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Discours de Benoît XVI aux professeurs universitaires (7 juin)

11 juin, 2008

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http://www.zenit.org/article-18171?l=french

 

 

Discours de Benoît XVI aux professeurs universitaires (7 juin)

 

 ROME, Lundi 9 juin 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a prononcé en recevant, samedi 7 juin, les participants au VIe Symposium européen des professeurs universitaires, qui a eu lieu à l’Université pontificale du Latran. 

Monsieur le cardinal, 

Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce 

Chers professeurs, 

C’est pour moi un motif de grande joie de vous rencontrer à l’occasion du VIe Symposium européen des professeurs universitaires sur le thème : « Elargir les horizons de la rationalité. Perspectives pour la philosophie », promu par des professeurs des universités de Rome et organisé par le bureau pour la pastorale universitaire du vicariat de Rome en collaboration avec les institutions régionales, provinciales et de la mairie de Rome. Je remercie Monsieur le cardinal Camillo Ruini et M. le Professeur Cesare Mirabelli, qui se sont faits les interprètes de vos sentiments, et j’adresse à toutes les personnes présentes ma cordiale bienvenue. 

Dans la continuité de la rencontre européenne des professeurs universitaires de l’année dernière, votre symposium aborde un sujet d’une grande importance académique et culturelle. Je souhaite exprimer ma reconnaissance au comité organisateur pour ce choix qui nous permet, entre autre, de célébrer le dixième anniversaire de la publication de la Lettre encyclique Fides et ratio de mon bien-aimé prédécesseur, le Pape Jean-Paul II. A cette occasion déjà, cinquante professeurs de philosophie des universités de Rome, publiques et pontificales, manifestèrent leur reconnaissance au Pape par une déclaration dans laquelle était répétée l’urgence de la relance des études de philosophie dans les universités et dans les écoles. Partageant cette préoccupation et encourageant la collaboration fructueuse entre les professeurs de différentes universités, romaines et européennes, je souhaite adresser aux professeurs de philosophie une invitation particulière à poursuivre avec confiance la recherche philosophique en investissant leurs énergies intellectuelles et en impliquant les nouvelles générations dans cette tâche. 

Les événements qui se sont succédé au cours des dix années qui ont suivi la publication de l’Encyclique ont fortement mis en évidence le scénario historique et culturel dans lequel la recherche philosophique est appelée à avancer. En effet, la crise de la modernité n’est pas synonyme de déclin de la philosophie ; la philosophie doit même s’engager dans un nouvel itinéraire de recherche pour comprendre la vraie nature de cette crise (cf. Discours aux participants à la rencontre européenne des professeurs d’université du 23 juin 2007) et identifier des perspectives nouvelles vers lesquelles s’orienter. La modernité, si elle est bien comprise, révèle une « question anthropologique » qui se présente de manière beaucoup plus complexe et articulée que dans les réflexions philosophiques des siècles derniers, surtout en Europe. Sans réduire les tentatives déjà faites, il reste encore beaucoup de recherche à faire et beaucoup de choses à comprendre. La modernité n’est pas un simple phénomène culturel, daté historiquement ; elle implique en réalité une nouvelle perspective d’avenir, une compréhension plus exacte de la nature humaine. Il n’est pas difficile de tirer des écrits de penseurs contemporains remarquables une réflexion honnête sur les difficultés qui s’opposent à la résolution de cette crise prolongée. Le crédit que certains auteurs accordent à certaines religions et, en particulier, au christianisme, est un signe évident du désir sincère de faire sortir la réflexion philosophique de son autosuffisance. 

Depuis le début de mon pontificat, j’ai écouté avec attention les demandes qui m’arrivent d’hommes et de femmes de notre époque et, à la lumière de ces attentes, j’ai voulu offrir une proposition de recherche qui, me semble-t-il, peut susciter de l’intérêt pour la relance de la philosophie et de son rôle irremplaçable au sein du monde académique et culturel. Vous en avez fait un objet de réflexion de votre symposium : c’est la proposition d’« élargir les horizons de la rationalité ». Cela me permet de m’arrêter sur cette proposition avec vous, comme entre des amis qui désirent poursuivre un itinéraire de recherche commun. Je voudrais partir d’une conviction profonde, que j’ai souvent exprimée : « La foi chrétienne a fait un choix clair : contre les dieux de la religion pour le Dieu des philosophes, ce qui revient à dire contre le mythe de la seule tradition pour la vérité de l’être » (J. Ratzinger, Introduction au christianisme, ch.3). Cette affirmation, qui reflète le parcours du christianisme depuis ses premières lueurs, se révèle pleinement actuelle dans le contexte historique et culturel que nous vivons. Ce n’est, en effet, qu’à partir de cette prémisse, qui est en même temps historique et théologique, qu’il est possible de répondre aux nouvelles attentes de la réflexion philosophique. Le risque que la religion, y compris la religion chrétienne, soit instrumentalisée comme phénomène subreptice est très présent, même aujourd’hui. 

Mais le christianisme, comme je l’ai rappelé dans l’Encyclique Spe salvi n’est pas seulement un message informatif, mais un message performatif (cf. n. 2). Cela signifie que depuis toujours la foi chrétienne ne peut pas être renfermée dans le monde abstrait des théories, mais doit s’inscrire dans une expérience historique concrète qui atteint l’homme dans la vérité la plus profonde de son existence. Cette expérience conditionnée par les nouvelles situations culturelles et idéologiques, est le lieu que la recherche théologique doit analyser et à propos duquel il est urgent de nouer un dialogue fécond avec la philosophie. Si, d’un côté, la compréhension du christianisme comme transformation réelle de l’existence de l’homme, pousse la réflexion philosophique à faire une nouvelle approche de la religion, de l’autre, elle l’encourage à ne jamais perdre la confiance de pouvoir connaître la réalité. La proposition d’« élargir les horizons de la rationalité » ne doit donc pas simplement être envisagée comme une nouvelle orientation de la pensée théologique et philosophique, mais comme la requête d’une nouvelle ouverture à l’égard de la réalité à laquelle la personne humaine est appelée dans son uni-totalité, en dépassant les anciens préjugés et les simplifications, pour s’ouvrir ainsi également la route vers une véritable compréhension de la modernité. Le désir d’une plénitude d’humanité ne peut pas être déçu : il attend des réponses adaptées. La foi chrétienne est appelée à prendre en charge cette urgence historique, en impliquant tous les hommes de bonne volonté dans une entreprise semblable. Le nouveau dialogue entre foi et raison, requis aujourd’hui, ne peut pas avoir lieu dans les termes et de la manière dont il a eu lieu par le passé. S’il ne veut pas se réduire à un exercice intellectuel stérile, il doit partir de la situation concrète de l’homme, et il doit développer à partir de cette situation une réflexion qui en recueille la vérité ontologique et métaphysique. 

Chers amis, vous avez devant vous un chemin très exigeant. Il est tout d’abord nécessaire de promouvoir des centres universitaires de haut niveau, où la philosophie puisse dialoguer avec les autres disciplines, en particulier avec la théologie en favorisant de nouvelles synthèses culturelles adaptées pour orienter le chemin de la société. La dimension européenne de votre réunion à Rome, – vous provenez en effet de 26 pays – peut favoriser une confrontation et un échange assurément fructueux. Je suis certain que les institutions académiques catholiques seront disponibles pour la réalisation de véritables laboratoires culturels. Je souhaite également vous inviter à encourager les jeunes à s’engager dans les études philosophiques, en favorisant des initiatives d’orientation opportunes. Je suis assuré que les nouvelles générations, avec leur enthousiasme, sauront répondre avec générosité aux attentes de l’Eglise et de la société

Dans quelques jours, j’aurai la joie d’inaugurer l’Année Saint-Paul, durant laquelle nous célébrerons l’Apôtre des Nations : je souhaite que cette singulière initiative constitue pour vous tous une occasion propice pour redécouvrir, sur les traces du grand Apôtre, la fécondité historique de l’Evangile et ses extraordinaires potentialités également pour la culture contemporaine. Avec ce souhait, je vous donne à tous ma Bénédiction. 

Angélus du dimanche 8 juin

9 juin, 2008

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Angélus du dimanche 8 juin

Texte intégral

ROME, Dimanche 8 juin 2008 (ZENIT.org

) – Nous publions ci-dessous le texte de la méditation que le pape Benoît XVI a prononcée avant la prière de l’Angélus ce dimanche, en présence de plusieurs milliers de pèlerins rassemblés place Saint-Pierre.

AVANT L’ANGELUS

Chers frères et sœurs,

Au centre de la liturgie de la Parole de ce dimanche se trouve une expression du prophète Osée que Jésus reprend dans l’Evangile : « C’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes » (Os 6, 6). Il s’agit d’une parole-clé, l’une de celles qui nous introduisent au cœur de l’Ecriture sainte. Le contexte dans lequel Jésus la fait sienne est celui de la vocation de Matthieu, « publicain » de profession, c’est-à-dire collecteur d’impôts pour le compte de l’autorité impériale romaine : il était pour cette raison considéré un pécheur public par les juifs. L’ayant appelé précisément alors qu’il était assis au bureau des impôts – une célèbre peinture du Caravage illustre bien cette scène -, Jésus se rendit chez lui avec les disciples et se mit à table avec d’autres publicains. Voici ce qu’il répondit aux pharisiens scandalisés : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades… Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs » (Mt 9, 12-13). Toujours attentif au lien entre l’Ancien et le Nouveau Testament, l’évangéliste Matthieu met alors dans la bouche de Jésus la prophétie d’Osée : « Allez apprendre ce que veut dire cette parole : C’est la miséricorde que je désire, et non les sacrifices ».Cette expression du proph

ète est tellement importante que le Seigneur la cite à nouveau dans un autre contexte, à propos de l’observance du sabbat (cf. Mt 12, 1-8). Dans ce cas également Il prend la responsabilité de l’interprétation du précepte, se révélant comme le « Seigneur » des institutions légales. S’adressant aux pharisiens il ajoute : « Si vous aviez compris ce que signifie : C’est la miséricorde que je veux, et non le sacrifice, vous n’auriez pas condamné des gens qui sont sans faute » (Mt 12, 7). Donc, dans cet oracle d’Osée, Jésus, Verbe fait homme, s’est d’une certaine manière « retrouvé » pleinement ; il l’a fait vraiment de tout son cœur et l’a réalisé par son comportement, au risque même de heurter la susceptibilité des chefs de son peuple. Cette parole de Dieu nous est parvenue, à travers les Evangiles, comme une des synthèses de tout le message chrétien : la vraie religion consiste dans l’amour de Dieu et du prochain. Voilà ce qui donne de la valeur au culte et à la pratique des préceptes.

En nous tournant maintenant vers la Vierge Marie demandons, par son intercession, de toujours vivre dans la joie de l’expérience chrétienne. Que la Vierge Marie, Mère de Miséricorde, suscite en nous des sentiments d’abandon filial envers Dieu, qui est miséricorde infinie ; qu’elle nous aide à faire nôtre la prière que saint Augustin formule dans un célèbre passage de ses « Confessions » : « Aie pitié de moi, Seigneur ! Voilà, je ne cache pas mes blessures : tu es le médecin, moi le malade ; tu es miséricordieux, moi misérable… Je place toute mon espérance dans ta grande miséricorde » (X, 28.39 ; 29.40).

APRES L’ANGELUS

Après la prière de l’Angélus le pape a salué les pèlerins en différentes langues. Voici ce qu’il a dit en français :

Chers pèlerins francophones, je vous salue cordialement. L’Évangile du jour nous montre le visage d’amour et de miséricorde de Jésus, qui mange avec les publicains et les pécheurs. Puissiez-vous découvrir ce visage du Seigneur pour vous, notamment dans les Sacrements du Pardon et de l’Eucharistie, et devenir autour de vous des témoins de l’amour de Dieu pour toute l’humanité. Avec ma Bénédiction apostolique.

Et en polonais :

Je salue cordialement tous les Polonais. J’adresse aujourd’hui une prière spéciale pour les mineurs qui ont perdu la vie mercredi dernier dans la catastrophe de la mine Borynia. Je demande pour eux la grâce du repos éternel, le réconfort spirituel pour leur famille et une prompte guérison pour les blessés. Que Dieu miséricordieux nous préserve de la mort brutale. Qu’il vous protège, vous guide et vous bénisse

Indulgences spéciales pour l’Année Saint-Paul

9 juin, 2008

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Indulgences spéciales pour l’Année Saint-Paul

Texte du décret

ROME, Jeudi 5 juin 2008 (ZENIT.org)

 Nous publions ci-dessous le texte du décret signé par le Grand pénitencier de la pénitencerie apostolique concernant les indulgences spéciales qui seront accordées à l’occasion des deux mille ans de la naissance de l’apôtre Paul.

PENITENCERIE APOSTOLIQUE

URBIS ET ORBIS

A l’occasion des deux mille ans de la naissance du saint apôtre Paul, des indulgences spéciales sont accordées.

A l’approche de la solennité liturgique des Princes des apôtres, le Souverain Pontife, mû par une sollicitude pastorale, tient à pourvoir en temps utile aux trésors spirituels à accorder aux fidèles pour leur sanctification, de manière à ce qu’ils puissent renouveler et renforcer, avec une ferveur encore plus grande en cette pieuse et heureuse occasion, des intentions de salut surnaturel déjà à partir des premières vêpres de la solennité commémorée, principalement en l’honneur de l’Apôtre des Nations, dont s’approchent à présent les deux mille ans de la naissance terrestre.

En effet, le don des Indulgences, que le Pontife Romain offre à l’Eglise universelle, ouvre la voie pour parvenir au plus haut degré à la purification intérieure qui, alors qu’elle rend hommage au bienheureux apôtre Paul, exalte la vie surnaturelle dans le cœur des fidèles et les incite avec douceur à porter des fruits de bonnes œuvres.

C’est pourquoi cette Pénitencerie apostolique, à laquelle le Saint-Père a confié la tâche de préparer et rédiger le Décret sur la distribution et l’obtention des Indulgences qui seront valables pendant toute la durée de l’Année paulinienne, avec le présent Décret, émis conformément à la volonté de l’Auguste Pontife, accorde avec bienveillance les grâces qui sont citées ci-dessous:

I. A tous les fidèles chrétiens et à chacun d’eux véritablement repentis, purifiés comme il se doit par le Sacrement de la Confession et nourris par la Sainte Communion, qui visiteront pieusement sous forme de pèlerinage la Basilique papale Saint-Paul sur la via Ostiense et prieront selon les intentions du Souverain Pontife, est accordée et donnée l’Indulgence plénière de la peine temporelle pour leurs péchés, une fois obtenu la rémission sacramentelle de ceux-ci et le pardon de leurs manquements.

L’Indulgence plénière pourra être utilisée par les fidèles chrétiens soit pour eux-mêmes, soit pour les défunts, autant de fois que seront accomplies les œuvres prescrites; étant toutefois établie la norme selon laquelle on ne peut obtenir l’Indulgence plénière qu’une fois par jour.

Ensuite, afin que les prières qui sont élevées au cours de ces saintes visites conduisent et invitent plus intensément les âmes des fidèles à la vénération de saint Paul, il est établi et disposé ce qui suit: les fidèles, outre à élever leurs supplications devant l’autel du Très Saint Sacrement, chacun selon sa piété, devront se rendre à l’autel de la Confession et réciter avec dévotion le «Notre Père» et le «Credo», en ajoutant de pieuses invocations en l’honneur de la Bienheureuses Vierge Marie et de saint Paul. Et cette dévotion doit toujours être étroitement unie à la mémoire du Prince des Apôtres, saint Pierre.

II. Les fidèles chrétiens des diverses Eglises locales, ayant accompli les conditions habituelles (Confession sacramentelle, Communion eucharistique et prière selon les intentions du Souverain Pontife), avec le désir de rejeter tout péché, pourront obtenir l’Indulgence plénière s’ils participent pieusement à une sainte fonction ou à un pieux exercice publiquement accomplis en l’honneur de l’apôtre des Nations: les jours de l’ouverture et de la clôture solennelle de l’Année paulinienne, dans tous les lieux sacrés; en d’autres jours déterminés par l’Evêque du lieu; dans les lieux saints consacrés à saint Paul et, pour l’utilité des fidèles, en d’autres lieux désignés par l’Evêque lui-même.

III. Enfin, les fidèles empêchés par des maladies ou d’autres graves causes légitimes, toujours avec l’âme détachée de tout péché et avec l’intention de remplir les conditions habituelles à peine cela sera possible, pourront eux aussi obtenir l’Indulgence plénière, s’ils s’unissent spirituellement à une célébration jubilaire en l’honneur de saint Paul, en offrant à Dieu leurs prières et leurs souffrances pour l’unité des chrétiens.

Ensuite, afin que les fidèles puissent plus facilement recevoir ces faveurs célestes, que les prêtres, approuvés pour l’écoute des confessions par les autorités ecclésiastiques compétentes, soient prêts à les accueillir avec disponibilité et générosité

.Le Décret présent est valable uniquement pendant l’Année paulinienne. Nonobstant toutes choses contraires.

Donné à Rome, du siège de la Pénitencerie apostolique, le 10 mai, année de l’incarnation du Seigneur 2008, veille de la Pentecôte.

James Francis Card. STAFFORD

Grand Pénitencier

S.Exc. Mgr Gianfranco GIROTTI,

o.f.m. conv.

Pape Grégoire le Grand, Audience générale du mercredi 4 juin

5 juin, 2008

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Audience générale du mercredi 4 juin

Texte intégral

ROME, Mercredi 4 juin 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a donnée au cours de l’audience générale, ce mercredi, place Saint-Pierre.

Chers frères et sœurs,Je reviendrai aujourd’hui,

à l’occasion de notre rencontre du mercredi, sur la figure extraordinaire du Pape Grégoire le Grand, pour tirer quelques lumières supplémentaires de la richesse de son enseignement. Malgré les multiples engagements liés à sa fonction d’évêque de Rome, il nous a laissé de nombreuses œuvres, dans lesquelles l’Eglise a puisé à pleines mains au cours des siècles suivants. Outre ses nombreuses lettres – le Registre que j’ai mentionné dans la dernière catéchèse contient plus de 800 lettres – il nous a surtout laissé des écrits de caractère exégétique, parmi lesquels se distinguent le « Commentaire moral à Job » – célèbre sous son titre latin de Moralia in Iob -, les « Homélies sur Ezéchiel » et les « Homélies sur les Evangiles ». Il y a aussi une importante œuvre de caractère hagiographique, les « Dialogues », écrite par Grégoire pour l’édification de la reine lombarde Théodelinde. L’œuvre principale et la plus célèbre est sans aucun doute la « Règle pastorale », que la Pape rédigea au début de son pontificat dans le but précis de présenter un programme.

En passant rapidement ces œuvres en revue, nous devons tout d’abord noter que, dans ses écrits, Grégoire ne se montre jamais préoccupé de tracer une doctrine qui soit « la sienne », qui soit originale. Il entend plutôt se faire l’écho de l’enseignement traditionnel de l’Eglise, il veut simplement être la bouche du Christ et de son Eglise, sur le chemin qu’il faut parcourir pour arriver à Dieu. Ses commentaires exégétiques sont exemplaires à ce propos. Il fut un lecteur passionné de la Bible qu’il aborda avec des intentions qui n’étaient pas simplement spéculatives : il pensait que le chrétien ne devait pas tellement tirer des connaissances théoriques de l’Ecriture Sainte, mais plutôt la nourriture quotidienne pour son âme, sa vie d’homme dans ce monde. Dans ses « Homélies sur Ezéchiel », par exemple, il insiste fortement sur cette fonction du texte sacré : aborder l’Ecriture uniquement pour satisfaire son propre désir de connaissance signifie céder à la tentation de l’orgueil et s’exposer ainsi au risque de glisser dans l’hérésie. L’humilité intellectuelle est la première règle pour celui qui cherche à pénétrer les réalités surnaturelles en partant du livre sacré. L’humilité n’exclut pas du tout, bien sûr, l’étude sérieuse ; mais si l’on veut que celle-ci soit bénéfique sur le plan spirituel, en permettant d’entrer réellement dans la profondeur du texte, l’humilité demeure indispensable. Ce n’est qu’avec cette attitude intérieure que l’on écoute réellement et que l’on perçoit enfin la voix de Dieu. D’autre part, lorsqu’il s’agit de la Parole de Dieu, comprendre n’est rien, si la compréhension ne conduit pas à l’action. Dans ces « Homélies sur Ezéchiel » on trouve également cette belle expression selon laquelle « le prédicateur doit tremper sa plume dans le sang de son cœur ; il pourra ainsi arriver également jusqu’à l’oreille de son prochain ». En lisant ses homélies on voit que Grégoire a réellement écrit avec le sang de son cœur et c’est pourquoi il nous parle encore aujourd’hui.Gr

égoire développe également ce discours dans le « Commentaire moral à Job ». En suivant la tradition patristique, il examine le texte sacré dans les trois dimensions de son sens : la dimension littérale, la dimension allégorique et la dimension morale, qui sont des dimensions du sens unique de l’Ecriture Sainte. Grégoire attribue toutefois une nette priorité au sens moral. Dans cette perspective, il propose sa pensée à travers plusieurs binômes significatifs – savoir-faire, parler-vivre, connaître-agir – dans lesquels il évoque deux aspects de la vie humaine qui devraient être complémentaires, mais qui finissent souvent par être antithétiques. L’idéal moral, commente-t-il, consiste toujours à réaliser une intégration harmonieuse entre la parole et l’action, la pensée et l’engagement, la prière et le dévouement aux devoirs de son propre état : telle est la route pour réaliser cette synthèse grâce à laquelle le divin descend dans l’homme et l’homme s’élève jusqu’à l’identification avec Dieu. Le grand Pape trace ainsi pour le croyant authentique un projet complet de vie ; c’est pourquoi le « Commentaire moral à Job » constituera au cours du Moyen-âge une sorte de Summa de la morale chrétienne.

Les « Homélies sur les Evangiles » sont également d’une grande importance et d’une grande beauté. La première d’entre elles fut tenue dans la basilique Saint-Pierre au cours du temps de l’Avent de 590 et donc quelques mois après son élection au pontificat ; la dernière fut prononcée dans la basilique Saint-Laurent, lors du deuxième dimanche de Pentecôte de 593. Le Pape prêchait au peuple dans les églises où l’on célébrait les « stations » – des cérémonies de prière particulières pendant les temps forts de l’année liturgique – ou les fêtes des martyrs titulaires. Le principe inspirateur, qui lie les diverses interventions, peut être synthétisé par le terme praedicator : non seulement le ministre de Dieu, mais également chaque chrétien, a la tâche de devenir le « prédicateur » de ce dont il a fait l’expérience en lui-même, à l’exemple du Christ qui s’est fait homme pour apporter à tous l’annonce du salut. L’horizon de cet engagement est l’horizon eschatologique : l’attente de l’accomplissement en Christ de toutes les choses est une pensée constante du grand Pontife et finit par devenir un motif inspirateur de chacune de ses pensées et de ses activités. C’est de là que naissent ses rappels incessants à la vigilance et à l’engagement dans les bonnes œuvres.Le texte peut-

être le plus organique de Grégoire le Grand est la Règle pastorale, écrite au cours des premières années de pontificat. Dans celle-ci, Grégoire se propose de tracer la figure de l’évêque idéal, maître et guide de son troupeau. Dans ce but, il illustre la gravité de la charge de pasteur de l’Eglise et les devoirs qu’elle comporte : c’est pourquoi, ceux qui n’ont pas été appelés à cette tâche ne doivent pas la rechercher avec superficialité, et ceux qui en revanche l’ont assumée sans la réflexion nécessaire doivent sentir naître dans leur âme une juste inquiétude. Reprenant un thème privilégié, il affirme que l’évêque est tout d’abord le « prédicateur » par excellence ; comme tel il doit être, en premier lieu, un exemple pour les autres, de manière à ce que son comportement puisse constituer un point de référence pour tous. Une action pastorale efficace demande ensuite qu’il connaisse ses destinataires et qu’il adapte ses interventions à la situation de chacun : Grégoire s’arrête pour illustrer les différentes catégories de fidèles avec des annotations judicieuses et précises, qui peuvent justifier l’évaluation de ceux qui ont également vu dans cette œuvre un traité de psychologie. On comprend à partir de cela qu’il connaissait réellement son troupeau et parlait de tout avec les personnes de son temps et de sa ville.

Ce grand Pape insiste cependant sur le devoir que le pasteur a de reconnaître chaque jour sa propre misère, de manière à ce que l’orgueil ne rende pas vain, devant les yeux du Juge suprême, le bien accompli. C’est pourquoi le chapitre final de la Règle est consacré à l’humilité : « lorsqu’on se complaît d’avoir atteint de nombreuses vertus, il est bon de réfléchir sur ses propres manquements et de s’humilier : au lieu de considérer le bien accompli, il faut considérer celui qu’on a négligé d’accomplir ». Toutes ces précieuses indications démontrent le très haut concept que saint Grégoire a du soin des âmes, qu’il définit ars artium, l’art des arts. La Règle connut un grand succès, au point que, chose plutôt rare, elle fut rapidement traduite en grec et en anglo-saxon.Son autre

œuvre, les « Dialogues », est également significative. Dans celle-ci, s’adressant à son ami et diacre Pierre, qui était convaincu que les mœurs étaient désormais tellement corrompues que la naissance de saints n’était plus possible comme par les époques passées, Grégoire démontre le contraire : la sainteté est toujours possible, même dans les temps difficiles. Il le prouve en racontant la vie de personnes contemporaines ou disparues depuis peu, que l’on pouvait tout à fait qualifier de saintes, même si elles n’avaient pas été canonisées. Le récit est accompagné par des réflexions théologiques et mystiques qui font du livre un texte hagiographique particulier, capable de fasciner des générations entières de lecteurs. La matière est tirée des traditions vivantes du peuple et a pour but d’édifier et de former, en attirant l’attention de celui qui lit sur une série de questions telles que le sens du miracle, l’interprétation de l’Ecriture, l’immortalité de l’âme, l’existence de l’enfer, la représentation de l’au-delà, des thèmes qui avaient besoin d’éclaircissements opportuns. Le livre II est entièrement consacré à la figure de Benoît de Nursie et est l’unique témoignage antique sur la vie du saint moine, dont la beauté spirituelle paraît dans ce texte avec une grande évidence.

Dans le dessein théologique que Grégoire développe dans ses œuvres, passé, présent et avenir sont relativisés. Ce qui compte le plus pour lui est le cours tout entier de l’histoire salvifique, qui continue à se dérouler dans les obscures méandres du temps. Dans cette perspective, il est significatif qu’il insère l’annonce de la conversion des Angles au beau milieu du « Commentaire moral à Job » : à ses yeux, l’événement constituait une avancée du royaume de Dieu dont parle l’Ecriture ; il pouvait donc à juste titre être mentionné dans le commentaire d’un livre sacré. Selon lui, les guides des communautés chrétiennes doivent sans cesse s’engager à relire les événements à la lumière de la parole de Dieu : c’est dans ce sens que le grand Pape ressent le devoir d’orienter les pasteurs et les fidèles sur l’itinéraire spirituel d’une lectio divina éclairée et concrète, inscrite dans le contexte de sa propre vie.

Avant de conclure, il est juste de dire un mot sur les relations que le Pape Grégoire entretint avec les patriarches d’Antioche, d’Alexandrie et de Constantinople elle-même. Il se soucia toujours d’en reconnaître et d’en respecter les droits, en se gardant de toute interférence qui en limitât l’autonomie légitime. Si toutefois saint Grégoire, dans le contexte de sa situation historique, s’opposa au titre d’« œcuménique » que voulait le Patriarche de Constantinople, il ne le fit pas pour limiter ou nier cette autorité légitime, mais parce qu’il était préoccupé par l’unité fraternelle de l’Eglise universelle. Il le fit surtout en raison de sa profonde conviction que l’humilité devrait être la vertu fondamentale de tout évêque, et plus encore d’un Patriarche. Grégoire était resté un simple moine dans son cœur, et c’est pourquoi il était absolument contraire aux grands titres. Il voulait être – telle est son expression – servus servorum Dei. Ce terme forgé par lui n’était pas dans sa bouche une formule pieuse, mais la manifestation véritable de son mode de vivre et d’agir. Il était intimement frappé par l’humilité de Dieu, qui en Christ s’est fait notre serviteur, qui a lavé et lave nos pieds sales. Par conséquent, il était convaincu que notamment un évêque devrait imiter cette humilité de Dieu et suivre ainsi le Christ. Son désir fut véritablement de vivre en moine, dans un entretien permanent avec la Parole de Dieu, mais par amour de Dieu il sut se faire le serviteur de tous à une époque pleine de troubles et de souffrances, se faire « serviteur des serviteurs ». C’est précisément parce qu’il le fut qu’il est grand et qu’il nous montre également la mesure de la vraie grandeur.

Discours de Benoît XVI pour la fin du mois de Marie au Vatican (31 mai)

3 juin, 2008

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Discours de Benoît XVI pour la fin du mois de Marie au Vatican (31 mai)

Texte intégral

ROME, Lundi 2 juin 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la méditation que le pape Benoît XVI a prononcée le 31 mai après la prière du chapelet dans la salle Paul VI, au terme de la procession aux flambeaux sur la place Saint-Pierre, marquant la clôture du mois de Marie.

Chers frères et sœurs,Nous concluons le mois de mai par cette suggestive rencontre de pri

ère mariale. Je vous salue avec affection et je vous remercie de votre participation. Je salue tout d’abord le cardinal Angelo Comastri ; avec lui je salue les autres cardinaux, archevêques, évêques et prêtres, qui ont participé à cette célébration vespérale. J’étends mon salut aux personnes consacrées et à vous tous, chers fidèles laïcs, qui par votre présence avez voulu rendre hommage à la Très Sainte Vierge.

Nous célébrons aujourd’hui la fête de la Visitation de la Bienheureuse Vierge Marie et la mémoire du Cœur immaculé de Marie. Tout nous invite donc à tourner notre regard avec confiance vers Marie. Ce soir, nous nous sommes à nouveau adressés à Elle avec l’ancienne et toujours actuelle pieuse pratique du chapelet. Le chapelet, lorsqu’il n’est pas une répétition mécanique de formules traditionnelles, est une méditation biblique qui nous fait reparcourir le événements de la vie du Seigneur en compagnie de la Bienheureuse Vierge Marie, en les conservant, comme Elle, dans notre cœur. Au cours du mois de mai, il existe dans de nombreuses communautés chrétiennes la belle habitude de réciter de manière plus solennelle le chapelet en famille et dans les paroisses. A présent, alors que le mois se termine, que cette bonne habitude ne cesse pas ; qu’elle se poursuive même avec un plus grand zèle, afin que, à l’école de Marie, la lampe de la foi brille toujours plus dans le cœur des chrétiens et dans leurs maisons. Aujourd’hui, en la f

ête de la Visitation, la liturgie nous fait entendre à nouveau le passage de l’Evangile de Luc, qui raconte le voyage de Marie de Nazareth vers la maison de sa cousine âgée Elisabeth. Imaginons-nous l’état d’âme de la Vierge après l’Annonciation, lorsque l’Ange partit de chez elle. Marie se retrouva avec un grand mystère enfermé dans son sein ; elle savait que quelque chose d’unique et extraordinaire avait eu lieu ; elle se rendait compte qu’avait commencé le dernier chapitre de l’histoire du salut du monde. Mais, autour d’elle, tout était resté comme avant et le village de Nazareth ignorait complètement ce qui lui était arrivé.

Avant de se préoccuper pour elle-même, Marie pense cependant à Elisabeth qui est âgée, après avoir su qu’elle allait bientôt accoucher, et poussée par le mystère d’amour qu’elle vient d’accueillir en elle, elle se met en chemin « en hâte » pour aller lui porter son aide. Voilà la grandeur simple et sublime de Marie ! Lorsqu’elle arrive chez Elisabeth, il se produit un fait qu’aucun peintre ne pourra jamais rendre dans la beauté et la profondeur de sa réalisation. La lumière intérieure de l’Esprit Saint enveloppe leurs personnes. Et Elisabeth, illuminée d’en-Haut, s’exclame : « Tu es bénie entre toute les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Car, lorsque j’ai entendu tes paroles de salutation, l’enfant a tressailli d’allégresse au-dedans de moi. Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur » (Lc 1, 42-45).Ces paroles pourraient nous appara

ître disproportionnées par rapport au contexte réel. Elisabeth est l’une des nombreuses femmes âgées d’Israël et Marie une jeune fille inconnue d’un village perdu de la Galilée. Que peuvent-elles être et que peuvent-elles faire dans un monde où comptent d’autres personnes et pèsent d’autres pouvoirs ? Mais Marie nous étonne encore une fois ; son cœur est transparent, totalement ouvert à la lumière de Dieu ; son âme est sans péché, elle n’est pas alourdie par l’orgueil et l’égoïsme. Les paroles d’Elisabeth font naître dans son esprit un cantique de louange, qui est une lecture « théologique » de l’histoire authentique et profonde : une lecture que nous devons sans cesse apprendre de Celle dont la foi est sans ombres ni faille. « Mon âme magnifie le Seigneur ». Marie reconnaît la grandeur de Dieu. Tel est le premier et indispensable sentiment de foi ; le sentiment qui donne sa sécurité à la créature humaine et la libère de la peur, même si elle se trouve au milieu des tempêtes de l’histoire.

Allant au-delà de la surface, Marie « voit » avec les yeux de la foi l’œuvre de Dieu dans l’histoire. C’est pourquoi elle est bienheureuse, car elle a cru : en effet, c’est à cause de sa foi qu’elle a accueilli la Parole du Seigneur et a conçu le Verbe incarné. Sa foi lui a fait voir que les trônes des puissants de ce monde sont tous provisoires, alors que le trône de Dieu est l’unique roc qui ne change pas et qui ne tombe pas. Et son Magnificat, après plusieurs siècles et plusieurs millénaires, reste l’interprétation la plus véritable et profonde de l’histoire, alors que les lectures faites par de si nombreux sages de ce monde ont été démenties par les faits au cours des siècles.

Chers frères et sœurs ! Revenons chez nous avec le Magnificat dans notre cœur. Portons en nous les mêmes sentiments de louange et d’action de grâce que Marie envers le Seigneur, sa foi et son espérance, son abandon docile entre les mains de la divine Providence. Imitons son exemple de disponibilité et de générosité à servir nos frères. En effet, ce n’est qu’en accueillant l’amour de Dieu et en faisant de notre existence un service désintéressé et généreux envers notre prochain, que nous pourrons élever avec joie un chant de louange au Seigneur. Que la Vierge qui nous invite ce soir à trouver refuge dans son Cœur Immaculé nous obtienne cette grâce. Je donne à tous ma Bénédiction.

Audience du mercredi 28 mai: Pape saint Grégoire

29 mai, 2008

du site:

http://www.zenit.org/article-18080?l=french

Audience du mercredi 28 mai

Texte intégral

ROME, Mercredi 28 mai 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de l’audience générale, ce mercredi, place Saint-Pierre.

Chers frères et sœurs,Mercredi dernier j’ai parlé d’un Père de l’Eglise peu connu en Occident, Romanos le Mélode, je voudrais aujourd’hui présenter la figure de l’un des plus grands Pères dans l’histoire de l’Eglise, un des quatre docteurs de l’Occident, le Pape saint Grégoire, qui fut évêque de Rome entre 590 et 604, et auquel la tradition attribua le titre de Magnus/Grand. Grégoire fut vraiment un grand Pape et un grand Docteur de l’Eglise ! Il naquit à Rome vers 540, dans une riche famille patricienne de la gens Anicia, qui se distinguait non seulement par la noblesse de son sang, mais également par son attachement à la foi chrétienne et par les services rendus au Siège apostolique. Deux Papes étaient issus de cette famille : Félix III (483-492), trisaïeul de Grégoire et Agapit (535-536). La maison dans laquelle Grégoire grandit s’élevait sur le Clivus Scauri, entourée par des édifices solennels qui témoignaient de la grandeur de la Rome antique et de la force spirituelle du christianisme. Des sentiments chrétiens élevés lui furent aussi inspirés par ses parents, Gordien et Silvia, tous deux vénérés comme des saints, et par deux tantes paternelles, Emiliana et Tarsilia, qui vécurent dans leur maison en tant que vierges consacrées sur un chemin partagé de prière et d’ascèse.

Grégoire entra très tôt dans la carrière administrative, que son père avait également suivie et, en 572, il en atteint le sommet, devenant préfet de la ville. Cette fonction, compliquée par la difficulté des temps, lui permit de se consacrer à large échelle à chaque type de problèmes administratifs, en en tirant des lumières pour ses futures tâches. Il lui resta en particulier un profond sens de l’ordre et de la discipline : devenu Pape, il suggérera aux évêques de prendre pour modèle dans la gestion des affaires ecclésiastiques la diligence et le respect des lois propres aux fonctionnaires civils. Toutefois, cette vie ne devait pas le satisfaire car, peu après, il décida de quitter toute charge civile, pour se retirer dans sa maison et commencer une vie de moine, transformant la maison de famille en monastère, le monastère Saint André au Celio. De cette période de vie monastique, vie de dialogue permanent avec le Seigneur dans l’écoute de sa parole, il lui restera toujours la nostalgie, qui apparaît toujours à nouveau et toujours davantage dans ses homélies : face aux assauts des préoccupations pastorales, il la rappellera plusieurs fois dans ses écrits comme un temps heureux de recueillement en Dieu, de consécration à la prière, d’immersion sereine dans l’étude. Il put ainsi acquérir cette profonde connaissance de l’Ecriture Sainte et des Pères de l’Eglise dont il se servit ensuite dans ses œuvres.Mais la retraite dans la clôture de Grégoire ne dura pas longtemps. La précieuse expérience mûrie dans l’administration civile à une époque chargée de graves problèmes, les relations entretenues dans cette charge avec les byzantins, l’estime universelle qu’il avait acquise, poussèrent le Pape Pélage à le nommer diacre et à l’envoyer à Constantinople comme son « apocrisaire », on dirait aujourd’hui « Nonce apostolique », pour permettre de surmonter les dernières séquelles de la controverse monophysite et, surtout, pour obtenir l’appui de l’empereur dans son effort pour contenir la poussée lombarde. Son séjour à Constantinople, où avec un groupe de moines il avait repris la vie monastique, fut très important pour Grégoire, car il lui donna l’occasion d’acquérir une expérience directe du monde byzantin, ainsi que d’aborder la question des Lombards, qui aurait ensuite mis à rude épreuve son habileté et son énergie au cours de ses années de pontificat. Après quelques années, il fut rappelé à Rome par le Pape, qui le nomma son secrétaire. Il s’agissait d’années difficiles : les pluies incessantes, le débordement des fleuves, la famine qui frappait de nombreuses zones d’Italie et Rome elle-même. A la fin, la peste éclata également, faisant de nombreuses victimes, parmi lesquelles le Pape Pélage II. Le clergé, le peuple et le sénat furent unanimes en choisissant précisément Grégoire pour être son Successeur sur le Siège de Pierre. Il chercha à résister, tentant également la fuite, mais il n’y eut rien à faire : à la fin il dut céder. C’était l’année 590.

Reconnaissant la volonté de Dieu dans ce qui était arrivé, le nouveau Pontife se mit immédiatement au travail avec zèle. Dès le début, il révéla une vision particulièrement clairvoyante de la réalité avec laquelle il devait se mesurer, une extraordinaire capacité de travail pour affronter les affaires ecclésiastiques et civiles, un équilibre constant dans les décisions, parfois courageuses, que sa charge lui imposait. On possède une vaste documentation sur son gouvernement grâce au Registre de ses lettres (environ 800), dans lesquelles se reflète la confrontation quotidienne avec les problèmes complexes qui affluaient sur sa table. Il s’agissait de questions qui provenaient des évêques, des abbés, des clercs, et également des autorités civiles de tout ordre et degré. Parmi les problèmes qui affligeaient l’Italie et Rome à cette époque, il y en avait un d’une importance particulière dans le domaine civil et ecclésial : la question lombarde. Le Pape y consacra toutes les énergies possibles en vue d’une solution vraiment pacificatrice. A la différence de l’empereur byzantin qui partait du présupposé que les Lombards n’étaient que des individus grossiers et prédateurs à vaincre ou à exterminer, saint Grégoire voyait ces personnes avec les yeux du bon pasteur, préoccupé de leur annoncer la parole du salut, établissant avec eux des relations fraternelles en vue d’un avenir de paix fondé sur le respect réciproque et sur la coexistence sereine entre les Italiens, les Impériaux et les Lombards. Il se préoccupa de la conversion des jeunes peuples et de la nouvelle organisation civile de l’Europe : les Wisigoths d’Espagne, les Francs, les Saxons, les immigrés en Britannia et les Lombards furent les destinataires privilégiés de sa mission évangélisatrice. Nous avons célébré hier la mémoire liturgique de saint Augustin de Canterbury, le chef d’un groupe de moines chargés par Grégoire de se rendre en Britannia pour évangéliser l’Angleterre.Pour obtenir une paix effective

à Rome et en Italie, le Pape s’engagea à fond – c’était un véritable pacificateur -, entreprenant des négociations serrées avec le roi lombard Agilulf. Ces négociations conduisirent à une période de trêve qui dura environ trois ans (598-601), après lesquels il fut possible de stipuler, en 603, un armistice plus stable. Ce résultat positif fut rendu possible également grâce aux contacts parallèles que, entre temps, le Pape entretenait avec la reine Théodelinde, qui était une princesse bavaroise et qui, à la différence des chefs des autres peuples germaniques, était catholique, profondément catholique. On conserve une série de lettres du Pape Grégoire à cette reine, dans lesquelles il révèle son estime et son amitié pour elle. Théodelinde réussit peu à peu à guider le roi vers le catholicisme, préparant ainsi la voie à la paix. Le Pape se soucia également de lui envoyer les reliques pour la basilique Saint-Jean-Baptiste qu’elle fit ériger à Monza, et il ne manqua pas de lui faire parvenir ses vœux et des dons précieux à l’occasion de la naissance et du baptême de son fils Adaloald. L’histoire de cette reine constitue un beau témoignage à propos de l’importance des femmes dans l’histoire de l’Eglise. Au fond, les objectifs auxquels Grégoire aspira constamment furent au nombre de trois : contenir l’expansion des Lombards en Italie ; soustraire la reine Théodelinde à l’influence des schismatiques et renforcer sa foi catholique ; servir de médiateur entre les Lombards et les Byzantins en vue d’un accord pour garantir la paix dans la péninsule, en permettant dans le même temps d’accomplir une action évangélisatrice parmi les Lombards eux-mêmes. Son orientation constante dans cette situation complexe fut donc double : promouvoir des ententes sur le plan diplomatique et politique, diffuser l’annonce de la vraie foi parmi les populations.

A côté de son action purement spirituelle et pastorale, le Pape Grégoire fut également le protagoniste actif d’une activité sociale multiple. Avec les rentes de l’important patrimoine que le Siège romain possédait en Italie, en particulier en Sicile, il acheta et distribua du blé, il secourut ceux qui étaient dans le besoin, il aida les prêtres, les moines et les moniales qui vivaient dans l’indigence, il paya les rançons des citoyens devenus prisonniers des Lombards, il conclut des armistices et des trèves. En outre, il accomplit aussi bien à Rome que dans d’autres parties de l’Italie une œuvre soignée de réorganisation administrative, en donnant des instructions précises afin que les biens de l’Eglise, utiles à sa subsistance et à son œuvre évangélisatrice dans le monde, soient gérés avec une rectitude absolue et selon les règles de la justice et de la miséricorde. Il exigeait que les colons soient protégés des abus des concessionnaires des terres appartenant à l’Eglise et, en cas de fraude, qu’ils soient rapidement dédommagés, afin que le visage de l’Epouse du Christ ne soit pas défiguré par des profits malhonnêtes.

Cette intense activité fut accomplie par Grégoire malgré sa santé fragile, qui le poussait souvent à rester au lit pendant de longs jours. Les jeûnes pratiqués au cours des années de sa vie monastique lui avaient procuré de sérieux problèmes digestifs. En outre, sa voix était très faible, si bien qu’il était souvent obligé de confier au diacre la lecture de ses homélies, afin que les fidèles présents dans les basiliques romaines puissent l’entendre. Il faisait cependant tout son possible pour célébrer les jours de fête Missarum sollemnia, c’est-à-dire la Messe solennelle, et il rencontrait alors personnellement le peuple de Dieu, qui lui était très attaché, car il voyait en lui la référence autorisée où il pouvait puiser son assurance: ce n’est pas par hasard que lui fut très vite attribué le titre de Consul Dei. Malgré les conditions très difficiles dans lesquelles il dut œuvrer, il réussit à conquérir, grâce à sa sainteté de vie et à sa riche humanité, la confiance des fidèles, en obtenant, pour son époque et pour l’avenir, des résultats vraiment grandioses. C’était un homme plongé en Dieu : le désir de Dieu était toujours vivant au fond de son âme et c’est précisément pour cela qu’il était toujours très proche de son prochain, des besoins des personnes de son époque. A une époque désastreuse, et même désespérée, il sut établir la paix et donner l’espérance. Cet homme de Dieu nous montre où sont les véritables sources de la paix, d’où vient la véritable espérance et il devient ainsi un guide également pour nous aujourd’hui.

Puis le pape a proposé une synthèse de sa catéchèse, en français :

Chers Frères et Sœurs,

Je désire vous présenter la figure de saint Grégoire, qui fut Évêque de Rome de 590 à 604, portant le titre de grand. Grégoire fut vraiment un grand Pape et un grand Docteur de l’Église. Il est né dans une famille noble, qui se distingue surtout par son attachement à la foi chrétienne et son soutien au Siège Apostolique. À la suite de son père, il choisit la carrière administrative et devient préfet de Rome. Doué d’un sens profond de l’ordre et de la discipline, devenu Pape, il suggèrera aux Évêques de prendre modèle, pour la gestion des affaires ecclésiastiques, sur la société civile de son temps. Abandonnant toutes ses fonctions, il se retire dans sa demeure pour mener une vie monastique. Mais très vite, étant donné sa réputation, le Pape Pélage l’ordonne diacre et l’envoie en mission pour régler la crise monophysite et pour obtenir l’aide de l’Empereur contre les lombards. Son séjour lui permit de faire l’expérience du monachisme byzantin. Après quelques années, le Pape l’appela pour être son secrétaire. À sa suite, il fut élu Pape. Il régla courageusement de nombreux problèmes internes à l’Église, mais aussi de type politique et social, se comportant en fin négociateur. Il s’attacha à vivre saintement. Les fidèles avaient confiance en lui et il reçut le titre de Consul Dei. Il reste encore aujourd’hui un modèle qui fait l’admiration par sa personnalité, son exemple et la profondeur de son enseignement.Je suis heureux de vous accueillir chers pèlerins francophones, en particulier les jeunes du Canada et les prêtres de Bruges. En cette fin du mois de mai, je vous confie à la Vierge Marie, Mère de l’Église et notre Mère. Avec ma Bénédiction apostolique.

Pape Benoît: Solennité du « Corpus Domini », ou Fête Dieu

25 mai, 2008

du site:
http://www.zenit.org/article-18044?l=french

Dans l’Eucharistie, la « force de la révolution chrétienne », déclare Benoît XVI

Solennité du « Corpus Domini », ou Fête Dieu

ROME, Vendredi 23 mai 2008 (ZENIT.org) – Dans l’Eucharistie se trouve la « force de la révolution chrétienne », la « plus profonde de l’histoire humaine », qui donne à l’homme une « vraie liberté », déclare Benoît XVI.

Le pape a présidé jeudi soir en la basilique Saint-Jean du Latran la messe de la solennité du Saint-Sacrement ou « Fête Dieu », qui se fête dans beaucoup de pays (dont l’Italie et la France) dimanche prochain. Il a ensuite présidé la traditionnelle procession eucharistique jusqu’à Sainte-Marie Majeure (cf. Zenit du 13 mai 2008).

Benoît XVI a expliqué la force de l’Eucharistie à partir des trois attitudes suggérées par la célébration : se rassembler, pour l’Eucharistie, marcher, dans la procession, adorer, avant la bénédiction finale.

Le rassemblement dans le Christ

Le pape a souligné la dimension « publique » et non « ésotérique » de l’eucharistie : « L’Eucharistie, a-t-il dit, ne peut jamais être un simple fait privé, réservé à des personnes qui se sont choisies par affinité ou amitié. L’Eucharistie est un culte public, qui n’a rien d’ésotérique ou d’exclusif. Ici aussi ce soir, ce n’est pas nous qui avons choisi de nous rencontrer, nous sommes venus et nous nous retrouvons les uns à côté des autres, avec une foi commune, appelés à devenir un unique corps en partageant l’unique Pain qui est le Christ. Nous sommes unis au-delà de nos différences de nationalités, de profession, de milieu social, d’idées politiques : nous nous ouvrons les uns aux autres pour devenir une seule chose à partir de Lui ».

Le pape a donc recommandé aux catholiques que les « tentations récurrentes de particularisme, même de bonne foi, n’aillent pas en sens inverse ».

En revanche, il les a invités à marcher avec le Seigneur qui, disait-il, « nous libère de nos paralysies, nous fait nous relever » pour avancer.

Le Christ marche avec les chrétiens« L’Eucharistie, expliquait Benoît XVI, est le Sacrement du Dieu qui ne nous laisse pas seuls sur le chemin, mais se place à nos côtés, et nous indique la direction. En effet, il ne suffit pas d’avancer, il faut voir ce vers quoi l’on va ! Le « progrès » ne suffit pas, sans critères de référence. Et si l’on court en dehors du chemin, on risque de finir dans un précipice ou de toute façon de s’éloigner plus rapidement de l’objectif. Dieu nous a créés libres, mais il ne nous a pas laissés seuls : il s’est fait lui-même « chemin » et il est venu marcher avec nous, afin que notre liberté ait aussi le critère pour discerner le bon chemin ».

L’adoration, remède aux idolâtries« Adorer le Dieu de Jésus Christ, qui, par amour s’est fait pain rompu, soulignait ensuite le pape, est le remède le plus valide et radical contre les idolâtries d’hier et d’aujourd’hui. S’agenouiller devant l’Eucharistie est une profession de liberté : qui s’incline devant Jésus ne peut et ne doit pas se prosterner devant aucun autre pouvoir terrestre, si fort fût-il. Nous, chrétiens, nous ne nous agenouillons que devant le Saint-Sacrement, parce que nous savons et nous croyons qu’en lui l’unique vrai Dieu est présent, lui qui a créé le monde et l’a tant aimé qu’il lui a donné son Fils unique ».

« Nous nous prosternons devant un Dieu qui le premier s’est incliné vers l’homme comme un bon Samaritain, pour le secourir et lui redonner la vie », a insisté le pape.

« Adorer le Corps du Christ veut dire croire qu’en lui, dans ce morceau de pain, il y a réellement le Christ, qui donne un vrai sens à la vie, à l’immense univers et à la créature la plus petite, à toute l’histoire humaine comme à la plus brève existence. L’adoration est prière qui prolonge la célébration et la communion eucharistique et dans laquelle l’âme continue à se nourrir : à se nourrir d’amour, de vérité, de paix ; se nourrit d’espérance, parce que Celui devant lequel nous nous prosternons ne nous juge pas, ne nous écrase pas, mais nous libère et nous transforme ».

Anita S. Bourdin

PRIÈRE À NOTRE-DAME DE SHESHAN

23 mai, 2008

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2008/may/documents/hf_ben-xvi_spe_20080515_sheshan_fr.html

25 mai 2008

BENOÎT XVI

PRIÈRE À NOTRE-DAME DE SHESHAN

Vierge très sainte, Mère du Verbe incarné et notre Mère,
v
énérée dans le sanctuaire de Sheshan sous le vocable d’«Aide des Chrétiens»
,
toi vers qui toute l
’É
glise qui est en Chine regarde avec une profonde affection,
nous venons aujourd
hui devant toi pour implorer ta protection.
Tourne ton regard vers le peuple de Dieu et guide-le avec une sollicitude maternelle
sur les chemins de la v
érité et de lamour, afin qu
il soit en toute circonstance
un ferment de cohabitation harmonieuse entre tous les citoyens.

Par ton «oui» docile prononcé à Nazareth, tu as permis
au Fils
é
ternel de Dieu de prendre chair dans ton sein virginal
et d
engager ainsi dans lhistoire l’œuvre de la Ré
demption,
à laquelle tu as coopéré par la suite avec un dévouement empressé
,
acceptant que l
’épée de douleur transperce ton â
me,
jusqu
’à lheure suprê
me de la Croix, quand, sur le Calvaire, tu restas
debout aupr
ès de ton Fils, qui mourait pour que l
homme vive.Depuis lors, tu es devenue, de mani

ère nouvelle, Mère
de tous ceux qui accueillent dans la foi ton Fils J
é
sus
et qui acceptent de le suivre en prenant sa Croix sur leurs
é
paules.
M
ère de lespérance, qui, dans lobscurité
du Samedi-Saint,
avec une confiance in
ébranlable, est allée au devant du matin de Pâ
ques,
donne
à tes fils la capacité
de discerner en toute situation,
m
ême la plus obscure, les signes de la pré
sence aimante de Dieu.Notre-Dame de Sheshan, soutiens lengagement de tous ceux qui, en Chine,
au milieu des difficult
és quotidiennes, continuent à croire, à espérer, à
aimer,
afin qu
ils ne craignent jamais de parler de Jésus au monde et du monde à Jé
sus.
Dans la statue qui domine le Sanctuaire, tu
élè
ves ton Fils,
le pr
ésentant au monde avec les bras grands ouverts en un geste d
amour.
Aide les catholiques
à être toujours des témoins cré
dibles de cet amour,
les maintenant unis au roc qui est Pierre, sur lequel est construite l
’É
glise.
M
ère de la Chine et de lAsie, prie pour nous maintenant et toujours. Amen !

Audience du mercredi 21 mai – sur: Romanos le Mélode

22 mai, 2008

du site:

http://www.zenit.org/article-18016?l=french

Audience du mercredi 21 mai -  sur: Romanos le Mélode

Texte intégral

ROME, Mercredi 21 mai 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de l’audience générale, ce mercredi, dans la salle Paul VI.

Chers frères et sœurs,Dans la s

érie des catéchèses sur les Pères de l’Eglise, je voudrais aujourd’hui parler d’une figure peu connue : Romanos le Mélode, né vers 490 à Emesa (aujourd’hui Homs) en Syrie. Théologien, poète et compositeur, il appartient au grand groupe des théologiens qui ont transformé la théologie en poésie. Nous pensons à son compatriote saint Ephrém de Syrie, qui vécut deux cents ans avant lui. Mais nous pensons également à des théologiens de l’Occident, comme saint Ambroise, dont les hymnes font encore aujourd’hui partie de notre liturgie et touchent également notre cœur ; ou à un théologien, à un penseur d’une grande vigueur, comme saint Thomas, qui nous a donné les hymnes de la fête du Corpus Domini de demain ; nous pensons à saint Jean de la Croix et à tant d’autres. La foi est amour et c’est pourquoi elle crée de la poésie et elle crée de la musique. La foi est joie, c’est pourquoi elle crée de la beauté.

Ainsi, Romanos le Mélode est l’un de ceux-ci, un poète et compositeur théologien. Ayant appris les premiers éléments de la culture grecque et syriaque dans sa ville natale, il se transféra à Berito (Beyrouth), où il perfectionna son instruction classique et ses connaissances rhétoriques. Ordonné diacre permanent (v. 515), il y fut prédicateur pendant trois ans. Puis il se transféra à Constantinople vers la fin du règne d’Anasthase Ier (v. 518), et s’établit dans le monastère près de l’église de la Théotókos, Mère de Dieu. C’est là qu’eut lieu l’épisode clef de sa vie : le Synaxaire nous informe de l’apparition en rêve de la Mère de Dieu et du don du charisme poétique. En effet, Marie lui intima d’avaler une feuille roulée. Le lendemain matin – c’était la fête de la Nativité du Seigneur – Romanos alla déclamer à l’ambon : « Aujourd’hui la Vierge fait naître le Transcendant » (Hymne « Sur la Nativité » I. Préambule). Il devint ainsi prédicateur et chantre jusqu’à sa mort (après 555).Romanos demeure dans l’histoire comme l’un des auteurs les plus repr

ésentatifs d’hymnes liturgiques. L’homélie était alors, pour les fidèles, l’occasion pratiquement unique d’instruction catéchétique. Romanos apparaît ainsi comme le témoin éminent du sentiment religieux de son époque, mais également d’un style vivace et original de catéchèse. A travers ses compositions, nous pouvons nous rendre compte de la créativité de cette forme de catéchèse, de la créativité de la pensée théologique, de l’esthétique et de l’hymnographie sainte de ce temps. Le lieu où Romanos prêchait était un sanctuaire de la périphérie de Constantinople : il montait à l’ambon placé au centre de l’église et s’adressait à la communauté en ayant recours à une mise en scène demandant de grands moyens : il utilisait des représentations murales ou des icônes disposées sur l’ambon et il avait aussi recours au dialogue. Ses homélies étaient des homélies métriques chantées, appelées « contacio » (kontakia). Le terme « kontákion », « petite verge », paraît renvoyer au bâtonnet autour duquel on enroulait le rouleau d’un manuscrit liturgique ou d’un autre type. Les kontákia qui nous sont parvenus sous le nom de Romanos sont au nombre de quatre-vingt neuf, mais la tradition lui en attribue mille.

Chez Romanos, chaque kontákion

est composé de strophes, généralement de dix-huit à vingt-quatre, avec un nombre de syllabes égales, structurées sur le modèle de la première strophe (irmo) ; les accents rythmiques des versets de toutes les strophes se modèlent sur ceux de l’irmo. Chaque strophe se conclut par un refrain (efimnio) généralement identique, pour créer l’unité poétique. En outre, les initiales de chaque strophe indiquent le nom de l’auteur (acrostico), souvent précédé par l’adjectif « humble ». Une prière se référant aux faits célébrés ou évoqués conclut l’hymne. Une fois terminée la lecture biblique, Romanos chantait le Préambule, généralement sous forme de prière ou de supplique. Il annonçait ainsi le thème de l’homélie et expliquait le refrain à répéter en chœur à la fin de chaque strophe, qu’il déclamait de manière cadencée à haute voix.Un exemple significatif nous est offert par le

kontakion pour le Vendredi de la Passion : c’est un dialogue dramatique entre Marie et son Fils, qui se déroule sur le chemin de croix. Marie dit : « Où vas-tu, mon fils ? Pourquoi accomplis-tu si vite le cours de ta vie ? / Jamais je n’aurais cru, mon fils, te voir dans cet état, / et je n’aurais jamais imaginé que les impies seraient arrivés à ce point de fureur / levant les mains sur toi contre toute justice ». Jésus répond : « Pourquoi pleures-tu, ma mère ? [...]. Je ne devrais pas souffrir ? Je ne devrais pas mourir ? / Comment pourrais-je donc sauver Adam ? ». Le fils de Marie console sa mère, mais il la rappelle à son rôle dans l’histoire du salut : « Dépose, donc, mère, dépose ta douleur : / les gémissements ne te conviennent pas, car tu fus appelée « pleine de grâce » » (Marie au pied de la croix, 1-2 ; 4-5). Ensuite, dans l’hymne sur le sacrifice d’Abraham, Sara se réserve la décision sur la vie d’Isaac. Abraham dit : « Quand Sara écoutera, mon Seigneur, toutes tes paroles, / ayant connu ta volonté elle me dira : / – Si celui qui nous l’a donné le reprend, pourquoi nous l’a-t-il donné ? [...] – Toi, ô vieillard, mon fils, laisse-le moi, / et quand celui qui t’a appelé le voudra, il devra me le dire » (Le sacrifice d’Abraham, 7).

Romanos adopte non pas le grec byzantin solennel de la cour, mais un grec simple proche du langage du peuple. Je voudrais ici citer un exemple de sa manière vivace et très personnelle de parler du Seigneur Jésus : il l’appelle « source qui ne brûle pas et lumière contre les ténèbres » et dit : « Je brûle de te tenir dans la main comme une lampe ; / en effet, celui qui porte une lampe parmi les hommes est illuminé sans brûler. / Illumine-moi donc, Toi qui es la Lampe inextinguible » (La Présentation ou Fête de la rencontre, 8). La force de conviction de ses prédications était fondée sur la grande cohérence entre ses paroles et sa vie. Dans une prière, il dit : « Rends claire ma langue, mon Sauveur, ouvre ma bouche / et, après l’avoir remplie, transperce mon cœur, pour que mon action / soit cohérente avec mes paroles » (Mission des Apôtres, n. 2).Examinons

à présent certains de ses thèmes principaux. Un thème fondamental de sa prédication est l’unité de l’action de Dieu dans l’histoire, l’unité entre création et histoire du salut, l’unité entre Ancien et Nouveau Testament. Un autre thème important est la pneumatologie, c’est-à-dire la doctrine sur l’Esprit Saint. En la fête de la Pentecôte, il souligne la continuité entre le Christ monté au ciel et les apôtres, c’est-à-dire l’Eglise, et il en exalte l’action missionnaire dans le monde : « [...] avec la vertu divine ils ont conquis tous les hommes ; / ils ont pris la croix du Christ comme une plume, / ils ont utilisé les paroles comme des filets et avec ceux-ci ils ont pêché le monde, / ils ont eu le Verbe pour hameçon pointu, / un appât est devenu pour eux / la chair du Souverain de l’univers » (La Pentecôte 2 ; 18).

Un autre thème central est naturellement la christologie. Il n’entre pas dans le problème des concepts difficiles de la théologie, tant débattu à cette époque et qui ont aussi tant déchiré l’unité non seulement entre les théologiens, mais également entre les chrétiens dans l’Eglise. Il prêche une christologie simple mais fondamentale, la christologie des grands Conciles. Mais surtout il est proche de la piété populaire – du reste les concepts des Conciles sont nés de la piété populaire et de la connaissance du cœur chrétien – et ainsi Romanos souligne que le Christ est vrai homme et vrai Dieu, et en étant vrai Homme-Dieu il est une seule personne, la synthèse entre création et Créateur : dans ses paroles humaines nous entendons parler le Verbe de Dieu lui-même. « Il était homme – dit-il – le Christ, / mais il n’est cependant pas divisé en deux : il est Un, fils d’un Père qui est Un seulement » (La Passion 19). Quant à la mariologie, reconnaissant à la Vierge pour le don du charisme poétique, Romanos la rappelle à la fin de presque tous les hymnes et lui consacre ses kontáki les plus beaux : Nativité, Annonciation, Maternité divine, Nouvelle Eve.Enfin, les enseignements moraux se rapportent au jugement final (

Les dix vierges [II]). Il nous conduit vers ce moment de la vérité de notre vie, de la confrontation avec le Juge juste et par conséquent il exhorte à la conversion dans la pénitence et dans le jeûne. De manière concrète, le chrétien doit pratiquer la charité, l’aumône. Il accentue le primat de la charité sur la continence dans deux hymnes, les Noces de Cana et les Dix vierges. La charité est la plus grande des vertus : « [...] dix vierges possédaient la vertu de la virginité intacte, / mais pour cinq d’entre elles le dur exercice fut sans fruit. / Les autres brillèrent par les lampes de l’amour pour l’humanité, / c’est pourquoi l’époux les invita » (Les dix Vierges, 1).

Une humanité palpitante, l’ardeur de foi, une profonde humilité imprègnent les chants de Romanos le Mélode. Ce grand poète et compositeur nous rappelle tout le trésor de la culture chrétienne, née de la foi, née du cœur qui a rencontré le Christ, le Fils de Dieu. De ce contact du cœur avec la Vérité qui est Amour naît la culture, est née toute la grande culture chrétienne. Et si la foi reste vivante, cet héritage culturel aussi ne devient pas chose morte, mais reste vivant et présent. Les icônes parlent encore aujourd’hui au coeur des croyants, ce ne sont pas des choses du passé. Les cathédrales ne sont pas des monuments médiévaux, mais des maisons de vie, où nous nous sentons « à la maison » : nous rencontrons Dieu et nous nous rencontrons les uns les autres. La grande musique non plus – le chant grégorien ou Bach ou Mozart – n’est pas une chose du passé, mais elle vit de la vitalité de la liturgie et de notre foi. Si la foi est vivante, la culture chrétienne ne devient pas « passé », mais reste vivante et présente. Et si la foi est vivante, aujourd’hui aussi nous pouvons répondre à l’impératif qui se répète toujours à nouveau dans les Psaumes : « Chantez au Seigneur un chant nouveau ». Créativité, innovation, chant nouveau, culture nouvelle et présence de tout l’héritage culturel dans la vitalité de la foi ne s’excluent pas, mais sont une unique réalité ; ils sont la présence de la beauté de Dieu et de la joie d’être ses enfants.

Puis le pape a proposé une synthèse de sa catéchèse, en français :

Chers Frères et Sœurs,

Nous nous intéressons, ce matin, à Romanos le Mélode, un diacre auquel fût donné le titre de ‘Pindare chrétien’ car, par sa qualité littéraire, sa poésie savait bien célébrer les mystères de la foi. Né en Syrie vers 490, il rejoint Beyrouth pour y perfectionner sa formation académique. Il y devient diacre permanent. En 518, il s’installe à Constantinople, dans un monastère proche d’une église dédiée à la Theotokos. C’est là qu’il recevra de la Mère de Dieu le charisme de la poésie sacrée qui fera de lui l’un des plus grands auteurs d’hymnes de l’Orient. Dans sa communauté, il tiendra, jusqu’à sa mort, le rôle de chantre et de prédicateur.

À travers ses hymnes liturgiques, rédigées dans le grec de la koiné et dont le chant s’intercalait entre la lecture des textes bibliques et l’homélie, nous possédons un témoignage précis de la liturgie, de la théologie, de l’esthétique sacrée de cette époque. Romanos se montre surtout soucieux de faire comprendre le plan de salut de Dieu dans le Christ, soulignant le lien entre création et rédemption. Pour cela, il recourt abondamment à la typologie et il déploie une riche théologie de l’Esprit Saint. Si ses enseignements moraux accordent une grande valeur à la pénitence et au jeûne, ils soulignent toujours le primat de la charité.Je salue les pèlerins francophones, en particulier les prêtres jubilaires du diocèse de Gand, ainsi que les jeunes du Lycée du Foyer de Charité de Chateauneuf de Galaure, de l’École « Jeunesse Lumière » et de l’École de la foi de Coutances. Que la beauté du visage de notre Dieu se reflète toujours sur notre être et dans notre louange. Avec ma Bénédiction apostolique.

Homélie du patriarche Grégoire III à Saint-Paul-hors-les-Murs

22 mai, 2008

du site:
http://www.zenit.org/article-17922?l=french

 

 Homélie du patriarche Grégoire III à Saint-Paul-hors-les-Murs 

Pèlerinage aux tombeaux des Apôtres Pierre et Paul

 

 ROME, Vendredi 9 mai 2008 (ZENIT.org) – « Aujourd’hui, notre concélébration a lieu près du tombeau de Saint Paul. Après-demain, samedi 10 mai, nous concélébrerons la Divine Liturgie sur le tombeau de Saint Pierre, sur la foi de qui le Christ a fondé son Eglise », a expliqué le patriarche Grégoire III Laham. 

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Voici le texte intégral de l’homélie de Sa Béatitude le patriarche Grégoire III Laham, hier, jeudi 8 mai, en la basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs. 

Eminences, 

Chers Frères dans l’Episcopat et le Sacerdoce, 

Chers Frères et Sœurs, 

C’est une grande joie pour nous tous d’être à Rome, dans cette Basilique Papale de Saint-Paul-hors-les-Murs. Notre joie est grande d’être les pèlerins de l’Orient, et surtout du lieu de la conversion de Saint Paul, de Damas, la capitale syrienne, où celui qui allait être l’Apôtre des Gentils fut baptisé par Saint Ananie, premier Evêque de cette ville et l’un des premiers Evêques de la chrétienté. 

Nous sommes heureux de concélébrer la Divine Liturgie dans cette Basilique, inaugurée une première fois en 403 par l’Empereur Honorius. Nous sommes venus en pèlerins pour vénérer, dans cette Ville Sainte de Rome, les tombeaux des Coryphées des Apôtres, Pierre et Paul, qui sont des concitoyens de notre Orient bien-aimé. 

Aujourd’hui, notre concélébration a lieu près du tombeau de Saint Paul. Après-demain, samedi 10 mai, nous concélébrerons la Divine Liturgie sur le tombeau de Saint Pierre, sur la foi de qui le Christ a fondé son Eglise. 

Saint Pierre fut le premier Evêque de notre siège patriarcal d’Antioche, et Nous sommes, par la grâce de Dieu, son successeur sur le Trône d’Antioche. Il est devenu ensuite le premier Evêque de Rome, alors capitale des Empereurs, et depuis lors capitale de la foi catholique, siège aujourd’hui du successeur de Pierre et Vicaire du Christ, Sa Sainteté le Pape Benoît XVI, avec qui nous nous sommes rencontrés ce matin, au début de notre pèlerinage; ce fut une rencontre spirituelle de foi, une rencontre de la grande famille catholique; le Saint Père nous a reçus avec grand amour, en compagnie de mes frères les Evêques du Saint-Synode, des Supérieurs Généraux, des Supérieures Générales, de prêtres, religieux et religieuses, et d’un grand nombre de fidèles de l’Eglise Grecque-Melkite Catholique, des pays arabes du Proche-Orient et du monde de l’émigration. 

Antioche, Damas, Jérusalem et Alexandrie font ce pèlerinage à Rome, la Ville Eternelle, gardienne de la sainte foi chrétienne, sous la houlette du Pasteur des Pasteurs, Sa Sainteté le Pape, et de ses collaborateurs de la Curie Romaine, dont sont présents aujourd’hui parmi nous Son Eminence le Cardinal Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Eglises Orientales, et son prédécesseur, Sa Béatitude Eminentissime le Cardinal Ignace Moussa Daoud, fils de l’Orient, Patriarche émérite d’Antioche des Syriens. 

Notre pèlerinage d’aujourd’hui est aussi un prélude aux célébrations de l’Année de Saint Paul, que le Saint Père a annoncée, qu’il ouvrira le 28 juin prochain ici même, et qui se terminera le 29 juin 2009. Nous avons déjà prévu un grand programme pour la célébration de cette Année à Damas, et nous serons, à cet effet, en continuelle relation et coordination avec Son Eminence le Cardinal Andrea Cordero Lanza di Montezemolo, Archiprêtre de cette Basilique, qui nous donne l’hospitalité aujourd’hui. 

Souvenirs personnels 

Notre pèlerinage a une signification spéciale pour moi, car c’est le prélude de mes noces d’or sacerdotales, ayant été ordonné prêtre en l’Abbaye de Notre-Dame de Grottaferrata le 15 février 1959, et j’ai célébré la Divine Liturgie pour la première fois le lendemain, en cette Basilique, sur ce même autel. 

Dans l’Abbaye adjacente, j’ai passé trois ans, jouissant de l’hospitalité des Pères bénédictins, et aujourd’hui nous avons eu la joie de visiter son Révérendissime Père Abbé, Dom Edward Power. J’ai vécu dans cette Abbaye avec huit de mes confrères, moines de l’Ordre Basilien du Très Saint Sauveur, à qui le Père Gabriel Acace Coussa, de l’Ordre Basilien Alépin, alors Assesseur de la Congrégation pour l’Eglise Orientale, futur Cardinal et Secrétaire – malheureusement mort prématurément de la même Congrégation, avait donné l’opportunité de venir continuer leurs études à Rome. 

Ici même, j’ai eu la joie d’assister à la Sainte Messe célébrée par le Bienheureux Jean XXIII le 25 janvier 1958 pour la fête de la Conversion de Saint Paul sur la route de Damas, fête patronale de cette Basilique, puis, après la célébration, j’ai eu le privilège, avec les moines de l’Abbaye et mes confrères salvatoriens, d’être présent au discours que le Pape prononça, à l’intérieur de l’Abbaye, dans lequel il annonça la convocation du Concile Vatican II, dont il précisa la finalité: « pour l’unité des chrétiens » . 

Paul, Apôtre de Jésus-Christ, a porté à Rome et au monde entier cette Orientale Lumen, le message du Christ venu de l’Orient; à travers ses Epîtres et ses voyages apostoliques autour de la Méditerranée, il a donné à l’Orient et à l’Occident la théologie et la spiritualité de l’Evangile. Paul, Apôtre des Nations, est le vrai signe du dialogue dans le monde entier. 

 

Dans cette Ville Sainte, nous sommes heureux de proclamer de nouveau notre communion spirituelle avec l’Eglise de Rome, et nous voudrions répéter les paroles du Concile de Chalcédoine, en 451, dont les Pères, après avoir écouté le Tomos du Pape Saint Léon le Grand, ont proclamé que « Pierre a parlé par la bouche de Léon ». Nous gardons aussi le souvenir de notre prédécesseur Pierre III d’Antioche, qui écrivait à son confrère le Patriarche de Constantinople Michel Cérulaire, après la discorde de celui-ci en 1054 avec le Cardinal Humbert de Silva-Candida: 

« Tous les malheurs présents (…) ne proviendraient-ils pas d’ici, je veux dire de cette longue séparation, de cette mésintelligence de notre Eglise avec le Siège Apostolique? » 

Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin de cette voix de Pierre et de son successeur, le Pape de Rome, et de tous les Pasteurs de l’Eglise. Oui, nous avons besoin de cette unité chrétienne, qui s’est exprimée ex cathedra, d’une manière imposante et mondiale, à travers les messages du Pape et des Papes. Le Pape, successeur de Saint Pierre, a toujours la mission que Jésus a confiée à Pierre: « Et toi, confirme tes frères ». 

Le Pape est une nécessité chrétienne, et je dirais mondiale, une nécessité de la foi, car c’est lui qui est, avec tous les Pasteurs du monde chrétien, appelé à fortifier, à confirmer les chrétiens dans leur foi, dans les grandes valeurs spirituelles. 

Comme nous demandons dans notre prière liturgique pour le Pape, pour le Patriarche et pour les Evêques: « Qu’ils dispensent fidèlement les paroles de ta vérité ». 

Nous avons besoin de cette unité afin de réaliser l’expérience de l’Eglise primitive de Jérusalem, la Mère de toutes les Eglises, comme nous lisons au chapitre IV des Actes des Apôtres, que les chrétiens n’avaient « qu’un cœur et une âme », et « entre eux tout était commun ». 

 

Ici présents, à Rome, nous sentons plus que jamais l’importance unique de notre mission en Orient et en Occident, pour tout ce qui se rapporte à la présence chrétienne, à la convivialité et au dialogue des chrétiens avec les autres chrétiens et avec les musulmans, un dialogue mondial. Nous, en Orient, nous avons cette mission très spéciale, comme celle que Saint Paul a portée, qui est d’être présents et, comme Jésus l’a dit, « levain dans la pâte », dans le monde arabe, qui compte 300 millions de personnes, à majorité musulmane. 

Nous demandons à Dieu de fortifier la foi juste et orthodoxe, comme Saint Paul, à Ephèse, a prié, à genoux, pour l’union des chrétiens et pour une plus profonde compréhension du mystère du Christ, dans toutes ses dimensions, dans sa largeur, sa longueur, sa profondeur et sa hauteur. 

Nous avons besoin de Saint Paul, de son enseignement, pour avoir plus de courage dans la vie chrétienne, et surtout nous avons besoin d’expérimenter, nous aussi, cette rencontre qui a changé la vie de Paul de Tarse et toute la trame de l’histoire de l’Eglise et du monde entier: la rencontre de Paul avec Jésus, qui lui a donné la possibilité de comprendre, de trouver l’anneau de la vraie rencontre avec la philosophie grecque et avec la révélation divine, comme ce fut le cas plus tard pour lui à Athènes. Sa rencontre avec Jésus l’a rendu fort pour rencontrer tout homme, afin d’être, comme il l’a dit, « tout à tous », afin que chacun obtienne l’intelligence par la connaissance du Christ, afin de gagner le monde et tous les hommes à Jésus-Christ. 

Aujourd’hui, le monde a plus que jamais besoin de cette rencontre vraie avec le Christ, dans la foi, afin que nous puissions affronter le monde, la nature, l’environnement, toute la création dans tous ses éléments, pour que l’homme soit vraiment roi de cette création comme Dieu l’a fait, et comme le rappelle le Psaume 8: « Tu l’as couronné d’honneur et de gloire; Tu l’as fait régner sur les œuvres de tes mains ». 

 

La rencontre avec Dieu est à la base de la rencontre des civilisations, des cultures, des peuples et des nations dans leurs diversités et dans leurs croyances. La rencontre avec la personne de Jésus-Christ est la base de la vraie mondialisation, de la vraie globalisation. 

Aujourd’hui, plus que jamais, chers Frères et Sœurs ici présents, et à travers vous je le dis à tous les fidèles de l’Eglise Grecque-Melkite Catholique, nous avons besoin d’approfondir cette rencontre avec le Christ. Nous l’avons rencontré d’abord le jour de notre baptême et de notre chrismation, nous l’avons reçu dans l’Eucharistie et dans l’Evangile. Notre approfondissement doit se faire à travers les Sacrements, les saints Mystères de l’Eglise, à travers notre vie chrétienne selon l’Evangile, afin de rencontrer, à travers Jésus et à travers notre foi, notre monde et notre société, l’autre, le frère de notre communauté, notre frère de n’importe quelle religion, culture ou civilisation, pour pouvoir ainsi être le levain dans la pâte de notre société, la lumière pour le monde, et le sel pour donner un sens à la vie. 

C’est là le sens de notre vocation de chrétiens orientaux, dans notre monde arabe à majorité musulmane, et de notre vocation de grecs-melkites catholiques en relation avec le monde occidental, en pleine communion avec l’Eglise de Rome, qui « préside dans la charité », selon les mots de Saint Ignace d’Antioche. 

Nous avons, chers Frères et Sœurs, à travers ces convictions, ces données et ces valeurs constantes de notre vie, à être des serviteurs de l’unité chrétienne et humaine. Avec témérité, j’ose dire que nous devons être un modèle de l’unité chrétienne et les grands promoteurs de cette unité, « afin que le monde croie », afin que l’on puisse arriver, dans ce monde, à la pleine stature du Christ, afin que nous soyons « l’Eglise Une, Sainte, Catholique et Apostolique », avec un même Pasteur, Jésus-Christ, qui est « l’Evêque de nos âmes », comme dit Saint Irénée. 

 

Selon les mots de Saint Paul, « nous sommes un seul corps, nous avons un seul baptême et une seule foi », et nous sommes tous unis à ce grand homme-Dieu, le nouvel Adam, Jésus Christ; à Lui la gloire dans les siècles des siècles. Amin. 

+ Gregorios III, Patriarche

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