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Messe de requiem pour Sr Emmanuelle : Homélie du card. Vingt-Trois

23 octobre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-19174?l=french

Messe de requiem pour Sr Emmanuelle : Homélie du card. Vingt-Trois

« Si nous voulons progresser dans l’amour… »

ROME, Mercredi 22 octobre 2008 (ZENIT.org) – « Il n’y a pas trente six sortes d’amour et si nous voulons progresser dans l’amour, il nous faut nous mettre à l’école de celles et de ceux qui en ont été habités au point de tout donner pour le vivre », a fait observer cet après midi, en la cathédrale Notre-Dame de Paris, lors de la messe de requiem pour Soeur Emmanuelle, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris et président de la conférence épiscopale de France.Homélie du Cardinal André Vingt-Trois

« J’ai cent ans et je voudrais vous dire. » Au moment où Sśur Emmanuelle quitte ce monde, il est bon pour nous d’essayer de comprendre ce qu’elle voudrait, ce qu’elle veut nous dire. Non seulement l’exposé de ses idées (sur la vie) ou ses pensées, mais surtout le témoignage de sa vie. Car, comme chacun d’entre nous, comme tout homme ou toute femme en ce monde, ce qu’elle peut vraiment nous communiquer c’est ce qu’elle a vécu, ce qui l’a fait vivre et ce qui dévoile le sens de son action.

Le premier trait qui se présente à nous dans la vie de Soeur Emmanuelle, c’est la puissance de l’amour. Un jour, elle a été saisie et transformée par l’amour d’une façon décisive et irrémédiable. Sans doute le don qu’elle avait fait d’elle-même dans sa consécration religieuse était-il déjà inspiré par le désir d’aimer et de servir Dieu et ses frères. Mais le chemin où elle s’est engagée avec les enfants du Caire est un basculement total. Il découvre à nos yeux la profondeur et la puissance de cet amour.

Il s’agit du même don de soi définitif qui fut celui de sa profession religieuse, mais ce don prend une dimension nouvelle par la communauté de destin dans laquelle elle s’engage avec ces enfants qui, avant d’avoir besoin de ses leçons de professeur et d’éducatrice, ont besoin de manger pour survivre. Elle comprend que les aimer, c’est se lier à eux par le genre de vie, par le partage de la misère et par l’encouragement à faire quelque chose pour en sortir.

Il s’agit d’un véritable basculement qui saisit la liberté et le cśur et qui entraîne à miser tout sur une parole, la parole de celui qui est venu donner sa vie pour l’humanité, Jésus de Nazareth. Comme les disciples, qui avaient passé en vain toute la nuit à pécher, elle entend le Maître l’appeler à « jeter les filets pour la pêche. » Et, confiante en la parole de Celui qu’elle aime, elle lâche tout et se lance dans une aventure inimaginable, au-delà des conventions habituelles, hors de son champ de compétence. Elle se fait chiffonnière avec les chiffonniers. Elle plonge sans retour dans la solidarité de destin avec ceux qui n’ont rien et que tous méprisent.

Et la joie qui l’habitait et dont elle rayonnait était certainement le signe extérieur de ce cśur donné sans retour pour répondre à l’appel du Christ.

Mais nous devons faire un pas de plus. Faut-il considérer l’histoire de Soeur Emmanuelle comme un prodige extraordinaire que l’on admire avec d’autant plus de ferveur qu’on n’imagine pas qu’il puisse nous concerner ? Est-elle un de ces héros dont on exalte la figure sans craindre d’être nous-mêmes entraînés à les suivre ? Saint Paul nous le disait à l’instant, l’amour est le don le plus grand qui puisse nous arriver et qui les surpasse tous. Mais de quel amour parle-t-il ? De l’amour que Dieu nous manifeste et qu’Il nous invite à vivre dans nos rapports les uns avec les autres. Sans cet amour je ne suis rien. Il n’y a pas trente six sortes d’amour et si nous voulons progresser dans l’amour, il nous faut nous mettre à l’école de celles et de ceux qui en ont été habités au point de tout donner pour le vivre, l’école de saint Vincent de Paul, du Bienheureux Frédéric Ozanam, de Mère Térésa, de l’Abbé Pierre et de tant d’autres qui ont passé leur vie au service des pauvres dans lesquels ils reconnaissaient le visage du Christ qui les avait appelés : « J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli, nu et vous m’avez vêtu, malade et vous m’avez visité, prisonnier et vous êtes venus me voir » (Mt 25, 36).

De ces exemples nous pouvons tirer quelques enseignements qui éclairent notre propre route. L’amour suppose un don total de soi. Il nous entraîne à quitter les sécurités des chemins bien balisés et surtout il nous demande de ne pas nous laisser prendre au piège de la bonne conscience qui se nourrit du souci de notre image. Sśur Emmanuelle a utilisé sans complexe les moyens de la communication et de la médiatisation, non pour faire la promotion de son image, mais pour faire connaître à tous l’univers de cauchemar dans lequel vit aujourd’hui encore une bonne partie de l’humanité.

L’amour est un don définitif et sans retour, sinon il n’est que chimère et illusion. Comment les enfants du Caire auraient-ils pu faire confiance à Sśur Emmanuelle si sa présence au milieu d’eux avait été incertaine et épisodique ? Il n’y a pas d’alliance s’il y a une échappatoire.

Enfin l’amour est contagieux. Il est une force d’attraction qui embarque des complices à tout moment. Certes la personnalité de Sśur Emmanuelle est une sorte de figure emblématique. Mais l’authenticité du service qu’elle a accompli se manifeste dans sa capacité à associer toutes sortes de gens à son action, telle sśur Sara, une religieuse copte orthodoxe qui poursuit aujourd’hui son śuvre avec les chiffonniers du Caire. Elle ne les séduisait pas pour elle-même, ni pour se donner la satisfaction d’avoir des disciples, mais elle les enrôlait dans son armée de miséreux parce qu’ils pouvaient y faire quelque chose d’utile pour les autres et pour eux-mêmes. Les vedettes n’ont pas de successeurs, les serviteurs ont des amis qui les soutiennent et qui développent leur śuvre.

Notre véritable hommage à Sśur Emmanuelle n’est-il pas de tirer les leçons de son histoire d’amour avec les pauvres de ce monde ? N’est-il pas de crier pour tous ceux qui survivent avec peine dans la malnutrition et le manque de soins ? N’est-il pas de nous interroger sur le déséquilibre qui marque notre univers : d’un coté, l’énergie que l’on dépense pour la richesse et le confort d’une société dont on attend qu’elle assume tous les risques de la vie et de l’autre, l’insécurité absolue sur les besoins élémentaires de l’existence : manger, boire de l’eau, se soigner, apprendre à lire et à écrire ?

Ceux qui professent la foi chrétienne autrement que comme une assurance supplémentaire ne doivent-ils pas être les premiers à « avancer en eaux profondes et à jeter les filets pour la pêche » pour que l’amour soit connu non pas seulement en paroles, mais en acte et en vérité. Certes, les chrétiens se mobilisent pour vivre davantage le partage avec les pauvres de ce temps et nous en sommes fiers. Mais nous n’oublions pas que même la générosité n’est rien si elle n’est pas animée par l’amour. Nous ne sommes pas appelés seulement à donner de nos biens, nous sommes appelés à nous donner nous-mêmes.

Sśur Emmanuelle a souhaité que ses obsèques soient célébrées dans l’intimité de sa famille religieuse. Aurait-t-elle été très à l’aise dans notre hommage national ? Je ne suis pas capable de répondre à sa place, mais il y deux choses dont je suis sûr. Premièrement, elle jubile certainement de voir que sa mort est une occasion de rappeler à tous l’urgence du service des pauvres de ce monde, un temps d’antenne supplémentaire pour ceux dont on parle si peu. Deuxièmement, elle voit certainement avec joie que nous n’essayons pas d’expliquer sa vie en oubliant Celui qui seul lui a donné sens : Jésus de Nazareth qui est passé parmi les hommes en faisant le bien et qui, à la veille de sa passion, nous a donné la clef d’interprétation absolue : « il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » C’est ce qu’il a fait et ce qu’il fait aujourd’hui dans cette Eucharistie. C’est ce que Sśur Emmanuelle a vécu à la suite et en compagnie de tant de disciples du Christ. C’est ce que nous sommes tous appelés à vivre, car finalement sans l’amour nous ne sommes rien. L’amour seul est digne de foi.

+André cardinal Vingt-Trois

PAULUS P. P. VI. : L’encyclique Christi Mater Rosarii (sur la recitation du rosaire)

9 octobre, 2008

du site: 

http://missel.free.fr/Sanctoral/10/07.php#encyclique

PAULUS P. P. VI.

Rome, près Saint-Pierre, le 15 septembre 1966, quatrième année de Notre pontificat.

L’encyclique Christi Mater Rosarii

A nos vénérables frères, patriarches, primats, archevêques, évêques et autres ordinaires locaux en paix et communion avec le Siège apostolique. Paul VI, Pape.

Vénérables Frères, salut et bénédiction apostolique.

Durant le mois d’octobre, le peuple fidèle a coutume d’offrir la récitation du rosaire comme autant de couronnes à la Mère de Dieu. A l’exemple de Nos Prédécesseurs, Nous approuvons vivement cette pratique. Cette année, Nous convions tous les enfants de l’Eglise à un hommage plus particulier de piété envers Notre-Dame. Et cela en raison des menaces de calamités graves et étendues qui pèsent sur la famille humaine : en Asie orientale se poursuit un conflit sanglant et se déchaîne une guerre acharnée. De ce fait, Nous Nous trouvons pressé d’intensifier tout l’effort possible en faveur de la paix.

Ce qui ajoute à nos préoccupations, c’est ce que Nous apprenons d’autres régions du monde : la course aux armements nucléaires, l’ambition incontrôlée d’expansion nationale, l’exaltation démesurée de la race, les tendances subversives, le séparation imposée entre citoyens d’un même pays, les manśuvres criminelles, le meurtre de personnes innocentes.Tout cela peut donner lieu aux pires catastrophes.

La Providence nous impose, semble-t-il, à Nous comme à Nos plus récents Prédécesseurs, la mission particulière de consacrer Nos efforts patients et constants à la sauvegarde et à l’affermissement de la paix. Ce devoir découle évidemment du mandat qui Nous est confié de conduire l’Eglise entière. Celle-ci, « signe dressé devant les nations » (cf. Isaïe XI 12), ne sert pas d’intérêts politiques, mais elle doit apporter au genre humain la vérité et la grâce de Jésus-Christ, son divin fondateur.

En réalité, depuis les débuts de Notre ministère apostolique, Nous n’avons rien négligé pour la cause de la paix, ni prière adressée à Dieu, ni instances, ni exhortations, et même, vous vous en souvenez, l’an dernier, Nous Nous sommes rendu par la voie des airs en Amérique du Nord afin de parler au siège de l’Organisation des Nations Unies devant l’assemblée si distinguée des représentants de presque tous les peuples, du bien si désiré de la paix, et de recommander qu’on ne laisse pas des peuples en état d’infériorité par rapport à d’autres, que les uns ne s’attaquent point aux autres mais que tous conjuguent leur zèle et leur action pour établir la paix.

Et encore dans la suite, mû par Notre sollicitude apostolique, Nous n’avons pas cessé d’encourager les hommes à qui incombe cette lourde responsabilité à écarter de l’humanité l’épouvantable fléau qui pourrait survenir.

Maintenant encore, Nous élevons Notre voix « avec un grand cri et des larmes » (Hébreux V 7 ) pour supplier instamment les dirigeants des nations de tout tenter pour empêcher la propagation de l’incendie et pour éteindre complètement celui-ci. Nous n’en doutons point : les hommes de toute race, de toute couleur, de toute religion, de toute classe sociale, s’ils aiment le droit et l’honnêteté, partagent Notre sentiment.

Que tous ceux dont cela dépend ménagent les conditions nécessaires à la cessation des hostilités avant que ne leur échappe, par le poids même des évènements, la possibilité de déposer les armes.

Que ceux-là au pouvoir desquels est remis le salut de la famille humaine sachent que leur conscience est chargée d’une très grave obligation. Qu’ils interrogent cette conscience et sondent leur propre cśur ; que chacun veuille bien regarder et sa propre nation, et le monde, et Dieu, et l’histoire ; qu’ils songent que leur nom restera en bénédiction s’ils répondent avec sagesse à cette pressante invitation.

Au nom du Seigneur, Nous crions : « Arrêtez ! » Il faut se rencontrer ; il faut en venir à conférer et à négocier en toute sincérité. C’est maintenant qu’il faut régler les conflits, serait-ce avec quelque inconvénient et quelque désavantage ; car il faudra bien qu’ils soient réglés non sans peut-être d’énormes dommages et des désastres dont, pour le moment, nul ne peut imaginer l’horreur. La paix à établir doit être cependant basée sur le justice et la liberté, elle doit donc respecter les droits des hommes et des communautés – autrement, elle serait précaire et instable.

Tout en exprimant de la sorte Notre anxiété et Notre émoi, Nous devons, comme le dicte Notre responsabilité pastorale, implorer le secours d’en haut. A celui qui est « le Prince de la Paix » (Isaïe IX 16), il faut demander la paix, « ce bien si grand que parmi les biens de la terre et du temps on n’entend mentionner rien de plus apprécié, on ne saurait souhaiter rien de plus désirable, trouver rien de meilleur.[1] »Et puisque aux époques d’incertitude et de trouble, l’Eglise a l’habitude de recourir à l’intercession attentive de Marie, sa mère, c’est vers celle-ci que Nous Nous tournons, vers elle que Nous orientons Notre pensée et celle de tous les chrétiens. Car, selon le mot de saint Irénée « elle est devenue le salut du genre humain tout entier.[2] »

Rien ne Nous paraît répondre plus parfaitement aux circonstances que de faire monter la supplication de toute la famille chrétienne vers la Mère de Dieu invoquée comme « Reine de la Paix », afin que parmi tant et de si graves misères et menaces, elle dispense largement les dons de sa bonté maternelle.

Il faut, disons-Nous, adresser un prière intense et persévérante à celle que, au cours du second Concile ścuménique du Vatican, aux applaudissemnts des Pères conciliaires et du monde catholique Nous avons proclamée Mère de l’Eglise. Par cette reconnaissance du fait que Marie a spirituellement enfanté l’Eglise Nous confirmions un point de la doctrine traditionnelle. Marie est « vraiment mère des membres du Christ », dit saint Augustin[3] ; à quoi fait écho, sans parler des autres, saint Anselme : « Quelle dignité plus haute pourra-t-on jamais reconnaître que celle d’être la mère de ceux-là dont le Christ daigne être le père et le frère ?[4] » Notre prédécesseur Léon XIII a même appelé Notre-Dame « en toute vérité Mère de l’Eglise[5] », c’est donc en toute assurance que Nous mettons Notre espoir en elle, parmi l’émoi et la crainte qu’inspirent les troubles actuels.

Puisque quand les maux deviennent plus graves le pitié de Dieu doit grandir, Notre souhait le plus vif, vénérables frères, est que suivant votre initiative, vos invitations et votre impulsion, on invoque plus instamment durant le mois d’octobre Marie notre Mère, comme Nous l’avons déjà fait entendre par la pratique pieuse du Rosaire. C’est là une forme de prière très adaptée au sens du peuple de Dieu, très agréable à la Mère du Seigneur et si efficace pour obtenir les dons du ciel.

Cette prière, le second Concile ścuménique du Vatican l’a recommandée à tous les enfants de l’Eglise de façon bien certaine, encore que non explicite, en disant : « Qu’on fasse grand cas de ces pratiques et exercices de dévotion envers Marie que le Magistère a recommandés au cours des siècles.

[6] »Cette pratique si féconde ne sert pas seulement à endiguer le mal et à conjurer les désastres, comme le montre clairement l’histoire de l’Eglise. Elle favorise aussi grandement la vitalité chrétienne : « Avant tout, elle nourrit la foi catholique en faisant méditer fort à propos les mystères du salut, et elle élève notre pensée au niveau des vérités de la Révélation.

[7] »

Ainsi donc, durant le prochain mois d’octobre, dédié à Notre-Dame du Rosaire, qu’on redouble de prières et de supplications ! Que par l’intercession de Marie brille enfin pour le monde entier l’aurore de la véritable paix, – la paix dans tous les domaines y compris celui de la pratique religieuse ; actuellement, hélas ! la liberté de professer la religion n’est point assurée partout.

Plus spécialement Nous souhaitons que, le 4 octobre, anniversaire de Notre visite à l’Organisation des Nations Unies, soit célébré, cette année, dans l’univers catholique comme « jour consacré à prier pour la paix. »

Il vous appartiendra, vénérables frères, selon la piété qui vous distingue et votre conscience de la gravité de la situation, de prescrire les actes religieux par lesquels, ce jour-là, les prêtres, les religieux, le peuple fidèle mais plus particulièrement l’enfant, signalé par son innocence, ainsi que les malades et tous ceux qui souffrent, tous enfin d’un élan unanime implorent le Mère de Dieu et de l’Eglise.

Pour Nous, dans la basilique Saint-Pierre, près du tombeau du Prince des apôtres, Nous adresserons une prières toute spéciale à la Vierge protectrice du monde chrétien et garante de la paix. Ainsi la voix unique de l’Eglise, montant de toutes les parties de la terre, ira comme frapper à la porte du ciel. En effet, selon le mot de saint Augustin « dans la diversité des langues humaines qu’entendent nos oreilles, unique est le langage de la foi qui anime nos cśurs.[8] »

O Bienheureuse Vierge, dans votre bonté maternelle, regardez tous vos enfants ! Voyez l’inquiétude des pasteurs qui redoutent les horreurs d’une tempête pour le troupeau confié à leur responsabilité ; montrez-vous attentive à l’angoisse de tant d’hommes, pères et mères de famille, que préoccupe le sort de leurs enfants comme le leur et qui portent les pires tracas. Apaisez les dispositions des belligérantset inspirez-leur « des pensées de paix » ; faites que Dieu, vengeur de la justice lésée, agisse selon sa miséricorde, restitue aux peuples la tranquillité si désirée et leur assure une ère très longue de véritable prospérité.

Dans le ferme espoir que la Sainte Mère de Dieu accueillera Notre humble demande, Nous vous accordons de tout cśur, à vous-mêmes, Vénérables Frères, ainsi qu’à tout votre clergé et aux peuples confiés à vos soins, la Bénédiction apostolique.

Rome, près Saint-Pierre, le 15 septembre 1966, quatrième année de Notre pontificat.

PAULUS P. P. VI.

[1] Saint Augustin : la Cité de Dieu, livre XIX, chapitre 11.

[2] Saint Irénée : Contre les hérésies, III 22

[3] Saint Augustin : de la Sainte Virginité.

[4] Saint Anselme : Prières, XLVII.

[5] Léon XIII : Lettre encyclique Adjutricem Populi Christiani, 5 septembre 1895

[6] Constitution dogmatique sur l’Eglise, n° 67

[7] Lettre encyclique de Pie XI Ingravescentibus Malis, 29 septembre 1937.

[8] Saint Augustin : Homélies sur les psaumes, LIV 11.

« L’autorité des Saintes Écritures du peuple juif », par le card. Vanhoye

9 octobre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-19001?l=french

« L’autorité des Saintes Écritures du peuple juif », par le card. Vanhoye

Rapport sur un document de la commission biblique (1)

ROME, Mardi 7 octobre 2008 (ZENIT.org) – « Le Nouveau Testament reconnaît l’autorité des Saintes Écritures du peuple juif », rappelle le cardinal Vanhoye en présentant au synode avec une grande pédagogie la genèse et le contenu d’un important document de 2001, de la commission biblique, préfacé par le cardinal Joseph Ratzinger, sur le peuple juif et la Bible.

Le cardinal Albert Vanhoye, recteur émérite de l’Institut biblique pontifical de Rome, a présenté au synode des évêques un rapport sur le document de la commission biblique pontificale – dont il a été le secrétaire – sur « Le peuple juif et ses Saintes Écritures dans la Bible chrétienne ».

Le cardinal Vanhoye a rappelé l’origine de ce document : « En 1996, après son renouvellement partiel, la commission biblique pontificale a été invitée par son président, le cardinal Joseph Ratzinger, à choisir un nouveau sujet de recherche, qui soit important pour la vie et la mission de l’Église dans le monde actuel ».

Pour une orientation positive

« Plusieurs sujets ont été proposés, continue le cardinal Vanhoye. Un vote a été effectué. Le sujet qui a obtenu le plus grand nombre de voix a été « l’antijudaïsme et la Bible ». Le terme « antijudaïsme » a été préféré à « antisémitisme », parce qu’il est plus précis ; il y a, en effet, d’autres peuples sémites que le peuple juif ». Ce fut d’ailleurs l’un des thèmes examinés par la commission historique et théologique du Grand jubilé de l’an 2000.

Mais le cardinal Vanhoye explique que explique que « la commission biblique s’est ensuite montrée fidèle au choix de ce terme, mais elle ne l’a pas maintenu dans le titre de son travail », préférant une « perspective plus ouverte et plus positive » c’est pourquoi elle a choisi cette autre formulation: « Le peuple juif et ses Écritures dans la Bible chrétienne ».

Or une nouvelle précision allait être apportée pour arriver au titre définitif, comme le rapporte l’exégète : « Un collègue a fait alors remarquer que l’expression « ses Écritures » a un sens trop large, car, en plus de la Bible hébraïque, elle s’applique aussi à la Mishna, à la Tosephta, au Talmud. On a donc précisé en mettant « saintes Écritures », expression employée par l’apôtre Paul au début de sa Lettre aux Romains et qui a l’avantage d’exprimer un respect religieux pour les écrits désignés de cette façon ».

« Le peuple juif et ses Saintes Écritures dans la Bible chrétienne »: ce titre, explique le cardinal Vanhoye indique « deux thèmes distincts et complémentaires », correspondant à deux questions.

Le bibliste les résume ainsi en précisant que le document les traite dans l’ordre inverse: « La première est de quelles façons « le peuple juif » est-il présenté dans la Bible chrétienne, c’est-à-dire dans l’Ancien Testament et dans le Nouveau? La seconde question est: quelle place les « saintes Écritures » du peuple juif occupent-elles dans la Bible chrétienne ? »

Le document « traite d’abord, ajoute-t-il, de la place occupée par l’Ancien Testament dans la Bible chrétienne et ensuite des façons dont le peuple juif est présenté dans les deux parties de cette Bible, Ancien et Nouveau Testament ».

Avec cette précision à propos de la notion d’ « antijudaïsme »: « Disons tout de suite que cette façon plus ouverte et plus positive de poser les questions a eu pour conséquence que le mot « antijudaïsme » ne se trouve plus dans aucun des titres du document, ni dans les titres des chapitres, ni dans ceux des paragraphes. Par contre, il se trouve en plus d’un endroit dans le texte, car le problème n’a aucunement été éludé; il a été clairement affronté, mais sans occuper toute la perspective, qui est restée avant tout positive, ce qui fait – remarquons-le – que le document constitue un antidote plus efficace contre l’antijudaïsme ».

Le cardinal Vanhoye a expliqué ensuite le travail de la commission, « en trois étapes » : études monographiques rédigées par des membres et discutées en assemblée ; l’établissement d’un plan pour le document et la rédaction des diverses parties confiée à des collègues et soumise ensuite à une discussion ; unification des différentes contributions dans une rédaction d’ensemble, elle aussi discutée, révisée, soumise au vote. « La rédaction finale est donc vraiment le fruit d’un travail collégial », souligne le cardinal Vanhoye.

Il souligne aussi la « rigueur scientifique » du travail et son « esprit de respect et d’amour pour le peuple juif ».

Et de préciser : « On ne s’est pas contenté d’un examen superficiel des textes, mais on les a étudiés et approfondis. Le document n’est donc pas toujours de lecture facile. Et ce sont les textes eux-mêmes qui inspirent respect et amour pour le peuple juif ».

L’Ancien et le Nouveau

A propos du rapport entre les deux Testaments, le document affirme ainsi, rapporte le cardinal Vanhoye : « « Dans l’Ancien Testament, » en effet, « le projet de Dieu est un projet d’union d’amour avec son peuple, amour paternel, amour conjugal, et quelles que soient les infidélités d’Israël, Dieu n’y renonce jamais, mais en affirme la perpétuité (Is 54,8 ; Jr 31,3). Dans le Nouveau Testament, l’amour de Dieu surmonte les pires obstacles. Même s’ils ne croient pas en son Fils, qu’il leur a envoyé pour être leur Messie sauveur, les Israélites restent « aimés » [saint Paul l'affirme dans sa Lettre aux Romains 11,28]. Qui veut être uni à Dieu, doit donc également les aimer » (n 86, fin) ».

Les travaux ont été guidés, souligne l’expert, par « l’orientation indiquée par le Pape Paul VI dans son homélie du 28 octobre 1965, jour de la promulgation du document conciliaire Nostra Aetate, qui traite des rapports avec les religions non chrétiennes, en particulier la religion juive ».

« Parlant des Juifs, précise le cardinal Vanhoye, Paul VI a souhaité « qu’on ait pour eux respect et amour » et il a même ajouté « et qu’on ait espoir en eux ». Extrêmement positive, cette orientation ne laisse aucune place à l’antijudaïsme. Elle devrait être plus fidèlement maintenue ».

L’Ancien Testament, partie fondamentale de la Bible

Pour ce qui est du plan du document, le cardinal Vanhoye en rappelle les 3 grands chapitres en expliquant le choix des titres, et en particulier ce rapport « fondamental » entre l’Ancien et le Nouveau Testament : « Le premier [chapitre] s’intitule « Les Saintes Écritures du peuple juif, partie fondamentale de la Bible chrétienne ». On avait d’abord mis « partie intégrante », ce qui aurait signifié que sans les Saintes Écritures du peuple juif, la Bible chrétienne ne serait pas complète. Cela est tout à fait exact, mais reste insuffisant. L’Ancien Testament n’est pas simplement un morceau entre autres de la Bible chrétienne. Il en est la base, la partie fondamentale ».

Et d’expliquer encore : « Si le Nouveau Testament s’était établi sur une autre base, il serait sans vraie valeur. Sans sa conformité aux Saintes Écritures du peuple juif, il n’aurait pas pu se présenter comme l’accomplissement du dessein de Dieu ».

Le cardinal Vanhoye cite à l’appui les réflexions de l’apôtre Paul : lorsqu’il veut « exprimer l’essentiel de la foi chrétienne, il souligne deux fois cette conformité, en disant : « Christ est mort pour nos péchés, conformément aux Écritures et il a été enseveli ; il est ressuscité le troisième jour, conformément aux Écritures, et il est apparu » (1 Co 15,3-5) ».

« La foi chrétienne, affirme le cardinal Vanhoye, n’est donc pas basée seulement sur des événements, mais sur la conformité de ces événements à la révélation contenue dans les Saintes Écritures du peuple juif (n 7). Cela constitue évidemment un lien très fort entre les chrétiens et le peuple juif ».

« Le 1er chapitre présente une longue démonstration de l’affirmation contenue dans son titre », explique le bibliste.

« Il montre d’abord que « le Nouveau Testament reconnaît l’autorité des Saintes Écritures du peuple juif » (…). Le Document rappelle en détail les multiples façons dont sont présentées dans le Nouveau Testament ces citations explicites. Le lecteur peut en être fatigué, mais c’est cette attention aux détails précis qui donne toute sa valeur à la démonstration ».

Le Nouveau Testament utilise la Bible juive pour argumenter, souligne par ailleurs le document : « À une argumentation basée sur les Écritures du peuple juif, le Nouveau Testament reconnaît une valeur décisive. Dans le IVème évangile, Jésus déclare à ce propos que  » l’Écriture ne peut être abolie » (Jn 10,35). Sa valeur vient de ce qu’elle est « parole de Dieu » (ibid.). « Dans ses argumentations doctrinales, l’apôtre Paul, en particulier, s’appuie constamment sur les Écritures de son peuple et il met une nette distinction entre les argumentations scripturaires et les raisonnements humains. Aux argumentations scripturaires, il attribue une valeur incontestable. Pour lui, les Écritures juives ont une valeur toujours actuelle pour guider la vie spirituelle des chrétiens ».

Le Nouveau Testament s’affirme conforme aux Écritures du peuple juif

« Le Nouveau Testament manifeste, souligne le cardinal, une double conviction : « d’une part, ce qui est écrit dans la Bible juive doit nécessairement s’accomplir, car cela révèle le dessein de Dieu, qui ne peut manquer de se réaliser, et d’autre part, la vie, la mort et la résurrection du Christ correspondent pleinement à ce qui était dit dans ces Écritures ». »

C’est le thème de « l’accomplissement des Écritures », un thème « très important pour les rapports entre les chrétiens et les Juifs » et « très complexe », fait observer le bibliste (cf. Les paragraphes 8, et 19-21 du document).

« L’accomplissement des Écritures comprend nécessairement trois aspects: un aspect fondamental de continuité avec la révélation de l’Ancien Testament, mais en même temps un aspect de différence sur certains points et un aspect de dépassement. Une simple répétition de ce qui existait dans l’Ancien Testament ne suffit pas pour qu’on puisse parler d’accomplissement. Un progrès décisif est indispensable », explique l’auteur qui cite « le thème de l’habitation de Dieu au milieu de son peuple ».

« Dans son paragraphe 8, explique le cardinal Vanhoye, le Document précise donc que la conformité du Nouveau Testament aux Écritures du peuple juif n’est pas totale, mais est « accompagnée de quelques aspects de non-conformité ». C’est le cas, par exemple, dans les Lettres de S. Paul. « Dans la Lettre aux Galates et dans celle aux Romains, l’apôtre argumente à partir de la Loi » – c’est-à-dire de l’Ancien Testament – « pour démontrer que la foi au Christ a mis fin au régime de la Loi. Il montre que la Loi comme révélation a annoncé sa propre fin comme institution nécessaire au salut » ».

« On peut remarquer, précise immédiatement le cardinal Vanhoye, qu’en réalité, il n’y a pas « non-conformité » aux Écritures du peuple juif prises dans leur ensemble, mais non-conformité à leur aspect institutionnel et conformité à leur aspect prophétique, lequel est présent dans la Torah elle-même. L’Ancien Testament, en effet, est rempli de tensions entre ces deux aspects ».

Dans le paragraphe 21, continue l’auteur, le Document « revient sur la notion d’accomplissement et déclare que c’est « une notion extrêmement complexe, qui peut facilement être faussée, si on insiste unilatéralement soit sur la continuité, soit sur la discontinuité ». »

C’est pourquoi le cardinal Vanhoye insiste sur le fait que « la pastorale doit donc être attentive à ne pas fausser la notion d’accomplissement des Écritures ».

Le Document affirme que « la foi chrétienne reconnaît l’accomplissement, dans le Christ, des Écritures et des attentes d’Israël, mais elle ne comprend pas cet accomplissement comme la simple réalisation de ce qui était écrit », ce serait « réducteur ».

« Dans le mystère du Christ crucifié et ressuscité, explique ce document, l’accomplissement s’effectue d’une manière imprévisible. Il comporte un dépassement ».

Le texte, cité par le cardinal Vanhoye, conclut sur cette mise en garde : « Il y a donc lieu de renoncer à l’insistance excessive, caractéristique d’une certaine apologétique, sur la valeur de preuve attribuée à l’accomplissement des prophéties. Cette insistance a contribué à rendre plus sévère le jugement des chrétiens sur les Juifs et sur leur lecture de l’Ancien Testament : plus on trouve évidente la référence au Christ dans les textes de l’Ancien Testament et plus on trouve inexcusable et obstinée l’incrédulité [de la grande majorité] des Juifs ».

Le cardinal vanhoye attire aussi l’attention sur cette remarque du document à propos des Juifs « qui ne croient pas au Christ »: « On ne doit donc pas dire que le Juif ne voit pas ce qui était annoncé dans les textes, mais que le chrétien, à la lumière du Christ et dans l’Esprit, découvre dans les textes un surplus de sens qui y était caché ».

Dans le paragraphe 64, le Document exprime « la même idée en d’autres termes », souligne le cardinal Vanhoye : « Les lecteurs chrétiens sont convaincus que leur herméneutique de l’Ancien Testament, fort différente, assurément, de celle du judaïsme, correspond cependant à une potentialité de sens effectivement présente dans les textes ».

Il prend cette image du « révélateur » : « À la manière d’un « révélateur » au cours du développement d’une pellicule photographique, la personne de Jésus et les événements qui la concernent ont fait apparaître dans les Écritures une plénitude de sens qui, auparavant, ne pouvait pas être perçue ».

Lecture juive de la Bible, une lecture possible

D’où cette affirmation : « Les chrétiens peuvent et doivent admettre que la lecture juive de la Bible, est une lecture possible », une lecture « qui se trouve en continuité avec les Saintes Écritures juives de l‘époque du second Temple, une lecture analogue à la lecture chrétienne, qui s’est développée parallèlement ».

Avec cette précision du cardinal : « Possible pour les Juifs qui ne croient pas au Christ, cette lecture n’est pas possible pour les chrétiens, car elle implique l’acceptation de tous les présupposés du judaïsme, en particulier ceux « qui excluent la foi en Jésus comme Messie et Fils de Dieu ». « Chacune des deux lectures est solidaire de la vision de foi respective dont elle est un produit et une expression. Elles sont, par conséquent, irréductibles l’une à l’autre ». »

Un position qui « vaut pour la lecture juive dans son ensemble », mais « pas pour la lecture de tous les détails des textes bibliques » qui, « souvent », « n’implique nullement le refus de la foi au Christ. Elle correspond simplement à une lecture faite avant la venue du Christ ».

Le Document souligne que les chrétiens peuvent « apprendre beaucoup de l’exégèse juive pratiquée depuis plus de deux mille ans » et « ont appris beaucoup » d’elle. Or, « réciproquement, les exégètes chrétiens « peuvent espérer que les Juifs pourront tirer profit, eux aussi, des recherches exégétiques chrétiennes » (n. 22) ».

(à suivre)

Audience générale du 8 octobre : Paul et la vie terrestre de Jésus

9 octobre, 2008

du site:

http://www.zenit.org/article-19006?l=french

Audience générale du 8 octobre : Paul et la vie terrestre de Jésus Texte intégral

ROME, Mercredi 8 octobre 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse prononcée ce mercredi par le pape Benoît XVI au cours de l’audience générale, place Saint-Pierre.

* * *

Chers frères et sśurs,Au cours des dernières catéchèses sur saint Paul, j’ai parlé de sa rencontre avec le Christ ressuscité, qui a changé profondément sa vie, puis de sa relation avec les douze Apôtres, appelés par Jésus – en particulier avec Jacques, Céphas et Jean – et de sa relation avec l’Eglise de Jérusalem. Il reste à présent la question de ce que saint Paul a su du Jésus terrestre, de sa vie, de ses enseignements, de sa passion. Avant d’entrer dans cette question, il peut être utile d’avoir à l’esprit que saint Paul lui-même distingue deux façons de connaître Jésus et plus généralement deux façons de connaître une personne. Il écrit dans la Deuxième Lettre aux Corinthiens : « Ainsi donc, désormais nous ne connaissons personne selon la chair. Même si nous avons connu le Christ selon la chair, maintenant ce n’est plus ainsi que nous le connaissons » (5, 16). Connaître « selon la chair », de manière charnelle, cela veut dire connaître de manière seulement extérieure, avec des critères extérieurs : on peut avoir vu une personne plusieurs fois, en connaître ainsi l’aspect et les divers détails de son comportement : comment il parle, comment il bouge, etc. Toutefois, même en connaissant quelqu’un de cette manière on ne le connaît pas réellement, on ne connaît pas le noyau de sa personne. C’est seulement avec le cśur que l’on connaît vraiment une personne. De fait, les pharisiens et les saducéens ont connu Jésus de manière extérieure, ils ont appris son enseignement, beaucoup de détails sur lui, mais ils ne l’ont pas connu dans sa vérité. Il y a une distinction analogue dans une parole de Jésus. Après la Transfiguration, il demande aux apôtres : « Le Fils de l’homme, qui est-il, d’après ce que disent les hommes ? » (Mt 16, 13) et « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » (Mt 16, 15). Les gens le connaissent, mais de manière superficielle ; ils savent plusieurs choses de lui, mais ils ne l’ont pas réellement connu. En revanche, les Douze, grâce à l’amitié qui fait participer le cśur, ont au moins compris dans la substance et ont commencé à savoir qui est Jésus. Cette manière différente de connaître existe aussi aujourd’hui : il y a des personnes savantes qui connaissent Jésus dans ses nombreux détails et des personnes simples qui n’ont pas connaissance de ces détails, mais qui l’ont connu dans sa vérité : « le cśur parle au cśur ». Et Paul veut dire essentiellement qu’il faut connaître Jésus ainsi, avec le cśur et connaître de cette manière essentiellement la personne dans sa vérité ; puis, dans un deuxième temps, d’en connaître les détails.

Cela dit, une question demeure toutefois : qu’a connu saint Paul de la vie concrète, des paroles, de la passion, des miracles de Jésus ? Il semble confirmé qu’il ne l’a pas rencontré pendant sa vie terrestre. A travers les apôtres et l’Eglise naissante il a assurément connu aussi les détails sur la vie terrestre de Jésus. Dans ses Lettres, nous trouvons trois formes de référence au Jésus pré-pascal.

En premier lieu, des références explicites et directes. Paul parle de l’ascendance davidique de Jésus (cf. Rm 1, 3), il connaît l’existence de ses « frères » ou consanguins (1 Co 9, 5; Ga 1, 19), il connaît le déroulement de la Dernière Cène (cf. 1 Co 11, 23), il connaît d’autres paroles de Jésus, par exemple, sur l’indissolubilité du mariage (cf. 1 Co 7, 10 avec Mc 10, 11-12), sur la nécessité que celui qui annonce l’Evangile soit nourri par la communauté dans la mesure où l’ouvrier est digne de son salaire (cf. 1 Co 9, 14 et Lc 10, 7) ; Paul connaît les paroles prononcées par Jésus lors de la Dernière Cène (cf. 1 Co 11, 24-25 et Lc 22, 19-20) et il connaît aussi la croix de Jésus. Telles sont les références directes à des paroles et des faits de la vie de Jésus.

En deuxième lieu, nous pouvons entrevoir dans certaines phrases des Lettres pauliniennes plusieurs allusions à la tradition attestée dans les Evangiles synoptiques. Par exemple, les paroles que nous lisons dans la première Lettre aux Thessaloniciens, selon lesquelles « le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit » (5, 2), ne s’expliqueraient pas comme un renvoi aux prophéties de l’Ancien Testament, car la comparaison avec le voleur nocturne ne se trouve que dans l’Evangile de Matthieu et de Luc, donc elle est tirée précisément de la tradition synoptique. Ainsi, quand nous lisons que : « ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Jésus a choisi… » (1 Co 1, 27-28), on entend l’écho fidèle de l’enseignement de Jésus sur les simples et sur les pauvres (cf. Mt 5, 3; 11, 25; 19, 30). Il y a ensuite les paroles prononcées par Jésus dans la joie messianique « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25). Paul sait – c’est son expérience missionnaire – combien ces paroles sont vraies, c’est-à-dire que ce sont précisément les simples qui ont le cśur ouvert à la connaissance de Jésus. La mention de l’obéissance de Jésus « jusqu’à la mort », que l’on trouve dans Ph 2, 8, ne peut également que rappeler la totale disponibilité du Jésus terrestre à l’accomplissement de la volonté de son Père (cf. Mc 3, 35 ; Jn 4, 34). Paul connaît donc la passion de Jésus, sa croix, la manière dont il a vécu les derniers moments de sa vie. La croix de Jésus et la tradition sur cet événement de la croix sont au centre du Kerygme paulinien. Un autre pilier de la vie de Jésus connu par saint Paul est le Discours de la Montagne, dont il cite certains éléments presque à la lettre, quand il écrit aux Romains : « Aimez-vous les uns les autres… Bénissez ceux qui vous persécutent… Vivez en paix avec tous… Vainc le mal par le bien… ». Donc, dans ses lettres, on trouve un reflet fidèle du Discours de la Montagne (cf. Mt 5- 7).

Enfin, on peut trouver une troisième manière dont sont présentes les paroles de Jésus dans les Lettres de Paul : lorsqu’il opère une forme de transposition de la tradition pré-pascale à la situation d’après la Pâque. Le thème du Royaume de Dieu est un cas typique. Il se trouve sans aucun doute au centre de la prédication du Jésus historique (cf. Mt 3, 2 ; Mc 1, 15 ; Lc 4, 43). Chez Paul on trouve une transposition de cette thématique, parce qu’après la résurrection il est évident que Jésus en personne, le ressuscité, est le Royaume de Dieu. Le Royaume arrive donc là où Jésus arrive. Et ainsi, nécessairement, le thème du Royaume de Dieu, où était anticipé le mystère de Jésus, se transforme en christologie. Toutefois, les mêmes dispositions demandées par Jésus pour entrer dans le Royaume de Dieu sont tout à fait valables pour Paul en ce qui concerne la justification au moyen de la foi : autant l’entrée dans le Royaume que la justification exigent une attitude de grande humilité et disponibilité, libre de présomptions, pour accueillir la grâce de Dieu. Par exemple, la parabole du pharisien et du publicain (cf. Lc 18, 9-14) donne un enseignement que l’on retrouve tel quel chez Paul, lorsqu’il insiste sur le fait de devoir exclure toute vanterie à l’égard de Dieu. Les phrases de Jésus sur les publicains et les prostituées, plus disponibles que les pharisiens à accueillir l’Evangile (cf. Mt 21, 31 ; Lc 7, 36-50), et son choix de partager la table avec eux (cf. Mt 9, 10-13 ; Lc 15, 1-2) se retrouvent elles aussi entièrement dans la doctrine de Paul sur l’amour miséricordieux de Dieu envers les pécheurs (cf. Rm 5, 8-10 ; et aussi Ep 2, 3-5). Ainsi le thème du Royaume de Dieu est reproposé sous une forme nouvelle, mais toujours dans une pleine fidélité à la tradition du Jésus historique.

Un autre exemple de transformation fidèle du noyau doctrinal tel que l’entendait Jésus se trouve dans les « titres » qui lui sont attribués. Avant Pâques, il se qualifie lui-même de Fils de l’homme ; après la Pâque, il devient évident que le Fils de l’homme est aussi le Fils de Dieu. Par conséquent, le titre préféré par Paul pour qualifier Jésus est Kyrios, « Seigneur » (cf. Ph 2, 9-11), qui indique la divinité de Jésus. Avec ce titre le Seigneur Jésus apparaît dans toute la lumière de la résurrection. Sur le Mont des Oliviers, au moment de l’extrême angoisse de Jésus (cf. Mc 14, 36), les disciples avant de s’endormir avaient entendu comment il parlait avec le Père et l’appelait « Abbà-Père ». C’est un terme très familier, équivalent à notre « papa », utilisé uniquement par les enfants en communion avec leur père. Jusqu’à ce moment-là il était impensable qu’un juif utilise une parole semblable pour s’adresser à Dieu ; mais Jésus, étant vrai Fils, en ce moment d’intimité, parle ainsi et dit : « Abbà, Père ». Dans les Lettres de saint Paul aux Romains et aux Galates, de manière surprenante ce terme « Abbà », qui exprime le caractère exclusif de la filiation de Jésus, apparaît dans la bouche des baptisés (cf. Rm 8, 15; Ga 4, 6), parce qu’ils ont reçu l’« esprit du Fils » et à présent ils portent en eux-mêmes cet Esprit et ils peuvent parler comme Jésus et avec Jésus en vrais fils de leur Père, ils peuvent dire « Abbà » parce qu’ils sont devenus fils dans le Fils.

Et enfin, je voudrais évoquer la dimension salvifique de la mort de Jésus, que nous trouvons dans la phrase évangélique selon laquelle « le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10, 45 ; Mt 20, 28). Le reflet fidèle de cette parole de Jésus apparaît dans la doctrine paulinienne sur la mort de Jésus comme rachat (cf. 1 Co 6, 20), comme rédemption (cf. Rm 3, 24), comme libération (cf. Ga 5, 1) et comme réconciliation (cf. Rm 5, 10; 2 Co 5, 18-20). C’est là le centre de la théologie paulinienne, qui se fonde sur cette parole de Jésus.

En conclusion, saint Paul ne pense pas à Jésus en tant qu’historien, comme à une personne du passé. Il connaît assurément la grande tradition sur la vie, les paroles, la mort et la résurrection de Jésus, mais il ne traite pas de tout cela comme d’une chose du passé ; il le propose comme réalité du Jésus vivant. Pour Paul, les paroles et les actions de Jésus n’appartiennent pas au temps historique, au passé. Jésus vit maintenant et parle maintenant avec nous et vit pour nous. Telle est la vraie manière de connaître Jésus et d’accueillir la tradition le concernant. Nous devons nous aussi apprendre à connaître Jésus non selon la chair, comme une personne du passé, mais comme notre Seigneur et Frère, qui est aujourd’hui avec nous et nous montre comment vivre et comment mourir.

Puis le pape a proposé une synthèse de sa catéchèse, en français :

Chers frères et sśurs,

Après avoir parlé de la rencontre de Paul avec le Christ ressuscité sur le chemin de Damas, regardons quelle fut sa connaissance de l’existence terrestre de Jésus. Il l’a connu surtout à travers la première communauté chrétienne. Nous pouvons distinguer chez Paul trois formes de références au Jésus terrestre. Il y a en premier lieu des références explicites à certains événements, comme la dernière Cène, le rôle de Pierre, ou encore des citations de paroles de Jésus. En deuxième lieu, dans certains passages des Lettres de Paul, nous pouvons entrevoir des allusions à la tradition attestée dans les Évangiles synoptiques. Enfin il y a aussi d’importantes consonances entre la pensée de Paul et la prédication de Jésus, comme sur le thème du Règne de Dieu. À propos de l’identité de Jésus, nous pouvons remarquer que Paul ne parle pas de lui comme Fils de l’homme et il ne le qualifie pas de Maître ou de Prophète comme dans les Évangiles. Pour lui Jésus est beaucoup plus que tout cela. Il est « Seigneur ». En définitive, saint Paul ne pense pas à Jésus comme à une personne du passé. Pour lui, Jésus Christ est avant tout la vie de notre vie, ici et maintenant. Puissions nous en faire aussi notre propre trésor !

Je suis heureux d’accueillir les pèlerins de langue française, particulièrement les servants de messe du Jura pastoral, dans le diocèse de Bâle. Que par son enseignement saint Paul vous aide à mettre la personne du Christ au cśur de votre vie et à reconnaître en elle le salut de Dieu offert à tous ! Avec ma bénédiction apostolique !

Le synode lance l’idée d’une encyclique sur l’interprétation de la Bible

7 octobre, 2008

 du site:

http://www.zenit.org/article-18985?l=french

Le synode lance l’idée d’une encyclique sur l’interprétation de la Bible

Proposition du rapporteur général, le cardinal Marc Ouellet

ROME, Lundi 6 octobre 2008 (ZENIT.org) – Les travaux du synode ont commencé ce matin par une proposition importante : la demande au pape d’écrire une encyclique sur l’interprétation des Ecritures.

Cette proposition a été faite par le rapporteur général du synode, le cardinal Marc Ouellet, P.S.S., archevêque de Québec, qui a constaté que souvent, les Facultés de théologie et les Facultés bibliques divergent de la vision de la Bible donnée par le magistère du pape et des évêques.

On assiste ainsi à « une fragmentation excessive des interprétations », a-t-il dit.

« Dorénavant, le rapport interne de l’exégèse à la foi ne fait plus l’unanimité et des tensions augmentent entre exégètes, pasteurs et théologiens », a-t-il ajouté.

« On complète certes de plus en plus l’exégèse historico-critique par d’autres méthodes dont certaines renouent avec la tradition et l’histoire de l’exégèse. Mais d’une façon générale, après plusieurs décennies de concentration sur les médiations humaines de l’Ecriture, ne faut-il pas retrouver la profondeur divine du texte inspiré sans perdre les acquis précieux des nouvelles méthodologies ? » s’est interrogé le cardinal Ouellet.

« Il serait opportun que le synode s’interroge sur la pertinence d’une encyclique éventuelle sur l’interprétation de l’Ecriture dans l’Eglise », a-t-il dit.

Le rapporteur général du synode invite à ne pas considérer l’interprétation de la Bible comme une chose purement académique car la Parole de Dieu pénètre dans toutes les dimensions de la personne.En m

ême temps, a-t-il ajouté après la réunion de l’assemblée synodale, au cours d’une conférence de presse, à la salle de presse du Saint-Siège, il faut créer une relation entre exégètes, théologiens et évêques, qui permette de dépasser les tensions, pour parvenir à la communion, en respectant bien sûr les attributions propres à chacun.

Le cardinal a cité un exemple de cette communion qui respecte les différents domaines sans perdre de vue le fondement même de la Parole qui est l’Amour : l’élan qu’est en train de donner l’śuvre de Marie, c’est-à-dire le Mouvement des Focolari, fondé par la défunte Chiara Lubich.

Au cours de la conférence de presse, le cardinal Ouellet a précisé qu’il existe déjà un document de la Commission biblique internationale sur l’interprétation des Ecritures, mais un document du pape aurait davantage d’autorité et d’impact.

Synode sur la Parole de Dieu : « Pour que l’apostolat biblique porte des fruits »

6 octobre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18797?l=french

Synode sur la Parole de Dieu : « Pour que l’apostolat biblique porte des fruits »

Par le Fr Luc Devillers, op

ROME, Mardi 16 septembre 2008 (ZENIT) – Un bibliste, dominicain, français, le Fr Luc Devillers, à peine remis de sa surprise d’être appelé par Benoît XVI à participer au synode des évêques sur la Parole de Dieu (5-26 octobre 2008), en tant qu’expert, souligne combien le travail des exégètes prend tout son sens « pour que l’apostolat biblique porte des fruits ».

Zenit – Fr Luc Devillers, vous êtes nommé expert au synode sur la parole de Dieu: quel est le rôle d’un expert ?

Fr Luc Devillers – N’ayant pour le moment reçu aucune information sur mon rôle pendant le Synode, je ne peux pas parler avec précision de ce qu’on attend d’un expert ! Disons simplement que le Synode est une assemblée d’évêques : donc seuls les évêques ont droit à la parole dans les réunions générales. Il y aura aussi, probablement, quelques invités à qui l’on demandera une intervention particulière, comme Jean Vanier l’avait fait je crois lors du dernier Synode. À partir de leur compétence en matière biblique, les experts travaillent dans les coulisses, ils aident les évêques à formuler leur réflexion sur ce sujet, à produire des textes.

Zenit – Comment se déroule un synode ?

Fr Luc Devillers – Comme beaucoup d’évêques, les experts nommés pour ce synode seront (pour la plupart) novices en la matière. Je ne sais que ce que vous savez déjà : le Synode débutera par une célébration à la basilique Saint-Paul-Hors-Les-Murs le dimanche 5 octobre, et s’achèvera le dimanche 26 par une célébration à la Basilique Saint-Pierre.

Zenit – Comment se prépare-t-on à un tel événement ?

Fr Luc Devillers – Je tâche de vivre mon travail quotidien avec sérénité, en faisant confiance. Pour le mois de septembre, je suis au Canada, au Collège universitaire dominicain d’Ottawa, pour de l’enseignement biblique intensif ; j’en profite aussi pour continuer ma recherche personnelle : je prépare un commentaire sur l’évangile de Jean.

Zenit – Quelle urgence y a-t-il pour notre monde à faire réfléchir les évêques du monde entier sur ce thème de la Parole de Dieu ?

Fr Luc Devillers – Quarante ans après Vatican II, et donc après le magnifique document « Dei Verbum » (la « Parole de Dieu ») sur la Révélation divine, le Saint-Père a souhaité que les évêques fassent en quelque sorte le point sur la réception de ce document, en particulier sur l’élan qu’il avait suscité en faveur d’une meilleure connaissance de la Bible par les croyants : connaissance technique ou scientifique (avec l’appui de spécialistes : livres, articles, cours et groupes bibliques, etc.) mais aussi connaissance « par le coeur » (lectio divina, méditation personnelle de la Parole de Dieu, etc.). Sur ce plan-là, il y a certainement eu beaucoup de positif depuis Vatican II, mais il reste bien du travail à faire, bien des vides à combler, des défauts à corriger. À l’heure actuelle, il est plus que jamais important que les chrétiens sachent à quel Dieu ils croient, et donc à quelles Écritures ils peuvent et doivent se référer pour vivre au quotidien leur foi, avec toutes ses implications dans les différents domaines de la vie (éthique ; spiritualité ; témoignage et évangélisation, etc.).

Zenit – Qu’est-ce que vous attendez de cette assemblée dite « ordinaire » mais non moins exceptionnelle ?

Fr Luc Devillers – Que cette assemblée redonne un souffle à l’Église universelle et aux Églises locales à partir d’une meilleure prise en compte de l’Écriture, pour que celle-ci ne soit plus seulement un livre de papier (ou de signes informatiques !), mais soit toujours plus la trace précieuse de la Parole de Dieu qui donne la vie et la joie. J’aimerais aussi que le travail des chercheurs (exégètes, historiens, biblistes) soit mieux reconnu et davantage encouragé. Pour cela, il faudrait que notre assemblée reprenne et médite à nouveau les mots de « Dei Verbum » (d’ailleurs empruntés à une encyclique de Léon XIII) : que le travail des spécialistes aide l’Église à mûrir son jugement sur toute sorte de questions. Si on la prend au sérieux, l’Écriture – la Bible – nous invite sans cesse à la conversion.

Zenit – Comment nos lecteurs peuvent-ils s’unir au travail du synode, semaine après semaine ?

Fr Luc Devillers – Je crois, bien sûr, que la première manière pour les lecteurs de Zenit de s’unir au travail du Synode est la prière. Ce n’est pas un vain mot, une formule pieuse. Il n’y a pas d’Église sans prière, une réflexion de pasteurs et d’experts ne portera du fruit que si elle est animée par la prière : leur prière personnelle et communautaire, au cours des grands moments liturgiques que ce Synode suscitera, mais aussi la prière de toute la communauté catholique, et je suis sûr aussi que bien des chrétiens non catholiques prieront pour le succès de cette rencontre unique. Peut-on encore suggérer une autre manière pour les chrétiens de s’unir au travail du Synode ? Il s’agirait pour eux de profiter de ce mois d’octobre pour lire l’Écriture, pour approfondir une question, étudier un livre biblique, par exemple une lettre de saint Paul – c’est l’année paulinienne – ou un évangile. Pourquoi ne pas relire aussi le document « Dei Verbum » de Vatican II ? Il reste une pièce maîtresse du dernier Concile. On pourra encore lire le document de travail – « Instrumentum laboris » – préparé pour ce Synode (le seul document que j’aie pour le moment à son sujet !).

Zenit – Pour mieux comprendre qui le Saint-Père appelle à cette assemblée, qui est le Fr Luc Devillers ?

Fr Luc Devillers – Né en 1954, je suis un dominicain français de la Province de Toulouse. J’ai fêté mes 30 ans de profession religieuse et 25 ans de sacerdoce. Docteur en Écriture sainte, j’ai publié un gros ouvrage à partir de ma thèse : « La fête de l’Envoyé. La section johannique de la fête des Tentes [Jean 7,1-10,21] et la christologie » (Paris, Gabalda, 2002). J’en ai ensuite donné une version plus courte, accessible à un public soucieux de formation biblique : « La saga de Siloé. Jésus et la fête des Tentes [Jean 7,1-10,21] » (Paris, Éd. du Cerf, 2005).

De 1986 à 1995 j’ai enseigné au premier cycle du couvent des Dominicains de Bordeaux le grec biblique et une introduction aux évangiles, ainsi qu’au Séminaire interdiocésain de Bordeaux, sur la littérature johannique.

De 1995 à 2008 j’ai enseigné à l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, toujours sur la littérature johannique. Pendant plusieurs années j’ai été aussi Secrétaire pour le Nouveau Testament de la « Revue biblique », la revue scientifique des Dominicains.

Durant ces temps à Bordeaux et à Jérusalem, j’ai aussi exercé dans mon couvent la charge de chantre, responsable de la liturgie quotidienne. J’aime beaucoup la liturgie, le lieu où la Parole de Dieu est célébrée, pour mieux en vivre.Au mois de novembre, juste après le Synode, je vais prêcher la retraite des moniales puis des moines de Solesmes, renouant avec un exercice de prédication que j’aime beaucoup et que j’ai souvent pratiqué.

De même, j’ai souvent animé des sessions bibliques dans des monastères, des communautés, ou pour des groupes diocésains ou des paroisses. Avant Noël, je vais quitter Jérusalem pour aller vivre au couvent Saint-Albert de Fribourg, en Suisse. En effet, dès février 2009 je serai professeur d’exégèse et de théologie du Nouveau Testament à la Faculté de théologie de l’Université de Fribourg.

Vous voyez que, pour moi, la Bible n’est pas qu’un objet d’étude en chambre ! Mais ce travail de spécialiste est indispensable pour que l’apostolat biblique porte des fruits.

Propos recueillis par Anita S. Bourdin

Benoît XVI rappelle le sens profond et l’actualité de Humanae Vitae

4 octobre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18967?l=french

Benoît XVI rappelle le sens profond et l’actualité de Humanae Vitae

« Les exigences d’un grand amour »


ROME, Vendredi 3 octobre 2008 (ZENIT.org) – Benoît XVI souligne le sens profond et l’actualité de l’encyclique de Paul VI, Humanae Vitae, à l’occasion des 40 ans de ce document publié le 25 juillet 1968.

Le pape a adressé un message au président de l’Institut Jean-Paul II pour les Etudes sur le Mariage et la Famille, Mgr Livio Melina, à l’occasion d’un congrès marquant ce 40e anniversaire, organisé par cet institut et par l’université du Sacré-Coeur.

En donnant naissance à des enfants, l’amour conjugal « non seulement ressemble à l’amour de Dieu », a expliqué le pape, mais « participe » de cet amour. « Toute forme d’amour tend à diffuser la plénitude dont il vit, l’amour conjugal a une façon à lui de se communiquer : engendrer des enfants ».

C’est pourquoi, explique le pape, «exclure cette dimension communicative par une action qui vise à empêcher la procréation signifie nier la vérité intime de l’amour sponsal par lequel le don divin se communique ».A distance de 40 ans, on comprend, continue le pape, que « les enfants ne sont plus l’objectif d’un projet humain, mais sont reconnus comme un don authentique, à accueillir avec une attitude de générosité responsable envers Dieu, source première de la vie humaine ».

Le pape voit dans ce «grand oui’ à la beauté de l’amour » également l’expression de la gratitude des parents lorsqu’ils reçoivent le don d’un enfant et lorsqu’ils savent que sa vie a pour origine un amour aussi grand et aussi accueillant ».Or, aujourd’hui, de nombreux chrétiens ont des difficultés à comprendre le message de l’Eglise, qui défend pourtant, a souligné le pape, « la beauté de l’amour conjugal dans sa manifestation naturelle ».

La solution «technique » semble le plus souvent la plus « facile », a fait observer le pape, mais « elle cache en réalité la question de fond qui concerne le sens de la sexualité humaine, et la nécessité d’une maîtrise responsable afin que son exercice puisse devenir l’expression d’un amour personnel ».

Ainsi, la technique, fait observer Benoît XVI, « ne peut pas remplacer la maturation de la liberté lorsque ce qui est en jeu c’est l’amour », et même « la raison ne suffit pas : il faut que ce soit le cœur qui voie ».

« Seuls les yeux du cœur réussissent à saisir les exigences propres à un grand amour capable d’embrasser la totalité de l’être humain ».

Pour ce qui est des circonstances qui conduisent les couples à espacer la naissance des enfants, ou à les suspendre, le pape explique que « la connaissance des rythmes naturels de la fertilité de la femme devient importante pour la vie des conjoints ». Ces méthodes, continue le message, permettent aux couples de « gérer ce que le Créateur a sagement inscrit dans la nature humaine sans troubler la signification intégrale du don sexuel ».

Ces méthodes, souligne le pape, « respectent la pleine vérité de l’amour » et requièrent « une maturité dans l’amour qui n’est pas immédiate mais comporte un dialogue et une écoute réciproque et une maîtrise singulière de l’impulsion sexuelle sur un chemin de croissance dans la vertu ».Le pape a salué les instituts qui, comme l’institut international Paul VI, voulu par Jean-Paul II, qui font « progresser la connaissance des méthodes » visant à la fois à « la régulation de la fertilité humaine », et à « surmonter naturellement une infertilité éventuelle ».

Dans la ligne de «Donum vitae », de Jean-Paul II, Benoît XVI souligne que beaucoup de chercheurs, « en sauvegardant pleinement la dignité de la procréation humaine », ont atteint des résultats « qui semblaient auparavant inatteignables ».Ainsi, le pape souhaite que la pastorale familiale et matrimoniale de l’Eglise sache aider les couples à comprendre « avec le cœur, le merveilleux dessein que Dieu a inscrit dans le corps humain ».Quant aux époux catholiques, ils sont appelés à être « des témoins crédibles de la beauté de l’amour ».

Pape Benoît, pour un ordination épiscopale une Homelie sur les Archanges (29.9.2007)

28 septembre, 2008

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/homilies/2007/documents/hf_ben-xvi_hom_20070929_episc-ordinations_fr.html

CHAPELLE PAPALE POUR L’ORDINATION ÉPISCOPALE DE
SIX NOUVEAUX ÉVÊQUES

HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI Basilique Vaticane
Samedi 29 septembre 2007

Chers frères et soeur,

Nous sommes rassemblés autour de l’autel du Seigneur en une circonstance dans le même temps solennelle et heureuse: l’ordination épiscopale de six nouveaux Evêques, appelés à exercer différentes tâches au service de l’unique Eglise du Christ. Il s’agit de Mgr Mieckzyslaw Mokrzycki, Mgr Francesco Brugnaro, Mgr Gianfranco Ravasi, Mgr Tommaso Caputo, Mgr Sergio Pagano, Mgr Vincenzo Di Mauro. J’adresse à tous mon salut cordial avec un baiser fraternel. Un salut particulier va à Mgr Mokrzycki qui, avec l’actuel Cardinal Stanislaw Dziwisz, a servi pendant de nombreuses années le Saint-Père Jean-Paul II comme secrétaire et qui ensuite, après mon élection comme Successeur de Pierre, a également été mon secrétaire avec une grande humilité, compétence et dévouement. Avec lui, je salue l’ami du Pape Jean-Paul II, le Cardinal Marian Jaworski, à qui Mgr Mokrzycki apportera son aide en tant que Coadjuteur. Je salue en outre les Evêques latins d’Ukraine, qui sont ici à Rome pour leur visite « ad limina Apostolorum ». Ma pensée va également aux Evêques grecs-catholiques – j’ai rencontré certains d’eux lundi dernier -, et à l’Eglise orthodoxe d’Ukraine. Je souhaite à tous les bénédictions du Ciel pour leurs efforts qui visent à garder active dans leur terre la force guérissante et corroborante de l’Evangile du Christ et à la transmettre aux futures générations.

Nous célébrons cette ordination épiscopale en la fête des trois Archanges qui sont mentionnés par leur nom dans l’Ecriture: Michel, Gabriel et Raphaël. Cela nous rappelle à l’esprit que dans l’antique Eglise – déjà dans l’Apocalypse – les Evêques étaient qualifiés d’ »anges » de leur Eglise, exprimant de cette façon un lien intime entre le ministère de l’Evêque et la mission de l’Ange. A partir de la tâche de l’Ange, on peut comprendre le service de l’Evêque. Mais qu’est-ce qu’un Ange? L’Ecriture Sainte et la Tradition de l’Eglise nous laissent entrevoir deux aspects. D’une part, l’Ange est une créature qui se trouve devant Dieu, orientée de tout son être vers Dieu. Les trois noms des Archanges finissent par le mot « El », qui signifie Dieu. Dieu est inscrit dans leurs noms, dans leur nature. Leur véritable nature est l’existence en vue de Lui et pour Lui. C’est précisément ainsi que s’explique également le deuxième aspect qui caractérise les Anges: ils sont les messagers de Dieu. Ils apportent Dieu aux hommes, ils ouvrent le ciel et ouvrent ainsi la terre. C’est précisément parce qu’ils sont auprès de Dieu, qu’ils peuvent être également très près de l’homme. En effet, Dieu est plus intime à chacun de nous que nous ne le sommes à nous-mêmes. Les Anges parlent à l’homme de ce qui constitue son être véritable, de ce qui dans sa vie est si souvent couvert et enseveli. Ils l’appellent à rentrer en lui-même, en le touchant de la part de Dieu. Dans ce sens également, nous qui sommes des êtres humains devrions toujours à nouveau devenir des anges les uns pour les autres – des anges qui nous détournent des voies de l’erreur et qui nous orientent toujours à nouveau vers Dieu. Si l’Eglise antique appelle les Evêques « anges » de leur Eglise, elle entend dire précisément cela: les Evêques eux-mêmes doivent être des hommes de Dieu, ils doivent vivre orientés vers Dieu. « Multum orat pro populo » – « Prie beaucoup pour le peuple », dit le Bréviaire de l’Eglise à propos des saints Evêques. L’Evêque doit être un orant, quelqu’un qui intercède pour les hommes auprès de Dieu. Plus il le fait, plus il comprend également les personnes qui lui sont confiées et il peut devenir un ange pour eux – un messager de Dieu, qui les aide à trouver leur véritable nature, elles-mêmes, et à vivre l’idée que Dieu a d’elles.

Tout cela devient encore plus clair si nous regardons à présent les figures des trois Archanges dont l’Eglise célèbre la fête aujourd’hui. Il y a tout d’abord Michel. Nous le rencontrons dans l’Ecriture Sainte, en particulier dans le Livre de Daniel, dans la Lettre de l’Apôtre saint Jude Thaddée et dans l’Apocalypse. Dans ces textes, on souligne deux fonctions de cet Archange. Il défend la cause de l’unicité de Dieu contre la présomption du dragon, du « serpent antique », comme le dit Jean. C’est la tentative incessante du serpent de faire croire aux hommes que Dieu doit disparaître, afin qu’ils puissent devenir grands; que Dieu fait obstacle à notre liberté et que nous devons donc nous débarrasser de Lui. Mais le dragon n’accuse pas seulement Dieu. L’Apocalypse l’appelle également « l’accusateur de nos frères, lui qui les accusait jour et nuit devant notre Dieu » (12, 10). Celui qui met Dieu de côté, ne rend pas l’homme plus grand, mais lui ôte sa dignité. L’homme devient alors un produit mal réussi de l’évolution. Celui qui accuse Dieu, accuse également l’homme. La foi en Dieu défend l’homme dans toutes ses faiblesses et ses manquements: la splendeur de Dieu resplendit sur chaque individu. La tâche de l’Evêque, en tant qu’homme de Dieu, est de faire place à Dieu dans le monde contre les négations et de défendre ainsi la grandeur de l’homme. Et que pourrait-on dire et penser de plus grand sur l’homme que le fait que Dieu lui-même s’est fait homme? L’autre fonction de Michel, selon l’Ecriture, est celle de protecteur du Peuple de Dieu (cf. Dn 10, 21; 12, 1). Chers amis, vous êtes vraiment les « anges gardiens » des Eglises qui vous seront confiées! Aidez le Peuple de Dieu, que vous devez précéder dans son pèlerinage, à trouver la joie dans la foi et à apprendre le discernement des esprits: à accueillir le bien et à refuser le mal, à rester et à devenir toujours plus, en vertu de l’espérance de la foi, des personnes qui aiment en communion avec le Dieu-Amour.

Nous rencontrons l’Archange Gabriel, en particulier dans le précieux récit de l’annonce à Marie de l’incarnation de Dieu, comme nous le rapporte saint Luc (1, 26-39). Gabriel est le messager de l’incarnation de Dieu. Il frappe à la porte de Marie et, par son intermédiaire, Dieu demande à Marie son « oui » à la proposition de devenir la Mère du Rédempteur: de donner sa chair humaine au Verbe éternel de Dieu, au Fils de Dieu. Le Seigneur frappe à plusieurs reprises à la porte du cśur humain. Dans l’Apocalypse, il dit à l’ »ange » de l’Eglise de Laodicée et, à travers lui, aux hommes de tous les temps: « Voici que je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui; je prendrai mon repas avec lui, et lui avec moi » (3, 20). Le Seigneur se trouve à la porte – à la porte du monde et à la porte de chaque cśur en particulier. Il frappe pour qu’on le laisse entrer: l’incarnation de Dieu, son devenir chair doit continuer jusqu’à la fin des temps. Tous doivent être réunis dans le Christ en un seul corps: c’est ce que nous disent les grands hymnes sur le Christ dans la Lettre aux Ephésiens et dans celle aux Colossiens. Le Christ frappe. Aujourd’hui aussi, Il a besoin de personnes qui, pour ainsi dire, mettent à sa disposition leur propre chair, qui lui donnent la matière du monde et de leur vie, servant ainsi à l’unification entre Dieu et le monde, à la réconciliation de l’univers. Chers amis, votre tâche est de frapper au nom du Christ aux cśurs des hommes. En entrant vous-mêmes en union avec le Christ, vous pourrez également assumer la fonction de Gabriel: apporter l’appel du Christ aux hommes.

Saint Raphaël nous est présenté, en particulier dans le livre de Tobie, comme l’Ange auquel est confiée la tâche de guérir. Lorsque Jésus envoie ses disciples en mission, la tâche de l’annonce de l’Evangile s’accompagne également toujours de celle de guérir. Le Bon Samaritain, en accueillant et en guérissant la personne blessée qui gît au bord de la route, devient sans paroles un témoin de l’amour de Dieu. Cet homme blessé, qui a besoin d’être guéri, c’est chacun de nous. Annoncer l’Evangile signifie déjà en soi guérir, car l’homme a surtout besoin de la vérité et de l’amour. Dans le Livre de Tobie, on rapporte deux tâches emblématiques de guérison de l’Archange Raphaël. Il guérit la communion perturbée entre l’homme et la femme. Il guérit leur amour. Il chasse les démons qui, toujours à nouveau, déchirent et détruisent leur amour. Il purifie l’atmosphère entre les deux et leur donne la capacité de s’accueillir mutuellement pour toujours. Dans le récit de Tobie, cette guérison est rapportée à travers des images légendaires. Dans le Nouveau Testament, l’ordre du mariage, établi dans la création et menacé de multiples manières par le péché, est guéri par le fait que le Christ l’accueille dans son amour rédempteur. Il fait du mariage un sacrement: son amour, qui est monté pour nous sur la croix, est la force qui guérit et qui, au sein de toutes les confusions, donne la capacité de la réconciliation, purifie l’atmosphère et guérit les blessures. La tâche de conduire les hommes toujours à nouveau vers la force réconciliatrice de l’amour du Christ est confiée au prêtre. Il doit être « l’ange » qui guérit et qui les aide à ancrer leur amour au sacrement et à le vivre avec un engagement toujours renouvelé à partir de celui-ci. En deuxième lieu, le Livre de Tobie parle de la guérison des yeux aveugles. Nous savons tous combien nous sommes aujourd’hui menacés par la cécité à l’égard de Dieu. Comme le danger est grand que, face à tout ce que nous savons sur les choses matérielles et que nous sommes en mesure de faire avec celles-ci, nous devenions aveugles à la lumière de Dieu! Guérir cette cécité à travers le message de la foi et le témoignage de l’amour, est le service de Raphaël confié jour après jour au prêtre et, de manière particulière, à l’Evêque. Ainsi, nous sommes spontanément portés à penser également au sacrement de la Réconciliation, au Sacrement de la Pénitence qui, au sens le plus profond du terme, est un sacrement de guérison. En effet, la véritable blessure de l’âme, le motif de toutes nos autres blessures, est le péché. Et ce n’est que s’il existe un pardon en vertu de la puissance de Dieu, en vertu de la puissance de l’amour du Christ, que nous pouvons être guéris, que nous pouvons être rachetés.

« Demeurez dans mon amour », nous dit aujourd’hui le Seigneur dans l’Evangile (Jn 15, 9). A l’heure de l’ordination épiscopale, il vous le dit à vous de manière particulière, chers amis! Demeurez dans cette amitié avec Lui, pleine de l’amour qu’en cette heure, Il vous donne à nouveau! Alors, votre vie portera du fruit – un fruit qui demeure (Jn 15, 16). Chers frères, afin que cela vous soit donné, prions tous pour vous en cette heure. Amen.

Audience du mercredi 24 septembre : saint Paul et les apôtres

27 septembre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18898?l=french

Audience du mercredi 24 septembre : saint Paul et les apôtres

Texte intégral

ROME, Mercredi 24 septembre 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse prononcée ce mercredi par le pape Benoît XVI au cours de l’audience générale, place Saint-Pierre.

* * *

Chers frères et soeurs

Je voudrais parler aujourd’hui des relations entre saint Paul et les Apôtres qui l’avaient précédé à la suite de Jésus. Ces relations furent toujours marquées par un profond respect et par une franchise qui, chez saint Paul, dérive de la défense de la vérité de l’Evangile. Même s’il était, dans les faits, contemporain de Jésus de Nazareth, il n’eut jamais l’occasion de le rencontrer, au cours de sa vie publique. C’est pourquoi, après avoir été foudroyé sur le chemin de Damas, il ressentit le besoin de consulter les premiers disciples du Maître, qui avaient été choisis par Lui pour en porter l’Evangile jusqu’aux extrémités de la terre.

Dans la Lettre aux Galates, Paul rédige un compte-rendu important sur les contacts entretenus avec plusieurs des Douze : avant tout avec Pierre qui avait été choisi comme Kephas, le terme araméen qui signifie le roc sur lequel on édifiait l’Eglise (cf. Ga 1, 18), avec Jacques, « le frère du Seigneur » (cf. Ga 1, 19), et avec Jean (cf. Ga 2, 9): Paul n’hésite pas à les reconnaître comme « les colonnes » de l’Eglise. La rencontre avec Céphas (Pierre), qui eut lieu à Jérusalem, est particulièrement significative : Paul resta chez lui pendant 15 jours pour « le consulter » (cf. Ga 1, 19), c’est-à-dire pour être informé sur la vie terrestre du Ressuscité, qui l’avait « saisi » sur la route de Damas et qui était en train de lui changer l’existence, de manière radicale : de persécuteur à l’égard de l’Eglise de Dieu, il était devenu évangélisateur de cette foi dans le Messie crucifié et Fils de Dieu, que par le passé il avait cherché à détruire (cf. Ga 1, 23).

Quel genre d’informations Paul obtint-il sur Jésus Christ pendant les trois années qui suivirent la rencontre de Damas ? Dans la première Lettre aux Corinthiens nous pouvons noter deux passages, que Paul a découverts à Jérusalem, et qui avaient déjà été formulés comme éléments centraux de la tradition chrétienne, tradition constitutive. Il les transmet verbalement, tels qu’il les a reçus, avec une formule très solennelle : « Je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu ». Il insiste sur la fidélité à ce qu’il a lui-même reçu et qu’il transmet fidèlement aux nouveaux chrétiens. Ce sont des éléments constitutifs et qui concernent l’Eucharistie et la Résurrection ; il s’agit de passages déjà formulés dans les années trente. Nous arrivons ainsi à la mort, la sépulture au cśur de la terre et la résurrection de Jésus (cf. 1 Co 15, 3-4). Prenons l’un et l’autre. Les paroles de Jésus au cours de la Dernière Cène (cf. 1 Co 11, 23-25) sont réellement pour Paul le centre de la vie de l’Eglise : l’Eglise s’édifie à partir de ce centre, en devenant ainsi elle-même. Outre ce centre eucharistique, dans lequel naît toujours à nouveau l’Eglise – également pour toute la théologie de saint Paul, pour toute sa pensée – ces paroles ont eu une profonde répercussion sur la relation personnelle de Paul avec Jésus. D’une part, elles attestent que l’Eucharistie éclaire la malédiction de la croix, la transformant en bénédiction (Ga 3, 13-14) et, de l’autre, elles expliquent la portée de la mort et de la résurrection de Jésus. Dans ses Lettres, le « pour vous » de l’institution eucharistique devient le « pour moi » (Ga 2, 20), personnalisant, sachant qu’en ce « vous » il était lui-même connu et aimé de Jésus, et d’autre part « pour tous » (2 Co 5, 14) : ce « pour vous » devient « pour moi » et « pour l’Eglise (Ep 5, 25) », c’est-à-dire également « pour tous » du sacrifice expiatoire de la croix (cf. Rm 3, 25). A partir de l’Eucharistie et dans celle-ci, l’Eglise s’édifie et se reconnaît comme « Corps du Christ » (1 Co 12, 27), nourri chaque jour par la puissance de l’Esprit du Ressuscité.

L’autre texte sur la Résurrection nous transmet à nouveau la même formule de fidélité. Saint Paul écrit : « Avant tout, je vous ai transmis ceci, que j’ai moi-même reçu : le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Ecritures, et il a été mis au tombeau ; il est ressuscité le troisième jour conformément aux Ecritures, et il est apparu à Pierre, puis aux Douze » (1 Co 15, 3-5). Dans cette tradition transmise à Paul revient également ce « pour nos péchés », qui met l’accent sur le don que Jésus a fait de lui-même au Père, pour nous libérer des péchés et de la mort. De ce don de soi, Paul tirera les expressions les plus captivantes et fascinantes de notre relation avec le Christ : « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu » (2 Co 5, 21) ; « Vous connaissez en effet la générosité de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté » (2 Co 8, 9). Il vaut la peine de rappeler le commentaire par lequel celui qui était alors un moine augustin, Martin Luther, accompagnait ces expressions paradoxales de Paul : « Tel est le mystère grandiose de la grâce divine envers les pécheurs : que par un admirable échange nos péchés ne sont plus les nôtres, mais du Christ, et la justice du Christ n’est plus du Christ, mais la nôtre » (Commentaire sur les Psaumes de 1513-1515). Et ainsi nous sommes sauvés.

Dans le kerygma original, transmis de bouche à oreille, il faut souligner l’usage du verbe « il est ressuscité », au lieu de « il fut ressuscité » qu’il aurait été plus logique d’utiliser, en continuité avec « il mourut.. et fut enseveli ». La forme verbale est choisie pour souligner que la résurrection du Christ influence jusqu’à l’heure actuelle l’existence des croyants : nous pouvons le traduire par « il est ressuscité et continue à vivre » dans l’Eucharistie et dans l’Eglise. Ainsi toutes les Ecritures rendent témoignage de la mort et de la résurrection du Christ car – comme l’écrira Ugo di San Vittore – « toute la divine Ecriture constitue un unique livre et cet unique livre est le Christ, car toute l’Ecriture parle du Christ et trouve dans le Christ son accomplissement » (De arca Noe, 2, 8). Si saint Ambroise de Milan peut dire que « dans l’Ecriture nous lisons le Christ », c’est parce que l’Eglise des origines a relu toutes les Ecritures d’Israël en partant du Christ et en revenant à Lui.

L’énumération des apparitions du Ressuscité à Céphas, aux Douze, à plus de cinq cent frères et à Jacques se termine par la mention de l’apparition personnelle, reçue par Paul sur le chemin de Damas : « Et en tout dernier lieu, il est même apparu à l’avorton que je suis » (1 Co 15, 8). Ayant persécuté l’Eglise de Dieu, il exprime dans cette confession son indignité à être considéré apôtre, au même niveau que ceux qui l’ont précédé : mais la grâce de Dieu en lui n’a pas été vaine (1 Co 15, 10). C’est pourquoi l’affirmation puissante de la grâce divine unit Paul aux premiers témoins de la résurrection du Christ : « Bref, qu’il s’agisse de moi ou des autres, voilà notre message, et voilà notre foi » (1 Co 15, 11). L’identité et le caractère unique de l’Evangile sont importants : aussi bien eux que moi prêchons la même foi, le même Evangile de Jésus Christ mort et ressuscité qui se donne dans la Très Sainte Eucharistie.

L’importance qu’il confère à cette Tradition vivante de l’Eglise, qu’il transmet à ses communautés, démontre à quel point est erronée la vision de ceux qui attribuent à Paul l’invention du christianisme : avant de porter l’évangile de Jésus Christ, son Seigneur, il l’a rencontré sur le chemin de Damas et il l’a fréquenté dans l’Eglise, en observant sa vie chez les Douze et chez ceux qui l’ont suivi sur les routes de la Galilée. Dans les prochaines catéchèses, nous aurons l’opportunité d’approfondir les contributions que Paul a apportées à l’Eglise des origines ; mais la mission reçue par le Ressuscité en vue d’évangéliser les païens a besoin d’être confirmée et garantie par ceux qui lui donnèrent leur main droite, ainsi qu’à Barnabé, en signe d’approbation de leur apostolat et de leur évangélisation et d’accueil dans l’unique communion de l’Eglise du Christ (cf. Ga 2, 9). On comprend alors que l’expression « nous avons compris le Christ à la manière humaine » ( 2 Co 5, 16) ne signifie pas que son existence terrestre ait eu une faible importance pour notre maturation dans la foi, mais qu’à partir du moment de sa Résurrection, notre façon de nous rapporter à Lui se transforme. Il est, en même temps, le Fils de Dieu, « né de la race de David ; selon l’Esprit qui sanctifie, il a été établi dans sa puissance de Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts, lui, Jésus Christ, notre Seigneur », comme le rappellera Paul au début de la Lettre aux Romains (1, 3-4).

Plus nous cherchons à nous mettre dans les traces de Jésus de Nazareth sur les routes de la Galilée, plus nous pouvons comprendre qu’il a pris en charge notre humanité, la partageant en tout, hormis le péché. Notre foi ne naît pas d’un mythe, ni d’une idée, mais bien de la rencontre avec le Ressuscité, dans la vie de l’Eglise.

Puis le pape a proposé une synthèse de sa catéchèse, en français :

Chers Frères et Sśurs,

Les rapports entre saint Paul et les Apôtres qui ont suivi Jésus, ont toujours été marqués par le respect et par cette franchise avec laquelle saint Paul défendait la vérité de l’Évangile. Bien que contemporain de Jésus de Nazareth, il ne l’a jamais rencontré durant sa vie terrestre. C’est pourquoi, après la rencontre foudroyante du chemin de Damas, il a éprouvé le besoin de consulter les premiers disciples du Maître, choisis par Lui pour aller porter l’Évangile jusqu’aux limites du monde. Afin de s’informer sur la vie publique de Jésus, il vient à Jérusalem rencontrer Pierre, Jacques et Jean, « les colonnes de l’Église ».

Parmi tous les éléments qu’il recueille, les paroles de la Cène ont un impact important sur sa relation avec Jésus Christ, car, d’une part, elles montrent que l’Eucharistie éclaire la malédiction de la Croix, faisant d’elle une bénédiction, et, d’autre part, elles expliquent la portée de la mort et de la résurrection de Jésus. Paul accorde beaucoup d’importance à la Tradition vivante de l’Église. Avant d’annoncer lui-même Jésus Christ, son Seigneur, il l’a rencontré sur le chemin de Damas et il l’a fréquenté dans l’Église, regardant les Douze et ceux qui l’ont suivi sur les routes de Galilée vivre de sa vie. Notre foi ne naît pas d’un mythe, ni d’une idée, mais bien d’une rencontre avec le Ressuscité, dans la vie de l’Église.

Je suis heureux de vous accueillir, chers pèlerins francophones, en particulier les pèlerins du Diocèse de Chartres avec leur Évêque Monseigneur Michel Pansard, ainsi que les pèlerins du Diocèse de Tournai, avec leur Évêque Monseigneur Guy Harpigny. A la suite de saint Paul, prions afin que le Seigneur envoie beaucoup d’ouvriers apostoliques dans sa vigne. Avec ma Bénédiction Apostolique.

Evêque de Montauban: « Benoît XVI ou la foi tranquille », par Mgr Bernard Ginoux

21 septembre, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18864?l=french

« Benoît XVI ou la foi tranquille », par Mgr Bernard GinouxEvêque de Montauban

ROME, Dimanche 21 septembre 2008 (ZENIT.org) – « Pendant quatre jours le Saint-Père Benoît XVI a porté à la France l’attention bienveillante, la sollicitude de ‘celui qui vient au nom du Seigneur’. L’Eglise catholique peut se réjouir de ce voyage pastoral et remercier le Seigneur », commente Mgr Bernard Ginous, évêque de Montauban. Nous publions ci-dessous le texte de son commentaire.

« Cette venue en France était motivée par le jubilé de Lourdes : le cent cinquantième anniversaire des apparitions de la Vierge Marie à Bernadette. Pèlerin, le Saint-Père l’a été en accomplissant les quatre étapes de la démarche jubilaire, humblement, comme chaque pèlerin peut le faire.

Mais, auparavant, il avait été accueilli par Paris. Reconnu en tant que chef d’un état, la Cité du Vatican, ce qui justifie la qualité de la réception, il est aussi reconnu pour ce qu’il est réellement : le messager qui vient pour faire partager les richesses de la foi chrétienne. A la suite de l’apôtre Pierre il est porteur de la Bonne Nouvelle : Dieu aime chacun d’entre nous. Tant à Paris qu’à Lourdes c’est en rappelant que la Parole de Dieu est notre appui, notre force qu’il redit la foi dans le Christ mort et ressuscité. Le mois prochain le synode des évêques, c’est-à-dire l’Assemblée des évêques désignés ou élus venant du monde entier va travailler autour du Saint-Père ce thème de la Parole de Dieu et nous pourrons ensuite dans nos diocèses mettre à profit cette réflexion.

Devant les représentants du monde de la culture le Saint-Père a développé ce que représentait pour la société actuelle les fondements d’une culture qui « cherchait Dieu ». Le monachisme était ce chemin de rencontre avec Dieu qui se révèle aux hommes. Cette culture de la vérité est un appel à fuir les idoles qui détournent l’homme contemporain de la recherche du bonheur de vivre avec Dieu. Ce bonheur était celui que la Vierge Marie à Lourdes promit à Bernadette ; non pas le bonheur de la terre mais le bonheur du ciel.Comme pèlerin à Lourdes

En venant comme pèlerin à Lourdes Benoît XVI nous invitait à nous tourner vers la Vierge Marie, en ce lieu d’une « extraordinaire proximité entre le ciel et la terre » pour que, par Marie, la lumière du Christ éclaire notre route.

Le dimanche 14 septembre la fête de la Croix Glorieuse donnait au Saint-Père l’occasion de conduire son homélie à partir du mystère de la croix présent à toute vie, ce premier signe que donne Marie dans sa rencontre avec Bernadette. Cette « synthèse de toute notre foi » dira Benoît XVI nous invitant ainsi à faire ce geste avec grande délicatesse. C’est aussi par ce signe que commence la méditation du chapelet que nous prions parce qu’elle est une prière « évangélique ».

Aux évêques le pape a redit sa confiance, les a « confirmés dans la foi » et sans alarmisme a cependant pointé des difficultés d’aujourd’hui pour notre pays : le manque de vocations, la dégradation de la famille, la place de l’Eglise catholique dans la société française. Chaque évêque trouve là parole de réconfort et de soutien.

Enfin, le dernier jour Benoît XVI se faisait proche des personnes malades et handicapées. Au cours de la messe sur l’esplanade du Rosaire il a donné le sacrement des malades à dix personnes et son homélie a invité chacun à contempler au cśur de l’épreuve « le sourire de Marie » où se reflète notre « dignité éminente d’enfants de Dieu ». Avec tendresse et bienveillance le Saint-Père a évoqué les larmes de Marie, sa souffrance, sa douleur au pied de la croix et ce sourire qu’elle fait connaître à Bernadette, reflet de l’amour de Dieu.

Je suis heureux d’avoir participé à ce pèlerinage dans la foi durant les journées de Lourdes avec tous les évêques de France et quelques évêques d’autres pays. Les médias commentent allègrement les propos du pape prétendant tantôt qu’il a fait la leçon à la France, tantôt qu’il a durci ou assoupli telle ou telle attitude de l’Eglise catholique. Tout cela est vain. Le Saint-Père est venu sereinement prier et rencontrer ceux qui sont ses frères et ses sś

urs dans la foi. Il nous a permis de vivre une étape heureuse auprès de Marie. Beaucoup sont venus partager ce moment de paix. Que ce moment nous donne la force de continuer paisiblement dans la confiance notre chemin de lumière

Mgr Bernard Ginoux
Evêque de Montauban

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