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24 JUIN : NATIVITÉ DE SAINT JEAN-BAPTISTE

24 juin, 2013

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24 JUIN : NATIVITÉ DE SAINT JEAN-BAPTISTE

Sommaire :

  Evangile (Luc, I 57-80)
  Méditation et historique

EVANGILE SELON SAINT LUC (I 57-80)

Quand à Elisabeth, le temps fut révolu où elle devait enfanter, et elle donna naissance à un fils. Et ses voisines et ses parents apprirent que le Seigneur avait magnifié sa miséricorde à son égard, et ils s’en réjouissaient avec elle.
Or, le huitième jour, ils vinrent pour circoncire[1] l’enfant, et ils voulaient l’appeler Zacharie, du nom de son père[2]. Et prenant la parole, sa mère dit : « Non, mais il s’appellera Jean.[3] » Et on lui dit : « Il n’y a personne de ta parenté qui soit appelé de ce nom. » Et on demandait par signes au père comment il voulait qu’on l’appelât[4]. Et ayant demandé une tablette, il écrivit : « Jean est son nom.[5] » Et ils furent tous étonnés.
Sa bouche s’ouvrit à l’instant même et sa langue se délia[6], et il parlait, bénissant Dieu. Et la crainte s’empara de tous leurs voisins et, dans toute la région montagneuse de la Judée, on s’entretenait de toutes ces choses. Et tous ceux qui en entendirent parler les mirent dans leur cœur, en disant : « Que sera donc cet enfant ? » Et de fait la main du Seigneur était avec lui[7].
Et Zacharie, son père, fut rempli du Saint-Esprit et il prophétisa[8] en disant[9] :
« Béni soit le Seigneur Dieu d’Israël : il visite[10] et rachète son peuple. Il nous suscite une force de salut dans la maison de David, son serviteur, comme il l’a dit par la bouche des saints, ceux d’autrefois[11] , ses prophètes[12]. Salut qui nous arrache à l’oppresseur, aux mains de tous nos ennemis[13]  ; amour qu’il scellait avec nos pères et souvenir de son alliance sainte ; serment juré à notre père Abraham de nous donner, qu’affranchis de la crainte, délivrés des mains de l’oppresseur, nous le servions en justice[14] et sainteté devant sa face tout au long de nos jours. Et toi, petit enfant, qu’on nommera prophète du Très-Haut, tu marcheras devant la face du Seigneur pour préparer ses voies ; pour annoncer à son peuple le salut en rémission de ses péchés, par l’amour du cœur de notre Dieu qui vient nous visiter ; soleil levant, lumière d’en haut sur ceux de la ténèbre qui gisent dans l’ombre de la mort[15] , et guide pour nos pas au chemin de la paix.[16] »
Quant à l’enfant, il croissait, et son esprit se fortifiait[17]. Et il fut dans les endroits déserts jusqu’au jour où il se présenta à Israël.
———————-
[1] La circoncision avait été donnée à Abraham pour distinguer sa race de toute autre race et la préparer à posséder les biens promis à Dieu; quand arriva ce qui avait été promis, le signe fut aboli. A la circoncision, qui cesse à J.-C., succède le baptême; et c’est pourquoi Jean devait être circoncis. On l’imposait au huitième jour; l’enfant était moins sensible à la souffrance; et d’autre part on lui imposait cette marque qui l’incorporait au peuple de Dieu avant qu’il ne put le vouloir lui-même, pour établir que c’était une pure grâce.  On lui donnait après la circoncision le nom qu’il devait porter, car avant de faire nombre dans le peuple de Dieu, il devait porter le signe de Dieu. Cela signifiait aussi que pour être inscrit au livre de vie, il devait avoir dépouillé les passions charnelles (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[2] On pensait qu’à cet enfant du miracle on ne pouvait donner de nom plus honorable que celui de son père Zacharie, de ce prêtre qui avait passé sa longue vie dans la piété et la justice. » Cela ne pouvait déplaire à la mère. Ce ne fut donc pas par répugnance pour ce nom, mais sous l’action de l’Esprit Saint qu’elle se montra si affirmative (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31).
[3] Elle ne pouvait pas ignorer le nom du précurseur du Christ, elle qui avait prophétisé le Christ (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31).
[4] Zacharie, prêtre de la classe d’Abia, époux d’Elisabeth, avait été réduit au silence pour n’avoir pas cru à l’annonce de l’Ange : « Moi, je suis Gabriel, qui me tiens devant Dieu, et j’ai été envoyé pour te parler et t’annoncer cette bonne nouvelle. Et voici que tu vas être réduit au silence et sans pouvoir parler jusqu’au jour où ces choses arriveront, pour ce que tu n’as pas cru à mes paroles, lesquelles s’accompliront en leur temps » (évangile selon saint Luc, I 19-20).
[5] Nous ne lui imposons pas nous-mêmes sont nom : il a déjà son nom donné par Dieu, nous le faisons connaître seulement. Les saints méritent de recevoir leur nom de Dieu ; les anges ne font que transmettre ces noms, ils ne les donnent pas eux-mêmes. Il apparaît bien que ce sera là non pas un nom de parenté, mais de prophétie (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 31 & 32).
[6] Il aurait été contradictoire qu’à l’apparition de celui qui devait être la voix, son père demeurât muet (saint Grégoire de Nazianze : discours XII).
Cette bouche avait été fermée par l’Ange; elle est ouverte par le fils qui avait été promis par l’Ange (saint Maxime de Turin : homélie LXV).
Il convenait que la foi déliât cette langue qui avait été liée par l’incrédulité. Croyons, nous aussi, et notre langue qui demeure embarrassée tant que nous sommes dans les liens de l’incrédulité, saura trouver des paroles pleines de raison. Si nous voulons savoir parler, sachons écrire en esprit les mystères de Dieu : sachons écrire non sur des tablettes, mais dans nos cœurs, tout ce qui annonce le Christ (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 32).
[7] Maintenant encore l’Eglise célèbre cette naissance ; elle ne célèbre que trois naissances, celle du Fils de Dieu, celle de sa mère et celle-ci ; elle sait « que pour l’homme le jour de la mort est meilleur que celui de sa naissance », et que toute naissance humaine est accompagnée de tristesse. C’est pourquoi elle célèbre la mort des martyrs qu’elle appelle leur naissance, car ils naissent vraiment à la vie quand ils se dépouillent de la vie pour le Christ. Mais cette naissance de Jean, l’Eglise la célèbre avec assurance sur la parole si expresse de l’Ange (saint Pierre Damien : sermon XXIII, sur la nativité de saint Jean-Baptiste, 4).
[8] Voyez comme Dieu est bon et comme il pardonne complètement : non seulement il rend ce qu’il avait pris, mais il accorde des faveurs que l’on ne pouvait espérer. Cet homme, tout à l’heure muet, prophétise; ceux qui auront renié Dieu, sous l’action des grâces nouvelles, le loueront. Que personne donc ne perde confiance; que personne, au souvenir des fautes anciennes, ne désespère des dons de Dieu. Dieu sait changer ses jugements, si vous savez renoncer à vos fautes (saint Ambroise : commentaire de l’évangile selon saint Luc, II 33).
[9] Ce cantique contient deux prophéties : l’une relative au Christ, l’autre à Jean. La première est exprimée dans ces paroles qui annoncent la chose comme déjà présente : « Dieu a visité. » Celle qui a rapport au Précurseur sera annoncée tout à l’heure au futur (Origène : homélie X sur l’évangile selon saint Luc).
[10] Ce peuple qu’il a visité, c’est cette nation qui depuis si longtemps portait le nom de peuple de Dieu, et qui depuis longtemps semblait abandonnée de Dieu. C’était aussi ce peuple qui, dans le monde entier, gémissait sous le joug du péché et que le sang du Sauveur allait racheter et dont il allait faire son peuple par cette rédemption (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[11] Je pense qu’Abraham, Isaac et Jacob, au jour de l’avènement du Christ, ont joui des effets de sa miséricorde; il n’est pas possible que ceux qui avaient vu de loin son jour et en avaient eu une grande joie, n’aient pas eu une joie plus grande au jour où vint celui dont il est dit, « qu’il a, par le sang de sa croix, fait la paix et sur la terre et dans le ciel » (Origène : homélie X sur l’évangile selon saint Luc).
[12] Toutes les Ecritures de l’ancienne Loi avaient eu pour objet le Christ ; Adam lui-même et tous les patriarches après lui, par leurs paroles ou par leurs actes, avaient rendu témoignage de cette économie qui préparait le Christ (saint Bède le Vénérable).
[13] Nos ennemis sont aussi nos convoitises, qui nous font la guerre dans nos membres, et nos péchés qui nous accablent, et nos faiblesses qui nous tuent, et les terreurs de la conscience qui ne nous laissent aucun repos (Bossuet).
[14] Non plus dans la justice charnelle des Juifs qui mettaient leur confiance dans les victimes et les observances de la Loi, mais dans une justice spirituelle, se traduisant en œuvres bonnes : dans la sainteté qui nous rend dignes de Dieu, et dans la justice qui nous fait accomplir tous nos devoirs envers le prochain; non plus dans une justice extérieure, comme est celle des hommes qui cherchent à plaire aux hommes, mais dans une justice qui agit devant Dieu, qui cherche non l’approbation des hommes, mais celle de Dieu; et cela non pas une fois ou pour un temps, mais tous les jours de la vie (saint Jean Chrysostome : « Contra Judæos et Gentiles quod Christus sit Deus »).
[15] L’ombre de la mort c’est l’oubli envahissant l’âme : de même que la mort met un abîme entre le mort et les régions de la vie, de même l’oubli entre l’âme et l’objet qui s’est éloigné de son souvenir : le peuple juif, ayant oublié Dieu, était dans la mort par rapport à Dieu (saint Grégoire le Grand : « Moralia in Job », XVI 30).
[16] Nous dressons nos pas dans le chemin de la paix quand le mouvement de nos actes est toujours en accord avec la grâce de notre Créateur (saint Grégoire le Grand : homélie XXXIII sur les péricopes évangéliques, 4).
[17] Il y a des hommes qui cultivent en eux la vigueur corporelle pour être vainqueurs dans les combats : l’athlète de Dieu se fortifiait dans l’esprit pour briser la puissance de la chair (Origène : homélie XI sur l’évangile selon saint Luc).

MÉDITATION ET HISTORIQUE
L’Église célèbre la naissance du Sauveur au solstice d’hiver et celle de Jean-Baptiste au solstice d’été. Ces deux fêtes, séparées l’une de l’autre par un intervalle de six mois, appartiennent au cycle de l’Incarnation ; elles sont, par leur objet, dans une mutuelle dépendance ; à cause de ces relations, on peut leur donner le même titre, c’est en latin : nativitas, naissance ; natalis dies, Noël.
Pourquoi célébrer la naissance de Jean-Baptiste, se demande saint Augustin, dans un sermon qui se lit à l’office nocturne ? La célébration de l’entrée de Jésus-Christ dans ce monde s’explique fort bien ; mais les hommes – et Jean-Baptiste en est un – sont d’une condition différente ; s’ils deviennent des saints, leur fête est plutôt celle de leur mort : leur labeur est consommé, leurs mérites sont acquis ; après avoir remporté la victoire sur le monde, ils inaugurent une vie nouvelle qui durera toute l’éternité. Saint Jean-Baptiste est le seul à qui soit réservé cet honneur ; et cela dès le cinquième siècle, car la nativité de la Vierge Marie ne fut instituée que beaucoup plus tard. Ce privilège est fondé sur ce fait que Jean a été sanctifié dès le sein de sa mère Élisabeth, quand elle reçut la visite de Marie sa cousine ; il se trouva délivré du péché originel ; sa naissance fut sainte, on peut donc la célébrer. C’est un homme à part, il n’est inférieur à personne, non surrexit inter natos mulierum major Jobanne Baptista. L’ange Gabriel vint annoncer sa naissance, son nom et sa mission, nous dit saint Maxime, dans une leçon de l’octave ; sa naissance merveilleuse a été suivie d’une existence admirable, qu’un glorieux trépas a couronnée ; l’Esprit Saint l’a prophétisé, un ange l’a annoncé, le Seigneur a célébré ses louanges, la gloire éternelle d’une sainte mort l’a consacré. Pour ces motifs, l’Église du Christ se réjouit dans tout l’univers de la naissance du témoin qui signala aux mortels la présence de celui par lequel leur arrivent les joies de l’éternité.
Saint Augustin, qui s’appliquait à découvrir les raisons mystérieuses des événements, a voulu savoir pourquoi Jésus-Christ est né à l’équinoxe d’hiver et Jean-Baptiste à celui d’été. Dans le sermon du quatrième jour dans l’octave, il nous propose ce qu’il a découvert : Jean est un homme, le Christ est Dieu. Que l’homme se fasse petit, pour que Dieu apparaisse plus grand, suivant ces paroles dites par Jean au sujet du Sauveur : il faut qu’il croisse et que moi, je diminue. Pour que l’homme soit abaissé, Jean naît aujourd’hui, où les jours commencent à diminuer ; pour que Dieu soit exalté, le Christ naît au moment où les jours commencent à grandir. tout cela est très mystérieux. La naissance de Jean-Baptiste, que nous célébrons, est, comme celle du Sauveur, pleine de mystère. Quel est ce mystère, si ce n’est celui de notre humiliation, comme la naissance du Christ est pleine du mystère de notre élévation.
Ces témoignages de saint Maxime et de saint Augustin prouvent que cette fête est l’une des plus anciennes du calendrier. Sa célébration est constatée dès le milieu du quatrième siècle. Elle a déjà sa place parmi les solennités importantes ; on lui donna bientôt une octave et une vigile et elle traversa le moyen âge avec ce complément.
Les Pères du Concile de Bâle, dans leur quarante-troisième session (1441), firent suivre son octave d’une fête nouvelle, la Visitation, et Eugène IV eut soin de confirmer plus tard cette mesure. Ce n’est pas le Concile de Bâle, il est vrai, qui établit cette fête, il n’eut qu’à la fixer au 2 juillet ; son institution remonte au pontificat d’Urbain VI qui espérait, par ce moyen, appeler la protection de Notre Dame sur l’Église menacée d’un nouveau schisme ; la bulle qui lui assignait un jour après l’Annonciation fut promulguée par Boniface IX (1389).
Le Noël d’été a, comme celui d’hiver, son cortège liturgique. Sa vigile est une réduction de l’Avent : L’Église présente à nos réflexions le récit évangélique de la mission de l’ange Gabriel auprès de Zacharie, pour lui prédire la naissance d’un enfant : l’envoyé céleste lui dit qu’il sera grand devant le Seigneur ; l’Esprit Saint le remplira de sa vertu, dès le sein de sa mère ; il convertira un grand nombre de fils d’Israël au Seigneur leur Dieu ; il précédera le Seigneur, dans l’esprit et la vertu d’Élie ; il conciliera aux fils le cœur des pères ; il amènera les incrédules à la prudence des justes ; il préparera au Seigneur un peuple parfait. L’octave de la fête pourrait fort bien être appelée la circoncision de Jean-Baptiste : en ce jour, son père lui donna son nom et il entonna ce Benedictus Dominus Deus Israël que nous chantons tous les jours de l’année, à l’office du matin, en l’honneur de l’Oriens ex alto. La Visitation est, en quelque sorte, l’épiphanie de Jean-Baptiste : il confesse par un tressaillement la manifestation de Jésus, caché dans le sein maternel. Notre Dame chante au Seigneur le Magnificat anima mea Dominum.Ce Noël d’été précède le Noël d’hiver, comme saint Jean-Baptiste est le précurseur de Jésus-Christ ; elle l’annonce ; nous le verrons paraître quand le soleil sera au terme de ses diminutions.
L’objet historique de la fête et la doctrine qui l’éclaire sont exposés par saint Luc, au chapitre premier de son Évangile. Les trois passages qui nous intéressent sont lus aux messes de la vigile, de la Nativité et de la Visitation ; il est nécessaire d’y ajouter quelques lignes de l’évangile de saint Jean, qui termine la messe : Fuit homo missus a Deo, cui nomen erat Johannes ; his venit in testimonium, ut testimonium perbiberet de lumine, ut omnes crederent per illum ; non erat ille lux, sed ut testimonium perbiret de lumine. Il est le témoin, le précurseur, la voix de Dieu…
Une mission de ce caractère n’a pu échapper aux Prophètes de l’Ancien Testament ; il faut nous attendre à trouver, sous leur plume, des figures lumineuses qui aident à la saisir. Le plus expressif est Jérémie. Le début de sa prophétie s’applique aussi bien à saint Jean-Baptiste qu’à lui-même ; l’analogie est frappante ; il n’y a qu’à le reproduire et chacun, à première vue, pourra s’en convaincre : La parole du Seigneur s’est fait entendre ; il me disait : Je te connaissais avant de te former dans le sein de ta mère ; je t’ai sanctifié avant que tu en sortes ; je t’ai choisi pour être mon prophète devant les nations. Et j’ai bégayé, A, a, a, Seigneur, mon Dieu ; mais je ne sais pas parler, je ne suis qu’un enfant. Et le reste. L’Église fait lire Jérémie aux matines de la fête et à la messe de la vigile. L’épître du jour est empruntée à Isaïe ; c’est de Jean-Baptiste qu’il écrit : Que les îles écoutent ; peuples éloignés, faites attention. Le Seigneur m’a appelé, il s’est souvenu de mon nom dès le sein de ma mère. Il a fait de ma langue un glaive aigu ; il m’a protégé de l’ombre de sa main ; il m’a pris comme une flèche de son choix et il m’a caché dans son carquois… Le Seigneur, qui a fait de moi son serviteur dès le sein maternel, me dit : Je t’ai donné aux nations comme leur lumière pour que tu sois mon salut jusqu’aux extrémités de la terre.
Ces lectures fournissent le texte des antiennes et des répons : l’introït et le graduel enferment, dans leur mélodie, ce que Jérémie et Isaïe ont pu dire de la sanctification de Jean-Baptiste avant sa naissance ; le verset alleluiatique et la communion répètent cette déclaration de Zacharie devant le berceau et les langes de son enfant : Tu, puer, Propheta altissimi vocaberis ; prœibis enim ante faciem Domini parare vias ejus. Tu t’appelleras, enfant, le prophète du Très-Haut ; tu iras devant la face du Seigneur pour lui préparer les voies. Nous retrouvons ces mêmes paroles aux offices du jour et de la nuit : les antiennes, qui accompagnent les psaumes de vêpres, de matines ou de laudes, sont tirées de l’Évangile et des prophètes. Les unes prennent les traits principaux du récit et le reconstituent ; par exemple, celles des laudes et des secondes vêpres : Élisabeth Zachariæ magnum virum genuit, Jobannem prœcursorem Domini, c’est l’annonce de l’événement ; de là, nous passons à la circoncision et à la tradition du nom : Innuebant patri ejus, quem vellet vocari eum ; et scripsit, dicens : Joannes est nomen ejus ; la troisième revient sur la même pensée ; après quoi, il semble que nous soyons mis en présence de l’enfant et, en le saluant nous ne pouvons que lui rendre les témoignages contenus dans l’Évangile : Inter natos mulierum non surrexit major Jobanne Baptista. Les antiennes des premières vêpres traduisent les mêmes impressions et empruntent leurs formules aux mêmes sources : le peuple chrétien se représente la scène et s’approprie les sentiments et le langage de ceux qui remplissent un rôle actif ; avec eux, il dit de Jean : Ipse præbit ante illum in spiritu et virtute Eliæ – Joannes est nomen ejus ; vinum et siceram non bibet. – Ex utero senectutis et sterili Joannes natus est præcursor Domini. Je ne dis rien des antiennes de matines : elles ont ce même caractère. Pendant que l’âme s’applique à suivre le sens des psaumes, l’imagination est occupée par ces souvenirs ; cela ne lui damande guère d’effort ; elle est paisible ; l’esprit, qui reçoit ses impulsions, découvre dans la psalmodie, à la faveur d’aperçus auxquels il n’aurait jamais songé de lui-même, des allusions ingénieuses à la solennité ; la pensée de saint Jean apparaît partout.
Les observations faites au sujet des antiennes valent pour les répons ; on s’exposerait, en les citant, à des répétitions inutiles : ils transportent, dans le chant, des textes connus déjà ; je n’en reproduirai qu’un, d’une facture assez originale. Hic est præcursor dilectus, voici le précurseur bien-aimé, et lucerna lucens ante dominum, et la lumière qui brille devant le Seigneur. Ipse est enim Joannes, qui viam Domino preparavit in eremo, c’est Jean qui a préparé au Seigneur la voie dans le désert, sed et Agnum Dei demonstravit et illuminavit mentes hominum, il a montré l’agneau de Dieu et éclairé l’esprit des hommes. Ipse præibit ante illum in spiritu et virtute Eliæ. En résumé, les antiennes et les répons ne font que répéter ce que l’Évangile présente de saillant ; ces traits sont de nature à pénétrer l’âme de la mission du précurseur et de son importance ; ils accroissent, par leur répétition même, l’admiration pour son caractère et sa personne ; son souvenir prend vie dans le cœur.
L’Ange Gabriel avait annoncé à Zacharie que la naissance de Jean serait, pour un grand nombre, une occasion de joie, multi in nativitate ejus gaudebunt. En souvenir de cette prophétie, sa fête est joyeuse ; elle a pour signe caractéristique une allégresse qui ne se trouve pas ailleurs. L’Église invite les fidèles à s’y abandonner ; il lui suffit de leur répéter, par ses antiennes, les paroles de Gabriel. Mais la piété chrétienne ne s’est pas contentée du chant liturgique pour manifester sa joie ; elle a emprunté, en les transformant, les usages par lesquels les païens célébraient le solstice : on sait que l’instinct qui portait ces derniers à substituer, dans leur vénération religieuse, les forces créées de la nature à leur auteur, les faisait rendre un culte au soleil et au feu dont il est le grand foyer ; leur dévotion s’épanchait en manifestations bruyantes, au moment des équinoxes ; les fêtes, qui bénéficiaient d’une popularité extraordinaire, consistaient surtout en des réjouissances publiques ; la principale était d’allumer de grands feux autour desquels dansait la population. Le paganisme grec et romain avait eu l’art de mêler ainsi son culte à la vie extérieure des peuples, et c’est ce qui contribua le plus à le faire entrer dans les mœurs, si profondément même que ces coutumes ont survécu au paganisme.
Il y avait là, pour les chrétiens, un véritable danger ; tout le monde prenait part à ces réjouissances, qui en elles-mêmes n’avaient rien de condamnable. Mais les circonstances, en les liant à une superstition, les mettaient au service du paganisme naturaliste ; c’était un entraînement auquel on résistait fort mal. Tertullien, le premier, dénonça les chrétiens impudents, qui ne craignaient pas de célébrer ainsi les calendes de janvier, les brumalies et les saturnales. La conversion de l’Empire laissa leur popularité aux réjouissances solsticiales dans l’Afrique romaine, à Rome et dans les Gaules. Les évêques voyaient ce fait avec mécontentement ; saint augustin protestait avec énergie. Habeamus solemnem istum diem, disait-il, non sicut infideles, prpter hunc solem, sed propter eum qui fecit hunc solem, solennisons ce jour, non comme des infidèles, à cause du soleil, mais à cause de celui qui a fait le soleil. Saint Césaire proscrivit, pour les mêmes motifs, ces survivances païennes ; l’évêque franc, auteur des sermons qui nous sont parvenus sous le nom de saint Éloi, défend aux chrétiens de célébrer les solstices par des danses, des caroles et des chants diaboliques. Mais la fidélité aux superstitions pyrolatriques était tenace ; les évêques ne purent en avoir raison. C’est en vain que Charlemagne leur recommanda, par un capitulaire, de proscrire de nouveau ces feux sacrilèges et ces usages païens ; il fallut en prendre son parti et chercher à transformer, par une intention pieuse, l’abus qu’on ne pouvait supprimer. Cette évolution se produisit l’abus qu’on ne pouvait supprimer. Cette évolution se produisit dans le cours du neuvième siècle : on s’apercevait enfin qu’un retour offensif du paganisme n’était plus à craindre ; il était donc inutile de se prémunir contre un ennemi définitivement vaincu.
La réaction contre les pagania solsticiales avait sans nul doute accru la note joyeuse de la fête de saint Jean-Baptiste. Cette joie spirituelle, par son charme, contribuait à détourner les chrétiens de ces réjouissances profanes ; elle servit à ménager l’évolution, qui débarrassa ces dernières de toute pensée superstitieuses, en les associant à la fête de saint Jean-Baptiste. Le solstice d’été tomba dans l’oubli ; les feux furent allumés pour manifester la joie que la naissance du Précurseur causait au monde ; le feu devint ecclésiastique : le clergé alla processionnellement le bénir ; la Jouannée, ainsi que nos pères la nommaient, resta l’une des fêtes les plus populaires et les bourgeois des villes ne l’appréciaient pas moins que les campagnards.
Les Parisiens, entre autres, étaient amateurs des feux de saint Jean ; ils en allumaient un par quartier. Celui de la Bastille passait pour l’un des mieux réussis, la garnison de la forteresse assistait en armes à son embrasement. Il ne valait pas cependant celui de la place de Grève ; on laissait au roi l’honneur de l’allumer : Louis XI le fit en 1471, François Ier en 1528, Henri II et Catherine de Médicis en 1549, Charles IX en 1573, Henri IV en 1596, Louis XIII en 1615 et 1620, Anne d’Autriche en 1616 et 1618, Louis XIV en 1648 ; à partir de cette date, l’honneur d’allumer le feu revint au conseil de ville.
Les hommes de la Révolution furent incapables de comprendre ces réjouissances et elles disparurent, à Paris du moins, en 1789 ; il en fut de même dans la plupart des villes importantes ; à Douai, où la population tenait à ces feux au point d’en allumer un dans chaque rue, tous les soirs du 23 au 29 juin, la police les interdit en 1793 ; ils furent rallumés en 1795 et les années suivantes jusqu’en 1806, sans tenir compte d’une nouvelle défense promulguée en 1797.
Ces réjouissances populaires et religieuses faisaient entrer le sentiment chrétien dans la vie des villages et des villes ; la religion n’était pas reléguée entre les murailles des sanctuaires ; les hommes la connaissaient, ils l’aimaient comme un élément essentiel de leur existence. Les coutumes auxquelles on avait l’esprit de la mêler transmettaient, avec elles, sa pensée d’une génération à l’autre ; cela pouvait aller fort loin, car ces habitudes populaires sont tenaces. Ce fait n’a pas été toujours compris au dix-neuvième siècle. Ces traditions ont eu fréquemment pour adversaires aveugles des catholiques, qualifiés hommes d’œuvre, et des prêtres, qui ont affecté d’y voir des pratiques superstitieuses. C’est ainsi que les feux de saint Jean se sont éteints peu à peu dans un grand nombre de campagnes ; il est juste de dire que saint Jean-Baptiste n’y a pas gagné un rayon de joie spirituelle ; sa fête passe presque inaperçue ; elle attire certainement beaucoup moins de monde à la messe et à la Sainte Table que le premier vendredi du mois.

17 Décembre: Saint Grégoire de Tours (mf)

17 décembre, 2012

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17 Décembre: Saint Grégoire de Tours (mf)

Par son aïeule paternelle, Léocradie, Grégoire descendait de Vettius Epagathus qui fut un des martyrs de Lyon2, et, par sa mère, Armentaire, il était un arrière-petit-fils de saint Grégoire3 qui fut évêque de Langres. Fils du sénateur Florent, il naquit à Clermont le 30 novembre 539.
A cinq ans, il fut confié à son oncle paternel, saint Gal, évêque de Clermont4, et, dès ce temps-là, il paraissait si saint que son cousin Nizier, saint évêque de Lyon, le regardait comme un saint et un prédestiné ; en effet, dans son enfance, instruit en songe par un ange, il guérit deux fois son père des maux dont il était tourmenté : une fois, en mettant sous le chevet du lit paternel une tablette où était écrit le nom de Jésus, et une autre fois, à l’exemple de l’ange Raphaël, dans le livre de Tobie, par l’odeur du foie d’un poisson qu’il fit rôtir.
Etant lui-même tombé malade, il se fit porter au tombeau de saint Alyre qui fut évêque de Clermont5 ; n’ayant obtenu aucun résultat la première fois, il promit à la seconde d’entrer dans l’Eglise et recouvra la santé.  En 569, il reçut le diaconat des mains de Cautin, successeur de saint Gall.
Comme un bourgeois de Clermont qui avait apporté de Tours un morceau de bois détaché du tombeau de saint Martin, ne le gardait pas dans sa maison avec la révérence convenable, tous ses domestiques tombèrent malades. Lorsqu’il eut recours à Dieu pour savoir la cause du mal, un visage indigné lui apparut en songe pour lui dire que le peu de respect porté à la relique était la cause de ses maladies qui cesseraient quand il remettrait le précieux dépôt entre les mains du diacre Grégoire. Il le fit et il vit l’accomplissement de la promesse. Grégoire visitait alors souvent des religieux pénitents dont la conversation le dégoûta entièrement du monde ; il s’adonna à la prière continuelle et de grandes austérités qui altérèrent tant sa santé que l’on désespéra de le guérir ; il se fit transporter au tombeau de saint Martin où il reçut une parfaite guérison, miracle qui se reproduisit si souvent qu’on eût dit qu’il ne tenait la vie que de ce grand saint.
Ses fréquents pèlerinages à Tours l’y rendirent si familier qu’après la mort d’Euphrone (4 août 573), malgré sa résistance, selon les vœux du roi Sigebert6 et de la reine Brunehaut, on l’élit évêque de Tours où, après les guerres qui avaient désolé le pays, les églises étaient ruinées, les mœurs corrompues et la discipline altérée. Avec un zèle merveilleux, il fit remédier à tous ces désordres, surmontant les obstacles qu’il trouva d’abord à ses desseins. Il fit restaurer sa cathédrale et fit bâtir d’autres églises. Il corrigea dans le peuple un grand nombre d’abus et réforma son clergé. Il avait le don du discernement des esprits dont il se servait utilement pour délivrer ses ouailles de leurs maladies spirituelles ; ainsi,  ayant découvert à deux religieux, Sénoch et Liobard, dont chacun vantait la sainteté, leurs plus secrètes pensées, il les guérit d’une vanité dangereuse qu’ils entretenaient dans leur cœur sans la bien connaître. Il secourait  les pauvres plutôt selon la grandeur de sa charité, qui était sans bornes, que selon la force de son bien et du revenu de son évêché. Il soutenait avec un courage intrépide les immunités ecclésiastiques et le droit d’asile des temples sacrés contre les plus grands seigneurs et contre les rois eux-mêmes ; ainsi ne voulut-il jamais livrer au roi Chilpéric7 son fils Mérovée qui s’était réfugié au pied de l’autel de Saint-Martin ; quand le duc Bladaste et le comte Badachaire eurent recours au même asile, il s’en fut trouver le roi Gontran8 qui, refusant de pardonner, s’entendit dire : Puisque vous ne voulez pas, Sire, m’accorder ce que je vous demande, que souhaitez-vous que je réponde à mon Seigneur qui m’a envoyé vers vous ? Le roi Gontran demanda : Et qui est ce seigneur ? Grégoire répondit en souriant : C’est le glorieux saint Martin, il a pris ces deux princes sous sa protection, et lui-même vous demande leur grâce. Ces paroles touchèrent tellement Gontran qu’il pardonna et fit rendre les biens qu’il avait confisqués.
Cet excellent prélat ne montra pas moins de constance dans un synode tenu à Paris contre saint Prétextat, évêque de Rouen, qui avait pour partie adverse le roi Chilpéric et la reine Frédégonde (577) ; les autres évêques n’osant pas parler en faveur de l’accusé, de peur de déplaire à la cour, Grégoire eut le courage d’exhorter ceux qui étaient les mieux venus auprès du roi à le persuader de se départir de cette affaire qui ne ferait que lui attirer le blâme des hommes, aussi bien que la colère et les justes vengeances de Dieu ; et comme Chilpéric le fit appeler devant lui pour se plaindre de ce qu’il soutenait un évêque qui lui était désagréable, il lui fit cette excellente réponse : Si quelqu’un de vos sujets s’écarte de son devoir et commet quelque injustice, vous êtes au-dessus de lui pour le châtier ; mais si vous-même vous vous éloignez du droit sentier de la justice, il n’y a personne qui ait le droit de vous punir. Nous donc, à qui Dieu a commis le soin des âmes, nous prenons alors la liberté de vous en faire de très humbles remontrances, et vous nous écoutez si vous voulez ; que, si vous ne nous écoutez pas, vous aurez à répondre à un souverain juge qui, étant le maître absolu des rois, vous traitera selon vos mérites.
Ce discours n’empêcha certes pas la condamnation de Prétextat, mais comme Frédégonde connut par là la vigueur épiscopale de Grégoire, elle fit ce qu’elle put par des promesses et des menaces pour l’attirer dans ses intérêts. Il fut insensible aux uns et aux autres, et, dans l’état déplorable où était alors le pays, troublé par les démêlés de quatre rois, et presque ruiné par les cruautés de deux reines ambitieuses, il sut se maintenir inviolablement dans la défense de la vérité et de la justice. Il éprouva néanmoins combien il était dangereux de déplaire à Frédégonde quand, trois ans après l’affaire de saint Prétextat, elle le fit citer devant un synode que l’on tenait à Brenni, près de Compiègne, sous prétexte qu’il avait mal parlé d’elle ; mais, n’ayant aucune preuve contre lui et son serment le purgeant entièrement, elle fut obligée de le laisser renvoyer absous, contrairement à celui qui l’avait accusé qui fut excommunié comme calomniateur.
En 594 il partit en pèlerinage à Rome pour vénérer les tombeaux des saints Apôtres. Saint Grégoire le Grand, qui était nouvellement élu pape, le reçut avec beaucoup d’honneurs ; cependant, le voyant de très petite taille, il admirait que Dieu eût enfermé une si belle âme et tant de grâces dans un si petit corps. L’évêque connut par révélation cette pensée, et lui dit : Le Seigneur nous a faits, et nous ne nous sommes pas faits nous-mêmes, mais il est le même dans les petits que dans les grands. Le Pape fut étonné de voir qu’il eût pénétré le secret de son cœur, et depuis il l’honora comme un saint, lui donna une chaîne d’or, pour mettre dans son église de Tours, et accorda en sa faveur de beaux privilèges à la même église.
Saint Grégoire de Tours a fait durant sa vie un très grand nombre de miracles et de guérisons surnaturelles ; mais, comme il était extrêmement humble, pour cacher la grâce des guérisons dont Dieu l’avait favorisé, il appliquait toujours sur les malades qu’il voulait guérir les reliques qu’il portait sur lui. Il a aussi reçu de la bonté de Dieu des faveurs et des assistances tout à fait extraordinaires. Des voleurs étant venus pour le maltraiter, ils furent contraints de s’enfuir par une terreur panique dont ils furent saisis. Un orage, accompagné d’éclairs et de tonnerres, s’étant élevé en l’air tandis qu’il était en voyage, il ne fit que lui opposer son reliquaire, et il se dissipa en un moment. Dans la même occasion, ce miracle lui ayant donné quelque vaine joie et quelque sorte de complaisance, il tomba aussitôt de cheval et apprit par là à étouffer dans son cœur les plus petits sentiments d’orgueil. Etant un jour de Noël, le matin, dans un grand assoupissement pour avoir veillé toute la nuit, une personne lui apparut en songe et le réveilla par trois fois, lui disant à la troisième fois, par allusion à son nom de Grégoire, qui signifie vigilant : Dormirez-vous toujours, vous qui devez éveiller les autres ? Enfin, sa vie a été remplie de tant de merveilles, qu’il faudrait un volume entier pour les rapporter.
Depuis son retour de Rome, il s’appliqua plus que jamais à la visite de son diocèse, à la correction et à la sanctification des âmes qui lui étaient commises, à la prédication de la parole de Dieu et à toutes les autres fonctions d’un bon évêque. Ce fut dans ces exercices qu’il acheva le cours de sa vie, étant seulement âgé de cinquante-six ans, le 17 novembre de l’an 595, qui était la vingt et unième de son épiscopat. L’humilité qu’il avait pratiquée pendant sa vie parut encore après son décès, par le choix qu’il fit de sa sépulture.
Saint Grégoire de Tours a beaucoup écrit mais son principal ouvrage est son Historia Francorum sans laquelle l’histoire et les mœurs de la seconde moitié du VI° siècle nous seraient presque inconnues. On peut le considérer comme le père de l’histoire de France.
2 Les martyrs de Lyon, dont la fête est célébrée le 2 juin, souffrirent leur passion en 177 ; les plus connus sont : saint Pothin, évêque de Lyon, Vettius Epagathus, le médecin phrygien Alexandre, Attale de Pergame, Alicibiade, Ponticus, Biblis, Sanctus, Maurus et Blandine. On connaît leur martyre par une lettre aux Eglises d’Asie et de Phrygie : « Vettius Epagathus se trouvait avec nos frères. Il débordait de charité envers Dieu et le prochain ; sa vie austère lui méritait, malgré sa jeunesse, l’éloge donné au vieillard Zacharie : oui, il marchait sans reproche dans tous les commandements et observances du Seigneur (S. Luc I 6). Il était diligent pour rendre service, très zélé pour Dieu, tout bouillant de l’Esprit. Un pareil homme ne put tolérer la procédure extravagante instituée contre nous. Dans un sursaut d’indignation, il réclama la parole, lui aussi, pour défendre ses frères et montrer qu’il n’y avait rien d’irréligieux ni d’impie parmi nous. Mais ceux qui étaient autour du tribunal crièrent haro sur lui, car c’était un homme connu, et le gouverneur n’admit point cette requête pourtant juste. Il se contenta de lui demander s’il était chrétien, lui aussi. Epagathus le reconnut d’une voix vibrante et fut admis au nombre des martyrs. »
3 Grégoire, seizième évêque de Langres, membre d’une des grandes familles sénatoriales de la Gaule romaine, naquit vers 450 et fut très jeune comte d’Autun, charge qu’il exerça pendant une quarantaine d’années avec beaucoup de conscience et une fermeté que certains jugèrent quelque peu excessive. Veuf, il fut élu évêque de Langres en 506. Son épiscopat dura près de 33 ans. Langres ayant été dévastée, il fixa sa résidence au castrum de Dijon. Evêque très zélé, il menait une vie fort mortifiée et consacrait de longues heures à la prière. Il avait l’habitude de passer une partie de la nuit dans le baptistère de Saint-Vincent, où étaient exposées de nombreuses reliques. Ayant redécouvert (à la suite d’une vision) les reliques de saint Bénigne, il fit construire sur la tombe du martyr une église (consacrée en 535) et il fonda pour la desservir l’abbaye de Saint-Bénigne, qu’il dota de terres prises sur son patrimoine. Il assista aux conciles d’Epaonne de 517, de Lyon vers 519 et de Clermont en 535 ; il se fit représenter par un de ses prêtres à celui d’Orléans (538). Lorsque l’abbé Jean, fondateur du monastère de Réomé, voulut se retirer à Lérins, il le rappela par une lettre sévère. Pris de fièvre en se rendant de Dijon à Langres pour y célébrer la fête de l’Epiphanie, il mourut le 4 janvier 539. Conformément à son désir, on ramena son corps à Dijon, où il fut inhumé dans le baptistère. Venance Fortunat composa son épitaphe. Des miracles ne tardèrent pas à se produire par son intercession. Il avait eu trois enfants, dont l’un, Tetricus, lui succéda comme évêque de Langres et fit construire un tombeau répondant mieux au culte dont son père était l’objet (I’anniversaire de cette translation se célébrait le 6 novembre); un autre fut le père de saint Euphrone, évêque de Tours ; et un troisième fut le grand-père de Grégoire de Tours qui a évoqué à diverses reprises avec de nombreux détails la figure de son aïeul.
4 Gal, issu d’une illustre famille clermontoise, fut d’abord moine à Cournon, à une dizaine de kilomètres de Clermont, puis diacre de Quintianus, évêque de sa ville natale. Thierry I°, fils de Clovis, se l’attacha ensuite et l’emmena dans quelques-uns de ses déplacements ; Gal séjourna notamment à Cologne. Enfin, il succéda à Quintianus au siège de Clermont. Il serait mort dans sa soixante-cinquième année, huit ans après une épidémie qui ravagea l’Europe et qu’on situe en 543 : sa mort daterait donc de 551 et sa naissance de 487. Son épiscopat ayant duré vingt-sept ans, couvrirait les années 524-51, période durant laquelle se tinrent les conciles de Clermont (535) et Orléans (541, 549) auxquels il participa, et ceux d’Orléans (533 et 538) où il se fit représenter. Malgré son séjour à la cour de Thierry I° et la faveur du roi et de la reine, Gal ne semble pas avoir joué un rôle majeur dans la vie politique de son temps, sinon Grégoire l’eut mis en valeur dans son Historia Francorum.  Sa désignation au siège de Clermont avait fait des jaloux et il eut des rivaux que Grégoire ne manque pas de discréditer. Sa nomination toutefois ne provoqua sans doute pas de sérieuses difficultés, car le neveu ne s’attarde pas longuement à légitimer le pouvoir de l’oncle comme il le fait pour d’autres évêques. Notons cependant que le second canon du concile de Clermont de 535 rappelle précisément que la dignité épiscopale doit être accordée en fonction des mérites et non à la suite d’intrigues. Sur le plan ecclésiastique, rien de connu ou presque n’est à porter au compte de Gal : Grégoire lui prête l’institution d’un pèlerinage annuel à Saint-Julien de Brioude au temps du Carême, pèlerinage qui se faisait encore au moins sous son successeur Cautinus ; il serait osé d’attribuer à Gal un rôle particulier dans les lois qui furent édictées dans les conciles auxquels il participa. Pour éclairer la personnalité de l’évêque, on rappellera l’attachement de sa famille à la religion et à l’Église, sa fuite au monastère et son refus du mariage, sa voix qu’il avait belle, don remarqué à une époque où l’art de lire et de chanter était à la fois peu commun et important (cet art séduisit d’ailleurs Quintianus d’abord, le roi Thierry I° ensuite), l’esclandre qu’il provoqua dans un temple païen à Cologne et qui faillit lui coûter la vie, sa mort pieuse à la suite d’une maladie qui lui fit perdre barbe et cheveux. On sait aussi qu’il aimait montrer une cicatrice qu’il avait au pied, souvenir d’une blessure dont il attribuait la guérison à saint Julien et qu’il exprimait souvent le regret de n’avoir pas été massacré par les païens au temple de Cologne. Il eut des miracles sur son tombeau qui fut transféré à Saint-Laurent de Clermont puis à Notre-Dame-du-Port.
5 Saint Alyre, quatrième évêque de Clermont (370-384), succéda à saint Leogontius. Sa reputation de sainteté s’étendit dans les cités voisines et parvint jusqu’au palais impérial de Trèves, où la fille de l’Empereur, possédée du démon, était regardée comme incurable. L’Empereur dont il s’agit ne peut être que l’usurpateur Maxime (383-388). L’Empereur manda l’évêque des Arvernes à Trèves. Alyre se mit en prières ; on lui amena la possédée et il lui suffit de poser ses doigts sur sa bouche pour la guérir. Alyre refusa les grosses sommes d’argent offertes par l’Empereur, se contentant d’obtenir de que le tribut sur le blé et le vin de Clermont, payés jusque-là en nature, serait transformé en contribution en numéraire. Alyre mourut sur le trajet du retour à Clermont (384). De nombreux miracles, eurent lieu sur son tombeau, placé dans la crypte de l’église Sainte-Marie-entre-les-Saints qui lui fut consacrée.
6 Sigebert I°, fils de Clotaire I°, fut roi d’Austrasie de 561 à 575 ; il épousa Brunehaut, fille du roi des Wisigoths, Athanagilde.
7 Chilpéric I°, fils de Clotaire I°, fut roi de Neustrie de 561 à 584 ; il épousa Galswinthe (sœur de Brunehaut), fille du roi des Wisigoths, Athanagilde.
8 Gontran, fils de Clotaire I°, fut roi de Bourgogne et d’Orléans de 561 à 563.

JEAN-PAUL II : HISTOIRE DU PROCÈS DE CANONISATION /1

9 mai, 2012

http://www.zenit.org/article-30759?l=french

JEAN-PAUL II : HISTOIRE DU PROCÈS DE CANONISATION /1

Interview de Mgr Slawomir Oder, postulateur de la cause

Propos reccueillis par Wlodzimierz Redzioch

Traduit par Hélène Ginabat

ROME, mardi 8 mai 2012 (ZENIT.org) – « “Enquêter” sur Jean-Paul II m’a permis d’approcher un modèle de sacerdoce magnifique, qui m’a enthousiasmé, a renforcé ma vocation et m’a beaucoup stimulé à progresser personnellement », déclare le postulateur de la cause du bienheureux Jean-Paul II.
A l’occasion du septième anniversaire de la mort du pape polonais, et du premier anniversaire de sa béatification, Mgr Slawomir Oder raconte cette « aventure » qui se poursuit avec la seconde étape du procès, celle de la canonisation. Nous publions ici le premier volet de l’interview, qui sera suivie par un second volet demain, 9 mai.
Wlodzimierz Redzioch- Comment avez-vous vécu 2011, l’année de la béatification de Jean-Paul II ?
Mgr Slawomir Oder – 2011 a été pour moi une année très particulière avec la cérémonie de béatification de Jean-Paul II, le 1ermai, et la célébration de la première fête liturgique du nouveau Bienheureux, le 22 octobre. L’année dernière, après six ans d’un travail intense, j’ai atteint un objectif important : l’Eglise a enfin pu offrir au peuple de Dieu et au monde cette splendide figure du nouveau Bienheureux. Mais l’année 2011 n’a signé que la première étape parce que le procès ne s’est pas arrêté là. Du point de vue théologique, il n’y a pas de grande différence entre « saint » et « bienheureux ». Ce qui change, en revanche, c’est l’extension du culte : pour la personne bienheureuse, le culte est proposé localement ; dans le cas du saint, le culte est universel. Ce qui change aussi, c’est l’implication de l’autorité pontificale : lorsque la sainteté est prononcée, c’est-à-dire lors de la canonisation, c’est l’infaillibilité du pape qui est engagée.
Cela veut dire qu’on ne fait pas de nouveau procès pour canoniser un bienheureux ?
En ce qui regarde la canonisation, on ne refait pas de procès pour vérifier  l’héroïcité des vertus puisqu’une telle héroïcité a déjà été certifiée. Pour arriver à la canonisation, la pratique de l’Eglise demande un second miracle qui doit se réaliser après le jour de la béatification.
Revenons aux années du procès : quels sont les moments saillants du procès de béatification qui vous ont marqué l’esprit ?
Certainement le moment où le cardinal vicaire du diocèse de Rome m’a confié cette charge. C’était le jour de la visite de Benoît XVI dans la basilique de Saint Jean du Latran, sa première rencontre avec le clergé romain. Ce jour-là, le pape avait fait connaître sa décision de dispenser du temps d’attente pour l’ouverture du procès. C’était un grand signe de confiance du cardinal à mon égard. Je suis vicaire judiciaire et je travaillais déjà comme président du Tribunal d’appel du vicariat de Rome. Cette nouvelle réalité s’est ajoutée à mon travail quotidien. C’était un grand défi professionnel, mais aussi personnel parce que je devais complètement réorganiser ma vie.
Le second moment important a été l’ouverture du procès, le jour de la solennité des saints Pierre et Paul, avec la présence de représentants des Eglises locales, parmi lesquelles l’Eglise de Rome et l’Eglise polonaise, mais aussi des représentants des Eglises sœurs comme le patriarcat de Constantinople. Le caractère œcuménique de l’ouverture du procès correspondait à l’un des traits les plus significatifs du pontificat de Jean-Paul II, qui était sa dimension œcuménique.
Puis a commencé le travail d’investigation : le recueil de documents et les rencontres avec les témoins. Parmi les témoins, il y avait les personnes qui, avec le pape, ont contribué au changement de l’histoire contemporaine. Du point de vue humain, j’ai vécu la belle expérience de pouvoir rencontrer ces grands protagonistes de l’histoire.
Un moment bouleversant a été lorsque, peu après l’ouverture du procès, j’ai été appelé en France  pour prendre connaissance de l’événement, que l’Eglise a ensuite reconnu comme miraculeux : la guérison de sœur Simon-Pierre. J’ai vécu ce moment avec beaucoup d’émotion.
Je ne cache pas l’émotion avec laquelle j’ai vécu les différentes étapes du procès : la remise de la « Positio », la reconnaissance du miracle et la promulgation du décret sur l’héroïcité des vertus.
Mais le moment le plus gratifiant pour moi a été celui de l’échange du baiser de paix avec le pape au cours de la messe de la béatification. D’un côté, je voyais la grande joie du pape Benoît XVI qui, dès le début, avait voulu accompagner ce procès par sa bienveillance, sa prière discrète et à travers les diverses homélies et interventions qui ont été sa contribution indirecte à ce procès.
D’un autre côté, tout de suite après la messe, quand j’ai quitté la place Saint-Pierre, j’ai vu l’enthousiasme de la foule venue du monde entier, l’Eglise en fête, et j’ai alors éprouvé une immense gratitude envers Dieu et une grande satisfaction personnelle.
Que vous a apporté ce travail d’enquête sur la sainteté de Jean-Paul II ?
Le procès de béatification est devenu pour moi une aventure qui m’a amené à regarder de près une histoire sacerdotale, parce que Jean-Paul II a été pape, cardinal et évêque, mais il est toujours resté prêtre, il a vécu toute sa vie dans un esprit sacerdotal. « Enquêter » sur Jean-Paul II m’a permis d’approcher un modèle de sacerdoce magnifique, qui m’a enthousiasmé, a renforcé ma vocation et m’a beaucoup stimulé à progresser personnellement.

16 avril: Sainte Bernadette Soubirous

16 avril, 2012

http://nominis.cef.fr/

16 AVRIL – MEMOIRE FACOLTATIVE

Sainte Bernadette Soubirous

jeune fille à la quelle la Vierge Marie apparut (+ 1879)

Fille aînée d’une famille de meunier que l’arrivée des moulins à vapeur jettera dans une extrême pauvreté, Bernadette Soubirous est accueillie en janvier 1858 à l’Hospice de Lourdes, dirigé par les Sœurs de la Charité de Nevers, pour y apprendre à lire et à écrire afin de préparer sa première communion. En février 1858, alors qu’elle ramassait du bois avec deux autres petites filles, la Vierge Marie lui apparaît au creux du rocher de Massabielle, près de Lourdes. Dix huit Apparitions auront ainsi lieu entre février et juillet 1858. Chargée de transmettre le message de la Vierge Marie, et non de le faire croire, Bernadette résistera aux accusations multiples de ses contemporains. En juillet 1866, voulant réaliser son désir de vie religieuse, elle entre chez les Sœurs de la Charité de Nevers à Saint-Gildard, Maison-Mère de la Congrégation. Elle y mène une vie humble et cachée. Bien que de plus en plus malade, elle remplit avec amour les tâches qui lui sont confiées. Elle meurt le 16 avril 1879. Elle est béatifiée le 14 juin 1925 puis canonisée le 8 décembre 1933. Son corps, retrouvé intact, repose depuis 1925 dans une châsse en verre dans la Chapelle. Chaque année, venant du monde entier, des milliers de pèlerins et de visiteurs se rendent à Nevers pour accueillir le message de Bernadette.
- Sainte Bernadette Soubirous (1844-1879) De santé fragile, mais entourée de l’amour des siens et d’une foi solide, cette adolescente de quatorze ans rencontra la Vierge à dix-huit reprises à la grotte de Massabielle. Figures de sainteté – site de l’Eglise catholique en France
- « Bernadette Soubirous naquit au moulin de Boly, au pied du château fort de Lourdes le 7 janvier 1844, de François Soubirous, meunier, et de Louise Castérot. Elle avait 14 ans quand l’Immaculée l’appellera à être sa confidente et sa messagère, en février 1858. Elle rentrait alors de Bartrès, où elle avait passé quatre mois chez sa nourrice. Elle habitait alors avec ses parents, ses frères et sœur dans une profonde misère au Cachot.
Elle était simple et de santé fragile, mais pleine de bon sens et de joie de vivre. Elle désirait plus que tout faire sa première communion. Le 11 février 1858, alors qu’elle était partie chercher du bois avec sa sœur et une voisine près du rocher de Massabielle, dans la partie supérieure de la grotte, lui apparaît une belle Dame vêtue de blanc. Jusqu’au 16 juillet, 18 apparitions. Le sommet de toutes: le jeudi 25 mars, fête de l’Annonciation où la Vierge Marie se présenta à elle comme étant ‘l’Immaculée Conception’.
Sainte Bernadette devint célèbre, on parla de miracles… Mais la petite bigourdane choisit de se retirer du monde. Elle partit pour Nevers où elle vivra avec ses sœurs dans l’humilité et la prière, la souffrance aussi, loin de Lourdes et de la grotte de Massabielle. Elle mourut le 16 avril 1879 et fut canonisée en 1933. » (diocèse de Tarbes et Lourdes – les saints du diocèse)
Sainte Bernadette (Lourdes 1844 – Nevers 1879) … En juillet 1866, voulant réaliser son désir de vie religieuse, elle entre chez les Soeurs de la Charité de Nevers à Saint-Gildard, Maison-Mère de la Congrégation. Elle y mène une vie humble et cachée. Bien que de plus en plus malade, elle remplit avec amour les tâches qui lui sont confiées. Elle meurt le 16 avril 1879.
(diocèse de Nevers)
Le site de l’Espace Bernadette à Nevers
À Nevers, en 1879, sainte Bernadette Soubirous, vierge. Née à Lourdes d’une famille très pauvre, elle ressentit, toute jeune fille, la présence de la Vierge Marie immaculée dans la grotte de Massabielle, et par la suite, ayant pris l’habit de religieuse, elle mena à Nevers une vie humble et cachée.

SAINT JEAN CHRYSOSTOME (13 Septembre) (sur)

12 septembre, 2011

du site:

http://www.orthodoxa.org/FR/orthodoxie/synaxaire/StJeanChrysostome.htm

SAINT JEAN CHRYSOSTOME (13 Septembre)

du très révérend Archimandrite Placide Deseille

Higoumène du Monastère Saint Antoine le Grand (France)
 
1) SA VIE
Jeunesse et éducation classique
Jean Chrysostome est né vers 349, à Antioche. Son père, Secundus, était officier. Il laissa son épouse Anthousa veuve à vingt ans, avec un fils et une fille. Celle-ci mourut très tôt, et Anthousa, chrétienne fervente, consacra tous ses soins à l’éducation de Jean. Après avoir acquis les connaissances élémentaires habituelles, Jean étudia la rhétorique à l’école de Libanius, le plus illustre rhéteur du temps, païen convaincu et nostalgique.

Vie ascétique et monastique
A partir de 367, il s’intègre au groupe des disciples de Diodore, futur évêque de Tarse, pour s’adonner à l’étude des sciences sacrées. Ce groupement ascétique n’était pas un monastère, et Jean, à la demande d’Anthousa, revenait chaque soir à la maison familiale. Il fut baptisé par saint Mélèce pendant la nuit pascale de 367. Vers 370, d’abord ordonné lecteur, il se soustrait par la fuite au sacerdoce, «trompant» son ami Basile, qui se laissa ordonner, croyant que Jean l’était aussi. Cette querelle fraternelle sera évoquée plus tard vers 390, dans le Dialogue sur le sacerdoce de Jean, dont elle fournira le prétexte. Vivement attiré par la vie monastique, il se retire en 372 au désert et vit pendant quatre ans auprès d’un ancien. Puis il se retire, seul, dans une grotte, où il passe la plupart de son temps sans dormir, apprenant par cœur les Ecritures. Sa complexion fragile ne résiste pas à ce régime, il tombe malade et doit regagner Antioche en 378, après deux années de vie érémitique. C’est l’époque où saint Mélèce, exilé par Valens, rentrait à Antioche.

Diacre et prêtre à Antioche
En 381, saint Mélèce l’ordonne diacre, puis, en 386, son successeur Flavien lui confère le sacerdoce. Le ministère principal de Jean devient la prédication. «La parole fut sa vocation et sa passion», a-t-on pu écrire. Dans son dialogue sur le sacerdoce, il décrira ainsi cet idéal qui fut le sien : «La parole, voilà l’instrument du médecin des âmes. Elle remplace tou : régime, changement d’air, remèdes. C’est elle qui cautérise ; c’est elle qui ampute. Quand elle manque, tout manque. C’est elle qui relève l’âme battue, dégonfle la colère, retranche l’inutile, comble les vides, et fait, en un mot, tout ce qui importe à la santé spirituelle. Quand il s’agit de la conduite de la vie, l’exemple est le meilleur des entraînements ; mais pour guérir l’âme du poison de l’erreur, il faut la parole, non seulement quand on a à maintenir la foi du troupeau, mais encore quand on a à combattre les ennemis du dehors. Même si nous avions le don des miracles, la parole nous serait utile, même nécessaire. Saint Paul le prouve, saint Pierre aussi, qui dit : «Soyez prêts à répondre à ceux qui vous demandent compte de votre foi» (1 P 3, 15). Et, si tout le collège des Apôtres confia jadis à Etienne la direction des veuves, c’était uniquement pour mieux s’adonner eux mêmes au ministère de la parole. Toutefois, nous n’aurions pas tant besoin du don de la parole si nous avions le don des miracles. Ne l’ayant pas, il faut nous armer de l’arme qui nous reste. C’est donc à nous de travailler avec acharnement pour nous enrichir de la parole du Christ… Le prêtre doit tout faire pour acquérir le talent de la parole.» (Sur le Sacerdoce, IV, 3; traduction de B. H. Vandenberghe, Saint Jean Chrysostome, Le livre de l’espérance, Namur, 1958, p. 9-10).
Jean prêche inlassablement, plusieurs fois par semaine, parfois pendant deux heures de suite. Jamais il ne pactise avec le vice, jamais il n’acceptera de compromission avec aucun scandale. Mais sa parole se nuance souvent de tendresse, et, s’il ne parvient pas à détacher la population d’Antioche des jeux et des spectacles du cirque, ni de ses autres désordres, son auditoire l’écoute en général volontiers et lui est profondément attaché.
En février 387, mécontents de l’augmentation des impôts, les habitants d’Antioche se soulèvent et brisent les statues de l’empereur Théodose, de l’impératrice défunte et des jeunes princes Arcadius et Honorius. Pour apaiser la sédition, Jean prononce dix-neuf homélies «sur les statues» durant le Carême, tandis que l’évêque Flavien se rend à Constantinople pour implorer la clémence de l’empereur. Le dimanche de Pâques, Jean put annoncer au peuple le succès des efforts de Flavien et le pardon de l’empereur.

Evêque de Constantinople
La renommée de Jean s’étendait bien au-delà d’Antioche. A la mort de Nectaire, évêque de Constantinople (397), l’évêque d’Alexandrie, Théophile, essaya de faire nommer à sa place l’un de ses protégés, le moine Isidore. Mais l’eunuque Eutrope, conseiller tout-puissant de l’empereur Arcadius, imposa le choix de Jean, le fit littéralement enlever à Antioche, et Théophile d’Alexandrie, ulcéré, dut le sacrer évêque de Constantinople, le 15 décembre 397.
Jean entreprit aussitôt de s’attaquer à tous les désordres qu’il constatait, dans le clergé, à la cour, dans toutes les classes de la société. Malgré ses invectives, une grande partie du peuple s’attacha à lui, et lui demeura toujours fidèle. Mais il s’attira, chez certains évêques, dans le clergé, et finalement à la cour, de terribles inimitiés. Après la disgrâce d’Eutrope, la bienveillance initiale de la toute-puissante impératrice Eudoxie se mua progressivement en haine.
On a écrit très justement au sujet de Jean : «son âme était trop noble et désintéressée pour deviner le jeu des intrigues de la cour, et son sentiment de la dignité personnelle était trop élevée pour s’arrêter à cette attitude obséquieuse à l’égard des majestés impériales, qui lui aurait assuré la continuité de leur faveur.. Sa fidélité sans compromission à son idéal ne put qu’unir contre lui toutes les forces hostiles, que sa simplicité lui empêchait d’opposer les unes aux autres par une adroite diplomatie.» (J. Quasten, Initiation aux Pères de l’Eglise, t. 111, p-507).
En 401, une cinquantaine de moines de Nitrie, conduits par trois d’entre eux, Ammonios, Eusébios et Euthymios, appelés «Ies longs frères» en raison de leur taille, arrivèrent à Constantinople, expulsés d’Egypte par Théophile, qui poursuivait alors les moines origénistes. Jean ne les reçut pas dans sa communion, mais il les accueillit avec une grande charité et pourvut à leurs besoins.
Les frères égyptiens portèrent plainte devant la cour contre Théophile. Appelé à comparaître, celui-ci se rendit à Constantinople précédé par saint Épiphane, qu’il avait engagé dans la lutte contre l’origénisme, mais qui se rembarqua pour Chypre quand il réalisa la duplicité de Théophile. Il mourut au cours du voyage.

Premier exil
Théophile se changea d’accusé en accusateur et réunit près de Chalcédoine, à la villa du Chêne, un synode de 35 évêques pour juger Jean. Celui-ci, ayant refusé de venir, fut condamné, sur d’absurdes griefs, qui le présentaient comme violent, injuste, voleur, sacrilège, origéniste, impie. Il était même accusé de lèse-majesté, ce qui aurait entraîné la peine de mort. Mais cette dernière accusation ne fut pas retenue par l’empereur. Quant aux moines de Nitrie, Théophile se réconcilia avec eux et leur «pardonna».
L’annonce de la déposition de Jean suscita une violente effervescence dans le peuple de Constantinople, qui restait fidèle à son évêque. Jean partit pour l’exil, mais une émeute éclata. Un tremblement de terre eut lieu dans la nuit, Effrayée, l’impératrice Eudoxie décida de rappeler l’exilé. Jean fut accueilli triomphalement. Théophile, menacé d’être jeté à la mer, se rembarqua précipitamment pour l’Egypte. Les évêques hostiles à Jean se dispersèrent. Mais à Constantinople, les intrigues reprirent contre Jean, qui avait repris ses fonctions épiscopales, dans l’attente d’un concile qui devait, normalement, le réhabiliter.
L’érection d’une statue d’Eudoxie ayant donné lieu à des divertissements païens et licencieux, Jean protesta dans une homélie prononcée à cette occasion. Elle aurait débuté par ces mots: «De nouveau, Hérodiade fait rage ; de nouveau, elle s’emporte ; de nouveau, elle danse ; de nouveau, elle demande à recevoir sur un plat la tête de Jean.» Eudoxie, irritée, voulut en finir avec lui.
Les évêques opposés à Jean firent valoir que celui-ci avait repris illégitimement ses fonctions malgré sa déposition. L’empereur interdit à Jean tout exercice de son office épiscopal. Jean refusa.
S’étant vu interdire l’usage de toute église, Jean, la nuit pascale de 404, rassembla les fidèles dans les thermes de Constance pour le baptême des quelques trois mille catéchumènes qui devaient le recevoir. A l’instigation des évêques hostiles, l’armée intervint brutalement, les fidèles et les clercs furent dispersés ou emprisonnés, et l’eau baptismale fut souillée de sang. Pendant le temps pascal qui suivit, Jean demeura en résidence surveillée dans son évêché, puis, au lendemain de la Pentecôte, il fut envoyé définitivement en exil.

Second exil et mort
Il fut d’abord conduit à Cucuse, en Petite Arménie. Il y demeura trois ans, prêchant aux habitants de la localité, et recevant de fréquentes visites des fidèles d’Antioche, restés attachés à leur ancien prédicateur. Jaloux et irrités, les évêques syriens qui avaient contribué à sa condamnation obtinrent qu’Arcadius l’exile à Pityus, à l’extrémité orientale de la mer Noire. Accablé de mauvais traitements, il mourut en cours de route, à Comane, dans le Pont, le 14 septembre 407 Ses dernières paroles furent sa doxologie coutumière : «Gloire à Dieu pour tout. Amen.»

SAINTE THÉRÈSE D’AVILA : PRÉSENCE DE L’ESPRIT

14 octobre, 2010

du site: 

http://jean-paul.barriere.pagesperso-orange.fr/divers2/therese.htm

SAINTE THÉRÈSE D’AVILA

PRÉSENCE DE L’ESPRIT

   Jeune femme brillante et aimée de ses proches, elle entre à l’âge de 20 ans au monastère de l’Incarnation d’Avila. Elle y prend le nom de Thérèse de Jésus et découvre dans la prière silencieuse (oraison) le lieu de l’amitié et de l’intimité avec le Christ.
Fondatrice de nombreux couvents après qu’elle eut réformé l’ordre du carmel, elle connut de 1515 à sa mort, de nombreux états mystiques, visions, extases telle que la transverbération (1559). Ces expériences nourrissent son livre « les demeures de l’âme » où elle décrit la vie mystique depuis ses débuts jusqu’à l’union du mariage spirituel. Thérèse s’absorbe en son amour qui n’a besoin, ni de prière, ni de lecture et un soir une inondation de joie la saisit; et quand elle fut endormie, un océan de joie l’inondait, c’était une extase.
Quelque chose d’insinuant et doux; elle se demandait si ce songe étrange n’était point un avertissement; elle n’a qu’à descendre en elle-même, qu’a creuser son âme et la certitude vient; ce n’est pas le sentiment d’une présence individuelle, c’est une sorte d’enveloppement aussi vague et informe que celui d’une eau la baignant ou d’une lumière diffuse matériellement sentie; pourtant il est rare, incertain, trompe son espoir; mais l’espoir suffit qu’il puisse revenir encore et elle vit jour après jour, le cherchant au fond de son âme; frémissant déjà de pressentir que viendra son impalpable et sereine invasion.
Ce fut d’abord à peine comme un allégement, une sensation fuyante de légèreté; puis tout d’un coup, une suavité dilata sa poitrine; c’était comme une inondation si soudaine que le coeur semblait prêt à se rompre; ses yeux ne voyaient plus; alors la joie l’enveloppe, étreignit ses sens; puis tout s’éfface; mais quelque chose d’inconnu lui demeurait : une sensation d’allégresse, une dilatation d’amour.
L’innéfable la pénétrait, ne faisait plus qu’un avec elle; parfois, elle chancelait sous sa violence; cet amour l’envahissait à flot égal comme une mer qui sans cesse gagne du rivage, ne lui laissait plus rien d’elle-même; quelque chose en elle se dissolvait délicieusement jusque dans sa propre matière; elle sentait une profection toute puissante l’enserrer à jamais sans pouvoir s’y soustraire; l’impulsion de la volonté divine chassait sa propre volonté; elle ne pouvait que lui offrir sa soumission et sa passivité radieuse; il lui arrivait de connaître un tel délice, et une telle crainte que ce délice cessât, qu’elle versait malgré elle des larmes et que la gorge étranglait, elle ne savait plus si elle souffrait ou si elle défaillait de joie.
   Alors l’amour qui l’embrassait semblait prêt a rompre les liens de son corps; elle sentait une douleur si vive qu’elle en gémissait et en même temps si délicieuse qu’elle eut voulu ne jamais la voir finir; qui peut savoir jusqu’ou va cette blessure, d’où elle est venue et comment peut s’adoucir un si cruel et délicieux tourment? consumée de désir, elle ne savait que demander; elle flottait vraiment dans la durée sans mesure, submergée, comme dans les extases furtives de notre pauvre amour mortel, par la violence de son émotion; une intensité qui abolit la conscience; que sont les voluptés charnelles à coté de cet envahissement de tout l’être par ce torrent de félicité; car toute puissance, la félicité l’enveloppait, s’abattait sur elle, et cette plénitude, à laquelle elle avait en vain essayé d’échapper, la déchirait comme si elle ne pouvait la contenir, lui donnait la sensation d’une flèche traversant son coeur; elle croyait voir entre les mains d’un ange un long dard qui était d’or et dont la pointe portait un peu de feu et l’ange lui passait ce dard au travers du coeur.

EXTASE

Le coeur bat à bonds désordonnés, les mains inertes, si froides, le corps lourd d’un poids inexplicable et qui toujours, à coups sourds et irrégulier, martèle le coeur; en soulevant ses mains, elle a senti ses jointures brisées et tout son corps lui semble avoir été déchiré, étiré sur la roue soumis à un terrible supplice; mais sur cette fatigue corporelle, l’âme veille et de nouveau espère et prie; de nouveau s’est attendri son coeur, de nouveau elle sait ce qu’est le don des larmes; elle comprend que sans la grâce elle ne peut rien, pas même aimer, pas même souffrir; ou résonne la divine joie, car la joie l’habitait toute entière a chaque souffle, elle semblait dilater ses poumons et avec son sang battre à grands coups égaux et surs; et elle allait baignée de Dieu, fondue en lui; elle n’aurait qu’a baisser la tête et a l’appuyer pour retrouver l’extase et son ineffable joie.

ADAPTATION A LA VIE MONASTIQUE

Comme tous les vrais ascètes , elle avait un besoin physique de solitude et de silence, or à l’infirmerie, au milieu des autres malades, dans le bruit des conversations, des allées et venues , il lui était presque impossible de se recueillir et de pratiquer les règles d’ascèse; c’était un véritable purgatoire; « On me voyait me retirer dans la solitude pour y prier longuement et pour y faire de longues lectures ».
La maladie n’est pas une excuse suffisante, à défaut des forces corporelles, l’amour et l’habitude devraient soutenir dans l’oraison, l’âme vraiment zélée.

LA MALADIE

On peut dire que Ste Thérèse a été toute sa vie une malade, ou plus exactement une souffrante, jusqu’à l’approche de ses derniers jours; pour elle, qui eût, dés sa petite enfance, ce goût de solitude, cette promiscuité continuelle devait-être un véritable supplice; elle était foncièrement robuste; mais cette forte constitution, a été éprouvée jusqu’au bout par des crises terribles et des souffrances presque continuelles, au caractère complexe et mystérieux; ce sont des troubles nerveux aux répercussions sur le coeur, sur l’estomac et les entrailles; or ces troubles sont consécutifs à des crises morales ou bien, plus tard, ils seront concomitants de ses extases, de ses ravissements et de ses visions; évanouissements et des maux de coeur si étranges et si violents; crise de catalepsies, des contractions nerveuses qui lui mettaient le corps en boule; et pourtant les visions, les grandes grâces n’ont commencées que beaucoup plus tard, comme si cette âme élevée voulait nous montrer que pour mériter ces grâces, les souffrances matérielles de la maladie ne suffisent pas et qu’il faut encore un long entraînement par toutes les pratiques de l’ascèse et l’exercice de vertus péniblement acquises; cette maladie lui révèle l’importance capitale de la douleur dans l’ascétisme comme moyen de purification et de libération spirituelle; ce fut jusqu’au moment ou elle entra dans les voies mystiques; les grâces d’union, les extases et la ravissements furent pour Thérèse le commencement de la guérison; sans doute, elle ne revint jamais complètement à la santé.

LA PRÉSENCE DE DIEU

D’abord un certain sentiment de présence; « quelquefois au milieu d’une lecture, il me venait à l’improviste, un sentiment de la présence de Dieu »; » elle suspend l’âme de telle sorte qu’elle semble être toute entière hors d’elle-même; l’âme s’épanouit, le coeur s’attendrit et les larmes viennent; mais ce ne sont là que les prémices de faveur plus hautes ».

LE COMMENCEMENT D’ORAISON

Son amour s’exalte comme se fortifie dans la solitude de nos passions humaines; il s’alimente perpétuellement de l’élan d’un désir que rien désormais ne distrait, il se nourrit de la contemplation; cette sensualité frémissante trahit, par dessus tout un grand besoin d’amour et d’être heureux; au dessus ce qui lui manquait, c’est l’amour de Dieu; « Je n’avais pas alors, il me semble, l’amour de Dieu, comme je crois l’avoir ou après que je commençais à faire oraison. »
« O mon Dieu, qu’ils consentent seulement à passer deux heures par jour dans votre compagnie et ils verront de quelle récompense vous les payez ».

Oraison premier degré

c’est la plus simple; elle consiste à méditer sur une vérité ou sur un mystère de la foi; on peut s’aider des images saintes; on doit choisir de préférence une image dont la représentation est la plus saisissante et porte la volonté à une dévotion plus ardente; »comme je voudrais pleurer, moi aussi; mais j’ai le coeur tellement sec que je pourrais bien lire d’un bout à l’autre tout le récit de la passion sans en tirer une larme »; le grand ressort lui manquait : l’amour de Dieu.
Le culte des images; on doit choisir celles dont la représentation est la plus saisissante et porte la volonté à une plus grande dévotion; mais la vrai prière n’a pas besoin de chef d’oeuvre; la moindre allusion à l’Aimé bouleverse l’âme blessée par l’amour; »Entretenez-vous avec lui ».
Les premières touches de l’Esprit : elle se trouve un jour, un moment, dans certaines dispositions extraordinaires, l’émotion éprouvée, loin d’être passagère peut-être le point de départ de toute une vie nouvelle; Ste Thérèse nous dit cependant que Dieu se plait à brûler les étapes et que la méditation peut-être inutile à celui qui reçoit la grâce d’oraison.

Oraison mentale

   Chaque jour, elle prenait pour sujet de méditation un des épisodes de la passion ou un mystère de la vie du Christ; cette oraison appartient au premier degré de la vie spirituelle et n’a rien de proprement mystique; c’est la plus simple; l’oraison mentale n’est guère que la prolongation de l’oraison vocale, elle consiste à méditer une vérité ou sur un mystère de la foi; Ste Thérèse éprouvait la plus grande difficulté à se recueillir pour l’oraison, même mentale; cependant si l’on reçoit la grâce, elle ne devient plus nécessaire; attouchements ineffables qui lui faisaient devenir une présence toute proche, véritables prélibations des hauts états mystiques; les premiers phénomènes mystiques sont involontaires; tout ce qu’a pu faire Thérèse pendant vingt ans d’exercices qu’elle a pu faire par sa volonté l’ont laissée malade et désespérée; ce n’est que par la grâce que les prémices des faveurs beaucoup plus hautes lui viennent. D’abord la priére vocale, puis l’oraison mentale qui repose sur la méditation; Thérèse a beaucoup de mal à méditer; pour fixer son attention, elle prend un livre;
elle se recueille dans sa lecture, mais son grand sujet , c’est la passion du Christ; elle ne raisonne pas, elle voit, elle contemple; tous ces exercices sont à la portée de chacun; chacun peut faire pour se mettre en état de mériter les grâces d’oraison, mais Dieu seul peut les donner; il y a des âmes qui ne peuvent dépasser le premier degré de la vie mystique, c’est quelquefois la maladie, une certaine débilité physique ou enfin la fatigue qui en sont la cause; dans le cas, il ne faut pas s’obstiner, forcer sa nature.

LES GRÂCES D’ORAISON

Dieu les accorde à qui lui plait; elles arrivent souvent au début de la vie mystique pour attirer l’âme davantage ; les larmes pieuses sont d’enthousiasmes et d’exaltation; il arrive qu’un mot prononcé à l’improviste déchaîne dans l’âme une émotion; elle goûtait une joie toute nouvelle, une joie différente, c’était les prémices des grâces qu’elle allait être comblée; Dieu les accorde même à des pêcheurs au milieu de leurs égarements; toutes les pénitences, toutes les vertus imaginables, les désirs les plus ardents de l’âme n’y font rien; les grâces d’oraison, comme toutes les grâces, si nous pouvons nous y préparer ne dépendent pas de nous; la volonté humaine est impuissante; il faut que quelqu’un intervienne : l’Esprit.

Oraison de quiétude :

Les yeux sont ouverts; la volonté est captivée par la douce présence; un coup au coeur; elle vit émerger des ténèbres, un supplicié couvert de plaies, ruisselant de sang et de sueur; si l’âme s’épanouit, le coeur s’attendrit et les larmes viennent; mais ce ne sont que les prémices de faveurs beaucoup plus hautes; tout en demeurant unie à Dieu, sans rien perdre de son repos ni de son apaisement, elle arrive peu à peu a amener au recueillement l’entendement et la mémoire; le premier degré de la vie mystique est l’oraison de quiétude.
D’abord, c’est un sentiment de joie dans un sentiment de quiétude inexprimable; cette joie ne vient pas d’ici bas; l’âme goûte les délices de cette joie inconnue et surnaturelle avec plus de plaisir; la volonté même en proie aux délices surnaturelles, ne reste pas inactive; tout en demeurant unie à Dieu, sans rien perdre de son repos ni de son apaisement , elle arrive peu a peu à un recueillement par des transitions plus ou moins consciente, elle va s’acheminer vers l’état le plus haut qui est celui d’union; c’est la source d’eau vive; les yeux du corps se ferment d’eux-mêmes, le corps ne peut plus bouger de peur de perdre la paix; l’âme se désaltère à la fontaine d’eau vive; elle doit avaler la nourriture de l’âme.

Le sommeil des puissances

Avant l’oraison, il est le sommeil des puissances; sans se perdre complètement, elles n’entendent pas comment elles agissent; le goût; la suavité et délectation sont supérieurs à ce qu’on a éprouvé jusque là; l’ âme ne sait que faire, c’est un glorieux délire, où l’on apprend la vraie sagesse et c’est pour l’âme la plus délectable de toutes les puissances; l’âme est dans un état d’exaltation extraordinaire.

ORAISON D’UNION

   C’est la contemplation pure; l’oraison de quiétude conduit à une activité héroïque qui ne recule même pas devant le martyre; les yeux du corps sont fermés; ceux de l’âme s’ouvrent; dans ces moments là, devant quels tourments pourrait-on mettre une âme que celle-ci ne trouve délicieux ces souffrances pour son Seigneur; elle perçoit la présence de Dieu en elle, son union avec lui; il est impossible d’exprimer par des paroles les délices qu’elle ressent; et c’est ainsi que l’âme peu à peu arrive à l’union désirée; cette grâce suprême n’est pas un coup d’état, une sorte de révélation qui bouleverse l’âme, le don est imprévisible, mais cependant certain pour l’âme prédestinée. L’union immédiate avec Dieu; elle ne sait plus que se répandre en protestations d’humilité et en actions de grâce sans fin; l’âme dit-elle se sent avec un très vif et très suave plaisir, défaillir presque complètement; c’est une espèce d’évanouissement qui lui enlève la respiration et toutes les forces corporelles;
ses yeux se ferment malgré elle; si elle les ouvre, elle ne voit rien; le corps et les sens sont anéantis; ni la mémoire, ni la volonté ne fonctionnent comme d’habitude; la conscience reçoit une illumination ineffable; l’âme sent la présence de Dieu en elle, son union avec lui; et il en reste une telle certitude que d’aucune manière on ne peut cesser d’y croire; Thérèse ne cesse d’insister sur les lumières surnaturelles qu’elle puise dans l’oraison et en particulier dans l’oraison d’union sur l’accroissement d’intelligence.

PRÉSENCE ET VISIONS

Visions imaginaires :
C’est à dire qui consistent en images intérieures ou qui admettent certaines données sensibles; elles sont considérées comme d’un ordre inférieur aux visions intellectuelles, mais ce sont elles qui frappent le plus d’imagination; « un jour j’étais en oraison, le Seigneur me montre ses mains »; elle peut contempler la Sainte humanité du Christ; elle le vit dans toute sa beauté et toute la gloire de la résurrection.
La vision du corps glorieux du Seigneur est telle que l’âme qui la contemple entre dans un trouble extraordinaire; « je ne les vis jamais avec les yeux du corps, mais avec ceux de mon âme »; la vision de cette beauté dépasse tout ce que l’on peut imaginer ici-bas; c’est une blancheur suave et une splendeur infuse qui est un délice infini pour la vue et qui ne fatigue pas; c’est une lumière si différente de celle d’ici-bas; c’est une image vivante, ce n’est pas un homme mort, c’est le Christ vivant.

20 août – Saint Bernard de Clairvaux: Le dernier Pére du Moyen Âge

19 août, 2010

du site:

http://www.medio-evo.org/bernardof.htm

20 août – Saint Bernard de Clairvaux

 Le dernier Pére du Moyen Âge  

Il est impossible de ne pas se joindre à tous ceux qui ont écrit et commenté sur la figure de Saint Bernard de Clairvaux.. Ce fils de nobles bourguignons est le dernier des « Pères » du monachisme bénédictin, et avec lui la vocation monastique parvient à un des degrés les plus élevés de son histoire. Né en 1090, à proximité de Dijon, dans le château paternel, fils de nobles chevaliers, il eut une éducation typiquement féodale, et incarna en soi cet esprit des moines et chevaliers médiévaux, fait de prière et de combat, d’ascétisme et de discipline, une discipline spirituelle qui ressemble beaucoup à celle chevaleresque. Très jeune, il entre à l’école des chanoines de Châtillon, une des plus importantes de la Bourgogne, où il étudie les écrivains latins et les Pères de l’Église. En 1107, après la mort de sa mère avec laquelle il était très lié, il entra dans une crise qui le fit se sentir bien éloigné de ce monde de « femmes, chevaliers, armes et amour » qui était le propre de sa famille, et bien proche, au contraire, du désir ardent de rechercher Dieu dans la paix et la quiétude du monastère, loin du fracas et de la violence du monde. Ainsi, à vingt-deux ans, en 1112, il se retire à Citeaux, dans le monastère dirigé par Stéphane Harding et ses trente compagnons. Cette arrivée marquera un tournant, non seulement pour le monastère, mais aussi dans l’histoire de l’Église et de l’Europe occidentale. Quoique différents par leur tempérament, Bernard fit sienne l’idée qui avait inspiré Saint Robert de Moleste, Albéric et Stéphane. Ces derniers s’étaient éloignés de Moleste en 1098 pour se rendre en un lieu solitaire à 20 km de Dijon, en un lieu appelé Cistercium, pour y suivre un style de vie plus simple et plus stricte, en reprenant à l’esprit et à la lettre l’ancienne règle bénédictine, désormais entachée par le grand pouvoir temporel acquis par les monastères clunisiens. Le lieu originel, dans lequel Bernard partagea les premières années de sa vocation rigoureuse, lui convenait très bien, car il était en quête de solitude, mais aussi de lieux ouverts et plaisants pour entretenir un contact plus étroit avec Dieu. Il abandonna donc Citeaux. Ce nouveau lieu sera encore plus éloigné de l’assemblée civile et s’appellera Clairvaux (chiaravalle en italien). Il y devint abbé et y resta jusqu’à sa mort, en 1156, malgré de nombreux voyages, disputes (très célèbre celle avec Abélard), la prêche de la seconde Croisade et l’administration spirituelle d’un ordre qui, à sa mort, comptait plus de 300 monastères.

Nous pouvons dire que les quatre Pères de l’ordre cistercien fondèrent une authentique école de spiritualité, dont Saint Bernard forme le maître incontesté et le point de référence pour des générations futures de moines. Sa dévotion pour la Vierge Marie et pour l’Enfant Jésus reste une caractéristique de sa spiritualité. La tradition de clore la journée de prière par le Salve Regina dérive justement d’une idée à lui. Il avait une prédilection pour les lieux ouverts et agréables, les vallées lumineuses et proches des cours d’eau. De là cette habitude, toute cistercienne, de fonder des monastères dans les vallées. Il y a bien trois villes en Italie qui nous rappellent, donc en raison de leur nom, celui de Clairvaux (Chiaravalle), leur fondation par les moines de Saint Bernard. Humilité, amour vers Dieu, avec un cheminement d’union du coeur, dur travail dans les champs et profonde dévotion mariale sont quelques-uns des traits de la spiritualité de Saint Bernard. Un esprit qui se répand aussi dans les structures architectoniques des monastères et des églises abbatiales, presque quasiment privées de décorations et toutes élancées vers le ciel. Sa réforme spirituelle marque donc le passage de l’art roman à l’art gothique. Comme toute la spiritualité monastique, il voit la vie spirituelle comme un cheminement fait de degrés de perfection, pour être toujours plus uni à l’amour de Dieu. Un amour qui se déverse ensuite sur le prochain, parce qu’on a conscience d’être tous des pêcheurs. Il fut aussi un auteur très prolifique: traités, lettres, prêches, poèmes, un « corpus » d’écrits qui occupe une place très importante dans l’histoire médiévale, et qui le place comme le troisième « Père » médiéval, après Saint Grégoire le Grand et Saint Benoît de Nursie.Parmi les oeuvres les plus importantes, on peut rappeler « De gradibus humilitatis et superbiae », « De gratia et libero arbitrio », « De diligendo Deo ». EIl fut donc un phare de lumière spirituelle qui allait illuminé toute l’Europe occidentale au douzième siècle. Il fut en effet capable de reprendre de manière originale et géniale toute la pensée chrétienne qui le précédait, pourtant dans une perspective monastique et bénédictine. À la différence des Clunisiens, lui ne voit pas simplement l’homme comme un pêcheur, mais aussi comme une créature bonne, à savoir, capable de retrouver toujours la dimension d’amour vers Dieu et vers son prochain. L’être humain, par le péché, a déformé cette image, mais c’est justement au travers de l’incarnation du Fils de Dieu et la disponibilité de Marie Très Sainte, que Dieu peut reformer l’homme à son image. L’homme est appelé à prendre part à cette oeuvre, par la conversion et l’ascèse de l’âme vers Dieu, qui est décrite dans le traité De diligendo Deo. L’incarnation occupe donc une place centrale dans la spiritualité cistercienne. Cette expérience appelle l’homme à la séquelle du Christ, faite dans l’obscurité de la foi, elle se réalise dans la charité.

Mais Saint Bernard ne fut pas seulement un mystique enfermé dans un monastère, éloigné du monde et tendu vers la recherche spirituelle de la communion avec Dieu. Esprit farouche et combattant, vrai chevalier de l’Esprit Saint, il participa activement aux vicissitudes turbulentes de l’Église et de l’Europe occidentale de son temps.  En effet, il prêcha la seconde croisade sous les ordres du Pape Eugène III, celle de Louis VII, Richard Coeur de Lion et Frédéric Barbe Rousse (1148-1151). Il aida le Pape Innocent II, réfugié à Cluny après l’élection de l’antipape Anaclet. Au Concile d’Étampes, grâce à son intervention, le roi Louis VI reconnut Innocent comme le Pape légitime. Il intervint aussi au fameux Concile de Troyes (1128) qui marque la fondation de l’Ordre des Chevaliers du Temple (Templiers), un mythe encore aujourd’hui impérissable. Pour  la première fois, en effet, les deux ordres, bellatores et oratores, à savoir chevaliers et moines, séparés dans la société féodale, furent fondus en un seul, avec l’objectif de défendre les pèlerins en Terre Sainte et les lieux de la vie du Christ. Il fut aussi engagé dans la dispute avec Abélard, et avec les nouveaux maîtres de philosophie qui prétendaient, à ses yeux, expliquer la foi par la raison, et finalement il en obtint la condamnation au Concile de Sains (1140). Ces deux là étaient deux fortes personnalités et ils exprimaient, chacun dans son optique, deux manières de voir le rôle de la foi et de la raison qui sont encore présentes aujourd’hui en terre de France.

     En effet, Saint Bernard adressa des paroles d’exhortation et de reproche, d’encouragement et d’aide, de lumière spirituelle et de foi à toutes les  catégories de la société de son temps, en devenant un point de référence pour son époque. Sans lui, le douzième siècle et la civilisation féodale qu’il représente, n’aurait pas été ce qu’ils ont été. Mais fondamentalement, il fut d’abord avant tout un homme de prière dans un temps de guerre, de croisades, de haines et de violences privées. Une phrase de son De Diligendo Deo m’a beaucoup frappé quand il dit au commencement: 

“En Dieu je veux vivre et en Dieu je veux mourir: pour moi ce sont prières et non questions ”
(Domino vivere et in Domino mori. Orationes a me et non quaestiones) 

Un homme qui privilégiait donc la prière aux disputes philosophiques (dites justement quaestiones) et qui préféra la quiétude du monastère au noble art de la chevalerie et de la guerre. Un choix on ne peut plus actuel.  

28 décembre: Les saints Innocents

28 décembre, 2009

du site:

http://missel.free.fr/Sanctoral/12/28.php

28 décembre

Les saints Innocents

Celui qui ne croit pas que le baptême de Jésus-Christ soit utile aux enfants, pourrait douter aussi que votre mort et votre sang répandu pour Jésus-Christ vous aient obtenu la couronne de l’immortalité. Vous n’aviez pas l’âge pour croire qu’il devait souffrir, mais vous aviez déjà un corps capable d’endurer la mort pour Celui qui devait mourir pour nous.

Saint Augustin

Si vous cherchez pour quelles actions méritoires ces enfants ont été couronnés de la main de Dieu, cherchez aussi pour quels crimes ils ont été cruellement massacrés par Hérode. Serait-il possible que la bonté du Sauveur eût cédé à l’impiété de ce tyran, et qu’Hérode ayant pu les livrer à la mort, nonobstant leur innocence, Jésus-Christ n’ait point pu leur donner la vie éternelle, quoiqu’ils fussent morts à son occasion ?

Saint Bernard

De quoi t’a servi ta cruauté, ô roi impie et barbare ? Tu as pu faire des martyrs, mais tu n’as pu trouver Jésus-Christ que tu voulais égorger. Tu t’imaginais qu’en venant au monde il te chasserait de ton trône ; mais tu étais dans l’erreur. Il n’est pas venu pour prendre la gloire d’autrui, mais pour donner la sienne. Il n’est pas venu pour ravir les royaumes de la terre, mais pour offrir le royaume du ciel. Il n’est pas venu pour s’emparer des grandeurs et des dignités d’ici-bas, mais pour souffrir des injures et des opprobres. Il n’est pas venu pour avoir la tête couronnée de diadèmes, mais pour y porter une couronne d’épines. Enfin, il n’est pas venu pour y être élevé au-dessus des empires, mais pour être attaché à une croix et y endurer la mort.

Saint Augustin

Saint Bernard, « la conscience de son temps »

20 août, 2009

du site:

http://www.mariedenazareth.com/4553.0.html?&L=0

Bernard de Clairvaux, Docteur de l’Eglise
Saint Bernard, « la conscience de son temps »

Si Clairvaux est un lieu enfoui de l’histoire du passé de la France, Bernard de Clairvaux est présent par sa foi, sa doctrine, la vigueur de ses combats spirituels. « Apprenez de Jésus à régner », répète-t-il aux princes… « Votre crime ne restera pas longtemps impuni », affirme-t-il à l’un d’eux. De tels accents l’ont fait surnommer « la conscience de son temps ».  
Il n’est pas besoin d’attendre le recul du temps pour savoir qu’un Jean-Paul II apparaîtra aux générations futures comme l’un des grands phares du XXème siècle tant par son action pastorale que par la puissance de sa pensée théologique et de sa foi théologale.
Au XIIème siècle, il en va de même pour Bernard de Clairvaux. Il est considéré, dès son époque, comme colonne de la foi et père spirituel commun : « Quelques hommes, dit Ernest Hello, ont reçu le don de résumer un siècle en eux. Ces hommes sont rares ; on les compterait sans fatigue. L’un d’eux s’appelait Bernard… » 

Il entre à Cîteaux , sans prévenir personne

En cette première moitié du XIIème siècle, la France est un pays chrétien, riche de monastères, notamment chez les Bénédictins, après le passage de Benoît de Nursie, (VI° siècle), la renaissance carolingienne et la réforme de Cluny. Lorsque naît Bernard, en 1090, il arrive donc dans un contexte aux racines chrétiennes très profondes.
On affirme d’ailleurs que sa propre mère, Aleth, est une sainte reconnue. Ce n’est pas le cas du père, cependant. Croyant, certes, il l’est, car la famille est de bonne souche. Mais la ferveur religieuse n’y est plus, du moins chez ce vassal du duc de Bourgogne. Bernard est le troisième des sept enfants. Il a cinq frères et une sœur. Sa mère pressent, par révélation intérieure, alors même qu’elle est enceinte, la vocation exceptionnelle de ce troisième fils.
L’enfant apparaît très tôt porté vers le silence et la contemplation. A l’adolescence, grand, blond, fin, viril, il est beau, il attire, la grâce rayonne en lui.
Il a seize ans lorsque sa mère meurt. Sans comprendre le désir profond de Bernard, la famille entreprend de faire entrer cet élégant jeune homme dans le monde. C’est mal le connaître. En 1112, il entre à Cîteaux, sans prévenir personne.  

Un rayonnement qui se propage largement dans sa nombreuse famille…

Cîteaux n’est pas Cluny ! Car de ces deux grandes abbayes bénédictines du temps, la première est la plus austère et la plus rude. On cherche à le faire revenir… Il revient, et va passer plusieurs mois, chez les siens, au château de Fontaine-les-Dijon. Mais ce n’est pas pour s’y attiédir : il vient pour prêcher autour de lui l’idéal cistercien.
Lorsqu’il retourne à Cîteaux, trente jeunes gens convertis le suivent. Parmi eux, quatre de ses frères :
- « Nous partons. Tout ce domaine est à toi. Es-tu content ? », demande Guy, l’aîné, au plus jeune, Nivard, le benjamin qui reste à la maison.
- « Ce n’est pas juste ! Vous prenez le ciel et vous me laissez la terre », répond l’enfant.
Plus tard il les suivra à son tour. De même que son père. 

Clairvaux

Trois ans après son entrée dans la vie religieuse, Bernard fonde l’abbaye de Clairvaux,  construite dans une architecture sobre correspondant à l’austérité nouvelle.
Il pose cette abbaye sous la protection de la bieheureuse Vierge Marie.
Il y fut abbé durant 38 ans.
A sa mort, en 1153, Clairvaux compte 700 moines et l’ordre cistercien comporte 165 fondations.

Impossible d’écrire sa vie sans écrire l’histoire du monde entier pendant sa vie

Moine, fondateur, il sera aussi conseiller des grands, rois, penseurs, hommes d’affaires : « Il est impossible d’écrire l’histoire de sa vie sans écrire celle du monde entier pendant sa vie », dit encore Ernest Hello. « Pour se figurer un peu saint Bernard,…il faut tout questionner, les livres et les champs de bataille, les palais des rois, les conciles, les peuples, et l’oratoire où priaient les moines… ».
C’est lui qui a prêché la deuxième croisade, à la demande du pape Eugène III, dont il fut le supérieur à Clairvaux. Et pourtant, il pensait :« Plutôt mourir que parler en public » ! 

Prédicateur, il le devient par amour, mais contemplatif il le restera toujours.  

Saint Bernard et Abelard, la foi révélée contre les idéologies

Bernard a mis sa vie au service de la vérité de l’Ecriture et combat sans complaisance l’erreur dès qu’il la détecte autour de lui, même s’il faut affronter pour cela théologiens en renom et opinion publique.
Il a  notamment compris le danger immense que représente la pensée d’Abelard.
Pour Abélard, la raison, la logique humaine, sont toutes puissantes et la foi est une opinion, aujourd’hui, on dirait « une idéologie ».
Huit siècles avant l’ère des idéologies, en 1140, l’abbé de Clairvaux s’est battu contre une telle attitude d’orgueil, jusqu’à ce que la vérité triomphe. Il affirme à propos du théologien : « Un faux catholique est plus pernicieux qu’un impie déclaré ».
Apôtre de la soumission à l’Ecriture, à la volonté du Père, Bernard est libre. Libre de la liberté même de Dieu, de la docilité à sa lumière. Et Abélard s’est rendu.  

Saint Bernard est amical, doux, conscient de ses faiblesses

S’il est ferme et sévère, Bernard n’est pas pour autant stoïque ni dur, ni ennemi de tout sentiment humain. Son cœur est celui d’un doux.
Il aime l’amitié et la sienne est fidèle :« Aimons-nous, soyons aimés, c’est notre intérêt et l’intérêt des nôtres. En ceux que nous aimons nous reposons ; et à ceux qui nous aiment, nous offrons ce repos. Aimer en Dieu, c’est avoir la charité ; chercher à être aimé pour Dieu, c’est servir la charité ».
Ses faiblesses, ses tentations, ses fautes, il les reconnaît et ne cherche pas à les dominer orgueilleusement par ses propres forces, mais les offre à Marie.  

La responsabilité de Marie, et ce qu’elle est pour nous

Saint Bernard sait que seule la force de Dieu est forte en nous.
Son admiration pour le plan divin du salut se concentre sur le mystère du Verbe Incarné.
Or, pour réaliser l’union entre Dieu et l’homme, le Seigneur il a prévu la contribution singulière d’une créature, Marie. Ce qui fait dire à saint Bernard : « Efforçons-nous de monter vers le Sauveur par la même voie qu’il a suivie pour venir jusqu’à nous »  et « quand on pense à elle, on ne s’égare pas ».
L’importance de Marie dérive du fait qu’elle a contribué à rapprocher l’homme de Dieu et à rendre Dieu plus accessible à l’homme.
La grandeur de Marie se situe aussi au plan de la responsabilité personnelle et morale, dans la réponse que Marie donne le jour de l’Annonciation.
Marie est « l’étoile » nécessaire à notre « navigation » en ce monde.
La pensée de saint Bernard n’est pas vraiment nouvelle,  saint Bernard reprend la pensée des pères de l’Eglise, il est parfois considéré comme le dernier père de l’Eglise… Son style tout à fait enthousiasmant fait de lui le chantre de Marie. 

Canonisé rapidement après sa mort

Bernard a soixante-trois ans. Depuis plusieurs années déjà, il avait reçu le don d’accomplir des miracles, mais tout à la vie intérieure et s’effaçant devant l’action de Dieu en lui et par lui, il affirmait : « Il n’y a aucun rapport entre ces miracles et moi ».
Vingt et un an après sa mort seulement, il est canonisé.

22 juillet – Sainte Marie-Madeleine

22 juillet, 2009

du site:

http://missel.free.fr/Sanctoral/07/22.php

22 juillet – Sainte Marie-Madeleine

Biographie

Marie-Madeleine, ainsi nommée en l’évangile selon saint Luc[1] parmi les femmes qui suivent Jésus depuis la Galilée, se retrouve dans les récits de la Passion et de la Résurrection. Son identité avec Marie de Béthanie et la pécheresse[2] est depuis toujours discutée. Si la chose était de nature à pouvoir être parfaitement éclaircie, elle devrait l’être à présent, puisque tant d’habiles personnages l’ont traitée.

1° La pécheresse

Invité chez un pharisien, Jésus, la Sagesse de Dieu[3], accueille les pécheurs. Sa parole révèle la puissance de l’amour et la grâce du pardon à l’homme trop préoccupé de soi et peu conscient de son médiocre amour. L’attitude de Simon se caractérise par une triple inaction, alors que la pécheresse multiplie les gestes de repentir et d’amour qui, loin d’être pour Jésus une cause de scandale, manifestent une profonde contrition ; d’elle-même elle dénoue sa chevelure[4] et vénère les pieds du Maître avec une intense émotion. L’onction des pieds est un geste extraordinaire, signe d’un amour d’une intensité exceptionnelle. Le pharisien doute du caractère prophétique de Jésus qui se laisse toucher par une pécheresse au détriment de sa propre pureté, mais Jésus connaît le cœur de cette pénitente et, délicatesse suprême, il ne lui révèle la connaissance de ses péchés qu’au moment de les lui pardonner.

Ce texte fonde la nécessité de la contrition parfaite pour la rémission des péchés et son antériorité par rapport à elle, bien que cette contrition est elle-même le fruit de la grâce prévenante du Dieu de pardon. Il souligne l’importance de la foi dans le salut du pécheur, message si utile dans la maison du pharisien. Tandis qu’elle s’en va en paix, elle porte en elle le royaume de Dieu.

2° Disciple de Jésus.

En l’évangile selon saint Luc[5], Marie, appelée la Magdaléenne, est la première nommée des femmes qui assurent la subsistance de Jésus et des Douze. Ces femmes, étroitement associées à la vie du Maître, sont avec lui, ce qui est le propre de la vocation apostolique[6], mais leur présence est un acte permanent de reconnaissance envers celui qui les a guéries d’esprits mauvais et de maladies. Marie-Madeleine est privilégiée, puisqu’elle a été libérée de sept démons[7]. Le passé n’est mentionné que dans la mesure où il est vaincu par Jésus, et où l’être racheté se trouve désormais intimement lié à lui. Peut-on l’assimiler à la pécheresse ? La possession démoniaque n’est pas, de soi, synonyme de péché, mais en l’évangile selon saint Jean[8], l’équivalence est établie entre être pécheur et avoir un démon.

On la retrouve dans les récits de la Passion et peut-être avant, si on l’identifie à Marie de Béthanie. On remarque que Marie de Béthanie, comme la pécheresse et Marie de Magdala, se complait aux pieds de Jésus et connaît en même temps de grands élans d’amour ; on ne peut interpréter le deuxième verset du onzième chapitre de l’évangile selon saint Jean comme une allusion à la seule onction de Béthanie. L’unification des trois donne une cohérence certaine aux récits de la Passion. La relation entre l’onction et la mort apparaît plus étroite, si la femme qui pose un geste prophétique de grande portée, souligné par Jésus, est assimilée à celle qui est présente au pied de la croix et au tombeau.

Saint Marc[9] et saint Matthieu[10] signalent sa présence à quelque distance de la Croix, en tête des femmes qui ont suivi et servi Jésus depuis la Galilée ; l’évangile selon saint Jean[11] la place au pied de la croix près de Marie et de la femme de Cléophas. Les synoptiques la montrent au sépulcre regardant où l’on dépose le corps[12]. Elles furent, pour l’Église primitive, les témoins de la réalité de cet ensevelissement et les garantes d’une connaissance exacte de l’emplacement du tombeau de Jésus. Comparée à l’attitude des apôtres au cours de la Passion[13], la présence des femmes au Calvaire témoigne d’une fidélité sans faille et d’une communion persévérante aux épreuves du Christ. Ce sont elles qui accomplissent la parole de Jésus aux disciples : Vous êtes, vous, ceux qui sont demeurés constamment avec moi dans mes épreuves[14].

3° Apôtre des apôtres[15]

Les évangiles de Pâques notent la présence de Marie-Madeleine au tombeau. Marc et Luc soulignent le côté négatif de son attitude : perplexité, crainte devant le vide du tombeau. Marc achève par leur étonnant silence, tandis que Matthieu montre leur grande joie, leur hâte à remplir leur mission, et décrit une rapide apparition de Jésus : et elles de s’approcher et d’étreindre ses pieds en se prosternant devant lui[16], détail qui permet de rendre compte de la réaction de Jésus en l’évangile selon saint Jean (XX 17). Saint Marc dit qu’il est d’abord apparu à Marie de Magdala dont il avait chassé sept démons.

Ici, En l’évangile selon saint Jean, Marie quitte deux fois le tombeau pour aller vers les disciples : la première fois, d’elle-même, pour annoncer la disparition du Seigneur ; la seconde fois, envoyée en mission pour révéler la présence du Ressuscité auprès du Père et de ses frères. Son amour pour le Christ apparaît dans toute son intensité : ses pleurs, mentionnés quatre fois, révèlent la profondeur du vide qu’elle ressent et l’épaisseur de son ignorance du mystère. Elle est si préoccupée de retrouver le corps qu’elle est incapable de reconnaître le Vivant. Sa foi ne s’éveille qu’à l’écoute de son nom : Marie. Un retournement total s’opère, elle retrouve son Maître avec le désir de ne plus le quitter. Mais Jésus l’invite à dépasser l’ordre du sensible pour devenir l’annonciatrice du mystère pascal. La relation de Marie-Madeleine à son Seigneur subit ici une véritable mutation, une transfiguration dans le feu de l’Esprit : Marie est appelée à le rejoindre là où il va, auprès du Père et dans l’Eglise, avec les frères.

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[1] Evangile selon saint Luc, VIII 2.

[2] Evangile selon saint Luc, VII, 36-50.

[3] Evangile selon saint Luc, VII, 34-35.

[4] Livre des Nombres, V 11-31.

[5] Evangile selon saint Luc, VIII 1-3.

[6] Evangile selon saint Marc, III 14.

[7] Evangile selon saint Luc, XI 24-26.

[8] Evangile selon saint Jean, VIII 46-49.

[9] Evangile selon saint Marc, XV 40-41.

[10] Evangile selon saint Matthieu, XXVII 55-56.

[11] Evangile selon saint Jean, XIX 25.

[12] Evangile selon saint Marc, XV 47 ; évangile selon saint Matthieu, XXVII 61 ; évangile selon saint Luc, XXIII 55 et XXIV 10.

[13] Evangile selon saint Matthieu, XXVI, 56.

[14] Evangile selon saint Luc, XXII, 28.

[15] Evangile selon saint Matthieu, XXVIII 1-10 ; évangile selon saint Marc, XVI 1-11 ; évangile selon saint Luc, XXIV 1-11 ; évangile selon saint Jean, XX 1-18.

[16] Evangile selon saint Matthieu, XXVIII, 9.
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Morceaux choisis

Ne me touchez pas, parce que je ne suis pas encore remonté vers mon Père. O Sainte femme qui avez saisi les pieds du Seigneur pour qu’il vous emporte vers le Père ! C’est une race nouvelle qu’il emportera : Eve qui désormais ne s’égare plus, mais saisit de toutes ses forces l’arbre de vie. Après cela le Christ l’envoie comme apôtre aux apôtres. O merveilleux renversement : Eve devient apôtre.

SaintHippolyte de Rome.

Puisque c’est par une femme que fut inaugrée la séparation d’avec Dieu par la désobéissance, il convenait qu’une femme fût aussi le premier témoin de la Résurrection, afin que la catastrophe qui avait résulté de la désobéissance fût redressée par la foi dans la Résurrection.

SaintGrégoire de Nysse.

De même qu’au début la femme fut l’instigatrice du péché pour l’homme, l’homme consommant l’erreur ; de même à présent celle qui avait goûté la première à la mort a vu la première la Resurrection. Selon l’ordre de la faute, elle fut la première au remède ; elle compense le désastre de l’antique déchéance par l’annonce de la Résurrection. Les lèvres de la femme avaient autrefois donné passage à la mort, les lèvres de cette femme rendent la vie.

SaintAmbroise de Milan.

Il y a trois saints qui m’ont agréé par-dessus tous les autres : sainte Marie, ma mère, saint Jean-Baptiste et sainte Marie-Madeleine.

Notre-Seigneur à Sainte Brigitte de Suède.

Sa pénitence est amour, son désert est amour, sa vie est amour, sa solitude est amour, sa croix est amour, sa langueur est amour et sa mort est amour. Je ne vois qu’amour en Madeleine. Je ne vois que Jésus en son amour, je ne vois que Jésus et amour dans son désert.

Le cardinal de Bérulle.

Marie Madeleine, après être venue au tombeau sans y trouver le corps du Seigneur, crut qu’on l’avait enlevé et porta cette nouvelle aux disciples. Une fois venus, ceux-ci constatèrent et ils crurent qu’il en était comme elle l’avait dit. L’Évangile note aussitôt : « Après cela, les disciples rentrèrent chez eux. » Puis il ajoute : « Mais Marie restait là dehors, à pleurer. »

A ce sujet, il faut mesurer avec quelle force l’amour avait embrasé l’âme de cette femme qui ne s’éloignait pas du tombeau du Seigneur, même lorsque les disciples l’avaient quitté. Elle recherchait celui qu’elle ne trouvait pas, elle pleurait en le cherchant, et, embrasée par le feu de son amour, elle brûlait du désir de celui qu’elle croyait enlevé. C’est pour cela qu’elle a été la seule à le voir, elle qui était restée pour le chercher, car l’efficacité d’une œuvre bonne tient à la persévérance, et la Vérité dit cette parole : « Celui qui aura persévéré jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. »

Elle a donc commencé par chercher, et elle n’a rien trouvé ; elle a persévéré dans sa recherche, et c’est pourquoi elle devait trouver ; ce qui s’est produit, c’est que ses désirs ont grandi à cause de son attente, et en grandissant ils ont pu saisir ce qu’ils avaient trouvé. Car l’attente fait grandir les saints désirs. Si l’attente les fait tomber, ce n’étaient pas de vrais désirs. C’est d’un tel amour qu’ont brûlé tous ceux qui ont pu atteindre la vérité. Aussi David dit-il : « Mon âme a soif du Dieu vivant : quand pourrai-je parvenir devant la face de Dieu ? » Aussi l’Église dit-elle encore dans le Cantique des cantiques : « Je suis blessée d’amour. » Et plus loin : « Mon âme a défailli. »

« Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » On lui demande le motif de sa douleur, afin que son désir s’accroisse, et qu’en nommant celui qu’elle cherchait, elle rende plus ardent son amour pour lui. Jésus lui dit : « Marie. » Après qu’il l’eut appelée par le mot banal de « femme », sans être reconnu, il l’appelle par son nom. C’est comme s’il lui disait clairement : « Reconnais celui par qui tu es reconnue. Je ne te connais pas en général, comme les autres, je te connais d’une façon particulière. » Appelée par son nom, Marie reconnaît donc son créateur et elle l’appelle aussitôt « Rabboni, c’est-à-dire maître », parce que celui qu’elle cherchait extérieurement était celui-là même qui lui enseignait intérieurement à le chercher.

Saint Grégoire le Grand

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