Archive pour la catégorie 'Pape Benoît: voyage'

BERLIN : DISCOURS DE BENOÎT XVI AUX MUSULMANS

24 septembre, 2011

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BERLIN : DISCOURS DE BENOÎT XVI AUX MUSULMANS

ROME, Vendredi 23 septembre 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a adressé ce matin à une quinzaine de représentants des communautés musulmanes présentes en Allemagne, qu’il a rencontrés à la nonciature apostolique de Berlin dans le cadre de son 3ème voyage en Allemagne.
Chers amis musulmans,
Il m’est agréable de vous adresser ici, aujourd’hui, un salut à vous, représentants de diverses communautés musulmanes présentes en Allemagne. Je remercie de tout cœur le professeur Mouhanad Khorchide pour ses paroles amicales de salutation. Elles me montrent combien a grandi une atmosphère de respect et de confiance entre l’Église catholique et les communautés musulmanes en Allemagne.
Berlin est un lieu opportun pour une telle rencontre, non seulement parce qu’ici se trouve la mosquée la plus ancienne sur le sol allemand, mais aussi parce qu’à Berlin vit le plus grand nombre de musulmans par rapport à toutes les autres villes d’Allemagne.
À partir des années 70, la présence de nombreuses familles musulmanes est devenue toujours plus un trait distinctif de ce pays. Il sera toutefois nécessaire de s’engager constamment pour une meilleure connaissance et compréhension réciproques. Cela est essentiel non seulement pour une cohabitation pacifique, mais aussi pour l’apport que chacun est en mesure de donner pour la construction du bien commun à l’intérieur de la société même.
Beaucoup de musulmans attribuent une grande importance à la dimension religieuse. Cela est interprété, parfois, comme une provocation dans une société qui tend à marginaliser cet aspect ou à l’admettre tout au plus dans la sphère des choix individuels de chacun.
L’Église catholique s’engage fermement pour que soit donnée la juste reconnaissance à la dimension publique de l’appartenance religieuse. Il s’agit d’une exigence qui ne devient pas insignifiante dans le contexte d’une société majoritairement pluraliste. Il faut faire attention, cependant, à ce que le respect envers l’autre soit toujours maintenu. Le respect réciproque grandit seulement sur la base de l’entente sur quelques valeurs inaliénables, propres à la nature humaine, surtout l’inviolable dignité de toute personne. Cette entente ne limite pas l’expression de chaque religion ; au contraire, elle permet à chacun de témoigner de manière constructive de ce en quoi il croit, en ne se soustrayant pas à la confrontation avec l’autre.
En Allemagne – comme en de nombreux autres pays, pas seulement occidentaux – ce cadre de référence commun est représenté par la Constitution, dont le contenu juridique est contraignant pour chaque citoyen, qu’il appartienne ou non à une confession religieuse.
Naturellement le débat sur la meilleure formulation de principes comme la liberté de culte public, est vaste et toujours ouvert, toutefois le fait que la Loi Fondamentale les exprime d’une façon encore valable aujourd’hui, à plus de 60 ans de distance (cf. art. 4, 2), est significatif. Nous y trouvons exprimé avant tout cet ethos commun qui est à la base de la cohabitation civile et qui en quelque manière indique aussi les règles apparemment seulement formelles du fonctionnement des organes institutionnels et de la vie démocratique.
Nous pourrions nous demander comment un tel texte, élaboré à une époque historique radicalement différente, dans une situation culturelle presque uniformément chrétienne, peut être adapté à l’Allemagne d’aujourd’hui, qui vit dans le contexte de la mondialisation et qui est marqué par un pluralisme notable en matière de convictions religieuses.
La raison de ceci, me semble-t-il, se trouve dans le fait que les pères de la Loi Fondamentale ont eu pleinement conscience, en ce moment important, de devoir chercher un terrain solide, sur lequel tous les citoyens pourraient se reconnaître. En faisant cela ils ne faisaient pas abstraction de leur propre appartenance religieuse; pour beaucoup d’entre eux, au contraire, la vision chrétienne de l’homme était la vraie force inspiratrice. Toutefois ils savaient devoir se confronter avec des hommes ayant une base confessionnelle différente voire non religieuse : le terrain commun fut trouvé dans la reconnaissance de quelques droits inaliénables, qui sont propres à la nature humaine et qui précèdent toute formulation positive.
De cette façon une société substantiellement homogène a posé le fondement qu’aujourd’hui nous reconnaissons valable pour un monde marqué par le pluralisme. Fondement qui, en réalité, indique aussi des limites évidentes à ce pluralisme : il n’est pas pensable, en effet, qu’une société puisse se maintenir à long terme sans un consensus sur les valeurs éthiques fondamentales.
Chers amis, sur la base de tout ce que j’ai indiqué ici, je pense qu’une collaboration féconde entre chrétiens et musulmans est possible. Et de cette manière nous contribuons à la construction d’une société qui, sous de nombreux aspects, sera différente de ce que nous avons apporté avec nous du passé. En tant qu’hommes religieux, à partir de nos convictions respectives, nous pouvons donner un témoignage important dans de nombreux secteurs cruciaux de la vie sociale. Je pense, par exemple, à la sauvegarde de la famille fondée sur le mariage, au respect de la vie dans toutes les phases de son évolution naturelle ou à la promotion d’une plus grande justice sociale.
Pour cela aussi j’estime important de célébrer une Journée de réflexion, de dialogue et de prière pour la paix et la justice dans le monde ; et nous voulons le faire le 27 octobre prochain, à 25 ans de la rencontre historique d’Assise conduite par mon prédécesseur, le Bienheureux Jean-Paul II. Par ce rassemblement nous voulons montrer, avec simplicité, que, en hommes religieux, nous offrons notre contribution particulière pour la construction d’un monde meilleur, reconnaissant en même temps la nécessité, pour l’efficacité de notre action, de progresser dans le dialogue et dans l’estime réciproque.
Avec ces sentiments je vous renouvelle mon cordial salut et je vous remercie pour cette rencontre, qui enrichit mon séjour dans ma patrie. Merci pour votre attention !
[Texte original: Allemand]

ERFURT : LE PAPE RENCONTRE L’EGLISE ÉVANGÉLIQUE ALLEMANDE

24 septembre, 2011

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ERFURT : LE PAPE RENCONTRE L’EGLISE ÉVANGÉLIQUE ALLEMANDE

ROME, Vendredi 23 septembre 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a adressé ce matin aux représentants du Conseil de l’Eglise évangélique allemande qu’il a rencontrés à Erfurt au couvent des Augustins où Luther commença son cheminement théologique.
Mesdames et Messieurs,
Prenant la parole, je voudrais tout d’abord remercier pour cette occasion de vous rencontrer. Ma gratitude va particulièrement au Président Schneider qui m’a donné la bienvenue et m’a reçu parmi vous avec des paroles amicales. Je voudrai remercier également pour le don spécial qu’est notre rencontre dans ce lieu historique.
Pour moi, en tant qu’Évêque de Rome, c’est un moment d’émotion de rencontrer ici, dans l’antique couvent augustinien d’Erfurt, les représentants du Conseil de l’Église Évangélique en Allemagne.Luther a étudié ici. Ici, il été ordonné prêtre en 1507. Contre le désir de son père, il ne continua pas ses études de droit, mais il étudia la théologie et se mit en marche vers le sacerdoce dans l’Ordre de saint Augustin. Sur ce chemin, ce n’était pas ceci ou cela qui l’intéressait. Ce qui ne lui donnait pas la paix était la question de Dieu, qui fut la passion profonde et le ressort de sa vie et de son itinéraire tout entier. « Comment puis-je avoir un Dieu miséricordieux ? » Cette question lui pénétrait le cœur et se trouvait derrière chacune de ses recherches théologiques et chaque lutte intérieure. Pour lui, la théologie n’était pas une question académique, mais la lutte intérieure avec lui-même, et ensuite c’était une lutte par rapport à Dieu et avec Dieu.
« Comment puis-je avoir un Dieu miséricordieux ? » Que cette question ait été la force motrice de tout son chemin, me touche toujours à nouveau. Qui, en effet, se préoccupe aujourd’hui de cela, même parmi les chrétiens ? Que signifie la question de Dieu dans notre vie ? Dans notre annonce ? La plus grande partie des gens, même des chrétiens, tient aujourd’hui pour acquis que Dieu, en dernière analyse, ne s’occupe plus de nos péchés et de nos vertus. Il sait, en effet, que nous sommes tous que chair. Si aujourd’hui, on croit encore en un au-delà et en un jugement de Dieu, alors presque tous nous présupposons en pratique que Dieu doit être généreux, et, qu’à la fin, dans sa miséricorde, il ignorera nos petites fautes. Mais nos fautes sont-elles vraiment si petites ? Le monde n’est-il pas dévasté à cause de la corruption des grands, mais aussi à cause de celle des petits, qui pensent seulement à leurs propres intérêts ? N’est-il pas dévasté par le pouvoir des drogues, qui vit du désir de vie et d’argent d’une part, et de l’autre, par l’addiction à la jouissance des personnes qui lui sont adonnées ? N’est-il pas menacé par la disposition croissante à la violence qui se revêt souvent de la religiosité ? La faim et la pauvreté pourraient-elles dévaster autant de parties entières du monde si, en nous, l’amour de Dieu et, à partir de Lui, l’amour pour le prochain, pour les créatures de Dieu, les hommes, étaient plus vivants ? Les questions en ce sens pourraient continuer. Non, le mal n’est pas une bagatelle. Et il ne pourrait être aussi puissant si nous mettions vraiment Dieu au centre de notre vie. La question : quelle est la position de Dieu à mon égard, comment je me situe moi devant Dieu ? – cette question brûlante de Martin Luther doit devenir de nouveau, et certainement sous une forme nouvelle également notre question. Je pense que c’est là le premier appel que nous devrions entendre dans la rencontre avec Martin Luther.
Et alors, est important : Dieu, le Dieu unique, le Créateur du ciel et de la terre, est quelque chose d’autre qu’une hypothèse philosophique sur les origines du cosmos. Ce Dieu a un visage et il nous a parlé. Dans l’homme Jésus Christ, il est devenu l’un de nous – à la fois vrai Dieu et vrai homme. La pensée de Luther, sa spiritualité toute entière était complètement christocentrique : « Ce qui promeut la cause du Christ » était pour Luther le critère herméneutique décisif dans l’interprétation de la Sainte Écriture. Cela suppose toutefois que le Christ soit le centre de notre spiritualité et que l’amour pour Lui, le vivre ensemble avec Lui oriente notre vie.
Maintenant vous direz peut-être : c’est bien et bon ! Mais qu’a à voir tout cela avec notre situation œcuménique ? Tout cela n’est peut-être seulement qu’une tentative d’éluder, avec tant de paroles, les problèmes urgents dans lesquels nous attendons des progrès pratiques, des résultats concrets ? A ce sujet, je réponds : la chose la plus nécessaire pour l’œcuménisme est par-dessus tout que, sous la pression de la sécularisation, nous ne perdions pas presque par inadvertance les grandes choses que nous avons en commun, qui en elles-mêmes nous rendent chrétiens et qui sont restées comme don et devoir. C’était l’erreur de l’âge confessionnel d’avoir vu en majeure partie seulement ce qui sépare, et de ne pas avoir perçu de façon existentielle ce que nous avons en commun dans les grandes directives de la Sainte Écriture et dans les professions de foi du christianisme antique. Le grand progrès œcuménique des dernières décennies est que nous nous soyons rendu compte de cette communion et que nous pouvons la reconnaître comme notre fondement impérissable dans la prière et le chant communs, dans l’engagement commun pour l’ethos chrétien face au monde, dans le témoignage commun du Dieu de Jésus Christ en ce monde.
Le danger de la perdre n’est pas irréel, malheureusement. Je voudrais ici faire remarquer deux aspects. Ces derniers temps, la géographie du christianisme a profondément changé et est en train de continuer à changer. Devant une forme nouvelle de christianisme, qui se diffuse avec un immense dynamisme missionnaire, parfois préoccupant dans ses formes, les Églises confessionnelles historiques restent souvent perplexes. C’est un christianisme de faible densité institutionnelle, avec peu de bagage rationnel et encore moins de bagage dogmatique et aussi avec peu de stabilité. Ce phénomène mondial nous place tous devant la question : Qu’est-ce-que cette nouvelle forme de christianisme a à nous dire de positif et de négatif ? En tous cas, elle nous met de nouveau face à la question de savoir ce qui demeure toujours valable, et ce qui peut ou doit être changé, par rapport à la question de notre choix fondamental dans la foi.
Plus profond et plus sensible dans notre Pays, est le second défi pour la chrétienté tout entière, dont je voudrais vous parler. Il s’agit du contexte du monde sécularisé, dans lequel nous devons vivre et témoigner aujourd’hui notre foi. L’absence de Dieu dans notre société se fait plus pesante, l’histoire de sa Révélation, dont nous parle l’Écriture, semble reléguée dans un passé qui s’éloigne toujours davantage. Faut-il peut-être céder à la pression de la sécularisation, devenir modernes moyennant une édulcoration de la foi ? La foi doit être repensée, naturellement, et surtout elle doit être vécue aujourd’hui d’une manière nouvelle pour devenir quelque chose qui appartient au présent. Mais ce n’est pas l’édulcoration de la foi qui aide, mais seulement le fait de la vivre entièrement dans notre aujourd’hui. C’est une tâche œcuménique centrale. En cela nous devrions nous entraider à croire de façon plus profonde et plus vivante. Ce ne seront pas les tactiques qui nous sauveront, qui sauveront le christianisme, mais une foi repensée et vécue d’une façon nouvelle, par laquelle le Christ, et avec Lui le Dieu vivant, entre dans notre monde. Comme les martyrs de l’époque nazie nous ont conduits les uns vers les autres, et ont suscité la première grande ouverture œcuménique, ainsi aujourd’hui encore, la foi, vécue à partir du plus profond de nous-mêmes, dans un monde sécularisé, est la force œcuménique la plus forte qui nous réunit, nous guidant vers l’unité dans l’unique Seigneur.[Texte original: Allemand]

DISCOURS DE BENOÎT XVI AU PARLEMENT DE BERLIN

23 septembre, 2011

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DISCOURS DE BENOÎT XVI AU PARLEMENT DE BERLIN

Texte intégral

ROME, Jeudi 22 septembre 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte du discours que le pape Benoît XVI a prononcé ce jeudi après-midi au Bundestag (parlement) de Berlin, dans le cadre de son voyage apostolique en Allemagne (22-25 septembre).
Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Président du Bundestag,
Madame la Chancelière fédérale,
Madame le Président du Bundesrat,
Mesdames et messieurs les Députés,
C’est pour moi un honneur et une joie de parler devant cette Chambre haute — devant le Parlement de ma patrie allemande, qui se réunit ici comme représentation du peuple, élue démocratiquement, pour travailler pour le bien de la République fédérale d’Allemagne. Je voudrais remercier Monsieur le Président du Bundestag pour son invitation à tenir ce discours, ainsi que pour les aimables paroles de bienvenue et d’appréciation avec lesquelles il m’a accueilli. En cette heure, je m’adresse à vous, Mesdames et Messieurs — certainement aussi comme compatriote qui se sait lié pour toute la vie à ses origines et suit avec intérêt le devenir de la Patrie allemande. Mais l’invitation à tenir ce discours m’est adressée en tant que Pape, en tant qu’Evêque de Rome, qui porte la responsabilité suprême pour la chrétienté catholique. En cela, vous reconnaissez le rôle qui incombe au Saint-Siège en tant que partenaire au sein de la communauté des Peuples et des Etats. Sur la base de ma responsabilité internationale, je voudrais vous proposer quelques considérations sur les fondements de l’Etat de droit libéral.
Vous me permettrez de commencer mes réflexions sur les fondements du droit par un petit récit tiré de la Sainte Ecriture. Dans le Premier Livre des Rois on raconte qu’au jeune roi Salomon, à l’occasion de son intronisation, Dieu accorda d’avancer une requête. Que demandera le jeune souverain en ce moment? Succès, richesse, une longue vie, l’élimination de ses ennemis? Il ne demanda rien de tout cela. Par contre il demanda: «Donne à ton serviteur un cœur docile pour gouverner ton peuple, pour discerner entre le bien et le mal» (1 R 3, 9). Par ce récit, la Bible veut nous indiquer ce qui en définitive doit être important pour un politicien. Son critère ultime et la motivation pour son travail comme politicien ne doit pas être le succès et encore moins le profit matériel. La politique doit être un engagement pour la justice et créer ainsi les conditions de fond pour la paix. Naturellement un politicien cherchera le succès sans lequel il n’aurait aucune possibilité d’action politique effective! Mais le succès est subordonné au critère de la justice, à la volonté de mettre en œuvre le droit et à l’intelligence du droit. Le succès peut aussi être une séduction, et ainsi il peut ouvrir la route à la contrefaçon du droit, à la destruction de la justice. «Enlève le droit — et alors qu’est ce qui distingue l’Etat d’une grosse bande de brigands?» a dit un jour saint Augustin (De civitate Dei iv, 4, 1). Nous Allemands, nous savons par notre expérience que ces paroles ne sont pas un phantasme vide. Nous avons fait l’expérience de séparer le pouvoir du droit, de mettre le pouvoir contre le droit, de fouler aux pieds le droit, de sorte que l’Etat était devenu une bande de brigands très bien organisée, qui pouvait menacer le monde entier et le pousser au bord du précipice. Servir le droit et combattre la domination de l’injustice est et demeure la tâche fondamentale du politicien. Dans un moment historique où l’homme a acquis un pouvoir jusqu’ici inimaginable, cette tâche devient particulièrement urgente. L’homme est en mesure de détruire le monde. Il peut se manipuler lui-même. Il peut, pour ainsi dire, créer des êtres humains et exclure d’autres êtres humains du fait d’être des hommes. Comment reconnaissons-nous ce qui est juste? Comment pouvons-nous distinguer entre le bien et le mal, entre le vrai droit et le droit seulement apparent? La demande de Salomon reste la question décisive devant laquelle l’homme politique et la politique se trouvent aussi aujourd’hui.
Pour une grande partie des matières à réguler juridiquement, le critère de la majorité peut être suffisant. Mais il est évident que dans les questions fondamentales du droit, où est en jeu la dignité de l’homme et de l’humanité, le principe majoritaire ne suffit pas: dans le processus de formation du droit, chaque personne qui a une responsabilité doit chercher elle-même les critères de sa propre orientation. Au troisième siècle, le grand théologien Origène a justifié ainsi la résistance des chrétiens à certains règlements juridiques en vigueur: «Si quelqu’un se trouvait chez les Scythes qui ont des lois irréligieuses, et qu’il fut contraint de vivre parmi eux… celui-ci certainement agirait de façon très raisonnable si, au nom de la loi de la vérité qui chez les Scythes est justement illégalité, il formerait aussi avec les autres qui ont la même opinion, des associations contre le règlement en vigueur…» (Contra Celsum GCS Orig. 428 (Koetschau); cf. A. Fürst, Monotheismuis und Monarchie. Zum Zusammenhang von Heil und Herrschaft in der Antike. In: Theol. Phil. 81 (2006) 321-338; citation p. 336; cf. également J. Ratzinger, Die Einheit der Nationen. Eine Vision der Kirchenväter (Sazburg-München 1971) 60).
Sur la base de cette conviction, les combattants de la résistance ont agi contre le régime nazi et contre d’autres régimes totalitaires, rendant ainsi un service au droit et à l’humanité tout entière. Pour ces personnes il était évident de façon incontestable que le droit en vigueur était, en réalité, une injustice. Mais dans les décisions d’un politicien démocrate, la question de savoir ce qui correspond maintenant à la loi de la vérité, ce qui est vraiment juste et peut devenir loi, n’est pas aussi évidente. Ce qui, en référence aux questions anthropologiques fondamentales, est la chose juste et peut devenir droit en vigueur, n’est pas du tout évident en soi aujourd’hui. A la question de savoir comment on peut reconnaître ce qui est vraiment juste et servir ainsi la justice dans la législation, il n’a jamais été facile de trouver la réponse et aujourd’hui, dans l’abondance de nos connaissances et de nos capacités, cette question est devenue encore plus difficile.
Comment reconnaît-on ce qui est juste? Dans l’histoire, les règlements juridiques ont presque toujours été motivés de façon religieuse: sur la base d’une référence à la divinité on décide ce qui parmi les hommes est juste. Contrairement aux autres grandes religions, le christianisme n’a jamais imposé à l’Etat et à la société un droit révélé, ni un règlement juridique découlant d’une révélation. Il a au contraire renvoyé à la nature et à la raison comme vraies sources du droit — il a renvoyé à l’harmonie entre raison objective et subjective, une harmonie qui toutefois suppose le fait d’être toutes deux les sphères fondées dans la Raison créatrice de Dieu. Avec cela les théologiens chrétiens se sont associés à un mouvement philosophique et juridique qui s’était formé depuis le iie siècle av. J-.C. Dans la première moitié du deuxième siècle préchrétien, il y eut une rencontre entre le droit naturel social développé par les philosophes stoïciens et des maîtres influents du droit romain (Cf. W. Waldstein, Ins Herz geschrieben. Das Naturrecht als Fundament einer menschlichen Gesellschaft [Augsburg 2010] 11ss; 31-61). Dans ce contact est née la culture juridique occidentale, qui a été et est encore d’une importance déterminante pour la culture juridique de l’humanité. De ce lien préchrétien entre droit et philosophie part le chemin qui conduit, à travers le Moyen-âge chrétien, au développement juridique des Lumières jusqu’à la Déclaration des Droits de l’homme et jusqu’à notre Loi Fondamentale allemande, par laquelle notre peuple, en 1949, a reconnu «les droits inviolables et inaliénables de l’homme comme fondement de toute communauté humaine, de la paix et de la justice dans le monde».
Pour le développement du droit et pour le développement de l’humanité il a été décisif que les théologiens chrétiens aient pris position contre le droit religieux demandé par la foi dans les divinités, et se soient mis du côté de la philosophie, reconnaissant la raison et la nature dans leur corrélation comme source juridique valable pour tous. Saint Paul avait déjà fait ce choix quand, dans sa Lettre aux Romains, il affirmait: «Quand des païens privés de la Loi [la Torah d’Israël] accomplissent naturellement les prescriptions de la Loi, à ils se tiennent à eux-mêmes lieu de Loi; ils montrent la réalité de cette loi inscrite en leur cœur, à preuve le témoignage de leur conscience…» (2, 14s.). Ici apparaissent les deux concepts fondamentaux de nature et de conscience, où «conscience» n’est autre que le «cœur docile» de Salomon, la raison ouverte au langage de l’être. Si avec cela jusqu’à l’époque des Lumières, de la Déclaration des Droits de l’Homme après la seconde guerre mondiale et jusqu’à la formation de notre Loi Fondamentale, la question des fondements de la législation semblait claire, un dramatique changement de la situation est arrivé au cours du dernier demi siècle. L’idée du droit naturel est considérée aujourd’hui comme une doctrine catholique plutôt singulière, sur laquelle il ne vaudrait pas la peine de discuter en dehors du milieu catholique, de sorte qu’on a presque honte d’en mentionner même seulement le terme. Je voudrais brièvement indiquer comment il se fait que cette situation se soit créée. Avant tout, la thèse selon laquelle entre l’être et le devoir être il y aurait un abîme insurmontable, est fondamentale. Du fait d’être ne pourrait pas découler un devoir, parce qu’il s’agirait de deux domaines absolument différents. La base de cette opinion est la conception positiviste, aujourd’hui presque généralement adoptée, de nature. Si on considère la nature — avec les paroles de Hans Kelsen — comme «un agrégat de données objectives, jointes les unes aux autres comme causes et effets», alors aucune indication qui soit en quelque manière de caractère éthique ne peut réellement en découler (Waldstein, op. cit. 15-21). Une conception positiviste de la nature, qui entend la nature de façon purement fonctionnelle, comme les sciences naturelles la reconnaissent, ne peut créer aucun pont vers l’ethos et le droit, mais susciter de nouveau seulement des réponses fonctionnelles. La même chose, cependant, vaut aussi pour la raison dans une vision positiviste, qui chez beaucoup est considérée comme l’unique vision scientifique. Dans cette vision, ce qui n’est pas vérifiable ou falsifiable ne rentre pas dans le domaine de la raison au sens strict. C’est pourquoi l’ethos et la religion doivent être assignés au domaine du subjectif et tombent hors du domaine de la raison au sens strict du mot. Là où la domination exclusive de la raison positiviste est en vigueur — et cela est en grande partie le cas dans notre conscience publique — les sources classiques de connaissance de l’ethos et du droit sont mises hors jeu. C’est une situation dramatique qui nous intéresse tous et sur laquelle une discussion publique est nécessaire; une intention essentielle de ce discours est d’y inviter d’urgence.
Le concept positiviste de nature et de raison, la vision positiviste du monde est dans son ensemble une partie importante de la connaissance humaine et de la capacité humaine, à laquelle nous ne devons absolument pas renoncer. Mais elle-même dans son ensemble n’est pas une culture qui corresponde et soit suffisante au fait d’être homme dans toute son ampleur. Là ou la raison positiviste s’estime comme la seule culture suffisante, reléguant toutes les autres réalités culturelles à l’état de sous-culture, elle réduit l’homme, ou même, menace son humanité. Je le dis justement en vue de l’Europe, dans laquelle de vastes milieux cherchent à reconnaître seulement le positivisme comme culture commune et comme fondement commun pour la formation du droit, alors que toutes les autres convictions et les autres valeurs de notre culture sont réduites à l’état d’une sous-culture. Avec cela l’Europe se place, face aux autres cultures du monde, dans une condition de manque de culture et en même temps des courants extrémistes et radicaux sont suscités. La raison positiviste, qui se présente de façon exclusiviste et n’est pas en mesure de percevoir quelque chose au-delà de ce qui est fonctionnel, ressemble à des édifices de béton armé sans fenêtres, où nous nous donnons le climat et la lumière tout seuls et nous ne voulons plus recevoir ces deux choses du vaste monde de Dieu. Toutefois nous ne pouvons pas nous imaginer que dans ce monde auto-construit nous puisons en secret également aux «ressources» de Dieu, que nous transformons en ce que nous produisons. Il faut ouvrir à nouveau tout grand les fenêtres, nous devons voir de nouveau l’étendue du monde, le ciel et la terre et apprendre à utiliser tout cela de façon juste.
Mais comment cela se réalise-t-il? Comment trouvons-nous l’entrée dans l’étendue, dans l’ensemble? Comment la raison peut-elle retrouver sa grandeur sans glisser dans l’irrationnel? Comment la nature peut-elle apparaître de nouveau dans sa vraie profondeur, dans ses exigences et avec ses indications? Je rappelle un processus de la récente histoire politique, espérant ne pas être trop mal compris ni susciter trop de polémiques unilatérales. Je dirais que l’apparition du mouvement écologique dans la politique allemande à partir des années soixante-dix, bien que n’ayant peut-être pas ouvert tout grand les fenêtres, a toutefois été et demeure un cri qui aspire à l’air frais, un cri qui ne peut pas être ignoré ni être mis de côté, parce qu’on y entrevoit trop d’irrationalité. Des personnes jeunes s’étaient rendu compte qu’il y a quelque chose qui ne va pas dans nos relations à la nature; que la matière n’est pas seulement un matériel pour notre faire, mais que la terre elle-même porte en elle sa propre dignité et que nous devons suivre ses indications. Il est clair que je ne fais pas ici de la propagande pour un parti politique déterminé — rien ne m’est plus étranger que cela. Quand, dans notre relation avec la réalité, il y a quelque chose qui ne va pas, alors nous devons tous réfléchir sérieusement sur l’ensemble et nous sommes tous renvoyés à la question des fondements de notre culture elle-même. Qu’il me soit permis de m’arrêter encore un moment sur ce point. L’importance de l’écologie est désormais indiscutée. Nous devons écouter le langage de la nature et y répondre avec cohérence. Je voudrais cependant aborder avec force un point qui aujourd’hui comme hier est — me semble-t-il — largement négligé: il existe aussi une écologie de l’homme. L’homme aussi possède une nature qu’il doit respecter et qu’il ne peut manipuler à volonté. L’homme n’est pas seulement une liberté qui se crée de soi. L’homme ne se crée pas lui-même. Il est esprit et volonté, mais il est aussi nature, et sa volonté est juste quand il respecte la nature, l’écoute et quand il s’accepte lui-même pour ce qu’il est, et qu’il accepte qu’il ne s’est pas créé de soi. C’est justement ainsi et seulement ainsi que se réalise la véritable liberté humaine.
Revenons aux concepts fondamentaux de nature et de raison d’où nous étions partis. Le grand théoricien du positivisme juridique, Kelsen, à l’âge de 84 ans — en 1965 — abandonna le dualisme d’être et de devoir être. (Cela me console qu’à 84 ans, on puisse encore penser correctement) Il avait dit auparavant que les normes peuvent découler seulement de la volonté. En conséquence, la nature pourrait renfermer en elle des normes seulement — ajouta-t-il — si une volonté avait mis en elle ces normes. D’autre part disait-il, cela présupposerait un Dieu créateur, dont la volonté s’est introduite dans la nature. «Discuter sur la vérité de cette foi est une chose absolument vaine», note-t-il à ce sujet (Cfr. W. Waldstein, op. cit. 19). L’est-ce vraiment? — voudrais-je demander. Est-ce vraiment privé de sens de réfléchir pour savoir si la raison objective qui se manifeste dans la nature ne suppose pas une Raison créatrice, un Creator Spiritus?
A ce point le patrimoine culturel de l’Europe devrait nous venir en aide. Sur la base de la conviction de l’existence d’un Dieu créateur se sont développées l’idée des droits de l’homme, l’idée d’égalité de tous les hommes devant la loi, la connaissance de l’inviolabilité de la dignité humaine en chaque personne et la conscience de la responsabilité des hommes pour leur agir. Ces connaissances de la raison constituent notre mémoire culturelle. L’ignorer ou la considérer comme simple passé serait une amputation de notre culture dans son ensemble et la priverait de son intégralité. La culture de l’Europe est née de la rencontre entre Jérusalem, Athènes et Rome — de la rencontre entre la foi au Dieu d’Israël, la raison philosophique des Grecs et la pensée juridique de Rome. Cette triple rencontre forme l’identité profonde de l’Europe. Dans la conscience de la responsabilité de l’homme devant Dieu et dans la reconnaissance de la dignité inviolable de l’homme, de tout homme, cette rencontre a fixé des critères du droit, et les défendre est notre tâche en ce moment historique.
Au jeune roi Salomon, au moment de son accession au pouvoir, une requête a été accordée. Qu’en serait-il si à nous, législateurs d’aujourd’hui, était concédé d’avancer une requête? Que demanderions-nous? Je pense qu’aujourd’hui aussi, en dernière analyse, nous ne pourrions pas désirer autre chose qu’un cœur docile — la capacité de distinguer le bien du mal et d’établir ainsi le vrai droit, de servir la justice et la paix. Je vous remercie pour votre attention.

[Texte original: Allemand]

BENOÎT XVI RENCONTRE LA COMMUNAUTÉ JUIVE DE BERLIN

23 septembre, 2011

du site:

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BENOÎT XVI RENCONTRE LA COMMUNAUTÉ JUIVE DE BERLIN

Discours

ROME, Jeudi 22 septembre 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le discours que le pape Benoît XVI a adressé ce jeudi aux membres de la communauté juive de Berlin, qu’il a rencontrés dans le cadre de son voyage apostolique dans son pays natal (22-25 septembre).
Mesdames et Messieurs, chers amis!
Je suis heureux de cette rencontre avec vous ici à Berlin. Je remercie de tout cœur Monsieur le Président, Dr Dieter Graumann, pour ses aimables paroles qui font aussi réfléchir. Elles me montrent combien a grandi la confiance entre le Peuple juif et l’Eglise catholique, qui ont en commun une partie non négligeable de leurs traditions fondamentales, comme vous l’avez souligné. En même temps, nous savons bien, tous, qu’une communion affectueuse et compréhensive entre Israël et l’Eglise, dans le respect réciproque de l’être de chacun, doit toujours encore continuer à croître, et qu’elle est à inclure profondément dans l’annonce de la foi.
Durant ma visite à la synagogue de Cologne, il y a six ans, le Rabbin Teitelbaum a parlé de la mémoire comme l’une des colonnes dont on a besoin pour fonder sur elle un avenir pacifique. Et aujourd’hui, je me trouve dans un lieu central de la mémoire, d’une mémoire effroyable: d’ici fut projetée et organisée la Shoah, l’élimination des citoyens juifs en Europe. Avant la terreur nazie en Allemagne vivaient environ un demi million de juifs, qui constituaient une composante stable de la société allemande. Après la deuxième guerre mondiale, l’Allemagne fut considérée comme le «Pays de la Shoah» où, au fond, on ne pouvait plus vivre en temps que juif. Au début il n’y avait pratiquement plus aucun effort pour refonder les anciennes communautés juives, même si de l’Est arrivaient continuellement des personnes seules et des familles juives. Beaucoup d’entre elles voulaient émigrer et se construire une nouvelle existence, surtout aux Etats-Unis ou en Israël.
En ce lieu, il faut aussi rappeler le pogrom de la «nuit de cristal» du 9 au 10 novembre 1938. Seulement peu de personnes percevront toute la portée de cet acte de mépris comme le perçut le prévôt du Chapitre berlinois, Bernhard Lichtenberg qui, de la chaire de la cathédrale de Sainte-Hedwige, cria: «Le Temple est en flammes dehors — et il est aussi une maison de Dieu». Le régime de terreur du national-socialisme se fondait sur un mythe raciste, dont faisait partie le refus du Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, du Dieu de Jésus Christ et des personnes croyantes en lui. Le «tout-puissant» Adolf Hitler, c’était une idole païenne qui voulait se mettre à la place du Dieu biblique, Créateur et Père de tous les hommes. Avec le refus du respect pour ce Dieu unique se perd toujours aussi le respect pour la dignité de l’homme. Ce dont est capable l’homme qui refuse Dieu et quel visage peut prendre un peuple dans le «non» à ce Dieu, les horribles images provenant des camps de concentration à la fin de la guerre l’ont révélé.
Face à cette mémoire, il faut constater, avec gratitude, que depuis quelques décennies se manifeste un nouveau développement à propos duquel on peut même parler d’une nouvelle floraison de la vie juive en Allemagne. Il faut souligner qu’à cette même époque la communauté juive a eu, de façon particulière, un grand mérite pour son œuvre d’intégration des immigrés est-européens.
Avec reconnaissance, je voudrais aussi évoquer le dialogue entre l’Eglise catholique et le Judaïsme, un dialogue qui s’approfondit. L’Eglise ressent une grande proximité avec le peuple juif. Avec la Déclaration Nostra aetate du Concile Vatican ii, on a commencé à «parcourir un chemin irrévocable de dialogue, de fraternité et d’amitié» (Discours à la Synagogue de Rome, 17 janvier 2010). Ceci vaut pour l’Eglise catholique tout entière, dans laquelle le bienheureux Pape Jean-Paul ii s’est engagé de façon particulièrement vigoureuse en faveur de ce nouveau chemin. Ceci vaut évidemment aussi pour l’Eglise catholique en Allemagne qui est bien consciente de sa responsabilité particulière en cette matière. Dans le domaine public on note surtout la «Semaine de la fraternité» qui est organisée chaque année au cours de la première semaine de mars par les associations locales pour la collaboration judéo-chrétienne.
Du côté catholique il y a en outre des rencontres annuelles entre Evêques et Rabbins, comme aussi des colloques structurés avec le Conseil central des Juifs. Déjà dans les années soixante-dix, le Comité Central des Catholiques allemands (ZdK) s’est distingué par la fondation d’un forum «Juifs et Chrétiens», qui au cours des années a produit, avec compétence, de nombreux documents utiles. Je ne voudrai pas oublier de mentionner la rencontre historique pour le dialogue judéo-chrétien de mars 2006, avec la participation du Cardinal Walter Kasper. Ce travail en commun porte des fruits.
A côté de ces initiatives importantes il me semble que nous chrétiens nous devons nous rendre toujours plus compte de notre affinité intérieure avec le judaïsme, vous en avez parlé. Pour les chrétiens il ne peut y avoir une rupture dans l’événement du salut. Le salut vient justement des Juifs (cf. Jn 4, 22). Là où le conflit de Jésus avec le Judaïsme de son temps est vu de manière superficielle comme un détachement de l’Ancienne Alliance, il finit par être réduit à une idée de libération qui mésinterprète la Torah comme étant seulement l’observance servile de rites et de prescriptions extérieures. Mais de fait, le discours sur la Montagne n’abolit pas la Loi mosaïque, mais il révèle ses possibilités cachées et fait émerger de nouvelles exigences. Il nous renvoie au fondement le plus profond de l’agir humain, au cœur, où l’homme choisit entre le pur et l’impur, où se développent la foi, l’espérance et l’amour.
Le message d’espérance que les livres de la Bible hébraïque et de l’Ancien testament chrétien transmettent, a été assimilé et développé par des juifs et des chrétiens de diverses façons. «Après des siècles d’opposition, nous nous reconnaissons le devoir de faire en sorte que ces deux manières de faire une nouvelle lecture des écrits bibliques — celle des chrétiens et celle des juifs — entrent en dialogue entre elles, pour comprendre correctement la volonté et la parole de Dieu» (Jésus de Nazareth. Deuxième partie: De l’entrée à Jérusalem à la résurrection, p. 50). Dans une société toujours plus sécularisée, ce dialogue doit renforcer la commune espérance en Dieu. Sans cette espérance la société perd son humanité.
Tout compte fait, nous pouvons constater que l’échange entre l’Eglise catholique et le Judaïsme en Allemagne a déjà porté des fruits prometteurs. Des relations durables et confiantes ont grandi. Juifs et Chrétiens ont certainement une responsabilité commune pour le développement de la société, laquelle possède toujours aussi une dimension religieuse. Puissent tous les intéressés continuer ensemble ce chemin. Pour cela que l’Unique et le Tout-Puissant — Ha Kadosch Baruch Hu — donne sa Bénédiction. Je vous remercie.[Texte original: Allemand]

INTERVENTION DU PAPE À LA TÉLÉVISION ALLEMANDE À LA VEILLE DE SON VOYAGE

21 septembre, 2011

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INTERVENTION DU PAPE À LA TÉLÉVISION ALLEMANDE À LA VEILLE DE SON VOYAGE

Benoît XVI se rendra en Allemagne du 22 au 25 septembre

ROME, Dimanche 18 septembre 2011 (ZENIT.org) – A la veille du voyage apostolique qu’il accomplira en Allemagne du 22 au 25 septembre, le pape Benoît XVI a enregistré à Castel Gandolfo une intervention pour l’émission « Wort zum Sonntag » diffusée le 17 septembre au soir par la télévision publique allemande ARD. Nous publions ci-dessous la traduction de l’intervention de Benoît XVI en langue allemande.
Mesdames et Messieurs, chers compatriotes !
D’ici quelques jours, je partirai pour mon voyage en Allemagne et j’en suis très content. Je pense particulièrement avec joie à Berlin, où il y aura de nombreuses rencontres, et naturellement au discours que je tiendrai au Bundestag et à la grand messe que nous pourrons célébrer au stade olympique.
Un des moments les plus importants sera Erfurt : dans ce monastère augustinien où Luther a commencé son chemin, je pourrai rencontrer les représentants de l’Eglise évangélique d’Allemagne. Là, nous prierons ensemble, nous écouterons la Parole de Dieu, nous réfléchirons et nous parlerons ensemble. Nous n’attendons aucun événement sensationnel : en effet, la véritable grandeur de l’événement consiste justement en cela, que nous puissions ensemble, dans ce lieu, réfléchir, écouter la Parole de Dieu et prier et ainsi nous serons intimement proches et un véritable œcuménisme se manifestera.
Il y aura quelque chose de particulier pour moi : la rencontre avec l’Eichsfeld, cette petite bande de terre qui, tout en passant à travers toutes les péripéties de l’histoire, est restée catholique ; et puis le sud-est de l’Allemagne avec Fribourg, cette grande ville, avec de nombreuses rencontres qui se dérouleront là, surtout la veillée avec les jeunes et la Grand Messe qui conclura le voyage.
Tout cela n’est pas du tourisme religieux, et encore moins un « spectacle ». Ce dont il s’agit, la devise de ces journées le dit : «  Là où il y a Dieu, il y a un avenir ». Il devrait s’agir du fait que Dieu revienne dans notre horizon, ce Dieu si souvent totalement absent dont nous avons pourtant tant besoin.
Peut-être me demanderez-vous : « Mais Dieu, existe-t-il ? Et s’il existe, s’occupe-t-il vraiment de nous ? Pouvons-nous arriver jusqu’à Lui ? ». Bien sûr, c’est vrai : nous ne pouvons pas mettre Dieu sur la table, nous ne pouvons pas le toucher comme un ustensile ou le prendre en main comme n’importe quel objet. Nous devons de nouveau développer la capacité de perception de Dieu, capacité qui existe en nous. Nous pouvons pressentir quelque chose de la grandeur de Dieu dans la grandeur du cosmos. Nous pouvons utiliser le monde à travers la technique, parce qu’il est construit de manière rationnelle. Dans la grande rationalité du monde, nous pouvons pressentir l’esprit créateur duquel il provient, et dans la beauté de la création, nous pouvons pressentir quelque chose de la beauté, de la grandeur et de la bonté de Dieu. Dans la Parole des Saintes Ecritures, nous pouvons entendre des paroles de vie éternelle qui ne viennent pas simplement d’hommes mais qui viennent de Lui, et dans celles-ci, nous entendons sa voix. Et enfin, nous voyons presque Dieu aussi, dans la rencontre avec les personnes qui ont été touchées par Lui. Je ne pense pas seulement aux grands : de Paul à François d’Assise jusqu’à Mère Teresa ; mais je pense aux si nombreuses personnes simples dont personne ne parle. Et pourtant, quand nous les rencontrons, il y a de la bonté, de la sincérité, de la joie qui émane d’eux et nous savons que Dieu est là et qu’il nous touche aussi. C’est pourquoi, durant ces journées, nous voulons nous engager à revoir Dieu, pour redevenir des personnes par lesquelles une lumière de l’espérance entre dans le monde, cette lumière qui vient de Dieu et qui nous aide à vivre.

Traduction française : Zenit

LE 3E VOYAGE DE BENOÎT XVI EN ALLEMAGNE SOUS LE SIGNE DE L’AVENIR

17 septembre, 2011

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LE 3E VOYAGE DE BENOÎT XVI EN ALLEMAGNE SOUS LE SIGNE DE L’AVENIR

Présentation par le P. Lombardi

ROME, Vendredi 16 septembre 2011 (ZENIT.org)– Le P. Lombardi a présenté ce matin au Vatican le3e voyage de Benoît XVI en Allemagne (22-25 septembre) : un voyage intense dans trois diocèses et au Bundestag, où les relations œcuméniques et interreligieuses seront en bonne place. Et sous le signe de l’avenir:« Là où il y a Dieu, il y a un avenir ».
Le thème du voyage, clef de lecture
Il s’agit du 21evoyage du pape en dehors de l’Italie et de son 3evoyage dans sa patrie après celui de 2005, à l’occasion de la Journée mondiale de la jeunesse de Cologne, et celui de 2006, en Bavière.
Le thème de ce voyage de quatre jours est : « Là où il y a Dieu, il y a un avenir ». Cette expression est tirée d’une homélie de Benoît XVI au sanctuaire autrichien de Mariazell en 2007. Le père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse du Saint-Siège a souligné que ce choix signifie rappeler le primat de Dieu et son soutien à l’humanité pour faire face aux défis du monde.
Le P. Lombardi voit dans ce thème « une clef de lecture importante » de ce voyage « très riche et très intense » : 17 ou 18 discours sont prévus, ce qui place ce voyage, « après le voyage en Terre Sainte » parmi « ceux qui comportent le plus grand nombre de discours ».
Le pape se rendra à Berlin, Erfurt et Fribourg-en-Brisgau : son discours devant le Parlement, le Bundestag, est très attendu, mais aussi ses rencontres avec l’Eglise évangélique allemande et les Eglises orthodoxes, ainsi qu’avec des représentants de la communauté juive. Le pape rencontrera également des représentants de l’islam.
Le discours au Bundestag
Benoît XVI, a rappelé le P. Lombardi, rencontrera le président fédéral Christian Wulff, à la résidence du château de Bellevue, puis la chancelière Angela Merkel, au siège berlinois de la conférence épiscopale allemande.
A propos de la visite au Bundestag, dès le jeudi 22 septembre, et des polémiques suscitées par certaines personnalités politiques, le P. Lombardi a souligné le caractère « officiel » de l’invitation adressée à Benoît XVI par le président du Parlement lui-même, M. Norbert Lammert, un catholique, du parti de l’Union chrétienne démocrate (CDU) : « C’est le président du Bundestag qui a invité le Saint-Père à venir parler. Etant invité, le pape s’y rend et prononce un discours, naturellement pour les personnes qui désirent l’écouter et qui veulent recevoir ce discours avec respect ».
Certains députés ont annoncé qu’ils quitteraient la salle à cette occasion. L’archevêque de Berlin Mgr Rainer Maria Woelki, a pour sa part souligné que l’Allemagne est un pays démocratique où l’on respecte la liberté d’opinion. Il recommande, avant de critiquer, d’attendre les paroles du pape.
Le coordinateur du voyage et secrétaire général de la Conférence épiscopale, le P. Hans Langendörfer, a de son côté souhaité que la légitime liberté d’expression ne dégénère pas en violence.
A Berlin également, le pape présidera la messe à l’ « Olympiastadion » en présence de plusieurs dizaines de milliers de personnes.
Au pays de Luther, dans l’ex-Allemagne de l’Est
A Erfurt, capitale de la Thuringe (dans l’ex-Allemagne de l’Est), le samedi 24 septembre, Benoît XVI aura un rendez-vous œcuménique très important au couvent des Augustins où il rencontrera des représentants de l’Eglise évangélique et où il participera à une célébration œcuménique en présence de quelque 300 personnes : un psaume sera lu dans la traduction de la Bible de Luther.
Ce couvent est célèbre pour avoir accueilli Martin Luther du 17 juillet 1505 à 1508. Luther devint en effet moine augustin, après ses études à l’université d’Erfurt (1501-1505). Il y fit un noviciat rapide et fut ordonné prêtre en 1507. L’année suivante, il était envoyé compléter sa théologie à Wittenberg : il reviendra à son couvent régulièrement jusqu’en 1511.
Rappelons qu’en décembre 2010, le pape avait souhaité un rapprochement accru entre catholiques et luthériens, près de 500 ans – en 2017 – après le schisme : il a en effet reçu au Vatican, le 17 décembre, le président de la fédération luthérienne mondiale, le révérend Munib Younan.
« Dans ces années menant au 500eanniversaire des événements de 1517 », quand le moine allemand Martin Luther prit ses distance vis-à-vis du catholicisme, « catholiques et luthériens sont appelés à réfléchir de nouveau pour voir où notre chemin vers l’unité nous a conduit et à implorer les conseils et l’aide du Seigneur pour le futur », avait dit le pape.
Le 24 janvier dernier, le pape a également reçu au Vatican une délégation de l’Eglise évangélique luthérienne d’Allemagne, dans le cadre de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Il a souhaité que ces célébrations aient lieu dans un esprit œcuménique qui permette de souligner la foi commune dans le Dieu trinitaire. Il y voyait une occasion de réfléchir sur les raisons de la division et de poursuivre la purification des consciences, en se remémorant les 1500 ans de patrimoine ecclésial commun qui avaient précédé.
L’après-midi, le pape se rendra au sanctuaire marial d’Etzelsbach, marqué par les persécutions communistes contre les chrétiens, dans l’ancienne « République démocratique allemande ».
Rendez-vous avec les jeunes à Fribourg
A Fribourg-en-Brisgau, le pape doit présider une messe en plein air, dimanche 25 septembre. C’est une région allemande très catholique, a fait observer le P. Lombardi. Le pape y rencontrera l’ancien chancelier Helmut Kohl, un des principaux protagonistes de la réunification.
Le P. Lombardi a aussi insisté sur la signification de la rencontre prévue avec les catholiques engagés dans le Comité central des catholiques allemands : le ZDK (Zentralkomitee der Deutschen Katholiken), cheville ouvrière de l’apostolat des laïcs en Allemagne.
Le sommet de ces rencontres sera la veillée avec les jeunes de différents diocèses d’Allemagne.
Rappelons aussi que pour la question du coût du voyage – autour de 30 millions d’euros – Mgr Zollitsch, président de la conférence épiscopale, a affirmé qu’ils seraient à la charge de l’Eglise allemande. Les dépenses revenant à l’Etat ne concerneront que les mesures de sécurité, comme pour tout autre manifestation publique.
Mgr Zollitsch a également annoncé la création d’un « Fonds Benoît XVI pour l’Afrique orientale », une collecte pour les populations affamées de la Corne de l’Afrique.
Anita S. Bourdin

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