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LA CORPORALITÉ DANS LA PENSÉE ET L’ART DU JUDAÏSME – TATOUAGES SUR LA CHAIR ET L’ÂME

27 novembre, 2019

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Marc Chagall « Over the town »

LA CORPORALITÉ DANS LA PENSÉE ET L’ART DU JUDAÏSME – TATOUAGES SUR LA CHAIR ET L’ÂME

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Le 23 mai, l’exposition du Linceul se terminera à Turin. Au lieu de cela, l’exposition – organisée par Imago Veritatis et organisée par Timothy Verdon – se poursuit jusqu’au 1er août à la Venaria Reale – « Jésus. Le corps, le visage dans l’art ». À partir du catalogue (Cinisello Balsamo, Silvana Editoriale, 2010, pages 336, euro 35), nous publions presque intégralement l’essai écrit par l’Ambassadeur d’Israël près le Saint-Siège.

par Mordechay Lewy
La corporalité dans le judaïsme, par opposition à la spiritualité dans le christianisme, a fait l’objet de nombreuses controverses pendant des siècles, se terminant parfois de manière désastreuse pour les juifs. En écrivant cet essai, je n’ai pas l’intention de raviver le cercle des polémiques. Au contraire, je voudrais mettre en lumière certains aspects susceptibles de réduire la polarisation créée au cours des siècles. Ni le judaïsme ni le christianisme n’ont toujours adhéré pleinement à la corporalité ou à la spiritualité. Nous trouvons parfois des juifs qui développent leur doctrine en adoptant la philosophie hellénistique, comme par exemple Philon d’Alexandrie, ou même des conceptions aristotéliciennes de la vie après la mort, telles que Maïmonide. La Qabbalah juive a développé un concept très corporel de Dieu, y compris l’idée de réincarnation de l’âme. La plupart des chrétiens ont compris que Dieu était une entité corporelle en adoptant l’idée de l’incarnation, du Verbe incarné. L’idée de la transsubstantiation a contribué au culte deLe Corpus Christi a été créé en 1264. L’art chrétien est devenu corporel lorsque des peintures plus naturalistes ont été nécessaires pour diffuser la nouvelle doctrine. Cependant, tout en empruntant, Juifs et Chrétiens sont restés fidèles à leur propre vérité.
L’alliance de Dieu a été stipulée non seulement avec la nation juive présente physiquement dans le Sinaï, mais également avec les générations futures. L’arche d’abord, et le temple, ensuite, étaient considérés comme la demeure de Dieu.À partir de la destruction du deuxième temple, la présence divine s’est dispersée parmi le peuple juif; dans le Talmud, il est appelé Shekhina. Le texte écrit est devenu l’instrument de l’omniprésence du divin. Les offres matérielles ont été sublimées par des mots et des prières quotidiennes. Cette idée de l’omniprésence divine est bien adaptée au concept juif de Dieu invisible, dépourvu de corps ou de corporéité.
Parmi les résumés des articles de foi, les treize principes écrits par Maïmonide ont toujours fait l’objet d’une grande considération. Les trois premiers sont pertinents: « Que le Dieu vivant soit loué et loué. Il existe et son existence n’a pas de limite de temps »; « Il est un et il n’y en a pas d’autre aussi unique que son unité. Son unité est impénétrable et infinie »; « Il n’a pas de forme corporelle et n’est pas un corps. Rien ne peut être comparé à sa sainteté. Dieu est un, il est invisible et omniprésent et n’a pas de corporalité. »
Les princes de Maïmonide ont provoqué une rupture dans le monde rabbinique médiéval. Un de ses premiers critiques, proche des milieux kabbalistiques, fut le rabbin Moïse ben Hasdai Taku, qui n’accepta pas l’interprétation allégorique donnée par Maïmonide du langage anthropomorphique avec lequel le texte biblique du Pentateuque attribue des voix à Dieu. Pour Rabbi Moïse, la puissance de Dieu est infinie et il peut se « réduire », apparaître de manière inattendue et de même produire des sons ou des bruits à volonté. Le judaïsme continue de considérer Dieu comme invisible et omniprésent et n’a jamais soutenu l’idée d’une réincarnation de l’âme ( Gilgul Neshamot), en effet il les a complètement rejetés. Avec l’émergence de l’impact de la Kabbale entre le XIIe et le XIIIe siècle, l’idée de la réincarnation de l’âme est devenue une partie du mysticisme juif.
L’attitude différente à l’égard de l’incarnation dans le judaïsme et le christianisme trouve ses racines dans la manière d’interpréter la création de l’humanité. Le concept moniste de la créature humaine, selon lequel l’âme et le corps étaient créés comme une unité, revêtait une importance capitale pour le judaïsme. Le mot hébreu pour l’âme, Nefesh, est presque synonyme d’homme et de vie. En tant que tel, l’homme fait entrer son corps dans sa relation avec Dieu, d’autre part, Dieu confirme cette corporéité, y compris le corps dans son alliance par le biais de la circoncision. Le dualisme hellénistique, cependant, a également eu un impact sur divers mouvements du judaïsme durant la période du Second Temple. Philon d’Alexandrie est considéré comme son principal représentant dans la philosophie juive. Selon sa pensée, le corps est presque une prison de l’âme. Dans le Talmud, un certain Antonin apparaît à de nombreuses reprises tout en conversant avec un certain rabbin Yehuda, manifestement le président vénéré du Sanhédrin. Cela reflète une sorte de légitimation de l’échange de vues avec la philosophie grecque. C’est trop demander si Antonin représente par hasard un empereur de la dynastie des Antonins, probablement même Marc Aurèle lui-même? Certains sages juifs se sentaient menacés et opposés à l’impact hellénistique.
Un sujet de discorde était la question de la circoncision. Dans le Talmud, certains essais présentent la distinction selon laquelle, après la mort, la créature humaine se décompose en trois parties. L’âme vient de Dieu qui (re) prend ce qui lui appartient. La substance blanche provient de l’homme, et le cerveau et les os en sont constitués. La substance rouge provient de la femme et la peau, la chair et le sang en sont constitués. Les parties qui proviennent de l’homme et de la femme se décomposent après la mort. La mort sépare temporairement le corps et l’âme jusqu’à la résurrection. Il n’y a pas de description de la résurrection la plus suggestive de celle de la vision d’Ezekiel des os secs. Les Juifs ont adopté des coutumes funéraires visant précisément à préparer le corps humain à la résurrection future: le tout le corps doit être enterré le même jour, et la crémation n’est pas autorisée. L’intégrité du corps doit être maintenue malgré la décomposition mortelle, car avec la résurrection, le corps reviendra à la vie.
Qui n’a pas vu, après chaque attentat-suicide, des Juifs orthodoxes errant parmi des victimes civiles israéliennes pour rassembler des restes de corps humains, éparpillés un peu partout, même loin du site de l’attaque terroriste? En réalité, de tels efforts ne sont justifiés que si l’on croit en la résurrection du corps dans son intégralité. Mais probablement ils n’auraient pas trouvé Maïmonide, très contesté par les sages juifs de son temps (1135-1204) et même considéré comme un hérétique par certains, uniquement parce qu’il avait réclamé la séparation de l’âme du corps après la mort.
Il n’ya pas d’expression corporelle plus forte que la demande de Dieu à Abraham et à tous ses descendants de pratiquer le rite de la circoncision ( Brit Mila) sur leur chair, en signe d’alliance. Une autre contrainte corporelle, répétée quotidiennement par les juifs pratiquants, consiste à lier les phylactères ( téfilines ) au front ( totafot ) et au bras gauche, près du cœur ( ot ).
Ceci est une expression supplémentaire de la corporalité, qui inclut la propriété collective de Dieu de chaque individu juif en tant qu’esclave. Le corps du Juif mâle porte des signes permanents (circoncision) et des signes temporaires (les phylactères liés quotidiennement) comme signes mnémoniques, pour rappeler la bienveillance de Dieu depuis l’exode d’Egypte. Mais une signification anthropologique peut également être ajoutée à ces signes corporels. Ils semblent refléter l’évolution des anciens modèles socio-juridiques de la pratique du marquage des propriétés. Les anciennes cultures orientales marquaient la propriété sur les biens, qu’il s’agisse d’objets, de corps d’animaux ou de corps humains. L’état d’esclavage permanent dans les cultures mésopotamiennes était marqué par un tatouage plutôt que par une image de marque, mais la Bible ne tolérait pas de signes corporels permanents. Je crois que jetéfilinesont été introduits en remplacement; l’interdiction des marques et des tatouages ??visait à établir une distinction entre la nouvelle religion monothéiste et les cultures polythéistes de la région, a répété Maïmonide au XIIIe siècle. Cependant, la circoncision continuait à être pratiquée par les Juifs dans la mesure où seuls les peuples égyptien et cananéen étaient habitués à le faire. Il n’existe aucune preuve linguistique, ni autre, que les cultures mésopotamiennes ont pratiqué la circoncision. Par conséquent, la tradition qui voit dans la circoncision d’Abraham un héritage mésopotamien me semble douteuse; probablement quelqu’un avait intérêt à cacher l’influence de la culture égyptienne sur les juifs. L’hellénisme a très probablement hérité de la coutume babylono-persane de rejeter la circoncision et L’influence hellénistique, la pratique de la circoncision ne fut plus suivie par tous les Juifs, à tel point que la restauration du prépuce n’était pas inhabituelle. La culture gréco-romaine a rejeté la circoncision, considérée comme une mutilation de la beauté du corps.
Les mnémotechniques utilisées dans le judaïsme ancien à travers les signes du corps avaient un brillant avenir dans le christianisme médiéval. Le Nouveau Testament a donné naissance à la vision organique de la communauté en tant que corps en communion avec Jésus. L’idée de Dieu (la Parole ou Logos)) qui devient chair (c’est-à-dire qui prend une forme humaine) n’était pas étranger à la tradition hellénistique, égyptienne et mésopotamienne. En même temps, la nature divine et humaine de Jésus devint une doctrine contraignante lors du premier concile de Nicée en 325. Les premiers chrétiens adoptèrent des coutumes similaires à celles de la culture juive, mais à un niveau symbolique et non corporel. Le meilleur exemple est le baptême en tant que rite d’initiation. De la même manière que la circoncision, le baptême crée une marque indélébile, mais dans l’âme. Le contraste entre la corporalité juive et la spiritualité chrétienne a été marqué par une controverse entre les deux religions, dont la plus ancienne remonte probablement à la Michna . Rabbi Eliezer Hamodai disait dans les Maximes des Pèresque ceux qui annulent l’alliance d’Abraham « n’ont aucune part dans le monde à venir ». Saint Augustin a exprimé cette polarisation polémique, affirmant que les chrétiens ont une compréhension plus profonde de la signification spirituelle, tandis que les Juifs restent dans le royaume « inférieur » de la charalité, comprise uniquement sous sa forme physique et matérielle. Néanmoins, Augustin considérait la circoncision comme une sorte de sceau du salut. Cependant, Pietro Lombardo l’a comprise comme une simple marque, car Abraham était déjà justifié par la foi. Lombardo, s’appuyant sur Augustin, considérait la circoncision depuis Abraham comme un remède contre le péché originel, hérité de génération en génération par le biais de la concupiscence des parents.
Dans l’iconographie chrétienne depuis le XIIIe siècle, le rite de la circoncision juif apparaît souvent dans le cycle de la vie de Jésus, presque toujours sans allusions négatives. À partir du XIIIe siècle, les sentiments religieux chrétiens incluaient une corporéité émergente suivie par l’art figuratif. En conséquence, le culte des signes du corps grandit sous les formes les plus diverses, telles que la vénération du Corpus Christi , les cinq blessures de Jésus, les stigmates de saint François ou la vénération de l’ Arma Christi . L’ imitatio Christiil devint l’idéal corporel de la religiosité mystique à la fin du Moyen Âge. Le sang a changé de signification normative, contrairement à ce qui était écrit dans la Bible, dans lequel il était associé à la vie, à la pureté et à la prospérité. La Kabbale a adopté des valeurs différentes et contradictoires. Tant pour les chrétiens que pour les juifs du Moyen Âge, le corps de Dieu, et en particulier son sang, est devenu le centre d’un nouveau sens de la corporalité; Les deux cultures, comme l’écrit David Biale, partageaient le culte du sang de Dieu.
Il ne fait aucun doute que les juifs et les chrétiens des villes médiévales partageaient une société issue de la cohabitation dans un environnement urbain densément peuplé. Ils avaient appris à connaître les rites de chacun, mais, en compétition pour la bienveillance divine, cela ne suffisait pas pour réduire leur animosité. Juifs et chrétiens souventils « interprétaient » ou se moquaient mutuellement des rites, contribuant ainsi à alimenter un cycle de controverses. La seule différence était que les Juifs constituaient une minorité qui non seulement risquait leur vie, mais était également marquée de préjugés profondément enracinés.
En considérant la liturgie comme langage corporel dans une religion, on pourrait retracer les similitudes et les différences entre les gestes corporels juifs et chrétiens et leurs liturgies respectives. Dans l’acte de pénitence au début de chaque messe, les fidèles frappent trois fois le poing de la main droite sur le côté gauche de la poitrine; le même geste est principalement accompli par les Juifs Ashkénazes dans la prière quotidienne du Vidui (confession) pour chacun des vingt-quatre péchés énumérés. On ne sait pas quelle religion a adopté le geste en premier, mais il a probablement été introduit au Moyen Âge. Lorsque le rouleau de la Torah est extrait de l’arche sacrée, la communauté de la synagogue se lève. De même, lors des verbes de liturgiepour la lecture de l’Evangile, l’assemblée de l’église se lève. L’Évangile est une dignité réservée semblable à celle de la Torah, les deux sont en fait exposés en procession autour de l’autel ou de l’arche du Saint, respectivement. Alors que l’Évangile est vénéré de loin, les Juifs recherchent une proximité physique avec le rouleau de la Torah pendant la procession, l’embrassant ou le touchant avec la frange de cordes entrelacées ( Zizit ) placées aux extrémités du manteau de prière ( Tallith). La même manifestation de contact physique se produit parmi les Juifs au début et à la fin de chaque lecture d’un passage du rouleau de la Torah. Cependant, même la liturgie chrétienne a développé sa propre expression authentique de corporalité. Le carré de toile blanche sur l’autel, sur lequel sont placées les espèces eucharistiques, porte déjà le titre de caporal depuis le XIVe siècle, puisqu’il sert à envelopper le corps du Christ lors de la liturgie eucharistique. Le signe de la croix avec les doigts sur les objets, sur le corps de quelqu’un ou dans les airs a créé une grande variété de gestes liturgiques. Le baroque espagnol a réalisé des sculptures votives en bois peintes de façon si naturaliste qu’on les appelait encarnación . Cet art post-tridentin donna à la doctrine de la Parole devenue chair une très grande visibilité.
Le Pentateuque reflète déjà une attitude iconoclaste interdisant la création d’images. Les Juifs ont par la suite développé la capacité de sublimer la corporéité en immatérialité, par exemple en transformant des offrandes en prières. Les mots et les écrits canonisés ont renforcé l’aptitude à l’expression artistique non picturale. Dérivé, comme dans l’art islamique, de dessins ornementaux et de micrographies. L’instauration d’une culture presque dépourvue d’images sous la domination musulmane constituait une rupture avec la tradition gréco-romaine classique de l’expression picturale, qui dominait la Méditerranée depuis l’Antiquité. Le christianisme est allé dans d’autres directions, sublimant la spiritualité de la Parole dans l’incarnation de Dieu par Jésus. Grâce à cette corporéité, le christianisme pourrait facilement emprunter des modèles d’art pictural de la tradition gréco-romaine. Sous l’influence hellénistique, les mosaïques des synagogues de Terre Sainte reproduisaient des représentations iconographiques d’épisodes bibliques. La richesse des images bibliques dans les fresques de la synagogue Doura-Europos, du 3ème siècle, est unique.
La culture hellénistique a admis les images comme vérité, comme l’a exprimé Filostrato; Platon s’est opposé à la peinture(et les sophistes) dans le Phèdre , car aucun ne pouvait créer la vie et la vérité. À son avis, seules l’âme et sa vérité pourraient créer la vie. Les réserves platoniques contre la peinture existent également dans les traditions des hadiths musulmans . L’hostilité aux images a été globalement maintenue par les juifs et les musulmans. Dans sa polémique contre l’approche iconoclaste, Giovanni Damasceno a affirmé que, depuis que Jésus était devenu l’incarnation de la parole divine, il pouvait être représenté.
Bede le Vénérable a essayé d’harmoniserInterprétation de l’Ancien et du Nouveau Testament l’un comme préfiguration de l’autre. L’émergence de la corporalité dans l’art chrétien était presque une nécessité didactique. Cette approche fondamentale du catholicisme favorable à l’image n’est pas identique à l’attitude iconophilique byzantine (iconodule). William Durand (1220-1296) expliqua clairement qu ‘ »une chose est d’adorer une image et une autre, à travers une image, d’apprendre historiquement ce que l’on doit adorer ». Les docteurs de l’Église étaient bien conscients du fait que, dans les conflits médiévaux avec les juifs et les musulmans, le christianisme était perçu comme une idolâtrie.L’argument principal partait du principe que, si Jésus avait été une simple nature humaine, son image serait vénérée comme une idolâtrie. Si, au contraire, Jésus avait eu une nature divine, il aurait été impossible de le représenter. La nouvelle doctrine de la transsubstantiation et la vénération du Corpus Christi nécessitaient une diffusion parmi les croyants qui, sans miracles apparents, avaient du mal à les comprendre. Maïmonide, dans sa classification des cinq types d’infidélité, définit le chrétien « celui qui admet qu’il n’y a qu’un seul Dieu, mais qu’il a un corps et une forme ».
Le moyen d’expression le mieux préservé dans l’art juif médiéval est constitué par les manuscrits juifs enluminés d’origine ashkénaze (en Europe centrale et occidentale). Ce qui frappe, en les observant, ce sont les représentations figuratives des animaux et des humains. Comment concilier ce phénomène avec l’approche iconoclaste du judaïsme? Maïmonide écrit dans Mishe Torah: « Il est permis de bénéficier de figures faites par des gentils pour la décoration, mais celles faites pour le culte des idoles sont interdites ». L’opinion admise aujourd’hui est que ces manuscrits sont le produit de la collaboration entre des scribes juifs et des enlumineurs chrétiens. Les créatures, souvent bizarres et déformées, ont essentiellement répondu à la demande des clients juifs de ne pas représenter les êtres humains. En tout état de cause, tout en ne nous poussant pas plus loin que Ruth Melnikoff, nous pouvons dire que les Juifs, opposés aux images humaines, semblent fermer les yeux sur ces miniatures.Dans les manuscrits hébreux d’origine italienne ou espagnole, ce type de déformation volontaire de la figure humaine n’est pas retrouvé. J’exclus la possibilité que des peintres juifs aient été embauchés dans ces pays; Si nous considérons les normes prescrites par Maïmonide contre les idoles, la peinture et la sculpture ne pourraient être un métier pour les Juifs. Seul le processus d’assimilation au sein d’une société aimable, comme cela s’est produit dans certaines parties de l’Europe à la fin du XIXe siècle, a provoqué un changement radical. Il fallut près de huit cents ans à l’époque de Maïmonide pour que Chagall crée pour la première fois un art figuratif juif authentique.

Texte d’origine

L’opinione accettata oggigiorno è che quei manoscritti sono il prodotto della collaborazione fra scribi ebrei e miniatori cristiani.
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La corporalité dans la pensée et l’art du judaïsme
Tatouages ??sur la chair et l’âme

Le 23 mai, l’exposition du Linceul se terminera à Turin. Au lieu de cela, l’exposition – organisée par Imago Veritatis et organisée par Timothy Verdon – se poursuit jusqu’au 1er août à la Venaria Reale – « Jésus. Le corps, le visage dans l’art ». À partir du catalogue (Cinisello Balsamo, Silvana Editoriale, 2010, pages 336, euro 35), nous publions presque intégralement l’essai écrit par l’Ambassadeur d’Israël près le Saint-Siège.

par Mordechay Lewy
La corporalité dans le judaïsme, par opposition à la spiritualité dans le christianisme, a fait l’objet de nombreuses controverses pendant des siècles, se terminant parfois de manière désastreuse pour les juifs. En écrivant cet essai, je n’ai pas l’intention de raviver le cercle des polémiques. Au contraire, je voudrais mettre en lumière certains aspects susceptibles de réduire la polarisation créée au cours des siècles. Ni le judaïsme ni le christianisme n’ont toujours adhéré pleinement à la corporalité ou à la spiritualité. Nous trouvons parfois des juifs qui développent leur doctrine en adoptant la philosophie hellénistique, comme par exemple Philon d’Alexandrie, ou même des conceptions aristotéliciennes de la vie après la mort, telles que Maïmonide. La Qabbalah juive a développé un concept très corporel de Dieu, y compris l’idée de réincarnation de l’âme. La plupart des chrétiens ont compris que Dieu était une entité corporelle en adoptant l’idée de l’incarnation, du Verbe incarné. L’idée de la transsubstantiation a contribué au culte deLe Corpus Christi a été créé en 1264. L’art chrétien est devenu corporel lorsque des peintures plus naturalistes ont été nécessaires pour diffuser la nouvelle doctrine. Cependant, tout en empruntant, Juifs et Chrétiens sont restés fidèles à leur propre vérité.
L’alliance de Dieu a été stipulée non seulement avec la nation juive présente physiquement dans le Sinaï, mais également avec les générations futures. L’arche d’abord, et le temple, ensuite, étaient considérés comme la demeure de Dieu.À partir de la destruction du deuxième temple, la présence divine s’est dispersée parmi le peuple juif; dans le Talmud, il est appelé Shekhina. Le texte écrit est devenu l’instrument de l’omniprésence du divin. Les offres matérielles ont été sublimées par des mots et des prières quotidiennes. Cette idée de l’omniprésence divine est bien adaptée au concept juif de Dieu invisible, dépourvu de corps ou de corporéité.
Parmi les résumés des articles de foi, les treize principes écrits par Maïmonide ont toujours fait l’objet d’une grande considération. Les trois premiers sont pertinents: « Que le Dieu vivant soit loué et loué. Il existe et son existence n’a pas de limite de temps »; « Il est un et il n’y en a pas d’autre aussi unique que son unité. Son unité est impénétrable et infinie »; « Il n’a pas de forme corporelle et n’est pas un corps. Rien ne peut être comparé à sa sainteté. Dieu est un, il est invisible et omniprésent et n’a pas de corporalité. »
Les princes de Maïmonide ont provoqué une rupture dans le monde rabbinique médiéval. Un de ses premiers critiques, proche des milieux kabbalistiques, fut le rabbin Moïse ben Hasdai Taku, qui n’accepta pas l’interprétation allégorique donnée par Maïmonide du langage anthropomorphique avec lequel le texte biblique du Pentateuque attribue des voix à Dieu. Pour Rabbi Moïse, la puissance de Dieu est infinie et il peut se « réduire », apparaître de manière inattendue et de même produire des sons ou des bruits à volonté. Le judaïsme continue de considérer Dieu comme invisible et omniprésent et n’a jamais soutenu l’idée d’une réincarnation de l’âme ( Gilgul Neshamot), en effet il les a complètement rejetés. Avec l’émergence de l’impact de la Kabbale entre le XIIe et le XIIIe siècle, l’idée de la réincarnation de l’âme est devenue une partie du mysticisme juif.
L’attitude différente à l’égard de l’incarnation dans le judaïsme et le christianisme trouve ses racines dans la manière d’interpréter la création de l’humanité. Le concept moniste de la créature humaine, selon lequel l’âme et le corps étaient créés comme une unité, revêtait une importance capitale pour le judaïsme. Le mot hébreu pour l’âme, Nefesh, est presque synonyme d’homme et de vie. En tant que tel, l’homme fait entrer son corps dans sa relation avec Dieu, d’autre part, Dieu confirme cette corporéité, y compris le corps dans son alliance par le biais de la circoncision. Le dualisme hellénistique, cependant, a également eu un impact sur divers mouvements du judaïsme durant la période du Second Temple. Philon d’Alexandrie est considéré comme son principal représentant dans la philosophie juive. Selon sa pensée, le corps est presque une prison de l’âme. Dans le Talmud, un certain Antonin apparaît à de nombreuses reprises tout en conversant avec un certain rabbin Yehuda, manifestement le président vénéré du Sanhédrin. Cela reflète une sorte de légitimation de l’échange de vues avec la philosophie grecque. C’est trop demander si Antonin représente par hasard un empereur de la dynastie des Antonins, probablement même Marc Aurèle lui-même? Certains sages juifs se sentaient menacés et opposés à l’impact hellénistique.
Un sujet de discorde était la question de la circoncision. Dans le Talmud, certains essais présentent la distinction selon laquelle, après la mort, la créature humaine se décompose en trois parties. L’âme vient de Dieu qui (re) prend ce qui lui appartient. La substance blanche provient de l’homme, et le cerveau et les os en sont constitués. La substance rouge provient de la femme et la peau, la chair et le sang en sont constitués. Les parties qui proviennent de l’homme et de la femme se décomposent après la mort. La mort sépare temporairement le corps et l’âme jusqu’à la résurrection. Il n’y a pas de description de la résurrection la plus suggestive de celle de la vision d’Ezekiel des os secs. Les Juifs ont adopté des coutumes funéraires visant précisément à préparer le corps humain à la résurrection future: le tout le corps doit être enterré le même jour, et la crémation n’est pas autorisée. L’intégrité du corps doit être maintenue malgré la décomposition mortelle, car avec la résurrection, le corps reviendra à la vie.
Qui n’a pas vu, après chaque attentat-suicide, des Juifs orthodoxes errant parmi des victimes civiles israéliennes pour rassembler des restes de corps humains, éparpillés un peu partout, même loin du site de l’attaque terroriste? En réalité, de tels efforts ne sont justifiés que si l’on croit en la résurrection du corps dans son intégralité. Mais probablement ils n’auraient pas trouvé Maïmonide, très contesté par les sages juifs de son temps (1135-1204) et même considéré comme un hérétique par certains, uniquement parce qu’il avait réclamé la séparation de l’âme du corps après la mort.
Il n’ya pas d’expression corporelle plus forte que la demande de Dieu à Abraham et à tous ses descendants de pratiquer le rite de la circoncision ( Brit Mila) sur leur chair, en signe d’alliance. Une autre contrainte corporelle, répétée quotidiennement par les juifs pratiquants, consiste à lier les phylactères ( téfilines ) au front ( totafot ) et au bras gauche, près du cœur ( ot ).
Ceci est une expression supplémentaire de la corporalité, qui inclut la propriété collective de Dieu de chaque individu juif en tant qu’esclave. Le corps du Juif mâle porte des signes permanents (circoncision) et des signes temporaires (les phylactères liés quotidiennement) comme signes mnémoniques, pour rappeler la bienveillance de Dieu depuis l’exode d’Egypte. Mais une signification anthropologique peut également être ajoutée à ces signes corporels. Ils semblent refléter l’évolution des anciens modèles socio-juridiques de la pratique du marquage des propriétés. Les anciennes cultures orientales marquaient la propriété sur les biens, qu’il s’agisse d’objets, de corps d’animaux ou de corps humains. L’état d’esclavage permanent dans les cultures mésopotamiennes était marqué par un tatouage plutôt que par une image de marque, mais la Bible ne tolérait pas de signes corporels permanents. Je crois que jetéfilinesont été introduits en remplacement; l’interdiction des marques et des tatouages ??visait à établir une distinction entre la nouvelle religion monothéiste et les cultures polythéistes de la région, a répété Maïmonide au XIIIe siècle. Cependant, la circoncision continuait à être pratiquée par les Juifs dans la mesure où seuls les peuples égyptien et cananéen étaient habitués à le faire. Il n’existe aucune preuve linguistique, ni autre, que les cultures mésopotamiennes ont pratiqué la circoncision. Par conséquent, la tradition qui voit dans la circoncision d’Abraham un héritage mésopotamien me semble douteuse; probablement quelqu’un avait intérêt à cacher l’influence de la culture égyptienne sur les juifs. L’hellénisme a très probablement hérité de la coutume babylono-persane de rejeter la circoncision et L’influence hellénistique, la pratique de la circoncision ne fut plus suivie par tous les Juifs, à tel point que la restauration du prépuce n’était pas inhabituelle. La culture gréco-romaine a rejeté la circoncision, considérée comme une mutilation de la beauté du corps.
Les mnémotechniques utilisées dans le judaïsme ancien à travers les signes du corps avaient un brillant avenir dans le christianisme médiéval. Le Nouveau Testament a donné naissance à la vision organique de la communauté en tant que corps en communion avec Jésus. L’idée de Dieu (la Parole ou Logos)) qui devient chair (c’est-à-dire qui prend une forme humaine) n’était pas étranger à la tradition hellénistique, égyptienne et mésopotamienne. En même temps, la nature divine et humaine de Jésus devint une doctrine contraignante lors du premier concile de Nicée en 325. Les premiers chrétiens adoptèrent des coutumes similaires à celles de la culture juive, mais à un niveau symbolique et non corporel. Le meilleur exemple est le baptême en tant que rite d’initiation. De la même manière que la circoncision, le baptême crée une marque indélébile, mais dans l’âme. Le contraste entre la corporalité juive et la spiritualité chrétienne a été marqué par une controverse entre les deux religions, dont la plus ancienne remonte probablement à la Michna . Rabbi Eliezer Hamodai disait dans les Maximes des Pèresque ceux qui annulent l’alliance d’Abraham « n’ont aucune part dans le monde à venir ». Saint Augustin a exprimé cette polarisation polémique, affirmant que les chrétiens ont une compréhension plus profonde de la signification spirituelle, tandis que les Juifs restent dans le royaume « inférieur » de la charalité, comprise uniquement sous sa forme physique et matérielle. Néanmoins, Augustin considérait la circoncision comme une sorte de sceau du salut. Cependant, Pietro Lombardo l’a comprise comme une simple marque, car Abraham était déjà justifié par la foi. Lombardo, s’appuyant sur Augustin, considérait la circoncision depuis Abraham comme un remède contre le péché originel, hérité de génération en génération par le biais de la concupiscence des parents.
Dans l’iconographie chrétienne depuis le XIIIe siècle, le rite de la circoncision juif apparaît souvent dans le cycle de la vie de Jésus, presque toujours sans allusions négatives. À partir du XIIIe siècle, les sentiments religieux chrétiens incluaient une corporéité émergente suivie par l’art figuratif. En conséquence, le culte des signes du corps grandit sous les formes les plus diverses, telles que la vénération du Corpus Christi , les cinq blessures de Jésus, les stigmates de saint François ou la vénération de l’ Arma Christi . L’ imitatio Christiil devint l’idéal corporel de la religiosité mystique à la fin du Moyen Âge. Le sang a changé de signification normative, contrairement à ce qui était écrit dans la Bible, dans lequel il était associé à la vie, à la pureté et à la prospérité. La Kabbale a adopté des valeurs différentes et contradictoires. Tant pour les chrétiens que pour les juifs du Moyen Âge, le corps de Dieu, et en particulier son sang, est devenu le centre d’un nouveau sens de la corporalité; Les deux cultures, comme l’écrit David Biale, partageaient le culte du sang de Dieu.
Il ne fait aucun doute que les juifs et les chrétiens des villes médiévales partageaient une société issue de la cohabitation dans un environnement urbain densément peuplé. Ils avaient appris à connaître les rites de chacun, mais, en compétition pour la bienveillance divine, cela ne suffisait pas pour réduire leur animosité. Juifs et chrétiens souventils « interprétaient » ou se moquaient mutuellement des rites, contribuant ainsi à alimenter un cycle de controverses. La seule différence était que les Juifs constituaient une minorité qui non seulement risquait leur vie, mais était également marquée de préjugés profondément enracinés.
En considérant la liturgie comme langage corporel dans une religion, on pourrait retracer les similitudes et les différences entre les gestes corporels juifs et chrétiens et leurs liturgies respectives. Dans l’acte de pénitence au début de chaque messe, les fidèles frappent trois fois le poing de la main droite sur le côté gauche de la poitrine; le même geste est principalement accompli par les Juifs Ashkénazes dans la prière quotidienne du Vidui (confession) pour chacun des vingt-quatre péchés énumérés. On ne sait pas quelle religion a adopté le geste en premier, mais il a probablement été introduit au Moyen Âge. Lorsque le rouleau de la Torah est extrait de l’arche sacrée, la communauté de la synagogue se lève. De même, lors des verbes de liturgiepour la lecture de l’Evangile, l’assemblée de l’église se lève. L’Évangile est une dignité réservée semblable à celle de la Torah, les deux sont en fait exposés en procession autour de l’autel ou de l’arche du Saint, respectivement. Alors que l’Évangile est vénéré de loin, les Juifs recherchent une proximité physique avec le rouleau de la Torah pendant la procession, l’embrassant ou le touchant avec la frange de cordes entrelacées ( Zizit ) placées aux extrémités du manteau de prière ( Tallith). La même manifestation de contact physique se produit parmi les Juifs au début et à la fin de chaque lecture d’un passage du rouleau de la Torah. Cependant, même la liturgie chrétienne a développé sa propre expression authentique de corporalité. Le carré de toile blanche sur l’autel, sur lequel sont placées les espèces eucharistiques, porte déjà le titre de caporal depuis le XIVe siècle, puisqu’il sert à envelopper le corps du Christ lors de la liturgie eucharistique. Le signe de la croix avec les doigts sur les objets, sur le corps de quelqu’un ou dans les airs a créé une grande variété de gestes liturgiques. Le baroque espagnol a réalisé des sculptures votives en bois peintes de façon si naturaliste qu’on les appelait encarnación . Cet art post-tridentin donna à la doctrine de la Parole devenue chair une très grande visibilité.
Le Pentateuque reflète déjà une attitude iconoclaste interdisant la création d’images. Les Juifs ont par la suite développé la capacité de sublimer la corporéité en immatérialité, par exemple en transformant des offrandes en prières. Les mots et les écrits canonisés ont renforcé l’aptitude à l’expression artistique non picturale. Dérivé, comme dans l’art islamique, de dessins ornementaux et de micrographies. L’instauration d’une culture presque dépourvue d’images sous la domination musulmane constituait une rupture avec la tradition gréco-romaine classique de l’expression picturale, qui dominait la Méditerranée depuis l’Antiquité. Le christianisme est allé dans d’autres directions, sublimant la spiritualité de la Parole dans l’incarnation de Dieu par Jésus. Grâce à cette corporéité, le christianisme pourrait facilement emprunter des modèles d’art pictural de la tradition gréco-romaine. Sous l’influence hellénistique, les mosaïques des synagogues de Terre Sainte reproduisaient des représentations iconographiques d’épisodes bibliques. La richesse des images bibliques dans les fresques de la synagogue Doura-Europos, du 3ème siècle, est unique.
La culture hellénistique a admis les images comme vérité, comme l’a exprimé Filostrato; Platon s’est opposé à la peinture(et les sophistes) dans le Phèdre , car aucun ne pouvait créer la vie et la vérité. À son avis, seules l’âme et sa vérité pourraient créer la vie. Les réserves platoniques contre la peinture existent également dans les traditions des hadiths musulmans . L’hostilité aux images a été globalement maintenue par les juifs et les musulmans. Dans sa polémique contre l’approche iconoclaste, Giovanni Damasceno a affirmé que, depuis que Jésus était devenu l’incarnation de la parole divine, il pouvait être représenté.
Bede le Vénérable a essayé d’harmoniserInterprétation de l’Ancien et du Nouveau Testament l’un comme préfiguration de l’autre. L’émergence de la corporalité dans l’art chrétien était presque une nécessité didactique. Cette approche fondamentale du catholicisme favorable à l’image n’est pas identique à l’attitude iconophilique byzantine (iconodule). William Durand (1220-1296) expliqua clairement qu ‘ »une chose est d’adorer une image et une autre, à travers une image, d’apprendre historiquement ce que l’on doit adorer ». Les docteurs de l’Église étaient bien conscients du fait que, dans les conflits médiévaux avec les juifs et les musulmans, le christianisme était perçu comme une idolâtrie.L’argument principal partait du principe que, si Jésus avait été une simple nature humaine, son image serait vénérée comme une idolâtrie. Si, au contraire, Jésus avait eu une nature divine, il aurait été impossible de le représenter. La nouvelle doctrine de la transsubstantiation et la vénération du Corpus Christi nécessitaient une diffusion parmi les croyants qui, sans miracles apparents, avaient du mal à les comprendre. Maïmonide, dans sa classification des cinq types d’infidélité, définit le chrétien « celui qui admet qu’il n’y a qu’un seul Dieu, mais qu’il a un corps et une forme ».
Le moyen d’expression le mieux préservé dans l’art juif médiéval est constitué par les manuscrits juifs enluminés d’origine ashkénaze (en Europe centrale et occidentale). Ce qui frappe, en les observant, ce sont les représentations figuratives des animaux et des humains. Comment concilier ce phénomène avec l’approche iconoclaste du judaïsme? Maïmonide écrit dans Mishe Torah: « Il est permis de bénéficier de figures faites par des gentils pour la décoration, mais celles faites pour le culte des idoles sont interdites ». L’opinion admise aujourd’hui est que ces manuscrits sont le produit de la collaboration entre des scribes juifs et des enlumineurs chrétiens. Les créatures, souvent bizarres et déformées, ont essentiellement répondu à la demande des clients juifs de ne pas représenter les êtres humains. En tout état de cause, tout en ne nous poussant pas plus loin que Ruth Melnikoff, nous pouvons dire que les Juifs, opposés aux images humaines, semblent fermer les yeux sur ces miniatures.Dans les manuscrits hébreux d’origine italienne ou espagnole, ce type de déformation volontaire de la figure humaine n’est pas retrouvé. J’exclus la possibilité que des peintres juifs aient été embauchés dans ces pays; Si nous considérons les normes prescrites par Maïmonide contre les idoles, la peinture et la sculpture ne pourraient être un métier pour les Juifs. Seul le processus d’assimilation au sein d’une société aimable, comme cela s’est produit dans certaines parties de l’Europe à la fin du XIXe siècle, a provoqué un changement radical. Il fallut près de huit cents ans à l’époque de Maïmonide pour que Chagall crée pour la première fois un art figuratif juif authentique.

 

PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002)

23 avril, 2018

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PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002) dans PAIX (LA) Saint_Bonnet_le_Ch%C3%A2teau-Anges_musiciens_04

Saint Bonnet le Château-Anges musiciens

CONSEIL PONTIFICAL POUR LA PROMOTION DE L’UNITÉ DES CHRÉTIENS

PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002)

La paix, shalom, est au centre du message de l’Ancien et du Nouveau Testament. Paix, shalom dans la Bible, n’est pas seulement le salut normal que serait une formule de politesse; paix, shalom, est une promesse eschatologique venant de Dieu et un souhait de bénédiction entre les hommes. En effet, Jésus-Christ lui-même est notre paix (cf. Ep 2, 1). Bénis par Dieu en Jésus-Christ, les chrétiens doivent être entre eux une bénédiction et une bénédiction pour toutes les nations. « Heureux les artisans de la paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9). L’Eglise est donc appelée à être le signe, l’instrument et le témoin de la paix, paix avec Dieu et entre les hommes (cf. Lumen gentium, nn. 1 et 13).
Paix, justice et pardon
La paix entre les hommes, cette tranquillitas ordinis enseignée par saint Augustin, à laquelle le Pape Jean-Paul II s’est référé dans son Message pour la Journée de la Paix du 1er janvier (cf. n. 3), ne doit toutefois pas être entendue seulement au sens de silence des armes et absence de guerre. Elle est le fruit de l’ordre insufflé par son fondateur dans la société humaine (cf. Gaudium et spes, n. 78), et elle présuppose un engagement constant pour instaurer la justice dans le monde. Comme l’affirme l’Ecriture, la paix véritable est le « fruit de la justice » (Is 32, 17; cf. Jc 3, 18).
Par justice, il faut entendre la reconnaissance de la dignité de chaque personne, ses droits fondamentaux en tant qu’être humain, la liberté de chacun, l’absence de discrimination au nom de la foi, de l’origine, de la culture, du sexe. Par justice, il faut entendre le droit de chaque créature humaine à la vie, à la terre, à la nourriture, à l’eau, et à une éducation qui la rende plus pleinement consciente des droits qui sont les siens, et capable d’autodétermination dans sa propre vie. Ce bien de la personne présuppose le bien commun, la justice sociale, surtout pour les pauvres, l’équilibre social et la stabilité de l’ordre social et politique.
Face à un monde marqué par le péché, l’égoïsme et l’envie, un monde qui trop souvent nie avec violence la justice, et bouleverse, dans le cercle vicieux des conflits, la tranquillitas ordinis, qui est la condition nécessaire et la substance même de la paix, il est impossible d’instaurer la paix sans la « sollicitude miséricordieuse et providentielle de Dieu, qui connaît les chemins permettant d’atteindre les coeurs les plus endurcis et de tirer de bons fruits même d’une terre aride et inféconde » (Message pour la Journée mondiale de la Paix, 1er janvier 2002, n. 1, cf. ORLF n. 50 du 11 décembre 2001). La paix est le don du pardon, de la rédemption et de la nouvelle création; tout comme l’amour, la joie, la pénitence, la bienveillance, la bonté, elle est le fruit de l’Esprit (cf. Ga 5, 22). Le Royaume de Dieu est justice, paix et joie dans l’Esprit (cf. Rm 14, 17).
Cette espérance doit toujours plus profondément animer notre prière. La paix doit être constamment implorée, afin qu’elle puisse nous être accordée et être sauvegardée. Mais l’arme de la prière renforce aussi notre engagement à renverser les situations d’injustice, et à agir ensemble pour l’édification d’un monde plus juste. Guidés par la mansuétude de Celui qui a prédit la justice pour les pauvres du Royaume, les chrétiens savent que « la capacité de pardonner est à la base de tout projet d’une société à venir plus juste et solidaire » (ibid. n. 9).
Les chrétiens savent que la haine ethnique, raciale, religieuse, cette spirale de la violence qui frappe indistinctement victimes et bourreaux, peut avoir un antidote: le pardon. Seul le pardon, en effet, nous situe au-dessus des accusations; nous permet de ne pas rendre coupables à cause de quelques uns, des peuples entiers; de ne pas faire retomber sur les fils les fautes des pères. Le pardon, qui dépend de chacun de nous, peut rétablir la justice et nous conduire d’une situation de guerre à un état de paix.
Réconciliation et paix entre les chrétiens
C’est précisément à propos de ce lien entre la paix, la justice et le pardon qu’il faut souligner l’importance du dialogue oecuménique et de la collaboration entre tous les chrétiens. « Aux yeux du monde l’action conjuguée des chrétiens dans la société revêt alors la valeur transparente d’un témoignage chrétien rendu en commun au nom du Seigneur » (Ut unum sint, n. 75). Mais il y a plus. Accablés par leur histoire, faite de disputes et d’affrontements, coupables d’avoir quelquefois prêché et imposé l’Evangile du Christ également par les armes, les chrétiens se sont engagés, particulièrement au cours de ce siècle, sur le chemin lent et difficile de leur pardon réciproque. Il n’y a pas d’oecuménisme sans conversion et sans pardon (cf. ibid., n. 15s, n. 33). La honte et le repentir intérieur pour le scandale de la division, un repentir suscité par l’Esprit, sont à la base du mouvement oecuménique (cf. Unitatis redintegratio, n. 1).
Aujourd’hui, les chrétiens ont franchi le seuil du troisième millénaire, et se trouvent face à un choix responsable, difficile, essentiel. L’engagement oecuménique, la promotion de l’unité des chrétiens est l’un des grands défis et des devoirs les plus urgents au début du nouveau millénaire (cf. Novo millennio ineunte, nn. 12 et 48). Les chrétiens sont appelés à « promouvoir une spiritualité de la communion » (ibid. n. 43s), et être ainsi « lumière du monde », « ville sise au sommet d’un mont » (Mt 5, 14).
Ils prêchent le pardon, cette forme particulière de l’amour (cf. Message, op. cit., n. 2) et, peu à peu, se l’appliquent à eux-mêmes, à leurs Eglises en Orient et en Occident. Dialoguer, se rencontrer, purifier leurs mémoires, est pour les Eglises un acte de courage et un engagement exigeant. Elles savent que « la cohérence et l’honnêteté des intentions et des affirmations de principe se vérifient quand on les applique à la vie concrète » (Ut unum sint, n. 74). Cela les pousse, dans la situation actuelle, à avoir entre elles un comportement exemplaire, qui offre au monde un témoignage de pardon, de concorde, de dialogue, qui exige d’être d’autant plus profond que les divergences semblent insurmontables.
Malgré les divisions persistantes, les Eglises, grâce à l’expérience du dialogue qu’elles sont en train de vivre, ont pu, jusqu’à aujourd’hui, démontrer au moins que le processus de purification de la mémoire de leur passé entraîne peu à peu une évolution qui fait prévaloir « la « Loi nouvelle » de l’esprit de charité. La « fraternité universelle » des chrétiens est devenue une ferme conviction oecuménique » (ibid., n. 42). Ils vivent déjà dans une communion réelle et profonde, même si elle n’est malheureusement pas encore parfaite (cf. ibid., nn. 11-14). Pour servir la paix et en donner l’exemple, ils peuvent et doivent, dès aujourd’hui, collaborer étroitement entre eux.
Dialogue oecuménique et dialogue interreligieux
L’attitude des Eglises et la prédisposition au pardon, qu’elles appliquent à leurs relations réciproques, doivent les conduire à dialoguer ensemble avec les autres religions et les autres cultures afin que la morale oecuménique, qu’elles recherchent dans leurs actions, se reflète dans les rapports et dans le dialogue avec les autres religions, en vue d’une collaboration qui vise à réaffirmer les valeurs de la vie et de la culture humaine.
Le dialogue oecuménique et le dialogue interreligieux sont liés l’un à l’autre, mais ils ne se confondent pas l’un avec l’autre. Il existe entre les deux une différence spécifique et qualitative, et c’est pour cette raison qu’il faut bien les distinguer. Le dialogue oecuménique ne se fonde pas seulement sur la tolérance et le respect dû à chaque conviction humaine et en particulier religieuse; pas plus qu’il ne se fonde seulement sur un philanthropisme libéral ou une simple politesse bourgeoise; au contraire, le dialogue oecuménique s’enracine dans la foi commune en Jésus-Christ et dans la reconnaissance réciproque du baptème au moyen duquel tous les baptisés sont membres de l’unique Corps du Christ (cf. Ga 3, 28; 1 Co 12, 13; Ut unum sint, n. 42) et ils peuvent prier ensemble comme nous l’a enseigné Jésus, « notre Père ». Dans les autres religions, l’Eglise reconnaît un rayon de cette vérité « qui éclaire chaque homme » (Jn 1, 9), mais qui n’est révélée pleinement qu’en Jésus-Christ; lui seul est « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6; cf. Nostra aetate, n. 2). C’est pour cela qu’il est ambigu de parler du dialogue interreligieux en terme de macrooecuménisme ou d’une phase nouvelle et plus large de l’oecuménisme.
Les chrétiens et les partisans des autres religions peuvent prier, mais ils ne peuvent prier ensemble. Tout syncrétisme est exclu. Néanmoins, ils partagent le sens et le respect de Dieu ou du Divin et le désir de Dieu ou du Divin; le respect pour la vie, le désir de la paix avec Dieu ou avec le Divin, entre les hommes et dans l’univers; ils partagent beaucoup de valeurs morales. Ils peuvent et doivent collaborer pour défendre et promouvoir ensemble, au profit de tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté. Cela est particulièrement vrai pour les religions monothéistes, qui voient en Abraham leur père dans la foi.
L’invitation pour la Journée de prière pour la paix dans le monde est une façon de réaffirmer tout cela. L’Eglise catholique voit dans cette participation une occasion utile pour témoigner ensemble que « les chrétiens se sentent toujours plus interpellés par la question de la paix » (Ut unum sint, n. 76). En respectant les critères de la recherche de leur propre unité, les chrétiens respectent les autres religions. Ils savent que la « loi nouvelle » de l’esprit de charité encourage à accueillir les autres, n’exclut pas la légitime diversité. Ils savent qu’ils ont en commun avec les autres religions l’arme de la prière pour implorer la paix.
Face à ce mal terrible qu’est l’absence de paix, face à la chaîne infinie de deuils qu’apporte la guerre, ils savent qu’il n’y a qu’une seule alternative: donner un témoignage de pardon réciproque et de tranquillitas ordinis entre eux. Ainsi, nous demandons à tous de parcourir avec nous le même chemin d’espoir vers la justice, la réconciliation et la paix.

Cardinal Walter Kasper,
Président du Conseil pontifical pour l’Unité des Chrétiens

La Via pulchritudinis, chemin privilégié d’évangélisation et de dialogue –

1 octobre, 2015

http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/cultr/documents/rc_pc_cultr_doc_20060327_plenary-assembly_final-document_fr.html#_Toc138050319

La Via pulchritudinis, chemin privilégié d’évangélisation et de dialogue

document final de l’assemblée plénière

(un extrait)

III. les voies de la beauté.

Trois développements s’offrent à nous comme voies privilégiées de la Via pulchritudinis pour dialoguer avec les cultures contemporaines :

III.1 La beauté de la création
III.2 La beauté des arts
III.3 La beauté du Christ, modèle et prototype de la sainteté chrétienne
La Beauté de Dieu, révélée par la beauté singulière de son Fils, constitue l’origine et la fin de tout le créé. S’il est possible de partir du degré le plus élémentaire, pour ensuite remonter, selon un dynamisme inscrit dans l’Écriture Sainte, de la beauté sensible de la nature à la Beauté du Créateur, celle-ci resplendit d’une manière unique sur le visage du Christ, et sur celui de sa Mère et des saints. Pour le chrétien, la « création » est inséparable de la « recréation », car si Dieu a jugé bonne et belle l’œuvre des six jours (cf. Gn 1), le péché, avec le désordre a introduit la laideur du mal et de la mort dont le Christ ressuscité est vainqueur. « Heureuse faute qui nous a valu un tel Rédempteur ! », chante la liturgie de Pâques : la Grâce qui se répand sur le monde du côté ouvert du Christ Sauveur, purifie et introduit dans une beauté tout autre le monde sauvé qui attend dans les gémissements l’heure de la transformation finale (Rm 8, 22).

III.1 La beauté de la création.
L’Écriture souligne la valeur symbolique de la beauté du monde qui nous entoure, reflet visible de la beauté de son créateur invisible : « Oui, vains par nature tous les hommes en qui se trouvait l’ignorance de Dieu, qui, en partant des biens visibles, n’ont pas été capables de connaître Celui-qui-est, et qui, en considérant les œuvres, n’ont pas reconnu l’Artisan… S’ils les ont pris pour des dieux, qu’ils sachent combien leur Maître est supérieur, car c’est la source même de la beauté qui les a créés. » (Sg 13, 1 et 3). Il est toutefois un abîme entre la beauté ineffable de Dieu et ses vestiges dans la création, aussi l’auteur sacré ne croit pas inutile de préciser le cadre de cette « dialectique ascendante » : « La grandeur et la beauté des créatures font, par analogie, contempler leur Auteur » (v. 5). Il importe de dépasser les formes visibles des choses de la nature, pour remonter jusqu’à leur Auteur invisible, le « Tout Autre » que nous professons dans le Credo : « Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible ».

A) L’émerveillement devant la beauté de la création. « La nature est un temple où de vivants piliers laissent parfois sortir de confuses paroles… ». Les poètes sont, avec Baudelaire, particulièrement sensibles aux beautés de la création et à leur mystérieux langage. Ainsi, en son Cantique spirituel, saint Jean de la Croix donne aux créatures de confesser :
« Répandant mille grâces
En hâte il est passé par ces bocages.
Les allant regardant,
par sa seule figure,
il les laissa revêtus de beauté »,
et le poète anglais G.M. Hopkins : « Le monde est pénétré de la splendeur de Dieu ». C’est que de la contemplation d’un paysage au coucher du soleil, des sommets des montagnes enneigées sous le ciel étoilé, des champs couverts de fleurs baignés de lumière, du foisonnement des plantes et des espèces animales naissent une palette de sentiments qui nous invitent à « lire de l’intérieur – intus-legere », pour, du visible atteindre l’invisible et donner réponse raisonnable au questionnement incontournable : qui est cet artisan à l’imagination si puissante à l’origine de tant de beauté et de grandeur, d’une telle profusion d’êtres dans le ciel et sur la terre ?
Voici deux mille ans, Platon avait dit : « Le beau, qui est l’unité d’une diversité, nous fait parvenir au seuil de la réalité suprême, le Bien », c’est à dire Dieu. Et Aristote affirmait que « dans toutes les choses de la nature, il est quelque chose de merveilleux ». L’étude de la nature et du cosmos a, de fait, joué un rôle essentiel dans la philosophie, dès la Grèce antique. De même, en théologie, la cosmologie a constitué un élément fondamental pour comprendre l’œuvre de Dieu et son action dans l’histoire. Ainsi : la vision du Pseudo-Denys l’Aréopagite, tant de fois reprise dans la théologie et la mystique chrétienne, et la cosmologie aristotélicienne reprise par saint Thomas, présente dans ses « preuves de l’existence de Dieu ». Emmanuel Kant reconnaît lui aussi la beauté de la création et sa capacité à provoquer l’émerveillement, dans la Critique de la raison pratique : « Deux choses remplissent le cœur d’une admiration et d’une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes, à mesure que la réflexion s’y attache et s’y applique : le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi. »
La contemplation des beautés de la création suscite la paix intérieure et aiguise le sens de l’harmonie et le désir d’une vie belle. Chez l’homme religieux, l’étonnement et l’admiration se transforment en des attitudes intérieures plus spirituelles : l’adoration, la louange et l’action de grâces envers l’Auteur de ces beautés. Ainsi le psalmiste : « Quand je contemple les cieux, ouvrage de tes mains, la lune et les étoiles que tu as créées : Qu’est-ce que l’homme, pour que tu te souviennes de lui ? le fils de l’homme, pour que tu en prennes souci ? Tu l’as fait de peu inférieur à Dieu, et tu l’as couronné de gloire et de magnificence. Tu lui as donné la domination sur les oeuvres de tes mains, tu as tout mis sous ses pieds… Yahvé, notre Dieu, que ton nom est magnifique sur toute la terre ! » (Ps 8, 3-6 et 9). La tradition franciscaine, avec saint Bonaventure et Dun Scot Erigène[15], accorde une dimension « sacramentelle » à la création, qui porte en elle les traces de ses origines. Aussi, la nature est-elle considérée comme une allégorie, et chaque réalité naturelle le symbole de son Auteur.

B) De la création à la recréation. Parmi les créatures, il en est une qui présente une certaine similitude de Dieu : l’homme, créé « à son image et à sa ressemblance » (Gn 1, 27). Par son âme spirituelle, il porte en lui un « germe d’éternité irréductible à la seule matière » (Gaudium et spes, 18). Mais l’image a été altérée par le premier péché, ce poison qui affaiblit la volonté dans son orientation vers le bien et, par là, obscurcit l’intelligence et entache la sensibilité. La beauté de l’âme, assoiffée de vérité et élan vers le bien-aimé, perd de son éclat et devient capable du mal, du laid. Un enfant témoin d’un acte mauvais ne dit-il pas spontanément : « Ce n’est pas beau ». Ainsi la laideur – et donc a fortiori le bien – apparaît dans le domaine de la morale et rejaillit sur l’homme, son sujet. Avec le péché, celui-ci a perdu sa beauté originelle et se voit nu, jusqu’à en éprouver de la honte. La venue du Rédempteur le rétablit dans sa beauté première, plus encore, le revêt d’une beauté nouvelle : la beauté inimaginable de la créature élevée à la filiation divine, la transfiguration promise de l’âme rachetée et élevée par la grâce, son resplendissement dans toutes les fibres du corps appelé à ressusciter avec le Christ (Eph 2, 6).
Si le Christ, Nouvel Adam, « manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation » (Gaudium et spes, 22), le regard chrétien sur la beauté de la création trouve son achèvement dans la bouleversante nouvelle de la recréation : le Christ, parfaite représentation de la gloire du Père, communique à l’homme de sa plénitude de grâce. Il le rend « gracieux », c’est-à-dire beau et agréable à Dieu. L’Incarnation est le centre focal, la juste perspective dans laquelle la beauté prend son ultime signification : « « Image du Dieu invisible » (Col 1,15), le Christ Seigneur est l’homme parfait qui a restauré dans la descendance d’Adam la ressemblance divine, altérée dès le premier péché. Parce qu’en lui la nature humaine a été assumée, non absorbée, par le fait même, cette nature a été élevée en nous aussi à une dignité sans égale. Car, par son incarnation, le Fils de Dieu s’est en quelque sorte uni lui-même à tout homme. » Nous y reviendrons plus loin, la beauté de la sainteté qui émane de l’homme configuré au Christ sous le souffle de l’Esprit-Saint, est l’un des plus beaux témoignages, capable d’ébranler les plus indifférents et de leur faire ressentir le passage de Dieu dans la vie des hommes.
Dans une action de grâces continuelle, le chrétien loue le Christ qui lui a redonné vie, et se laisse transfigurer par ce don glorieux qui lui est fait. Nos yeux avides de beauté se laissent attirer par le Nouvel Adam, véritable icône du Père éternel, « resplendissement de Sa gloire » et « effigie de Sa substance » (He 1.3). Aux « cœurs purs » à qui il est promis de voir Dieu face à face, le Christ donne déjà d’entrevoir la lumière de la gloire au cœur même de la nuit de la foi.

C) La création, utilisée ou idolâtrée. Nombreux, cependant, sont les hommes et les femmes qui ne voient la nature et le cosmos que dans leur matérialité visible, univers muet qui n’aurait d’autre destin que d’obéir aux froides lois physiques immuables et invariables, sans évoquer nulle autre beauté, encore moins un Créateur. Dans une culture où le scientisme, cette science extrapolée hors de ses frontières, impose les limites de sa méthode d’observation valable dans le domaine des sciences exactes, jusqu’à en faire indûment la norme exclusive de toute connaissance, le cosmos est réduit à n’être qu’un immense réservoir où l’homme puise jusqu’à l’épuiser, en fonction de ses besoins croissants, démesurés.
Le Livre de la Sagesse met en garde contre une telle myopie que saint Paul dénonce comme un « péché d’orgueil et de présomption » (Rm 1, 20-23). Au reste, la création n’est pas muette : les phénomènes naturels extraordinaires, parfois tragiques, enregistrés ces dernières années, et les désastres écologiques qui ne cessent de se multiplier, suscitent une nouvelle compréhension de la nature, de ses lois, de son harmonie. Il s’avère de plus en plus évident pour nombre de nos contemporains que la nature ne peut ni ne doit être manipulée sans respect.
Il ne s’agit pas pour autant de faire de la nature un absolu, voire une idole, comme en certains groupes néo-païens : sa valeur ne saurait surpasser la dignité de l’homme appelé à en être le gardien.

DIGNITÉ ET MISSION DES PERSONNES ÂGÉES DANS L’EGLISE ET DANS LE MONDE

9 octobre, 2014

http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/laity/documents/rc_pc_laity_doc_05021999_older-people_fr.html

PONTIFICIUM CONSILIUM PRO LAICIS
Documents

DIGNITÉ ET MISSION DES PERSONNES ÂGÉES DANS L’EGLISE ET DANS LE MONDE

INTRODUCTION

Les conquêtes de la science et les progrès de la médecine qui s’ensuivent ont contribué de manière décisive, ces dernières décennies, à prolonger la durée moyenne de la vie. L’expression « troisième âge » embrasse désormais une couche considérable de la population mondiale : des personnes qui sortent des circuits de production, disposant encore de grandes ressources et de grandes capacités de participation au bien commun. A cette foule de « young old » (« vieux jeunes », comme les démographes qualifient ces nouvelles catégories de la vieillesse, situant leur fourchette d’âge entre 65 et 75 ans) s’ajoute celle des « oldest old » (« les plus vieux des vieux », qui dépassent les 75 ans), un quatrième âge dont les rangs sont destinés à grossir de plus en plus. (1)
L’allongement de la durée moyenne de la vie, d’un côté, et la chute parfois dramatique de la natalité, (2) de l’autre, ont engendré une transition démographique sans précédent, qui inverse littéralement la pyramide des âges telle qu’elle se présentait il n’y a pas plus de cinquante ans : le nombre des personnes âgées connaît une croissance constante, tandis que celui des jeunes est en chute libre. Amorcé au cours des années 60 dans les pays de l’hémisphère nord, ce phénomène touche aussi actuellement ceux de l’hémisphère sud dans lesquels le processus de vieillissement est encore plus rapide.
Cette sorte de « révolution silencieuse », qui va bien au-delà des données démographiques, pose des problèmes d’ordre social, économique, culturel, psychologique et spirituel dont la portée fait l’objet, depuis déjà un certain temps, d’une attention soutenue de la part de la communauté internationale. Dès 1982 – au cours de l’Assemblée mondiale sur les problèmes du vieillissement de la population, convoquée par les Nations Unies à Vienne (Autriche), du 26 juillet au 6 août – un Plan international d’action avait été élaboré. Il demeure aujourd’hui encore un point de référence au niveau mondial. D’autres études avaient ensuite conduit à la définition de dix-huit Principes des Nations Unies pour les personnes âgées (regroupés en cinq chapitres: indépendance, participation, soins, réalisation personnelle, dignité) (3) et à la décision de consacrer aux personnes âgées une Journée mondiale dont la date fut fixée au 1er octobre de chaque année.
La résolution de l’ONU de proclamer 1999 Année internationale des personnes âgées et le choix même du thème « Vers une société pour tous les âges » confirment cet intérêt. « Une société pour tous les âges – a affirmé le secrétaire général, Kofi Annan, dans son message pour la Journée mondiale des personnes âgées 1998 – est une société qui, loin de réduire les personnes âgées au rang caricatural d’infirmes et de retraités, les considère au contraire comme des agents et bénéficiaires du développement ». Donc une société prenant en compte toutes les générations et s’efforçant de créer des conditions de vie capables de favoriser la réalisation du grand potentiel du troisième âge.
Le Saint-Siège – qui apprécie l’intention de jeter les bases d’une organisation sociale s’inspirant de la solidarité, où chaque génération apporte sa contribution en union avec les autres – désire collaborer à l’Année internationale des personnes âgées en faisant entendre la voix de l’Eglise, aussi bien au niveau de la réflexion que de l’action.
En appelant au respect de la dignité et des droits fondamentaux des personnes âgées et convaincu que celles-ci ont encore beaucoup à donner et peuvent encore beaucoup donner à la vie de la société, il souhaite que la question soit affrontée avec un grand sens de responsabilité par tous : individus, familles, associations, gouvernants et organisations internationales selon les compétences et les devoirs de chacun et en vertu du principe très important de la subsidiarité. En effet, ce n’est qu’ainsi que l’on pourra parvenir à garantir aux personnes âgées des conditions d’une vie toujours plus humaine et à donner de la valeur à leur rôle irremplaçable dans une société connaissant des mutations économiques et culturelles continuelles et rapides. Alors il sera également possible d’adopter des initiatives bien structurées visant à exercer une influence sur les aspects socio-économico-éducatifs destinés à rendre accessibles à tous les citoyens, sans aucune discrimination, les ressources nécessaires pour satisfaire les besoins anciens et nouveaux de ceux qui ont été éloignés des circuits de la vie en société, pour assurer la tutelle effective de leurs droits, pour leur rendre des raisons de croire et d’espérer, de participer activement à la vie de la société et d’y appartenir.
L’attention et l’engagement de l’Eglise aux côtés des personnes âgées ne datent pas d’aujourd’hui. Celles-ci ont compté parmi les destinataires de sa mission et de son attention pastorale à travers les siècles et dans les circonstances les plus variées. La « caritas » chrétienne a pris en compte leurs besoins, suscitant les œuvres les plus diverses au service des personnes âgées, grâce surtout à l’initiative et à la sollicitude de congrégations religieuses et d’organisations laïques. Pour sa part, le magistère ecclésial, loin de considérer la question comme un simple problème d’assistance et de bienfaisance, a toujours rappelé l’importance primordiale de la mise en valeur des personnes de tous âges, rappelant à tous de faire en sorte que la richesse humaine et spirituelle et les réserves d’expérience et de conseil accumulées au cours de vies entières ne soient pas perdues. Pour confirmer cela, s’adressant à quelque huit mille personnes âgées reçues en audience le 23 mars 1984, Jean-Paul II déclarait : « Ne vous laissez pas surprendre par la tentation de la solitude intérieure. Malgré la complexité de vos problèmes [...], les forces qui progressivement s’affaiblissent et malgré les insuffisances des organisations sociales, les retards de la législation officielle, les incompréhensions d’une société égoïste, vous n’êtes pas et vous ne devez pas vous sentir en marge de la vie de l’Eglise, comme des éléments passifs d’un monde en excès de mouvement, mais des sujets actifs d’une période humainement et spirituellement féconde de l’existence humaine. Vous avez encore une mission à accomplir, une contribution à apporter ». (4)
La situation actuelle – inédite par de nombreux aspects – interpelle toutefois l’Eglise à procéder à une révision de la pastorale des troisième et quatrième âges. La recherche de formes et de méthodes nouvelles, correspondant davantage à leurs besoins et à leurs attentes spirituelles, et l’élaboration de parcours pastoraux enracinés dans le terrain de la défense de la vie, de sa signification et de son destin semblent être, en effet, une condition incontournable pour inciter les personnes âgées à apporter leur contribution à la mission de l’Eglise et pour les aider à tirer un bénéfice spirituel particulier de leur participation active à la vie de la communauté ecclésiale.
Tel est, à grands traits, le contexte dans lequel s’insère ce document du Conseil Pontifical pour les Laïcs. Un groupe de travail constitué de représentants de divers dicastères de la Curie romaine et de la Secrétairerie d’Etat a contribué à sa rédaction, ainsi que des responsables de réalités ecclésiales (mouvements, associations, congrégations religieuses) ayant une longue expérience du monde du troisième âge. En le mettant à la disposition des conférences épiscopales, des évêques et des prêtres, des religieuses et des religieux, des mouvements et des associations, des jeunes, des adultes et des personnes âgées elles-mêmes, le Conseil Pontifical pour les Laïcs – désigné pour être le creuset des activités du Saint-Siège pour l’Année internationale des personnes âgées – espère qu’il stimulera la réflexion et les efforts de chacun.

I SENS ET VALEUR DE LA VIEILLESSE
Les attentes d’une longévité vécue dans des conditions de santé meilleures que par le passé, la perspective de pouvoir cultiver des intérêts liés à un degré d’instruction plus élevé des personnes, le fait que la vieillesse n’est plus toujours synonyme de dépendance et qu’elle ne nuit donc pas toujours à la qualité de la vie ne semblent pas suffir à faire accepter cette période de l’existence que bon nombre de nos contemporains considèrent exclusivement comme une fatalité inévitable et pénible.
En effet, l’image la plus répandue aujourd’hui est celle du troisième âge comme phase de déclin où l’insuffisance humaine et sociale est donnée pour acquise. Il s’agit pourtant d’un stéréotype qui ne correspond pas à une condition des faits qui, dans la réalité, est beaucoup plus diversifiée car les personnes âgées ne constituent pas un groupe humain homogène et la vieillesse est vécue de façons fort différentes. Il existe une catégorie de personnes capables de saisir la signification de la vieillesse dans l’existence humaine et qui la vit non seulement avec sérénité et dignité, mais aussi comme une saison de vie offrant de nouvelles occasions de croissance et d’engagement. Et puis il y a une autre catégorie – précisément la plus nombreuse de nos jours – pour laquelle la vieillesse constitue un traumatisme. Il s’agit de personnes qui, face à leur propre vieillissement, adoptent des comportements allant de la résignation passive à la rébellion et au refus désespérés. En se repliant sur elles-mêmes et en se plaçant en marge de la vie, ces personnes enclenchent un processus de dégradation physique et mentale.
Nous pouvons donc affirmer que les visages des troisième et quatrième âges sont aussi nombreux qu’il existe de personnes âgées et que chaque personne prépare la façon de vivre sa vieillesse au cours de l’ensemble de sa vie. En ce sens, la vieillesse croît avec nous et la qualité de notre vieillesse dépendra surtout de notre capacité à saisir son sens et sa valeur, aussi bien sur le plan purement humain que sur celui de la foi. Il faut donc situer la vieillesse dans un dessein précis de Dieu qui est amour, en la vivant comme une étape sur le chemin par lequel le Christ nous conduit à la maison du Père (cf. Jn 14, 2). De fait, ce n’est qu’à la lumière de la foi, forts de l’espérance qui ne déçoit jamais (cf. Rm 5, 5), que nous serons capables de la vivre comme un don et comme un devoir, d’une manière véritablement chrétienne. C’est le secret de la jeunesse de l’esprit que nous pouvons cultiver malgré le passage des années. Linda, une femme qui a vécu 106 ans, a laissé un merveilleux témoignage en ce sens. A l’occasion de son 101ème anniversaire, elle confiait à une amie : « J’ai 101 ans, mais je suis forte, tu sais. Physiquement, j’ai quelques problèmes, mais spirituellement je fais tout, je ne me laisse pas affliger par les choses physiques, je ne les écoute pas. Je ne vis pas la vieillesse parce que je n’écoute pas ma vieillesse : elle va de l’avant toute seule, mais moi je ne lui accorde pas d’importance. Le seul moyen de bien la vivre, c’est de la vivre en Dieu ».
Corriger la représentation négative que l’on se fait actuellement de la vieillesse constitue donc un engagement culturel et éducatif qui doit impliquer toutes les générations. La responsabilité envers les personnes âgées consiste à les aider à saisir le sens de leur âge, en en appréciant les ressources et en rejetant la tentation du refus, de l’autoisolement, de la résignation, du sentiment d’inutilité et du désespoir. Nous avons une responsabilité envers les générations futures : celle de préparer un contexte humain, social et spirituel au sein duquel chaque personne puisse vivre pleinement et dignement cette étape de la vie.
Dans son message adressé à l’Assemblée mondiale sur les problèmes du vieillissement de la population, Jean-Paul II affirmait : « La vie est un don que Dieu fait aux hommes créés par amour à son image et à sa ressemblance. Cette compréhension de la dignité sacrée de la personne humaine conduit à accorder une valeur à toutes les étapes de la vie. C’est une question de cohérence et de justice. En effet, il est impossible d’accorder véritablement une valeur à la vie d’une personne âgée si l’on ne donne pas vraiment sa valeur à la vie d’un enfant dès le moment de sa conception. Personne ne sait où l’on pourrait arriver si la vie n’était plus respectée comme un bien inaliénable et sacré ». (5)
La construction d’une société prenant en compte toutes les générations ne perdurera que si elle est fondée sur le respect de la vie dans toutes ses phases. La présence de tant de personnes âgées dans le monde contemporain est un don, une richesse humaine et spirituelle nouvelle. Un signe des temps qui, s’il est pleinement compris et accueilli, peut aider l’homme d’aujourd’hui à retrouver le sens de la vie qui va bien au-delà des significations contingentes qui lui sont attribuées par le marché, par l’Etat et par la mentalité dominante.
L’expérience que les personnes âgées peuvent apporter au processus d’humanisation de notre société et de notre culture est on ne peut plus précieux et doit être sollicité en mettant en valeur ce que nous pourrions qualifier de charismes propres à la vieillesse :
– La gratuité. La culture dominante mesure la valeur de nos actions avec les paramètres d’une efficacité qui ignore la dimension de la gratuité. La personne âgée, qui vit le temps de la disponibilité, peut attirer l’attention d’une société trop occupée sur l’exigence d’abattre les barrières de l’indifférence qui avilit, décourage et endigue le flux des impulsions altruistes.
– La mémoire. Les générations les plus jeunes sont en train de perdre le sens de l’histoire et, avec lui, celui de leur identité. Une société qui minimise le sens de l’histoire élude la formation des jeunes. Une société qui ignore le passé risque aisément de reproduire ses erreurs. La perte du sens de l’histoire est également imputable à un système de vie qui a éloigné et isolé les personnes âgées, rendant ainsi plus difficile le dialogue entre les générations.
– L’expérience. Nous vivons aujourd’hui dans un monde où les réponses de la science et de la technique semblent avoir supplanté l’utilité de l’expérience de vie accumulée par les personnes âgées au cours de toute leur existence. Cette sorte de barrière culturelle ne doit pas décourager les personnes des troisième et quatrième âges car elles ont beaucoup de choses à dire aux jeunes générations, beaucoup de choses à partager avec elles.
– L’interdépendance. Personne ne peut vivre seul, mais l’individualisme et la volonté exagérée des personnes de toujours se mettre au premier plan masquent cette vérité. Les personnes âgées, qui recherchent la compagnie des autres, contestent une société au sein de laquelle les plus faibles sont souvent livrés à eux-mêmes. Elles rappellent la nature sociale de l’homme et la nécessité de recoudre le tissu des rapports interpersonnels et sociaux.
– Une vision plus complète de la vie. Notre vie est dominée par la hâte, par l’agitation, et souvent même par la névrose. C’est une vie dispersée, qui oublie les interrogations fondamentales concernant la vocation, la dignité et le destin de l’homme. Le troisième âge est aussi l’âge de la simplicité, de la contemplation. Les valeurs affectives, morales et religieuses vécues par les personnes âgées représentent une ressource indispensable pour l’équilibre de la société, des familles et des personnes. Elles vont du sens de la responsabilité, de l’amitié, de la non-recherche du pouvoir à la prudence de jugement, à la patience et à la sagesse, en passant par l’intériorité, le respect de la création et l’édification de la paix. La personne âgée saisit bien la supériorité de l’« être » sur le « faire » et sur l’« avoir ». Les sociétés humaines seront meilleures si elles savent bénéficier des charismes de la vieillesse.

II LA PERSONNE ÂGÉE DANS LA BIBLE

Il suffit d’ouvrir la Bible pour mieux comprendre le sens et la valeur de la vieillesse. Seule la Parole de Dieu peut nous rendre capables de sonder la plénitude spirituelle, morale et théologique de cette saison de la vie. Pour aider à approfondir la signification des troisième et quatrième âges, nous souhaitons donc proposer ici plusieurs passages bibliques accompagnés d’observations ou de réflexions sur les défis qui se présentent à ceux-ci dans la société contemporaine.

Tu honoreras la personne du vieillard (Lv 19, 32)

L’estime manifestée au vieillard dans les Ecritures se transforme en loi : « Tu te lèveras devant une tête chenue, [...] et tu craindras ton Dieu » (ibid.). Et encore : « Honore ton père et ta mère » (Dt 5, 16). Une exhortation très délicate en faveur des parents, en particulier dans leur grand âge, se trouve également au troisième chapitre du Siracide (vv. 1-16), qui s’achève par une affirmation d’une gravité particulière : « Tel un blasphémateur, celui qui délaisse son père, un maudit du Seigneur, celui qui fait de la peine à sa mère ». Il faut œuvrer pour endiguer la tendance, aujourd’hui répandue, à ignorer les personnes âgées, à les marginaliser et qui « apprend » aux nouvelles générations à les abandonner : jeunes, adultes et personnes âgées ont besoin les uns des autres.

Nos pères nous ont raconté l’œuvre
que tu fis de leurs jours,
aux jours d’autrefois (Ps 43 [44], 2)

Les récits des patriarches sont particulièrement éloquents à cet égard. Lorsque Moïse vit l’expérience du buisson ardent, Dieu se présente à lui en disant: « Je suis le Dieu de tes pères, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob » (Ex 3, 6). Dieu lie son nom aux grands vieillards qui représentent la légitimité et la garantie de la foi d’Israël. Le fils, le jeune homme, rencontre Dieu – nous pourrions même dire « reçoit » Dieu – toujours et seulement à travers ses pères, les vieux. Dans le passage que nous venons de citer, pour chaque patriarche nous retrouvons l’expression « Dieu de … », comme pour signifier que chacun d’eux a fait sa propre expérience de Dieu. Or, cette expérience, qui était le legs des personnes âgées, était également la raison de leur jeunesse intérieure et de leur sérénité devant la mort. De façon paradoxale, en transmettant ce qu’il a reçu, le vieillard dessine le présent : dans un monde qui exalte la jeunesse éternelle, sans mémoire et sans avenir, cet élément donne à réfléchir.

Dans la vieillesse encore
ils portent fruit (Ps 91 [92], 15)

La puissance de Dieu peut se révéler dans la période de sénilité, à un âge marqué par les limites et les difficultés. « Mais ce qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre les sages; ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre ce qui est fort; ce qui dans le monde est sans naissance et ce que l’on méprise, voilà ce que Dieu a choisi; ce qui n’est pas, pour réduire à rien ce qui est, afin qu’aucune chair n’aille se glorifier devant Dieu » (1 Co 1, 27-29). Le dessein de salut de Dieu se réalise également dans la fragilité de corps qui ne sont plus jeunes, mais faibles, stériles, impuissants. Ainsi, c’est des entrailles stériles de Sarah et du corps centenaire d’Abraham que naît le Peuple élu (cf. Rm 4, 18-20). Plus tard, les entrailles stériles d’Elisabeth et un vieillard croulant sous le poids des ans, Zacharie, donnent naissance à Jean-Baptiste, le précurseur du Christ. Même lorsque sa vie est marquée par la faiblesse, le vieillard a donc des raisons de se considérer comme un instrument de l’histoire du salut : « De longs jours, je veux le rassasier, et je ferai qu’il voie mon salut » (Ps 90 [91], 16), promet le Seigneur.

Et souviens-toi de ton Créateur aux jours
de ton adolescence, avant que viennent
les jours mauvais et qu’arrivent les années
dont tu diras : « Je ne les aime pas » (Qo 12, 1)

Cette approche biblique de la vieillesse frappe surtout par son objectivité désarmante. En outre, comme le rappelle le psalmiste, la vie passe en un rien de temps et elle n’est pas toujours légère et indolore : « Le temps de nos années, quelque soixante-dix ans, quatre-vingts si la vigueur y est; mais leur grand nombre n’est que peine et mécompte, car elles passent vite, et nous nous envolons » (Ps 89 [90], 10). Les paroles du Qohélet – qui décrit longuement, à l’aide d’images symboliques, le déclin physique et la mort – tracent un portrait amer de la vieillesse. L’Ecriture nous met ici en garde contre les illusions que nous pourrions nous faire sur un âge qui réserve des ennuis, des problèmes et des souffrances. Elle nous invite à nous tourner vers Dieu durant toute notre existence car il est le point d’ancrage vers lequel il nous faut toujours nous diriger, mais surtout au moment de la peur que nous procure une vieillesse vécue comme un naufrage.

Abraham expira, il mourut dans une vieillesse heureuse,
âgé et rassasié de jours, et il fut réuni à sa parenté (Gn 25, 8)

Ce passage biblique apparaît d’une grande actualité. Le monde contemporain a oublié la vérité sur le sens et la valeur de la vie humaine, imprimée par Dieu dès le commencement dans la conscience de l’homme et, avec elle, le sens plénier de la vieillesse et de la mort. Aujourd’hui, la mort a perdu son caractère sacré, sa signification d’accomplissement. Elle est devenue taboue et l’on fait tout pour qu’elle passe inaperçue, pour qu’elle ne dérange pas. Son contexte aussi a changé : surtout si l’on est vieux, on meurt de moins en moins chez soi et toujours plus à l’hôpital ou dans une maison de retraite, séparé de sa communauté humaine. Les temps rituels du deuil et de nombreuses formes de piété ont pratiquement disparu, surtout en ville. L’homme d’aujourd’hui, comme anesthésié face aux représentations médiatiques quotidiennes de la mort, fait tout pour éviter de se mesurer à une réalité qui lui provoque des sensations d’égarement, d’angoisse et de peur. Alors, inévitablement, face à sa propre mort, il est souvent seul. Mais, sur la croix, le Fils de Dieu fait homme a renversé la signification de la mort, ouvrant toutes grandes les portes de l’espérance: « Je suis la résurrection et la vie. Qui croit en moi, même s’il meurt, vivra; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (cf. Jn 11, 25-26). A la lumière de ces mots, la mort – non plus condamnation, ni même conclusion irrationnelle de la vie dans le néant – se révèle être le temps de l’espérance vive et certaine de la rencontre face à face avec le Seigneur.

Fais-nous savoir comment compter nos jours,
que nous venions de cœur à la sagesse (Ps 89 [90], 12)

Un des « charismes de la longévité », selon la Bible, est la sagesse. Mais la sagesse n’est pas une prérogative automatique de l’âge; c’est un don de Dieu que le vieillard doit accueillir et se fixer pour but, afin de parvenir à la sagesse du cœur qui permet de « savoir compter [ses] jours », c’est-à-dire de vivre de façon responsable le temps que la Providence concède à chacun. Le point essentiel de cette sagesse est la découverte du sens le plus profond de la vie humaine et du destin transcendant de la personne en Dieu. Or, si cela est déjà important pour le jeune, il l’est encore plus pour le vieux, appelé à orienter sa vie sans jamais perdre de vue la « seule chose nécessaire » (cf. Lc 10, 42).

En toi, Seigneur, j’ai mon abri,
sur moi pas de honte à jamais (Ps 70 [71], 1)

Ce psaume, qui frappe par sa beauté, n’est qu’une des nombreuses prières de vieillards que l’on rencontre dans la Bible et qui témoignent des sentiments religieux de l’âme devant le Seigneur. La prière est la voie royale de la compréhension de la vie selon l’esprit, propre aux personnes âgées. La prière est un service, c’est un ministère que les personnes âgées peuvent accomplir pour le bien de toute l’Eglise et du monde. Même les vieux les plus malades ou ceux qui sont contraints à l’immobilité peuvent prier. La prière est leur force, la prière est leur vie. A travers la prière, ils participent aux douleurs et aux joies des autres; ils peuvent rompre le cercle de l’isolement, sortir de leur condition d’impuissance. Le discours sur la prière est un discours central qui touche également la façon dont une personne âgée peut devenir contemplative. Un vieil homme ou vieille femme réduit à la dernière extrémité, sur son lit, devient comme une sorte de moine, d’ermite et, par sa prière, peut englober le monde entier. Il semble impossible qu’une personne ayant vécu toute sa vie d’une manière très active puisse devenir contemplative. Et pourtant, il y a des moments de la vie où des ouvertures se produisent au profit de toute la communauté humaine. Or, la prière est l’ouverture par excellence, car « il n’y a pas de renouveau, même social, qui ne parte de la contemplation. La rencontre avec Dieu dans la prière introduit dans les méandres de l’histoire une force [...] qui touche les cœurs, les conduit à la conversion et au renouveau, et par cela elle devient alors une puissante force historique de transformation des structures sociales ». (6)

 

Aménagement du « Passetto » entre le Vatican et le Château Saint-Ange

7 mars, 2013

http://www.zenit.org/fr/articles/amenagement-du-passetto-entre-le-vatican-et-le-chateau-saint-ange

Aménagement du « Passetto » entre le Vatican et le Château Saint-Ange

Accord entre le Vatican et le ministère italien des « Biens culturels »

Rome, 14 février 2013 (Zenit.org) Anita Bourdin

Le « Passetto », le mur fortifié qui relie la caserne des Gardes Suisses de la Cité du Vatican, au Château Saint-Ange, au bord du Tibre, vient de faire l’objet d’un accord entre le gouvernorat de l’Etat de la Cité du Vatican et le ministère italien des « Biens culturels ».
Un protocole d’accord concernant l’utilisation de ce « Passetto » – « passage » – et d’une tour de garde qui en contrôle l’accès a en effet été signé, ce jeudi 14 février 2013, indique un communiqué du Vatican.
En partie restauré pour l’An 2000, le « Passetto » coonstruit par le pape saint Léon IV (845-855) – le contructeur des murailles « léonines » -, a pu être emprunté par des visiteurs pendant le Grand jubilé. Mais le Vatican et l’Italie ont souhaité collaborer afin de le mettre en valeur et de le protéger, en tant que « patrimoine historique et artistique ».
Il fera donc l’objet d’aménagements pour consentir le passage de visiteurs y compris pour les personnes handicapées.
Les travaux, indique la même source, doivent permettre à l’Etat italien de rouvrir le passage surélevé au public, par un accès à partir du Musée national du Château Saint-Ange, qui fut à l’origine projeté pour accueillir le tombeau de l’empereur Hadrien (ses cendres y sont déposées en 139), transformé en bastion militaire, en prison, puis en résidence papale.
Il est surmonté d’une statue de l’archange saint Michel, dont on ne sait pas, quand on l’aperçoit, s’il dégaine son glaive ou s’il le remet au fourreau. La statue est récente: elle date de 1753: c’est un bronze de Peter Antin von Verschaffelt. Ce serait la représentation d’un songe du pape Grégoire Ier, alors que la population de Rome était décimée par la peste de 590. Après une procession et des prières publiques, le pape vit en songe que l’archange rengainait son glaive : l’épidémie prenait fin.
C’est là que le pape Clément VII a pu se réfugier, en passant par le « Passetto » alors que les lansquenets de Charles Quint mettaient à sac la Ville éternelle : c’était en 1527, le 6 mai. Les Gardes suisses furent massacrés en protégeant la fuite du pape. C’est pourquoi la prestation de serment des Gardes suisses pontificaux est fixée chaque année au 6 mai. Le pape s’enfuit ensuite à Orvieto.
La page en ligne de la Garde suisse, sur le site du Vatican raconte cet épisode terrible : « Après un moment d’hésitation, les mercenaires défoncèrent la Porta del Torrione, tandis que les lansquenets envahissaient Borgo Santo Spirito et Saint-Pierre. La Garde suisse, rassemblée aux pieds de l’obélisque qui se trouvait alors près du Campo Santo Teutonico, et les quelques troupes romaines, luttèrent désespérément. Le commandant Kaspar Röist, blessé, sera massacré par les Espagnols chez lui, sous les yeux de sa femme Elizabeth Klingler. Des 189 Suisses, seuls 42 purent en réchapper, c’est-à-dire ceux qui, à la dernière minute, sous le commandement de Hercules Göldli, avaient accompagné Clément VII à son refuge de Château Saint-Ange: les autres tombèrent glorieusement, massacrés, avec deux-cents fugitifs, sur les marches du maître-autel de la basilique Saint-Pierre. Le salut de Clément VII et de ses hommes fut possible grâce au «Passetto», un couloir secret construit par Alexandre VI sur la muraille qui reliait le Vatican à Château Saint-Ange ».
« La horde sauvage était pressée, raconte la même source, car elle craignait que les forces de la Ligue coupent la voie pour la retraite. Après avoir traversé le Ponte Sisto, les lansquenets et les Espagnols se ruèrent sur la ville, et pendant huit jours ils donnèrent libre course à tout abus, vol, sacrilège et massacre; même les tombes des Papes furent violées, y compris celle de Jules II, pour voler ce qui était à l’intérieur: les morts furent environ douze mille et le butin d’environ dix millions de ducats. Tout cela n’est pas étonnant, car l’armée impériale, et en particulier les lansquenets de Frundsberg, étaient animés par un esprit de croisade anti-papiste ».
Mais auparavant, un autre pape avait dû son salut au « Passetto », devant une autre armée d’occupation : les troupes du roi de France Charles VIII, qui s’était proclamé roi de Naples, entrèrent dans Rome, en décembre 1494, lors de la première Guerre d’Italie, et Alexandre VI se réfugia au Château Saint-Ange.

LE SAINT-SIÈGE ET LA LIBYE APRÈS LA MORT DU COLONEL KADHAFI

24 octobre, 2011

du site:

http://www.zenit.org/article-29281?l=french

LE SAINT-SIÈGE ET LA LIBYE APRÈS LA MORT DU COLONEL KADHAFI

Note de la salle de presse du Saint-Siège

ROME, jeudi 20 octobre 2011 (ZENIT.org) – “Le Saint-Siège et la Libye après la mort du colonel Kadhafi”: c’est le titre d’une Note de la salle de presse du Saint-Siège publiée ce jeudi soir, et dont nous donnons ci-dessous notre traduction de l’italien.
Le Saint-Siège y redit son soutien au “peuple libyen” et à “la transition”, en vue de la “pacification et de la “reconstruction”, dans la “justice” et le “droit”.
Les responsables de la nouvelle Libye pour leur part remercié le pape pour ses “appels humanitaires” et la communauté catholique pour ses hôpitaux et les centres  d’aide de 13 comunautés religieuses.
« Le colonel Mouammar Kadhafi a été tué ce jeudi, 20 octobre, dans le dernier assaut contre sa région d’origine : Syrte tombée aux mains des forces du CNT après plus d’un mois de combats sanglants. La nouvelle a été confirmée par le porte-parole officiel du Conseil national de transition. C’est la fin de 42 ans de dictature en Libye. Confronté à un soulèvement sans précédent contre son régime, Mouammar Kadhafi était entré dans la clandestinité depuis la chute de Tripoli en août », rapporte Radio Vatican.
Radio Vatican rapporte aussi deux réactions du Saint-Siège, celle du cardinal Bertone, et, en ligne, celle du nonce apostolique, Mgr Tommaso Caputo ( ). A l’occasion d’une cérémonie dans un hôpital de Rome, le cardinal secrétaire d’État Tarcisio Bertone a estimé qu’il fallait « travailler pour le peuple libyen et pour que tous coopèrent pour la reconstruction ».
Depuis le début de la guerre en Libye, rappelle aussi Radio Vatican, le pape avait à plusieurs reprises exprimé sa vive préoccupation, appelant à des pourparlers pour parvenir à une solution politique.
Note de la salle de presse du Saint-Siège
La nouvelle de la mort du colonel Mouammar Kadhafi clôt la trop longue et tragique phase de la lutte sanglante pour abattre un régime dur et oppresseur.
Cet événement dramatique oblige une fois encore à la réflexion sur le prix de l’immense souffrance humaine qui accompagne l’affirmation et l’écroulement de tout système qui n’est pas fondé sur le respect et la dignité de la personne, mais sur l’affirmation dominante du pouvoir.
On doit donc maintenant souhaiter qu’épargant au peuple libyen de nouvelles violences dues à un esprit de revanche ou de vengeance, les nouveaux gouvernants puissent entreprendre au plus vite la nécessaire oeuvre de pacification et de reconstruction, dans un esprit d’inclusion, sur la base de la justice et du droit, et que la communauté internationale s’engage à aider généreusement la réédification du pays
De son côté, la petite communauté catholique continuera à offrir son témoignage et son service désintéressé, en particulier dans les domaines caritatif et sanitaire, et le Saint-Siège s’engagera en faveur du peuple libyen dans le  domaine des relations internationales, dans un esprit de promotion de la justice et de la paix.
A ce propos, il est opportun de rappeler que c’est une pratique constante du Saint-Siège, pour l’établissement de relations diplomatiques, de reconnaître les Etats et non les gouvernements. Par conséquent, le Saint-Siège n’a pas procédé à une reconnaissance formelle du Conseil national de transition (CNT) comme gouvernement de la Libye. Etant donné que le CNT s’est installé de façon effective comme gouvernement à Tripoli, le Saint-Siège le considère comme le légitime représentant du peuple libyen, conformément au droit international.
Le Saint-Siège a déjà eu différents contacts avec les nouvelles autorités de la Libye. En premier lieu, la Secrétairerie d’Etat, qui a la responsabilité des rapports diplomatiques du Saint-Siège, a eu des contacts avec l’ambassade de Libye près le Saint-Siège, après le changement politique à Tripoli. Au cours de sa récente participation à l’Assemblée générale des Nations unies, le secrétaire pour les Relations avec les Etats, S.E.  Mgr Dominique Mamberti,  a eu l’occasion d’avoir un entretien avec le Représentant permanent de la Libye à l’ONU, M. Abdurrahman M. Shalgham. Et, plus récemment, le nonce apostolique en Libye, S.E. Mons. Tommaso Caputo, qui réside à Malte, s’est rendu à Tripoli pour une visite de trois jours, (du 2 au 4 octobre) au cours de laquelle il a rencontré le Premier ministre du CNT, M. Mahmoud Jibril. Mgr Caputo a été reçu également par le ministère des Affaires étrangères.                  
A l’occasion de ces différentes rencontres, les deux parties ont souligné l’importance des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et la Libye. Le Saint-Siège a eu l’occasion de renouveler son appui au peuple libyen et son soutien à la transition. Le Saint-Siège a souhaité aux nouvelles autorités de réussir dans la reconstruction du pays. Pour leur part, les responsables de la nouvelle Libye ont dit combien ils ont apprécié les appels humanitaires du Saint-Père et l’engagement de l’Eglise en Libye, surtout grâce au service des hôpitaux ou d’autres centres  d’aide de 13 comunautés religieuses (6 en Tripolitaine et 7 en Cyrénaïque).