Archive pour la catégorie 'Saint Paul'

PAUL DE TARSE ET MARIE DE NAZARETH DE STEFANO DE FIORES, SMM

11 février, 2019

http://www.stpauls.it/madre/1003md/1003md08.htm

fr en La Vierge et l'enfant

La Vierge et l’Enfant

PAUL DE TARSE ET MARIE DE NAZARETH DE STEFANO DE FIORES, SMM

(traduction Google de l’italien)

Dans ce texte, un vrai sage, la doctrine de l’apôtre pour la mariologie est abordée.
Il est rare de trouver la combinaison de Paul de Tarse et de Marie de Nazareth, deux figures bibliques sans lien évident ou référence nécessaire. Il suffit de consulter le Dictionnaire de Paul et ses lettres (GF Hawthorne, CR Martin et D. Reid, édité par R. Penna, San Paolo 2000, p. 1886, 61,97 €), pour se rendre compte que le nom de Marie est complètement ignorée, même en tant que femme qui a engendré le Fils de Dieu (Gal 4: 4), une étape est même omise dans la Lettre aux Galates.
À première vue, il semble qu’en réalité, il n’ya rien de commun entre les deux personnalités de l’Église primitive. Paul est le missionnaire théologique, l’apôtre des peuples et le représentant d’un christianisme libre de la loi de Moïse et ouvert à l’hellénisme; Marie est une femme très estimée en tant que mère du Christ, mais professant, comme Pierre et Jacques, un judéo-christianisme fidèle aux exigences légales en vigueur dans la communauté de Jérusalem.
Pourtant, le lien entre Paul et Marie existe, puisque nous devons à l’apôtre le premier texte du Nouveau Testament où nous parlons du Christ comme « né d’une femme » (Ga 4: 4). En réfléchissant au plan du salut et en particulier à l’incarnation, Paul ne peut s’empêcher de se référer à cette femme d’Israël qui a généré le Messie.
Le cadre normatif pour l’annonce de Marie dans l’Église. Comme on le sait, les discours kérygmatiques de Pierre (Actes 2: 14-39; 3.12-26; 4.12-12; 5.29-32; 10.34-46) et de Paul (Actes 13: 16- 30; 17,22-31), visent à communiquer le contenu essentiel de l’histoire du salut: le Christ mort et ressuscité. Une seule fois, on fait référence à l’activité de guérison et d’exorcisation de Jésus après le baptême de Jean (Actes 10:38) et une seule fois est mentionnée la descendance davidique de Christ: « D’après sa lignée [David], conformément à la promesse, Dieu a amené un sauveur en Israël « (Actes 13:23).
Dans cette première phase, Maria n’est jamais nommée. La raison de ce silence sur la mère de Jésus est compréhensible: cela fait partie du silence plus général qui entoure toute l’histoire du Christ (qui fera l’objet d’une attention particulière de la part des évangélistes), car le centre d’intérêt des apôtres est: l’annonce du mystère pascal.
Paul brise le silence sur l’offrande de Marie dans Gal 4.4, le plus ancien témoignage marial du Nouveau Testament, qui remonte à 49 ans ou tout au plus à 57 ans après le Christ, soit vingt ans après l’Ascension.
L’occasion de la lettre aux Galates est l’infiltration de chrétiens judaïsants dans les communautés de Galatie, en Asie Mineure (Turquie actuelle), qui ont enseigné la validité de la loi juive qui n’a pas été abolie par le Christ. À ces derniers, il oppose son Évangile, c’est le salut par la foi en Christ. En tant que théologien authentique, Paul pose le dilemme suivant: qui nous sauve, Christ ou la loi?Si le salut vient de la loi, alors « Christ est mort en vain » (Gal 2, 21). Mais si Christ est le sauveur, la loi perd alors sa fonction et sa nécessité, de sorte que le peuple puisse croire et se faire baptiser sans passer de l’obéissance aux prescriptions de la mosaïque. Avec cette solution, qui rassemble l’accord des apôtres et des communautés, le christianisme cesse d’être un simple groupe juif (tout en maintenant sa foi monothéiste et sa profonde spiritualité) pour devenir une communauté universelle.
Dans ce contexte controversé contre les judaïsants, Paul introduit le texte de grand intérêt christologique dans lequel il mentionne « de manière tangentielle et anonyme » de Marie, la « femme » de laquelle est né Jésus: « Quand la plénitude du temps arriva, Dieu envoya son Fils, né d’une femme née sous la loi, pour racheter ceux qui étaient sous la loi, afin que nous puissions recevoir l’adoption en tant que fils « (Ga 4: 4).
Malgré sa brièveté , le texte est considéré comme le plus grand intérêt marial, presque « un mariologie dans l’œuf », comme « noyau germinale » ouvert « à l’acquisition ultérieure du Nouveau Testament. »
L’historien des dogmes mariaux, Georg Söll, vient d’affirmer: « Du point de vue dogmatique, la déclaration de Gal 4,4 est le texte mariologique le plus significatif du NT, même si son importance n’a pas été pleinement ressentie par certains théologiens aujourd’hui. Avec Paolo commence l’engagement de la mariologie avec la christologie, précisément à travers l’attestation de la maternité divine de Marie et la première intuition d’une considération historique-salvifique de son sens ».
L’ importance du texte paulinien est donnée par le fait qu’il a une structure trinitaire et historique-salvifique.
Paul fait clairement référence au système d’envoi . Le sujet de la phrase est le Père, qui détermine la plénitude du temps, c’est-à-dire le moment propice au salut après la période de sujétion et de maturation (Gal 4: 1-2), et décide de l’envoi de son Fils. Ceux – ci, l’ ordre préexistant à envoyer, est dans le temps selon deux méthodes et les objectifs intimement liés et en face: né dans un état fragile ( né de la femme ) l’ esclavage edi ( né sous la loi ) en vue de la libération de l’ esclavage ( pour racheter ceux qui étaient sous la loi ) et du don de filiation divine rendu possible par l’Esprit (pourquoi nous avons reçu l’adoption d’un enfant , Gal 4,6).
Marie est la femme qui insère le Fils de Dieu dans l’histoire dans un état d’abaissement, mais elle se situe dans la plénitude du temps et se trouve impliquée dans le plan historique et salvifique de la transformation des hommes en fils de Dieu.
Dans les deux versets (Gal 4: 4-6), les personnes de la Trinité sont présentes dans un horizon historique salvifique, afin que nous puissions constater à juste titre que la femme dont est né le Christ est incompréhensible en dehors de sa relation avec les trois personnes divines et avec l’histoire du salut.
Le « mystère » de la femme dans Gal 4: 4f est totalement inséré dans un plan christologique-trinitaire-ecclésial et placé comme une garantie de la liberté effective des enfants de Dieu.
La femme, dont le nom n’est pas mentionné, est entièrement au service de l’événement salvifique qui engage toute la Trinité et profite à tous les hommes.
Nous pourrions dire que Marie est impliquée dans le « complot » de Dieu, mieux dans son « dessein » mystérieux et surprenant, pour le salut des êtres humains: « [Marie] est-elle qui porte Jésus-Christ en elle; mais il ne veut pas le garder pour lui-même, car c’est finalement celui qui l’amène au monde: en ce sens, il participe – comme l’Église – à ce qu’on pourrait appeler le « complot » de Dieu pour sauver le monde, et il peut être célébré comme celui qui il a introduit secrètement le Christ parmi les hommes, en qui le royaume de Dieu est présent ».
Le genre paradoxal pour parler de la mère du Christ. Dans la même étape courte de Gal 4.4 Paul utilise le sexe paradoxale, qui lui est cher (1 Co 1,21 à 31; 2 Co 5,21; 8,9; Rm 8,3 à 4), en mettant la réalité ensemble mixte ( paradoxe , du grec pará dóxa = à côté de l’opinion ): esclavage-rédemption, fragilité-filiation divine. Il existe en fait une relation antithétique entre la manière dont le Fils de Dieu se présente au monde et le but de sa venue.
En pratique, Paul applique à l’envoi de la Parole dans la condition humaine la loi historique et salvifique de l’ abaissement de l’exaltation qui lie la première alliance au Testament définitif.
Le renversement du destin est le message du livre d’Esther, où il est intronisé et répudié par Vasti, Mardochée est exalté et Amman assassiné. C’est surtout chez le Serviteur de JHWH que l’antithèse d’ abaissement-exaltation est réalisée : il est humilié par la persécution et la souffrance, mais est ensuite « exalté et grandement élevé » (Is 50: 6, 52, 13).
Lorsque la communauté chrétienne cherche un principe qui rend compréhensible l’histoire de Jésus, elle le trouve dans le schéma du juste souffrant et exalté. Dans cette ligne, il y a le célèbre hymne christologique pré-paulien de Phil 2,6-11, où nous passons de la phase d’humiliation qui atteint son apogée dans la mort de la croix à l’exaltation de Jésus en tant que Seigneur.
En ce qui concerne le texte de Paul, certaines questions se posent spontanément: comment le Christ « soumis à la loi » peut-il libérer ceux qui attendent d’être libérés? Et comment une « femme née », comme tous les êtres humains, peut-elle conférer la dignité d’enfants de Dieu?
Paul ne dissout pas ces énigmes, mais laisse ouvert le discours sur la façon dont le Christ vient au monde (par exemple, virginal et la puissance de l’Esprit , comme spécifié par les évangiles de l’enfance) ou est soumis à la loi (c’est-à-dire volontairement , sans être nécessaire). Le discours reste également ouvert sur le moment où il passera de l’humiliation à l’exaltation; un tel passage se produira sûrement pour Paul dans le mystère pascal, mais dans le passage de Gal 4,4, il reste implicite.
M air est lié à la kénose du Fils , c’est-à-dire à son incarnation dans un état de vide et de faiblesse, dont elle devient un élément indispensable.
Quatre siècles plus tard, Augustin reconnaîtra à Marie la mère de la « faiblesse » du Christ, « pas de sa divinité », l’ayant engendrée dans la condition humaine. De plus, les études bibliques et théologiques du XXe siècle relativisent la Vierge de Nazareth dans l’histoire spirituelle de son petit peuple, méprisé et piétiné par les grandes puissances. Elle fait partie des « pauvres de JHWH », le sommet spirituel d’Israël, en tant que femme à l’écoute de Dieu qui se révèle, à qui elle se donne totalement.
Bien qu’elle ait généré le Seigneur de l’univers, elle mène une vie sans privilèges terrestres, dans des situations de pauvreté et d’absence de pouvoir et d’influence. Sa kénose suprême est atteinte au Calvaire lorsqu’il éprouve l’épée de douleur. Cependant, le principe kénotique « serait incomplet et incomplet s’il n’était pas attribué à la Mère de Jésus, mais aussi à sa conséquence nécessaire qui est l’exaltation ».
L à kénose du Christ, qui participe Maria, n’est pas que le premier panneau d’un diptyque qui prévoit également l’état glorifié des deux. Theologumeno historique-salvifique de l’abaissement-exaltation que la Vierge applique à son affaire dans le Magnificat(Lc 1,47-48), peut aujourd’hui se traduire par marginalisation-promotion, passivité-insertion active dans l’histoire, vide des valeurs-plénitude de sens: Dieu a transformé son insignifiance en un moment de salut messianique. L’image kénotique de Marie contrebalance sa tendance glorifiante, qui l’a privée de sa consistance concrète en tant que femme insérée dans l’histoire du judaïsme, atteignant une certaine déshumanisation de sa silhouette.

Stefano De Fiores, smm

BENOÎT XVI – PAUL…SON TESTAMENT SPIRITUEL : LA LETTRE AUX PHILIPPIENS

26 juillet, 2018

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2012/documents/hf_ben-xvi_aud_20120627.html

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BENOÎT XVI – PAUL…SON TESTAMENT SPIRITUEL : LA LETTRE AUX PHILIPPIENS

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI

Mercredi 27 juin 2012

Chers frères et sœurs,

Notre prière est faite, comme nous l’avons vu lors des mercredis passés, de silences et de mots, de chants et de gestes qui font participer la personne tout entière : de la bouche à l’esprit, du cœur au corps entier. C’est une caractéristique que nous retrouvons dans la prière juive, en particulier dans les Psaumes. Je voudrais aujourd’hui parler de l’un des chants ou hymnes les plus anciens de la tradition chrétienne, que saint Paul nous présente dans ce qui est, d’une certaine manière, son testament spirituel : la Lettre aux Philippiens. En effet, il s’agit d’une Lettre que l’Apôtre dicte alors qu’il est en prison, peut-être à Rome. Il sent sa mort prochaine, car il affirme que sa vie sera offerte en sacrifice (cf. Ph 2, 17).
Malgré cette situation de grave danger pour son intégrité physique, saint Paul, dans tout ce texte, exprime la joie d’être un disciple du Christ, de pouvoir aller à sa rencontre, au point de voir la mort non comme une perte, mais comme un gain. Dans le dernier chapitre de la Lettre, il y a une invitation pressante à la joie, caractéristique fondamentale de la condition du chrétien et de la prière. Saint Paul écrit : « Soyez toujours dans la joie du Seigneur; laissez-moi vous le redire: soyez dans la joie » (Ph 4, 4). Mais comment peut-on se réjouir face à une condamnation à mort désormais imminente ? D’où, ou plutôt de qui, saint Paul tire-t-il la sérénité, la force, le courage d’aller à la rencontre du martyre et de l’effusion de sang ?
Nous trouvons la réponse au cœur de la Lettre aux Philippiens, dans ce que la tradition chrétienne appelle carmen Christo, le chant au Christ, ou plus communément « hymne christologique » ; un chant dans lequel toute l’attention est centrée sur les « sentiments » du Christ, c’est-à-dire sur sa façon de penser et sur son attitude concrète et vécue. Cette prière commence par une exhortation : « Ayez entre vous les dispositions que l’on doit avoir dans le Christ Jésus » (Ph 2, 5). Ces sentiments sont présentés dans les versets qui suivent: l’amour, la générosité, l’humilité, l’obéissance à Dieu, le don de soi. Il s’agit non seulement et pas simplement de suivre l’exemple de Jésus, comme quelque chose de moral, mais de faire participer toute l’existence à sa manière de penser et d’agir. La prière doit conduire à une connaissance et à une union dans l’amour toujours plus profondes avec le Seigneur, pour pouvoir penser, agir et aimer comme Lui, en Lui et pour Lui. Exercer cela, apprendre les sentiments de Jésus, représente la voie de la vie chrétienne.
Je voudrais à présent m’arrêter brièvement sur plusieurs éléments de ce chant riche, qui résume tout l’itinéraire divin et humain du Fils de Dieu et qui englobe toute l’histoire humaine : du fait d’être dans la condition de Dieu, à l’incarnation, à la mort en croix et à l’exaltation dans la gloire du Père est également implicite le comportement d’Adam, de l’homme depuis le début. Cet hymne au Christ part de son être « en morphe tou Theou », dit le texte grec, c’est-à-dire d’être « sous la forme de Dieu », ou mieux dans la condition de Dieu. Jésus, vrai Dieu et vrai homme, ne vit pas son « être comme Dieu » pour triompher ou pour imposer sa suprématie, il ne le considère pas une possession, un privilège, un trésor à garder jalousement. Au contraire, « il se dépouilla », il se vida lui-même en assumant, dit le texte grec, la « morphe doulos », la « forme d’esclave », la réalité humaine marquée par la souffrance, par la pauvreté, par la mort; il s’est pleinement assimilé aux hommes, en dehors du péché, de manière à se comporter comme un serviteur complètement dévoué au service des autres. À cet égard, Eusèbe de Césarée — ive siècle — affirme : « Il a pris sur lui la fatigue des membres qui souffrent. Il a faites siennes nos humbles maladies. Il a souffert et pâti pour notre cause : et cela en conformité avec son grand amour pour l’humanité » (La démonstration évangélique, 10, 1, 22). Saint Paul poursuit en traçant le cadre historique dans lequel s’est réalisé cet abaissement de Jésus : « il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir » (Ph 2, 8). Le Fils de Dieu est devenu vraiment homme et il a accompli un chemin dans la complète obéissance et fidélité à la volonté du Père, jusqu’au sacrifice suprême de sa propre vie. Plus encore, l’apôtre spécifie « jusqu’à mourir et à mourir sur une croix ». Sur la croix Jésus Christ a atteint le plus haut degré de l’humiliation, car la crucifixion était la peine réservée aux esclaves et non aux personnes libres : « mors turpissima crucis », écrit Cicéron (cf. In Verrem, v, 64, 16).
Dans la Croix du Christ l’homme est racheté et l’expérience d’Adam est renversée : Adam, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, prétendit être comme Dieu par ses propres forces, se mettre à la place de Dieu, et il perdit ainsi la dignité originelle qui lui avait été donnée. Jésus, en revanche, était « dans la condition de Dieu », mais il s’est abaissé, il s’est plongé dans la condition humaine, dans la fidélité totale au Père, pour racheter l’Adam qui est en nous et redonner à l’homme la dignité qu’il avait perdue. Les Pères soulignent qu’Il s’est fait obéissant, en restituant à la nature humaine, à travers son humanité et son obéissance, ce qui avait été perdu par la désobéissance d’Adam.
Dans la prière, dans la relation avec Dieu, nous ouvrons notre esprit, notre cœur, notre volonté à l’action de l’Esprit Saint pour entrer dans cette même dynamique de vie, comme l’affirme saint Cyrille d’Alexandrie, dont nous célébrons aujourd’hui la fête : « L’œuvre de l’Esprit cherche à nous transformer par l’intermédiaire de la grâce dans la copie parfaite de son humiliation » (Lettres Festales 10, 4). La logique humaine, en revanche, recherche souvent la réalisation de soi-même dans le pouvoir, dans la domination, dans des moyens puissants. L’homme continue à vouloir construire avec ses propres forces la tour de Babel pour atteindre par lui-même la hauteur de Dieu, pour être comme Dieu. L’Incarnation et la Croix nous rappellent que la pleine réalisation se trouve dans la conformation de notre volonté humaine à celle du Père, dans le fait de se vider de notre égoïsme, pour nous remplir de l’amour, de la charité de Dieu et ainsi devenir vraiment capables d’aimer les autres. L’homme ne se trouve pas lui-même en restant enfermé en lui-même, en s’affirmant lui-même. L’homme ne se retrouve qu’en sortant de lui-même; ce n’est qu’en sortant de nous-mêmes que nous nous retrouvons. Et si Adam voulait imiter Dieu, cela n’est pas un mal en soi, mais il s’est trompé sur l’idée de Dieu. Dieu n’est pas un être qui veut uniquement la grandeur. Dieu est amour qui se donne déjà dans la Trinité, puis dans la création. Et imiter Dieu veut dire sortir de soi-même, se donner dans l’amour.
Dans la seconde partie de cet « hymne christologique » de la Lettre aux Philippiens, le sujet change ; ce n’est plus le Christ, mais Dieu le Père. Saint Paul souligne que c’est justement par l’obéissance à la volonté du Père que « Dieu l’a élevé au-dessus de tout; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms » (Ph 2, 9). Celui qui s’est profondément abaissé en prenant la condition d’esclave, est exalté, élevé au-dessus de toute chose par le Père, qui lui donne le nom de « Kyrios », « Seigneur », la suprême dignité et seigneurie. Face à ce nom nouveau, en effet, qui est le nom même de Dieu dans l’Ancien Testament, « qu’au Nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l’abîme, tout être vivant tombe à genoux, et que toute langue proclame : “Jésus Christ est le Seigneur”, pour la gloire de Dieu le Père » (vv. 10-11). Le Jésus qui est exalté est celui de la Dernière Cène, qui dépose ses vêtements, se ceint d’une serviette, se penche pour laver les pieds des Apôtres et leur demande: « Comprenez-vous ce que je viens de faire ? Vous m’appelez Maître et Seigneur, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres » (Jn 13, 12-14). C’est de cela qu’il est important de toujours nous souvenir dans notre prière et dans notre vie : « l’ascension à Dieu advient précisément dans la descente de l’humble service, dans la descente de l’amour, qui est l’essence de Dieu et donc la force vraiment purificatrice, qui rend l’homme capable de percevoir et de voir Dieu » (Jésus de Nazareth, 2007).
L’hymne de la Lettre aux Philippiens nous offre ici deux indications importantes pour notre prière. La première est l’invocation « Seigneur » adressée à Jésus Christ, assis à la droite du Père : il est l’unique Seigneur de notre vie, au milieu de tant de « dominateurs » qui veulent l’orienter et la guider. C’est pourquoi il est nécessaire d’avoir une échelle de valeurs où le primat revient à Dieu, pour affirmer avec saint Paul : « Je considère tout cela comme une perte à cause de ce bien qui dépasse tout : la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur » (Ph 3, 8). La rencontre avec le Ressuscité lui a fait comprendre qu’il est l’unique trésor pour lequel il vaille la peine de consacrer sa propre existence.
La deuxième indication est la prostration, « tous les genoux se plient » sur la terre comme aux cieux, ce qui rappelle une expression du Prophète Isaïe, où il indique l’adoration que toutes les créatures doivent à Dieu (cf. 45, 23). La génuflexion devant le Très Saint Sacrement, ou le fait de se mettre à genoux dans la prière, expriment justement l’attitude d’adoration devant Dieu, également avec le corps. D’où l’importance d’accomplir ce geste non par habitude et en hâte, mais avec une profonde conscience. Lorsque nous nous agenouillons devant le Seigneur, nous confessons notre foi en Lui, nous reconnaissons qu’il est l’unique Seigneur de notre vie.
Chers frères et sœurs, dans notre prière, fixons notre regard sur le Crucifié, arrêtons-nous plus souvent en adoration devant l’Eucharistie, pour faire entrer notre vie dans l’amour de Dieu, qui s’est abaissé avec humilité pour nous élever jusqu’à Lui. Au début de la catéchèse, nous nous sommes demandé comment saint Paul pouvait se réjouir face au risque imminent du martyre et de son effusion de sang. Cela n’est possible que parce que l’Apôtre n’a jamais éloigné son regard du Christ jusqu’à se configurer à lui dans la mort, « dans l’espoir de parvenir à ressusciter d’entre les morts » (Ph 3, 11). Comme saint François devant le crucifix, disons nous aussi: Très Haut, Dieu de gloire, illumine les ténèbres de mon cœur, donne-moi une foi droite, une espérance certaine, sens et discernement pour accomplir ta vraie et sainte volonté. Amen (cf. Prière devant le crucifix : FF [276]).

 

PAPE FRANÇOIS – [L'espérance chrétienne - source de réconfort mutuel et la paix (1 Thes 5,12 à 22)]

15 février, 2017

http://w2.vatican.va/content/francesco/it/audiences/2017/documents/papa-francesco_20170208_udienza-generale.html

PAPE FRANÇOIS – [L'espérance chrétienne - source de réconfort mutuel et la paix (1 Thes 5,12 à 22)]

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 8 février 2017

Chers frères et sœurs, bonjour!

Mercredi dernier, nous avons vue que saint Paul, dans la première Lettre aux Thessaloniciens, exhorte à rester enracinés dans l’espérance de la résurrection (cf. 5, 4-11), avec cette belle parole «nous serons avec le Seigneur toujours» (4, 17). Dans le même contexte, l’apôtre montre que l’espérance chrétienne ne possède pas seulement un souffle personnel, individuel, mais communautaire, ecclésial. Nous espérons tous; nous avons tous l’espérance, également de manière communautaire.

C’est pourquoi le regard de Paul s’élargit immédiatement à tous les groupes qui composent la communauté chrétienne, en leur demandant de prier les uns pour les autres et de se soutenir réciproquement. Nous aider réciproquement. Mais pas seulement nous aider dans le besoin, dans les nombreux besoins de la vie quotidienne, mais nous aider dans l’espérance, nous soutenir dans l’espérance. Et ce n’est pas un hasard s’il commence précisément en faisant référence à ceux à qui est confiée la responsabilité et la direction pastorale. Ils sont les premiers à être appelés à nourrir l’espérance, et cela non parce qu’ils sont meilleurs que les autres, mais en vertu d’un ministère divin qui va bien au-delà de leurs forces. C’est pour cette raison qu’ils ont plus que jamais besoin du respect, de la compréhension et du soutien bienveillant de tout le monde.
L’attention se porte ensuite sur nos frères qui risquent davantage de perdre l’espérance, de tomber dans le désespoir. Nous venons toujours à connaissance de gens qui tombent dans le désespoir et font de mauvaises choses… Le désespoir les conduit à tant de mauvaises choses. La référence concerne celui qui est découragé, qui est faible, qui se sent écrasé par le poids de la vie et de ses propres fautes et ne réussit pas à se relever. Dans ces cas, la proximité et la chaleur de toute l’Eglise doivent se faire encore plus intenses et aimantes, et doivent prendre la forme exquise de la compassion, qui n’est pas avoir pitié: la compassion signifie pâtir avec l’autre, souffrir avec l’autre, m’approcher de celui qui souffre; un mot, une caresse, mais qui doivent venir du cœur; cela est la compassion. Pour celui qui a besoin de réconfort et de consolation. Cela est extrêmement important: l’espérance chrétienne ne peut se passer de la charité authentique et concrète. L’apôtre des nations lui-même, dans sa lettre aux Romains, affirme avec le cœur sur la main: «C’est un devoir pour nous, les forts — qui avons la foi, l’espérance, ou qui n’avons pas tant de difficultés —, de porter les faiblesses de ceux qui n’ont pas cette force et de ne point rechercher ce qui nous plaît» (15, 1). Porter, porter les faiblesses des autres. Ensuite, ce témoignage ne reste pas enfermé dans les limites de la communauté chrétienne: il retentit dans toute sa vigueur également en dehors, dans le contexte social et civil, comme un appel à ne pas créer des murs mais des ponts, à ne pas rendre le mal pour le mal, à vaincre le mal par le bien, l’offense par le pardon — le chrétien ne peut jamais dire: tu me le paieras!, jamais; cela n’est pas un geste chrétien; l’offense est vaincue par le pardon —, à vivre en paix avec tous. Voilà ce qu’est l’Eglise! Et c’est ce que réalise l’espérance chrétienne, quand elle prend les traits forts et dans le même temps tendres de l’amour. L’amour est fort et tendre. C’est beau.
On comprend alors que l’on n’apprend pas à espérer seuls. Personne n’apprend à espérer seul. Cela n’est pas possible. L’espérance, pour se nourrir, a nécessairement besoin d’un «corps», dans lequel les divers membres se soutiennent et se ravivent réciproquement. Cela veut alors dire que, si nous espérons, c’est parce que beaucoup de nos frères et sœurs nous ont enseigné à espérer et ont gardé notre espérance vivante. Et parmi eux se distinguent les petits, les pauvres, les simples, les exclus. En effet, celui qui s’enferme dans son bien-être ne connaît pas l’espérance: il espère seulement dans son bien-être et cela n’est pas l’espérance: c’est une sécurité relative; celui qui s’enferme dans sa propre satisfaction, qui se sent toujours comme il faut, ne connaît pas l’espérance… Ceux qui espèrent sont en revanche ceux qui font chaque jour l’expérience de l’épreuve, de la précarité et de leurs propres limites. Ce sont ces frères qui nous donnent le plus beau témoignage, le plus fort, parce qu’ils demeurent fermes dans la confiance au Seigneur, en sachant que, au-delà de la tristesse, de l’oppression et du caractère inéluctable de la mort, la dernière parole sera la sienne, et ce sera une parole de miséricorde, de vie et de paix. Celui qui espère, espère entendre dire un jour ce mot: «Viens, viens à moi, mon frère; viens, viens à moi, ma sœur, pour toute l’éternité».
Chers amis, si — comme nous l’avons dit — la demeure naturelle de l’espérance est un «corps» solidaire, dans le cas de l’espérance chrétienne ce corps est l’Eglise, alors que le souffle vital, l’âme de cette espérance est l’Esprit Saint. Sans l’Esprit Saint on ne peut pas avoir d’espérance. Voilà alors pourquoi l’apôtre Paul nous invite à la fin à l’invoquer sans cesse. S’il n’est pas facile de croire, cela l’est encore moins d’espérer. Il est plus difficile d’espérer que de croire, cela est plus difficile. Mais quand l’Esprit Saint habite dans nos cœurs, c’est Lui qui nous fait comprendre que nous ne devons pas craindre, que le Seigneur est proche et qu’il prend soin de nous; et c’est Lui qui modèle nos communautés, dans une Pentecôte éternelle, comme signes vivants d’espérance pour la famille humaine. Merci.

 

Année paulienne : Homélie sur le discours de saint Paul à Athènes en Actes 17, 16-34 –

5 septembre, 2011

du site:

http://www.seminairedequebec.org/Annee-paulienne-Homelie-sur-le-discours-de-saint-Paul-a-Athenes-en-Actes-17-16-34-Mercredi-de-la-6e-semaine-de-Paques_a278.html

Année paulienne : Homélie sur le discours de saint Paul à Athènes en Actes 17, 16-34 –

Mercredi de la 6e semaine de Pâques.

« Ce que vous vénérez, sans le connaître, voilà ce que, moi, je viens vous annoncer. » Homélie prononcée lors de la fête du Supérieur général par Mgr Hermann Giguère P.H. à la chapelle du Pavillon Jean-Olivier-Briand, Séminaire de Québec, le 20 mai 2009. Textes de l’Écriture: Actes17, 15.22-18,1(discours de saint Paul à Athènes au complet : Actes 17, 16-34) et Jn 16, 12-15. Mercredi de la 6e semaine de Pâques.
Les lectures d’aujourd’hui demanderaient des commentaires assez développés, mais n’ayez crainte, je ne serai pas très long. Il reste qu’en cette année paulienne, le discours de saint Paul devant les Athéniens résonne à nos oreilles de façon interpellante. Le contenu de cette annonce de l’Évangile tranche avec celle de Pierre après la Pentecôte ou encore avec le discours de Paul à Antioche (Actes 13, 16-43) que nous avons lu au cours des dernières semaines. Il s’agit toujours du même Évangile bien sûr que Paul annonce, mais nous pouvons constater ici que Paul se préoccupe non seulement du contenu, mais aussi de la façon de transmettre ce contenu. Voilà pourquoi, ce discours de Paul aux Athéniens est des plus actuels pour nous.
I- Contexte : le deuxième voyage missionnaire
De l’an 49 à l’an 52, selon les spécialistes de saint Paul, celui-ci est engagé dans son deuxième voyage missionnaire qu’il commence à Antioche dans les difficultés avec Barnabé qu’il laisse pour traverser la Turquie actuelle avec Silas (Actes 15, 36-40). Plus de mille kilomètres. Il retrouve les communautés déjà fondées notamment celle des Galates et rencontre Timothée qui l’accompagnera pour le reste du voyage. Le groupe s’embarque pour la Macédoine, poursuit sa route, évangélisant Thessalonique et Bérée et Paul se retrouve à Athènes, la capitale culturelle de la Grèce. Il y est seul attendant que Timothée et Silas viennent le rejoindre.
Transportons-nous dans cette capitale il y a presque 2000 ans en même temps que Paul. La ville est une des plus belles villes de l’époque, pleine d’animation, de culture comme le sont aujourd’hui Paris ou New-York. Parcourons la ville avec Paul. Admirons-y les magnifiques bâtiments, les riches maisons sculptées en pierre blanche, les théâtres et les fontaines. Avec Paul, au fil de notre promenade, nous découvrons aussi les nombreux temples où l’on adorait une multitude de divinités. Petits temples bien souvent avec colonnades et frontons sculptés et décorés. Chaque temple a son dieu ou sa déesse.

II- Un discours exemplaire
Lorsqu’il commence à s’adresser aux gens réunis autour de lui à l’Aréopage, Paul se sert de cette visite pour en faire un point d’accrochage : « En effet, en parcourant la ville, et en observant vos monuments sacrés, j’y ai trouvé, en particulier, un autel portant cette inscription : ‘ Au dieu inconnu’ ».
Voilà le départ. Et le discours continue avec un souci remarquable de rejoindre les auditeurs. Cependant, remarquez-le, il y a plus qu’une technique de communication ici.
Autant, jusqu’ici on voyait Paul se faisant « juif avec les juifs », autant on le voit maintenant se faire « grec avec les grecs », autant on l’entendait citer plein de passages de l’Ancien Testament et se référer à l’histoire d’Israël, autant maintenant à Athènes on sent l’adaptation au milieu païen, mais le discours s’achève avec la proclamation de la résurrection de façon non équivoque. « [Dieu] a fixé le jour où il va juger l’univers avec justice, par un homme qu’il a désigné; il en a donné la garantie à tous en ressuscitant cet homme d’entre les morts. »
L’ensemble de l’argumentation va dans le sens d’un effort pour rejoindre ceux à qui Paul s’adresse pour la proclamation de l’Évangile. Ce discours est vraiment remarquable du point de vue de la communication, mais il n’est pas seulement un effort de communicateur, il est aussi la parole d’un évangélisateur.

III- Application
On parle volontiers dans le Québec d’aujourd’hui de « nouvelle évangélisation ». La Montée des Jeunes qui a eu lieu en fin de semaine dernière avait comme thème : « Missionnaire, ose le style saint Paul. » On trouve dans le discours à Athènes, un bel exemple du « style saint Paul», d’une véritable méthode d’évangélisation.
Paul se trouve à Athènes dans une situation inédite : – il est seul, sans aide ni équipe. Qu’est-ce que Paul fait dans un tel contexte? Premièrement, Paul commence par faire le tour de la ville pour prendre connaissance du milieu dans lequel il se trouve. Deuxièmement, il cherche des ponts par lesquels il peut, avec l’Évangile, rejoindre les Athéniens dans ce qu’ils croient. C’est pourquoi, Paul ne part pas, contrairement à l’accoutumée, des affirmations bibliques pour s’adresser aux Grecs. Il part des éléments connus de leur culture par lesquels il y a une porte d’entrée pour l’Évangile. Et, troisièmement, Paul proclame le kérigme : « Il est ressuscité, oui, cet homme est vraiment ressuscité » comme le chante notre liturgie pascale.
L’approche est différente de celle qu’il avait avec les juifs, mais son message ne change pas. Il demeure le même qu’à Antioche : Dieu a ressuscité Jésus pour en faire le Premier-Né d’une multitude de frères et sœurs, même si Paul sent que celui-ci est difficile à entendre pour les Grecs. En effet, on se moque de lui, mais ce n’est pas l’échec total, étant donné que naît à Athènes une petite communauté chrétienne : Denys, Damaris et quelques autres (Actes 17, 32- 34).
Le pape Paul VI écrivait dans l’ Exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi » : « Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de Dieu ne sont pas annoncés.»
Et Jean-Paul II, faisant écho à ces paroles, écrit dans Novo millennio ineunte : « Nous ne sommes certes pas séduits par la perspective naïve qu’il pourrait exister pour nous, face aux grands défis de notre temps, une formule magique. Non, ce n’est pas une formule qui nous sauvera, mais une Personne, et la certitude qu’elle nous inspire : Je suis avec vous ! »

Conclusion
Cette méditation, plus longue que ce que je m’imaginais, nous garde, avec saint Paul, dans le sillage du texte de l’évangile de Jean qui nous invite à rester toujours attentifs à l’Esprit si nous voulons connaître et suivre Jésus. « Il reprend ce qui vient de moi, dit Jésus, pour vous le faire connaître. » (Jn 16,15)
Prions, chers amis, pour que nous sachions bien discerner les voies de l’Esprit pour notre Église d’aujourd’hui, pour notre communauté et pour notre cheminement de vie personnel,
Que cette Eucharistie nous donne d’être, de plus en plus, unis au Seigneur ressuscité comme des membres vivants et rayonnants de la beauté, de la bonté et de l’amour de Celui en qui « il nous est donné de vivre, de nous mouvoir, d’exister » (Actes 17, 28).

Amen!

Mgr Hermann Giguère, P.H.
Supérieur général du Séminaire de Québec
20 mai 2009

Les meilleurs amis de Paul, les femmes

16 juin, 2011

du site:

http://paulissimo.dominicains.com/spip.php?article214&lang=fr

Les meilleurs amis de Paul, les femmes

Mon souci dans cette conférence est de prendre le contre-pied des remarques encore trop souvent faites à propos de saint Paul et de marquer sa proximité avec le monde féminin, et l’équilibre de ses positions, surtout dans le contexte de son temps. J’ai donc choisi de faire un peu choc : lorsqu’on commence en disant « les meilleurs amis de Paul », on peut attendre que suivent quelques noms du genre « Timothée et Tite », des masculins, et sans doute pas « les femmes » : mais après tout, en rassemblant les uns et les autres dans un même titre, n’était-ce pas déjà une manière de contribuer à l’équilibre, celui-là même que Paul a vécu en son temps ?
 
Pour vous présenter le sujet choisi, je serai obligé, pour des contraintes de temps et de genre littéraire, de me limiter et de n’aborder que quelques textes parmi ceux qui auraient pu ou dû l’être, en particulier au niveau des Pastorales. J’ai choisi de commencer par elles parce que je considère pour ma part qu’elles sont peut-être les premières lettres de Paul, et qu’elles présentent une vision très traditionnelle de la femme, celle qu’a dû connaître l’apôtre autour de lui : en d’autres termes, elles sont pour moi un bon point de départ.

I. La situation des femmes dans les « Pastorales »

A – La place des Pastorales dans le corpus paulinien
Vous le savez, le corpus paulinien le plus traditionnel contient entre autres trois lettres, la première et la deuxième lettre à Timothée, plus la lettre à Tite, auxquels la critique très largement majoritaire refuse aujourd’hui le sceau de l’authenticité : voyez sur tout cela le récent commentaire du frère Michel Gourgues à ce sujet [1].
Je vous l’avoue, je suis très sceptique sur l’idée même d’une pseudépigraphie néotestamentaire, j’ai du mal à imaginer que quelques auteurs aient pu vouloir se présenter sous l’autorité de Paul alors même que celui-ci venait de disparaître et que beaucoup de ceux qui l’avaient connu étaient encore vivants, et j’ai encore plus de mal à penser qu’ils l’aient fait avec autant de maladresse, je veux dire en utilisant un vocabulaire très marqué par le judaïsme le plus classique, et en proposant de la loi une vision si différente par rapport aux lettres au Galates et aux Romains qui les ont précédées : il faudrait qu’ils aient été de très très mauvais faussaires, et que leurs critiques aient eu une grâce d’aveuglement extrêmement forte pour attribuer quand même la paternité de leurs écrits à l’apôtre Paul.
J’ai donc proposé, il y a déjà longtemps, dans une série d’articles parus dans la revue Lumière et Vie [2], de les considérer comme les premières lettres de Paul , celles d’un homme encore très marqué par son judaïsme natif. Je ne vais pas vous proposer une démonstration, parce que mon sujet ne porte pas sur les Pastorales, mais sur les femmes dans les Pastorales.

B – Les femmes en 1 Timothée et Tite
L’exhortation de Tite est relativement brève : « Que pareillement les femmes âgées aient le comportement qui sied à des saintes : ni médisantes, ni adonnées au vin, mais de bon conseil ; ainsi elles apprendront aux jeunes femmes à aimer leur mari et leurs enfants, à être réservées, chastes, femmes d’intérieur, bonnes, soumises à leur mari, en sorte que la parole de Dieu ne soit pas blasphémée » (2,3-5).
Trois points ressortent immédiatement relativement aux jeunes femmes : la soumission au mari, la consécration aux enfants, la limitation de l’activité à la sphère privée. Ces conditions sont celles qui permettent à la parole de Dieu de n’être pas blasphémée, autrement dit aux chrétiens de trouver leur place dans la société : tout simplement parce que, ce faisant, ils se conforment aux critères de la dite société.
L’exhortation de 1 Tm est plus longue : « Que les femmes, de même, aient une tenue décente ; que leur parure, modeste et réservée, ne soit pas faite de cheveux tressés, d’or, de pierreries, de somptueuses toilettes, mais bien plutôt de bonnes œuvres, ainsi qu’il convient à des femmes qui font profession de piété. Pendant l’instruction, la femme doit garder le silence, en toute soumission. Je ne permets pas à la femme d’enseigner ni de faire la loi à l’homme. Qu’elle garde le silence. C’est Adam en effet qui fut formé le premier, Ève ensuite. Et ce n’est pas Adam qui se laissa séduire, mais la femme qui, séduite, se rendit coupable de transgression. Néanmoins elle sera sauvée en devenant mère, à condition de persévérer avec modestie dans la foi, la charité et la sainteté » (2,9-15).
A nouveau, trois points que je synthétise ainsi : modestie, silence, maternité. C’est encore une fois conforme à l’air du temps : la femme est invitée à rester chez elle, à gérer la maison, et n’a de relations avec l’extérieur que par la médiation de son mari auquel elle doit rester soumis. La spécificité est que ces règles propres à la société sont maintenant justifiées religieusement par une lecture « appropriée », si je puis dire, du récit de la Genèse sur la faute.
Il faudrait examiner bien d’autres passages des Pastorales, mais je n’en visiterai plus qu’un qui pose une question : existait-il à l’époque des diaconesses ? La question naît d’une certaine lecture de 1 Tm 3,10-11, alors que Paul est en train de parler des diacres : « on commencera pas les mettre à l’épreuve, et ensuite, si on n’a rien à leur reprocher, on les admettra aux fonctions de diacres. Que pareillement, les femmes soient dignes, point médisantes, sobres, fidèles en tout ». Les femmes des diacres ou les diaconesses ?
Je serais assez favorable à la deuxième interprétation, à condition de bien comprendre que les diacres, et donc aussi les diaconesses, représentent plutôt à l’époque (voir le fond d’Ac 6) des préposés à l’administration, des sortes d’économes. Revenons à 1 Tm. S’il s’était agi des « femmes des diacres », on aurait attendu une expression comme « leurs femmes » ; la répétition du ôsautos au début du verset 11, après celui du verset 8, suggère aussi un parallélisme ; en outre, les exigences adressées à ces femmes sont très proches de celles qui s’adressent aux diacres : sobriété, dignité, ce qui suggère qu’elles ont le même statut.
En Rm 16,11 justement, Phoebé « sert » l’église de Cenchrée : quand on sait l’accueil économique réservé par certaines femmes à la prédication paulinienne (cf. Lydie en Ac 16,14-15), Phoebé pourrait bien être une diaconesse, au sens d’une personne chargée de l’administration économique de la communauté. L’existence de telles diaconesses, qui semblent avoir très vite disparu, serait le signe que le statut n’est pas aussi confiné en judaïsme qu’il ne l’était alors dans le monde hellénistique : sans doute le monde romain a-t-il changé un peu la donne.
Voilà d’où Paul part, que ces textes soient ou non de lui : une vision très classique des femmes, que l’on pourra dire réductrice, en même temps qu’une reconnaissance de son rôle de gestionnaire. Il faudrait maintenant voir l’évolution éventuelle de l’apôtre, et pour cela examiner ses lettres dans l’ordre supposé où elles ont été écrites : c’est là que le bât blesse, parce que personne n’est d’accord sur une chronologie de Paul et de ses lettres. Les différences ne sont toutefois pas considérables, et je vais m’arrêter un moment sur ce sujet.

II. Quelques remarques sur le sujet féminin dans les lettres de Paul

La chronologie la plus traditionnelle classe les lettres de Paul dans l’ordre relatif suivant, en partant des plus anciennes (compte non tenu des Pastorales) : 1 et éventuellement 2 Thessaloniciens ; Galates, 1 et 2 Corinthiens, Romains, Philippiens, Philémon, et Colossiens et Éphésiens lorsque l’on en admet l’authenticité.
En termes de chronologie absolue, la plus ancienne, 1 Th, est datée du début des années 50, les « grandes lettres » des années 55-58, et le reste des années 60.
Je ne vais pas discuter tout cela, ce qui nous éloignerait de notre sujet, mais essayer de comprendre où Paul peut évoquer les femmes : on peut bien sûr rechercher ce qu’il en est de l’utilisation des termes femme, épouse, fille, mère, mais il faut aussi penser que Paul peut aussi parler directement de telle ou telle femme. Dans le premier cas, vous allez constater que :
1. Le terme « femme », très présent dans les Pastorales comme dans les lettres aux Corinthiens, aux Romains, Éphésiens et Colossiens, est pratiquement absent des lettres aux Thessaloniciens (1 mention peu significative de la femme enceinte en 1 Th 5,3) et n’est présent en Galates en dehors de 3,28, mention sur laquelle je m’arrêterai plus loin, que dans l’allégorie du chapitre 4, dont on ne peut dire qu’il parle de la condition féminine.
2. Le terme « épouse » ne se trouve qu’une fois en Galates, toujours dans le même chapitre 4.
3. Celui de « fille » ne se rencontre qu’à trois reprises, uniquement dans les lettres aux Corinthiens.
4. Enfin celui de « mère », présent à trois reprises dans les Pastorales, n’est présent qu’une fois en 1 Th, Ga (une fois de plus dans le chapitre 4) et Rm, et deux en Éphésiens.
En définitive, il n’y a pas de surprise : le thème féminin n’est jamais traité pour lui-même, il est relativement rare et ne prend quelque ampleur que dans les Pastorales, des lettres où il est surtout question de l’organisation des communautés et de leur vie interne, dans les lettres aux Corinthiens ou aux Romains, où la dimension ecclésiale est importante, et dans les lettres de la captivité où apparaissent des exhortations et des recommandations domestiques. Rien dans les lettres aux Thessaloniciens, pratiquement rien en Galates, à l’exception de la mention de 3,28 qui mérite que l’on s’y arrête brièvement.
Mais ce constat est un peu réducteur : il ne faut pas oublier que Paul peut évoquer directement les femmes sans passer par l’un des termes déjà évoqués. Tel est bien le cas en Ph 4,1-3, où sont mentionnées Évodie et Syntychè, qui ont « assisté Paul dans sa lutte pour l’évangile » : j’y reviendrai plus loin.

III. La femme de Ga 3,28

La lettre aux Galates me semble constituer une lettre intermédiaire dans la carrière de Paul, et je la date de l’année 53, donc quelques années avant la lettre aux Romains : s’il est vrai que ces deux lettres sont proches par certains thèmes et références, le traitement des sujets et leur finalité, je pense ici à la justification par la foi, y est très différent [3].
Le thème féminin est, je l’ai rappelé, très présent en Ga 4, mais à titre métaphorique : les femmes représentent ici des alliances, et ce chapitre ne nous apprend donc rien sur la manière dont Paul voit les femmes. En revanche, nous rencontrons une mention importante, celle de 3,28 : « Il n’y a ni Juif ni Grec, il n’y a ni esclave ni homme libre, il n’y a ni homme ni femme ; car tous vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus ».
Ce verset récapitule toutes les grandes divisions sociales, et en particulier celle qui existe entre l’homme et la femme. Bien sûr, Paul plaide pour l’unité, mais il ne remet pourtant pas en cause ces distinctions : il en fait le constat, il ne veut pas qu’elles se transforment en oppositions, et il invite donc ses lecteurs à y reconnaître une complémentarité, ou au moins une communion possible « en Christ ». Force est de le constater : le temps n’est pas encore venu d’une réflexion autonome sur la femme comme telle.
C’est donc bien avec les lettres aux Corinthiens que le « sujet féminin » va prendre une consistance nouvelle.

IV. Les femmes dans les lettres aux Corinthiens

Ces lettres sont cruciales, non seulement parce qu’elles recèlent le plus grand nombre de références aux femmes, à leur statut dans la société, au rapport que Paul entretient avec elles, mais parce qu’elles ont largement contribué, avec la lettre aux Éphésiens, à donner une réputation de misogyne à l’apôtre. Je reviendrai plus loin rapidement sur Éphésiens, mais je commence donc par évoquer quelques mentions controversées.
A – 1 Co 11 et 1 Co 14
Passage extrêmement difficile que celui de 1 Co 11,2-15, dans lequel Paul lui-même semble perdu si l’on en juge par la conclusion : « au reste, si quelqu’un se plaît à ergoter, tel n’est pas notre usage, ni celui des églises de Dieu ».
La question est celle de la tenue des hommes et des femmes dans l’assemblée, et plus précisément le port des cheveux longs : sont-ils tolérables de la même manière pour les hommes et les femmes ? Et sinon, quels critères faut-il respecter ? Sur le fond, la réponse est simple : les hommes doivent couper leurs cheveux, les femmes doivent au contraire les garder longs…
Quant à l’argumentation, et donc aux critères, elle est beaucoup plus compliquée et n’est pas sans rappeler ce que Paul a déjà dit (ou dira) en 1Tm 2,9-15 ; je ne vais pas m’y attarder : il est très clair que ces usages, auxquels Paul veut donner une valeur forte, sont tout à fait contingents et Paul le reconnaît en fait dans les versets 13-15. La seule valeur qui en soi garde une justification, c’est l’importance de l’ordre, de la différenciation , idées très classiques dans la tradition juive [4] : s’il est clair que cet ordre, qui soumet la femme à l’homme, peut être discuté dans ses applications, il garde son importance au plan spirituel et théologique.
Et nous voici avec le fameux passage de 1 Co 14,34-35 : les femmes sont invitées à se taire dans l’assemblée, à se tenir dans la soumission, à s’instruire ou s’informer auprès de leurs maris !
Ici, deux remarques s’imposent d’emblée :
1. Cette invitation apparaît parfaitement contradictoire avec la reconnaissance de l’office prophétique accordé plus haut à la femme (11,5).
2. Les deux ou trois versets à considérer rompent le fil de la pensée. Il est en effet question de l’ordre qui doit régner dans l’expression prophétique dans les versets 31-33, et les interlocuteurs sont désignés par vous ; c’est à nouveau du bon ordre de l’expression prophétique dont il est question à partir du verset 37 et jusqu’à la fin du chapitre : ce passage sur les femmes est donc singulier, à moins de considérer qu’elles sont spécifiquement à l’origine de ces problèmes d’ordre, ce que rien n’indique par ailleurs.
Les commentateurs les plus anciens n’avaient pas encore de scrupules à accepter ces versets tels quels, et ils expliquaient par exemple que l’évocation de la prophétie en 11,5 avait un caractère hypothétique, ou que ces versets s’accordent une fois de plus avec 1 Tm 2,11-15, des versets d’inspiration judéo-chrétienne [5].
Mais, quoi qu’il en soit de la date de 1 Tm, il est certain que 1 Corinthiens ne se situe plus dans la même ligne, et que ces versets détonnent. Aujourd’hui donc, les commentateurs n’hésitent plus à parler d’interpolation : ils y sont d’autant plus invités que ces versets sont repoussés après le verset 40 dans la tradition textuelle occidentale, marquant la gêne qu’ils provoquaient déjà alors. Tel est le constat de C. Senft : « Les versets 33b-36 sont une interpolation » , et il se justifie à partir des raisons que je viens de donner plus haut [6].
Une autre possibilité, envisagée par certains, serait que les versets incriminés représentent la position des adversaires de Paul, et qu’ils seraient suivis de la réponse de Paul. Il reste qu’en toute occurrence, ces versets ne représentent pas la pensée de l’apôtre.
En définitive, ni 1 Co 11 ni 1 Co 14 ne nous apprennent grand chose sur la manière dont Paul perçoit vraiment les femmes. Il en va très différemment avec 1 Co 7.
Ce chapitre est particulièrement dense et compliqué, avec une organisation interne qu’il est difficile de suivre, voire même de repérer : il m’est donc impossible de vous en proposer une lecture détaillée, et je vais me contenter de mettre en valeur deux points sur le sujet qui nous occupe. La première chose à rappeler est que Paul n’est pas un révolutionnaire, qu’il accepte habituellement les contraintes politiques et sociales de son temps : la chose est particulièrement manifeste dans l’exhortation deux fois répétée « Que chacun demeure dans la condition où l’a trouvé l’appel de Dieu » (v. 17 et 24). Il est tout à fait possible de trouver, si on le juge nécessaire, des justifications au « conservatisme » paulinien (la fin des temps est proche, v. 29, ou l’attachement à l’ordre, déjà évoqué et qui sera à nouveau marqué en 14,33), mais c’est un fait : Paul se situe à l’intérieur d’une société dont il ne remet pas en cause les fondements, pas même celui de l’esclavage.
Dès lors, et c’est la deuxième chose à noter, la place qu’il donne à la femme par rapport à l’homme, place largement établie depuis des siècles et que seul le monde romain commençait depuis l’Empire à remettre en cause, n’en est que plus extraordinaire : elle est vraiment la correspondante de l’homme. Je fais ici allusion aux sept premiers versets du chapitre, dans lesquels Paul applique systématiquement à la femme ce qui est dit de l’homme et réciproquement : « Toutefois, à cause des débauches, que chaque homme ait sa femme et chaque femme son mari. Que le mari s’acquitte de son devoir envers sa femme, et pareillement la femme envers son mari. La femme ne dispose pas de son corps, mais le mari. Pareillement, le mari ne dispose pas de son corps, mais la femme etc. » (v. 2-4). Et le même équilibre se retrouve dans les versets 12-13 à propos de séparation.
C’est cet équilibre qui me fait parler d’amitié, alors même qu’il est question de conjugalité. Parce que, même si la situation des femmes mariées avait évolué dans la société, romaine en particulier, on ne pouvait certainement pas parler de réciprocité et d’équilibre. Lesquels étaient par contre particulièrement vantées dans le cadre de l’amitié, en particulier par Aristote [7]. Paul place donc les femmes comme des amies de l’homme.
C – 1 Co 16… et Rm 16 ou Ph 4
En évoquant 1 Co 7, je viens de montrer que les femmes étaient les meilleures amies de l’homme, mais non pas encore de Paul. En revanche, la finale de la première aux Corinthiens le manifeste, surtout si on lui adjoint la finale de Romains ou celle de Philippiens : ce sont là des interpellations directes qui nous en apprennent beaucoup [8]. La finale de Romains évoque de nombreux correspondants, parmi lesquels beaucoup de femmes, et on va voir que celle de Philippiens dit quelque chose d’important de deux d’entre elles.
En 1 Co 16, la femme est la fameuse Prisca, mariée à Aquilas. On sait qu’Ac 18 évoque aussi ce couple, et la manière dont Paul l’aurait connu : au travers d’une activité commune, celle de réparateurs ou fabricants de tentes. On les trouve mentionnés en Rm 16,3 et en 2 Tm 4,19 (une lettre que je date de la fin des années 40), et les deux fois, Prisca est nommée avant Aquilas, ce qui n’est pas du tout insignifiant pour l’époque [9]. Rm fait des deux, et je dis bien des deux, les coopérateurs ou collaborateurs de Paul, titre particulièrement enviable dans la bouche de l’apôtre : Urbain, inconnu par ailleurs, le reçoit en Rm 16,9, Timothée en Rm 16,21 et Tite en 2 Co 8,23, Clément et quelques autres en Ph 4. Comme on va le voir plus loin avec Ph 4, c’est finalement un vrai titre d’honneur qui touche aussi bien des femmes que des hommes.
En Rm 16, on remarque en outre que la première personne mentionnée, de manière extrêmement favorable, est Phoebé, une diaconesse : pour beaucoup de commentateurs, elle a dû porter la lettre que Paul adresse aux Romains, mais il reste qu’elle joue donc un rôle de premier plan. Et plus loin se trouvent évoquées Junias (v. 7), rangée au rang même des apôtres, Marie (v. 6) et Persis (v. 10), qui se seraient beaucoup fatiguées au service du Seigneur, puis « Philologue et Julie, Nérée et sa sœur, Olympas et tous les saints qui sont avec eux » (v. 15). Manifestement, les femmes sont très présentes et vues comme égales aux hommes, y compris dans les plus hautes fonctions.
Montrons-le plus encore avec Ph 4. Il s’agit des versets 2-3 : « J’exhorte Évodie comme j’exhorte Syntychè à vivre en bonne intelligence dans le Seigneur. Et toi de ton côté, Syzyge, vrai ‘compagnon’, je te demande de leur venir en aide : car elles m’ont assisté dans la lutte pour l’Évangile, en même temps que Clément et mes autres collaborateurs, dont les noms sont écrits au livre de vie ». Évodie et Syntychè ont donc « assisté » Paul dans la lutte pour l’évangile, en fait le grec dit littéralement qu’elles se sont comportées comme des athlètes à ses côtés ; et Paul, en les comparant à Clément et à d’autres, leur assure le titre de collaborateurs, celui-là même qui a été évoqué plus haut avec Rm 16. Pour Murphy O’Connor [10], le fait que la remontrance soit publique suggère que la dispute était publique, et il n’y voit d’autre explication que celle d’une dispute entre deux femmes dont chacune est à la tête d’une église domestique.
Terminons ce tour d’horizon en nous penchant maintenant, trop rapidement encore une fois, sur la condition des femmes dans les lettres de la captivité, surtout qu’elles sont pour une large part dans la fausse réputation de misogynie faite à Paul.

V. Les femmes dans les lettres de la captivité

Ces lettres font mention des femmes dans ce que l’on appelle « les tabelles », ou bien aussi les « codes de devoir » [11], autrement dit les règles de vie proposées par l’apôtre pour la vie domestique ou ecclésiastique. Ces règles forment un genre littéraire précis, relativement standardisé, et l’on est donc conduit à se demander si Paul reçoit ce qu’il y dit des femmes ou s’il est créatif.
Pour certains, tel Dibelius, il faut y reconnaître des éléments de la morale commune gréco-latine, en particulier stoïcienne, superficiellement christianisés ; pour d’autres, il faut accepter l’originalité chrétienne de ces tabelles, avec par exemple le caractère réciproque et « dans le Seigneur », des obligations. Ce sont vers ces derniers que penche ma lecture, en particulier du fait d’Ep 5, passage sur lequel je vais maintenant m’arrêter. Vous le savez, en Col 3,18-19 comme en Ep 5,21-33, ce qui est dit des femmes, en particulier l’invitation à la soumission, n’a cessé de générer un anti-paulinisme forcené et… totalement injuste. Je ne vais pas entrer dans cette stérile controverse, et je me contente de rappeler, au sujet d’Ep 5, le passage le plus conséquent, que Paul :
1. Invite préalablement à la soumission réciproque tout le monde en 5,21, et pas seulement les femmes.
2. Pour cette raison très probable que la soumission n’est pas ici une donnée sociale, mais l’acceptation d’un ordre voulu par Dieu. Dans la tradition juive en effet, et nous en avons une illustration dès le premier récit de la Genèse, Dieu trie et sépare, il met de l’ordre dans le tohu-bohu, il est un « dieu non de désordre, mais de paix ». Rappelons d’ailleurs que le verbe grec utilisé pour dire « soumettre » contient en lui-même l’idée d’ordre, ce qui n’est pas le cas du français.
3. Presse les hommes d’aimer leurs femmes, du même amour dont le Christ aime l’Église, ce qui représente quand même pour eux et pour toute époque une exigence considérable. C’est cette exigence qui me fait douter que Paul se contente de christianiser des recommandations classiques.
Le verset 33, trop souvent oublié, me semble dire l’essentiel de la pensée de Paul : « que chacun aime sa femme comme soi-même, et que la femme révère son mari ». La femme y est un vrai sujet, autonome, bénéficiant de l’amour que son mari se porte aussi à lui-même : je vois là à nouveau une forme de l’amitié, quand bien même le thème de la soumission, de caractère plus culturel [12], pourrait paraître l’invalider.

VI. Conclusion

Il est des réputations dont on dit qu’elles « collent à la peau » : telle est celle de misogyne pour Paul. Il ne suffit pas de dire qu’elle serait le résultat de l’agrégation de lettres non pauliniennes aux lettres authentiques, parce que rien n’assure que les lettres dénoncées ne soient pas de Paul, mais aussi parce qu’il existe des passages troublants dans des lettres aussi assurées que 1 Corinthiens.
Mais si l’on s’attache au contexte de chacun des passages dénoncés, si l’on tient compte de l’air du temps, si l’on cherche à établir un constat global, la vérité commande de reconnaître que l’apôtre Paul donne aux femmes un statut extrêmement élevé, différent certes mais néanmoins comparable à celui de l’homme, et que le rapport hommes/femmes est plus proche de l’amitié que de la soumission, quoi qu’il en soit de certains passages de ses lettres. Paul se révèle ainsi bien plus accueillant et positif pour elles qu’on ne l’était généralement à son époque. En définitive, certainement pas misogyne, bien plutôt philogyne : c’est ce que j’ai voulu marquer en assurant que les femmes étaient « les meilleurs amis » de Paul.
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notes:
[1] Michel Gourgues, Les Deux « Lettres à Timothée » ; La lettre à Tite, Commentaire biblique, Nouveau Testament (Paris : Les éditions du Cerf, 2009)
[2] Hervé Ponsot, “Les Pastorales seraient-elles les premières lettres de Paul ?,” Lumière et Vie, no. 231, 232 et 233 (1997)
[3] Voir Hervé Ponsot, Abraham dans la théologie paulinienne Rom IV. Gal III : fonction littéraire, historique et théologique de la paternité d’Abraham (Institut catholique de Paris, Université Paris-IV Sorbonne, 1985)
[4] Jerome Murphy O’Connor, Paolo e le donne, 1er éd. (Assisi : Cittadella, 2006), insiste sur la dimension de différenciation sexuelle dans ce passage.
[5] Voir par exemple A. Robertson et A. Plummer, A Critical and Exegetical Commentary on the First Epistle of Saint Paul to the Corinthians, coll. ICC. Édimbourg, T&T Clark, 1983, ad loc.
[6] C. Senft, La première épître de saint Paul aux Corinthiens, Coll. Commentaire du Nouveau Testament, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1979, ad loc.
[7] Je pense bien sûr ici aux chapitres 8 et 9 de l’Éthique à Nicomaque, dans lesquels on trouve par exemple : « Car l’amitié consiste plutôt à aimer qu’à être aimé ».
[8] Sur ces passages et ces points, on pourra consulter Jerome Murphy O’Connor, Paolo e le donne, 1er éd. (Assisi : Cittadella, 2006).
[9] Murphy O’Connor, p. 15, y insiste aussi.
[10] op. cit. p. 14.
[11] Marie-Louise Lamau, Des chrétiens dans le monde. Communautés pétriniennes au 1er siècle, Coll. Lectio Divina n? 134, Paris, Cerf, 1988, p. 153-230.
[12] Murphy O’Connor, ibid., ne retient pas l’authenticité d’Éphésiens, mais bien celle de Colossiens. Il explique le « recul » de Colossiens pour des raisons conjoncturelles, sans que soit remise en cause l’égalité fondamentale entre hommes et femmes, si chère à Paul.

BARNABÉ ET PAUL

10 juin, 2011

du site:

http://codexbezae.perso.sfr.fr/hebr/bar_saul.html

BARNABÉ   ET   PAUL

On retrouve Barnabé plus tard, présentant Saul aux Apôtres pour leur présentant sa conversion. Il précisait que Saul avait « vu le Seigneur en chemin »(Ac 9,27).
Il est à présumer que le récit tout entier de la conversion de Saul, tel qu’il est raconté au début de ce même chapitre 9 est dû à Barnabé qui en aurait été témoin. Dans les deux autres récits de sa conversion (Ac ch22 et 26), Saul témoignait lui-même avoir simplement entendu une voix au moment où il était ébloui. Pour Barnabé, cet éblouissement était signe d’une manifestation de Jésus, de même valeur que s’il avait vu le Ressuscité.    
Ensuite Barnabé reçut une mission de confiance car il fut envoyé de Jérusalem à Antioche par les Apôtres; ceux-ci avaient entendu dire qu’à Antioche des disciples, originaires de Cyrénaïque et de Chypre, s’adressaient désormais non à des Grecs d’origine juive mais à des païens (Ac 11,20-22D05). C’est Pierre qui avait initié le mouvement en entrant, à Césarée, sous le toît du centurion Corneille, un païen considéré par les Juifs comme un craignant-Dieu. Barnabé fut choisi probablement parce qu’étant, lui aussi originaire de Chypre, il devait savoir parler Latin et Grec. Arrivé à Antioche il se réjouit de ce qu’il y vit et exhorta les disciples à demeurer attachés au Seigneur par la consécration du coeur. Le terme « consécration » appartient au langage liturgique du Temple, avec les pains de consécration qui se trouvaient sur l’autel dans le Sanctuaire. Pour Barnabé, il était possible d’appartenir au Seigneur par la consécration du coeur, lieu de la volonté et des intentions humaines. Et Luc d’ajouter à son propos une rare éloge :
        Et parce qu’il était un homme bon, plein d’Esprit Saint et de foi s’ajoutait aussi une foule considérable au Seigneur.(Ac 11,24).
    Dans la foulée, Barnabé alla chercher Saul à Tarse puis ils demeurèrent au milieu des disciples une année environ. L’évangélisation des Païens inaugurée par Pierre se poursuivit à Antioche où elle fut encouragée par Barnabé puis, avec lui, Saul.  

Jérusalem et Antioche
    La conversion de Saul semble avoir eu lieu dans l’année sabbatique 33-34 et la rencontre de Pierre et Corneille avant le départ de l’armée romaine en 38 date de la nomination d’Agrippa comme roi. Les récits s’enchaînent ensuite avec des repères qui permettent de les dater avec une relative exactitude :    Or les disciples selon leurs ressources décidèrent que chacun d’entre eux enverrait pour la collecte aux frères qui se trouvaient en Judée. Aussi firent-ils ainsi en envoyant à l’intention des anciens par l’intermédiaire de Barnabé et de Saul. Ac 11, 29-30
    Ce récit prècède la mort d’Agrippa I survenue en 44 et racontée au chapitre suivant. D’ Antioche où ils se trouvaient, Barnabé et Saul reçurent mission de porter des secours à l’église de Judée. Des frères en étaient descendus qui avaient dû faire part des difficultés rencontrées à Jérusalem: l’année 41-42 avait été une année sabbatique et celle qui suivait, 42-43 jusqu’à la soudure avec la nouvelle moisson était réputée dure à vivre. Dans ce contexte l’annonce par un frère prophète, Agabos, d’une famine généralisée avait peut-être aidé à motiver la communauté d’Antioche à manifester sa solidarité. Une mention qui paraît nettement apocryphe dans le texte des Actes dit en substance que cette famine advint sous Claude. Il y eut une famine qui, sous cet empereur, s’étendit de l’Orient à l’Occident vers 48-49 et qui fut mentionnée par plusieurs auteurs. Toutefois les évènements des Actes se situaient quatre ans plus tôt et si Barnabé et Saul furent dépêchés à Jérusalem avec des secours, ce n’était certainement pas en prévision d’une famine qui devait survenir mais bien parce que celle-ci sévissait déjà en Judée (et non à Antioche) et avec elle la persécution contre l’église menée par Agrippa.
    (Ac 12/24 ) la parole du Seigneur croissait et se multipliait; alors Barnabas et Saul se détournèrent de Jérusalem après avoir mené à bien leur collecte prenant avec eux Jean surnommé Marc.13:1 Or il y avait à Antioche  dans l’église d’alors, des prophètes et des didaskales; parmi eux Barnabas et Siméon et le surnommé Niger,  Lucius Cyrénéen, et Manahen d’Hérode et frère de lait du tétrarque, et Saul.  2 Comme ils célébraient le culte du Seigneur et jeûnaient, l’Esprit Saint dit:  Distinguez enfin pour moi Barnabas et Saulen vue de l’oeuvre à laquelle je les ai appelés.3 Or jeûnant et tous priant ils leur imposèrent les mains. 4 Eux donc, envoyés par l’Esprit Saint, descendant à Séleucie, s’embarquèrent de là pour Chypre.        
    Barnabé était nommé le premier, comme chef de la communauté d’Antioche, Saul comme le benjamin, après tous les autres.  Il y avait une nette différence d’âge entre eux.

Paul et Barnabé ou Barnabé et Paul ?

LE  MAGE  DE  CHYPRE

Mais ensuite, à Chypre, Paul s’exaspéra contre le mage Etoimas (selonD05, ailleurs Elymas) – que rendait jaloux l’adhésion à la foi au Christ du proconsul Sergius Paulus qui jusque là s’était fié à lui. Saul plongea dans l’éblouissement ce mage qui semblait relever d’un culte solaire; celui de Mithra avait été propagé en Italie et dans l’armée romaine par les corsaires de Cilicie dont la côte était la plus proche du Nord de Chypre. Ce dieu d’origine persane était associé au soleil et au feu et l’aveuglement dans le quel Paul plongea le mage pour l’empêcher, justement, de voir le soleil, était un signe de puissance chargé d’un sens symbolique fort, propre à interpeller le proconsul. Homme avisé celui-ci se laissa convaincre par Paul. Comble de l’ironie, ce mage qui était Juif s’appelait « Bar-Jésus ». Paul n’imaginait pas qu’en le maîtrisant il pouvait déclancher les foudres du dieu.    
        Comble de l’ironie  le nom grec de ce mage rapelle étrangement celui d’un autre mage Juif et également originaire de Chypre, Atomos  dont parle Flavius Josèphe (AJ XX,7). Atomos qui signifie « l’indivisible » a donné le mot d’atome. Mage d’origine Juive, Chypriote , connaissant avec le Grec le Latin et l’Araméen il devait se déplacer entre les différents lieux de culte. Les auteurs l’ont souvent associé  à Simon qui avait suivi les Apôtres en Samarie et qui se rendit à Rome où non seulement il fit école mais se fit prendre pour un dieu (Justin: dialogue avec Tryphon, Irénée, Adv. Haer. I. xxiii. 1.). Cette association était très ancienne car elle s’est répercutée dans les manuscrits des Antiquités dont plusieurs témoins ont Simon à la place d’Atomos. 
Or une association d’Atomos avec le conseiller initial de Sergius Paulus semblerait bien davantage indiquée. Il était connu du procurateur de Judée, Felix, qui le manda auprès de Drusilla l’épouse du roi d’Emèse pour la décider à l’épouser en apaisant ses inquiétudes religieuses ( Ant Juives 20[.7.2].142). Drusilla de la dynastie Hérodienne avait épousé un souverain circoncis (ou qui avait accepté pour elle la circoncision). Emèse, ville de Syrie (aujourd’hui Homs), vouait un culte au dieu solaire sur une aérolithe noire, symbole du soleil invaincu. Une pierre semblable était aussi l’objet de culte dans le temple d’Aphrodite sur l’île de Chypre, à Paphos. Le mage eut raison des craintes de Drusilla car elle épousa Félix. C’est auprès de lui qu’ elle entendit Paul, vers les années 58-60.  Inscription de la famille de Sergius Paulus,Antioche de Pisidie. Yalvac Museum. 

Jean surnommé Marc
    Comme ils laissaient l’île derrière eux, Marc qui les y avait suivis, retourna à Jérusalem. C’était le fils d’une certaine Marie qui avait une maison à Jérusalem (Ac 12,12), où dans l’année post-sabbatique 41/42, Barnabé et Paul montèrent des subsides pour la communauté; en rentrant à Antioche ils emmenèrent Jean-Marc avec eux. Plus jeune que son parent Barnabé (Col 4,10) il n’apparaissait pas sur la scène auparavant et il semble que ce soit à Chypre que, comme Barnabé et Paul il ait reçu un surnom romain, Marcus (= marteau). Il les quita lorsqu’ils laissèrent l’île après l’épisode du mage pour retourner à Jérusalem où ils se retrouvèrent lors du premier « concile » apostolique. Il les suivit à nouveau lorsqu’ils rentrèrent à Antioche mais fut prétexte à la séparation de Paul et Barnabé.  Il n’en devint pas moins, un peu plus tard, collaborateur de Paul au même titre que Luc selon Philémon 24.
    Doit-il être confondu avec celui que Pierre appelait  « mon fils » (1P5:13) ?
    Doit-il être pris pour l’évangéliste Marc? Oui dans la mesure où celui-ci s’est référé à deux ou trois reprises à l’épître aux Hébreux. Non dans la mesure où Jean-Marc devait être familier des lieux tandis que l’évangéliste semblait mal connaître la topographie de Judée et de  Galilée ou l’histoire d’Antipas.
    

Zeus et Hermès
    A Iconium où ils restèrent un temps assez long, ils se firent jeter dehors et de là, à Lystre, Paul accomplit un second signe en remettant sur ses pieds un impotent de naissance. Devant le prodige on allait leur offrir un sacrifice:
    Ils appelaient Barnabas Zeus, et Paul Hermès, parce qu’il était le prince de la parole. Ac 14:12. Barnabé nommé en premier , considéré comme le chef était comparé au dieu de l’Olympe; Etant le plus âgé des deux il était l’Ancien auquel hommage était rendu. Paul , lui qui avait accompli un signe, était comme son messager gratifié du don de la parole; et c’est Barnabé nommé encore en premier qui, alors, reprit les choses en mains; lui serait dû le discours qui suit:
    Ac 14/ 14 ” Or Barnabas et Paul, l’ ayant appris, déchirèrent leurs vêtements, et s’élancèrent vers la foule en vociférant et criant: « hommes qu’allez-vous faire? Nous aussi, nous sommes des hommes de même pathos que vous; vous apportant la bonne nouvelle de Dieu, de sorte que loin de ces vanités vous vous tourniez vers le Dieu vivant, qui a fait le ciel, la terre, la mer, et tout ce qui est en eux. 16 Lui, dans les générations passées, a permis chez les nations de marcher selon des voies propres, 17 et certes il n’est pas resté lui-même sans témoignage, dans sa bienfaisance envers vous, du ciel, il a dispensé des pluies et des saisons fertiles et vous a comblés de nourriture , et de joie vos coeurs. 18 Puis ayant dit cela, avec peine ils empêchèrent la foule de leur offrir un sacrifice.”
    De par son origine lévitique Barnabé, plus sensible que Paul à ce genre d’atteintes aurait-il eu une réaction plus rapide? L’offrande à des faux dieux le faisait spécialement trembler lorsqu’il reprenait le geste de déchirer son vêtement à l’image du grand-prêtre offensé par un acte d’idolâtrie. Dans ses paroles, Barnabé, (si le discours est bien de lui) s’affirmait de « même pathos » que les Lycaoniens, soit comme eux, soumis aux évènements extérieurs et susceptible de souffrir. Aux dieux n’étaient pas reconnu ce pathos des humains. Le discours était ensuite tourné vers le Dieu Vivant, selon une expression qui se retrouve en I Th1,9 et désignant celui qui dispense la vie à toute chair; ce titre était audible en monde païen.    

 Concile Apostolique
    Au chapitre XV, 14 ans après sa conversion (selon Gal 2,1), dans l’année sabbatique 47-48 Paul se retrouva à nouveau avec Barnabé à Jérusalem; s’en suivit un concile avec les Apôtres. Barnabé était nommé en premier au moment de témoigner devant l’assemblée, comme dans la lettre de recommandation adressée aux différentes églises. Envoyé comme représentant de la communauté de Jérusalem à Antioche, sa primauté lui était gardée, indépendamment de l’ascendant pris par Paul, même si celui-ci écrivait:
     » Ensuite 14 ans passant, je suis à nouveau monté à Jérusalem avec Barnabé, emmenant aussi Tite…Et reconnaissant la grâce qui m’avait été donnée, Jacques, Céphas et Jean, considérés comme les colonnes nous donnèrent la main à moi et à Barnabé en signe de communion pour que nous allions vers les païens tandis qu’ils iraient vers la circoncision.“ Gal 2,1 et 9 .   Paul se présentait lui-même avant Barnabé ce qui exprime bien son état d’esprit. D’autant qu’au verset 13 il lui reprochait de suivre l’attitude hypocrite de Pierre qui ne s’associait pas au repas des païens en présence des envoyés de Jacques. Barnabé avait opté pour ce parti, vraisemblablement pour ne pas braquer les envoyés de Jacques. Mais Paul ne supportait pas la compromission. Lorsque Barnabé souhaita qu’à nouveau Jean-Marc, son cousin germain (col 4,10) les accompagne, la tension entre eux atteint son paroxysme; Barnabé décida de partir de son côté en emmenant Jean-Marc.  Se séparant de Paul il se rendit à Chypre, sa patrie, et Luc ne fera plus mention de lui, tournant ses regards vers Paul. Dans sa lettre aux Colossiens Paul rappellera aux frères de Colosses ce temps où, avec Barnabé, il fondait et visitait les églises.

    L’auteur de l’épître aux Hébreux
    L’épître aux Hébreux  s’achevait sur un Amen final. Mais Paul rajouta sa propre salutation, celle qui se retrouve à la fin de chacune de ses lettres « la grâce soit avec vous ». Il avait recueilli de Barnabé cette épître précieuse et dont. Clément d’Alexandrie  disait: “un témoin apostolique, Barnabas, un des 72 et  collègue de Paul qui parlait en ces mots: Avant de croire en Dieu le fondement de notre coeur était instable, un temple fait de mains humaines” (.Stromates 2.20). C’est ainsi que Clément d’Alexandrie qui identifiait  en Barnabé un témoin de la première heure  lui référait un thème central de l’épître aux Hébreux que Tertullien lui attribuait nominativement. Les indices littéraires permettant de la lui reconnaître  ont été regroupés dans la première partie des annotations accompagnant la traduction.

Commentaire de l’Epitre aux Corinthiens – Chapitre XV sur la Résurrection (5/9)

13 mai, 2011

du site:

http://www.cathoweb.org/catho-bliotheque/lecture-spirituelle/docteurs-et-pere-de-l-eglise/commentaire-de-l-epitre-aux.html

Commentaire de l’Epitre aux Corinthiens – Chapitre XV sur la Résurrection (5/9)

Publié le 11 mai 2009 par Jean-Baptiste Balleyguier
 
Leçon 5 : 1 Corinthiens XV, 35-38 — Comme la semence…

35. Mais, dira quelqu’un comment les morts ressuscitent-ils, et quel sera le corps dans lequel ils reviendront ?
36. Insensé que vous êtes ! ce que vous semez ne prend pas de vie s’il ne meurt auparavant.
37. Et quand vous semez, vous ne semez pas le corps qui doit naître, mais la graine seulement, comme du blé ou de quelque autre chose.
38. Mais Dieu, lui, donne un corps tel qu’il lui plaît, et il donne à chaque semence le corps qui est propre à chaque plante.
Après avoir prouvé, dans ce qui précède, la résurrection des morts, saint Paul enseigne ici comment ils ressusciteront et quelles seront les qualités des corps ressuscités. Sur ce point, I° il pose une question touchant l’état des ressuscités ; II° il la résout (verset 36) : Insensé que vous êtes, etc.
I° Il y a eu sur la résurrection deux erreurs. Quelques-uns nièrent totalement que la résurrection des morts dût avoir lieu ; car, ne considérant que les principes de la nature et son pouvoir, et voyant que, d’après ces principes et notre pouvoir, personne ne pouvait revenir de la mort à la vie, pas plus qu’un aveugle ne recouvre l’usage de la vue, ils furent amenés par là à nier totalement la résurrection. C’est eux que fait parler la Sagesse (II, 5) : « Le temps de notre vie n’est qu’une ombre qui passe, etc. » ; et encore (Sag., II, 2) : « C’est du néant que nous sommes sortis, etc. » ; et (Job, XIV, 14) : « L’homme, étant mort, pourrait-il bien vivre de nouveau, etc. ? » D’autres ont dit que la résurrection des morts se ferait, mais qu’on ressuscitait pour le même mode de vie et pour des actes semblables. C’est ce que supposaient aussi quelques philosophes, qui enseignent qu’après le cours d’un grand nombre d’années, Platon reviendra de nouveau à la vie, et qu’il aura à Athènes les mêmes disciples qu’il eut autrefois. Telle était aussi l’assertion des Pharisiens (Matthieu XXII, 28), p.ex. à l’égard de la femme aux sept maris ; ce qui leur faisait demander : « Au jour de la résurrection, duquel des sept sera t-elle la femme ? » Enfin les mahométans s’imaginent qu’après la résurrection ils auront des épouses, des voluptés, des délices corporelles ; (Job, XX, 17) : « Qu’il ne voit pas les ruisseaux du fleuve, ni les torrents de miel et de lait. » C’est contre eux qu’il est dit (Matthieu XXII, 30) : « ils seront comme les anges de Dieu dans le ciel. » Saint Paul traite donc ici ces deux questions : la première, lors qu’il dit (verset 35) : Mais comment les morts ressusciteront-ils ? comment est-il possible que les morts, qui ne sont plus que poussière, reviennent à la vie ? La seconde, lorsqu’il ajoute (verset 35) : Et avec quel corps reviendront-ils ? en d’autres termes, ressusciteront-ils avec un corps tel qu’est celui que nous avons maintenant ?
II° Saint Paul résout ces questions, lorsqu’il dit (verset 36) : Insensé que vous êtes, etc. Il résout d’abord la seconde, et ensuite la première (verset 51) : Voici que je vous apprends un mystère, etc. Or, pour l’intelligence de ce que dit saint Paul dans la première partie, il faut examiner ce qu’il se propose. Il veut, dans cette partie, montrer que les morts ressusciteront, et dans la même substance que durant la vie. Il propose donc d’abord deux comparaisons ; ensuite il les adapte à son sujet (verset 42) : Ainsi en sera-t-il de la résurrection des morts, etc. ; enfin, il donne la preuve (verset 44) : S’il y a un corps animal, etc. Sur la première subdivision, premièrement, il propose une comparaison d’un genre spécial ; secondement, plusieurs autres de divers genres (verset 39) : Toute chair n’est pas la même chair, etc. Sur cette première partie, il faut se rappeler que nous voyons dans une seule et même espèce un individu revêtir, quant à sa reproduction, des formes et des qualités diverses : le grain, par exemple, a, lorsqu’on le sème, une qualité et une forme différentes de celles qu’on lui voit lorsqu’il se développe et lorsqu’il est en herbe. Par cette comparaison, l’Apôtre se propose d’expliquer les qualités des ressuscités. Pour y arriver, il fait trois choses : I. il compare l’ordre de la semence au développement ; II. les qualités différentes de la semence et de la germination (verset 36) : Ce que vous semez, etc. ; III. la cause des qualités dans la germination (verset 38) : Et Dieu donne, etc.
I. Il dit donc (verset 36) : Insensé, etc. On objecte ce qu’on lit en saint Matthieu (V, 22) : « Celui qui dira à son frère : raca, etc. » Il faut répondre que le Seigneur défend de dire à son frère : raca ou insensé, par colère et non par correction ; or le motif qui fait dire à l’Apôtre : Insensé ! c’est que cette objection contre la résurrection s’appuie sur les principes de la sagesse humaine, qui ne demeure sagesse qu’autant qu’elle est soumise à la sagesse divine ; mais dès qu’elle s’éloigne de Dieu, elle se corrompt et devient le contraire de la sagesse. Voilà pourquoi, cette sagesse contredisant la sagesse divine, l’Apôtre l’appelle insensée, comme s’il disait Insensé !, est-ce que vous ne faites pas l’expérience tous les jours, vous-même, que ce que vous semez dans la terre ne prend point vie, c’est-à-dire n’entre point en végétation, si auparavant il ne meurt, c’est-à-dire s’il ne passe par la décomposition ? (Jean XII, 24) : « Si le grain de blé, etc. » L’Apôtre paraît tirer son point de comparaison de ceci, que quand le corps de l’homme est déposé dans le sépulcre, sous terre, c’est comme si on le semait, et quand il ressuscite, c’est comme une sorte de végétation. Aussi quelques auteurs ont pensé que la résurrection des corps se faisait naturellement, parce que saint Paul compare ici cette résurrection à germination de la semence, qui se fait suivant les lois naturelles.
Ils pensent donc que dans cette poussière déliée dans laquelle se résolvent les corps humains, il existe certaines vertus séminales et actives qui opère la résurrection de ces corps. Mais cette opinion ne paraît pas conforme à la vérité, car la dissolution du corps humain en éléments se fait comme celle des autres corps composés ; donc la poussière en laquelle les corps humains viennent se résoudre n’a pas d’autre propriété active que les autres poussières, qui n’ont assurément pas de vertu active pour la constitution du corps humain, propriété qu’on ne trouve que dans la liqueur séminale de l’homme.
Cependant il y a, entre la poussière en laquelle se résout le corps humain et les autres poussières, cette différence, d’après une disposition divine, que la première est destinée par la divine sagesse à servir de matière au renouvellement du corps humain. La cause active de la résurrection ne sera donc que Dieu seul, bien qu’il se serve pour l’opérer du ministère des anges, qui recueilleront cette poussière. Aussi saint Paul, expliquant plus loin le mode de la résurrection, l’attribue au son de la trompette, comme plus haut il l’a attribuée à la résurrection de Jésus-Christ ; mais nulle part il ne la voit dans quelque propriété active qui existerait dans cette poussière. Il ne veut donc point prouver par cette comparaison que la résurrection soit naturelle, comme le dévelop-pement opérée par la semence, mais il veut montrer par quelques exemples qu’il y a différence de qualités entre les corps de ceux qui meurent et de ceux qui ressuscitent ; et d’abord parce que la qualité de la semence n’est pas celle de la germination, ainsi qu’on le verra manifestement dans la suite.
II. Car, lorsqu’il dit ensuite (verset 37) : et ce que vous semez, etc., il fait voir que la qualité de la semence n’est pas la même que celle qu’on reconnaît à la germination, en disant (verset 37) : et ce que vous semez n’est pas le corps même de la plante qui doit venir, c’est-à-dire ce que vous semez n’est pas ce que le corps sera un jour. Il donne de suite l’explication, en ajoutant (verset 37) : Mais un grain nu, par exemple du blé, ou de quelque autre semence, car on sème le grain nu mais en germant il est orné de feuilles, d’épis et autres choses de ce genre. Semblablement, le corps humain aura, à la résurrection, des qualités différentes de celles qu’il a maintenant, comme il sera expliqué plus loin. Il y a cependant cette différence entre la résurrection du corps humain et la germination de la semence, que le corps humain ressuscitera numériquement le même, mais avec des qualités tout autres, ainsi que saint Paul le dit plus loin (verset 53) : Il faut que ce corps corruptible soit revêtu d’incorruptibilité. Il est dit aussi au livre de Job (XIX, 27) : « Je le verrai moi-même, et non pas un autre. » Mais dans la germination, il n’y a ni les mêmes qualités, ni numériquement le même corps : le grain n’est le même que quant à l’espèce. Voilà pourquoi saint Paul, parlant précisément de la germination, a dit (verset 37) : Ce n’est pas le corps même de la plante qui doit venir que vous semez, donnant à entendre qu’il n’est pas le même quant au nombre. Sur ce point l’oeuvre de la nature est au-dessous de l’oeuvre de Dieu ; car la vertu de la nature peut bien reproduire le même corps quant à l’espèce, mais non quant au nombre ; la puissance de Dieu, au contraire, se reproduit même quant au nombre. Ainsi donc, de ce qui précède on peut déduire la preuve que la résurrection en fait n’a rien d’impossible, comme l’insensé le soutenait, puisque si la nature, de ce qui est mort, peut reproduire le même corps quant à l’espèce, Dieu peut bien plus facilement restaurer le même corps quant au nombre. Ce que fait la nature, c’est Dieu qui le fait, car c’est de lui qu’elle tient la puissance de le faire.
III. Saint Paul, indiquant ensuite les qualités de la germination, les attribue d’abord à Dieu, mais ensuite à l’action réglée de la nature. 1° Il dit donc d’abord (verset 38) : et Dieu donne à ce grain un corps tel qu’il lui plaît, c’est-à-dire : c’est un effet de la disposition divine que de telle semence naisse telle plante, laquelle est comme le corps de cette semence ; car le fruit dernier de la plante, c’est la semence. Saint Paul attribue ce résultat à une disposition de Dieu, parce que toute opération de la nature est l’opération de Dieu, suivant ce qui a été dit au chapitre XII, 6 — Il n’y a qu’un même Dieu qui opère tout en tous. On peut expliquer ainsi ce verset : il est évident que les choses naturelles, dépourvues d’intelligence, font leur oeuvre pour une fin déterminée ; autrement elles n’atteindraient pas la même fin, ni toujours, ni même en majeure partie.
Il est également manifeste qu’aucun être privé de raison, s’il n’est dirigé par un autre être intelligent, ne tend à une fin certaine : ainsi la flèche ne se dirige vers le but fixé qu’autant que celui qui lui imprime l’impulsion l’a voulu. De même donc qu’en voyant une flèche

«Grâce et paix à vous de la part de Dieu, notre Père, et du Seigneur Jésus-Christ !» (Philosophie)

16 mars, 2011

du site:

http://bouquetphilosophique.pagesperso-orange.fr/newpage4.html

La grâce de Dieu, source de salut pour tous les hommes
 
«Grâce et paix à vous de la part de Dieu, notre Père, et du Seigneur Jésus-Christ !»
(Ephésiens 1.2)
 
Un jour, un chef d’état accordait la libération à un prisonnier condamné à mort. Cette amnistie fit la une des médias. L’homme libéré inopinément en fut reconnaissant toute sa vie. Un don immérité lui tombait littéralement du ciel. Enfin, il pouvait recommencer une vie nouvelle et n’avait plus envie de retourner dans son ancienne situation de vie débauchée. Cette décision inattendue l’avait complètement transformé, l’amenant désormais à être un membre utile pour sa famille et son entourage. Il parlait de son expérience merveilleuse à qui voulait l’entendre. Un proverbe ne dit-il pas que «de l’abondance du cœur, la bouche parle» ! Désormais, il avait trouvé un sens à sa vie et pouvait en apprécier chaque instant. Ce fut non la prison mais une grâce présidentielle inespérée qui conduisit cet homme dépravé à sa transformation complète.
Il y a plus de deux mille ans, il s’est passé dans notre monde une histoire analogue… mais combien plus merveilleuse encore ! Non seulement un prisonnier mais toute l’humanité a été graciée par un acte d’amour inconditionnel. Et ce ne fut pas la grâce d’un chef d’état mais celle de Dieu, manifestée par Jésus-Christ annoncé plusieurs siècles auparavant (Esaïe 53). Ce Messie (1) à venir de l’Ancien Testament accepta de vivre la condition humaine et toutes les souffrances d’ici-bas afin de libérer l’homme de l’esclavage du mal. La grâce (faveur imméritée) de Dieu est la seule «source de salut pour tous les hommes.» (Tite 2.11), elle exclut le désir de justice par les œuvres et transforme miraculeusement tous ceux qui l’acceptent.

Le salut de l’homme résulte uniquement de la grâce de Dieu
Concept humainement inconcevable, par amour pour ses créatures vouées à la perdition éternelle, Jésus-Christ, Fils de Dieu – devenu fils de l’homme – s’est dépouillé de tout, même de sa vie… afin de les sauver ! Autrement dit, il a pris sur lui le châtiment que l’humanité aurait mérité à cause de ses péchés. Il a ainsi accepté la mort la plus atroce – celle de la croix – pour payer le prix des transgressions des hommes. Mais la mort (étant le salaire du péché selon les Ecritures) ne pouvait le retenir dans la tombe, lui qui était parfaitement innocent. C’est pourquoi Dieu l’a rendu à la vie… et en même temps, tous ceux qui acceptent sa grâce. Dans sa lettre aux Ephésiens, Paul explique justement comment Dieu arrache ses créatures à la mort spirituelle : «Autrefois, vous étiez spirituellement morts à cause de vos fautes, à cause de vos péchés. [...] Mais la compassion de Dieu est immense, son amour pour nous est tel que, [...] il nous a fait revivre avec le Christ. C’est par la grâce de Dieu que vous avez été sauvés. Dans notre union avec Jésus-Christ, Dieu nous a ramenés de la mort avec lui pour nous faire régner avec lui dans le monde céleste. Par la bonté qu’il nous a manifestée en Jésus-Christ, il a voulu démontrer pour tous les siècles à venir la richesse extraordinaire de sa grâce.» (Ephésiens 2.1-7, BFC).
La grâce de Dieu est un concept tellement inouï qu’il semble effectivement dépasser l’intelligence humaine… à tel point que beaucoup d’hommes l’acceptent difficilement ! Et pourtant, l’Ecriture ne cesse de souligner cet attribut divin qui est en fait le thème principal de l’Evangile (le mot grâce revient plus de 160 fois dans la Bible). La grâce est l’expression de l’amour de Dieu envers ses créatures : «Dieu a tant aimé le monde [écrit l'apôtre Jean] qu’il a donné son fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle.» (Jean 3.16). Si à cause du péché tous les hommes méritent la mort, à tous cependant est offerte la grâce d’un Dieu aimant… la dette de chacun a déjà été payée par le créateur, c’est la bonne nouvelle de l’Evangile !
Par sa mort et sa résurrection (trois jours après comme il l’avait annoncé à ses disciples), le Christ a donc sauvé non seulement un prisonnier mais toute l’humanité. Cette bonne nouvelle a bouleversé la vie de ses disciples avant que ceux-ci – et leurs successeurs – la propagent dans le monde entier. Mais est-ce si facile de croire à cette grâce divine ? Peut-être quelqu’un mourrait-il pour un homme de bien, mais qui serait prêt à se sacrifier pour des gens de mauvaise vie ? Certainement personne ! Cet amour insensé nous dépasse et nous empêche souvent de saisir ce don immérité. Et pourtant, son acceptation constitue la seule condition du salut comme le rappelle clairement le livre des Actes des Apôtres : «Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, et ta famille avec toi.» (Actes 16.31, BFC).

La grâce exclut les œuvres méritoires
Revenons à notre prisonnier condamné à mort et gracié. Il a dû certainement faire un bond en lisant le décret de sa libération ! Assurément, il a bien entendu les paroles du directeur de la prison lui disant de se préparer pour la sortie et n’a pas préféré rester dans ce lieu le privant, comme un esclave, de toute dignité humaine. Quant à nous, chrétiens, qui «avons été rendus justes devant Dieu à cause de notre foi» (Romains 5.1, BFC), sommes-nous vraiment conscients de ce salut extraordinaire à la manière de cet homme apprenant sa libération ? Ayant découvert et accepté depuis longtemps ce message extraordinaire du salut par la foi ou l’ayant peut-être reçu récemment, comment perçevons-nous réellement cette bonne nouvelle, plus précisément, comment la vivons-nous chaque jour de notre vie ? Par exemple, grande est la tentation de vivre le christianisme à la lettre c’est-à-dire intellectuellement. Nous avons bien compris les faits historico-religieux et en sommes même convaincus mais l’Esprit de Dieu n’a pas réussi à nous transformer complètement.
Ou avons-nous peut-être gardé une certaine réserve, de petites incertitudes. Alors, hésitant à nous approcher de Dieu avec confiance comme de petits enfants afin de lui demander pardon et ne voulant surtout pas reconnaître notre totale impuissance à gagner le ciel par nos propres moyens, nous essayons de travailler durement pour acquérir la vie éternelle promise. Autrement dit, nous écoutons la bonne nouvelle du salut gratuit par la foi en Jésus Christ tout en continuant à nous comporter comme des prisonniers cherchant à mériter leur libération ! Bref, notre orgueil humain ne nous incite pas à accepter volontiers – à titre gracieux – une place dans l’éternité, mais nous pousse plutôt à rechercher ce salut par nos propres œuvres ! Dans plusieurs de ses lettres où il aborde la question, Paul nous fait comprendre que le salut ne s’obtient que par la foi, non par l’obéissance à la loi : «Ce n’est pas par les œuvres de la loi que l’homme est justifié, mais par la foi en Jésus-Christ.» (Galates 2.16) ; «Et que nul ne soit justifié devant Dieu par la loi, cela est évident, puisqu’il est dit : Le juste vivra par la foi.» (Galates 3.11) ; «En effet, c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est pas par les œuvres, afin que personne ne puisse se vanter.» (Ephésiens 2.8-9).

La grâce transforme le croyant
La conséquence naturelle du bénéfice de la grâce chez les chrétiens devrait être la même que pour le prisonnier gracié. Le fait de savoir qu’une vie nouvelle avec un idéal élevé peut commencer et que les choses anciennes sont effacées et pardonnées par un Sauveur aimant, devrait nous inciter à lui être agréables par des actes de reconnaissance et non plus méritoires. Et même ces actes de gratitude, ces «bonnes actions [c'est Dieu qui les] a préparées depuis longtemps pour nous.» (Ephésiens 2.10, Parole vivante par Alfred Kuen). De surcroît, en acceptant la grâce divine «Dieu lui-même œuvre en [nous], sa bienveillance suscite en [nous] à la fois la volonté et l’action, afin que ses desseins soient exécutés.» (Philippiens 2.13, Parole vivante par Alfred Kuen).
Complètement transformés, nos visages devraient être enfin rayonnants amenant les gens de notre entourage à se poser des questions sur notre métamorphose inexplicable. Ayant reçu la vraie vie en abondance, nous ne saurions nous taire comme les premiers disciples. Répandre cette bonne nouvelle de la grâce en toute occasion autour de nous devrait être notre objectif suprême, non dans le but d’amener nos amis à une quelconque dénomination religieuse mais surtout au pied de la croix du rédempteur Jésus-Christ.
«En effet, la grâce de Dieu s’est révélée comme une source de salut pour tous les hommes ; elle s’est levée sur ce monde, illuminant l’humanité entière et apportant à tous la possibilité d’être délivrés du péché. Elle veut nous éduquer et nous amener à nous détourner de toute impiété, à rejeter toutes les passions et convoitises terrestres et à renoncer à la course aux plaisirs. Elle nous enseigne à vivre dans le monde présent avec sagesse, réserve et maîtrise de soi, en toute intégrité et honorabilité devant Dieu. Elle remplit nos cœurs de l’attente ardente de la réalisation de notre bienheureuse espérance : l’avénement glorieux de notre grand Dieu et Sauveur Jésus-Christ. Ne s’est-il pas livré lui-même pour nous afin de payer la rançon de toutes nos injustices et de nous racheter ainsi de l’asservissement au péché, en vue de se créer un peuple purifié du mal qui lui appartienne tout entier et qui se passionne pour l’accomplissement d’œuvres bonnes.» (Tite 2 .11-14, Parole vivante par Alfred Kuen).

Karin Bouchot
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1) Notons en passant que son existence et sa mort sont attestées par les historiens de l’époque, en particulier par Flavius Josèphe.

Don de Dieu, œuvre à réaliser : Saint Paul et la liberté chrétienne

4 mars, 2011

du site:

http://www.catechese.viateurs.ca/bible/liberte-suite-jesus/page-2.cfm

La liberté à la suite de Jésus

Don de Dieu, œuvre à réaliser

Saint Paul et la liberté chrétienne

Le Ressuscité ouvre la route de la liberté véritable
À vrai dire, c’est le Ressuscité qui va ouvrir pour ses disciples la route de la liberté. Saint Paul l’a bien compris et annoncé dans ses lettres aux communautés chrétiennes qu’il a fondées et visitées. Oui, Paul a été le grand héraut de la liberté conférée par le Christ aux siens dans le mystère de sa mort-résurrection.
Aux Galates il proclame avec force : « Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son Fils, né d’une femme, né sujet de la Loi, afin de racheter les sujets de la Loi, afin de nous conférer l’adoption filiale » Ga 4,4-5). Selon ce passage, le fondement de la liberté du disciple, c’est la venue, la mort et la résurrection du Christ.
Le but de sa venue dans notre condition humaine : faire éclater l’esclavage de l’être humain et sauver ainsi l’humanité par le mystère de sa mort-résurrection. Jésus a été marqué par le tragique de la condition humaine (assujetti à la Loi); il ne nous a pas sauvés de l’extérieur, sans se compromettre; il est descendu au plus profond de notre esclavage pour le briser de l’intérieur. Voilà pourquoi la mort-résurrection du Christ est le mystère qui fonde la liberté chrétienne et la possibilité de libération pour l’humanité.
L’Esprit, source de liberté
Par ailleurs, la source immédiate de la liberté du chrétien reste l’Esprit du Christ en lui. En effet, Paul ajoute : « Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie Abba, Père! Aussi n’es-tu plus esclave mais fils; fils, et donc héritier de par Dieu » (Ga 4,6-7).
Par la mort-résurrection du Christ et par le don de l’Esprit, les croyants sont passés de l’état d’esclave à l’état de fils de Dieu; et comme fils, ils sont devenus héritiers des biens du salut et dotés de la liberté des enfants face à un Père aimant. Le chrétien véritable est donc libre puisqu’il agit sous l’impulsion d’un dynamisme intérieur qui n’est nul autre que l’Esprit même du Christ en lui.
La loi, les prescriptions, les codes, en tant que principes extérieurs à l’homme, ne peuvent lui conférer cette liberté profonde dans son agir.
L’Esprit libère de la peur de Dieu
L’Esprit libère aussi le croyant de toute crainte en face de Dieu à qui on peut maintenant donner en toute confiance le titre de Père.
Avant Jésus, aucun Juif n’avait osé dans ses prières interpeller Dieu sous le titre familier d’Abba, i.e. papa. Jésus fut le premier à se permettre une telle audace. Les chrétiens, sous l’impulsion de l’Esprit, continuèrent l’exemple du Maître (cf. Ga 4,6; Rm 8,15). Pour eux, Dieu est essentiellement un Père. Cette conviction est des plus libératrice, du moins sur le plan religieux.
Vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi
Ainsi, dans son développement sur la liberté, Paul donne une place importante à l’Esprit comme source de liberté. Car, dit-il, si vous êtes conduits par l’Esprit vous n’êtes plus soumis à la loi (5,18).
L’homme ne peut se libérer seul, à cause de la faiblesse de son être charnel. Il a besoin du dynamisme de l’Esprit du Christ en lui pour atteindre à la vraie liberté.
L’Esprit, dynamisme interne
Dans sa deuxième épître aux Corinthiens, Paul exprime encore la même conviction : Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté (2 Cor 3,17). Et selon lui, posséder l’Esprit du Seigneur en soi, ce n’est pas seulement avoir sa mentalité, mais bien posséder en soi un dynamisme de vie et une force d’action.
Alors que tout commandement est un principe externe, l’Esprit est au contraire un dynamisme interne qui pousse le chrétien à agir selon sa vocation profonde. En cela se trouve la vraie liberté.
C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés
Paul va préciser davantage sa pensée au chapitre 5 de l’épître aux Galates : « C’est pour que nous soyons vraiment libres que le Christ nous a libérés. Tenez donc ferme et ne vous laissez pas remettre sous le joug de l’esclavage » (Ga 5,1).
Si on traduisait littéralement le début du 1er verset, il faudrait rendre l’expression grecque par la périphrase suivante : « C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés ». L’expression « libérés pour la liberté » exprime une finalité, un but.
Par sa mort-résurrection, le Christ nous a libérés dans l’intention que nous demeurions vraiment libres, que nous jouissions à plein de cette nouvelle libération acquise par la Croix, et que nous ne retombions pas sous le joug des différents esclavages : le péché, l’égoïsme, la haine… La liberté entre donc dans l’intention même de la Rédemption.
Le chrétien doit exploiter à fond sa condition d’être pleinement libéré. Tout ce qui viole la liberté chrétienne va contre l’intention de la Rédemption.
Une liberté dans l’amour – Une vocation à la liberté
Un peu plus loin, Paul va affirmer qu’il s’agit d’une liberté dans l’amour : « Vous, en effet, mes frères, c’est à la liberté que vous avez été appelés. Seulement que cette liberté ne donne aucune prise à la chair! Mais, par l’amour, mettez-vous au service les uns des autres » (Ga 5,13). L’équivalent grec du verbe « appeler », c’est le mot kaleô qui sert de terme technique pour désigner la vocation chrétienne. On pourrait donc traduire ainsi : « vous avez reçu une vocation à la liberté ».
Par leur baptême dans le Christ Jésus, les chrétiens ont reçu une vocation à la liberté; ils sont devenus libres par vocation. La liberté est le nouveau statut de l’homme en tant que chrétien, et la condition normale de son existence.
Le chrétien est libre pour aimer et il se libère toujours davantage en aimant
Cette liberté reçue par vocation baptismale n’a rien de commun avec le repli égoïste sur soi; au contraire, elle ne peut s’exprimer valablement que dans l’amour. Paul l’affirme explicitement au verset 13, tout en précisant au verset 14 que l’amour fraternel est l’accomplissement plénier de tous les commandements.
La charité fraternelle devient ainsi, en christianisme, une composante de la liberté.
Plus loin Paul va énumérer les fruits de l’Esprit qui sont en même temps des manifestations de l’amour et des signes de la vraie liberté. Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi : contre de telles choses, il n’y a pas de loi (5,22-23).
Tous ces fruits de l’Esprit amènent le croyant à sortir de lui-même pour aller vers les autres. Et c’est dans cette ouverture sur les autres que s’épanouit le don de la liberté chrétienne. L’amour possède tous les signes de la vraie liberté. Le chrétien est libre pour aimer et il se libère toujours davantage en aimant.

Saint Paul et la liberté chrétienne

22 février, 2011

du site:

http://www.catechese.viateurs.ca/bible/liberte-suite-jesus/page-2.cfm

La liberté à la suite de Jésus

Don de Dieu, œuvre à réaliser

Saint Paul et la liberté chrétienne

Le Ressuscité ouvre la route de la liberté véritable
À vrai dire, c’est le Ressuscité qui va ouvrir pour ses disciples la route de la liberté. Saint Paul l’a bien compris et annoncé dans ses lettres aux communautés chrétiennes qu’il a fondées et visitées. Oui, Paul a été le grand héraut de la liberté conférée par le Christ aux siens dans le mystère de sa mort-résurrection.
Aux Galates il proclame avec force : « Quand vint la plénitude des temps, Dieu envoya son Fils, né d’une femme, né sujet de la Loi, afin de racheter les sujets de la Loi, afin de nous conférer l’adoption filiale » Ga 4,4-5). Selon ce passage, le fondement de la liberté du disciple, c’est la venue, la mort et la résurrection du Christ.
Le but de sa venue dans notre condition humaine : faire éclater l’esclavage de l’être humain et sauver ainsi l’humanité par le mystère de sa mort-résurrection. Jésus a été marqué par le tragique de la condition humaine (assujetti à la Loi); il ne nous a pas sauvés de l’extérieur, sans se compromettre; il est descendu au plus profond de notre esclavage pour le briser de l’intérieur. Voilà pourquoi la mort-résurrection du Christ est le mystère qui fonde la liberté chrétienne et la possibilité de libération pour l’humanité.
L’Esprit, source de liberté
Par ailleurs, la source immédiate de la liberté du chrétien reste l’Esprit du Christ en lui. En effet, Paul ajoute : « Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie Abba, Père! Aussi n’es-tu plus esclave mais fils; fils, et donc héritier de par Dieu » (Ga 4,6-7).
Par la mort-résurrection du Christ et par le don de l’Esprit, les croyants sont passés de l’état d’esclave à l’état de fils de Dieu; et comme fils, ils sont devenus héritiers des biens du salut et dotés de la liberté des enfants face à un Père aimant. Le chrétien véritable est donc libre puisqu’il agit sous l’impulsion d’un dynamisme intérieur qui n’est nul autre que l’Esprit même du Christ en lui.
La loi, les prescriptions, les codes, en tant que principes extérieurs à l’homme, ne peuvent lui conférer cette liberté profonde dans son agir.
L’Esprit libère de la peur de Dieu
L’Esprit libère aussi le croyant de toute crainte en face de Dieu à qui on peut maintenant donner en toute confiance le titre de Père.
Avant Jésus, aucun Juif n’avait osé dans ses prières interpeller Dieu sous le titre familier d’Abba, i.e. papa. Jésus fut le premier à se permettre une telle audace. Les chrétiens, sous l’impulsion de l’Esprit, continuèrent l’exemple du Maître (cf. Ga 4,6; Rm 8,15). Pour eux, Dieu est essentiellement un Père. Cette conviction est des plus libératrice, du moins sur le plan religieux.
Vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes plus soumis à la loi
Ainsi, dans son développement sur la liberté, Paul donne une place importante à l’Esprit comme source de liberté. Car, dit-il, si vous êtes conduits par l’Esprit vous n’êtes plus soumis à la loi (5,18).
L’homme ne peut se libérer seul, à cause de la faiblesse de son être charnel. Il a besoin du dynamisme de l’Esprit du Christ en lui pour atteindre à la vraie liberté.
L’Esprit, dynamisme interne
Dans sa deuxième épître aux Corinthiens, Paul exprime encore la même conviction : Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté (2 Cor 3,17). Et selon lui, posséder l’Esprit du Seigneur en soi, ce n’est pas seulement avoir sa mentalité, mais bien posséder en soi un dynamisme de vie et une force d’action.
Alors que tout commandement est un principe externe, l’Esprit est au contraire un dynamisme interne qui pousse le chrétien à agir selon sa vocation profonde. En cela se trouve la vraie liberté.
C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés
Paul va préciser davantage sa pensée au chapitre 5 de l’épître aux Galates : « C’est pour que nous soyons vraiment libres que le Christ nous a libérés. Tenez donc ferme et ne vous laissez pas remettre sous le joug de l’esclavage » (Ga 5,1).
Si on traduisait littéralement le début du 1er verset, il faudrait rendre l’expression grecque par la périphrase suivante : « C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés ». L’expression « libérés pour la liberté » exprime une finalité, un but.
Par sa mort-résurrection, le Christ nous a libérés dans l’intention que nous demeurions vraiment libres, que nous jouissions à plein de cette nouvelle libération acquise par la Croix, et que nous ne retombions pas sous le joug des différents esclavages : le péché, l’égoïsme, la haine… La liberté entre donc dans l’intention même de la Rédemption.
Le chrétien doit exploiter à fond sa condition d’être pleinement libéré. Tout ce qui viole la liberté chrétienne va contre l’intention de la Rédemption.
Une liberté dans l’amour – Une vocation à la liberté
Un peu plus loin, Paul va affirmer qu’il s’agit d’une liberté dans l’amour : « Vous, en effet, mes frères, c’est à la liberté que vous avez été appelés. Seulement que cette liberté ne donne aucune prise à la chair! Mais, par l’amour, mettez-vous au service les uns des autres » (Ga 5,13). L’équivalent grec du verbe « appeler », c’est le mot kaleô qui sert de terme technique pour désigner la vocation chrétienne. On pourrait donc traduire ainsi : « vous avez reçu une vocation à la liberté ».
Par leur baptême dans le Christ Jésus, les chrétiens ont reçu une vocation à la liberté; ils sont devenus libres par vocation. La liberté est le nouveau statut de l’homme en tant que chrétien, et la condition normale de son existence.
Le chrétien est libre pour aimer et il se libère toujours davantage en aimant
Cette liberté reçue par vocation baptismale n’a rien de commun avec le repli égoïste sur soi; au contraire, elle ne peut s’exprimer valablement que dans l’amour. Paul l’affirme explicitement au verset 13, tout en précisant au verset 14 que l’amour fraternel est l’accomplissement plénier de tous les commandements.
La charité fraternelle devient ainsi, en christianisme, une composante de la liberté.
Plus loin Paul va énumérer les fruits de l’Esprit qui sont en même temps des manifestations de l’amour et des signes de la vraie liberté. Mais voici le fruit de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi : contre de telles choses, il n’y a pas de loi (5,22-23).
Tous ces fruits de l’Esprit amènent le croyant à sortir de lui-même pour aller vers les autres. Et c’est dans cette ouverture sur les autres que s’épanouit le don de la liberté chrétienne. L’amour possède tous les signes de la vraie liberté. Le chrétien est libre pour aimer et il se libère toujours davantage en aimant.

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