Archive pour la catégorie 'Saint Augustin'

27 août : LA MORT DE SAINTE MONIQUE MÈRE DE SAINT AUGUSTIN (Le Confession)

26 août, 2011

du site: 

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/augustin/confessions/livre9.htm#_Toc509573582

LA MORT DE SAINTE MONIQUE MÈRE DE SAINT AUGUSTIN

LES CONFESSIONS – LIVRE IX  -CHAPITRE X ET XI

CHAPITRE X.

ENTRETIEN DE SAINTE MONIQUE AVEC SON FILS SUR LE BONHEUR DE LA VIE ÉTERNELLE.
 
23.A l’approche du jour où elle devait sortir de cette vie, jour que nous ignorions, et connu de vous, il arriva, je crois, par votre disposition secrète, que nous nous trouvions seuls, elle et moi, appuyés contre une fenêtre, d’où la vue s’étendait sur le jardin de la maison où nous étions descendus, au port d’Ostie. C’est là que, loin de la foule, après les fatigues d’une longue route, nous attendions le moment de la traversée.
Nous étions seuls, conversant avec une ineffable douceur, et dans l’oubli du passé, dévorant l’horizon de l’avenir ( Philip. III, 13), nous cherchions entre nous, en présence de la Vérité que vous êtes, quelle sera pour les saints cette vie éternelle « que l’oeil n’a pas vue, que l’oreille n’a pas entendue, et où n’atteint pas le coeur de l’homme (I Cor. II, 9). » Et nous aspirions des lèvres de l’âme aux sublimes courants de votre fontaine, fontaine de vie qui réside en vous (Ps. XXXV, 10), afin que, pénétrée selon sa mesure de la rosée céleste, notre pensée pût planer dans les hauteurs.
24.Et nos discours arrivant à cette conclusion, que la plus vive joie des sens dans le plus vif éclat des splendeurs corporelles, loin de soutenir le parallèle avec la félicité d’une telle vie, ne méritait pas même un nom, portés par un nouvel élan d’amour vers Celui qui est, nous nous promenâmes par les échelons des corps jusqu’aux espaces célestes d’où les étoiles, la lune et le soleil nous envoient leur lumière; et montant encore plus haut dans nos, pensées, dans nos paroles, dans l’admiration de vos oeuvres, nous traversâmes nos âmes pour atteindre, bien au-delà, cette région d’inépuisable abondance, où vous rassasiez éternellement (447) Israël de la nourriture de vérité, et où la vie est la sagesse créatrice de ce qui est, de ce qui a été, de ce qui sera; sagesse incréée, qui est ce qu’elle a été, ce qu’elle sera toujours; ou plutôt en qui ne se trouvent ni avoir été, ni devoir être, mais l’être seul, parce qu’elle est éternelle; car avoir été et devoir être exclut l’éternité.
Et en parlant ainsi, dans nos amoureux élans vers cette vie, nous y touchâmes un instant d’un bond de coeur, et nous soupirâmes en y laissant captives les prémices de l’esprit, et nous redescendîmes dans le bruit dé la voix, dans la parole qui commence et finit. Et qu’y a-t-il là de semblable à votre Verbe, Notre-Seigneur, dont l’immuable permanence en soi renouvelle toutes choses (Sag. VII, 27)?
25. Nous disions donc: qu’une âme soit; en qui les révoltes de la chair, le spectacle de la terre, des eaux, de l’air et des cieux, fassent silence, qui se fasse silence à elle-même qu’oublieuse de soi, elle franchisse le seuil intérieur; songes, visions fantastiques, toute langue, tout signe, tout ce qui passe, venant à se taire; car tout cela dit à qui sait entendre:
Je ne suis pas mon ouvrage; celui qui m’a fait est Celui qui demeure dans l’éternité ( Ps. XCIX, 3,5) ; que cette dernière voix s’évanouisse dans le silence, après avoir élevé notre âme vers l’Auteur de toutes choses, et qu’il parle lui seul, non par ses créatures, mais par lui-même, et que son Verbe nous parle, non plus par la langue charnelle, ni par la voix de l’ange, ni par le bruit de la nuée, ni par l’énigme de la parabole; mais qu’il nous parle lui seul que nous aimons en tout, qu’en l’absence de tout il nous parle; que notre pensée, dont l’aile rapide atteint en ce moment même l’éternelle sagesse immuable au-dessus de tout, se soutienne dans cet essor, et que, toute vue d’un ordre inférieur cessante, elle seule ravisse, captive, absorbe le contemplateur dans ses secrètes joies; qu’enfin la vie éternelle soit semblable à cette fugitive extase, qui nous fait soupirer encore; n’est-ce pas la promesse de cette parole : « Entre dans la joie de ton Seigneur (Matth. XXV, 21) ? » Et quand cela? Sera-ce alors que « nous ressusciterons tous, sans néanmoins être tous changés (I Cor. XV, 51)?»
26. Telles étaient les pensées, sinon les paroles, de notre entretien. Et vous savez, Seigneur, que ce jour même où nous parlions ainsi, où le monde avec tous ses charmes nous paraissait si bas, elle me dit: « Mon fils, en ce qui me regarde, rien ne m’attache plus à cette vie. Qu’y ferais-je? pourquoi y suis-je encore? J’ai consommé dans le siècle toute mon espérance. Il était une seule chose pour laquelle je désirais séjourner quelque peu dans cette vie, c’était « de te voir chrétien catholique avant de mourir. Mon Dieu me l’a donné avec surabondance, puisque je te vois mépriser toute félicité terrestre pour le servir. Que fais-je encore ici? »
 
CHAPITRE XI.
DERNIÈRES PAROLES DE SAINTE MONIQUE.
 
27.       Ce que je répond,is à ces paroles, je ne m’en souviens pas bien; mais à cinq ou six jours de là, la fièvre la mit au lit. Un jour dans sa maladie, elle perdit connaissance et fut un moment enlevée à tout ce qui l’entourait. Nous accourûmes; elle reprit bientôt ses sens, et nous regardant mon frère et moi, debout auprès d’elle; elle nous dit comme nous interrogeant: « Où étais-je? » Et à l’aspect de notre douleur muette : « Vous laisserez ici, votre mère! » Je gardais le silence et je retenais mes pleurs. Mon frère dit quelques mots exprimant le voeu qu’elle achevât sa vie dans sa patrie plutôt que sur une terre étrangère. Elle l’entendit, et, le visage ému, le réprimant des yeux pour de telles pensées, puis me regardant: « Vois comme il parle, » me dit-elle; et s’adressant à tous deux: « Laissez ce corps partout; et que tel souci ne vous trouble pas. Ce que je vous demande seulement, c’est de vous souvenir de moi à l’autel du Seigneur, partout où vous serez. » Nous ayant témoigné sa censée comme elle pouvait l’exprimer, elle se tut, et le progrès de la maladie redoublait ses souffrances.
28.       Alors, méditant sur vos dons, ô Dieu invisible, ces dons que vous semez dans le coeur de vos fidèles pour en récolter d’admirables moissons, je me réjouissais et vous rendais grâces au souvenir de cette vive préoccupation qui l’avait toujours inquiétée de sa sépulture, dont elle avait fixé et préparé la place auprès du corps de son mari; parce qu’ayant vécu dans une étroite union, elle voulait encore, ô insuffisance de l’esprit humain pour les choses (448) divines! ajouter à ce bonheur, et qu’il fût dit par les hommes qu’après un voyage d’outremer, une même terre couvrait la terre de leurs corps réunis dans la mort même.
Quand donc ce vide de son coeur avait-il commencé d’être comblé par la plénitude de votre grâce? Je l’ignorais, et cette révélation qu’elle venait de faire ainsi me pénétrait d’admiration et de joie. Mais déjà, dans mon entretien à la fenêtre, ces paroles: « Que fais-je ici? » témoignaient assez qu’elle ne tenait plus à mourir dans sa patrie. J’appris encore depuis, qu’à Ostie même, un jour, en mon absence, elle avait parlé avec une confiance toute maternelle à plusieurs de mes amis du mépris de cette vie et du bonheur de la mort. Admirant la vertu que vous aviez donnée à une femme, ils lui demandaient si elle ne redouterait pas de laisser son corps si loin de son pays: «Rien n’est loin de Dieu, répondit-elle; et il n’est pas à craindre qu’à la fin des siècles, il ne reconnaisse pas la place où il doit me ressusciter. » Ce fut ainsi que, le neuvième jour de sa maladie, dans la cinquante-sixième année de sa vie, et la trente-troisième de mon âge, cette âme pieuse et sainte vit tomber les chaînes corporelles.
 

Marie, disciple du Christ (Saint Augustin, Sermon 72/A, 7)

3 août, 2011

du site:

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20001208_agostino_fr.html

Saint Augustin, Sermon 72/A, 7

Marie, disciple du Christ 

« Quant il parlait aux foules, sa mère et ses frères étaient là dehors, et voulaient lui parler… Et lui: qui est ma mère? ou qui sont mem frères? Et étendant la main sur ses disciples, il dit: Ceux-ci sont ma mère et mes frères. Et quiconque fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux, il est pour moi un frère, une soeur et une mère… Comment le Christ Seigneur pouvait-il avec piété repousser sa mère, et pas une mère quelconque, mais une mère d’autant plus grande qu’elle était une mère vierge… Il a repoussé cette mère, pour que l’affection maternelle ne se mêle pas à l’oeuvre qu’il accomplissait, et ne l’empêche pas. Quelle était cette oeuvre? Il parlait au peuple, il détruisait le vieil homme, il édifiait l’homme nouveau, il délivrait les âmes, il déliait les captifs, il illuminait les esprit aveugles, il accomplissait une oeuvre bonne, et dans cette oeuvre bonne il était dans la ferveur de l’action et de la parole. A ce moment, on lui annonce cet affection maternelle… Que les mères entendent ce qu’il a répondu, pour que leur affection charnelle n’empeche pas les oeuvres bonnes de leurs fils… Mais tu me diras: Tu compares donc mon fils au Christ? Je ne le compare pas au Christ, ni toi à Marie. Le Christ Seigneur n’a donc pas condamné l’affection maternelle, mais il a montré en lui-même, par un grand exemple, qu’il fallait repousser sa mère pour l’oeuvre de Dieu. Il était notre maître. S’il a daigné repousser sa mère, c’est pour t’apprendre à repousser aussi ton père pour l’oeuvre de Dieu.
Faites donc plus attention, mes frères, faites plus attention, je vous en conjure, a` ce que dit le Seigneur Christ, en étendant la main sur ses disciples: Ceux-ci sont ma mère et mes frères; et celui qui fera la volonté de mon Père qui m’a envoyé, celui-là est pour moi un frère et und soeur et une mère. Est-ce qu’elle n’a pas fait la volonté du Père, la Vierge Marie, qui a cru par la foi, qui a conçu par la foi, qui a été choisie pour que d’elle naisse pour nous le salut parmi les hommes, qui a été  créée par le Christ, avant que le Christ ne fût créé en elle? Elle a fait, elle a fait absolument la volonté du Père, sainte Marie; et c’est plus pour Marie d’avoir été la disciple du Christ, que d’avoir été la mère du Christ. aussi Marie a été bienheureuse, parce qu’avant de l’enfanter, elle a porté son maître dons son sein. Vois si ce n’est pas comme je le dis. Quand le Seigneur passait avec des foules a` sa suite, et qu’il faisait des miracles divins, une femme dit: Bienheureux le sein qui t’a porte. Et qu’a répondu le Seigneur, pour qu’on n’aille pas chercher la félicité dans la chair? oui, heureux, ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent. Ainsi Marie est bienheureuse d’avoir écouté la parole de Dieu et de l’avoir gardée: ella a gardé la vérité en son coeur plus que la chair en son sein. Le Christ est vérité, le Christ est chair. Le Christ vérité est dans le coeur de Marie, le Christ chair dans le sein de Marie; ce qui est dans le coeur est plus que ce qui est dans le ventre. Sainte est Marie, bienheureuse est Marie, mais l’Eglise est meilleure que la Vierge Marie. Pourquoi? parce que Marie est une partie de l’Eglise, un membre saint, un membre excellent, un membre suréeminent, mais pourtant un membre de corps tout entier. Si elle est membre du corps tout entier, le corps est plus assurément qu’un seule membre. la tête, c’est le Seigneur, et le Christ tout entier est tête et corps. Que dire? Nous avons une tête divine, nous avons Dieu pour tête.

Prière

C’est toi que j’invoque, O Dieu Vérité, source, principe, auteur de la vérité de tout ce qui est vrai. Dieu, de qui on ne se détourne que pour choir, vers qui se tourner, c’est se laver à nouveau et en qui demeurer, c’est trover un solide appui, sois-moi propice, o mon Dieu. Cfr. Soliloq. 1.3 

Dieu avant la création (Saint Augustin de Hippone)

17 février, 2011

du site:

http://www.blogdei.com/pauletbarnabas/index.php/2007/05/27/175-dieu-avant-la-creation

Dieu avant la création

Par Jokebed  , dimanche 27 mai 2007 à 07:36 :: Création versus Evolution. :: #175 :: rss

Saint Augustin de Hippone

Ne sont-ils pas, sur ce propos, enviellis à fond les gens qui nous disent : « Dieu, avant de faire le ciel et la terre, que faisait-il ? Supposé, disent-ils, qu’il fût de loisir et désoeuvré, pourquoi n’eut-il pas continué toujours à toujours chômer comme devant ? Ou bien supposé en Dieu un mouvement nouveau et une volonté nouvelle de créer quelque chose non encore créé, comment, dès lors, concilier la véritable éternité avec l’éclosion d’une volonté jusque-là non existante ? La volonté de Dieu, en effet, n’est pas chose créée, mais précède la création, rien ne pouvant être créé, qu’il n’y ait d’abord une volonté dans le Créateur. La volonté de Dieu tient dans la substance même de Dieu. Or, que dans la substance de Dieu, quelque chose commence qui, avant, n’était pas, c’est se tromper que la dire substance éternelle ; mais que, d’autre part, Dieu ait de toute éternité voulu qu’il y eût une création, pourquoi la création, elle aussi, ne serait-elle pas éternelle ? »
Je dis seulement que tu es, Seigneur, le créateur de toute chose créée, et, si sous les noms de ciel et terre on entend toute chose créée, je dis sans broncher qu’avant de faire le ciel et la terre, Dieu ne faisait quoi que ce soit. Supposé, en effet, qu’il fît, qu’était-ce autre chose que du créé ?
Si cependant quelqu’un s’égare, esprit volage, à imaginer les temps révolus et s’il s’étonne que toi, le Dieu qui peut tout, qui crée tout, qui contient tout, tu aies, artisan du ciel et de la terre, remis, durant d’innombrables siècles, l’exécution d’un si grand ouvrage, qu’il se réveille, qu’il prenne garde : il s’étonne à faux.
De fait, où les prendre, ces innombrables siècles passés qui ne fussent pas faits par toi, auteur pourtant et créateur de tous les siècles ? Oui, le moyen ou bien qu’il y eût des temps que tu n’aurais pas créés ou bien qu’il y eût des temps passés, s’il n’y avait jamais eu de temps ?
Étant donc admis que les temps sont tous ton ouvrage, s’il y eut, avant que tu fasses le ciel et la terre, un temps quelconque, pourquoi dire que tu chômais, sans ouvrage ? Ce temps-là même, aussi bien, tu l’avais fait, et il ne put y avoir des temps passés avant que tu aies fait des temps. Si, d’ailleurs, il n’y eut, avant le ciel et la terre, aucun temps, pourquoi demander ce que tu faisait alors, puisque, faute de temps, il n’y avait pas d’alors ?
Toi, au surplus, tu n’es pas d’un temps avant d’autres temps, sinon tu ne serais pas avant tous les temps. Non, c’est du haut de ton éternité, perpétuel présent, que tu es avant tout passé et que tu es également par-dessus tout avenir, puisque cet avenir sera, une fois venu, le passé, tandis que toi tu es identique à toi-même, sans que tes années décroissent. Tes années ne s’en vont ni ne viennent, comme les nôtres, qui, pour que toutes viennent, s’en vont et viennent. Tes années, parce qu’elles sont stables, sont stables toutes ensembles, sans qu’il en vienne, car elles ne passent, pour en chasser qui s’en aille ; ce sont les nôtres d’ici, qui seront toutes au complet quand elles auront toutes cessé d’être. Tes années sont un unique jour et ton jour à toi est non pas un « jour pour jour », mais un « aujourd’hui », ton aujourd’hui qui, non plus qu’il ne succède à un hier, ne cède la place à un demain. Ton aujourd’hui, c’est l’éternité, d’où vient que tu as engendré, coéternel, celui auquel tu as dit : « Je t’ai engendré, moi, aujourd’hui. » Les temps, c’est toi qui, tous, les a faits, et tu es avant tous les temps, sans qu’il y ait eu temps quelconque où le temps n’existait pas. Il n’y a donc pas eu de temps où tu n’eusses fait quoi que ce soit, puisque ce temps même tu l’aurais fait. Il n’y a pas davantage des temps coéternels avec toi, puisque, toi, tu demeures et que, s’ils demeuraient, ce ne seraient pas des temps.

- Saint Augustin de Hippone

Saint Augustin – Sermon 185: Pour le jour de Noël

16 décembre, 2010

du site:

http://www.abbaye-champagne.com/themes/textes/augustin/patrologie/38/liturgique.htm

SAINT AUGUSTIN

Sermons sur les temps liturgiques

SERMON CLXXXIV. POUR LE JOUR DE NOEL. I. ABAISSEMENT ET ÉLÉVATION.
151

ANALYSE. — Si le Fils de Dieu en se faisant homme avait cessé d’être Dieu , on comprendrait la répugnance des sages du monde à croire ce mystère et l’inutilité pour nous de l’Incarnation. Mais en devenant ce que nous sommes, Jésus n’a rien perdu de ce qu’il était, et en s’abaissant jusqu’à nous, il veut nous élever jusqu’à lui. Que tous donc se réjouissent et contemplent avec ravissement les merveilles de cette naissance temporelle, où brille quelque éclat de la génération éternelle.
1. C’est aujourd’hui que revient et que brille parmi nous la solennité anniversaire de la naissance de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ ; aujourd’hui que la Vérité s’est élevée de terre et que le jour issu du jour a paru pour être notre jour : réjouissons-nous donc et tressaillons d’allégresse. Eh ! que ne devons-nous point aux abaissements de cette incomparable Majesté? La foi des chrétiens le connaît et le cœur des impies n’y comprend rien. C’est que Dieu a caché ces merveilles aux sages et aux prudents et les a dévoilées aux petits (1). Que les humbles donc s’attachent à ces abaissements d’un Dieu, et appuyée sur ce puissant secours, leur faiblesse pourra s’élever jusqu’à sa hauteur. Pour ces sages et ces prudents qui ne cherchent en Dieu que grandeurs sans croire à ses abaissements, en ne voulant pas de ceux-ci ils n’atteindront pas à celles-là : esprits vains et légers, qui n’ont pour eux que l’enflure et l’orgueil, ils sont comme suspendus entre le ciel et la terre, toujours agités par le souffle des vents. Sans doute ils sont sages et prudents, mais pour ce monde et non. pour Celui qui a fait le monde. Ah ! s’ils avaient cette vraie sagesse, cette sagesse de Dieu qui n’est autre que Dieu même, ils comprendraient que Dieu a pu prendre un corps sans devenir corps ; ils comprendraient qu’il est devenu ce qu’il n’était pas, sans cesser d’être ce qu’il était ; qu’il est venu à nous comme homme, sans s’éloigner de son Père; qu’en demeurant ce qu’il était, il s’est montré ce que nous sommes; et qu’en incarnant sa puissance dans le corps d’un enfant, il ne l’a pas moins appliquée au gouvernement du monde. Lui qui a créé l’univers en demeurant dans le sein de son Père, a donné à une Vierge d’enfanter, pour venir à nous. N’y a-t-il pas un reflet de sa toute-puissance dans cette Vierge qui devient mère et qui reste Vierge après l’avoir mis au monde comme avant de le concevoir; qu’un homme trouve enceinte, sans qu’aucun ‘homme y ait contribué ; qui porte un homme dans son sein, sans le concours d’aucun homme, et qui sans rien perdre de son intégrité emprunte à sa fécondité un nouveau bonheur et une gloire nouvelle? Plutôt que d’ajouter foi à d’aussi étonnantes merveilles, (152) ces orgueilleux aiment mieux croire qu’elles sont de notre part de simples fictions. Aussi, ne pouvant se résoudre à voir l’humanité dans un Dieu fait homme, ils dédaignent le Christ ; et parce qu’ils sentent la divinité au-dessus de leurs mépris, ils ne croient pas en lui. Mais, plus ils dédaignent les abaissements d’un Dieu fait homme, plus nous devons les aimer; et plus il leur semble impossible qu’une Vierge ait donné le jour à un homme, plus nous y devons voir l’empreinte de la puissance divine.
2. Célébrons .donc cette naissance du Seigneur avec tout l’empressement et la solennité qui conviennent. Hommes et femmes, tressaillez de joie, car le Christ s’est fait homme en naissant d’une femme et en honorant ainsi les deux sexes. Que tous les hommes s’attachent au second homme, puisque tous ont été condamnés avec le premier. Une femme nous avait inoculé la mort ; une femme a pour nous enfanté la vie. Pour purifier la chair de péché, elle a donné naissance à une chair semblable seulement à la chair de péché (1). Ne condamnez donc pas la chair, détruisez seulement le péché pour faire vivre la nature. Pour rendre en lui une vie nouvelle au pécheur, un homme ne vient-il pas de naître sans péché?
Réjouissez-vous, saints jeunes hommes, qui vous êtes attachés, avec un soin particulier, à marcher sur les traces du Christ et qui avez renoncé aux unions charnelles. Ce n’est point par le moyen d’une union charnelle que le Christ s’est présenté à vous; ainsi voulait-il vous servir de modèle et vous faire la grâce de dédaigner l’union qui vous a fait naître. En effet n’êtes-vous pas redevables de votre naissance à cette union charnelle en dehors de laquelle le Christ vient vous convier à une union toute spirituelle ? et tout en vous appelant à des noces ne vous a-t-il pas accordé de mépriser d’autres noces? Ainsi vous ne voulez point pour vous de ce qu’il vous a donné l’existence ; c’est que vous aimez, plus que beaucoup d’autres, Celui qui n’est pas né comme vous.
Réjouissez-vous, vierges saintes: une Vierge a enfanté pour vous l’Epoux auquel vous pourrez vous attacher sans contracter aucune souillure; et en ne concevant ni en enfantant vous ne pourrez perdre le trésor que vous chérissez. Réjouissez-vous, justes : voici la naissance de Celui qui fait les justes. Réjouissez-vous, infirmes et malades: voici la naissance du Sauveur. Réjouissez-vous, captifs; voici la naissance du Rédempteur. Réjouissez-vous, serviteurs : voici la naissance de votre Seigneur. Réjouissez-vous , hommes libres: voici naître Celui qui donne la liberté, Réjouissez-vous, chrétiens : voici la naissance du Christ.
3. En naissant de sa Mère il fait de ce jour un jour mémorable pour tous les siècles, comme il a créé tous les siècles en naissant de son Père. Il ne pouvait avoir de mère dans sa génération éternelle; et il n’a point voulu d’homme pour père dans sa génération temporelle. Ainsi le Christ est né à la fois et d’un père et d’une mère, et sans père et sans mère : d’un père, comme Dieu, et d’une mère, comme homme; sans mère, comme Dieu, et sans père, comme homme. « Qui expliquera sa génération (1) » ; soit la première qui est en dehors d u temps, soit la seconde qui est en dehors de l’homme; soit la première qui est sans commencement, soit la seconde qui est sans précédent; soit la première qui n’a jamais été sans être, soit la seconde qui ne s’est jamais reproduite, ni avant ni après; soit la première qui n’a point de fin, soit la seconde qui a aujourd’hui son commencement, mais quand aura-t-elle une fin ? Il était donc juste que les prophètes annonçassent sa naissance future, que les cieux et les anges publiassent sa naissance accomplie. Il reposait dans une étable, et il gouvernait le monde; enfant sans parole, il était la Parole même; les cieux ne sauraient le contenir, et une femme le portait sur son sein; oui, elle dirigeait notre Roi, elle portait Celui qui nous porte, elle allaitait Celui qui nous nourrit de lui-même. Quelle incontestable faiblesse ! quel abaissement prodigieux ! et pourtant la divinité tout entière y est enfermée. L’enfant dépendait de sa mère, et sa puissance la conduisait; il prenait son sein, et il la nourrissait de la vérité.
Ah ! qu’il mette en nous le comble à ses dons, puisqu’il n’a pas dédaigné de partager nos commencements; qu’il nous rende fils de Dieu, puisqu’il a voulu, pour notre amour; devenir fils de l’homme.

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1. Matt. XI, 25.
1. Rom. VIII, 3.
1. Isaïe, LIII, 8.

Prière à tous les saints – Saint Augustin

31 octobre, 2010

du site:

http://www.liturgiecatholique.fr/Priere-a-tous-les-saints.html

Prière à tous les saints

Saint Augustin

Reine de tous les saints, glorieux Apôtres et Evangélistes, Martyrs invincibles, généreux Confesseurs, savants Docteurs, illustres Anachorètes, dévoués Moines et Prêtres, Vierges pures et pieuses femmes, je me réjouis de la gloire ineffable à laquelle vous êtes élevés dans le Royaume de Jésus-Christ, notre divin Maître.
Je bénis le Très-Haut des dons et des faveurs extraordinaires dont il vous a comblés et du rang sublime où il vous élève. O amis de Dieu !
O vous qui buvez à longs traits au torrent des délices éternelles, et qui habitez cette patrie immortelle, cette heureuse cité, où abondent les solides richesses ! Puissants Protecteurs, abaissez vos regards sur nous qui combattons, qui gémissons encore dans l’exil, et obtenez-nous la force et les secours que sollicite notre faiblesse pour atteindre vos vertus, perpétuer vos triomphes et partager vos couronnes.
O Vous tous, bienheureux habitants du ciel, saints amis de Dieu qui avez traversé la mer orageuse de cette vie périssable, et qui avez mérité d’entrer dans le port tranquille de la paix souveraine et de l’éternel repos !
O saintes âmes du paradis, vous qui, maintenant à l’abri des écueils et des tempêtes, jouissez d’un bonheur qui ne doit pas finir, je vous en conjure, au nom de la charité qui remplit votre coeur, au nom de Celui qui vous a choisis et qui vous a faits tels que vous êtes, écoutez ma prière.
Prenez part à nos travaux et à nos combats, vous qui portez sur vos vos fronts vainqueurs une couronne incorruptible de gloire ; ayez pitié de nos innombrables misères, vous qui êtes à jamais délivrés de ce triste exil ; souvenez-vous de nos tentations, vous qui êtes affermis dans la justice ; intéressez-vous à notre salut, vous qui n’avez plus rien à redouter pour le vôtre ; tranquillement assis sur la montagne de Sion, n’oubliez pas ceux qui gisent encore couchés dans la vallée des larmes.
Puissante armée des saints, troupe bienheureuse des apôtres et évangélistes, des martyrs, des confesseurs, des docteurs, des anachorètes et des moines, des prêtres, des saintes femmes et des vierges pures, priez sans cesse pour nous misérables pécheurs. Tendez-nous une main secourable, détournez de nos têtes coupables la justice irritée de Dieu ; faites entrer par vos prières notre frêle navire dans le port de la bienheureuse éternité.

Saint Augustin

Saint Augustin: La vocation primitive de la personne humaine

18 septembre, 2010

du site:

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20000811_agostino-citta_fr.html

Saint Augustin, La Cité de Dieu, XII, 22 – 24.

La vocation primitive de la personne humaine

« Il est facile maintenant de comprendre qu’il valait beaucoup mieux multiplier le genre humain, comme Dieu l’a fait, en le faisant sortir d’un seul homme créé d’abord, plutôt que de plusieurs. Quant aux animaux : les uns solitaires, disons sau­vages, c’est-à-dire qui préfèrent vivre seuls, comme les aigles et les milans, les lions et les loups, etc. ; les autres grégaires, parce qu’ils préfèrent vivre réunis en troupes, tels les colombes et les étourneaux, les cerfs et les daims, etc. ; ni pour les uns ni pour les autres Dieu n’a pourvu à leur propagation à partir d’un seul, il les a fait exister plusieurs à la fois. A l’homme au contraire, il donna une nature intermédiaire entre l’ange et la bête : s’il restait soumis au créateur comme à son maître, gardant avec une pieuse obéissance ses commandements, il devait rejoindre la société des anges et obtenir à jamais sans passer par la mort, la béatitude éternelle ; si, abusant de sa libre volonté par orgueil et désobéissance, il offensait le Seigneur son Dieu, il devait, condamné à la mort, vivre à la façon des bêtes, esclave des passions et voué après la mort à un éternel supplice. C’est pourquoi Dieu créa l’homme unique et seul, non certes pour le laisser isolé de toute société humaine, mais pour mettre en plus vif relief à ses yeux l’unité de cette société et le lien de la concorde reliant les hommes entre eux, non seulement par une ressemblance de nature, mais encore par un sentiment de parenté. Bien plus, la femme elle-même, la compagne de l’homme, il a voulu la créer non pas comme il fit pour l’homme, mais en la tirant de lui, pour que ce fût absolument d’un seul que se pro­pageât le genre humain. Dieu n’ignorait pas d’ailleurs que l’homme pécherait et que désormais, voué à la mort, il engendrerait des fils destinés à mourir ; et cesmortels porteraient si loin leur férocité criminelle que les bêtes, sans raison, sans volonté, aux souches nombreuses pullulant des eaux et des terres vivraient entre elles en leur espèce avec plus de sécurité et de paix que les hommes dont la race était née d’un seul en gage de concorde. Ni les lions, en effet, ni les dragons n’ont jamais déchaîné entre eux des guerres semblables à celles des hommes. Mais Dieu prévoyait aussi qu’un peuple pieux, appelé par sa grâce à l’adoption divine, délié du péché et justifié par l’Esprit-Saint, serait associé aux saints anges dans la paix éternelle, quand serait détruite sa dernière ennemie, la mort. Ce peuple aurait intérêt à ne pas oublier que Dieu a fait sortir le genre humain d’un seul homme pour montrer aux hommes combien il appréciait l’unité dans leur pluralité.

Dieu fit donc l’homme à son image. Il lui a, en effet, créé une âme apte par sa raison et son intelligence à s’élever au-dessus de tous les animaux de la terre, des eaux et de l’air, dépourvus d’un esprit de cette nature. Ayant donc formé l’homme avec de la poussière, il lui a communiqué par son souffle cette âme dont je viens de parler, soit qu’il l’eût déjà faite, soit plutôt en la faisant par son souffle même, voulant que le souffle qu’il produisait ainsi (car « insuffler » est-ce autre chose que produire un souffle?) fût l’âme même de l’homme. Puis, à la manière de Dieu, il lui a fait, avec un os tiré de son côté, une épouse pour l’assister dans la génération. Ce qu’on ne doit pas imaginer d’ailleurs selon nos coutumes charnelles, comme nous voyons d’ordinaire les artisans se servir des membres de leur corps pour fabriquer avec une matière quelconque ce qui relève de leur art. Lamain de Dieu, c’est la puissance de Dieu qui produit invisiblement jusqu’aux choses visibles : mais cela paraît fable plutôt que vérité à qui mesure sur les œuvres de la vie courante la puissance et la sagesse de Dieu qui sait et qui peut, même sans semence, produire les semences mêmes.

Quant aux origines de la création, ces gens qui les ignorent, s’en font des idées fausses. Comme s’ils n’auraient pas trouvé encore plus incroyables la conception et la naissance humaine, si on les leur avait racontées avant qu’ils ne les aient connues par expérience ; encore que beaucoup d’entre eux n’y voient que des effets de forces corporelles, plutôt que des œuvres de l’intelligence divine. »

Prière:

Dieu, dans ta Sagesse, Tu as créé le genre humain pour qu’il trouve son bonheur en Toi, son Créateur. Nous te remercions de nous avoir donné l’intelligence pour découvrir par l’étude et l’observation les lois que Tu as placées dans la nature. Nous te demandons de guider nos pas d’enfants pour que nous puissions parvenir à la compréhension des mystères de notre monde qui nous échappent encore et ainsi t’aimer et T’adorer dans nos efforts. Nous te le demandons par Jésus le Christ notre Seigneur.

Accorde-moi de T’aimer (prière, Saint Augustin)

28 août, 2010

du site:

http://users.skynet.be/prier/textes/PR0962.HTM

Accorde-moi de T’aimer

Auteur : Saint Augustin 
 
De toutes mes forces, celles que Tu m’as données,
je T’ai cherché.
Désirant voir ce que j’ai cru,
et j’ai lutté et j’ai souffert.

Mon Dieu,
Mon Seigneur,
Mon unique espoir,
accorde-moi de n’être jamais las de Te chercher,
qu’avec passion sans cesse je cherche Ton visage.

Toi qui m’as donné de Te trouver,
donne-moi le courage de Te chercher
et d’espérer Te trouver toujours davantage.

Devant Toi ma solidité : garde-la.
Devant Toi ma fragilité : guéris-la
Devant Toi tout ce que je sais, tout ce que j’ignore.

Par là où Tu m’as ouvert, j’entre : accueille-moi.
De là où Tu m’as fermé, j’appelle : ouvre-moi.

Accorde-moi de ne pas T’oublier.
Accorde-moi de Te comprendre.
Mon Dieu,
Mon Seigneur,
accorde-moi de T’aimer.

28 août – SAINT AUGUSTIN: Le combat chrétien

28 août, 2010

dal sito:

http://missel.free.fr/Sanctoral/08/28.php

28 août – SAINT AUGUSTIN

Le combat chrétien

La couronne de la victoire n’est promise qu’à ceux qui combattent. Dans les divines écritures, nous trouvons continuellement que la couronne nous est promise si nous sommes vainqueurs. Mais pour ne pas abuser des citations, on lit en toutes lettres dans l’apôtre Paul : « J’ai parfait mon oeuvre, j’ai achevé ma course, j’ai conservé la foi, je n’ai plus à attendre que la couronne de justice. » Nous devons donc connaître qui est l’adversaire que nous avons à vaincre pour être couronnés. C’est, en effet, celui que notre Seigneur a vaincu en premier, afin que nous aussi, demeurant dans le Seigneur, nous le vainquions. Car la vertu, et la sagesse de Dieu, et le Verbe par qui tout a été fait, qui est le Fils unique de Dieu, demeure à jamais immuable au-dessus de toute créature. Et puisque la créature qui n’a pas péché est au-dessous de lui, combien plus est au-dessous de lui toute créature pécheresse ? Donc, puisque au-dessous de lui sont tous les saints anges, beaucoup plus au-dessous de lui sont tous les anges prévaricateurs dont le diable est le prince. Mais parce que le diable avait trompé notre nature, le Fils unique de Dieu a daigné revêtir notre propre nature, afin que le diable fût vaincu par elle, et que celui que Dieu a toujours sous son pouvoir, il le mît aussi sous le nôtre. C’est ce qu’il signifie en disant : « Le prince de ce monde a été jeté dehors. » Non qu’il ait été jeté hors du monde, comme le pensent certains hérétiques, mais hors des âmes de ceux qui adhèrent à la parole de Dieu et qui n’aiment pas le monde dont il est le prince. Il en est le prince parce qu’il domine sur ceux qui aiment les biens temporels, lesquels sont contenus dans ce monde visible. Non pas qu’il soit le seigneur même de ce monde mais il est le prince des cupidités par lesquelles on convoite tout ce qui passe, de sorte que lui sont assujettis ceux qui négligent le Dieu éternel et qui aiment les choses instables et changeantes. « En effet, la racine de tous les maux est la cupidité. Pour s’y être livrés, certains ont erré hors de la foi et se sont engagés dans de nombreuses douleurs. » Par cette cupidité, le diable règne dans l’homme et tient son coeur. Tels sont tous ceux qui aiment ce monde. Mais on jette le diable dehors quand on renonce de tout son coeur à ce monde. C’est ainsi qu’on renonce au diable, qui est prince de ce monde, lorsqu’on renonce à ses corruptions, et à ses pompes, et à ses anges. Voilà pourquoi le Seigneur lui-même, portant désormais triomphante la nature de l’homme, dit : « Sachez que j’ai vaincu le monde. »

Beaucoup objectent : « Comment pouvons-nous vaincre le diable que nous ne voyons pas ? » Mais nous avons un Maître qui a daigné nous apprendre comment se vainquent les ennemis invisibles. C’est de lui que l’Apôtre dit : « Vainqueur de la chair, il se proposa en exemple aux principautés et aux puissances, triomphant hardiment d’elles en lui-même. » Là donc sont vaincues les puissances invisibles, nos ennemies, où sont vaincues les cupidités visibles. Et parce que nous vainquons en nous-mêmes les cupidités temporelles, il est nécessaire que soit vaincu aussi en nous-mêmes celui par qui ces cupidités mêmes règnent dans l’homme. En effet, ceux qui nous attaquent extérieurement, nous les vainquons intérieurement en vainquant les concupiscences par lesquelles ils nous dominent. Et ceux qu’ils trouvent semblables à eux, ils les entraînent avec eux aux supplices.

C’est ainsi que même l’Apôtre dit qu’il combat en lui contre les puissances extérieures. Car il déclare : « Ce n’est pas contre des êtres de chair et de sang que nous avons à combattre, mais contre les princes et les puissances de ce monde, qui gouvernent les ténèbres, contre les esprits de malice répandus dans les espaces célestes. »

Averti de revenir à moi-même, je suis entré au fond de mon cour, sous votre conduite, Seigneur, et j’ai pu le faire, parce que vous êtes venu a mon secours. Je suis entré, et avec le regard de mon âme, quel que fût son état, au-dessus de ce même regard, au-dessus de mon intelligence, j’ai vu la lumière immuable. Ce n’était pas cette lumière ordinaire que tout le monde peut voir ; ce n’était pas non plus une lumière de même nature, mais plus puissante, qui aurait brillé de plus en plus et aurait tout rempli par son éclat. Non, cette lumière n’était pas cela, elle était autre chose, tout autre chose. Elle n’était pas au-dessus de mon esprit comme l’huile flotte à la surface de l’eau, ni comme le ciel s’étend au-dessus de la terre. Elle était au-dessus de moi parce qu’elle m’a créé ; j’étais au-dessous d’elle parce que créé par elle. Celui qui connaît la vérité la connaît, et celui qui la connaît, connaît l’éternité. C’est l’amour qui la connaît !

O éternelle vérité, ô véritable charité, ô chère éternité ! Vous êtes mon Dieu, je soupire après vous jour et nuit. Quand je vous ai connu pour la première fois, vous m’avez soulevé vers vous pour me faire voir l’existence de quelque chose que je devrais voir, mais que je ne pourrais pas encore voir moi-même. Vous avez ébloui la faiblesse de mon regard par la puissance de votre rayonnement, et je frissonnais d’amour et d’effroi. J’ai découvert que j’étais loin de vous, dans le pays de l’exil et de la dissemblance, et il me semblait que j’entendais votre voix, venant du haut du ciel : « je suis la nourriture des forts : grandis et tu me mangeras. Tu ne me changeras pas en toi, comme la nourriture de ton corps, c’est toi qui seras changé en moi. »

Je cherchais le moyen d’acquérir la force qui me rendrait capable de vivre uni à vous, et je ne la trouvais pas. Enfin, j’ai embrassé le Médiateur entre Dieu et les hommes, l’homme Jésus Christ, lui qui est au-dessus de tout, Dieu béni éternellement. C’est lui qui nous appelle et nous dit : Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. Il unit à la chair – puisque le Verbe s’est fait chair – la nourriture que j’étais incapable de prendre, afin que votre sagesse, par laquelle vous avez tout créé, se transforme en lait pour s’adapter à notre condition d’enfants.

Je vous ai aimée bien tard, Beauté si ancienne et si nouvelle, je vous ai aimée bien tard ! Mais voilà : vous étiez au-dedans de moi quand j’étais au-dehors, et c’est dehors que je vous cherchais ; dans ma laideur, je me précipitais sur la grâce de vos créatures. Vous étiez avec moi mais je n’étais pas avec vous. Elles me retenaient loin de vous, ces choses qui n’existeraient pas si elles n’existaient en vous. Vous m’avez appelé, vous avez crié, vous avez vaincu ma surdité vous avez brillé, vous avez resplendi et vous avez dissipé mon aveuglement ; vous avez répandu votre parfum, je l’ai respiré et je soupire maintenant pour vous ; je vous ai goûtée et j’ai faim et soif de vous ; vous m’avez touché et je me suis enflammé pour obtenir la paix qui est en vous.

Saint Augustin
Des Confessions (VIII 10. 18 & X 27)

27 août – Sainte Monique (Saint Augustin : prière pour le repos de l’âme de sa mère, sainte Monique)

26 août, 2010

du site:

http://missel.free.fr/Sanctoral/08/27.php

27 août – Sainte Monique

O mon Dieu, je ne laisse pas de pleurer en votre présence pour celle qui vous a si fidèlement servi, pour celle qui, après m’avoir porté dans son sein pour me faire naître à la lumière passagère de ce monde, me porta depuis dans son coeur, afin de me faire renaître à votre lumière éternelle.

O Dieu de mon coeur, Dieu de miséricorde, quelque sujet que j’aie de me réjouir en vous et de vous rendre grâces de tout le bien que fit ma mère pendant sa vie, je veux laisser à part, quant à présent, toutes ses bonnes oeuvres, et je viens implorer auprès de vous le pardon de ses péchés.

Exaucez-moi, je vous en conjure, par les mérites de celui qui fut attaché pour nous à une croix, et qui, maintenant assis à votre droite, ne cesse d’intercéder pour nous.

Je sais que votre servante a pratiqué les oeuvres de miséricorde, et qu’elle a pardonné du fond de son coeur à ceux qui l’avait offensée : pardonnez-lui donc aussi, mon Dieu, les fautes qu’elle a pu commettre envers vous pendant tout le temps qui s’est passé depuis son baptême jusqu’à sa mort. Pardonnez-lui, Seigneur, je vous en supplie ; que votre miséricorde l’emporte sur votre justice, parce que vous êtes fidèle dans vos promesses, et que vous avez promis la miséricorde à ceux qui auront été miséricordieux.

Je crois que vous avez déjà fait pour mère ce que je vous demande ; et cependant, Seigneur, puissent les prières que je vous offre être agréables à vos yeux. Elle-même nous recommanda de vous les adresser, et de nous souvenir d’elle à l’autel du Seigneur.

N’oubliez pas, mon Dieu, que celle pour qui je vous prie avait fortement attaché son âme, par les liens d’une foi inébranlable, à cet admirable mystère de notre rédemption. Que rien ne puisse donc l’arracher à la protection de son Dieu ! Que l’ennemi ne réussisse, ni par la ruse, ni par la force, à la séparer de vous ; que son âme repose dans la paix éternelle. Amen.

Saint Augustin : prière pour le repos de l’âme de sa mère, sainte Monique.

Extrait de l’homélie de Saint Augustin : «La Vérité aujourd’hui s’est élevée de terre ; le Christ est né de la chair.

21 décembre, 2009

du site:

http://www.mariedenazareth.com/8253.0.html

Noël ou les noces de Dieu et de l’humanité

Les noces de Dieu et de l’humanité, voilà comment saint Augustin, évêque d’Hippone au 5ème siècle, fêtait Noël !

Le Christ est Dieu qui s’unit véritablement à l’humanité sans rien perdre de sa divinité. Ce sont de vrais noces : le Christ est vrai homme : il est né de la chair, il est la Vérité élevée de terre ; le Christ est donc comme un époux qui, comme dit le psaume, s’élance d’une extrémité du ciel. 

Extrait de l’homélie de Saint Augustin :

«La Vérité aujourd’hui s’est élevée de terre ; le Christ est né de la chair.
Livrez-vous à une sainte joie ; que ce jour attache vos esprits à la pensée du jour éternel, souhaitez, espérez fermement les biens célestes, et puisque vous en avez reçu le pouvoir, comptez devenir enfants de Dieu.
N’est-ce pas pour vous qu’est né dans le temps l’Auteur même des temps, pour vous que s’est montré au monde le Fondateur du monde, pour vous enfin que le Créateur est devenu créature ?
Pourquoi donc, ô mortels, mettre encore votre esprit dans ce qui est mortel ? pourquoi consacrer toutes vos forces à retenir, s’il était possible, une vie fugitive ? Ah ! de plus brillantes espérances rayonnent sur la terre, et ceux qui l’habitent n’ont reçu rien moins que la promesse de vivre dans les cieux.
Or, pour faire croire à cette promesse, une chose bien plus incroyable vient d’être donnée au monde.
Pour rendre les hommes des dieux, Dieu s’est fait homme ; sans rien perdre de ce qu’il était, il a voulu devenir ce qu’il avait fait ; oui, devenir ce qu’il a fait, unissant l’homme à Dieu, sans anéantir Dieu dans l’homme.
Nous sommes étonnés de voir une Vierge qui devient Mère ; il nous faut des efforts pour convaincre les incrédules de la réalité de cet enfantement tout nouveau, pour leur faire admettre qu’une femme a conçu sans le concours d’aucun homme ; qu’elle a donné le jour à un Enfant dont aucun mortel n’était le père ; enfin que le sceau sacré de sa virginité est resté inviolable au moment de la conception et au moment de l’enfantement.
La puissance de Dieu se montre ici merveilleuse ; mais sa miséricorde plus admirable encore, puisqu’à la puissance il a joint la volonté de naître ainsi.
Il était le Fils unique du Père, avant de devenir le Fils unique de sa mère ; lui-même l’avait formée, avant d’être formé dans son sein ; avec son père il est éternel, et avec sa Mère il est enfant d’un jour ; moins âgé que la Mère dont il est formé, il est antérieur à tout sans être formé de son Père ; sans lui le Père n’a jamais existé, et sa Mère n’existerait pas sans lui. [...]  
Il était à craindre qu’on ne vint à mépriser la Vérité à cause qu’elle s’est élevée de terre, lorsque, semblable à l’époux qui sort du lit nuptial, elle s’est élancée du sein maternel où le Verbe de Dieu avait contracté avec la nature humaine une ineffable union. Afin de détourner ces mépris, et pour empêcher que malgré sa naissance admirable, malgré ses paroles et ses oeuvres merveilleuses, la ressemblance de la chair du Christ avec la chair de péché ne fit voir en lui qu’un homme, après ces mots « Pareil à l’époux sortant du lit nuptial, il s’est élancé comme un géant pour fournir sa carrière », viennent aussitôt ceux-ci : «Il est parti d’une extrémité du ciel ».
Si donc, « la Vérité s’est « élevée de terre », c’était bonté de sa part, et non pas nécessité ; miséricorde, et non pas dénuement.
Pour s’élever de terre, cette Vérité est descendue des cieux ; pour sortir de son lit nuptial, l’Epoux s’est élancé d’une extrémité du ciel.
Voilà pourquoi il est né aujourd’hui.  

Ce jour est le plus court des jours de la terre et c’est à dater de lui que les jours commencent à grandir. Ainsi Celui qui s’est rapetissé pour nous élever, a fait choix du jour qui est à la fois le moindre et le principe des grands jours.
En naissant ainsi et malgré son silence, il nous crie en quelque sorte avec une voix retentissante
que pour nous il s’est fait pauvre et qu’en lui nous devons apprendre à être riches;
que pour tous il s’est revêtu de la nature de son esclave et que nous devons en lui recouvrer la liberté;
que pour nous il s’est élevé de terre et que nous devons avec lui posséder le ciel.»

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Saint Augustin, Sermon 192, pour le jour de Noël, Oeuvres de saint Augustin, tome 7, édition Guérin Bar le Duc, 1868. Extraits par F. Breynaert.

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