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SAINT SYMÉON : QUARANTE ANS SUR UNE COLONNE

27 avril, 2016

https://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/saint_symeon_quarante_ans_sur_une_colonne.asp

SAINT SYMÉON : QUARANTE ANS SUR UNE COLONNE

Christian Marquant Directeur du Centre international d’histoire religieuse (CIHR)

Les ascètes chrétiens orientaux ouvrirent une bien curieuse voie dans l’exercice de la vie solitaire au Ve siècle, saint Syméon fut ainsi l’initiateur du stylitisme, qui consistait à s’isoler au sommet d’une tour ou d’une colonne. Après sa mort, une efflorescence de constructions jaillit dans le village de Qalat Seeman. Et les pierres aujourd’hui parlent encore du saint homme. Le sanctuaire de Qalat Seeman fut érigé à la fin du Ve siècle en l’honneur de l’un des plus prestigieux ascètes de Syrie, le stylite Syméon. Seule l’histoire de sa vie et de son apostolat pourrait faire comprendre les raisons qui poussèrent des milliers d’hommes à venir en pèlerinage sur le lieu de sa vie. « Syméon le fameux, le grand prodige de la terre habitée » est bien connu grâce à son biographe l’évêque syrien Théodoret de Cyr, l’une des sources les plus fiables de nos connaissances de l’ancien Proche-Orient chrétien. Cependant, bien que connue par ce témoignage de qualité, la vie de Syméon reste si exceptionnelle que même son contemporain hésitait à croire que l’on pourrait donner quelques créances à son récit. « Quant à moi, dit-il, qui ai pour ainsi dire tous les hommes pour témoins, je redoute de faire le récit de sa vie de peur qu’aux gens à venir il ne paraisse une fable totalement dénuée de vérité. Car il y a des choses qui dépassent la nature humaine ». Si cela était exact au Ve siècle, combien cela est encore plus vrai pour un Occidental de la fin du XXe siècle. Et pourtant, ce que dit Théodoret, il affirme le tenir de la bouche même du saint ou de ce qu’il a vu. « Syméon naquit en 389 à Sis, aux confins de la Cilicie et de la Syrie. Ses parents étaient chrétiens et le firent baptiser au berceau. Un jour que la neige avait tenu le troupeau renfermé à l’étable, Syméon accompagna ses parents à l’église et entendit les paroles de l’Évangile qui déclare bienheureux ceux qui pleurent et sont dans le deuil mais traite de malheureux ceux qui rient et nomme digne d’envie ceux qui possèdent une âme pure. Il demanda à une personne qui était là ce qu’il fallait faire pour gagner chacun de ces biens : elle lui suggéra la vie solitaire. « Ayant reçu les germes de la parole divine et les ayant enfouis soigneusement dans les profonds sillons de son âme il courut au sanctuaire des martyrs du voisinage. Là, prosterné, il supplia Celui qui veut sauver tous les hommes de le mener vers le chemin de la piété. S’étant levé il se rendit dans une retraite d’ascète du voisinage. Après avoir passé deux ans en leur compagnie et s’être épris d’une vertu plus parfaite, il se rendit au bourg de Teleda pour entrer au monastère dirigé par l’admirable Héliodore. Syméon passa là dix ans à combatte contre le péché. Il avait quatre-vingts compagnons de lutte et les surpassait tous. « Après avoir passé quelque temps chez ces moines il se rendit au bourg de Telanissos (aujourd’hui Deir Seeman) où il demeura enfermé trois ans. Après cela, il vint occuper ce fameux sommet où il s’enferma dans un espace entouré d’une clôture circulaire. « Les visiteurs venaient donc en nombre incalculable. Tous essayaient de le toucher et de récolter quelques bénédictions. Au début, il trouva ces excès d’honneur déplacés, puis la chose lui causant même une fatigue insupportable il imagina de se tenir debout sur une colonne. Il la fit d’abord tailler de 6 coudées, ensuite de 12 après cela de 22 et enfin de 36… » (ce qui représente une hauteur d’environ 12 mètres). C’est ainsi que débuta sa carrière de « stylite » qui dura 42 ans. Il vécut ainsi jusqu’à sa mort, survenue vraisemblablement le 24 juillet 459.

Un orateur aux étonnants succès L’Égypte avait vu naître à la fin du IVe siècle le monachisme avec saint Antoine, le père des moines. Ce mouvement s’était rapidement développé dans tout l’Orient, mais avait acquis en Syrie des formes et des aspects particuliers dont les stylites confirment le caractère. Les moines syriens, loin de fuir le monde qui les entourait, voulaient pour la plupart d’entre eux rester en contact avec celui-ci et devenir pour leurs frères, comme un levain dans la pâte. Leur vie devait donc concilier l’isolement et la discipline la plus sévère avec la participation la plus directe à toutes les manifestations de la vie temporelle, en contact journalier avec le peuple. Le stylitisme créé par Syméon correspond bien à cet objectif. Pour Syméon, le fait d’être exposé constamment aux regards de la foule était ressenti comme la part la plus notable de sa pénitence. Cependant, celle-ci était liée d’une manière directe à la vocation qu’il avait choisie. Cette vocation s’exprime d’abord par la prédication. «… En plus de sa modestie, il est des plus accessibles, doux, gracieux, répondant à chacun de ceux qui lui adressent la parole, que ce soit un artisan, un mendiant ou un paysan. D’ailleurs, il a reçu du Maître le don de l’enseignement. Deux fois par jour, en donnant ses exhortations, il verse dans les oreilles de ses auditeurs, le flot d’une parole abondante et charmante et leur offre la science de l’esprit divin : il leur recommande de lever la tête vers le ciel, et de prendre leur vol, de se détacher de la terre et de se représenter le Royaume qu’on espère… ». Ce rôle de prédicateur, Syméon l’avait volontairement choisi en installant son enclos, puis sa colonne, non pas en quelque lieu désert pris au hasard, mais en un endroit surplombant directement l’un des plus grands axes de communication de la Syrie du Nord : la route par où d’Apamée on se rend en Asie Mineure, et quotidiennement empruntée par des centaines de paysans, de voyageurs et de pèlerins. Théodoret dit que son apostolat fut particulièrement fécond auprès des Sarrasins, transcription d’un mot grec qui signifie « ceux qui vivaient sous la tente » et qui évoque les nomades arabes qui vivaient nombreux en bordure du désert syrien et qui étaient encore païens au milieu du Ve siècle. «… Ils arrivent par bande de deux cents ou trois cents à la fois, parfois même par mille, ils renient à grands cris leurs erreurs ancestrales, brisant devant ce grand luminaire les idoles qu’adoraient leurs pères, ils participent au mystère divin, acceptent des lois de cette bouche sacrée, disent adieu aux coutumes de leurs pères… » Quotidiennement, ces païens demandent à Syméon de formuler une prière, de trancher un conflit, de guérir un chef malade. Syméon, loin de vivre hors du temps, s’intéresse également à la vie de l’Église et aux grandes querelles du moment : «… Il lutte contre l’impiété des Grecs, pourfend les hérétiques. Un jour il écrit à l’empereur à ce sujet, un autre jour, il exhorte les fonctionnaires à prendre à cœur les intérêts de Dieu, d’autres fois, c’est même aux pasteurs des églises qu’il recommande de prendre plus de soin de leurs troupeaux… »

On se dispute la sainte dépouille Toujours exposé aux regards, Syméon apparaissait aux yeux des foules comme un modèle surhumain de force d’âme et de constance. Tout le jour, il se tenait debout sans abri, exposé à toutes les rigueurs d’un climat souvent redoutable. Dans les grandes solennités, de l’aurore jusqu’au coucher du soleil, il demeurait les mains levées au ciel, sans se laisser vaincre par la chaleur ou la fatigue. « Pour ma part, affirmait Théodoret, je ne crois pas que ce soit sans une particulière disposition de Dieu que s’est produit cette station. C’est précisément pourquoi j’invite les critiques à réfréner leur langue et à ne pas la laisser s’emporter au hasard, mais, à considérer que souvent le Christ a imaginé de telles choses pour le bien des gens trop nonchalants. Il a commandé, par exemple à Isaïe de marcher nu, à Jérémie de se mettre un pagne autour des reins, à Osée de prendre pour femme une prostituée, et d’annoncer ainsi la prophétie aux incrédules. » La gloire de Syméon éclata le jour de ses funérailles. L’évêque d’Antioche Martyrius accourut, accompagné de six évêques et du maître de la milice d’Antioche suivi de six cents soldats pour empêcher qu’on enlevât le corps. La dépouille fut descendue de la colonne et mise dans un cercueil de plomb. C’est à ce moment que se répandit dans le peuple la nouvelle de la mort du stylite. Aussitôt, arrivèrent sur les chameaux les Sarrasins en armes, décidés à s’emparer du corps saint. Mais Ardaburius, le maître de la milice était là avec une force suffisante. Une foule énorme faisait retentir l’air de ses gémissements. On déposa le cercueil sur un char et le cortège se mit en marche, suivi de la foule portant les cierges, de l’encens et chantant des psalmodies. En chemin, le passage de la sainte dépouille provoquait de nombreux miracles. Toute la population d’Antioche se porta à sa rencontre en habits blancs, avec des cierges et des torches. Déposée d’abord dans l’église de Kassianos, elle fut portée un mois après dans la cathédrale. L’empereur byzantin Léon réclama bientôt pour Constantinople ces précieuses reliques, mais les habitants d’Antioche le supplièrent de ne pas les priver de ce trésor : « Notre ville n’a plus de murailles lui dirent-ils, nous l’avons cherché pour nous en tenir lieu et pour nous protéger de ses prières. » L’empereur renonça à son projet pour ne pas indisposer les habitants d’Antioche dont la ville venait d’être détruite par un tremblement de terre. Ce qui semble évident aujourd’hui aux archéologues qui ont travaillé sur le site, c’est que malgré l’ampleur des pèlerinages, aucune construction ne fut réalisée autour de la colonne pendant un quart de siècle tandis qu’il existait déjà deux centres officiels de culte, l’un à Antioche et l’autre à Constantinople. D’un seul coup, vraisemblablement à partir de 476, jaillirent de terre autour de la colonne du stylite, d’immenses constructions : le martyrium cruciforme de saint Syméon qui couvre à lui seul une surface de près de 5 000 mètres carrés, entouré d’un monastère, d’une église et d’un grand tombeau conventuel. Plus au sud, à l’entrée du sanctuaire, c’est un baptistère avec ses annexes qui jaillit du sol. L’ensemble de la construction se réalisa pendant une période très courte.

Sept siècles de pèlerinages chrétiens Cette réalisation n’est pas due à l’initiative des moines de Télanissos, l’importance des sommes requises pour une telle construction dépassant leurs moyens. Elle ne pouvait non plus revenir au clergé d’Antioche qui, possédant les reliques du saint, n’avait aucun intérêt à créer un autre centre de pèlerinage. C’est vers Constantinople qu’il faut se tourner. L’empereur Zénon, très influencé par le stylite Daniel, l’un des anciens disciples de Syméon, avait pensé, par le biais de cette construction, s’attirer les faveurs des populations syriennes. L’érection d’un grand martyrium en l’honneur d’un saint syrien, si populaire dans les provinces orientales et si célèbre dans tout l’empire, peut avoir été conçue comme un moyen d’apaiser les discordes, en Syrie tout particulièrement. L’édifice consiste en un vaste sanctuaire cruciforme bâti autour d’un octogone entourant la colonne de Syméon. L’octogone est formé de huit grands arcs dont quatre basiliques à trois nefs donnant vers les quatre points cardinaux. La basilique orientale plus longue que les autres contient le sanctuaire formé de trois absides saillantes à l’extérieur. La basilique méridionale, servant d’entrée principale, est précédée d’un porche monumental où se répète le décor de l’octogone. Certains archéologues pensent aujourd’hui que cet octogone était autrefois couvert d’une charpente, mais après le tremblement de terre de 528 – qui détruisit complètement Antioche et ébranla vraisemblablement le sanctuaire de saint Syméon – cette couverture ne fut pas restaurée, l’octogone gardant dès lors ce caractère de cour qu’il prit dès le VIe siècle. La forme architecturale, l’idée d’ensemble, vint vraisemblablement d’Antioche. L’octogone et le sanctuaire cruciforme sont d’ailleurs composés d’éléments architecturaux que l’on retrouve dans cette région, même si par ailleurs, l’apparition d’autres éléments décoratifs (riches moulures des archivoltes, colonnes détachées) laisse apparaître que le projet était bien d’origine impériale. C’est à Telanissos d’abord que se regroupaient les pèlerins. Agglomération paysanne à l’origine, le village ne possédait jusqu’au Ve siècle aucune construction monumentale. Déjà très fréquenté durant la vie de saint Syméon, il ne s’organisa pour la réception en masse des pèlerins qu’après sa mort en 459. Les premières auberges qui s’élevèrent sur le bord de la route, encore très modestes et de style rustique, sont de cette période. Les nouveaux quartiers datent de l’ouverture, après 476, du grand chantier. L’afflux de milliers d’ouvriers et l’intense circulation des matériaux de construction et de ravitaillement acheminés par Telanissos vers la colline ont dû transformer le village pendant des années en un grand centre d’hébergement, de commerce et de transport. Sa prospérité et son extension rapide à partir de cette époque sont attestées par le nombre et la qualité des constructions. La fin des gros travaux sur la colline n’arrêta pas son développement. Fut alors bâti le plus ancien couvent conservé dans le village, celui du nord-ouest auquel s’ajouteront au cours du VIe siècle, de nombreux autres bâtiments : couvent, église et hôtelleries. Devenue alors la ville du pèlerinage, elle prit à ce moment son nom actuel de Deir Seeman. Ce sont ces vestiges encore très bien conservés que l’on découvre aujourd’hui. De Telanissos, les pèlerins empruntaient la voie processionnelle qu’aujourd’hui les visiteurs se contentent de descendre… Les portes monumentales qui jalonnent cette voie ne correspondent pas à des enceintes successives précédant un sanctuaire fortifié, mais à des stations ayant chacune leur caractère. L’arc triomphal, à la sortie de Deir Seeman, annonce l’ascension de la montagne, les trois arcs doubles du propylée donnent accès au sanctuaire, une double arcade monumentale permet la traversée des hôtelleries et l’accès au baptistère, enfin un porche à trois arcs marque l’entrée du martyrium. À l’intérieur de l’église, les huit arcs de l’octogone terminent autour de la colonne du saint cette voie triomphale. L’histoire reste muette sur ce qu’il advint du sanctuaire après la conquête musulmane, sans doute fut-il pillé et abandonné. Le pèlerinage, lui, survécut un temps, et les historiens s’accordent à penser que le village de Telanissos continua à accueillir moines et pèlerins au moins jusqu’au XIe siècle. Au Xe siècle, lors de la reconquête byzantine du nord de la Syrie, le sanctuaire fut momentanément restauré et surtout transformé en forteresse. C’est de cette époque que date le mur d’enceinte qui l’entoure encore aujourd’hui et lui a donné son nom moderne : Qalat Seeman – le château de Syméon. Cependant en 1017, après trente-huit ans d’occupation le site fut définitivement abandonné par les Byzantins après qu’il eut été attaqué et pillé par une armée égyptienne. Ce qui est sûr, c’est qu’à l’époque des croisades, le site était totalement abandonné et que pour de longs siècles, il disparut, à quelques exceptions près, de la mémoire chrétienne. Ainsi au XVIIe siècle la colonne, réduite aujourd’hui à un simple tambour jeté sur le sol, était aux dires de Frantz Ferdinand Von Troilo encore debout. Au XIXe siècle, lorsque pour la première fois il fut reconnu par un visiteur occidental, le marquis de Voguë, il servait de résidence à un prince kurde. Le sanctuaire ruiné n’était plus que l’ombre de sa grandeur passée, abandonné dans une zone semi-désertique. Néanmoins il était parvenu jusqu’à nous comme témoin de la gloire de Syméon.

Christian Marquant Septembre 1988

LE PÉRES COPTE: MACAIRE L’EGYPTIEN (+390)

27 octobre, 2014

http://eocf.free.fr/text_prieres_hamman_copte.htm

Les Pères coptes

MACAIRE L’EGYPTIEN (+390)

Sous le nom de Macaire (qui signifie bienheureux) ont eu cours quantité d’écrits, d’homélies ascétiques surtout, des lettres et des apophtegmes.
Les 5èmes homélies de  » Macaire  » le placent au nombre des premiers mystiques de l’antiquité chrétienne.
Mais toute cette production littéraire semble l’ oeuvre de moines qui se couvrirent du nom de Pères illustres.
Macaire l’Égyptien, appelé  » l’Ancien  » ou  » le Grand « , a vécu pendant 60 ans dans le désert de Scété ; il s’acquit, parmi les moines de la Basse Egypte, une exceptionnelle célébrité, pour sa sagesse et sa parole.
La  » prière du soir « , qui lui est attribuée, est insérée à l’office de None, dans l’Église Jacobite.

Prière du soir
DIEU qui es venu à la fin des temps pour nous sauver, à la chute du jour, tu as chassé Adam du paradis et tu l’as rouvert pour lui.
Par ta mort sur la croix, aie pitié de moi, maintenant que la fin de ma vie approche, que le soir m’atteint.
Le temps est trop court pour laver toutes mes souillures.
Je ne puis demander une multitude d’années, pour expier la multitude de mes fautes.
Épargne-moi, Seigneur, devant ton redoutable tribunal, aie pitié de moi, ô Dieu, en ces jours où la miséricorde sera mesurée.
Jette sur moi un regard de paix et de douceur, à l’heure où tu jugeras avec rigueur .
Guéris-moi dès cette terre et je serai en santé.
Relève-moi dans ta miséricorde et conduis-moi à la pénitence, afin que je puisse te rencontrer là-haut, à visage découvert.
Ne me laisse pas au pouvoir de mes ennemis, Seigneur, que je ne devienne pas la proie de ceux, qui tendent des embûches à mon âme; que je ne sois pas privé de ta grâce, ni dépouillé du don de l’Esprit.
Je laverai, Seigneur, la souillure de ma robe, pour n’être pas jeté aux ténèbres extérieures, avec celui qui n’a pas été jugé digne du festin. Conserve, dans ma lampe, l’huile des bons serviteurs, afin que je ne sois pas rejeté avec les vierges folles.
Épargne-moi, Seigneur, cette parole terrifiante adressée à ceux qui se tiennent à ta gauche: Je ne vous connais pas.
Par le sang de la Croix, que tu as répandu pour nous, délivre-moi, vivifie-moi, selon tes miséricordes, afin que je garde le témoignage de ta parole, que je vive pour ta gloire et que j’obtienne la joie de ton royaume durant les siècles des siècles.
Amen.

Prière à l’ange gardien
ANGE saint, qui veilles sur ma pauvre âme et sur ma misérable vie, ne me quitte pas je suis pécheur, et ne m’abandonne pas à cause de mes souillures.
Ne laisse pas approcher les esprits mauvais, dirige-moi en exerçant ton pouvoir sur mon corps périssable.
Prends ma main blessée et impuissante, conduis-moi sur le chemin du salut.
Oui, saint ange de Dieu, qui veilles sur mon âme et sur mon corps, pardonne-moi tout ce qui a pu t’offenser au cours de ma vie et toutes mes fautes d’aujourd’hui.
Protège-moi dans la nuit qui s’approche et garde-moi des embûches et des attaques de l’Ennemi, pour que je n’offense point Dieu par un péché.
Intercède pour moi, auprès du Seigneur, afin qu’il m’affermisse dans sa crainte, et qu’il fasse de moi un serviteur digne de sa sainteté.
Amen.

SCHENOUTÉ (+466)
A Atrépé, en Égypte, Schenouté organisa, comme Pacôme, la vie monastique.
Dans son célèbre  » Couvent blanc « , il modifia les règles cénobitiques.
Il est le plus grand écrivain copte.
Son oeuvre se compose de lettres, de sermons, d’apocalypses.
Il est malaisé de discerner ce qui est authentique dans les écrits qui lui sont attribués.
La prière que nous citons est utilisée à l’office de midi et du soir .

Prière à Dieu
DIEU, protège-moi, sans cesse, dans le travail, dans la parole et dans la pensée du coeur .
Dieu, aie pitié de moi, dans ce monde et dans celui qui doit venir .
Dieu, aie pitié de moi, car j’ai péché contre toi, comme un mortel; mais toi, Maître bon et doux, pardonne-moi.
Dieu ne m’effraie pas et ne me trouble pas à l’heure où l’âme quitte le corps.
Dieu, ne me réprimande pas alors dans ta colère et ne me châtie pas dans ton couroux.
Dieu, ne t’irrite pas contre moi, comme le méritent mes péchés et mes actions mauvaises.
Dieu, ne me cache pas ton visage, lorsque je paraîtrai devant toi et ne détourne pas ta face de moi au jour où tu jugeras les actions cachées et connues des hommes.
Dieu, ton Verbe, s’est incarné, il a été crucifié pour moi, il est mort, a été enseveli, il est ressuscité le troisième jour; attache-moi à toi, pour que les mauvais esprits ne dominent pas sur moi et ne m’arrachent pas de tes mains !
Dieu, ne me laisse pas succomber à la perfidie, ne permets pas que l’Adversaire trouve en moi quelque chose qui lui appartienne.
Dieu, rends mon coeur comme un glaive aiguisé contre toute pensée de péché, afin que je puisse les chasser de mon coeur .
Dieu qui as parlé à la mer et elle s’est apaisée, chasse les passions mauvaises de ma nature pécheresse, afin que le péché soit éteint et disparaisse de tous mes membres.
Dieu donne-moi pour toujours un coeur pur avec la foi orthodoxe, dans les siècles des siècles.
Amen.

LA VIE DE SAINT ANTOINE – SAINT ATHANASE[1] -

16 janvier, 2014

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/peres/antoine/viedesaintantoine.htm#_Toc104092621

LA VIE DE SAINT ANTOINE

SAINT ATHANASE[1]

(est très longue , tous les chapitres sont  XXXIII, je mets les 3 premiers)

C’est un combat très avantageux que celui où vous vous êtes engagés, d’égaler par votre vertu celle des Solitaires d’Egypte, et d’esssayer, même, de les surpasser par une généreuse émulation. Il y a déjà parmi vous plusieurs maisons de Solitaires où la discipline religieuse est très bien observée. Chacun louera avec raison votre dessein, et Dieu accordera sans doute à vos prières l’heureux accomplissement de vos désirs. Aussi, voyant que vous me demandez avec instance de vous faire une relation de la manière de vivre du bienheureux Antoine, et que vous désirez apprendre comment il commença à suivre une profession si sainte, ce qu’il était auparavant , quelle a été la fin de sa vie et si les choses que l’on publie à son sujet sont véritables, afin de pouvoir entrer encore dans une plus grande perfection par son imitation et par son exemple, j’ai entrepris avec beaucoup de joie ce que votre charité m’ordonne, parce que de mon côté, je ne saurais me remettre devant les yeux les saintes actions d’Antoine sans en tirer un grand avantage ; et je fuis assuré que du vôtre vous entendrez avec tant d’admiration ce que je vous en dirai, que cela fera naître en vous un ardent désir de marcher sur les pas de ce grand serviteur de Dieu, puisque pour des Solitaires, c’est connaître le vrai chemin de la perfection que de savoir quelle a été la vie d’Antoine.  Ne craignez donc point d’ajouter foi à ce que l’on vous a rapporté de lui, et croyez plutôt que ce ne sont que les moindres de ses excellentes vertus. Car comment aurait-on pu vous en informer entièrement, vu que tout ce que je vous en écrirai par cette lettre, après avoir rappelé ma mémoire pour satisfaire à votre désir, n’égale nullement ses actions. Mais vous-mêmes informez-vous-en soigneusement auprès de ceux qui passeront d’ici vers vous, mais même si chacun rapporte tout ce qu’il sait, il fera très difficile d’en faire une relation qui réponde à la dignité du sujet.  J’avais eu dessein après avoir reçu vos lettres, d’envoyer quérir quelques Solitaires, et principalement ceux qui allaient souvent le visiter, afin qu’en étant mieux informé, je puisse vous en donner une plus particulière connaissance : mais parce que le temps de la navigation était passé et que celui qui m’a rendu vos lettres, était pressé de s’en retourner, je me suis hâté de satisfaire à votre piété, en vous écrivant ce que j’en sais par moi-même, comme l’ayant souvent vu, et ce que j’en ai pu apprendre d’un Solitaire, qui a demeuré longtemps avec lui, et qui lui donnait souvent à laver les mains. J’ai eu soin partout de demeurer dans les termes de la vérité, ce dont j’estime devoir vous avertir, afin que si quelqu’un entend rapporter de lui des actions encore plus grandes que celles que je vous dirai, cette multitude de merveilles ne lui en diminue pas la créance ; et que si au contraire, il n’en apprend que des choses qui soient au dessus de son mérite, cela ne le porte pas à mépriser un si grand Saint.   CHAPITRE I.  La patrie d’Antoine fut l’Egypte, où il naquit de parents nobles et riches qui, étant chrétiens, l’élevèrent chrétiennement. Ils le nourrirent en leur maison, et il ne connaissait qu’eux et leur famille. Lors qu’il eut grandi, il ne voulut point apprendre les lettres, de peur que cela ne l’engageât à avoir communication avec les autres enfants. Car ainsi qu’il est écrit de Jacob : Tout son désir était de demeurer avec simplicité dans la maison. Quand on le menait à l’église, il ne s’amusait point à badiner comme les autres enfants ; et lorsqu’il fut plus grand, il ne se laissa nullement emporter à la négligence et à la paresse. Il était très attentif à la lecture, et conservait dans son cœur le fruit que l’on en pouvait tirer. Il rendait une grande obéissance à son père et à sa mère, et bien qu’il soient fort à l’aise, il ne les importunait jamais pour faire bonne chère, et ne cherchait point les plaisirs d’une nourriture délicate ; mais se contentait de ce qu’on lui donnait, et ne désirait rien de plus.  Lorsque son père et sa mère moururent, ils le laissèrent à l’âge de dix-huit à vingt ans avec une sœur encore fort jeune. Il prit soin d’elle et de la maison comme il le devait. Mais six mois s’étaient à peine écoulés, qu’un jour où il allait à l’église, selon sa coutume, avec grande dévotion, il pensait en lui-même pendant le chemin, comment les Apôtres avaient suivi Jésus-Christ en abandonnant toutes choses, et comment plusieurs autres, ainsi qu’on le voit dans les Actes, vendaient leurs biens et en mettaient le prix aux pieds des Apôtres, pour qu’il soit distribué à ceux qui en avaient besoin, et combien grande était la récompense qui les attendait dans le ciel. Alors qu’il avait, dis-je, l’esprit plein de ces pensées, il entra dans l’église au moment où on lisait l’Evangile où notre Seigneur a dit à ce jeune homme qui était riche : « Si tu veux être parfait, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et viens, et suis-moi, et tu aurais un trésor au Ciel » (Mt 19, 21). Antoine regarda la pensée qu’il avait eue de l’exemple des premiers Chrétiens, comme lui ayant été envoyée de Dieu, et ce qu’il avait entendu de l’Evangile, comme si ces paroles n’avaient été lues que pour lui. Il retourna soudain à son logis, et distribua à ses voisins, afin qu’ils n’aient rien à démêler avec lui ni avec sa sœur, tous les héritages qu’il avait de son patrimoine, qui étaient trois cents mesures de terre très fertile et très agréable. Et quant à ses meubles il les vendit tous, et en ayant tiré une somme considérable, il donna cet argent aux pauvres, à l’exception de quelque chose qu’il retint pour sa sœur.   CHAPITRE II Etant une autre fois entré dans l’église, et entendant lire l’Evangile où Jésus-Christ dit : « Ne vous inquiétez pas du lendemain » (Mt 6, 34), il ne put se résoudre à demeurer davantage dans le monde. Et ainsi, il donna aux plus pauvres ce qui lui restait et mit sa sœur entre les mains de quelques filles fort vertueuses qui étaient de sa connaissance, afin de l’élever dans la crainte de Dieu, et dans l’amour de la virginité. Il quitta sa maison pour embrasser une vie solitaire, veillant sur lui-même, et vivant dans une très grande tempérance : il n’y avait pas alors en Egypte beaucoup de maisons de solitaires, et nul d’entre eux ne s’était encore avisé de se retirer dans le désert, mais chacun de ceux qui voulaient penser sérieusement à son salut, demeurait seul en quelque lieu près de son village. Dans un petit champ proche d’Antoine, il y avait un bon vieillard, qui dès sa première jeunesse avait passé toute sa vie en solitude. L’ayant vu et étant touché d’un louable désir de l’imiter, il commença à demeurer aussi dans un lieu séparé du village, et s’il apprenait qu’il y avait quelqu’un qui travaillait avec soin pour s’avancer en cette sorte de vie, il imitait la prudence des abeilles en allant le voir ; et il ne s’en retournait pas sans l’avoir vu, afin de remporter de sa conversation quelques instructions qui lui serviraient à se former à la douceur des vertus chrétiennes.  Ayant commencé ainsi, il fortifiait son esprit dans le dessein de servir Dieu ; il ne se souvenait plus ni de ses parents, ni de ses alliés, et ne pensait à autre chose qu’à s’employer de tout son pouvoir à acquérir la perfection de la vie solitaire ; il travaillait de ses mains, sachant qu’il est écrit : « Que celui qui ne travaille pas, ne doit pas manger » (2 Th 3, 10) ; et ne gardant que ce qu’il lui fallait pour vivre, il donnait le reste aux pauvres. Il priait très souvent, parce qu’il avait appris qu’il fallait sans cesse prier dans son cœur (1 Th 5) ; et il lisait avec tant d’attention, que n’oubliant jamais rien de ce qu’il avait lu, sa mémoire lui servait de livres.  Cette manière de vivre le faisait aimer de tous. Il se soumettait avec joie aux serviteurs de Dieu qu’il allait visiter, et pour s’instruire de ce en quoi chacun d’eux excellait dans les exercices de la vie solitaire, il considérait l’humeur agréable de l’un et l’assiduité à prier de l’autre ; il observait quelle était la douceur d’esprit de celui-ci, et la bonté de celui-là ; il remarquait les veilles de l’un, et l’amour de l’étude d’un autre. Il admirait la patience des uns, et les jeûnes et les austérités de quelques autres qui n’avaient pour lit que la terre toute nue. Il se rendait attentif à voir la douceur de l’un et la constance de l’autre. Il gravait dans son cœur quel était leur amour à tous pour Jésus-Christ, et la charité qu’ils se portaient. Et ainsi rempli de toutes ces images, il s’en retournait dans sa solitude où, repassant en son esprit les vertus qu’il avait vues séparées en tant de personnes, il s’efforçait de les rassembler toutes en lui seul. Il n’était pas jaloux de ceux de son âge, si ce n’est à ne pas paraître le dernier dans les exercices de la vertu, mais même en cela même il fâchât personne ; au contraire ils en avaient de la joie, et ainsi tous ces saints amis qu’il avait dans son voisinage, et avec lesquels il communiquait, le voyant vivre de la sorte, l’appelaient le bien-aimé de Dieu, et le nommaient en le saluant, les uns leur fils, et les autres leur frère.   CHAPITRE III Mais le démon, qui hait tout ce qui est digne de louange et qui voit toutes les bonnes actions des hommes, ne pouvant souffrir de voir une personne de cet âge se porter avec tant d’ardeur dans un tel dessein, résolut d’user contre lui de tous les efforts qui seraient en son pouvoir. La première tentation, dont il se servit pour le détourner de la vie solitaire, fut de lui mettre devant les yeux les biens qu’il avait quittés, le soin qu’il devait prendre de sa sœur, la noblesse de sa race, l’amour des richesses, le désir de la gloire, les diverses voluptés qui se rencontrent dans les délices, et tous les autres plaisirs de la vie. Il lui représentait d’un autre côté les extrêmes difficultés et les travaux qui se rencontrent dans l’exercice de la vertu, la faiblesse de son corps, le long temps qui lui restait encore à vivre ; et enfin, pour tâcher de le détourner de la sainte résolution qu’il avait prise, il éleva dans son esprit comme une poussière et un nuage épais de diverses pensées. Mais se trouvant trop faible pour ébranler un aussi ferme dessein que celui d’Antoine, et voyant qu’au lieu d’en venir à bout il était vaincu par sa constance, renversé par la grandeur de sa foi, et mis à terre par ses prières continuelles, alors, se confiant avec orgueil, selon les paroles de l’Ecriture (Job 11) aux armes de ses reins, qui sont les premières embûches qu’il emploie contre les jeunes gens, il s’en servit pour l’attaquer, le troublant la nuit, et le tourmentant le jour, de telle sorte que ceux qui se trouvaient présents voyaient le combat qui se passait entre eux.  Le démon présentait à son esprit des pensées d’impureté ; mais Antoine les repoussait par ses prières. Le démon chatouillait ses sens ; mais Antoine, rougissant de honte, comme s’il y eut eu en cela de sa faute, fortifiait son corps par la foi, par l’oraison, et par les veilles. Le démon, se voyant ainsi surmonté, prit de nuit la figure d’une femme et en imita toutes les actions afin de le tromper. Mais Antoine, élevant ses pensées vers Jésus-Christ et considérant quelle est la noblesse et l’excellence de l’âme qu’il nous a donnée, éteignit ces charbons ardents dont il voulait par cette tromperie embraser son cœur. Le démon lui remit encore davantage devant les yeux les douceurs de la volupté ; mais Antoine, comme entrant en colère et en s’affligeant, se représenta les gênes éternelles dont les impudiques sont menacés, et les douleurs de ce remord qui, comme un ver insupportable, ronge pour jamais leur conscience.  Ainsi en opposant ces saintes considérations à tous ces efforts, ils n’eurent aucun pouvoir pour lui nuire. Et quelle plus grande honte pouvait recevoir le démon, lui qui ose s’égaler à Dieu, que de voir une personne de cet âge se moquer de lui, et de se trouver terrassé par un homme revêtu d’une chair fragile, lui qui se glorifie, comme il le fait, d’être par sa nature toute spirituelle élevé au-dessus de la chair et du sang ! Mais le Seigneur qui, par l’amour qu’il nous porte, a voulu prendre une chair mortelle, assistait son serviteur et le rendait victorieux du démon afin que chacun de ceux qui combattent contre lui puisse dire avec l’Apôtre : « Non pas moi, mais la grâce de Dieu qui est en moi » (1 Co 15).  Enfin, comme ce dragon infernal vit qu’il ne pouvait de cette manière surmonter Antoine qui l’avait si généreusement repoussé de son cœur, alors en grinçant des dents, ainsi qu’il est dit dans l’Ecriture (Mc 9), et tout transporté de fureur, il se présenta à lui sous la figure d’un enfant aussi noir qu’est son esprit, et, les tromperies lui ayant si mal réussi, il se confessa vaincu. Il ne l’aborda plus avec de simples raisonnements, mais prenant une voix humaine, il lui dit : J’en ai trompé plusieurs, et j’en ai surmonté encore davantage ; mais maintenant en voulant t’attaquer, ainsi que je l’ai fait bien d’autres fois, pour te faire sortir du chemin si laborieux où tu es entré, j’ai éprouvé ma faiblesse. Antoine lui demanda : Qui es-tu, qui me parle de la sorte ? Il répondit d’une voix lamentable : Je me nomme l’esprit de fornication, et c’est moi qui chatouille les sens des jeunes gens pour les porter à la volupté. Et combien en ai-je trompé qui avaient résolu de vivre chastement ? Je suis celui au sujet duquel le Prophète accuse ceux qui sont tombés dans le vice en leur disant : « Vous avez été trompé par l’esprit de fornication » ( ). Car c’était moi qui les avais surmontés. Je suis celui qui t’ai troublé tant de fois, et que tu as toujours repoussé.  Antoine, rendant grâces à Dieu, et prenant encore de nouvelles force par ce discours, lui dit : Tu es donc bien méprisable, puisque tu as l’esprit si noir, et la faiblesse d’un enfant. Ainsi je n’ai plus garde de t’appréhender, ni de te craindre. « Car le Seigneur est ma force et je mépriserai tous les ennemis » (Ps 117). Cet esprit de ténèbres, étonné par ces paroles, s’enfuit à l’instant et craignait de l’approcher.  reconnaissant comme leur Père, étaient sou

17 JANVIER: SAINT ANTOINE – Historique Vie de Saint Antoine par St Athanase

16 janvier, 2014

http://missel.free.fr/Sanctoral/01/17.php

17 JANVIER: SAINT ANTOINE

 Historique  Vie de Saint Antoine par St Athanase

Antoine, né vers 251 en Haute Egypte, avait dix-huit ans lorsque moururent ses parents, chrétiens à la fortune considérable, qui lui laissaient le soin d’élever sa petite sœur. Observant et pratiquant, il fut un jour vivement frappé par cette invitation de Jésus : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel : viens et suis-moi ! » (Mat, XIX 21). Il obéit, mais fit toutefois une réserve des ressources nécessaires à sa sœur. Bientôt il fut impressionné par une autre parole du Sauveur : « Ne vous mettez pas en peine du lendemain. » (Mat, VI 34). Il se débarrassa de sa réserve, confia sa sœur à une communauté de vierges, et se retira dans une solitude voisine de Qéman, entre Memphis et Arsinoé ; conduit par un vieil ascète, Antoine partagea son temps entre la prière et le travail. Cette demi-retraite ne lui suffit pas longtemps ; quand sa réputation lui amena trop des visiteurs, il se réfugia dans un des anciens tombeaux égyptiens de la montagne où, de temps à autre, un ami lui apportait des provisions. Là commencèrent ses tribulations : le démon lui livrait de furieuses attaques. Un matin l’ami charitable le trouva étendu inanimé sur le sol ; il le rapporta au village où, le croyant mort, on prépara ses funérailles. Antoine reprit ses sens et demanda à être ramené immédiatement dans sa grotte. Les assauts du démon continuèrent. Antoine chercha une retraite encore plus profonde, au delà du Nil. Vingt ans, il vécut enfermé dans un château ruiné, toujours aux prises avec Satan. « Le diable, qui hait tout ce qui est digne de louange et qui envie toutes les bonnes actions des hommes… résolut d’user contre lui de tous les efforts qui seraient en sa puissance. La première tentation dont il se servit pour le détourner de la vie solitaire, fut de lui mettre devant les yeux les biens qu’il avait quittés, le soin qu’il était obligé d’avoir de sa sœur, la noblesse de sa race, l’amour des richesses, le désir de la gloire, les diverses voluptés qui se rencontrent dans les délices, et tous les autres plaisirs de la vie. Il lui représentait d’un côté les extrêmes difficultés et les travaux qui se rencontrent dans l’exercice de la vertu, la faiblesse de son corps, le long temps qui lui restait encore à vivre ; et, enfin, pour tâcher de le détourner de la sainte résolution qu’il avait prise, il éleva dans son esprit comme une poussière et un nuage épais de diverses pensées. Mais se trouvant trop faible pour ébranler un aussi ferme dessein que celui d’Antoine, et voyant qu’au lieu d’en venir à bout, il était vaincu par sa constance, renversé par la grandeur de sa foi et porté par terre par ses prières continuelles, alors, se confiant avec orgueil, selon les paroles de l’Évangile, aux armes de ses reins, qui sont les premières embûches qu’il emploie contre les jeunes gens, il s’en servit pour l’attaquer, le troublant la nuit et le tourmentant de jour, de telle sorte que ceux qui se trouvaient présents voyaient le combat qui se passait entre eux. Le démon présentait à son esprit des pensées d’impureté, mais Antoine les repoussait par ses prières. Le démon chatouillait ses sens, mais Antoine rougissait de honte, comme s’il y eût en cela de sa faute, fortifiait son corps par la foi, par l’oraison et par les veilles. Le démon se voyant ainsi surmonté, prit de nuit la figure d’une femme et en imita toutes les actions afin de le tromper ; mais Antoine élevant ses pensées vers Jésus-Christ et considérant quelle est la noblesse et l’excellence de l’âme qu’il nous a donnée, éteignit ces charbons ardents dont il voulait, par cette tromperie, embraser son cœur. Le démon lui remit encore devant les yeux les douceurs de la volupté, mais Antoine, comme entrant en colère et s’en affligeant, se représenta les gênes mortelles dont les impudiques sont menacés et les douleurs de ce remords qui, comme un ver insupportable, rongera pour jamais leur conscience. Ainsi, en opposant ces saintes considérations à tous ces efforts, ils n’eurent aucun pouvoir de lui nuire. Et quelle plus grande honte pouvait recevoir le démon, lui qui ose s’égaler à Dieu, que de voir une personne de cet âge se moquer de lui et que, se glorifiant comme il fait, d’être par sa nature toute spirituelle élevé au-dessus de la chair et du sang, de se trouver terrassé par un homme revêtu d’une chair fragile ? Mais le Seigneur qui, par l’amour qu’il nous porte, a voulu prendre une chair mortelle, assistait son serviteur et le rendait victorieux du diable. » (Saint Athanase, Vie de Saint Antoine) Sollicité par les visiteurs qui venaient lui demander ou des miracles ou une règle de vie, il établit en 305 des ermitages où ses disciples, attentifs à ses discours et s’inspirant de ses exemples, pratiquaient un héroïque détachement. En 311, Antoine entendit dire que la persécution de Maximin ensanglantait l’Egypte ; il descendit à Alexandrie pour encourager les martyrs et partager leurs souffrances. Il s’attendait à être mis à mort, mais il ne fut pas inquiété. L’année suivante, il reprit le chemin de sa solitude ; animé d’une sainte émulation, il s’y imposa des jeûnes et des veilles plus austères. Il s’enfonça dans le désert de la Haute Egypte pour fixer sa résidence au mont Qualzoum, appelé plus tard Mont Saint Antoine, où il s’installa près d’une source, au milieu d’une palmeraie. Il cultivait lui-même un petit jardin pour aider à sa subsistance. Les disciples restés près du Nil construisirent le monastère de Pispir où Antoine les venait visiter à intervalles réguliers. Dans ses dernières années, il permit à deux de ses disciples, Macaire et Amathas, de rester près de lui. De 312 jusqu’à sa mort, Antoine demeura dans son ermitage où il y recevait des visiteurs animés de dispositions fort diverses : les uns lui demandant des miracles ou des enseignements, les autres cherchaient à l’embarrasser, comme ces philosophes grecs ou ces ariens qu’il réduisit au silence. Athanase, son futur biographe, y vint à plusieurs reprises ; l’empereur Constantin lui écrivit pour se recommander à ses prières. Vers 340, se place la rencontre d’Antoine et de l’ermite Paul dans les circonstances qu’a décrites saint Jérôme, dans la vie du second. Antoine ambitionnait d’imiter plus parfait que lui ; il apprit en songe qu’un anachorète, riche en mérites, vivait depuis longtemps dans une partie du désert qu’il croyait inhabitée. Sans tarder, il se mit à la recherche du saint homme, parvint non sans peine jusqu’à sa cellule, mais la trouva fermée. Paul qui l’avait pressenti, ne veut voir aucun être humain. Enfin, Paul céda aux instances réitérées d’Antoine, et les deux ermites tombèrent dans les bras l’un de l’autre, se saluant mutuellement par leur nom, s’entretenant des choses de Dieu, pendant qu’un corbeau apportait leur nourriture, un pain entier ce jour-là. On sait comment Paul mourut en l’absence de son visiteur, et reçut d’Antoine la sépulture dans une fosse que creusèrent deux lions du désert. Sur la fin de sa vie, Antoine descendit une seconde fois à Alexandrie où il convertit nombre d’hérétiques et d’infidèles. Peu après son retour, il annonça à ses deux disciples sa mort prochaine, leur fit promettre de ne révéler à personne le secret de sa tombe, légua à saint Athanase son manteau de peau et celui sur lequel il dormait. Il expira doucement en 356, un 17 janvier selon la tradition. Bien qu’il n’ait pas laissé de règle écrite, Antoine fut vraiment l’initiateur du monachisme. Antoine voulut que sa tombe fût secrète pour que l’on n’honorât pas ses reliques, mais son corps fut retrouvé et transféré à Alexandrie, puis à Constantinople (vers 633) où une église fut bâtie sous son vocable. Des documents du XIII° siècle, conservés à l’abbaye de Saint-Antoine de Viennois, attestaient que le corps fut apporté en Occident par un seigneur du Dauphiné, Jocelin, fils du comte Guillaume, qui l’aurait reçu de l’empereur de Constantinople, lors d’un pèlerinage en Terre Sainte. Aymar Falcon qui s’est servi de ces documents (XVI° siècle), place ce pèlerinage vers 1070, et la translation des reliques de saint Antoine à la Motte-Saint-Didier sous Urbain II. La localité prit le nom de Saint-Antoine-de-Viennois. Le culte de saint Antoine en Occident qui est devenu très populaire depuis cette époque, a pris son extension à l’occasion d’un mal étrange, une sorte de fièvre désignée sous les noms de feu sacré, de feu morbide, de feu infernal ou de feu de saint Antoine, le saint guérissant de ce mal ceux qui avaient recours à son intercession. Le noble Gaston, ayant avec son fils bénéficié de cette faveur, fonda à Saint-Antoine-de-Viennois un hôpital et une confrérie dont les membres devaient consacrer leur vie à soigner les malheureux atteints de ce mal. La confrérie, approuvée au concile de Clermont par Urbain II, fut confirmée comme ordre hospitalier par Honorius III (1228). Telle fut l’origine des Antonins qui furent chargés de la garde du sanctuaire et des reliques, enlevés aux bénédictins de Montmajour.

Vie de Saint Antoine Je vois que le Seigneur m’appelle à lui, et ainsi, je vais, comme il est écrit, entrer dans le chemin de mes pères. Continuez en votre abstinence ordinaire. Ne perdez pas malheureusement le fruit des saints exercices auxquels vous avez employé tant d’années, mais, comme si vous ne faisiez que commencer, efforcez-vous de demeurer dans votre ferveur ordinaire. Vous savez quelles sont les embûches des démons. Vous connaissez leur cruauté et n’ignorez pas aussi leur faiblesse. Ne les craignez donc point, mais croyez en Jésus-Christ et ne respirez jamais autre chose que le désir de le servir. Vivez comme chaque jour croyant devoir mourir. Veillez sur vous-mêmes et souvenez-vous de toutes les instructions que je vous ai données… Travaillez de tout votre pouvoir pour vous unir premièrement à Jésus et puis aux saints, afin qu’après votre mort ils vous reçoivent, comme étant de leurs amis et de leur connaissance, dans les tabernacles éternels. Gravez ces choses dans votre esprit. Gravez-les dans votre cœur… Ensevelissez-moi donc et me couvrez de terre ; et, afin que vous ne puissiez manquer à suivre mon intention, faites que nuls autres que vous ne sachent le lieu où sera le corps que je recevrai incorruptible de la main de mon Sauveur lors de la résurrection. Quant à mes habits, distribuez-les ainsi : donnez à l’évêque Athanase une de mes tuniques et le manteau que j’ai reçu de lui tout neuf et que je lui rends tout usé. Donnez mon autre tunique à l’évêque Sérapion, et gardez pour vous mon cilice. Adieu, mes chers enfants. Antoine s’en va et n’est plus avec vous. Saint Athanase

AU JAILLISSEMENT DE LA VIE MONASTIQUE : LES PÈRES DU DÉSERT

18 juillet, 2013

http://www.mavocation.org/actualite/2012-annee-de-la-vie-consacree/2008.html

AU JAILLISSEMENT DE LA VIE MONASTIQUE : LES PÈRES DU DÉSERT

Claire de Guillebon

Entre le IIIe et le VIe siècles, des chrétiens décidèrent d’abandonner le monde pour aller vivre dans les déserts d’Égypte, de Palestine, d’Arabie et de Perse. Le désert exerçait une fascination singulière sur ces personnes qui recherchaient une manière parfaite d’imiter le Christ, avec une certaine nostalgie de la communauté chrétienne primitive. A titre d’illustration : une vidéo réalisée par « Le Jour du Seigneur ».
Ceux qui furent ensuite appelés les Pères du désert voulaient trouver dans le désert une certaine préparation au martyre par une vie d’ascèse et de lutte contre les démons. Ces chrétiens, attirés par la solitude totale et désireux de répondre sans réserve à l’appel évangélique, furent les ancêtres du monachisme, tel qu’on le connaît aujourd’hui.
Saint Antoine fut le premier à oser s’enfoncer dans le désert, vers 270 après J-C. À sa suite, des hommes quittèrent la vie sociale pour rechercher le silence et la simplicité de la foi. Au départ, ils n’étaient qu’une poignée : Antoine, Macaire, Sisoès… Très vite, leur genre de vie étonna et attira. Des disciples vinrent d’un peu partout. Certains, comme Arsène, occupaient les plus hautes charges de la cour impériale. La plupart étaient d’origine modeste tel Moïse, un converti ancien chef d’une bande de brigands, ou Zacharie arrivé encore jeune enfant. En quelques décennies, les cabanes et les grottes dans lesquelles s’étaient installés les premiers ermites attirèrent tellement d’hommes que de véritables colonies monastiques se constituèrent dans les déserts.

L’organisation de la vie au désert
Cette vie érémitique, ou semi-érémitique selon les cas, se développa au départ de façon assez libre et prit des formes diverses. La plupart des moines vivaient dans des cellules, huttes ou cavernes, d’autres dans des habitats plus extraordinaires : sur une colonne, dans un arbre… Au désert, Dieu est le seul maître et, en dehors de sa volonté, il n’y a que peu ou pas de principes. Ainsi saint Antoine disait : « Tout ce que votre âme désire accomplir selon la volonté de Dieu, faites-le et elle sera sauvée ». Cependant, avec l’arrivée de nombreux disciples, il fallut instaurer certaines règles de vie. Des groupements de solitaires s’établirent pour rechercher une discipline de l’élan ascétique, au regard des dangers de la vie au désert. Chacun vivait seul dans son ermitage pendant la semaine, trouvant sa subsistance par son travail manuel, et retrouvait les autres le samedi et le dimanche à l’église pour les offi ces de nuit et l’eucharistie.
Une pédagogie spirituelle se mit en place pour les nouveaux venus : en arrivant dans le désert, ils se mettaient à l’école d’un ancien, expérimenté et apte à discerner l’authentique de l’apparent. Le nouvel arrivé devait apprendre à vivre comme l’ancien et à se désapproprier de tout égocentrisme pour apprendre l’humilité. Lorsqu’il devenait à son tour un « homme spirituel », il s’installait ailleurs, prêt à accueillir, à son tour, de nouveaux disciples auxquels il communiquerait la sagesse évangélique. C’est ainsi que différentes branches fleurirent dans l’institution monastique, à l’école de grands Pères du désert comme saint Pacôme en Égypte, saint Basile en Asie Mineure ou d’autres. Pour les uns, l’idéal spirituel érémitique primait, d’autres voyaient dans l’unité collective l’assurance d’une réussite de la majorité des vocations solitaires et la formation des nouveaux venus, d’autres encore concevaient des monastères avec une véritable clôture pour se couper du monde extérieur, etc.

La sagesse des Pères du désert
Pour vivre dans le désert, les Pères ne pouvaient se permettre d’être des illuminés, faute de quoi ils devenaient fous. Si nous manquons de détails historiques sur l’identité de tous ces moines, de nombreuses paroles qu’ils ont prononcées pendant leur vie érémitique nous sont parvenues. Réunies la plupart du temps sous forme d’apophtegmes, c’est-à-dire de recueil de sentences et d’anecdotes, ces paroles nous font entrevoir la sagesse des pères du désert, l’humilité et le bon sens de la plupart de ces hommes qui vivaient dans la solitude et le labeur, la pauvreté et le jeûne, la charité et la prière pour ne former qu’un seul Esprit dans le Christ.
Tous leurs efforts n’avaient qu’un but : atteindre la pureté de coeur, pour voir Dieu. Les récits de ces Pères du désert retracent les combats de ces hommes prêts à tout pour se débarrasser de leurs défauts et faire croître leur amour envers Dieu et leur prochain. C’est l’abbé Ammonas qui pria quatorze ans pour être délivré de la colère, l’abbé Serapion qui vendit son dernier livre, un exemplaire des Évangiles, pour donner l’argent aux pauvres, vendant ainsi « les paroles mêmes qui lui ordonnaient de se séparer de tout pour les pauvres ». Ou encore saint Antoine, dont la vie racontée par saint Athanase suscita de nombreuses vocations.
Pour la majorité, ces apophtegmes concernent la vie au désert de Scété et l’on trouve plus de cent trente représentants de ce monachisme primitif : saint Antoine, Arsène, Agathon, Théodore de Pherme, Jean Kolobos, Isidore, Macaire d’Alexandrie, Moyse, Poemen surtout, Phambon, Hor et beaucoup d’autres. En dépit de quelques bizarreries, l’impression laissée par les apophtegmes est celle d’une spiritualité évangélique toute de renoncement au monde, d’amour pour le Christ et pour Dieu, toute pénétrée d’humilité personnelle, de charité et de bonté foncière pour le prochain, de discernement, de bon sens et de modération. « Je vis tous les filets de l’ennemi déployés sur la terre, et je dis en gémissant : Qui donc passe outre ces pièges ?, disait saint Antoine. Et j’entendis une voix me répondre : l’humilité ».
Les Pères du désert ont expérimenté dans leur corps et leur esprit les tentations et le combat contre le démon. Leurs paroles sont aujourd’hui encore de véritables sources d’enseignement dans la voie de la sainteté et gardent une valeur spirituelle considérable, car la vie chrétienne y apparaît dans toute sa complexité. Par leur exemple, nous comprenons que le silence, extérieur et intérieur, nous aide à approcher Dieu, à le connaître davantage et à l’aimer. Nous pouvons partir nous aussi au désert, le temps d’une retraite…

PAROLES DE SAGES
Pionniers de la spiritualité chrétienne, les Pères du désert sont redécouverts aujourd’hui, grâce à l’actualité de leurs paroles pour notre monde.
• Un frère alla trouver l’abbé Moyse à Scété pour lui demander une bonne parole. Et l’ancien lui dit : « Va, reste dans ta cellule ; elle t’apprendra tout ce que tu dois savoir ».
• L’abbé Macaire disait : « Si, pour corriger autrui, vous vous mettez en colère, vous gratifi ez vos propres passions. Ne vous perdez pas pour sauver autrui ».
• L’abbé Hyperichios disait : « Mieux vaut manger de la viande et boire du vin que dévorer la chair de votre frère en le dénigrant ».
• L’un des anciens disait : « Si un homme se fi xe dans un endroit sans l’améliorer, cet endroit le rejettera comme un être qui n’a pas porté de fruit ».
• Un frère demanda un jour à l’abbé Poemen : « Comment dois-je me comporter là où je vis ? L’Ancien répondit : « Soyez prudent comme si vous étiez étranger : où que vous soyez, ne désirez pas que vos paroles fassent loi, et vous aurez le repos ».
• À un jeune moine qui craignait beaucoup la souffrance, Abba Daniel dit : « Qui a peur de souffrir souffre déjà de sa peur… »

LES PÈRES DE L’EGLISE

27 février, 2013

 http://orthodoxologie.blogspot.it/2010/02/les-peres-de-leglise.html

 LES PÈRES DE L’EGLISE

MON CHER AMI,

Vous avez posé une bonne question: « Qui sont ces Pères de l’Église que vous, chrétiens orthodoxes mentionnez toujours, et pourquoi sont-ils si importants pour vous? N’est-ce pas suffisant d’avoir juste la Bible? »
D’abord, je dois vous dire que non seulement les saints Pères sont importants pour les chrétiens orthodoxes aujourd’hui, mais ils ont été importants pour les chrétiens, dès le début, pendant la grande époque des Conciles de l’Eglise (du quatrième au huitième siècle). La proclamation de ces Conciles commençait avec ces paroles significatives: « A la suite des saints Pères … » Je pense que vous trouverez que ces saints Pères sont importants pour vous aussi, car même si vous n’êtes pas orthodoxe, celui qui aime le Christ aime aussi naturellement ceux qui L’ont connu et ont vécu intimement avec Lui, le révélant aux autres.
Et ainsi, un Saint-Père est, en premier lieu, un membre de l’Eglise orthodoxe et un saint – qui est, un croyant baptisé, connu pour sa sainteté et la grande vertu de sa vie, et qui est maintenant au ciel avec le Christ. Deuxièmement, un Saint-Père est celui qui enseigne la foi et quelqu’un qui explique la Sainte Écriture. Il lui rend témoignage à la fois par sa vie et ses écrits, éclairé par la grâce de l’Esprit Saint. En outre, un Saint-Père ne s’est pas désigné lui-même comme tel, il est choisi par Dieu et révélé à la conscience de tout le Corps du Christ comme celui qui a parlé des choses divines dans la Vérité. Enfin, ses paroles doivent refléter les enseignements de l’Écriture Sainte et des Apôtres, il ne peut pas enseigner des choses contraires à ce qu’on a toujours cru et enseigné dans l’Église, il doit transmettre fidèlement ce qu’il a reçu.
Parce que beaucoup de gens pensent que l’Eglise du Christ, a en quelque sorte « disparu », ou, comme beaucoup de protestants, même croire qu’elle apostasia pendant le premier siècle après Jésus Christ (comme si une telle chose était vraiment possible à considérer avec la promesse du Christ d’être avec son Église « jusqu’à la la fin des siècles »(Matthieu 25:20), je voudrais partager avec vous un aperçu de l’Eglise primitive vue dans la vie et les écrits des Pères de l’Église, depuis le temps des Apôtres jusque vers 200 après J.-C. c’est-à-dire couvrant environ trois générations.
Vous pouvez facilement vérifier que ce que vous vous apprêtez à lire n’est pas quelque chose que j’ai élaboré, ces informations peuvent être trouvées sous forme bien documentée dans n’importe quelle grande bibliothèque. En fait, je vous demande de ne pas me croire sur parole. Enquêtez vous-même, prenez la peine d’être informé de quelque chose qui touche votre salut même.
Dans son Epître aux Philippiens, saint Paul mentionne un « véritable compagnon d’œuvre » nommé « Clément » (Phil.4: 3). Vous pourriez être surpris d’apprendre que l’histoire connaît aussi cet homme, une de ses lettres est conservée sous forme de manuscrit du British Museum! Il est connu comme saint Clément de Rome. Il a été martyrisé en 97 ou 98, peu après la fin de la persécution de l’Église chrétienne de l’empereur Domitien. Sa lettre est un témoignage magnifique sur l’existence de la succession apostolique dans l’Église primitive:
« Les Apôtres ont reçu l’Evangile pour nous du Seigneur Jésus-Christ; Jésus-Christ fut envoyé par Dieu. Alors, le Christ vient de Dieu et les Apôtres du Christ. Tous deux sont donc venus de la volonté de Dieu dans un ordre voulu. Ayant donc a reçu une charge … ils s’en allèrent avec la Bonne Nouvelle… Puis, prêchant partout dans la campagne et la ville, ils ont nommé leurs premiers fruits, quand ils leur avaient prouvé par l’Esprit, être évêques et diacres pour tous ceux qui devaient croire… Ils ont nommé ces personnes et donc aussi fourni une continuité, afin que lorsque ceux-ci devaient s’endormir [en Christ], d’autres hommes approuvés devraientsuccéder à leurs charges.
Concernant la nécessité d’obéir aux successeurs des Apôtres, il dit: « Mais si certaines personnes étaient désobéissantes envers les paroles prononcées par Lui [le Christ] à travers nous, qu’ils comprennent qu’ils se seront eux-mêmes engagés dans une transgression et un danger qui ne seront pas des moindres. »
Un autre Père de l’Eglise, disciple de l’apôtre Jean, est saint Ignace d’Antioche, martyrisé en 109 après JC Il était l’enfant que Notre-Seigneur prit dans ses bras, dans l’Évangile de Matthieu. Sept de ses lettres ont survécu, et dans celles-ci, il donne des conseils aux chrétiens dans différentes villes. Il ne parle pas seulement des évêques, mais des prêtres et des diacres, et de ce que l’unité dans l’Eglise signifie: « Car tous ceux qui sont de Dieu et de Jésus-Christ sont avec l’évêque et tous ceux qui se repentent et entrent dans l’unité de l’Église, eux aussi doivent être de Dieu, afin qu’ils puisse vivre en Jésus-Christ… Là où est l’évêque, que le peuple soit comme si Jésus y était, là est l’Eglise universelle… Soyez donc attentifs à observer une seule Eucharistie, car il n’y a qu’une seule Chair de notre Seigneur Jésus-Christ, et une coupe pour union dans Son Sang, il y a un seul autel, comme il n’y a qu’un seul évêque [local], avec le clergé et les diacres. « 
Enfin je mentionne saint Irénée de Lyon, qui mourut en 202 après Jésus-Christ. Il avait été disciple de saint Polycarpe, qui à son tour, était disciple de l’apôtre Jean. Vous pouvez voir ici la continuité vivante de la foi. Dans ses dernières années, saint Polycarpe était le seul survivant de l’époque apostolique, le dernier homme encore en vie qui avait personnellement connu les Apôtres. Pour cette raison il a été traité avec beaucoup de respect et de vénération et de « nombreux disciples étaient rassemblés autour de lui pour entendre de ses lèvres le dernier écho vivant de l’enseignement apostolique », comme nous l’apprenons de sa vie.
Les trois générations des premiers saints Pères, que je vous ai brièvement décrits, nous amènent à l’aube du troisième siècle, ayant parcouru environ les premiers 170 ans de vie de l’Église, de l’Ascension du Christ en 33 après Jésus-Christ jusques à la mort d’lrénée en 202. Vous pouvez voir que chacun de ces Pères était parfaitement conscient de son lien vivant avec les Apôtres et l’Enseignement qu’il avait reçu d’eux.

Ma prière est que vous soyez un jour être éclairé par la Lumière du Christ afin de parvenir à une meilleure compréhension de ces choses.
Sincèrement en Christ,

Père Alexey Young
Version française Claude Lopez-Ginisty
d’après
http://www.pravmir.com/article_336.html

PÈRE DU DESERT – ABBA SYLVAIN

19 juillet, 2012

http://www.missa.org/apophtegmes.php

PÈRE DU DESERT

Abba Sylvain

A Scété, Abba Sylvain avait un disciple appelé Marc qui obéissait à merveille. Il était calligraphe. Et l’ancien l’aimait à cause de son obéissance. Or il avait onze autres disciples, et ceux-ci étaient peinés de ce qu’Abba Sylvain aimait Marc plus qu’eux.
Les anciens l’ayant appris, s’en attristèrent. Ils vinrent donc un jour chez Abba Sylvain pour lui faire des reproches. Alors Sylvain prend les anciens avec lui. Puis il va frapper à la porte de chaque cellule en disant :  » Frère, viens ici. J’ai besoin de toi ». Mais aucun frère ne le suit tout de suite.
Abba Sylvain arrive à la cellule de Marc. Il frappe alors et dit : « Marc ! ». En entendant la voix de l’ancien, lui, il bondit aussitôt dehors. Et l’ancien lui fait faire une commission, puis il dit aux anciens :  » Pères, où sont les autres frères ?  » Il entre dans la cellule de Marc et il prend son cahier. Il remarque ceci : Marc a commencé à former la lettre oméga, mais en entendant la voix de son Abba, il n’avait pas fini de l’écrire. Alors les anciens disent : « Vraiment, Abba, celui que tu aimes, nous l’aimons aussi parce que Dieu l’aime ».

S. ANTOINE DU DÉSERT FÊTÉ AU VATICAN PAR LES ÉLEVEURS ITALIENS

17 janvier, 2012

http://www.zenit.org/article-29903?l=french

S. ANTOINE DU DÉSERT FÊTÉ AU VATICAN PAR LES ÉLEVEURS ITALIENS

La Nouvelle évangélisation et la gratitude envers le Créateur

ROME, lundi 16 janvier 2012 (ZENIT.org) – Les animaux s’invitent au Vatican à l’occasion de la fête de saint Antoine du désert (251-356), demain, 17 janvier : la Nouvelle évangélisation passe aussi par la gratitude envers le Créateur pour sa générosité dans toutes les bestioles dont parle la Genèse.
En effet, comme chaque année, l’Association italienne des éleveurs (Associazione italiana allevatori, AIA) proposera devant la Place Saint-Pierre – Piazza Pio XII – sa traditionnelle
exposition d’animaux de ferme.
Les éleveurs et leurs familles participeront à une messe votive en la basilique vaticane, puis un défilé à cheval remontera la Via della Conciliazione.
C’est le cardinal Angelo Comastri, archiprêtre de la basilique vaticane et vicaire du pape pour la Cité du Vatican, qui bénira ensuite participants et visiteurs.
Le site Internet de l’AIA rappelle les principales étapes de la vie du saint du désert de la Thébaïde d’Egypte, et cite sa vie romancée par Gustave Flaubert (1874).
« Bien qu’il n’ait pas laissé de règle écrite, Antoine fut vraiment l’initiateur du monachisme, souligne le site « Missel.free.fr ». Antoine voulut que sa tombe fût secrète pour que l’on n’honorât pas ses reliques, mais son corps fut retrouvé et transféré à Alexandrie, puis à Constantinople (vers 633) où une église fut bâtie sous son vocable. » Selon une légende la tombe du saint aurait été indiquée par des léopards.
Et parce qu’il a été un grand thaumaturge avant et après sa mort – notamment pour la guérison du « feu de saint Antoine », il a été un saint très populaire et on lui a confié la protection des personnes et des troupeaux contre les maladies.
A Rome, en la paroisse de Sant’Eusebio, près de Sainte-Marie-Majeure, les animaux sont acceptés à la messe ce jour-là – et le dimanche suivant tout le monde ne pouvant participer à une messe en semaine -: chiens, chats, lapins, oiseaux – perroquets -, et même poissons rouges. Une belle chorale, une liturgie soignée, une homélie suggestive accompagnent la célébration à laquelle participent des personnes qui parfois ne viendront qu’à cette messe-là pendant l’année, comme si ces petites créatures restaient le dernier lien visible entre eux et le Créateur.
A la fin de la célébration, sur le parvis de l’église, sous la bannière de saint Antoine, le diacre passe au milieu de la foule et bénit chaque animal avec de l’eau bénite : une façon de remercier le Créateur pour la beauté et la bonté de sa création. Ici, pas de danger d’idolâtrer ces compagnons donnés par la générosité du Créateur : chacun est à sa place.
Un parchemin au nom de l’animal est ensuite remis à chacun des participants en souvenir de cette bénédiction. Sous l’effigie de saint Antoine, on y lit deux citations bibliques: « Vous tous, fauves et troupeaux, bénissez le Seigneur : A lui, haute gloire, louange éternelle ! Et vous, les enfants des hommes, bénissez le Seigneur : A lui, haute gloire, louange éternelle ! » (Daniel 3, 81).
Et cette citation d’Evangile : « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent ni ne recueillent en des greniers, et votre Père céleste les nourrit ! Ne valez-vous pas plus qu’eux ? » (Matthieu 6, 26)
On a déjà vu là les chevaux des Carabiniers ou de la Garde de finance, et les chiens de la Protection civile. Parfois aussi, la fête se prolonge par une procession jusqu’au parc voisin, suivie d’un concours festif et populaire des animaux les plus sympathiques, comme ce couple d’Inséparables nommés « Point » et « Virgule », vainqueurs en 2010.
Et pour les retardataires ? Le curé ne refuse pas une bénédiction – dans la sacristie – au maître qui a manqué la messe : bénédiction pour lui et les siens avant même que pour son compagnon à quatre pattes. Et si la Nouvelle évangélisation passait aussi par ces gestes séculaires de la bénédiction des hommes et des bêtes, de tous les dons du Créateur ?

Anita Bourdin

17 janvier – Saint Antoine

16 janvier, 2012

http://missel.free.fr/Sanctoral/01/17.php

17 janvier – Saint Antoine

Sommaire :

Historique
Vie de Saint Antoine par St Athanase

Historique
Antoine, né vers 251 en Haute Egypte, avait dix-huit ans lorsque moururent ses parents, chrétiens à la fortune considérable, qui lui laissaient le soin d’élever sa petite sœur. Observant et pratiquant, il fut un jour vivement frappé par cette invitation de Jésus : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel : viens et suis-moi ! » (Mat, XIX 21). Il obéit, mais fit toutefois une réserve des ressources nécessaires à sa sœur. Bientôt il fut impressionné par une autre parole du Sauveur : « Ne vous mettez pas en peine du lendemain. » (Mat, VI 34). Il se débarrassa de sa réserve, confia sa sœur à une communauté de vierges, et se retira dans une solitude voisine de Qéman, entre Memphis et Arsinoé ; conduit par un vieil ascète, Antoine partagea son temps entre la prière et le travail. Cette demi-retraite ne lui suffit pas longtemps ; quand sa réputation lui amena trop des visiteurs, il se réfugia dans un des anciens tombeaux égyptiens de la montagne où, de temps à autre, un ami lui apportait des provisions. Là commencèrent ses tribulations : le démon lui livrait de furieuses attaques. Un matin l’ami charitable le trouva étendu inanimé sur le sol ; il le rapporta au village où, le croyant mort, on prépara ses funérailles. Antoine reprit ses sens et demanda à être ramené immédiatement dans sa grotte.
Les assauts du démon continuèrent. Antoine chercha une retraite encore plus profonde, au delà du Nil. Vingt ans, il vécut enfermé dans un château ruiné, toujours aux prises avec Satan.
« Le diable, qui hait tout ce qui est digne de louange et qui envie toutes les bonnes actions des hommes… résolut d’user contre lui de tous les efforts qui seraient en sa puissance. La première tentation dont il se servit pour le détourner de la vie solitaire, fut de lui mettre devant les yeux les biens qu’il avait quittés, le soin qu’il était obligé d’avoir de sa sœur, la noblesse de sa race, l’amour des richesses, le désir de la gloire, les diverses voluptés qui se rencontrent dans les délices, et tous les autres plaisirs de la vie. Il lui représentait d’un côté les extrêmes difficultés et les travaux qui se rencontrent dans l’exercice de la vertu, la faiblesse de son corps, le long temps qui lui restait encore à vivre ; et, enfin, pour tâcher de le détourner de la sainte résolution qu’il avait prise, il éleva dans son esprit comme une poussière et un nuage épais de diverses pensées. Mais se trouvant trop faible pour ébranler un aussi ferme dessein que celui d’Antoine, et voyant qu’au lieu d’en venir à bout, il était vaincu par sa constance, renversé par la grandeur de sa foi et porté par terre par ses prières continuelles, alors, se confiant avec orgueil, selon les paroles de l’Évangile, aux armes de ses reins, qui sont les premières embûches qu’il emploie contre les jeunes gens, il s’en servit pour l’attaquer, le troublant la nuit et le tourmentant de jour, de telle sorte que ceux qui se trouvaient présents voyaient le combat qui se passait entre eux. Le démon présentait à son esprit des pensées d’impureté, mais Antoine les repoussait par ses prières. Le démon chatouillait ses sens, mais Antoine rougissait de honte, comme s’il y eût en cela de sa faute, fortifiait son corps par la foi, par l’oraison et par les veilles. Le démon se voyant ainsi surmonté, prit de nuit la figure d’une femme et en imita toutes les actions afin de le tromper ; mais Antoine élevant ses pensées vers Jésus-Christ et considérant quelle est la noblesse et l’excellence de l’âme qu’il nous a donnée, éteignit ces charbons ardents dont il voulait, par cette tromperie, embraser son cœur. Le démon lui remit encore devant les yeux les douceurs de la volupté, mais Antoine, comme entrant en colère et s’en affligeant, se représenta les gênes mortelles dont les impudiques sont menacés et les douleurs de ce remords qui, comme un ver insupportable, rongera pour jamais leur conscience. Ainsi, en opposant ces saintes considérations à tous ces efforts, ils n’eurent aucun pouvoir de lui nuire. Et quelle plus grande honte pouvait recevoir le démon, lui qui ose s’égaler à Dieu, que de voir une personne de cet âge se moquer de lui et que, se glorifiant comme il fait, d’être par sa nature toute spirituelle élevé au-dessus de la chair et du sang, de se trouver terrassé par un homme revêtu d’une chair fragile ? Mais le Seigneur qui, par l’amour qu’il nous porte, a voulu prendre une chair mortelle, assistait son serviteur et le rendait victorieux du diable. » (Saint Athanase, Vie de Saint Antoine)
Sollicité par les visiteurs qui venaient lui demander ou des miracles ou une règle de vie, il établit en 305 des ermitages où ses disciples, attentifs à ses discours et s’inspirant de ses exemples, pratiquaient un héroïque détachement.
En 311, Antoine entendit dire que la persécution de Maximin ensanglantait l’Egypte ; il descendit à Alexandrie pour encourager les martyrs et partager leurs souffrances. Il s’attendait à être mis à mort, mais il ne fut pas inquiété. L’année suivante, il reprit le chemin de sa solitude ; animé d’une sainte émulation, il s’y imposa des jeûnes et des veilles plus austères. Il s’enfonça dans le désert de la Haute Egypte pour fixer sa résidence au mont Qualzoum, appelé plus tard Mont Saint Antoine, où il s’installa près d’une source, au milieu d’une palmeraie. Il cultivait lui-même un petit jardin pour aider à sa subsistance. Les disciples restés près du Nil construisirent le monastère de Pispir où Antoine les venait visiter à intervalles réguliers. Dans ses dernières années, il permit à deux de ses disciples, Macaire et Amathas, de rester près de lui. De 312 jusqu’à sa mort, Antoine demeura dans son ermitage où il y recevait des visiteurs animés de dispositions fort diverses : les uns lui demandant des miracles ou des enseignements, les autres cherchaient à l’embarrasser, comme ces philosophes grecs ou ces ariens qu’il réduisit au silence. Athanase, son futur biographe, y vint à plusieurs reprises ; l’empereur Constantin lui écrivit pour se recommander à ses prières.
Vers 340, se place la rencontre d’Antoine et de l’ermite Paul dans les circonstances qu’a décrites saint Jérôme, dans la vie du second. Antoine ambitionnait d’imiter plus parfait que lui ; il apprit en songe qu’un anachorète, riche en mérites, vivait depuis longtemps dans une partie du désert qu’il croyait inhabitée. Sans tarder, il se mit à la recherche du saint homme, parvint non sans peine jusqu’à sa cellule, mais la trouva fermée. Paul qui l’avait pressenti, ne veut voir aucun être humain. Enfin, Paul céda aux instances réitérées d’Antoine, et les deux ermites tombèrent dans les bras l’un de l’autre, se saluant mutuellement par leur nom, s’entretenant des choses de Dieu, pendant qu’un corbeau apportait leur nourriture, un pain entier ce jour-là. On sait comment Paul mourut en l’absence de son visiteur, et reçut d’Antoine la sépulture dans une fosse que creusèrent deux lions du désert. Sur la fin de sa vie, Antoine descendit une seconde fois à Alexandrie où il convertit nombre d’hérétiques et d’infidèles. Peu après son retour, il annonça à ses deux disciples sa mort prochaine, leur fit promettre de ne révéler à personne le secret de sa tombe, légua à saint Athanase son manteau de peau et celui sur lequel il dormait. Il expira doucement en 356, un 17 janvier selon la tradition.
Bien qu’il n’ait pas laissé de règle écrite, Antoine fut vraiment l’initiateur du monachisme. Antoine voulut que sa tombe fût secrète pour que l’on n’honorât pas ses reliques, mais son corps fut retrouvé et transféré à Alexandrie, puis à Constantinople (vers 633) où une église fut bâtie sous son vocable.
Des documents du XIII° siècle, conservés à l’abbaye de Saint-Antoine de Viennois, attestaient que le corps fut apporté en Occident par un seigneur du Dauphiné, Jocelin, fils du comte Guillaume, qui l’aurait reçu de l’empereur de Constantinople, lors d’un pèlerinage en Terre Sainte. Aymar Falcon qui s’est servi de ces documents (XVI° siècle), place ce pèlerinage vers 1070, et la translation des reliques de saint Antoine à la Motte-Saint-Didier sous Urbain II. La localité prit le nom de Saint-Antoine-de-Viennois. Le culte de saint Antoine en Occident qui est devenu très populaire depuis cette époque, a pris son extension à l’occasion d’un mal étrange, une sorte de fièvre désignée sous les noms de feu sacré, de feu morbide, de feu infernal ou de feu de saint Antoine, le saint guérissant de ce mal ceux qui avaient recours à son intercession. Le noble Gaston, ayant avec son fils bénéficié de cette faveur, fonda à Saint-Antoine-de-Viennois un hôpital et une confrérie dont les membres devaient consacrer leur vie à soigner les malheureux atteints de ce mal. La confrérie, approuvée au concile de Clermont par Urbain II, fut confirmée comme ordre hospitalier par Honorius III (1228). Telle fut l’origine des Antonins qui furent chargés de la garde du sanctuaire et des reliques, enlevés aux bénédictins de Montmajour.

Vie de Saint Antoine
Je vois que le Seigneur m’appelle à lui, et ainsi, je vais, comme il est écrit, entrer dans le chemin de mes pères. Continuez en votre abstinence ordinaire. Ne perdez pas malheureusement le fruit des saints exercices auxquels vous avez employé tant d’années, mais, comme si vous ne faisiez que commencer, efforcez-vous de demeurer dans votre ferveur ordinaire. Vous savez quelles sont les embûches des démons. Vous connaissez leur cruauté et n’ignorez pas aussi leur faiblesse. Ne les craignez donc point, mais croyez en Jésus-Christ et ne respirez jamais autre chose que le désir de le servir. Vivez comme chaque jour croyant devoir mourir. Veillez sur vous-mêmes et souvenez-vous de toutes les instructions que je vous ai données… Travaillez de tout votre pouvoir pour vous unir premièrement à Jésus et puis aux saints, afin qu’après votre mort ils vous reçoivent, comme étant de leurs amis et de leur connaissance, dans les tabernacles éternels. Gravez ces choses dans votre esprit. Gravez-les dans votre cœur… Ensevelissez-moi donc et me couvrez de terre ; et, afin que vous ne puissiez manquer à suivre mon intention, faites que nuls autres que vous ne sachent le lieu où sera le corps que je recevrai incorruptible de la main de mon Sauveur lors de la résurrection. Quant à mes habits, distribuez-les ainsi : donnez à l’évêque Athanase une de mes tuniques et le manteau que j’ai reçu de lui tout neuf et que je lui rends tout usé. Donnez mon autre tunique à l’évêque Sérapion, et gardez pour vous mon cilice. Adieu, mes chers enfants. Antoine s’en va et n’est plus avec vous.
Saint Athanase

LES MÈRE DI DESERT

27 septembre, 2011

du site:

http://www.pagesorthodoxes.net/saints/meres-spirituelles/meres-du-desert-margot-king.htm

LES MÈRE DI DESERT
 
Un aperçu de la tradition anachorétique féminine
depuis l’Antiquité jusqu’au Moyen-Âge occidental

par Margot H. King

Résurrection d’une femme sainte

Ce texte constitue une première approche d’une étude de la tradition anachorétique féminine, depuis ses origines en Orient chrétien et aussi à Rome, jusqu’au Moyen-Âge en Europe occidentale. Publié pour la première fois en 1983 dans la revue Fourteenth Century Mystics Newsletter 9, puis repris en 1984 dans Peregrina Papers, son auteur le concevait comme une esquisse d’un vaste projet de recherche. Nous produisons ici, avec l’aimable autorisation de l’auteur, une traduction française du texte, à laquelle nous avons ajouté, dans la mesure du possible, les dates des fêtes des saintes mentionnées dans Le Synaxaire, Vies de saints de l’Église orthodoxe. Pour des raisons techniques, les renvois aux notes de bas de page ne sont des hyperliens valides. Les notes n’ont pas été traduites.

Presque toutes les études de la tradition érémitique de l’Europe médiévale mentionnent en passant le très grand nombre de recluses. Ainsi, lorsque j’ai entrepris cette étude en 1980, j’étais étonnée de constater que très peu d’études avait été publiées sur ce phénomène : celle de Francesca Steele sur les anachorètes du Moyen-Âge, éditée il y a 70 ans, et l’étude fondamentale de Rotha May Clay sur les ermites anglais médiévaux, dont la première publication remonte à 1914.1

Et pourtant il y avait des milliers de recluses – j’oserais même dire des dizaines de milliers. Vandenbrouck, par exemple, signalait qu’en 1320 il y avait 320 recluses seulement à Rome2, et Sainsaulieu a dénombré 455 reclus des deux sexes en France avant le Xe siècle et 3,000 dans les siècles postérieurs.3 Encore plus extraordinaire et étonnant est le fait rapporté par le père Delehave déjà en 1908 au sujet d’un monastère syriaque du IXe siècle où vivaient une centaine de femmes stylites.4 Lorsque j’ai initié mes recherches en ce domaine – en dépit de mon accès restreint aux sources primaires – j’ai localisé en moins de 18 mois environ 1,100 Mères du désert connues de nom et 900 recluses anonymes, entre les VIe et XVe siècles. Il était évident que je ne faisais qu’effleurer le sujet. Ainsi, une étude de la tradition anachorétique féminine est un projet de vaste envergure et cet essai n’a d’autre prétention que d’être une introduction superficielle au sujet, dont l’importance ne peut être niée.

Bien que ces femmes menaient des vies de solitude, dans la prière et la contemplation, elles exerçaient une influence politique et spirituelle profonde sur la société.5 Elles conseillaient les puissants du monde et, en dépit d’une censure, elles agissaient en tant que conseillères spirituelles et même confesseurs auprès des laïcs.6 Je souhaite donc que cette présentation sommaire des Mères du désert éveille la curiosité d’autres chercheurs et qu’en unissant nos forces, nous puissions mieux décrire et comprendre ce phénomène remarquable.

LES MÈRES DU DÉSERT DE L’ORIENT CHRÉTIEN

Le choix de l’expression « Mères du désert » doit son origine à une tentative, quelque peu légère, de contrebalancer la vision courte, sans doute involontaire, d’historiens du monachisme, qui, semble-t-il, voyaient les déserts d’Égypte habités exclusivement par des hommes et donc, l’histoire du monachisme comme un phénomène presque exclusivement masculin. Si Paul de Thèbes (IVe siècle, 15 janvier) et Antoine le Grand (IVe siècle, 17 janvier) et leur successeurs égyptiens sont appelés patres, pourquoi ne pas appliquer le féminin équivalent matres à Sarra(Ve siècle, 13 juillet), Synclétique (IVe siècle, 13 janvier) et leurs successeurs ? J’ai découvert par la suite qu’ainsi que comme on appelait Antoine abba (père), ainsi on nommait Sarra amma (mère), qui, avec Synclétique,7 est une des seules femmes dont les sentences sont conservées parmi les apophtegmes des Pères.8 Quand j’ai réalisé que Sarra et Synclétique étaient considérées comme les précurseurs de la vie solitaire dans le Ancrene Riwle, 9 une règle anglaise pour les anachorètes écrite au XIIe ou au XIIIe siècle, il était clair que l’expression  » Mères du désert  » reflétait une réalité effective.

En fait une nouvelle approche de l’histoire du monachisme antique s’ouvre quand on considère le désert égyptien comme ayant été peuplé autant par des femmes que par des hommes. Pallade mentionne 2,975 femmes dans son Histoire lausiaque10, et, selon Wallis Budge dans la Préface du The Paradise of the Fathers,  » des soixante-huit histoires du premier livre du Paradis syriaque, dix-neuf sont consacrées aux vies de femmes,  » qui, dit-il,  » étaient aussi bien en mesure de vivre la vie difficile du solitaire que tout homme. « 11 Vingt-sept pourcent est une proportion considérable, puisqu’il s’agit de femmes ou de groupes de femmes identifiées individuellement et qu’on ne tient pas compte d’innombrables vierges anonymes qui vivaient au désert comme cénobites ou recluses.

Il est également important sans doute, et on l’oublie souvent, qu’avant son départ pour le désert, Antoine plaça sa sœur dans une communauté  » de vierges respectées et faibles « .12 Il est évident que de telles communautés – qui doivent sûrement être appelés  » monastiques  » –, existaient déjà depuis quelque temps avant que le  » père du monachisme  » eut entrepris son séjour au désert. Et il est possible de retracer plus anciennement encore cette tradition de vierges consacrées. Zénaïde et Philonille sont vénérées dans le Ménologe grec (Ier siècle, 11 octobre) comme parents de saint Paul, la première une recluse et la seconde,  » en rien inférieure à Zénaïde  » vivant dans le monde.13 Et dans l’Ancien Testament, nous trouvons non seulement Élie et Élisée comme précurseurs de la vie érémitique, mais aussi la prophétesse Anne et Judith, vénérées comme les patronnes des recluses par Burhard14 et par l’auteur de l’Ancrene Riwle.15

Pourquoi donc peu de ces femmes sont-elles connues en dehors du cercle des spécialistes ? La popularité étonnante de certaines personnalités telles que l’ermite Marie l’Égyptienne16 au Haut Moyen-Âge suggère qu’il avait sûrement une longue tradition à travers les siècles, remontant certainement jusqu’au désert.17 La réponse est sans doute que la plupart des vies des saints étaient écrites par des hommes pour des communautés monastiques masculines et en tant que telles, elles manifestent un biais masculin. Bien qu’on ait rejeté les vies des Mères du désert comme autant de  » légendes romantiques « , une telle accusation n’a pas de sens, puisque pour l’hagiographe, les faits doivent toujours servir à édifier.18

Au contraire, ces vies 19 des Mères du désert sont importantes parce qu’elles révèlent les manifestations de l’esprit jugées être suffisamment significatives pour être retenues. Il n’est pas à propos de se poser la question si Marie l’Égyptienne a vraiment fait ce que Sophrone a écrit qu’elle a fait, ou si Marie Madeleine a vraiment passé les trente dernières années de sa vie comme recluse dans une grotte au désert sans eau et sans arbres près de Marseille.20 Dans le contexte de la vie d’un saint, de telles actions sont importantes et le succès évident des vies des saints à travers les âges – même au XXe siècle  » rationaliste  » – démontre clairement que ces vies touchent une corde sensible chez les lecteurs.

Une autre raison expliquant le rejet des Mères du désert est liée sans doute à la crainte et l’hostilité envers les femmes qu’on trouve souvent dans les écrits des Pères de l’Église et qui se reflète parfois dans les vies des Pères du désert. La femme, fille d’Ève, était considérée comme signe des pouvoirs inférieurs, de la luxure et du charnel. C’est elle, disaient les Pères, qui tente l’homme, incarnation des pouvoirs supérieurs de l’intellect et de la volonté, à pécher en se soumettant à ses désirs vulgaires et charnels.21

Ainsi Antoine fut assailli par des démons sous forme de femmes22 et abba Sisoès (IVe siècle, 6 juillet), au cri désespéré de son disciple  » Où y a-t-il de lieu sans femme sauf au désert ? « , répondit sans hésitation :  » Alors, emmène-moi au désert ! « 23 Sisoès n’a certainement pas pensé que même le désert était peuplé de femmes, et non la moindre amma Matrone, qui, dit-on, a fait la réflexion admirable sur cette conversation, qu’on s’emmène soi-même là où on va et qu’on ne peut échapper à la tentation simplement par la fuite.24

Cette crainte des femmes est bien exprimée dans le récit extraordinaire du reclus Martinien (fin IIIe siècle, 13 février), qui croyait avoir échappé aux femmes tant craintes en s’installant sur un rocher au milieu de la mer. Par les ruses du démon qui cherchait à le tenter, une femme nommée Photine a survécu à un naufrage et a été sauvé d’une mort certaine par le reclus hésitant. Il fut, cependant, tellement épouvanté à la perspective de devoir partager son rocher avec une femme qu’il s’est immédiatement jeté à la mer. Sauvé par deux dauphins, il continua sa fuite des femmes et traversa plus de cent soixante villes avant d’être libéré des femmes par la mort.25

Le biais anti-féminin se manifeste également dans l’appréciation que les femmes se font d’elles-mêmes. Ainsi amma Sarra disaient à ses sœurs :  » De sexe, je suis une femme mais pas en esprit « .26 Huit siècles plus tard, on disait de la Mère du désert médiévale Christina de Markyate qu’ayant repoussé les avances d’un clerc lascif,  » elle était plus semblable à un homme qu’à une femme,  » alors que le clerc  » méritait d’être appelé une femme.27 « 

Nombreuses furent ces femmes. Au IVe siècle, il y a Alexandra, qui s’est renfermée dans un tombeau et qui a reçu la visite de Mélanie;28 Marie l’Égyptienne;29 Thaïs (Taïs la Pénitente, 8 octobre);30 les sœurs Nymphodore, Menodore and Metrodonne(10 septembre), recluses dans un tumulus à Pythia;31 Photine qui prit possession du rocher de Martinien pendant six ans après son départ et, bien sûr, Sarra et Synclétique, pour ne mentionner que quelques-unes. Du milieu du Ve siècle au milieu du VIe siècle, nous trouvons parmi d’autres, Anastasie,32 Apollonaria,33 Athanasie (9 octobre),34 Euphrosyne (25 septembre),35 Hilaria,36 Théodora (11 septembre),37 Matrone (9 novembre),38 Eugenie (IIIe siècle, 24 décembre),39 Marina,40 Eusebie Hospitie,41 Pélagie (Pélagie la Pénitente, 8 octobre),42 ainsi que Marana et Cyra (28 février), qui habitèrent enchaînées dans une petite enceinte à moitie à découvert, pendant quarante-deux ans et qui ont été visitées par Théodoret, évêque de Chypre.43

 Comme John Anson l’a souligné44, trois étapes marquent ces vies : 1) la fuite du monde, motivée soit par un mariage immanent ou par une vie de péché ; 2) la prise de vêtements d’hommes et la réclusion ; et 3) la découverte et la reconnaissance, habituellement après la mort de la sainte. Nous trouvons le même schéma répété maintes fois à des époques ultérieures. Un aspect à souligner dans la vie d’une Mère du désert était sa prise de vêtements d’hommes. Cela semble être non seulement un reflet de l’orientation masculine de l’Église primitive, mais aussi un comportement prudent dans le désert où une femme seule pouvait facilement être considérée comme un démon et sommairement battue ou tuée. Cependant, le déguisement avait ses propres risques, car il y avait plusieurs cas où la  » femme « homme-de-Dieu » « 45 fut accusée de séduction par une autre femme, qui produisait un enfant comme preuve du péché du saint46 !

le notes sur le site:

http://www.pagesorthodoxes.net/saints/meres-spirituelles/meres-du-desert-margot-king.htm

LES MÈRES DU DÉSERT DE L’EUROPE OCCIDENTALE

Puisque le temps ne permet pas d’examiner ici ces vies en détail, déplaçons notre attention vers le nord, afin de voir comment ce phénomène nouveau s’installa dans les contrées émergent de l’Europe. Au IVe siècle, toutes les recluses que j’ai découvert à ce jour se trouvaient en Italie et en Gaule. Parmi les protégées de saint Jérôme figuraient Mélanie la Jeune (31 décembre), qui était à un moment recluse au Mont des Oliviers47, Marcelle (31 janvier)48 et Asella (6 décembre)49. Cette dernière, bien qu’elle n’avait que douze ans, s’était  » renfermée dans une cellule étroite et ainsi se promenait au Paradis « , recherchant  » toutes ses délices dans la solitude et ainsi elle établit pour elle-même un ermitage monastique en plein centre de Rome « .50 Une autre recluse romaine, mentionnée par Pallade, fut visitée par Serapion.  » Pourquoi demeures-tu solitaire ?  » demanda-t-il.  » Je ne suis pas solitaire, je suis en voyage.  »  » Où voyages-tu ?  »  » Vers Dieu,  » répondit-elle. Serapion la réprima, en dépit de sa sainteté, pour son orgueil, car elle refusa d’obéir à son ordre de se dévêtir en public ; pour Serapion, cela fut une preuve qu’elle n’était pas entièrement morte au monde.51 D’autres étaient Romana, qui vécut dans une grotte au Mont Soracte jusqu’à son décès en 324 à l’âge de onze ou de douze ans52 et en Gaule, Vitalina, une solitaire en Auvergne qui reçut la visite de Martin de Tours53, et aussi Florence,54 Menna et Triaise.55
Au Ve siècle, par contre, je n’ai trouvé qu’une recluse gauloise56, mais au moins quinze recluses celtes J’ai identifié trois recluses qui habitaient près de Reims à la fin du Ve siècle, mais elles étaient d’origine irlandaise.57 On trouve au VIe siècle six recluses en Gaule, dont trois sont mentionnées par Grégoire de Tours,58 une en Belgique et trois en Italie. On peut difficilement considérer Tygrie comme une recluse, puisque elle ne s’est pas cachée pour mener une vie solitaire, mais afin de dissimuler le pouce et deux doigts de Jean le Précurseur qu’elle avait volé de son sanctuaire à Alexandrie.59 Par rapport à ces dix recluses de l’Europe continentale, il y avait dix-huit recluses celtes.
Au VIIe siècle, nous trouvons quatre femmes solitaires aux Pays-Bas, dont deux étaient d’origine irlandaise, trois irlandaises en Gaule, deux anglaises en Italie, et dix recluses en Angleterre. Au VIIIe siècle : deux recluses en Belgique (dont une irlandaise), trois en Gaule, deux en Italie, deux en Irlande et sept en Angleterre. Notable parmi les recluses anglaises était Lioba, qui, à la mort de Boniface, s’est retirée comme abbesse de Tauberbischofsheim pour mener une vie de solitaire avec quelques compagnes.60 Au IXe siècle il semble avoir plus de recluses en Allemagne, mais la proportion peut changer avec des informations supplémentaires sur la France et la Belgique.
On peut tenter quelques conclusions découlant de cet échantillon assez restreint, même si on tient compte des difficultés associées à l’identification et à la chronologie des saints celtes des Îles britanniques.61 En dépit de l’exemple de saint Martin de Tours et du grand estime dont jouissaient les ermites de Lérins et de l’île avoisinante de Léro, la vie érémitique pendant ces premiers siècles n’a jamais jouit de la même popularité en Gaule qu’en Irlande.62 Dès le début du VIe siècle, les pratiques irlandaises de solitude et de pérégrination étaient devenues si répandues qu’elles causaient des problèmes pour l’Église.63 Comme Nora Chadwick a souligné:  » Les formes évoluées d’anachorétisme de l’Église celte ne semblent pas trouver leurs origines chez les anachorètes des montagnes et des forêts de la Gaule orientale… Ses affinités sont sûrement plutôt avec les solitaires et les petites communautés liées aux laures de l’Égypte, de la Syrie, de la Palestine et de Mésopotamie « 64.
La théorie de Chadwick selon laquelle les racines de la spiritualité celte se trouvent dans le modèle du désert, avec peu ou pas d’influence de l’Europe continentale, aide à expliquer le nombre disproportionné de recluses irlandaises par rapport à celles du Continent. Puisque la spiritualité monastique irlandaise a eu une profonde influence sur les Anglo-saxons, il n’est pas étonnant que la tradition érémitique en Angleterre au Moyen-Âge tardif était très forte. Bien que l’impression que nous donne la lecture du vénérable Bède soit que la vie monastique en Angleterre anglo-saxonne était presque entièrement cénobitique, il fut lui-même fortement influencé par l’idéal érémitique, ce qui est évident par sa vénération de personnalités telles qu’Aidan et Cuthbert.65 En fait, l’étude de la poésie vernaculaire de l’époque confirme l’influence de cette forme d’ascèse irlandaise sur les anglo-saxons.66 On appelle même Hilda de Whitby, cette abbesse bien organisée,  » une patronne des recluses « ,67 et il semble probable, compte tenu de son amitié avec Aidan, qu’elle a vécu comme ermite pendant son séjour au nord de Wear avant de devenir abbesse de Hartlepool. En fait, son prédécesseur à Hartlepool, Heiu, s’est retirée à Calcaria comme recluse.68
Aldhelm considère non seulement Paul de Thèbes et Antoine le Grand comme modèles de la vie érémitique, mais aussi Eugénie et Judith de l’Ancien Testament.69 Parmi les saintes femmes mentionnées par Aldhelm, nous trouvons Ethelthrith, qui a vécu quarante années comme recluse à Croyland,70 Milburga, qui s’est enfuie d’un mariage fâcheux et qui a vécu quelque temps comme recluse avant de devenir abbesse,71 et Frideswide, qui elle aussi, fuyant un prétendant inopportun, vécut comme solitaire pendant trois ans à environ dix milles d’Oxford72. Je signale ces trois femmes parce qu’avec Hilda, elles sont nommées dans un psautier du XIIe siècle, qui, d’après l’explication convaincante de Talbot, fut écrit spécifiquement pour la recluse Christina de Markyate  » selon ses intérêts « 73. Anticipant ainsi le XIIe siècle, nous voyons que la tradition érémitique ne s’est jamais affaiblie en Angleterre, et cela même face à l’hiérarchie de l’Église, normande et étrangère, qui semblait être  » plus intéressée par les formes structurées et disciplinées d’ascétisme religieux « 74 que par les formes qui trouvaient leur expression dans la vie de recluse.
Aux IXe et Xe siècles, il semble avoir eu un recul d’intérêt pour la vie solitaire. Sainsaulieu n’a repéré que sept recluses en France pendant cette époque75 et je n’ai identifié que 23 en Angleterre et en Europe continentale. Saint-Gall semble être une exception – là, nous trouvons la redoutable Wiborada et un grand nombre de femmes solitaires qui suivirent son exemple.76 Une raison possible de cette diminution du nombre de recluses serait que l’Église exerçait un contrôle plus strict sur ses enfants – surtout ceux de sexe féminin –, car c’est justement au IXe siècle que nous trouvons la première règle complète pour les recluses. La règle de Grimlaicus régit tous les aspects de la vie solitaire, la plaçant fermement sous la juridiction de l’hiérarchie.77 Il n’est peut-être pas étonnant qu’à partir de cette époque nous trouvons peu d’ascètes  » excentriques  » sauf en Égypte ou en Irlande. Celles-ci apparaissent de temps en temps, comme dans la cas bizarre de Christina Mirabilis (+1224), qui, fuyant la puanteur de l’humanité pécheresse après sa vision de Dieu, vécut dans les arbres et les clochers des églises et se jeta dans les fournaises afin de prévenir les gens du sort qui attend les pécheurs.78
 Au XIe siècle, la vie érémitique assuma de nouveau l’importance qu’elle avait aux premiers siècles de l’Église. Sainsaulieu identifia environ 3,000 reclus et recluses en France entre le XIe et le XVe siècles.79 Doerr recensa 433 recluses et le lieu de leur réclusion en Allemagne du sud80 et Clay inventoria 750 cellules en Angleterre et les noms de plus de 650 reclus, dont 180 femmes.81 Ces augmentations sont dues non seulement à l’accroissement de la population mais aussi à l’intensification de la piété des laïques. Les idéaux incarnés dans un Pierre Damien et un saint Bernard influencèrent profondément la vie ascétique et furent reflétés dans un nombre croissant de personnes qui trouvèrent leur vocation dans la vie de reclus. Les prédications basées sur la vie des saints eurent aussi une influence significative sur la sensibilité spirituelle des laïques.82 Ainsi nous trouvons, par exemple, la reine Margaret d’Écosse se retirant fréquemment pour la prière et la méditation dans une grotte près de Dunfermline ;83 Diemut de Wessobrun, copiste de manuscrits;84 Chelidonia, recluse pendant soixante ans dans les montagnes près de Subiaco;85 Damgerosa, qui vécut comme recluse pendant cinquante ans sur une colline près du Mans;86 et en Angleterre, Christina de Markyate, dont la vie a été préparée et traduit par C.H. Talbot.87
Je signale Christina de Markyate car elle est un exemple parfait des différents thèmes que nous avons abordés dans notre rapide périple à travers les siècles à la recherche des Mères du désert. Christina naquit vers 1096 à Huntingdon en Angleterre, où, nous l’avons vu, la tradition érémitique était fortement enracinée. À Saint-Albans, elle fait tôt dans sa vie un vœu de virginité, mais elle est promise en mariage contre son gré à un certain Burhred. En dépit de l’opposition de ses parents et de l’évêque qui tente de la séduire, elle suit l’exemple des Mères du désert et s’enfuit, déguisée comme un homme. Elle se réfugie auprès de la recluse Alfwen à Flamstead, où elle demeure deux ans avant de s’installer dans une petite cellule à l’ermitage de l’homme de Dieu Roger. Après quatre ans de réclusion, elle retourne à Markyate. Invitée à devenir la supérieure d’une communauté de moniales, elle décide de rester recluse et prononce ses vœux monastiques vers 1130. Bien que solitaire, elle était très impliquée dans les affaires du monde et elle était conseillère de Geoffroy, abbé de Saint-Albans. En dépit des souffrances et des maladies qu’elle endurait, elle se montra une personne bien équilibrée qui  » a trouvé la stabilité dans la vie de prière et de solitude « .88
Puisque cet essai n’est qu’un survol d’introduction à la tradition anachorète féminine, on peut signaler en passant deux règles pour recluses bien connues au XIIe siècle, celles d’Aelred de Rievaulx89 et l’Ancrene Riwle. Toutes deux sont baignées de l’esprit cistercien et sont des adaptations de la règle bénédictine, avec de généreux ajouts du mysticisme d’Antoine et de Cassien. De la même époque nous avons deux lettres d’Abélard à Héloïse90 dans les quelles il trace les origines des ordres religieux féminins et il loue les vertus de la vie solitaire, telle que vécue par Marie l’Égyptienne entre autres
 » Erigions donc des refuges pour nous-mêmes au désert afin de mieux pouvoir nous tenir devant le Seigneur et, ainsi préparés, participer à son service, afin que la société des hommes ne dérange pas notre repos, n’incite pas de tentations et ne distrait pas nos esprits de notre sainte vocation. « 91
Bien que beaucoup connaissent mal les premières Mères du désert, nul ne peut ignorer la floraison importante de traités mystiques du XIVe siècle. La tradition sur laquelle se fondait leurs auteurs était déjà ancienne et nous pouvons nous réjouir qu’au XXe siècle nous puissions bénéficier des expériences et des connaissances spirituelles des recluses du Moyen-Âge. L’une d’elles est Julian de Norwich, dont nous ne connaissons que peu de choses de sa vie ; nous n’avons que ses écrits.92 Une telle anonymat est en fait une conclusion appropriée à cet essai, car cela était sûrement le but de ces saintes femmes. Elles se sont retirées du monde et ont recherché la réclusion et la dissimulation afin de se dévouer entièrement à la contemplation. Les écrits de Julian la révèlent comme ne le pourrait aucun récit historique. Son harmonie spirituelle, son équilibre et son intégration témoignent de la validité de la vie solitaire. Bien que certaines des vies anciennes contiennent des éléments absurdes et même amusants, la motivation spirituelle est néanmoins réelle et la quête de solitude est un véritable phénomène contemporain.93 En fait, c’est par l’exemple de deux de ces recluses que j’ai entrepris ce voyage par des chemins peu fréquentés et que j’ai commencé cette étude qui pourrait bien occuper le reste de mes jours. C’est à elles, donc, que je dédie cet essai.

Traduit par Paul Ladouceur.

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