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La liturgie de la vie en saint Paul

16 janvier, 2010

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La liturgie de la vie en saint Paul

S. M. Regina Cesarato pddm

Saint Paul est encore vivant aujourd’hui et il continue à former les générations chrétiennes spécialement lorsque, dans la liturgie de l’Église, nous lisons ses Lettres ou les récits des Actes des Apôtres qui le concernent. En effet, Dieu a préparé l’Apôtre pour une mission particulière qui est allée bien au-delà de son histoire personnelle.
Lorsque le jeune Saul de Tarse, ayant terminé sa première formation, arrivait à Jérusalem pour suivre les leçons de Gamaliel (Ac 22, 3), le scribe pharisien le plus cultivé du moment, il s’est trouvé devant l’esplanade du Temple consacré au Dieu de ses pères. En effet, les leçons des rabbins étaient données sous les portiques ou dans les salles des édifices qui occupaient la partie centrale de l’esplanade.
Situé à l’est, le Temple était le coeur de la ville sainte vers laquelle se tournait le désir de chaque Israélite. Saul aura certainement admiré la grandeur de sa construction délimitée par un double portique et subdivisée en quatre cours; le sanctuaire, dont le toit était recouvert d’or, occupait la partie centrale. Pour les grandes fêtes annuelles, les pèlerins venus de partout couvraient les rues de la Palestine et se rendaient au Temple en chantant les psaumes des montées (Psaumes 120-134).
Saul vibrait à ce rythme et participait aux liturgies splendides du Temple. Il apprenait la valeur des pratiques cultuelles de son peuple, le repos sabbatique, l’office synagogale, le jeûne du jour de l’Expiation, les prières qui accompagnaient les actes quotidiens, l’usage des phylactères et des franges, les jeûnes spontanés, les offrandes et les voeux. La foi en Dieu et l’étude de la Torah imprègnent tous les moments et toutes les actions de son existence suivant le schéma rituel de la séparation de la réalité profane.
À travers la pratique minutieuse de toutes les prescriptions rituelles, dans la longue
expérience de contact avec la liturgie du Temple de Jérusalem, le Seigneur le préparait
à rencontrer Jésus Christ qui est “plus grand que le Temple”, et à intérioriser sa passion
pour Dieu dans une liturgie de la vie continuelle. Avec le Nouveau Testament, en effet,
la fonction du Temple est transférée à la personne de Jésus Christ, mort et ressuscité.
Son corps est le “Temple nouveau” (Jn 2, 21). Dans la révélation du chemin de Damas,
Saul en restera fulguré.

La “séparation” de Paul

Les nombreux détails de la conversion transfiguratrice de Saul que le Livre des Actes des Apôtres raconte trois fois (Ac 9; 22; 26) sont confirmés dans les Lettres de l’Apôtre mais avec plus de sobriété. Il comprend que sa vocation est l’oeuvre de Dieu, une grâce pure et non méritée, donnée à un homme qui se justifiait lui-même avec la pratique des prescriptions mais qui était en réalité un “blasphémateur, un persécuteur et un violent” (1 Tm 1, 13). Dieu a choisi et appelé un persécuteur pour faire de lui un apôtre. Cet appel est une libre décision du Seigneur et qui vient de son bon plaisir. Ce n’est pas une improvisation parce que l’amour de Dieu pour nous vient toujours de très loin (Rm 8, 28-30).
Dans les Lettres pauliniennes, l’action “d’appeler”, en grec kalein, a toujours Dieu même comme sujet. En termes théologiques et cultuels, Paul parle de sa vocation dans Ga 1, 15-16. « Lorsque Celui qui m’a mis à part depuis le sein de ma mère et m’a appelé par sa grâce, a jugé bon (eudokésen) de révéler son Fils en moi afin que je l’annonce parmi les païens, aussitôt, sans recourir à aucun conseil humain …».
Le verbe utilisé par l’Apôtre : “mettre à part – séparer” est significatif dans la vocation articulière de Paul. Il se présente de la même manière au début de la Lettre aux Romains : « Paul, appelé à être apôtre, mis à part pour annoncer l’Évangile de Dieu » (Rm 1, 1). Dieu s’est réservé Paul comme dans la liturgie du Temple on Lui réserve les offrandes et les prémices. Dans l’Ancien Testament, ce verbe a souvent un sens cultuel et il s’applique aux victimes choisies pour les sacrifices (Ex 29, 26-27) comme aux lévites mis à part pour le service liturgique (Nb 8-11) ainsi qu’à tout le peuple élu : «Vous serez consacrés à moi parce que je suis Saint, le Seigneur votre Dieu qui vous a mis à part de toutes les nations afin que vous m’apparteniez » (Lv 20, 26).
Paul a été soustrait à un mode commun de vie pour être introduit dans une relation spéciale avec Dieu. Cependant, le contexte fait comprendre qu’il ne s’agit pas d’une ségrégation parce que l’élection de l’apôtre porte en elle la mission d’introduire les autres, spécialement parmi les païens, dans la même relation d’alliance avec Dieu, dans le Christ Jésus. Toutefois, nous ne devons pas concevoir la vocation de Paul en clé “administrative” comme si Dieu lui confiait une fonction pour le bien des autres. Nous devons la comprendre comme une grâce personnelle, intérieure, qui lui donne la possibilité d’accomplir une mission qui s’adresse à d’autres personnes. C’est un témoignage, une liturgie de la vie qui demande l’engagement de toute la personne et qui jaillit d’une expérience de relation personnelle et profonde avec le Christ. Paul a reçu “en luimême” la révélation du Fils de Dieu et il a été introduit dans un rapport intime avec Lui, jusqu’à la conformation complète à son mystère. En effet, il affirme : « Car le Dieu qui a dit : que la lumière brille au milieu des ténèbres, c’est lui-même qui a brillé dans nos coeurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ » (2 Co 4, 6). Dieu a fait briller la lumière du Christ dans le coeur de Paul, c’est-à dire dans ce lieu qui, dans l’anthropologie biblique, indique le siège de l’intériorité, de la liberté et du choix conscient.
C’est pourquoi, il y a un rapport profond entre la révélation intérieure et la mission apostolique. La révélation du Fils de Dieu lui fut donnée, dit-il « afin qu’il l’annonce parmi les païens » (Ga 1, 16), c’est-à-dire qu’il en porte la bonne nouvelle à tous, de manière à ce que tous puissent entrer dans l’économie de l’alliance nouvelle et définitive et « participer au même héritage, membres du même corps, associés à la même promesse » (Ep 3, 6).
Le rapport vivant et dynamique avec la Personne du Fils de Dieu inaugure la liturgie de la vie. Il ne s’agit plus seulement d’une relation cultuelle, comme dans le Temple de Jérusalem, mais d’une relation existentielle qui transforme tous les moments du quotidien. Le schéma de la sacralité typique du Temple est renversé. La relation avec Dieu n’advient plus par des éparations mais en vertu de l’Incarnation, par immersion dans le mystère du Christ.
Paul a senti qu’il était saisi par le Christ Jésus (Ph 3, 12) et, même dans le milieu religieux, son échelle de valeurs a basculé. « Or, toutes ces choses qui étaient pour moi des gains, je les ai considérées comme une perte à cause du Christ. Mais oui, je considère que tout est perte en regard de ce bien suprême qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur. À cause de lui, j’ai tout perdu et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ… » (Ph 3, 7-8). Pour demeurer uni au Christ, Paul se met de toutes ses forces au service du prochain en évangélisant. L’amour du Christ dont il a fait l’expérience le pousse à donner sa vie pour l’Évangile.

Déplacement de la terminologie cultuelle

Puisant à son expérience prolongée dans le Temple, l’apôtre devenu chrétien opère un hangement radical de perspective. Il utilise la terminologie typique propre au culte et il l’applique à l’expérience de la vie chrétienne.
Par exemple, en se référant peut-être au rituel de l’agneau immolé pour l’expiation des péchés (cf. Lv 4, 24; Is 53, 10), Paul montre le Christ comme « offrande et victime d’agréable odeur » (Ep 5, 2). La fragrance des victimes sacrificielles signifiait l’accueil des sacrifices de la part de Dieu. Christ est “notre Pâque” c’est-à-dire “l’agneau pascal” qui offre une nouveauté de vie à tous ceux qui sont appelés à “célébrer” la pâque avec “des pains sans levain” et pas avec du “vieux levain” (cf. 1 Co 5, 7-8; Ga 5, 9).
Tout ce qui est salvifique pour le peuple dans la première Alliance s’accomplit maintenant en la personne de Jésus. Même si Paul écrit ses lettres quand le Temple de Jérusalem n’a pas encore été détruit (70 ap. C), il définit le corps des chrétiens comme “temple de Dieu” (cf. 1 Co 3, 16-17; 6, 18-20; 2 Co 6, 16; Ep 2, 21). Le processus de personnalisation du Temple a lieu à partir d’une perspective christologique, même dans la théologie johannique (Jn 2, 19-21).
Pour exprimer cette réalité, l’Apôtre opère un déplacement de terminologie parfois surprenant et très audacieux. Même la première lettre de Pierre est dans la même ligne.
Pour Paul, la liturgie devient le cadre “naturel” où se déploie la vie chrétienne dans toute sa sacralité. Il s’applique d’abord cette perspective à lui-même et il décrit son apostolat dans un langage cultuel. Dans des contextes déterminés, le verbe “servir” (douleuein), semble parfois rappeler le service liturgique (1 Th 1, 9-10; Ga 4, 8-11).

Paul, officiant du Christ

Dans l’évangélisation, Paul est “officiant du Christ” (cf. Rm 15, 16) qui rend le culte à Dieu par sa vie personnelle (Rm 1, 9-10; 2 Tm 1, 3).
Même si, ni le Christ Jésus ni Paul, n’ont accompli personnellement des sacrifices dans le temple de Jérusalem, les lettres pauliniennes décrivent leur existence dans un langage de culte. L’apôtre a chargé la vie chrétienne de sens liturgique sans faire de distinction entre actions ministérielles et communes; il compare la conclusion même de sa vie à la libation sacrificielle : son sang « va être offert en libation » (cf. Ph 2, 17; 2 Tm 4, 6).
Son ministère apostolique est un culte (latreuo) qu’il rend « à Dieu dans l’Esprit » (Rm 1, 9). Il se qualifie de “protagoniste d’une activité liturgique” (leitourgon : Rm 15, 16) dans son ministère au milieu des païens.
 Son dévouement total à l’égard des habitants de Philippes est un sacrifice qui se réalise en lui (spendomai) pour le bien de la vie de foi des chrétiens de Philippes qui est appelé “offrande sacrificielle” et activité liturgique (thysia kai liturgia : Ph 2, 17). La cueillette de fonds pratiquée dans les communautés grecques en faveur de l’Église de Jérusalem est appelée “activité liturgique” (leitourgia : 2 Co 9, 12) et Epaphrodite, envoyé par les chrétiens de Philippes pour assister Paul dans les inconforts de la prison en lui prêtant les modestes services dont l’apôtre emprisonné avait besoin, est désigné comme “protagoniste d’une action liturgique” (leitourgon : Ph 2, 25). En ce qui concerne Paul personnellement ainsi que les destinataires de ses lettres, le point de départ de toute la vie chrétienne, c’est le baptême en tant qu’immersion dans la
mort et la résurrection du Christ (cf. Rm 6, 1-11).

La vie chrétienne comme liturgie

La réalité baptismale place le chrétien dans une situation complètement nouvelle qui permet à l’apôtre de transférer à la vie chrétienne tous les termes propres au culte dans le Temple de Jérusalem. Ce déplacement de terminologie cultuelle est évident dans Rm 12, 1-2 :
 « .Je vous exhorte donc, frères, au nom de la miséricorde de Dieu, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu : ce sera là votre culte spirituel. Ne vous conformez pas au monde présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence, pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bien, ce qui lui est agréable, ce qui est parfait ».
Dans la première partie de la lettre aux Romains, après avoir expliqué la situation nouvelle de la vie chrétienne, Paul conclut en invitant les croyants, au nom de toute la miséricorde dont il a fait l’expérience, à présenter leur vie à Dieu, c’est-à-dire leurs propres corps (somata), dans le concret relationnel de la personne, en référence au temps et à l’espace.
Cette offrande devra être irréversible, comme la victime sacrificielle qui était immolée dans le Temple, mais en même temps, elle devra être une victime qui vit comme l’Agneau immolé et ressuscité de l’Apocalypse. Dans le cas des chrétiens, la radicalité de l’offrande constitue, selon Paul, un culte vrai (latreian) qui donne sens à la vie. Selon l’enseignement de l’apôtre, cet élan oblatif vécu dans les détails pratiques de la vie quotidienne est une liturgie.
Pour réaliser cette “liturgie de la vie”, il faut cependant s’éloigner de la mentalité du monde dans ses aspects corrompus et peccamineux. La participation à la vitalité du Christ ressuscité, avec le don de l’Esprit, fruit du baptême, poussera le chrétien à une transformation continue et progressive dans la ligne des valeurs du Christ ainsi qu’à un renouvellement constant de ses systèmes mentaux pour le rendre capable d’un discernement ouvert à la volonté de Dieu dans le détail de la vie quotidienne, sans suivre le schéma de ce monde.
Paul attribue cette qualité liturgique à tout ce qu’il est et à tout ce qu’il fait mais il trouve aussi des moments et des espaces qualifiants de prière pour lui-même et pour les communautés chrétiennes qui ont leur sommet dans l’Eucharistie (1 Co 11, 23-34).
L’épistolaire paulinien est parsemé d’hymnes, de doxologies,de formules de foi, de
bénédictions et d’acclamations qui évoquent le contexte ecclésial des communautés
Xuxquelles les lettres sont destinées ainsi que leur vitalité liturgique. Les fragments liturgiques sont employés par saint Paul d’une manière créative et vivace et chaque lettre commence par une bénédiction d’introduction adaptée aux nécessités spécifiques des communautés chrétiennes.
La sacralité merveilleuse qui était exprimée dans le rapport avec Dieu dans le Temple, les prières de la Synagogue, le chant des psaumes, les fêtes du judaïsme et tout l’ensemble rituel de la première Alliance, trouve maintenant son accomplissement dans le Christ Jésus. Par Lui et dans la force de l’Esprit monte vers Dieu, Père, notre amen, dans une continuelle liturgie de la vie.

Dédicace des Basiliques des saints Apôtres Pierre et Paul (traduction Google)

19 novembre, 2009

du site:

http://www.santiebeati.it/dettaglio/30100

Dédicace des Basiliques des saints Apôtres Pierre et Paul  (traduction Google)

Novembre 18 – facultatif Memorial

Les Princes des Apôtres Pierre et Paul, sont toujours associés dans la liturgie de l’Église romaine. Les deux basiliques, les trophées du martyre de Pierre et Paul, ont été érigés sur la tombe des deux apôtres. But de pèlerinage ininterrompue à travers les siècles, sont un signe d’unité et apostolique de Rome. (Msg Rom)
Martyrologe romain: Dédicace des Basiliques des saints Pierre et Paul, Apôtres, dont le premier a été construit par l’empereur Constantin sur la colline du Vatican, au-dessus du tombeau de saint Pierre, usé par le temps et reconstruit d’une manière plus approfondie, cette journée a été nouvellement consacrée, l’autre sur la Via Ostiense, construit par l’empereur Théodose et Valentinien, puis détruits par un feu terrible et entièrement reconstruite, a été consacrée le 10 Décembre. Dans leur commémoration conjointe s’exprime symboliquement la fraternité et l’unité de l’Eglise des Apôtres.

La mémoire de la Dédicace des Basiliques des saints apôtres Pierre et Paul, l’Apôtre une nouvelle opportunité, le quatrième cette année, de réfléchir sur la figure et l’œuvre des deux Princes des Apôtres et aussi sur le culte donné exceptionnelle dans leurs âges. Maintenant à la fin de leur vie, S. Pierre et Paul ont été induites par les circonstances à tâtons une brève évaluation de ce que le Seigneur avait travaillé à travers eux. Écrit « à ceux qui ont reçu le même sort avec une foi en la justice de notre Dieu et Sauveur Jésus-Christ», S. Peter a déclaré entre autres: «Je pense que le droit, pendant que je suis dans cette tente du corps, de vous tenir éveillé avec mes conseils, sachant que bientôt je vais devoir quitter ma tente, comme il m’a fait comprendre, même si notre Seigneur Jésus-Christ. Et de vous que, même après mon départ, vous devez vous rappeler ces choses. Il ne doit pas être laissé derrière artificiellement fables inventées lorsque nous vous avons donné la puissance et l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, mais nous avons été témoins de sa grandeur. .. nous avons entendu cette voix venant du ciel pendant que nous étions avec lui sur sa montagne sainte « (2 P 1,13-18).
Pour sa part, S. Paul confie à son «véritable enfant dans la foi», S. Timothée: « Je rends grâce à Celui qui m’a donné la force, le Christ Jésus notre Seigneur, parce que je pensais digne de confiance, appelé au ministère … donc la grâce de notre Seigneur m’a rempli de foi et d’amour qui est en Jésus-Christ .. C’est précisément pour cette raison que j’ai obtenu miséricorde, parce que Jésus Christ a voulu me montrer, d’une part, toute sa grandeur d’âme, par exemple à ceux qui croiraient en lui pour la vie éternelle « (2 Tm 1,12-16 ).
Leur qualité de «sauvé», le ministère parmi le peuple de Dieu, et enfin le témoignage suprême, par l’effusion de sang, le SS Pierre et Paul a attiré un culte qui sont la manifestation claire de la basiliques de cette journée de commémoration le dévouement, qui a été appliquée par les papes Sylvester (314-335) et Sirice (384-399). Surtout la Basilique de Saint – Peter est souvent la une des journaux quotidiens pour les cérémonies solennelles pontificaux qui sont établies dans ses murs ou sur la grande place en face: dans les yeux et le cœur de vue d’ensemble tout est encore magnifique sur les sièges pour environ 2500 pères de Vatican II, le Conseil a annoncé, par le Pape Jean-vient de la basilique de S. Paul hors les Murs.

Auteur: Piero Bargellini

Un regard de Saint Paul sur la Vierge Marie ; l’homme, la femme, le Christ, l’Eglise.

29 octobre, 2009

du site:

http://notredamedulaus.over-blog.com/article-30536683.html

Un regard de Saint Paul sur la Vierge Marie ; l’homme, la femme, le Christ, l’Eglise.

Enseignement de la Semaine Sainte à Notre Dame du Laus  

Un regard de Saint Paul sur la Vierge Marie,

 l’homme, la femme, le Christ l’Eglise.  

Pour aborder ce sujet délicat, aujourd’hui encore, sans doute depuis toujours, je vais vous proposer de nous enrichir de la manière dont l’apôtre Paul rapproche l’Eglise de la Vierge Marie. Pour réaliser ce parcours nous entrerons dans les textes du pape Jean-Paul II sur la femme dans l’Eglise (Redemptoris Mater : RM et Mulieris Dignitatem : MD), textes dans lesquels sont cités abondamment les lettres de Saint Paul. Puis, nous lirons les tout premiers chapitres de la Genèse évoquant la place de l’homme et de la femme. En final, nous pourrons retrouver l’expérience propre de Benoîte Rencurel au Laus.  

1- Deux lettres du pape Jean-Paul II.

            Le pape Jean-Paul II a écrit de très beaux textes sur le rôle de la femme dans l’Eglise  dans la société et dans l’Eglise. Nous les retrouvons commentés dans la revue de l’Académie d’Education et d’Etudes Sociales portant sur la différence homme / femme (Annales 2006 – 2007). Une théologienne, Marie Hendrickx, cherche à montrer comment l’encyclique Redemptoris Mater de 1987 et la lettre apostolique Mulieris Dignitatem de 1988 donnent une place première à la femme dans la société et montrent sa vocation au sein de la famille.1 Depuis la famille comme cellule de base de toute société humaine, le Pape aborde alors la vocation même de la femme au sein de l’Eglise.

            Pour le Pape Jean-Paul II, à la suite de l’apôtre Paul, la figure de Marie exprime parfaitement la vocation de la femme. Dans l’épitre aux Galates, Saint Paul écrit : « Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son Fils né d’une femme, né sujet de la loi, afin de racheter les sujets de la loi et de nous conférer l’adoption filiale. »(Gal 4, 4) Le Pape relie la présence de la Vierge Marie au mystère même, bien sûr, de la naissance du Christ et aussi au mystère non moins important du Salut de tous les hommes. De même, il donnera à Marie un rôle de médiation maternelle puisque c’est par elle que prend naissance auprès des hommes, leur rédempteur. En somme, par la Vierge Marie, se réalise pour l’homme, pour tout homme une nouvelle naissance. Marie, nouvelle Eve, devient alors la mère des vivants, ce qui est déjà la signification du nom d’Eve? Mais ces vivants que nous sommes reçoivent par Marie, la promesse de la vie éternelle. Nous en reparlerons.

            Le Pape Jean-Paul II ira plus loin encore dans sa lettre apostolique, Mulieris dignitatem. Dans cette courte lettre qui veut vraiment éclairer les croyants sur la vocation de la femme, le Pape cherche à présenter « celle qui reçoit l’amour pour aimer à son tour ». Il ne s’agit pas de croire que la femme ne ferait que de subir la domination de l’amour du mâle en vue de transmettre cet amour à ses seuls enfants et de n’en rien garder pour elle-même. Au contraire, le pape permet de découvrir comment la femme est « celle en qui l’ordre de l’amour dans le monde créé des personnes trouve le lieu de son premier enracinement ».2 La dimension de l’amour appartient en effet, à la vie intime de Dieu lui-même, à la vie trinitaire, explique Jean-Paul II. C’est donc la perfection de cet amour qui s’ échange sans fin entre le Père, le Fils et l’Esprit-Saint qui est confié à la femme pour qu’à partir d’elle naissent enfin les fils tant désirés par Dieu.

            Cette affirmation prophétique et magnifique provient de la manière dont le pape lit chez l’apôtre Paul, cette remarque très surprenante pour un lecteur du XXIème siècle : « Les chrétiens doivent être soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ » (Eph. 5, 21). Et aussi un peu plus loin : « Les maris doivent aimer leur femme comme le Christ a aimé l’Eglise, pour laquelle il s’est livré. » (v. 25) Dans cette réciprocité des liens entre le Christ et l’Eglise, l’époux est celui qui aime, l’épouse est aimée pour aimer à son tour. Et c’est à partir du modèle que représente le lien invisible qui unit le Christ à l’Eglise que St Paul compare l’homme au Christ et la femme à l’Eglise. Les membres de l’Eglise du Christ sont ainsi appelés à témoigner de l’amour qu’ils reçoivent sans cesse du Christ. L’amour du Christ concerne en fait tous les hommes. Ce sont donc tous les hommes qui sont invités à bénéficier de l’amour que le Christ réserve à l’Eglise.  

            Cela va bien sûr très loin. Poursuivant la comparaison que fait Saint Paul entre la vie du couple et les liens entre le Christ et l’Eglise, le Pape peut avancer que pour lui, la femme peut s’attendre à recevoir de son mari un amour tel que cela doit lui permettre de le redonner à un autre puis à d’autres… De fait, dans le couple, l’amour reçu par la femme ouvre sur la venue des enfants du couple. Aussi, à partir de là, le pape va plus loin et explique alors que la perspective visée par saint Paul est plus universelle que la situation concrète d’un couple humain. En toute personne humaine, les liens avec les autres touchent une part de féminin en elle, une part de masculin en elle. A partir des affirmations de l’apôtre, Jean Paul II perçoit que la femme n’a pas la même position que l’homme dans les rencontres qui la relient aux autres, « du fait même de sa féminité », dit-il. En lisant plus largement toute la Bible, les couples bibliques que nous rencontrons dans les livres de l’Ancien testament mettent moins en scène deux êtres différents que les deux aspects de masculin et de féminin en toute personne humaine. Afin d’illustrer cela dans sa lettre, le Pape étend son étude sur le témoignage de quelques couples bibliques, notamment Adam et Eve puis l’époux et l’épouse, le Christ et l’Eglise et enfin Dieu et l’humanité.

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2- Adam et Eve

            Dans le chapitre 3 de l’encyclique Mulieris dignitatem, Jean Paul II sonde le récit du Livre de la genèse. Mais essayons de lire aussi la proposition d’une femme bibliste, Marie Balmary, pour comprendre la place de l’homme et de la femme dans le processus de la Création. Marie Balmary nous fait entrer dans le mystère de la présence de l’homme et de la femme et de leur lien avec Dieu. Le Pape, lui, nous parle de la place d’Eve auprès d’Adam, disant que la présence de la femme auprès du premier homme lui permet de découvrir non seulement qu’il existe mais qu’il existe pour autrui. L’homme et la femme se donneront l’un à l’autre et se recevront l’un de l’autre. C’est ainsi qu’ils seront à l’image de Dieu, développe Jean Paul II. Parce qu’ils sont communion de l’un à l’autre dans l’amour. Rappelons le propos du Pape  : « Conformément au dessein éternel de Dieu, la femme, avons-nous dit, est celle en qui l’ordre de l’amour dans le monde créé des personnes trouve le lieu de son premier enracinement, l’ordre de l’amour appartient à la vie de Dieu lui-même, à la vie trinitaire. »

            Or, la vie trinitaire, l’amour entre le Père et le fils et avec l’Esprit Saint ne demeure pas enfermé entre les trois personnes de la Trinité. De même pour l’amour qui est échangé entre les deux personnes du couple, l’amour au sein de la vie trinitaire est fécond : « Dieu dit : ‘que la lumière soit et la lumière fut’… » A partir de là, le pape pourra développer comment la femme de Nazareth exprime « la vérité sur la maternité et aussi sur la virginité comme deux vocations de la femme à la  lumière de la révélation divine. » (MD, 7)  

3- Quelques mots sur l’homme et la femme.

            Revenons sur la phrase de Saint Paul : Les maris doivent aimer leur femme comme le Christ a aimé l’Eglise, pour laquelle il s’est livré. » Essayons de comprendre pourquoi l’apôtre s’appuie sur la différence homme/femme pour parler du Christ et de l’Eglise. Pour cela retrouvons le récit de la genèse et notamment les passages suivants : « Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. » (Gen 1, 27). Et plus loin, dans le chapitre 2, nous lisons : « Dieu dit : ‘Ce n’est pas bon que l’homme soit seul, je ferai une aide contre lui. » 4 (Gn 2, 18)  

            Pour cette étude, je m’appuie sur une communication de Marie Balmary sur ce sujet 2
 

A – Dieu et l’homme

« Yahvé ordonne à Adam pour dire : « De tout arbre du jardin, tu mangeras, tu mangeras, mais de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, tu ne mangeras pas, oui, du jour où tu en mangeras, tu mourras, tu mourras. » (Gen 2, 16-17) 5

           

            L’interdit posé par Dieu dans ce texte n’a rien d’un interdit social. Dieu demande qu’on ait confiance en la portée de l’interdit qu’il énonce. Si l’on pose comme postulat que Dieu est tout autre que tout ce qui est créé, le Grand Autre parce qu’il est à l’origine de tout mais séparé, différent de toute chose créée, nous pouvons comprendre qu’il porte en lui la Vérité sur tout être. Il énonce une loi en vue de protéger l’homme d’une menace pour lui. Mais quelle est cette menace ? Cette menace est exprimée ici à partir de la possibilité de manger de tous les arbres du jardin. Et, en mangeant de tous les arbres du jardin, l’homme pourrait manger aussi l’arbre de la connaissance du bien et du mal. C’est bien autour du fait de manger que proviendrait la chute conduisant l’homme vers sa mort. Marie Balmary éclaire ce point à partir de cette image de la nourriture que nous consommons : « Manger, c’est dé- différencier. Ce que je mange devient moi et disparaît en moi » 6 En mangeant le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, je le fais advenir moi-même. Il y a là un problème. C’est de là qu’il faut partir pour comprendre l’interdit posé par Dieu. « Car, explique Marie Balmary, ne pas se manger, entre humains, c’est se connaître bien, c’est se garder et cultiver l’écart, la séparation qui permet de s’écouter, de se parler, sans se confondre. » (Idem) Vis-à-vis de Dieu, il s’agit alors de savoir maintenir la séparation qu’il a installé pour qu’il soit Lui et l’homme un autre. En enfreignant cet interdit, l’homme prendrait le risque de s’engager sur une voie de toute puissance car il croirait connaître parfaitement Dieu en l’assimilant à lui. L’homme mourrait puisqu’il serait seul, ayant assimilé tout ce qui lui est différent. Sa vérité d’être ne s’appuierait pas sur une autre vérité, celle de Dieu, celle de tout autre que lui, mais sur sa seule imagination. Par cet interdit, Dieu offre à l’homme le moyen de se connaître lui-même par le regard que Dieu et tout autre que lui, portent sur lui et son avenir.

            La racine du péché est là. Elle est dans la place que nous accordons à l’autre. Or il est nécessaire de donner une place première à l’autre pour faire alliance avec lui et non pas le manger ou le faire disparaître en soi. C’est en reconnaissant la différence contenue en l’autre et donc une complémentarité avec l’autre qui permet de réaliser une œuvre commune. Le serpent est l’instance qui fait refuser d’accepter Dieu pour tout autre que soi. Il fait figure de celui qui empêche l’accomplissement de toute l’œuvre de Dieu et donc de toute la création.  

            Parlons alors du lien entre l’homme et la femme.  

B – L’homme et la femme.

« Dieu dit : ‘Il n’est pas bon pour le glébeux (Adam) d’être seul ! Je ferai pour lui une aide contre lui’. » 6 (Gn 2, 18) Il s’agit là d’un passage important de la Bible. Car de la condition de mâle et de femelle qui se trouvait être celle des humains parmi l’ensemble des espèces de la Création, il apparaît là, soudainement l’homme et la femme. Comment est exprimé le déplacement mâle-femelle vers la présence de l’homme et de la femme ?

            Cela a commencé juste après l’interdit dont nous venons de parler. Dieu dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, faisons-lui une aide ». (Gn 2,7) Littéralement, il faut lire : Dieu fait une aide contre Adam. A cet homme mâle, issu de la glaise du sol, Dieu va se mettre à chercher qui pourrait se placer « contre lui », c’est-à-dire en vis-à-vis différencié et immangeable, suivant ce qui est interdit plus haut. Dans ce sens, les animaux ne conviennent pas. Alors il plonge le glébeux, Adam, dans un sommeil. Suivant les psychanalystes, c’est précisément dans le sommeil que, « tout homme  qui dort va chercher son désir dans le rêve. » 7 Aussi, explique Marie Balmary, justement, l’Adam s’est endormi à la recherche de l’autre, à la recherche d’un autre pour qu’il puisse parler avec lui – et non pas seulement « parler à », ce qu’il a fait pour les animaux juste auparavant, en les nommant.’- Ainsi, Adam se met à parler vraiment avec une autre, c’est-à-dire celle, qui restera pour toujours différente de lui, non-mangeable. Il va recevoir de Dieu un être qui ne vient pas de la terre mais qui vient de lui, de son désir le plus profond (la côte, la chair de sa chair), d’avoir auprès de lui quelqu’un avec qui il puisse parler en vérité. « L’homme et la femme adviennent donc ensemble et l’un par l’autre », dit encore Marie Balmary. Dieu ne fait que les présenter l’un à l’autre comme lors du mariage où un témoin de Dieu prend les deux mains du couple et les unit leur proposant de se déclarer leur choix l’un de l’autre.  

4 – Dieu et l’homme.

            La manière dont Dieu cherche à maintenir une séparation toute nécessaire entre lui et Adam est aussi la manière dont l’homme et la femme auront à maintenir une différenciation, une distinction nécessaire entre eux en vue de vivre ensemble une alliance. L’homme mâle et l’homme femelle deviennent mari et épouse en se parlant, en échangeant une parole. Cette alliance fragile, toujours remise en question entre l’homme et la femme n’est pas non plus une coalition en vue de dominer sur l’œuvre de Dieu, suivant ce qu’illustre le récit de la Tour de Babel. Entre l’homme et la femme le projet rejoint le désir même de Dieu de permettre à l’homme de participer pleinement à sa vie trinitaire, à son œuvre d’amour. C’est ainsi que Saint Paul comprendra le lien entre le Christ et l’Eglise.

            « Quand vint la plénitude des temps, ‘Dieu envoya son Fils, né d’une femme’ » (Gal 4, 4). Le Pape Jean-Paul II fait de cette phrase de Saint Paul le sommet de sa lettre sur « La dignité de la femme ». En effet, lorsque Saint Paul parle de la « plénitude des temps », il insiste sur ce moment où Dieu décide de réaliser son projet. Et cette réalisation ultime passe par une femme d’une part, par le Fils de Dieu d’autre part. Jean-Paul II écrit : « L’événement de Nazareth met en relief une forme d’union à Dieu qui ne peut pas appartenir qu’à la femme » (MD 4). L’union à Dieu est une initiative de Dieu et une réponse entière de la vierge de Nazareth. De cette union entre Dieu et la femme il naît le fils même de Dieu, rendant ainsi la vierge de Nazareth mère de Dieu, puisque le fils de Dieu ne peut être autre que Dieu, même s’il est aussi pleinement homme par Marie. C’est donc le Christ qui sera le lien entre Dieu et la femme, qui unira finalement tous les hommes avec Dieu. Or, le Christ est Parole de Dieu. De même qu’entre Adam et Eve, la parole échangée leur permit d’unir leur vie sans manger l’autre. De même, c’est par le Christ que les hommes et Dieu sont réunis sans que l’homme puisse aller jusqu’au projet de se substituer à Dieu. C’est ainsi, par le don de la parole, le don du Christ entre les hommes que ceux-ci peuvent s’accomplir pleinement non plus mâle et femelle mais comme homme et femme à l’image et à la ressemblance de Dieu. Dieu parle à l’homme par son fils. L’homme parle à Dieu par Jésus-Christ, fils de Dieu. C’est-à-dire que par le verbe qui devient chair, l’homme est uni à Dieu, définitivement. L’homme est Dieu mais Dieu reste Lui-même et l’homme reste lui-même. « Ceux à qui la Parole de Dieu s’adressait, la Loi les appelle des dieux ; et l’Ecriture ne peut être abolie » dit Jésus (Jn 10, 34-35)  

5- Le Christ et l’Eglise.

      Il y a donc « mariage », dit le Pape entre Dieu et Marie et, à travers Marie en tant que femme, il y a mariage entre Dieu et l’homme, c’est-à-dire avec tous les hommes. De cette union entre Dieu et Marie, il naît le Christ-Jésus. La tâche de Jésus a été, nous le savons, de réaliser l’œuvre de son Père qui est de racheter tous les hommes. (Jn 10, 37) Or, c’est aujourd’hui l’Eglise par les successeurs des apôtres et la vie des sacrements qui continue l’œuvre de Dieu en rassemblant tous les hommes en vue de les unir à Dieu. Nous sommes donc, hommes et femmes, appelés à nous rassembler, à faire Eglise, en vue de témoigner de l’union de tous en Christ. S’inspirant du livre de l’apocalypse qui montre une femme située entre le ciel et la terre dont l’enfant qui vient de lui naître est menacé par un dragon, Pierre Claverie, qui deviendra évêque d’Alger puis assassiné en 199?, écrivait ceci en 1988, à partir de l’encyclique de Jean-Paul II : « L’enfant – ainsi menacé d’être englouti par le dragon – est en même temps Jésus et l’Eglise. Nous sommes toujours à la limite entre Marie et l’Eglise : cette vision évoque en même temps Marie qui accouche de cet homme nouveau, et cet homme nouveau, l’Eglise, toujours en danger d’être à nouveau avalé par la mort, par le mal. » 8 De quel homme nouveau parle Pierre Claverie ? Il s’agit de l’homme nouveau dont nous parle Saint Paul et qui est la distinction entre l’Eglise et le monde :  » Je vous dis donc et vous adjure dans le Seigneur de ne plus vous conduire comme le font les païens, avec leur vain jugement et leurs pensées enténébrées : ils sont devenus étrangers à la vie de Dieu à cause de l’ignorance qu’a entraînée chez eux l’endurcissement du cœur, et, leur sens moral une fois émoussé, ils se sont livrés à la débauche au point de perpétrer avec frénésie toute sorte d’impureté.

Mais vous, ce n’est pas ainsi que vous avez appris le Christ, si du moins vous l’avez reçu dans une prédication et un enseignement conformes à la vérité qui est en Jésus, à savoir qu’il vous faut abandonner votre premier genre de vie et dépouiller le vieil homme, qui va se corrompant au fil des convoitises décevantes, pour vous renouveler par une transformation spirituelle de votre jugement et revêtir l’Homme nouveau, qui a été créé selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité. » (Ephésiens 4, 17-24) Cet homme nouveau est sans cesse menacé d’être mangé par le dragon, menacé d’être assimilé par le mal et disparaître dans le mal. Parlons-en encore.            

6- L’homme ancien et l’homme nouveau.

            La vierge Marie, en répondant parfaitement à l’ange : « Je suis la servante du Seigneur, qu’il m’advienne selon ta parole  » (Lc 2, 38) manifeste parfaitement ce que tout homme peut vivre en lui : l’union parfaite avec Dieu. Mais, de même que l’Eglise n’est pas le monde et que le monde n’est pas l’Eglise, il y a en l’homme une vie en Christ, totalement unie à Dieu et une part qui demeure attachée au monde. Cette séparation est un combat intérieur en tout homme. Et ce combat au cœur de la vie de chacun est la raison de la venue du Christ. Le Christ est venue pour permettre non pas le rejet du monde par l’Eglise, non pas le rejet de la part humaine par la dimension divine en chacun mais il est venue pour que le monde tout entier, l’homme tout entier bénéficie du salut. Pierre Claverie cite là un mystique musulman, Rûmi, qui parle ainsi de ce mystère : « De même que l’Esprit saint insufflé en Marie, lui a fait concevoir l’enfant divin, lorsque la parole de Dieu pénètre dans le cœur de quelqu’un et que l’inspiration divine emplit son cœur et son âme, sa nature est telle qu’alors est produit en lui un enfant spirituel ayant le souffle de Jésus qui ressuscite les morts. L’appel de Dieu, qu’il soit voilé ou non, octroie à l’homme ce qu’il a octroyé à Marie. Ô vous qui êtes corrompus par la mort à l’intérieur de votre corps, revenez de la non-existence à la voix de l’Ami. En vérité, cette voix vient de Dieu. » (o.c. p. 207). Là aussi, l’homme peut demeurer lui-même par la voix qui lui vient du Père.            

7- l’homme et la femme, l’époux et l’épouse.

            Nous savons maintenant par l’apôtre Paul que le Christ est l’époux et l’Eglise est l’épouse. Mais nous naissons tous homme ou femme. Nous pourrions demeurer ainsi, dans ce statut de mâle et de femelle à la recherche de notre nourriture en vue d’engendrer la génération suivante. Il n’y a en cela ni mal, ni bien. Toute la nature est organisée ainsi, suivant un ordre naturel. Mais, l’Ecriture biblique dévoile le mystère de ce qui distingue l’homme et la femme du reste de la création, une alliance avec le divin, une invitation à accéder à l’éternité : « C’est pour que nous devenions libres que le Christ nous a libérés », rappelle encore Saint Paul (Gal 5,1) qui écrivait juste avant : « Vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Christ Jésus » (4, 26). N’est-ce pas lorsque l’homme et la femme comprirent les conséquences de leur compromission avec le serpent qu’ils éprouvèrent le besoin de se vêtir : « alors qu’ils étaient nus »(Cf. Gn 3, 6-7). Ils n’avaient pas jusque là le moyen de découvrir qui ils étaient l’un en vis-à-vis de l’autre. Pour ne pas mourir, c’est-à-dire pour ne pas être mangé ou assimilé, il est indispensable de mettre entre soi et tout autre la parole de Dieu, le Christ. Le Christ est le verbe de Dieu (Jn 1, 1-8). Il est cette parole issue de Dieu qui apporte vers l’homme  la source jaillissante en vie éternelle : « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’eau vive. » (Jn 4, 10) Là femme à qui Jésus s’adresse est la samaritaine. Dans ce dialogue autour d’un puits n’avons-nous pas l’illustration de tout notre mystère du lien entre l’homme et la femme mais aussi celui du lien entre le Christ et l’Eglise ?

            Toute femme est appelée à vivre l’expérience de Marie de Nazareth. Elle représente l’humanité en temps qu’espèce humaine au milieu de toutes les autres espèces de la création. Mais c’est par une femme que naît Jésus, le fils de Dieu; c’est au sein de l’humanité que le fils de Dieu vient prendre chair. Ainsi, le récit de la Genèse place la femme en face de l’homme comme une aide pour que l’homme s’accomplisse parfaitement dans le projet que Dieu porte sur lui, celui d’être élevé comme fils de Dieu. C’est ce qui doit naître du dialogue et de la relation entre l’homme et la femme : l’enfant qui naît de ce lien, n’est donc pas destiné à prolonger l’espèce humaine mais, suivant ce que Saint Paul nous enseigne, l’enfant qui vient est appelé à advenir fils de Dieu.  

8- L’enfant qui naît de l’homme et de la femme.

Comme l’homme se donne à la femme, le Christ se donne à l’humanité. De ce qui est échangé entre l’homme et la femme, naît l’enfant. De ce qui est échangé entre le Christ et l’humanité, il naît l’Eglise. Mais ce parallèle ne suffit pas pour comprendre comment l’homme devient fils de Dieu. Saint Paul dit ceci :  » Ainsi donc, désormais nous ne connaissons personne selon la chair. Même si nous avons connu le Christ selon la chair, maintenant ce n’est plus ainsi que nous le connaissons. Si donc quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle : l’être ancien a disparu, un être nouveau est là. Et le tout vient de Dieu, qui nous a réconciliés avec Lui par le Christ et nous a confié le ministère de la réconciliation. Car c’était Dieu qui dans le Christ se réconciliait le monde, ne tenant plus compte des fautes des hommes, et mettant en nous la parole de la réconciliation. Nous sommes donc en ambassade pour le Christ ; c’est comme si Dieu exhortait par nous. Nous vous en supplions au nom du Christ : laissez-vous réconcilier avec Dieu. Celui qui n’avait pas connu le péché, Il l’a fait « péché » pour nous, afin qu’en lui nous devenions justice de Dieu. » (2 Cor 5, 16-21). Mais le Livre de l’Apocalypse décrit la menace qui survient contre ce fils de Dieu par le dragon et la bête. L’invitation est là, la menace pèse encore.  

9- Benoîte Rencurel : une aide donnée aux hommes et aux femmes de son temps.

Jean-Paul II conclut ainsi son encyclique : « La femme est celle qui est aimée pour aimer à son tour ». On comprend par là que le Pape  a le souci de montrer à la suite de Saint Paul les liens entre le rapport homme-femme et ceux du Christ en tant qu’il est Dieu, avec l’Eglise.

C’est là toute l’expérience vécue par Benoîte Rencurel dans cette vallée alpine au 17ème siècle. En deux mots, Benoîte a reçue la visite d’une belle dame qui a commencé par lui sourire. Accompagnée d’un enfant de cinq ou six ans, cette belle dame resta silencieuse pendant deux mois durant lesquels la jeune paysanne âgée de 17 ans au début de ces apparitions mariales vint chaque jour recevoir la douceur du regard qu’elle rencontrait chaque jour. C’est ensuite que débuta pour cette jeune femme rustre une véritable éducation qui lui permit de découvrir en elle sa vie de fille totalement éprise de Dieu. C’est alors qu’elle s’est mise à servir les hommes et les femmes qui venaient à elle. Mais elle ne les servit pas simplement pour leur apporter la guérison physique qu’ils lui réclamaient le plus souvent. Elle vient à eux comme la femme du livre de la Genèse fut donnée à l’homme comme une aide pour que chacun et chacune advienne un enfant de Dieu. Pour réaliser cela, elle leur dévoilait les obscurités de leur cœur, leurs péchés, en somme, et elle leur recommandait d’aller voir un prêtre pour recevoir le sacrement du pardon.  Les contemporains de Benoîte en étaient reconnaissants. Car en recevant le Christ, ils quittaient quelque chose dans leur vie d’homme ou de femme pour devenir des enfants de Dieu. De fait, Benoîte remplissait dans ce ministère, sa vocation de chrétienne. Elle donnait sa part à la construction de l’Eglise du Christ. Benoîte, sa sainteté, la rigueur extraordinaire de son ascèse nous introduit dans les trois jours saints qui précèdent la grande fête de Pâques. La sainteté se vérifie sûrement dans la dépossession des choses du monde pour découvrir ce qui demeure caché aux yeux et aux oreilles.

Père Bertrand Gournay 

Conclusion:

En effet, les événements de ces trois jours saints dévoilent tout le mystère de l’homme et de son union avec Dieu. Par le jeudi Saint, nous allons entrer dans le mystère de l’Eucharistie. En donnant sa chair à manger, le Christ consent librement à se laisser assimiler par nous afin que nous allions jusqu’à Dieu et soyons divinisé. Par la souffrance de la Croix, le Christ prend sur lui, toute la charge de l’homme ancien et de l’humanité pas encore accomplie en fils de Dieu. Par le silence du samedi Saint, le Père du Ciel offre sa patience afin que l’homme ait le temps de se laisser réconcilier avec lui-même et retrouve sa vocation première. A l’approche de la victoire de la vie sur la mort, l’homme peut entendre résonner en lui ces mots d’une homélie des premiers siècles de l’Eglise : « C’est pour toi que moi, ton Dieu, je suis devenu ton fils; c’est pour toi que moi, le Maître, j’ai pris ta forme d’esclave; c’est pour toi que moi qui domine les cieux, je suis venu sur la terre et au-dessous de la terre; c’est pour toi, l’homme que je suis devenu comme un homme abandonné, libre entre les morts; c’est pour toi, qui es sorti du jardin, que j’ai été livré aux juifs dans un jardin et que j’ai été crucifié dans un jardin » 9 

Notes :

1 : Cf. p. 99-111

2 : o.c. p. 103.

3 : In Homme et femme Il les créa p 12-23

4;  5; 6 : Trad. Chouraqui

7 : Marie Balmary, idem, p. 19

8 : P. Claverie, Marie, la vivante, sept jours de retraite avec Marie, cerf, 2008, p. 205-206

9 : homélie ancienne pour le samedi saint, Livre des jours, DDB, p. 326 

La liturgie de la vie en saint Paul

9 octobre, 2009

du site:

http://lnx.alberione.info/index2.php?option=com_docman&task=doc_view&gid=13&Itemid=73

La liturgie de la vie en saint Paul

S. M. Regina Cesarato pddm

Saint Paul est encore vivant aujourd’hui et il continue à former les générations chrétiennes spécialement lorsque, dans la liturgie de l’Église, nous lisons ses Lettres ou les récits des Actes des Apôtres qui le concernent. En effet, Dieu a préparé l’Apôtre pour une mission particulière qui est allée bien au-delà de son histoire personnelle.
Lorsque le jeune Saul de Tarse, ayant terminé sa première formation, arrivait à Jérusalem pour suivre les leçons de Gamaliel (Ac 22, 3), le scribe pharisien le plus cultivé du moment, il s’est trouvé devant l’esplanade du Temple consacré au Dieu de ses pères. En effet, les leçons des rabbins étaient données sous les portiques ou dans les salles des édifices qui occupaient la partie centrale de l’esplanade.
Situé à l’est, le Temple était le coeur de la ville sainte vers laquelle se tournait le désir de chaque Israélite. Saul aura certainement admiré la grandeur de sa construction délimitée par un double portique et subdivisée en quatre cours; le sanctuaire, dont le toit était recouvert d’or, occupait la partie centrale. Pour les grandes fêtes annuelles, les pèlerins venus de partout couvraient les rues de la Palestine et se rendaient au Temple en chantant les psaumes des montées (Psaumes 120-134).
Saul vibrait à ce rythme et participait aux liturgies splendides du Temple. Il apprenait la valeur des pratiques cultuelles de son peuple, le repos sabbatique, l’office synagogale, le jeûne du jour de l’Expiation, les prières qui accompagnaient les actes quotidiens, l’usage des phylactères et des franges, les jeûnes spontanés, les offrandes et les voeux. La foi en Dieu et l’étude de la Torah imprègnent tous les moments et toutes les actions de son existence suivant le schéma rituel de la séparation de la réalité profane.
À travers la pratique minutieuse de toutes les prescriptions rituelles, dans la longue
expérience de contact avec la liturgie du Temple de Jérusalem, le Seigneur le préparait
à rencontrer Jésus Christ qui est “plus grand que le Temple”, et à intérioriser sa passion
pour Dieu dans une liturgie de la vie continuelle. Avec le Nouveau Testament, en effet,
la fonction du Temple est transférée à la personne de Jésus Christ, mort et ressuscité.
Son corps est le “Temple nouveau” (Jn 2, 21). Dans la révélation du chemin de Damas,
Saul en restera fulguré.

La “séparation” de Paul

Les nombreux détails de la conversion transfiguratrice de Saul que le Livre des Actes des Apôtres raconte trois fois (Ac 9; 22; 26) sont confirmés dans les Lettres de l’Apôtre mais avec plus de sobriété. Il comprend que sa vocation est l’oeuvre de Dieu, une grâce pure et non méritée, donnée à un homme qui se justifiait lui-même avec la pratique des prescriptions mais qui était en réalité un “blasphémateur, un persécuteur et un violent” (1 Tm 1, 13). Dieu a choisi et appelé un persécuteur pour faire de lui un apôtre. Cet appel est une libre décision du Seigneur et qui vient de son bon plaisir. Ce n’est pas une improvisation parce que l’amour de Dieu pour nous vient toujours de très loin (Rm 8, 28-30).
Dans les Lettres pauliniennes, l’action “d’appeler”, en grec kalein, a toujours Dieu même comme sujet. En termes théologiques et cultuels, Paul parle de sa vocation dans Ga 1, 15-16. « Lorsque Celui qui m’a mis à part depuis le sein de ma mère et m’a appelé par sa grâce, a jugé bon (eudokésen) de révéler son Fils en moi afin que je l’annonce parmi les païens, aussitôt, sans recourir à aucun conseil humain …».
Le verbe utilisé par l’Apôtre : “mettre à part – séparer” est significatif dans la vocation articulière de Paul. Il se présente de la même manière au début de la Lettre aux Romains : « Paul, appelé à être apôtre, mis à part pour annoncer l’Évangile de Dieu » (Rm 1, 1). Dieu s’est réservé Paul comme dans la liturgie du Temple on Lui réserve les offrandes et les prémices. Dans l’Ancien Testament, ce verbe a souvent un sens cultuel et il s’applique aux victimes choisies pour les sacrifices (Ex 29, 26-27) comme aux lévites mis à part pour le service liturgique (Nb 8-11) ainsi qu’à tout le peuple élu : «Vous serez consacrés à moi parce que je suis Saint, le Seigneur votre Dieu qui vous a mis à part de toutes les nations afin que vous m’apparteniez » (Lv 20, 26).
Paul a été soustrait à un mode commun de vie pour être introduit dans une relation spéciale avec Dieu. Cependant, le contexte fait comprendre qu’il ne s’agit pas d’une ségrégation parce que l’élection de l’apôtre porte en elle la mission d’introduire les autres, spécialement parmi les païens, dans la même relation d’alliance avec Dieu, dans le Christ Jésus. Toutefois, nous ne devons pas concevoir la vocation de Paul en clé “administrative” comme si Dieu lui confiait une fonction pour le bien des autres. Nous devons la comprendre comme une grâce personnelle, intérieure, qui lui donne la possibilité d’accomplir une mission qui s’adresse à d’autres personnes. C’est un témoignage, une liturgie de la vie qui demande l’engagement de toute la personne et qui jaillit d’une expérience de relation personnelle et profonde avec le Christ. Paul a reçu “en luimême” la révélation du Fils de Dieu et il a été introduit dans un rapport intime avec Lui, jusqu’à la conformation complète à son mystère. En effet, il affirme : « Car le Dieu qui a dit : que la lumière brille au milieu des ténèbres, c’est lui-même qui a brillé dans nos coeurs pour faire resplendir la connaissance de sa gloire qui rayonne sur le visage du Christ » (2 Co 4, 6). Dieu a fait briller la lumière du Christ dans le coeur de Paul, c’est-à dire dans ce lieu qui, dans l’anthropologie biblique, indique le siège de l’intériorité, de la liberté et du choix conscient.
C’est pourquoi, il y a un rapport profond entre la révélation intérieure et la mission apostolique. La révélation du Fils de Dieu lui fut donnée, dit-il « afin qu’il l’annonce parmi les païens » (Ga 1, 16), c’est-à-dire qu’il en porte la bonne nouvelle à tous, de manière à ce que tous puissent entrer dans l’économie de l’alliance nouvelle et définitive et « participer au même héritage, membres du même corps, associés à la même promesse » (Ep 3, 6).
Le rapport vivant et dynamique avec la Personne du Fils de Dieu inaugure la liturgie de la vie. Il ne s’agit plus seulement d’une relation cultuelle, comme dans le Temple de Jérusalem, mais d’une relation existentielle qui transforme tous les moments du quotidien. Le schéma de la sacralité typique du Temple est renversé. La relation avec Dieu n’advient plus par des éparations mais en vertu de l’Incarnation, par immersion dans le mystère du Christ.
Paul a senti qu’il était saisi par le Christ Jésus (Ph 3, 12) et, même dans le milieu religieux, son échelle de valeurs a basculé. « Or, toutes ces choses qui étaient pour moi des gains, je les ai considérées comme une perte à cause du Christ. Mais oui, je considère que tout est perte en regard de ce bien suprême qu’est la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur. À cause de lui, j’ai tout perdu et je considère tout cela comme ordures afin de gagner Christ… » (Ph 3, 7-8). Pour demeurer uni au Christ, Paul se met de toutes ses forces au service du prochain en évangélisant. L’amour du Christ dont il a fait l’expérience le pousse à donner sa vie pour l’Évangile.

Déplacement de la terminologie cultuelle

Puisant à son expérience prolongée dans le Temple, l’apôtre devenu chrétien opère un hangement radical de perspective. Il utilise la terminologie typique propre au culte et il l’applique à l’expérience de la vie chrétienne.
Par exemple, en se référant peut-être au rituel de l’agneau immolé pour l’expiation des péchés (cf. Lv 4, 24; Is 53, 10), Paul montre le Christ comme « offrande et victime d’agréable odeur » (Ep 5, 2). La fragrance des victimes sacrificielles signifiait l’accueil des sacrifices de la part de Dieu. Christ est “notre Pâque” c’est-à-dire “l’agneau pascal” qui offre une nouveauté de vie à tous ceux qui sont appelés à “célébrer” la pâque avec “des pains sans levain” et pas avec du “vieux levain” (cf. 1 Co 5, 7-8; Ga 5, 9).
Tout ce qui est salvifique pour le peuple dans la première Alliance s’accomplit maintenant en la personne de Jésus. Même si Paul écrit ses lettres quand le Temple de Jérusalem n’a pas encore été détruit (70 ap. C), il définit le corps des chrétiens comme “temple de Dieu” (cf. 1 Co 3, 16-17; 6, 18-20; 2 Co 6, 16; Ep 2, 21). Le processus de personnalisation du Temple a lieu à partir d’une perspective christologique, même dans la théologie johannique (Jn 2, 19-21).
Pour exprimer cette réalité, l’Apôtre opère un déplacement de terminologie parfois surprenant et très audacieux. Même la première lettre de Pierre est dans la même ligne.
Pour Paul, la liturgie devient le cadre “naturel” où se déploie la vie chrétienne dans toute sa sacralité. Il s’applique d’abord cette perspective à lui-même et il décrit son apostolat dans un langage cultuel. Dans des contextes déterminés, le verbe “servir” (douleuein), semble parfois rappeler le service liturgique (1 Th 1, 9-10; Ga 4, 8-11).

Paul, officiant du Christ

Dans l’évangélisation, Paul est “officiant du Christ” (cf. Rm 15, 16) qui rend le culte à Dieu par sa vie personnelle (Rm 1, 9-10; 2 Tm 1, 3).
Même si, ni le Christ Jésus ni Paul, n’ont accompli personnellement des sacrifices dans le temple de Jérusalem, les lettres pauliniennes décrivent leur existence dans un langage de culte. L’apôtre a chargé la vie chrétienne de sens liturgique sans faire de distinction entre actions ministérielles et communes; il compare la conclusion même de sa vie à la libation sacrificielle : son sang « va être offert en libation » (cf. Ph 2, 17; 2 Tm 4, 6).
Son ministère apostolique est un culte (latreuo) qu’il rend « à Dieu dans l’Esprit » (Rm 1, 9). Il se qualifie de “protagoniste d’une activité liturgique” (leitourgon : Rm 15, 16) dans son ministère au milieu des païens.
 Son dévouement total à l’égard des habitants de Philippes est un sacrifice qui se réalise en lui (spendomai) pour le bien de la vie de foi des chrétiens de Philippes qui est appelé “offrande sacrificielle” et activité liturgique (thysia kai liturgia : Ph 2, 17). La cueillette de fonds pratiquée dans les communautés grecques en faveur de l’Église de Jérusalem est appelée “activité liturgique” (leitourgia : 2 Co 9, 12) et Epaphrodite, envoyé par les chrétiens de Philippes pour assister Paul dans les inconforts de la prison en lui prêtant les modestes services dont l’apôtre emprisonné avait besoin, est désigné comme “protagoniste d’une action liturgique” (leitourgon : Ph 2, 25). En ce qui concerne Paul personnellement ainsi que les destinataires de ses lettres, le point de départ de toute la vie chrétienne, c’est le baptême en tant qu’immersion dans la
mort et la résurrection du Christ (cf. Rm 6, 1-11).

La vie chrétienne comme liturgie

La réalité baptismale place le chrétien dans une situation complètement nouvelle qui permet à l’apôtre de transférer à la vie chrétienne tous les termes propres au culte dans le Temple de Jérusalem. Ce déplacement de terminologie cultuelle est évident dans Rm 12, 1-2 :
 « .Je vous exhorte donc, frères, au nom de la miséricorde de Dieu, à vous offrir vous-mêmes en sacrifice vivant, saint et agréable à Dieu : ce sera là votre culte spirituel. Ne vous conformez pas au monde présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence, pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bien, ce qui lui est agréable, ce qui est parfait ».
Dans la première partie de la lettre aux Romains, après avoir expliqué la situation nouvelle de la vie chrétienne, Paul conclut en invitant les croyants, au nom de toute la miséricorde dont il a fait l’expérience, à présenter leur vie à Dieu, c’est-à-dire leurs propres corps (somata), dans le concret relationnel de la personne, en référence au temps et à l’espace.
Cette offrande devra être irréversible, comme la victime sacrificielle qui était immolée dans le Temple, mais en même temps, elle devra être une victime qui vit comme l’Agneau immolé et ressuscité de l’Apocalypse. Dans le cas des chrétiens, la radicalité de l’offrande constitue, selon Paul, un culte vrai (latreian) qui donne sens à la vie. Selon l’enseignement de l’apôtre, cet élan oblatif vécu dans les détails pratiques de la vie quotidienne est une liturgie.
Pour réaliser cette “liturgie de la vie”, il faut cependant s’éloigner de la mentalité du monde dans ses aspects corrompus et peccamineux. La participation à la vitalité du Christ ressuscité, avec le don de l’Esprit, fruit du baptême, poussera le chrétien à une transformation continue et progressive dans la ligne des valeurs du Christ ainsi qu’à un renouvellement constant de ses systèmes mentaux pour le rendre capable d’un discernement ouvert à la volonté de Dieu dans le détail de la vie quotidienne, sans suivre le schéma de ce monde.
Paul attribue cette qualité liturgique à tout ce qu’il est et à tout ce qu’il fait mais il trouve aussi des moments et des espaces qualifiants de prière pour lui-même et pour les communautés chrétiennes qui ont leur sommet dans l’Eucharistie (1 Co 11, 23-34).
L’épistolaire paulinien est parsemé d’hymnes, de doxologies,de formules de foi, de
bénédictions et d’acclamations qui évoquent le contexte ecclésial des communautés
Xuxquelles les lettres sont destinées ainsi que leur vitalité liturgique. Les fragments liturgiques sont employés par saint Paul d’une manière créative et vivace et chaque lettre commence par une bénédiction d’introduction adaptée aux nécessités spécifiques des communautés chrétiennes.
La sacralité merveilleuse qui était exprimée dans le rapport avec Dieu dans le Temple, les prières de la Synagogue, le chant des psaumes, les fêtes du judaïsme et tout l’ensemble rituel de la première Alliance, trouve maintenant son accomplissement dans le Christ Jésus. Par Lui et dans la force de l’Esprit monte vers Dieu, Père, notre amen, dans une continuelle liturgie de la vie.

Les deux Lettres aux Thessaloniciens

31 août, 2009

du site:

http://www.opusdei.fr/art.php?p=31017

Les deux Lettres aux Thessaloniciens

Nous publions le 5e article de Joseph Grifone sur saint Paul.

08/12/2008

La première lettre aux Thessaloniciens

La communauté de Thessalonique

La première lettre aux Thessaloniciens présente un intérêt tout particulier pour l’histoire et pour l’exégèse : elle est en effet le plus ancien écrit du Nouveau Testament.

Les Actes des Apôtres (ch. 16-17) situent la fondation de l’église de Thessalonique lors du premier voyage missionnaire en Europe. Après avoir évangélisé les contrées de la Galatie du Nord (au nord de l’actuelle Turquie), Paul s’était senti « poussé par l’Esprit » à changer de plan et à étendre son travail missionnaire en Achaïe. Il prêcha d’abord l’Évangile à Philippes, puis des dures contradictions l’obligèrent de quitter cette ville. C’est ainsi que, au printemps de l’année 50, il gagna Thessalonique, accompagné de Silas et de Timothée.

Située sur la Voie Egnatienne qui reliait le Bosphore avec Durazzo, Thessalonique était une ville portuaire, cosmopolite et commerçante, qui attirait des gens provenant des quatre coins du monde. Le niveau moral était plutôt bas, les différences ethniques et sociales importantes : des riches armateurs et commerçants formaient la classe aisée, face à une masse pauvre de travailleurs manuels, esclaves, déchargeurs de port, petits artisans. C’est chez ces derniers, que l’apostolat de Paul portera le plus de fruits.

Chez ces gens de condition modeste – Paul travaillera comme l’un d’eux, exerçant le métier de fabriquant de tentes –, l’Apôtre réalisa un travail admirable, un véritable travail pastoral de formation, d’instruction, de suivi spirituel, comme il apparaît dans les souvenirs que Paul évoque dans sa lettre. Cependant son succès suscita la jalousie des Juifs. Déféré aux autorités de la ville, il dut quitter précipitamment Thessalonique pour Bérée, puis pour Athènes et finalement il arriva à Corinthe. C’est là que, quelques mois après, il fut rejoint par Timothée qui lui apportait des nouvelles rassurantes de la communauté. Paul écrivit alors cette lettre, dans laquelle, aujourd’hui encore, on ressent son émotion et sa joie de renouer avec la communauté qu’il avait dû abandonner en toute hâte. On était dans les premiers mois de l’année 51[1].

Au début de sa lettre (1,4-2,14) Paul évoque les jours où il enseignait l’Évangile « avec sincérité et honnêteté », au milieu de bien des tribulations « travaillant nuit et jour pour n’être à la charge de personne » : il était, dit-il, « comme une mère qui entoure de soin ses enfants et elle les nourrit » au point d’être disposé à donner sa vie pour eux. On peut l’imaginer sans peine dans ce travail de formation qu’il réalisait, peut-être en partie dans son atelier, au milieu de diverses contradictions. C’est l’un des aspects intéressants de cette lettre, écrite avec simplicité et émotion, que de nous rendre, ne fût-ce que dans quelques traits, l’atmosphère de la première catéchèse aux origines du christianisme : la figure de Paul nous apparaît dans toute son humanité, bien distante des images stéréotypées du prédicateur austère sous lequel on se le figure parfois.

Une fenêtre ouverte sur la catéchèse primitive

Étant le premier écrit du Nouveau Testament, cette lettre est comme une « fenêtre ouverte » sur la période qui a précédé la rédaction des Évangiles. On peut penser qu’en elle résonnent les thèmes de la première prédication chrétienne, d’autant plus qu’elle a été écrite non pas comme un traité, mais simplement dans le but de renouer avec la communauté et rappeler des souvenirs de la première catéchèse. A plusieurs reprises, d’ailleurs, Paul fait allusion aux traditions qu’il avait rapportées au début de son évangélisation (cf. 3,3 ; 4,1-3 ; 4,4-9). Des résonances de la tradition synoptique ont été relevées (cf, par exemple, 1 Th  5,2 // Mt 24,4), et, en particulier, des parallélismes avec les thèmes du sermon de la montagne (Mt 5-8). Certains spécialistes se sont attaché à découvrir des traits du kerygme primitif, c’est-à-dire les thèmes centraux de la première prédication chrétienne. Sans pouvoir entrer ici dans les détails, nous pouvons juste remarquer l’annonce claire et explicite du mystère trinitaire, la proclamation de la mort et de la résurrection du Christ, les exigences de la vie chrétienne, le retour glorieux du Christ à la fin des temps. Tout cela faisait sans doute partie de l’enseignement habituel que l’on dispensait avant même la rédaction du Nouveau Testament. Il est intéressant de noter que ces données ne sont pas transmises sous forme d’énoncés, mais comme des vérités déjà acceptées par la communauté (par exemple Paul ne dit pas :« Jésus est le Fils de Dieu », mais « Jésus, Fils de Dieu ») : signe que Paul les avait déjà expliquées lors de son séjour à Thessalonique.

L’attente du Seigneur

Comme dans toutes ses lettres, Paul exprime ses pensées à la lumière de l’intuition fondamentale du mystère du Christ qu’il eut sur le chemin de Damas : le Christ est ressuscité et il est maintenant dans la gloire divine à laquelle il nous appelle. Ici, ce thème central s’épanouit dans un magnifique message d’espérance. Timothée et Silas, tout en faisant l’éloge de la persévérance et de la foi des Thessaloniciens, avaient fait état aussi des inquiétudes que ceux-ci manifestaient sur le sort de leurs défunts. Après le départ de Paul, certains membres de la communauté avaient perdu la vie et l’on se demandait quel serait leur sort lors du retour glorieux du Christ : seront-ils emportés dans la gloire, eux aussi, avec ceux que le Christ trouvera vivants? De toute évidence Paul les avait instruits à ce sujet : comme nous l’avons dit, la seconde venue du Christ était l’un des thèmes essentiels de la catéchèse primitive (cf. Mt 24,30-31 ; 1 Co 15,51 ; Ph 3,20-21) et la première génération chrétienne la croyait imminente. Ces doutes et ces inquiétudes nous valent un admirable enseignement (4, 13-17) où l’on entend encore l’écho de la prédication primitive, pleine d’espérance et de joie dans l’attente du Seigneur.

Pour décrire le retour du Christ, Paul utilise l’image de la parousie. Ce mot, qui signifie «présence» et aussi « arrivée », désignait l’entrée triomphale des souverains (rois, empereurs, magistrats supérieurs) dans une ville. Cet événement donnait lieu à une fête populaire fastueuse, politique et religieuse à la fois, marquée par des célébrations, des cortèges, des jeux : on levait des impôts pour en couvrir les frais, on frappait des monnaies commémoratives. A l’occasion de son entrée, l’empereur accordait des récompenses et punissait les coupables. Le mot parousie évoquait donc la liesse, la fête, la joie. Paul dissipe les doutes de ses disciples : les morts, eux aussi, participeront à la Parousie, ils précéderont même les vivants à la rencontre du Christ. Sous la plume de l’Apôtre disparaissent le caractère terrible du dernier jour et les incertitudes liées à la rencontre du Seigneur. Vers la fin de sa lettre Paul résume ainsi sa haute vision des relations des hommes avec Dieu : « Dieu, dit-il, ne nous a pas destinés à la colère, mais à l’acquisition du salut par Notre Seigneur Jésus-Christ, qui est mort pour nous, afin que, veillant ou dormant, nous vivions unis à lui » (5,9-10).

La seconde lettre aux Thessaloniciens

La seconde lettre aux Thessaloniciens se donne comme une suite de la première dans le but de corriger l’erreur de ceux qui affirmaient que le retour du Christ était imminent, et même qu’il avait déjà eu lieu (cf. 2 Th 2,1-12). Ces spéculations avaient créé un climat d’exaltation et d’attente surexcitée ; certains avaient même cessé tout travail et vivaient dans l’oisiveté. Pour accréditer ces théories on faisait circuler des fausses lettres de Paul (2,2). Le but de cet écrit est donc de préciser la doctrine eschatologique de la première lettre. Il ne faut pas se laisser abuser :  avant la fin doit se produire l’apostasie générale et doit se manifester l’Adversaire, l’homme d’iniquité, le fils de la perdition, lequel s’élèvera au-dessus de tout jusqu’à prétendre un culte divin (2,3-4). Cependant ces temps derniers ne sont pas encore venus : un « obstacle » empêche maintenant la manifestation de l’Impie (2,6-7). Mais il faut garder l’espérance, car le Seigneur Jésus, lors de sa Parousie, anéantira les forces sataniques par le souffle de sa bouche (2,8).

Le problème de l’authenticité

La seconde lettre aux Thessaloniciens présente de telles ressemblances littéraires avec la première (plan, résonances verbales et thématiques, passages parallèles, paraphrases et répétitions) que des critiques y ont vu l’œuvre de quelqu’un qui se proposait d’imiter le style de Paul. Il est difficile, en effet, qu’un esprit aussi créatif que Paul se soit répété d’une manière aussi rigide : Paul se serait exprimé d’une manière plus libre et plus spontanée, comme il le fait dans toutes ses lettres, même s’il reprend les mêmes thèmes. Certaines différences aussi font penser à une œuvre pseudo-épigraphique : alors que la première lettre, où abondent des souvenirs personnels et des détails sur la communauté, a un ton familier et affectueux, la seconde garde un ton plus impersonnel et didactique. Même la doctrine eschatologique donne l’impression d’être différente : alors que dans la première le message sur la fin des temps est plein d’espérance, dans la seconde il est chargé d’images dramatiques et terrifiantes. Enfin cette lettre semble bien traduire un contexte postérieur : le retard de la Parousie créa effectivement des problèmes dans la communauté chrétienne, mais dans une époque postérieure à la mort de Paul ; celui-ci, d’ailleurs, dans ses autres lettres exprime des conceptions eschatologiques semblables à celles de la première aux Thessaloniciens (cf. 1 Co 15,51-53 ; 2 Co 5,1-5 ; Ph 3,20-21). C’est pourquoi la seconde lettre aux Thessaloniciens est classée par certains spécialistes parmi les deutéro-pauliniennes. L’auteur, dans ce cas, aurait été un membre de ces cercles pauliniens auxquels nous avons fait allusion dans un article précédant (cf. 3. Le recueil paulinien dans le Nouveau Testament). Il ne s’agit certainement pas d’un faussaire, mais de quelqu’un de suffisamment autorisé, qui a voulu préciser la pensée de l’Apôtre en expliquant ce que celui-ci aurait dit dans ces nouvelles circonstances. D’autres spécialistes, en revanche, considèrent la lettre authentique [2]. Ils font remarquer la difficulté, même pour un écrivain expérimenté, d’imiter si fidèlement un style de rédaction. La doctrine eschatologique de 2 Th, d’autre part, peut sembler différente, tout simplement parce que Paul décrit deux situations différentes (1 Th parle de la destinée de ceux qui sont déjà morts, alors que 2 Th de ce qui arrivera avant la Parousie).

Ces questions d’authenticité n’ont aucun rapport avec l’inspiration : la lettre reste un écrit inspiré reconnu comme tel par l’Église depuis l’antiquité. En revanche, elles peuvent nous aider à reconstituer le cadre historique : dans l’hypothèse d’un procédé de pseudo épigraphie, on touche du doigt l’impact exercé par la figure de Paul dès les dernières décades du Ier siècle, et surtout on saisit dans le vif la foi chrétienne dans son dynamisme initial, s’élargissant et se précisant en parfaite homogénéité avec la tradition.

Le retard de la Parousie

L’intérêt de la seconde lettre aux Thessaloniciens est justement dans la doctrine eschatologique. Dans la description des terribles événements des derniers jours, l’auteur reprend selon une clé chrétienne certaines conceptions de l’apocalyptique juive (cf. Da 11,36-39, Ez 28,2) que l’on retrouvera ensuite dans le livre de l’Apocalypse. Le lecteur ne doit pas les prendre au pied de la lettre : les images saisissantes qui sont évoquées ont un caractère symbolique et font partie des modes d’expression conventionnels dans ce genre littéraire. Ce qui est intéressant, c’est le message dans son contenu essentiel. Et, malgré la différence de ton par rapport à la première lettre, il s’agit ici aussi d’un message d’espérance. La consolation et la crainte se mêlent, mais le triomphe du Christ est déjà assuré : les chrétiens doivent attendre avec patience et s’appuyer sur « l’amour de la vérité » qui seul pourra les sauver (2,10). Quant à la nature de l’« obstacle » qui empêche la pleine manifestation des forces du mal, les hypothèses les plus différentes ont été émises : l’Empire Romain, la prière de l’Église, la prédication de l’Évangile. Peut-être l’auteur, conformément à sa vision marquée par l’espérance, entend par cela tout simplement la volonté divine qui gouverne le monde.

[1]         Aujourd’hui un certain nombre spécialistes tendent à avancer la date de la mission en Europe. D’après cette chronologie, 1Th aurait été écrite en 48-49 .

[2]         Par exemple Murphy O’Connor, l’un des meilleurs spécialistes de saint Paul.

Saint Paul et la Vierge Marie – Mère de Dieu

4 août, 2009

du site:

http://copiste.romandie.com/post/11137/127225

Saint Paul et la Vierge Marie – Mère de Dieu

Une très belle page du Père Jean Galot sur le site des Pères Jésuites en Italie:

Le titre le plus nécessaire aurait été « Mère de Jésus » ou « Mère du Christ ». Il était affirmé sans séparation dans le mystère de l’Incarnation. Pour affirmer que le Fils de Dieu est venu sur terre pour vivre comme un homme et avec les hommes, on doit reconnaître qu’il est né de la Vierge Marie et qu’une femme est la mère de ce Fils. L’intervention d’une femme a été nécessaire pour une naissance réellement humaine ; la maternité de cette femme appartient au mystère de l’Incarnation.
Jésus est un homme, du sexe masculin, mais uni par un lien indissoluble au sexe féminin parce qu’une femme l’a enfanté et parce que cette femme a rempli totalement son rôle de mère envers lui.
Saint Paul a souligné la portée de ce mystère, en rappelant le grand geste du Père qui a fait don de son fils à l’humanité : « Mais, quand l’accomplissement du temps est venu, Dieu a envoyé son Fils, né d’une femme… » (Galates 4,4). Le nom de Marie n’est pas prononcé mais l’importance essentielle de la contribution de la femme est mise en lumière. Sans cette femme , le Père n’aurait pas pu donner son Fils comme il l’a fait par la naissance de Jésus. « Né d’une femme » est une caractéristique de l’identité du Sauveur, qui fait découvrir, dans un homme, avec la faiblesse de la chair, la personnalité de celui qui avant, dans l’éternité, était né du Père.
Dans cette naissance « d’une femme », Paul discerne l’humilité de la venue du Fils qui a accepté les conditions habituelles de la naissance humaine. Il ne considère pas explicitement la grandeur de la femme qui intervient dans une naissance au caractère extraordinaire. Mais il fait comprendre que cette femme a été associée par sa maternité, au projet divin de communication de la filiation divine à tous les hommes : le Fils est né d’une femme « afin qu’on fasse de nous des fils adoptifs ».
Ainsi, la maternité de Marie est élevée à un niveau divin, quant à son orientation fondamentale. La dignité de Marie comme mère apparaît plus clairement : le Fils que la femme a enfanté est destiné à partager sa filiation divine personnelle avec tous les hommes. Le Père qui, en envoyant son Fils sur terre, est à l’origine de cette maternité exceptionnelle, s’en sert pour répandre dans l’humanité sa propre paternité qui fait naître des fils adoptifs. Jamais une maternité n’aurait pu revendiquer une efficacité aussi grande et universelle.
Ce niveau divin attribué à la maternité de Marie n’exprime pas encore la suprématie de sa dignité. Seul le titre « Mère de Dieu » peut définir cette suprématie. Saint Paul n’a jamais fait usage de ce titre parce que son attention ne se portait pas sur la dignité propre à Marie dans la naissance du Christ, mais sur l’abaissement de Dieu qui manifestait ainsi un amour infini envers les hommes.

Saint Paul prêchant à Athènes

31 juillet, 2009

Saint Paul prêchant à Athènes dans images sacrée paul_p10

http://stmaterne.blogspot.com/2008/01/fte-orthodoxe-de-la-conversion-de-saint.html

Prier saint Paul pour l’unité des chrétiens

2 juillet, 2009

du site:

http://latriniteparis.com/Prier-saint-Paul-pour-l-unite-des.html

Prier saint Paul pour l’unité des chrétiens
Père Henri de Chauvigny


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Dimanche 25 janvier 2009
Conversion de saint Paul
Saint Paul, toi qui as entendu le Christ te répondre « Je suis Jésus, celui que tu persécutes. » (Actes 9,5), tu as pu saisir ce jour de ta conversion combien les chrétiens sont le corps du Christ. Alors que tu étais plein d’amour jaloux pour le Dieu de tes pères, tu as reçu la grâce d’une conversion profonde et radicale à sa volonté.
Nous te prions pour que tous les chrétiens soient remplis de zèle enviers le Christ, et se laissant convertur toujours plus, puissent ainsi retrouver la pleine unité.

Tu as dit : « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi. » (Galates 2,20). Tu nous témoignes ainsi que cette expérience personnelle de la rencontre du Christ qui a affronté la mort par amour toi est le centre de toute ta vie et de toute ton action.
Ce qui te motivait au plus profond, était d’être aimé par Jésus-Christ et le désir de transmettre cet amour aux autres.

Tu as dit : « Je vis, mais ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » (Galates 2, 20). Voilà à quelle intimité nous sommes appelés. Découvrir la liberté des enfants de Dieu, dans laquelle notre liberté propre est complètement intégrée dans la liberté de Dieu et se laisse entièrement guider par elle.
Nous te demandons de prier pour nous afin que nous recevions nous aussi cette grâce de sentir à quel point le Christ nous aime et que nous ayons alors le cœur brûlant d’amour pour Lui et pour tous les hommes.
Guide-nous sur ce chemin de conversion, aide-nous à surmonter les obstacles.

Tu as dit : « Ce trésor nous le portons dans des vases d’argile, pour que cette incomparable puissance soit de Dieu et non de nous. » (2 Corinthiens 4, 7). Aide-nous à accepter notre fragilité pour que le Seigneur soit notre seule force.

Toi qui as dit : « Prends ta part de souffrance pour l’annonce de l’Evangile. » (2 Timothée 2, 3), prie pour nous afin que nous soyons gardés fidèles dans les épreuves.
Saint Paul, prie pour nous !

“Saint Pierre et Saint Paul, Apôtres (opusdei)

2 juillet, 2009

du site:

http://fr.be.opusdei.org/art.php?p=17286

“Saint Pierre et Saint Paul, Apôtres”

Courage! Tu en es capable. — Vois ce que la grâce de Dieu a fait de ce Pierre somnolent, renégat et lâche…, de ce Paul persécuteur, haineux et obstiné. (Chemin, 483)

2000/06/29

Pierre lui dit: Toi, Seigneur, me laver les pieds à moi! Jésus répondit: ce que je fais, moi, tu ne le comprends pas pour le moment; tu le comprendras par la suite. Pierre insiste: jamais tu ne me laveras les pieds! Jésus répliqua: si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. Simon Pierre se rend: alors, Seigneur, non seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête.

En présence d’un appel à un don total, complet, sans hésitations, nous opposons bien souvent une fausse modestie, comme celle de Pierre… Ah si nous étions, nous aussi des hommes de cœur, comme l’Apôtre! Pierre ne permet à personne d’aimer Jésus plus que lui. Cet amour le pousse à réagir ainsi: me voici! lave-moi les mains, la tête, les pieds! purifie-moi tout entier! car je veux me livrer à Toi sans réserve. (Sillon, 266)

« Je porte sur moi la sollicitude pour toutes les églises », écrivait saint Paul. Et ce soupir de l’Apôtre rappelle à tous les chrétiens — et à toi aussi — leur responsabilité de mettre aux pieds de l’Epouse de Jésus-Christ, de la Sainte Eglise, ce que nous sommes et ce que nous pouvons, en l’aimant très fidèlement, fût-ce au prix de nos biens, de notre honneur et de notre vie. (Forge, 584)

par Père Raniero Cantalamessa: Jusqu’a la mort, et a la mort de la croix

23 avril, 2009

du site:

http://www.cantalamessa.org/fr/predicheView.php?id=305

par Père Raniero Cantalamessa:

Jusqu’a la mort, et a la mort de la croix
 
 
2009-04-10- Prédication du Vendredi Saint 2009 en la Basilique Saint-Pierre

« Christus factus est pro nobis oboediens usque ad amortem, mortem autem crucis » : « Le Christ s’est fait obéissant pour nous jusqu’à la mort. Et à la mort de la croix ». En ce bimillénaire de la naissance de l’apôtre Paul, écoutons encore quelques unes de ses paroles enflammées sur le mystère de la mort du Christ que nous célébrons. Personne ne saurait mieux que lui nous aider à en comprendre le sens et la portée.

Aux Corinthiens, il écrit en guise de manifeste : « Alors que les Juifs demandent des signes et que les Grecs sont en quête de sagesse, nous proclamons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens, mais pour ceux qui sont appelés, Juifs et Grecs, c’est le Christ, puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1, 22-24). La mort du Christ a une portée universelle : « Si un seul est mort pour tous, alors tous sont morts » (2 Co 5, 14). Sa mort a conféré un sens nouveau à la mort de chaque homme et de chaque femme.

Aux yeux de Paul, la croix revêt une dimension cosmique. Sur la croix, le Christ a détruit la barrière de séparation, a réconcilié les hommes avec Dieu et entre eux, en tuant la haine (Ep 2,14-16). Dorénavant, la tradition primitive développera le thème de la croix arbre cosmique qui, avec le bras vertical, unit le Ciel et la terre et, avec le bras horizontal, réconcilie entre eux l’ensemble des peuples du monde. Evénement à la fois cosmique et extrêmement personnel : « Il m’a aimé et s’est livré pour moi » (Ga 2, 20). Tout homme, écrit l’Apôtre, est « celui-là pour qui le Christ est mort » (Rm 14, 15).

De là naît le sentiment de la croix, non plus comme châtiment, reproche ou sujet d’affliction, mais gloire et fierté du chrétien, c’est-à-dire comme une joyeuse certitude, accompagnée d’une gratitude émue, à laquelle l’homme s’élève dans la foi : « Pour moi, que jamais je ne me glorifie sinon dans la croix de notre Seigneur Jésus Christ » (Ga 6, 14).

Paul a planté la croix au centre de l’Eglise, tel le grand mât au centre du navire ; il en a fait le fondement, le centre de gravité de tout. Il a fixé pour toujours le cadre de l’annonce chrétienne. Les évangiles, écrits après lui, en suivront le schéma, faisant du récit de la Passion et de la mort du Christ l’élément central vers lequel tout est orienté.

On reste abasourdi devant l’entreprise menée à bien par l’Apôtre. Il est relativement facile pour nous, aujourd’hui, de voir les choses dans cette lumière, après que la croix du Christ, comme disait saint Augustin, ait rempli l’univers et brille à présent sur la couronne des rois[1]. Mais au moment où Paul écrivait, la Croix était encore synonyme de la plus grande ignominie, quelque chose que l’on ne devait même pas mentionner entre gens bien élevés.

Le but de l’année paulinienne n’est pas tant de mieux connaître la pensée de l’Apôtre (ceci, les spécialistes le font depuis toujours, sans compter que la recherche scientifique requiert des périodes plus longues qu’un an) ; c’est plutôt, comme le Saint-Père l’a rappelé à plusieurs reprises, d’apprendre de Paul comment faire face aux défis actuels de la foi.

Un de ces défis ouverts, le plus ouvert peut-être jamais encore lancé, s’est traduit dans un slogan publicitaire écrit sur les bus de Londres et d’autres capitales européennes : « Dieu n’existe probablement pas. Cessez donc de vous inquiéter et profitez de la vie » : There’s probably no God. Now stop worrying and enjoy your life. »

L’élément le plus accrocheur de cette publicité n’est pas tant la prémisse « Dieu n’existe pas », que la conclusion : « Profitez de la vie ! » Le message sous-jacent est que la foi en Dieu empêche de profiter de la vie, qu’elle est ennemie de la joie. Sans la foi, il y aurait davantage de bonheur dans le monde ! Paul nous aide à apporter une réponse à ce défi, en nous expliquant l’origine et le sens de toute souffrance, à partir de celle du Christ.

Pourquoi « fallait-il que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa gloire » ? (Lc 24, 26). Une question, à laquelle on apporte parfois une réponse « faible » et, en un certain sens, rassurante. Le Christ, en révélant la vérité de Dieu, suscite nécessairement l’opposition des forces du mal et des ténèbres et celles-ci, comme cela s’était produit avec les prophètes, conduiront à son refus et à son élimination. « Il fallait que le Christ endurât ces souffrances » aurait donc été compris dans le sens qu’« il était inévitable que le Christ endurât ces souffrances ».

Paul donne une réponse « forte » à cette question. La nécessité n’est pas d’ordre naturel, mais surnaturel. Dans les pays qui ont conservé une foi chrétienne ancienne, on associe presque toujours l’idée de souffrance et de croix à celle de sacrifice et d’expiation : la souffrance, pense-t-on, est nécessaire pour expier le péché et apaiser la justice de Dieu. C’est ce qui a provoqué, à l’époque moderne, le rejet de toute idée de sacrifice offert à Dieu et, pour finir, l’idée même de Dieu.

Il est indéniable que nous, les chrétiens, avons parfois prêté le flanc à cette accusation. Mais il s’agit d’un malentendu qu’une meilleure connaissance de la pensée de Paul a désormais définitivement clarifié. Dieu, écrit-il, a exposé le Christ « comme instrument de propitiation » (Rm 3, 25), mais cette propitiation n’agit pas sur Dieu pour l’apaiser, mais sur le péché pour l’éliminer. « On peut dire que Dieu lui-même, pas l’homme, expie le péché… L’image est davantage celle d’une tache corrosive que l’on enlève, ou la neutralisation d’un virus mortel, que celle d’une colère apaisée par la punition »[2].

Le Christ a donné un contenu radicalement nouveau à l’idée de sacrifice. « Ce n’est plus l’homme qui exerce une influence sur Dieu pour l’apaiser. C’est plutôt Dieu qui agit pour que l’homme renonce à son inimitié contre lui et envers le prochain. Le salut ne commence pas avec la demande de réconciliation de la part de l’homme, mais avec l’exhortation de Dieu lui-même : ‘Laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20) »[3].

Le fait est que Paul prend le péché au sérieux, il ne le banalise pas. Le péché est, pour lui, la cause principale du malheur des hommes, c’est-à-dire le refus de Dieu, pas Dieu ! Le péché enferme la créature humaine dans le « mensonge » et dans l’« injustice » (Rm 1, 18 ss. ; 3, 23), condamne le cosmos matériel lui-même à la « vanité » et à la « corruption » (Rm 8, 19 ss.) ; il est aussi la cause ultime des maux sociaux qui affligent l’humanité.

On n’en finit pas d’analyser l’actuelle crise économique dans le monde ainsi que ses causes, mais qui ose mettre la hache à la racine et parler de péché ? L’Apôtre définit la cupidité une « idolâtrie » (Col 3, 5) et montre du doigt l’amour démesuré de l’argent comme étant « la racine de tous les maux » (1 Tm 6, 10). Pouvons-nous lui donner tort ? Pourquoi tant de familles sur la paille, de masses de travailleurs sans travail, sinon à cause de la soif insatiable de profit de quelques uns ? L’élite financière et économique mondiale était devenue une locomotive folle emportée dans une course effrénée, sans se soucier du reste du train resté à l’arrêt, à distance sur la voie. Nous marchions tous « à contresens ».

Par sa mort le Christ n’a pas seulement dénoncé et vaincu le péché, il a aussi donné un sens nouveau à la souffrance, y compris à la souffrance qui ne dépend du péché de personne, comme c’est le cas de la souffrance provoquée ces jours derniers dans la région voisine des Abruzzes à cause du terrible tremblement de terre. Il en a fait un instrument de salut, un chemin vers la résurrection et la vie. Son sacrifice agit non pas à travers la mort mais à travers le dépassement de la mort, c’est-à-dire la résurrection. Il a été « livré pour nos fautes » et il est « ressuscité pour notre justification » (Rm 4, 25) : les deux événements sont inséparables dans la pensée de Paul et de l’Eglise.

Il s’agit d’une expérience humaine universelle : dans cette vie, le plaisir et la douleur se succèdent avec la même régularité que l’affaissement et le creux qui avale le naufragé, suit la vague de la mer qui se soulève. « Un je ne sais quoi d’amer – a écrit le poète païen Lucrèce – jaillit du plus profond de chaque plaisir et nous angoisse au cœur des délices »[4]. Le recours à la drogue, l’abus du sexe, la violence homicide, procurent l’ébriété du plaisir sur le moment, mais conduisent à la dissolution morale, et souvent aussi physique, de la personne.

Par sa passion et sa mort, le Christ a renversé le rapport entre plaisir et douleur. « Au lieu de la joie qui lui était proposée, [il] endura une croix » (He 12, 2). Ce n’est plus un plaisir qui se termine dans la souffrance, mais une souffrance qui conduit à la vie et à la joie. Il ne s’agit pas seulement d’une manière différente de se suivre des deux choses ; c’est la joie qui, de cette manière a le dernier mot, non la souffrance, et une joie qui durera éternellement. « Le Christ une fois ressuscité des morts ne meurt plus », « la mort n’exerce plus de pouvoir sur lui » (Rm 6, 9). Et elle n’exercera plus de pouvoir sur nous non plus.

Ce nouveau rapport entre souffrance et plaisir se reflète dans la manière dont la Bible marque le temps. Dans le calcul humain, le jour commence avec le matin et se termine avec la nuit ; pour la Bible il commence avec la nuit et se termine avec le jour : « Il y eut un soir et il y eut un matin : premier jour », dit le récit de la création (Gn 1, 5). Le fait que Jésus soit mort le soir et ressuscité le matin a une signification. Sans Dieu, la vie est un jour qui se termine par la nuit ; avec Dieu c’est une nuit qui se termine par le jour, et un jour sans coucher du soleil.

Le Christ n’est donc pas venu augmenter la souffrance humaine ou prêcher la résignation à la souffrance ; il est venu lui donner un sens et en annoncer la fin et le dépassement. Le slogan sur les bus de Londres et d’autres villes est lu également par des parents qui ont un enfant malade, par des personnes seules, ou qui ont perdu leur travail, par des exilés qui ont fui les horreurs de la guerre, par des personnes qui ont subi de graves injustices dans la vie… J’essaie d’imaginer leur réaction en lisant ces paroles : « Dieu n’existe probablement pas : profite donc de la vie ! » Et avec quoi ?

La souffrance reste certes un mystère pour tous, spécialement la souffrance des innocents, mais sans la foi en Dieu celle-ci devient immensément plus absurde. On lui enlève même son ultime espérance de rachat. L’athéisme est un luxe que seuls les privilégiés de la vie peuvent se permettre, ceux qui ont tout eu, y compris la possibilité de se consacrer aux études et à la recherche.

Ce n’est pas la seule incohérence de cette trouvaille publicitaire. « Dieu n’existe probablement pas » : il pourrait donc exister, on ne peut pas exclure totalement le fait qu’il existe. Mais cher frère non croyant, si Dieu n’existe pas, moi je n’ai rien perdu ; si en revanche il existe, tu as tout perdu ! On devrait presque remercier ceux qui ont promu cette campagne publicitaire ; elle a servi davantage la cause de Dieu que tant de nos arguments apologétiques. Elle a montré la pauvreté de ses raisons et a contribué à réveiller de nombreuses consciences endormies.

Mais Dieu a un mètre de jugement différent du nôtre et s’il voit de la bonne foi ou une ignorance non coupable, il sauve aussi celui qui l’a combattu avec acharnement au cours de sa vie. Nous les croyants devons nous préparer à des surprises dans ce domaine. « Combien de brebis il y a à l’extérieur de la bergerie, s’exclame saint Augustin, et combien de loups à l’intérieur ! » « Quam multae oves foris, quam multi lupi intus ! »[5].

Dieu est capable de faire de ceux qui le nient de la manière la plus acharnée, ses apôtres les plus passionnés. Paul en est la preuve. Qu’avait fait Saul de Tarse pour mériter cette rencontre extraordinaire avec le Christ ? Qu’avait-il cru, espéré, souffert ? A lui s’applique ce que saint Augustin disait de tout choix divin : « Cherche le mérite, cherche la justice, réfléchis et vois si tu trouves autre chose que de la grâce »[6]. C’est ainsi qu’il explique son propre appel : « je ne mérite pas d’être appelé apôtre, parce que j’ai persécuté l’Eglise de Dieu. C’est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis » (1 Co 15, 9-10).

La croix du Christ est motif d’espérance pour tous et l’année paulinienne une occasion de grâce aussi pour celui qui ne croit pas et est en recherche. Il y a une chose qui parle en leur faveur devant Dieu : la souffrance ! Comme le reste de l’humanité, les athées souffrent aussi dans la vie, et depuis que le Fils de Dieu l’a prise sur soi, la souffrance a un pouvoir de rédemption presque sacramentel. C’est un canal, écrivait Jean-Paul II dans la lettre apostolique « Salvifici doloris »[7], à travers lequel les énergies salvifiques de la croix du Christ sont offertes à l’humanité.

L’invitation à prier « pour ceux qui ne croient pas en Dieu » sera suivie tout à l’heure par une prière touchante, en latin, qui dit : « Dieu éternel et tout puissant, tu as mis dans le cœur des hommes une nostalgie de toi tellement profonde, qu’ils ne sont en paix que lorsqu’ils te trouvent : fais qu’au-delà de tout obstacle, tous reconnaissent les signes de ta bonté et, encouragés par le témoignage de notre vie, qu’ils aient la joie de croire en toi, unique vrai Dieu et Père de tous les hommes. Par le Christ notre Seigneur ».

Traduit de l’italien par ZENIT

[1] S. Augustin, Enarr. in Psaumes, 54, 12 (PL 36, 637).
[2] J. Dunn, La teologia dell’apostolo Paolo, Paideia, Brescia 1999, p. 227.
[3] G. Theissen – A. Merz, Il Gesù storico. Un manuale, Queriniana, Brescia 20032, p. 573.
[4] Lucrèce, De rerum natura, IV, 1129 s.
[5] S. Augustin, In Ioh. Evang. 45,12.
[6] S. Agostino, La predestinazione dei santi 15, 30 (PL 44, 981).
[7] Cf. Lettre apostolique “Salvifici doloris”, 23.

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