http://missel.free.fr/Sanctoral/07/25.php
Sommaire :
Biographie et histoire
Précis d’un panégyrique de saint Jacques par Bossuet
Saint Jacques le Majeur et saint Christophe à Paris
Biographie et histoire
Jacques est un nom théophore, assez commun au temps du Christ, qui signifie « que (Dieu) protège », comme Jacob, dont il est la forme grécisée. Deux apôtres de Jésus portent le nom de Jacques : Jacques, dit le majeur, fils de Zébédée, dont on célèbre aujourd’hui la fête ; l’apôtre Jacques, dit le mineur, fils d’Alphée, premier évêque de Jérusalem et auteur de l’épître.
Frère aîné de Jean l’évangéliste, Jacques était fils de Zébédée et de Salomé ; il habitait Bethsaïde ou Capharnaüm et pratiquait la pêche sur le lac de Génésareth, en compagnie de son père et de mercenaires embauchés. Sans doute était-il par sa mère cousin de Jésus et appartenait-il au groupe des disciples de Jean-Baptiste, qui sur les bords du Jourdain furent conquis par Jésus. Sa famille jouissait d’une certaine aisance, puisque son père avait des mercenaires et que sa mère aura la possibilité d’accompagner le Seigneur dans ses randonnées apostoliques, de lui venir en aide et d’acheter des aromates d’embaumement.
Choisi comme Apôtre, Jacques ne tarda pas à figurer presque en tête des Douze, si l’on en juge par la place qu’il occupe dans les quatre listes apostoliques et par le comportement de Jésus à son égard. Avec Pierre et Jean, il formait le groupe des intimes de Jésus, seuls admis au spectacle de certains grands événements comme la résurrection de la fille de Jaïre, la Transfiguration et la sainte Agonie de Notre Seigneur au Mont des Oliviers. C’est sans doute cette situation privilégiée qui l’enhardit à faire plusieurs demandes intempestives, révélatrices de ses tendances naturelles. De passage en Samarie il réclama l’extermination par la foudre d’un village inhospitalier ; en route vers Jérusalem et dans la persuasion où il était d’une prochaine instauration sur terre du royaume messianique, il sollicita, ou poussa sa mère à solliciter, pour lui et son frère, les premières places dans ce royaume ; à l’annonce de la ruine du Temple, il s’enquit immédiatement de la date exacte de cet événement. Son impétuosité était telle qu’il reçut de Jésus, avec son frère Jean, le surnom de « Fils du tonnerre. » Il n’en imitera pas moins la défection des autres apôtres, après l’arrestation de son Maître au jardin de l’Agonie.
Figure importante de l’Eglise primitive, c’est sur lui et sur Pierre que porte, vers 41-44, le choix meurtrier du roi Hérode Agrippa I° qui voulait abattre les têtes de l’Eglise pour plaire aux Juifs. Jacques le majeur périt alors par le glaive, donnant sa vie en témoignage de sa foi, comme Jésus le lui avait prédit.
Les traditions grecques et latines ne disent presque rien sur Jacques le Majeur ; il y est simplement fait mention ici ou là de son nom et de son martyre. Eusèbe de Césarée est le seul auteur des premiers siècles à rapporter une anecdote qu’il dit venir de Clément d’Alexandrie qui la tenait des ancêtres. Jacques, dit Eusèbe de Césarée, à la suite d’une trahison, est mené devant le tribunal juif où il confesse sa foi ; à l’audition de son témoignage, l’homme qui l’avait livré se convertit. Tous deux sont condamnés à être décapités. Sur le chemin du supplice, le nouveau converti demande pardon à sa victime.
Les traditions postérieures parlent de la richesse de ses parents, de leur installation à Jérusalem, sur le mont Sion, de leurs relations avec le grand prêtre qui louait une partie de leur maison, de son apostolat en Judée, en Samarie et en Espagne, d’une épître, de sa mort et des prodiges qui la précédèrent, de son tombeau à Jérusalem, à Césarée ou en Espagne. Les dates de la fête de saint Jacques le Majeur, tant par l’Eglise latine (25 juillet) que par l’Eglise grecque (30 avril) ou l’Eglise syriaque (27 décembre), ne correspondent guère pas les Actes des Apôtres (XII 3) qui situent la mort de l’Apôtre juste avant la Pâque, fin mars ou début avril.
Saint Jacques serait venu en Espagne débarquant à l’extrémité ouest de la côte cantabrique à Iria Flavia (l’actuelle Padron). Il aurait prêché en Galice et sur les bords de l’Ebre. Un soir d’octobre 39, il priait près de l’Ebre, quand il fut ébloui par une lumière éclatante où lui apparut la Vierge, assise sur un pilier de jaspe, escortée par des milliers d’anges. Marie lui dit : « C’est ici que je veux étre honorée. Tu vas me construire un temple où ce pilier restera jusqu’à la fin du monde. Là j’accomplirai des miracles ». Saint Jacques édifia une chapelle, qui aurait été à l’origine de la basilique Notre-Dame del Pilar, à Saragosse.
Revenu en Judée, après un séjour de sept ans en Espagne, saint Jacques y fut exécuté. La légende espagnole dit que sept de ses disciples s’embarquèrent à Jaffa avec son corps dans un sarcophage ; l’embarcation « poussée par les anges », franchit les Colonnes d’Hercule (Gibraltar) et remonta le long de la péninsule pour venir s’echouer à l’extrémité ouest de la côte cantabérique à l’embouchure du rio Ulla. Le sarcophage fut enfoui, en sorte que le lieu de l’inhumation resta longtemps ignoré.
Au début du IX° siècle, la Reconquête ayant chassé les Maures de Galice, un ermite vit en songe le corps de saint Jacques et annonça la découverte prochaine de ses restes ; quelques jours plus tard, des bergers, guidés par la lumière d’une nouvelle étoile, découvrirent dans un champ le sarcophage ; d’où le nom de Campus stellæ (le champ de l’étoile), Compostelle. Dès qu’il l’apprit, Alphonse II le Chaste, roi des Asturies, y fit bâtir un sanctuaire ; il envoya l’os frontal du squelette à Charlemagne qui, ayant vu saint Jacques en songe, organisa l’expédition d’Espagne. Autour du premier sanctuaire naquit Saint-Jacques-de-Compostelle, Santiago (par contraction des deux mots Sant et Jago).
Saint national des Espagnols, saint Jacques devint le guerrier qui force la victoire. La veille de la bataille de Clavijo qui opposa Abdérame III à Ramiro I° (844), saint Jacques apparut au roi des Asturies et lui promit la victoire. Au cours de la bataille, on vit descendre du ciel un cavalier revêtu d’une armure étincelante, brandissant une épée flamboyante, avec laquelle il fit un carnage parmi les Maures. D’où le nouveau surnom de Matamore, par déformation de matamoros (tueurs de Maures) donné à saint Jacques, et sa statue équestre, maintes fois recopiée, promenée dans les processions, le représentant coiffé d’un vaste feutre dont le bord est relevé sur le front et brandissant une courte épée qui ressemble à un cimeterre ; un Maure pourfendu par cette arme est foulé par les pieds de sa monture. D’où encore et désormais, le cri de guerre Santiago, poussé par les Espagnols, lorsqu’ils foncent contre leurs ennemis.
Précis d’un panégyrique de saint Jacques par Bossuet
F. Lachat, en 1883, datait ce texte de 1688 ; l’abbé J. Lebarq, en 1890, datait ce texte de 1660, suivi en cela, en 1960, par le Professeur J. Truchet
Dites que mes deux fils soient assis dans votre royaume,
l’un à votre droite, et l’autre à votre gauche (Saint Matthieu XX 21).
Nous voyons trois choses dans l’Evangile : premièrement leur ambition réprimée : Vous ne savez pas ce que vous demandez ; secondement, leur ignorance instruite : Pouvez-vous boire le calice que je dois boire ? troisièmement, leur fidélité prophétisée : Vous boirez, il est vrai, mon calice.
PREMIER POINT
Il est assez ordinaire aux hommes de ne savoir ce qu’ils demandent, parce qu’ils ont des désirs qui sont des désirs de malades, inspirés par la fièvre, c’est-à-dire, par les passions ; et d’autres ont des désirs d’enfants, inspirés par l’imprudence. Il semble que celui de ces deux apôtres n’est pas de cette nature : ils veulent être auprès de Jésus-Christ, compagnons de sa gloire et de son triomphe : cela est fort désirable. L’ambition n’est pas excessive : il veut que nous régnons avec lui ; et lui qui nous promet de nous placer jusque dans son trône, ne doit pas trouver mauvais que l’on souhaite d’être à ses côtés. Néanmoins il leur répond : Vous ne savez pas ce que vous demandez.
Pour découvrir leur erreur, il faut savoir que les hommes peuvent se tromper doublement : ou en désirant comme bien ce qui ne l’est pas ; ou en désirant un bien véritable, sans considérer assez en quoi il consiste, ni les moyens pour y arriver. L’erreur des apôtres ne gît pas dans la première de ces fausses idées ; ce qu’ils désirent est un fort grand bien, puisqu’ils souhaitent d’être assis auprès de la personne du Sauveur des âmes. Mais ils le désirent avec un empressement trop humain ; et c’est là la nature de leur erreur, causée par l’ambition qui les anime. Ils s’étaient imaginé Jésus-Christ dans un trône, et ils souhaitaient d’être à ses côtés, non pas pour avoir le bonheur d’être avec lui, mais pour se montrer aux autres dans cet état de magnificence mondaine : tant il est vrai qu’on peut chercher Jésus-Christ même avec une intention mauvaise, pour paraître devant les hommes, afin qu’il fasse notre fortune. Il veut qu’on l’aime nu et dépouillé, pauvre et infirme, et non seulement glorieux et magnifique. Les apôtres avaient tout quitté pour lui, et néanmoins ils ne le cherchaient pas comme il faut, parce qu’ils ne le cherchaient pas seul. Voilà leur erreur découverte, et leur ambition réprimée : voyons maintenant, dans le deuxième point, leur ignorance instruite.
SECOND POINT
Il semble quelquefois que le Fils de Dieu ne réponde pas à propos aux questions qu’on lui fait. Ses apôtres disputent entre eux pour savoir quel est le plus grand ; et Jésus-Christ leur présente un enfant, et leur dit : Si vous ne devenez pas comme de petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. Si donc le divin Sauveur en quelques occasions ne satisfait pas directement aux demandes qui lui sont faites, il nous avertit alors de chercher la raison dans le fond de la réponse. Ainsi en ce lieu on lui parle de gloire, et il répond en présentant l’ignominie qu’il doit souffrir : c’est qu’il va à la source de l’erreur. Les deux disciples s’étaient figuré qu’à cause qu’ils touchaient de plus près au Fils de Dieu par l’alliance du sang, ils devaient aussi avoir les premières places dans son royaume ; c’est pourquoi, pour les désabuser, il les rappelle à sa croix : Pouvez-vous boire le calice ? Et pour bien entendre cette réponse, il faut savoir qu’au lieu que les rois de la terre tirent le titre de leur royauté de leur origine et de leur naissance, Jésus-Christ tire le sien de sa mort. Sa naissance est royale, il est le fils et l’héritier de David ; et néanmoins il ne veut être roi que par sa mort. Le titre de sa royauté est sur sa croix : il ne confesse qu’il est roi qu’étant près de mourir. C’est donc comme s’il disait à ses disciples : Ne prétendez pas aux premiers honneurs parce que vous me touchez par la naissance : voyez si vous avez le courage de m’approcher par la mort. Celui qui touche le plus à ma croix, c’est celui à qui je donne la première place ; non pour le sang qu’il a reçu dans sa naissance, mais pour celui qu’il répandra pour moi dans sa mort : voilà le bonheur des chrétiens. S’ils ne peuvent toucher Jésus-Christ par la naissance, ils le peuvent par la mort, et c’est là la gloire qu’ils doivent envier.
TROISIEME POINT
Les disciples acceptent ce parti : Nous pouvons, disent-ils, boire votre calice ; et Jésus-Christ leur prédit qu’ils le boiront. Leur promesse n’est pas téméraire. Mais admirons la dispensation de la grâce dans le martyre de ces deux frères. Ils demandaient deux places singulières dans la gloire, il leur donne deux places singulières dans sa croix. Quant à la gloire, ce n’est pas à moi de vous la donner : je ne suis distributeur que des croix, je ne puis vous donner que le calice de ma Passion ; mais dans l’ordre des souffrances, comme vous êtes mes favoris, vous aurez deux places singulières. L’un mourra le premier, et l’autre le dernier de tous mes apôtres ; l’un souffrira plus de violences, mais la persécution plus lente de l’autre éprouvera plus longtemps sa persévérance. Jacques a l’avantage, en ce qu’il boit le calice jusqu’à la dernière goutte. Jean le porte sur le bord des lèvres : prêt à boire, on le lui ravit, pour le faire souffrir plus longtemps.
Apprenons par cet exemple à boire le calice de notre Sauveur, selon qu’il lui plaît de le préparer. Il nous arrive une affliction, c’est le calice que Dieu nous présente : il est amer, mais il est salutaire. On nous fait une injure : ne regardons pas celui qui nous déchire ; que la foi nous fasse apercevoir la main de Jésus-Christ, invisiblement étendue pour nous présenter ce breuvage. Figurons-nous qu’il nous dit : Avez-vous le courage de le boire ? Mais avez-vous la hardiesse, ou serez-vous assez lâches de le refuser de ma main, d’une main si chère ? Une médecine amère devient douce, en quelque façon, quand un ami, un époux, la présente : vous la buvez volontiers, malgré la répugnance de la nature. Quoi ! Jésus-Christ vous la présente, et votre main tremble, votre coeur se soulève ! Vous voudriez répandre par la vengeance la moitié de son amertume sur votre ennemi, sur celui qui vous a fait tort ! Ce n’est pas là ce que Jésus-Christ demande. Pouvez-vous boire, dit-il, ce calice des mauvais traitements, qu’on vous fera boire ? Et non pas : Pouvez-vous renverser sur la tête de l’injuste qui vous vexe ce calice de la colère qui vous anime ? La véritable force, c’est de boire tout jusqu’à la dernière goutte. Disons donc avec les apôtres : nous pouvons : mais voyons Jésus-Christ qui a tout bu comme il l’avait promis : le calice que je vais boire ; et quoiqu’il fût tout-puissant pour l’éloigner de lui, il n’a usé de son autorité pour réprimer celui qui, par l’affection tout humaine qu’il lui portait, voulait l’empêcher de le boire : Le calice que me donne mon Père, je ne le boirais pas ?
Saint Jacques le Majeur et saint Christophe à Paris
Nous fêtons à la fois saint Jacques le Majeur et saint Christophe qui sont l’un et l’autre patrons des pèlerins et des voyageurs : l’église de la Villette fut dédiée, le 20 juillet 1578, aux deux saints réunis dans un même vocable.
La rue Saint-Jacques, ancienne voie romaine de Paris à Orléans, ne reçoit son nom qu’au XIII° siècle ; il y existait, à l’entrée de la ville, une chapelle de Saint-Jacques le Majeur, dépendance d’un hôpital destiné aux pèlerins, celle-là même qui fut, en 1218, concédée par Jean de Barastre, doyen de Saint-Quentin, aux Dominicains que l’on appela dès lors les Jacobins. l’église et la paroisse de Saint-Jacques de la Boucherie qui dépendait du prieuré Saint-Martin-des-Champs, est pour la première fois mentionnée dans une bulle de Callixte II, datée de 1119 ; détruite par les révolutionnaires, il n’en subsiste aujourd’hui que le clocher achevé sous François I°. L’hôpital et l’église Saint-Jacques de l’Hôpital, rue Saint-Denis, dont une fausse chronique attribue la fondation à Charlemagne, ont été établis par une confrérie d’anciens pèlerins de Compostelle qui, après avoir tenu ses assemblées à Saint-Eustache, puis aux Quinze-Vingts, fit construire ses propres bâtiments, en 1317.
Dès le VII° siècle, il existait une église Saint-Christophe de la Cité, et, au IX° siècle, on signale un hôpital des pauvres sous le titre de Saint-Christophe. La paroisse Saint-Christophe, fondée au XII° siècle, qui était celle de l’Hôtel-Dieu, subsista jusqu’en 1747. Saint Christophe était le patron d’Aubervilliers. Il y avait, dans la forêt de Halatte, au hameau de Fleurines, un prieuré Saint-Christophe où les parisiens venaient en pèlerinage ; c’est là que Jean II le Bon signa les lettres établissant l’ordre de chevalerie de l’Etoile.