Archive pour la catégorie 'Pape Benoît – écrit'

EXTRAITS DE « JÉSUS DE NAZARETH. DE NAZARETH À JÉRUSALEM », DE BENOÎT XVI

12 février, 2014

http://www.zenit.org/fr/articles/extraits-de-jesus-de-nazareth-de-nazareth-a-jerusalem-de-benoit-xvi

EXTRAITS DE « JÉSUS DE NAZARETH. DE NAZARETH À JÉRUSALEM », DE BENOÎT XVI

3 mars 2011

ROME, Jeudi 3 mars 2011 (ZENIT.org) – Nous reprenons ci-dessous la traduction française (Editions du Rocher, Parole et Silence) d’une partie des extraits du livre de Benoît XVI « Jésus de Nazareth. De Nazareth à Jérusalem », parus dans L’Osservatore Romano en italien du 3 mars.
Après le premier volume « Jésus de Nazareth, Du baptême dans le Jourdain à la transfiguration », ce second tome propose « une réflexion personnelle » sur la mission, la passion et la résurrection du Christ. Il aborde des questions fondamentales comme le mal dans le monde, et la discrétion de Dieu. Le livre sera présenté au Vatican le 10 mars par le cardinal Marc Ouellet.

Le mystère du traître
La péricope du lavement des pieds nous place devant deux manières différentes par lesquelles l’homme réagit à ce don: Judas et Pierre. Tout de suite après avoir évoqué l’exemple, Jésus commence à parler du cas de Judas. Jean nous rapporte à cet égard que Jésus fut profondément troublé et déclara : « En vérité, en vérité, je vous le dis, l’un de vous me livrera » (Jn 13,21).
(…) Jean ne nous donne aucune interprétation psychologique de l’agir de Judas ; l’unique point de repère qu’il nous offre est l’allusion au fait que Judas, comme trésorier du groupe des disciples, aurait soustrait leur argent (cf. 12,6). Quant au contexte qui nous intéresse, l’évangéliste dit seulement, de manière laconique : « Après la bouchée, alors Satan entra en lui » (13,27).
Ce qui est arrivé à Judas, selon Jean, n’est plus psychologiquement explicable. il est tombé sous le pouvoir de quelqu’un d’autre : celui qui brise l’amitié avec Jésus, celui qui se débarrasse de son « joug aisé », n’arrive pas à la liberté, il ne devient pas libre, mais il devient au contraire l’esclave d’autres puissances – ou plutôt : le fait de trahir cette amitié découle alors de l’intervention d’un autre pouvoir auquel on s’est ouvert.
Et pourtant, la lumière qui, venant de Jésus, était tombée sur l’âme de Judas, ne s’était pas éteinte complètement. il y a un premier pas vers la conversion : « J’ai péché », dit-il à ses commanditaires. Il essaie de sauver Jésus et rend l’argent (cf. Mt 27,3s.). Tout ce qu’il avait reçu de Jésus de pur et de grand demeurait inscrit dans son âme – il ne pouvait pas l’oublier.
Sa deuxième tragédie – après la trahison – est qu’il ne réussit plus à croire à un pardon. Sa repentance devient désespoir. il ne voit plus désormais que lui-même et ses ténèbres, il ne voit plus la lumière de Jésus – cette lumière qui peut illuminer et même outrepasser les ténèbres. Il nous fait ainsi découvrir la forme erronée du repentir : un repentir qui n’arrive plus à espérer, mais qui ne voit désormais que sa propre obscurité, est destructeur et n’est donc pas un authentique repentir. la certitude de l’espérance est inhérente au juste repentir – une certitude qui naît de la foi dans la puissance supérieure de la lumière qui s’est faite chair en Jésus.
Jean conclut le passage sur Judas de manière dramatique avec ces mots : « Aussitôt la bouchée prise, il sortit ; il faisait nuit » (13,30). Judas sort – dans un sens plus profond. Il entre dans la nuit, il quitte la lumière pour aller vers l’obscurité ; le « pouvoir des ténèbres » l’a saisi (cf. Jn 3,19 ; lc 22,53).

La dernière Cène
Une chose est évidente dans toute la tradition : l’essentiel de cette Cène de congé n’a pas été la Pâque ancienne, mais la nouveauté que Jésus a réalisée dans ce contexte. Même si ce banquet de Jésus avec les Douze n’a pas un repas pascal selon les prescriptions rituelles du judaïsme, en rétrospective la connexion intérieure de l’ensemble avec la mort et la Résurrection de Jésus est apparue évidente : c’était la Pâque de Jésus. et, en ce sens, il a célébré la Pâque et il ne l’a pas célébrée : les rites anciens ne pouvaient pas être pratiqués ; quand vint leur moment, Jésus était déjà mort. Mais il s’était donné lui-même et ainsi il avait vraiment célébré la Pâque avec eux. De cette façon, l’ancien rite n’avait pas été nié, mais il avait seulement été porté ainsi à son sens plénier.
Le premier témoignage de cette vision unifiante du nouveau et de l’ancien, que réalise la nouvelle interprétation de la Cène de Jésus par rapport à la Pâque dans le contexte de sa mort et de sa Résurrection, se trouve chez Paul, dans 1 Corinthiens 5, 7 : « Purifiez-vous du vieux levain pour être une pâte nouvelle, puisque vous êtes des azymes. Car notre Pâque, le Christ, a été immolé ! » Comme en Marc 14, 1, le premier jour des Azymes et la Pâque se succèdent ici, mais le sens rituel d’alors est transformé dans une signification christologique et existentielle. Les « azymes » doivent maintenant être constitués par les chrétiens eux-mêmes, libérés du levain du péché. l’Agneau immolé, cependant, c’est le Christ. En cela Paul concorde parfaitement avec la description johannique des événements. Pour lui, la mort et la Résurrection du Christ sont devenues ainsi la Pâque qui perdure.
D’après cela, on peut comprendre comment la dernière Cène de Jésus, qui n’était pas seulement une annonce, mais qui comprenait aussi, dans les dons eucharistiques, une anticipation de la Croix et de la Résurrection, a bien vite été considérée comme Pâque – comme sa Pâque. et elle l’était réellement.

Jésus devant Pilate
Le troisième acte est le couronnement d’épines. Les soldats se moquent de Jésus avec cruauté. Ils savent qu’il se prétend roi. (…). Ils le revêtent, lui – l’homme frappé et blessé sur tout le corps – des signes caricaturaux de la majesté impériale : le manteau pourpre, la couronne d’épines tressée et le sceptre de roseau. Et ils lui rendent hommage : « Salut, roi des Juifs ! » ; leur hommage consiste en gifles par lesquelles ils manifestent, encore une fois, tout le mépris qu’ils ont pour lui (cf. Mt 27,28s. ; Mc 15,17s. ; Jn 19,2).
(…) Jésus est conduit devant Pilate sous cette apparence caricaturale, et Pilate le présente à la foule – à l’humanité : ecce homo – « voici l’homme ! » (Jn 19, 5).
(…) Ecce homo – cette expression acquiert spontanément une profondeur qui va bien au-delà de ce moment-là. en Jésus apparaît l’être humain en tant que tel. En lui est rendue visible la misère de tous ceux qui sont frappés et anéantis. Dans sa misère se reflète l’inhumanité du pouvoir humain, qui écrase le faible. en lui se reflète ce que nous appelons « péché » : ce que devient l’homme lorsqu’il se détourne de Dieu et prend en mains de manière autonome le gouvernement du monde.
Mais il y a un autre aspect qui est vrai également : la profonde dignité de Jésus ne peut lui être enlevée. Le Dieu caché reste présent en lui. L’homme frappé et humilié reste aussi image de Dieu. Depuis que Jésus s’est laissé frapper, toutes les personnes blessées et humiliées sont justement image du Dieu qui a voulu souffrir pour nous. Alors, au coeur de sa Passion, Jésus est une image d’espérance : Dieu est du côté de ceux qui souffrent.
Finalement Pilate s’assied sur le siège du juge. Il dit encore une fois : « Voici votre roi ! » (Jn 19,14.) Puis il prononce la sentence de mort.
Sans doute la grande vérité, dont avait parlé Jésus, lui est restée inaccessible ; mais la vérité concrète de ce cas, Pilate la connaissait bien. Il savait que Jésus n’était pas un délinquant politique et que la royauté qu’il revendiquait ne représentait aucun danger politique – il savait donc qu’il devait être acquitté.
(…) Mais, en fin de compte, c’est l’interprétation pragmatique du droit qui l’emporta chez lui : il y a plus important que la vérité du cas présent, c’est la force pacifiante du droit, voilà ce que fut peut-être sa pensée et ainsi se justifiait-il à ses yeux. Absoudre l’innocent pouvait non seulement être source d’ennuis pour lui personnellement – cette crainte fut certainement un motif déterminant dans son comportement -, mais cela risquait encore de provoquer d’autres désagréments et des désordres qui, particulièrement au moment des fêtes de la Pâque, devaient être évités.
La paix fut en ce cas plus importante pour lui que la justice. Non seulement la grande et inaccessible vérité devait passer au second plan, mais aussi celle du cas concret : il crut ainsi accomplir le vrai sens du droit – sa fonction pacificatrice. Ainsi, peut-être, apaisa-t-il sa conscience. Sur le moment, tout sembla bien aller. Jérusalem resta calme. Toutefois le fait que la paix, en dernière analyse, ne peut être établie contre la vérité, devait se manifester plus tard.

Copyright 2011 : Libreria Editrice del Vaticano

Le « porche » de la trilogie de Joseph Ratzinger-Benoît XVI

21 novembre, 2012

http://www.zenit.org/article-32608?l=french

JOURNÉE MONDIALE DES DROITS DE L’ENFANT : « L’ENFANCE DE JÉSUS »

Le « porche » de la trilogie de  Joseph Ratzinger-Benoît XVI

Anita Bourdin                                                                             
ROME, mardi 20 novembre 2012 (Zenit.org) – Coïncidence ? Le livre de Benoît XVI sur l’enfance du Christ est présenté à la presse le jour où l’on célèbre la Journée mondiale des droits de l’enfant. Et alors que l’Eglise va entrer dans l’Avent, temps de préparation à Noël. Il s’intitule : « L’enfance de Jésus ». Il constitue comme le « porche» des deux volumes précédents. Et le pape y livre sa propre « méthode » de lecture de la bible. Elle ne manque pas d’actualité.
C’est, certes, le troisième volume de la trilogie de Joseph Ratzinger-Benoît XVI « Jésus de Nazareth », mais le pape avertit dès l’avant-propos : c’est ce volume qui constitue le « porche » des deux autres tomes consacrés à la vie publique du Christ – « Du baptême dans le Jourdain à la Transfiguration » –, puis à la passion et à la résurrection du Christ – « De l’entrée à Jérusalem à la Résurrection»-.
« Il ne s’agit pas d’un troisième volume, écrit le pape, mais d’une porte d’entrée qui introduit les deux volumes précédents consacrés à la figure et au message de Jésus de Nazareth ».
Ce livre de quelque 180 pages – Avant-Propos, 4 chapitres et un Epilogue – sort  en librairie demain, mercredi 21 novembre, en 9 langues et dans une cinquantaine de pays* : le premier tirage est d’un million d’exemplaires. D’autres traductions vont suivre, avec une distribution dans 72 pays.
Il a été présenté ce matin au Vatican par le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la culture, par Mme Maria Clara Bingemer, professeur à l’Université catholique de Rio de Janeiro, le P. Giuseppe Costa, SDB, directeur de la Librairie Editrice vaticane, et le P. Federico Lombardi, SJ, directeur de la Salle de presse du Saint-Siège.
Bref discours de la méthode
Mais avant même de lire ces pages, le pape offre un petit discours de la méthode. En quatre points. Tout d’abord, il a « cherché à interpréter » ce que les évangélistes de l’enfance, Matthieu et Luc, ont raconté, « en dialoguant avec des exégètes d’hier et d’aujourd’hui ».
Ensuite, il souligne les « deux étapes » de son interprétation. Il s’est demandé « ce qu’ont voulu dire, à leur époque, les auteurs de ces textes » : « c’est la composante historique de l’exégèse ». Le pape assume ainsi les conquêtes de l’exégèse moderne.
Il affirme en même temps la nécessité de la prise de risque de l’exégète dans une seconde étape : « Il ne faut pas laisser le texte dans le passé, en l’archivant parmi les événements arrivés il y a longtemps. La seconde question doit être: Ce qui est dit est-il vrai? Cela me regarde-t-il? Et si cela me regarde, de quelle façon? »
Et de préciser : « Devant un texte tel qu’un texte biblique, dont l’ultime et plus profond auteur, selon notre foi, est Dieu lui-même, la question du rapport entre le passé et le présent fait immanquablement partie de l’interprétation elle-même ».
Le pape va devance les objections en affirmant : « Cela ne diminue pas, mais accroît le sérieux de la recherche historique ». Voilà un choix exégétique qui a son poids.
L’auteur n’en reconnaît pas moins  les limites de l’investigation lorsqu’il s’agit de la bible : « Toute interprétation reste en deçà de la grandeur du texte biblique ».
Il affirme également son objectif : « J’espère que ce petit livre, en dépit de ses limites, pourra aider de nombreuses personnes dans leur chemin vers et avec Jésus ».
L’origine de Jésus et du baptisé
Le premier chapitre pose la question de l’origine de Jésus – et ce faisant de tout homme -: « D’où es-tu ? » (Jn 19, 9). Il examine les généalogies de Jésus chez Matthieu et Luc, dont saint Jean donne la clef.
« Jean, affirme le pape, a résumé la signification la plus profonde des généalogies et nous a enseigné à les comprendre également comme explication de notre origine même, de notre vraie « généalogie ». Comme les généalogies s’interrompent à la fin, parce que Jésus n’a pas été engendré par Joseph mais très réellement est né de la Vierge Marie, par l’opération du Saint-Esprit, de la même façon cela vaut à présent aussi pour nous : notre vraie « généalogie » est la foi en Jésus, qui nous donne une nouvelle origine, nous fait naître « de  Dieu ». » (p. 25).
Les trois « annonces » à Zacharie, Marie et Joseph
Après les deux généalogies, de la mère et du père adoptif, le deuxième chapitre rassemble les trois « annonces » à Zacharie, pour la naissance de Jean-Baptiste, puis, pour la naissance de Jésus, à Marie, et à Joseph, choisi pour accueillir Marie et l’Enfant dans sa maison.
Dans le récit de l’Annonciation à Marie par Luc, le pape insiste sur la liberté humaine face à Dieu qui cherche comment sauver l’humanité. « Qu’il m’advienne selon ta parole » : « C’est le moment de l’obéissance libre, humble et en même temps magnanime, où se réalise la décision la plus haute de la liberté humaine » (p. 58).
Le pape évoque de façon originale la solitude de Marie, comme pour renvoyer, mutatis mutandis, à l’expérience de tout baptisé, en filigrane, à la sienne : « Et l’ange la quitta » (Luc 1, 38) : « La grande heure de la rencontre avec le messager de Dieu, dans laquelle toute la vie change, passe, et Marie reste seule avec la tâche qui, en vérité, dépasse toute capacité humaine (…). Elle doit continuer le chemin qui passera à travers de nombreuses obscurités – à commencer par le désarroi de Joseph face à sa grossesse, jusqu’au moment où Jésus sera déclaré « hors de sens » (Mc 3, 21 ; cf. Jn 10, 20), et même, jusqu’à la nuit de la croix. (…) L’ange s’en va, la mission demeure et avec elle mûrit la proximité intérieure avec Dieu, la vision intime et la perception de sa proximité » (p. 59).
Ce deuxième chapitre s’achève sur un développement intitulé : « L’enfantement virginal : mythe ou vérité historique ? », particulièrement significatif en cette Année de la foi. Après un tour d’horizon de différentes exégèses, le pape souligne la rationalité de l’action de Dieu dans la naissance du Christ ou dans la résurrection : « Naturellement, on ne peut attribuer à Dieu des choses insensées, déraisonnables ou en opposition avec sa création. Cependant, il ne s’agit pas ici de quelque chose de déraisonnable ni de contradictoire, mais de quelque chose de positif – du pouvoir créateur de Dieu qui embrasse tout l’être. (…) L’enfantement virginal et la résurrection réelle du tombeau sont des pierres de touche pour la foi. Si Dieu n’a pas aussi pouvoir sur la matière il n’est pas Dieu. Mais il possède ce pouvoir et par la conception et la résurrection de Jésus-Christ, il a inauguré une nouvelle création. Ainsi, en tant que Créateur il est aussi notre Rédempteur. Pour cette raison, la conception et la naissance de Jésus de la Vierge Marie sont un élément fondamental de notre foi et un signal lumineux d’espérance ». A méditer aussi à l’approche de la fête de l’Immaculée, le 8 décembre.
Le cadre historique et la géographie
Le troisième chapitre évoque la naissance de Jésus à Bethléem. C’est Noël. Il faudra le découvrir pendant l’Avent. Le pape y déploie une exégèse savoureuse dans l’alliance de l’Ancien et du Nouveau Testament, comme le recommande Vatican II dans « Dei Verbum ». Il fait par exemple observer que « Luc conclut son récit de la  naissance de Jésus, dont faisait partie aussi l’accomplissement de la Loi (cf. Lc 2, 39), par l’annonce de la Sainte Famille à Nazareth : « L’enfant grandissait, se fortifiait et se remplissait de sagesse. Et la grâce de Dieu était sur lui (2, 40) » (p. 124). Le salut de toute l’humanité est en marche, dans la pauvreté et la simplicité d’une famille.
Le quatrième chapitre s’intitule : « Les Mages d’Orient et la fuite en Egypte ». A Cologne, en 2005, pour la Journée mondiale de la jeunesse, le pape avait longuement évoqué les Mages vénérés en la cathédrale de la ville : il les aime tout spécialement.
Le pape commence par planter le cadre historique et la géographie du récit.  Puis il se demande : « Qui étaient les Mages ? », « Quel genre d’hommes ? ». Au terme de son enquête, il conclut, pour ainsi dire dans l’esprit de son « Parvis des gentils » : « Les savants de l’Orient sont un commencement, ils représentent la mise en route de l’humanité vers le Christ, ils inaugurent une procession qui parcourt l’histoire tout entière. Ils ne représentent pas seulement les personnes qui ont trouvé le chemin jusqu’au Christ. Ils représentent l’attente intérieure de l’esprit humain, le mouvement des religions et de la raison humaine à la rencontre du Christ » (p. 137).
L’étoile qui veille sur les crèches ou les sapins à Noël a droit à un développement : « Quel type d’étoile était-ce ? A-t-elle vraiment existé ? » Puis vient le passage des Mages à Jérusalem, l’Adoration à Bethléem, la fuite en Egypte et le retour en Israël.
A chaque pas, Benoît XVI lime son analyse et son interprétation à l’interprétation de la grande tradition de l’Eglise, avec les Pères notamment, et aux recherches des exégètes. Puis il risque sa parole sur le texte. Il prend position, en rétablissant parfois les perspectives, comme lorsqu’il affirme : « Les deux chapitres du récit de l’enfance chez Matthieu ne sont pas une méditation exprimée sous forme d’histoires ; au contraire, Matthieu nous raconte la véritable histoire, qui a été méditée et interprétée  théologiquement, et ainsi il nous aide à comprendre plus profondément le mystère de Jésus » (p. 169).
Vrai Dieu et vrai homme
« L’Epilogue » est constitué d’un commentaire de l’épisode de « Jésus âgé de douze ans dans le Temple » de Jérusalem et du fait que Jésus « grandit » en taille et en sagesse.
D’une part, « comme Fils, il est à tu et à toi avec le Père. Il vit en sa présence. Il le voit (…). Il est auprès du Père, il voit les choses et les hommes dans Sa lumière ». 
D’autre part, « en tant qu’homme, il ne vit pas dans une omniscience abstraite, mais il est enraciné dans une histoire concrète, dans un lieu et dans une époque, dans les différentes phases de la vie humaine, et c’est de tout cela qu’il reçoit la forme concrète de son savoir. Il apparaît donc clairement qu’il a pensé et appris d’une manière humaine ».
« Il devient effectivement évident, qu’il est vrai homme et vrai Dieu, comme l’exprime la foi de l’Eglise, conclut le pape. Nous ne pouvons définir, en dernière analyse, le profond entrelacement entre l’une et l’autre dimension. Celui-ci demeure un mystère et, toutefois, il apparaît de manière vraiment concrète dans le bref récit sur l’enfant de douze ans – récit qui ouvre ainsi, en même temps, la porte vers l’intégralité de sa figure qui nous est racontée ensuite dans les Evangiles » (p. 181).
Dieu s’est fait petit enfant et il a grandi comme un enfant des hommes, a vécu parmi eux. Ces pages déshabituent des lectures rapides voire blasées de textes parfois trop connus. Elles redécouvrent la fraîcheur des récits de l’Enfance du Christ sous des facettes nouvelles, et Benoît XVI, qui ose son interprétation croyante et fondée en raison, s’impliquant en première personne, en disant « je », met en contact direct avec la personne du Christ vivant, grâce à ces récits, si connus, et pourtant ignorés, et toujours inépuisables. Où l’enfant a ses droits.
*En France, chez Flammarion.

La fille de Sion. Considérations sur la foi mariale de l’Église: Joseph Ratzinger

14 août, 2012

http://www.esprit-et-vie.com/article.php3?id_article=232

Joseph Ratzinger

La fille de Sion. Considérations sur la foi mariale de l’Église

P. Francis de Chaignon

Traduction, présentation et annotations par Sophie BINGELLI, Paris, Éd. Parole et Silence, coll. « Cahiers de l’École Cathédrale », n° 55, 2002.

Esprit & Vie n°72 / décembre 2002 – 2e quinzaine, p. 13-14.

Ce récent Cahier de l’École Cathédrale est la traduction de trois conférences de théologie mariale données en 1975 par Joseph RATZINGER, peu avant sa nomination comme archevêque de Munich (le texte allemand en avait été publié deux ans plus tard puis réédité en 1990).
L’auteur évalue, tout d’abord, la situation de la mariologie dans la théologie catholique et propose comme piste de réflexion de rechercher « dans l’Ancien Testament les éléments par lesquels le Nouveau Testament interprète théologiquement la figure de Marie ». Il s’agit de trois motifs vétérotestamentaires qui dessinent une théologie de la femme : la figure d’Ève, les figures de mères (fécondes ou stériles), les figures de femmes salvatrices (telles Déborah, Judith, Esther). À travers ces motifs s’élabore, en fait, une théologie du peuple que ces femmes incarnent et donc une théologie de l’Alliance ; nous accédons de la sorte à la révélation de Dieu lui-même. Dans les textes plus tardifs apparaît la figure de la sagesse, présentée comme créature de Dieu et pure réponse à son action. Or, cette figure de la sagesse demande à être réinterprétée, non seulement, de façon christologique mais également de façon mariale. La sagesse trouve son accomplissement à la fois dans le Christ, Verbe incarné, et dans l’accueil fécond de cette Parole en Marie.
Il est ainsi clairement montré que « la figure de la femme est indispensable à la cohérence de la foi biblique » (p. 43). Or, un tel principe trouve sa réalisation personnelle en Marie. Sans elle, sans le caractère marial de la foi, la création est niée, la grâce ne respecte pas la liberté humaine, le Dieu de l’Alliance est méconnu.
Le deuxième chapitre s’intéresse alors à la foi mariale de l’Église. Certes, les dogmes mariaux ne peuvent être déduits de textes isolés du Nouveau Testament. Mais ce que le premier chapitre a établi nous permet de comprendre que ces dogmes expriment l’unité de l’Ancien et du Nouveau Testament, grâce au recours à l’exégèse typologique. Sans cela, nous l’avons vu, on dissocie l’unité de l’Écriture et l’on compromet la vérité de la création et de la grâce. Nous pouvons donc voir dans la mariologie un critère d’équilibre de la théologie.
L’auteur vérifie cela sur chacun des trois dogmes mariaux fondamentaux : la maternité virginale, la conception immaculée, l’Assomption. Concernant le premier dogme, il convient de rappeler que, d’une part, l’incarnation de Dieu en Jésus-Christ a nécessairement une signification mariologique et que, d’autre part, la maternité divine de Marie a nécessairement une signification christologique (on sera attentif ici à la note 26, p. 94, qui constitue une retractatio de la position tenue par l’auteur dans Foi chrétienne hier et aujourd’hui, paru en 1969, et qui ne soulignait pas avec assez de précision la correspondance profonde entre la conception virginale et l’affirmation que la personne du Christ est celle du Fils de Dieu, de sorte que Jésus n’a que Dieu pour Père). Cette réflexion sur une vérité très contestée saisit le lien entre le biologique et le spirituel, par-delà nos tentations de les dissocier. D’ailleurs, note l’auteur, le nœud du refus de la conception virginale n’est pas, en dernier ressort, celui de l’historicité des récits évangéliques mais un présupposé implicite, une vision du monde et de Dieu qui interdit à ce dernier, au nom de notre raison scientifique, d’intervenir dans le monde. Mais c’est là régresser à une philosophie païenne…
La conception immaculée, quant à elle, éclaire la compréhension catholique de la grâce. Il n’y a pas opposition entre la Parole de Dieu et l’homme, ni irruption purement verticale, il y a un dialogue, une réponse et une correspondance. À la question du fondement scripturaire d’une telle affirmation dogmatique, il faut à nouveau répondre par le recours à la typologie. Or, ce type n’est pas abstrait mais se réalise dans une personne, celle de Marie. On lira avec soin les pages pénétrantes (spécialement p. 75-77) qui relient la question de l’immaculée conception à celle du péché originel, lui aussi intelligible uniquement grâce au recours à la typologie, à la suite de saint Paul. Dans un cas comme dans l’autre, on n’accède au fait que par la typologie qui unit Ancien et Nouveau Testament.
La dogmatisation de l’Assomption, enfin, est à comprendre comme l’acte le plus haut de vénération de Marie reflétant à nouveau l’unité des Testaments et la réalisation personnelle en Marie de ce que l’Église attend pour elle-même : la victoire définitive sur la mort, la participation de tous et de chacun non seulement à la Résurrection mais aussi à l’Ascension du Christ.
On l’aura compris, ces pages lumineuses sont d’une réelle pénétration théologique. Si elles demandent au lecteur d’être un tant soit peu familiarisé avec les grands thèmes de la théologie mariale, elles ne sont pas excessivement ardues. On regrettera seulement que la traduction soit souvent trop proche du texte allemand, d’où des obscurités qu’une réécriture aurait dû dissiper. Notons l’originalité de l’introduction qui met en perspective les propos de Joseph RATZINGER et l’anthropologie d’Edith STEIN. La troisième annexe, qui est le texte de la « Déclaration christologique commune entre l’Église catholique et l’Église assyrienne de l’Orient », datée du 11 novembre 1994, pourra surprendre. Elle n’est accompagnée d’aucun commentaire.

CATÉCHÈSE DE BENOÎT XVI : AUDIENCE DU MERCREDI 20 JUIN 2012

21 juin, 2012

http://www.zenit.org/article-31195?l=french

CATÉCHÈSE DE BENOÎT XVI : AUDIENCE DU MERCREDI 20 JUIN 2012

Le « mystère inconnu » de Dieu est révélé

ROME, mercredi 20 juin 2012 (ZENIT.org) – « Le ‘mystère inconnu’ de Dieu est révélé : Dieu nous aime, il nous aime depuis le début, depuis l’éternité » et « il n’exclut personne », déclare Benoît XVI. Dans la prière, on apprend à être avec Dieu et à voir les signes de son dessein d’amour, explique le pape en substance.
Benoît XVI a en effet poursuivi sa catéchèse hebdomadaire sur la prière dans les Lettres de saint Paul, au cours de l’audience qui a rassemblé quelque 8 000 visiteurs, ce mercredi 20 juin, en la salle Paul VI du Vatican.
Après la catéchèse, le pape a lancé un appel à ce que cessent les violences dirigées en particulier contre les chrétiens au Nigeria.


Catéchèse de Benoît XVI en italien :


Chers frères et sœurs,
Notre prière est très souvent une demande d’aide dans les nécessités. Et c’est normal pour l’homme, parce que nous avons besoin d’aide, nous avons besoin des autres, et nous avons besoin de Dieu. Il est donc normal pour nous de demander quelque chose à Dieu, de chercher de l’aide auprès de lui ; nous devons garder présent à l’esprit que la prière que le Seigneur nous a enseignée, le « Notre Père », est une prière de demande, et par cette elle le Seigneur nous enseigne quelles sont les priorités de notre prière ; il nettoie et purifie nos désirs et ainsi nettoie et purifie notre cœur. S’il est donc normal que, dans notre prière, nous demandions quelque chose, il ne devrait pas en être exclusivement ainsi. Il y a aussi des motifs de remerciements et, si nous sommes un peu attentifs, nous voyons que nous recevons beaucoup de bonnes choses de Dieu ; il est si bon avec nous qu’il convient, qu’il est nécessaire, de dire merci. Et cela doit aussi être une prière de louange : si notre cœur est ouvert, nous voyons aussi, malgré tous les problèmes, la beauté de la création, la bonté qui se manifeste dans sa création. Nous devons donc non seulement demander, mais aussi louer et remercier : c’est seulement comme cela que notre prière est complète.
Dans ses Lettres, non seulement saint Paul parle de la prière, mais il rapporte des prières de demande bien sûr, mais aussi de louange et de bénédiction pour tout ce que Dieu a fait et continue de réaliser dans l’histoire de l’humanité.
Je voudrais aujourd’hui m’arrêter au premier chapitre de la Lettre aux Ephésiens, qui commence justement par une prière, qui est un hymne de bénédiction, l’expression de remerciements, de la joie. Saint Paul bénit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, parce qu’en lui il nous a fait « connaître le mystère de sa volonté » (Ep 1, 9). Vraiment, nous avons un motif de rendre grâce si Dieu nous fait connaître ce qui est caché : sa volonté avec nous, pour nous : « le mystère de sa volonté ».
« Mysterion », « Mystère » : c’est un mot qui revient souvent dans l’Ecriture sainte et dans la liturgie. Je ne veux pas maintenant faire de la philologie mais, dans le langage commun, cela indique ce qui ne peut pas être connu, une réalité que nous ne pouvons pas saisir par notre intelligence. L’hymne qui ouvre la Lettre aux Ephésiens nous conduit par la main vers une signification plus profonde de ce terme et de la réalité qu’il recouvre. Pour les croyants, « mystère » n’est pas tant l’inconnu que la volonté miséricordieuse de Dieu, son dessein d’amour qui, en Jésus-Christ, s’est révélé pleinement et qui nous offre la possibilité de « comprendre, avec tous les saints, ce qu’est la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur » et de connaître « l’amour du Christ » (Ep 3, 18-19). Le « mystère inconnu » de Dieu est révélé : Dieu nous aime, il nous aime depuis le début, depuis l’éternité.
Arrêtons-nous donc un peu à cette prière solennelle et profonde. « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ » (Ep 1, 3). Saint Paul utilise le verbe « euloghein », qui traduit généralement le terme hébreu « barak » : il signifie louer, glorifier, remercier Dieu le Père, source des biens du salut, celui qui « nous a bénis par toutes sortes de bénédictions spirituelles, aux cieux, dans le Christ ».
L’apôtre remercie et loue, mais il réfléchit aussi sur les motifs qui poussent l’homme à cette louange, à ce remerciement, et il présente les éléments fondamentaux du plan divin et ses étapes. Avant tout, nous devons bénir Dieu le Père parce que, écrit saint Paul, il « nous a élus en lui, dès avant la fondation du monde, pour être saints et immaculés en sa présence, dans l’amour » (v 4). Ce qui nous rend saints et immaculés, c’est la charité. Dieu nous a appelés à l’existence, à la sainteté. Et ce choix précède même la création du monde. Depuis toujours, nous faisons partie de son plan, nous sommes dans sa pensée. Avec le prophète Jérémie, nous pouvons affirmer nous aussi qu’avant d’être formés dans le sein de notre mère, il nous connaissait (cf. Jr 1, 5) ; et, nous connaissant, il nous a aimés. La vocation à la sainteté, c’est-à-dire à la communion avec Dieu, appartient au dessein éternel de ce Dieu, un dessein qui s’étend dans l’histoire et qui comprend tous les hommes et toutes les femmes du monde, parce que c’est un appel universel. Dieu n’exclut personne, son projet n’est qu’amour. Saint Jean Chrysostome affirme : « Il nous a fait saints, mais il faut rester saints. Saint est celui qui a part à la foi » (Homélie sur la Lettre aux Ephésiens, 1, 1-4).
Et saint Paul continue : Dieu nous a prédestinés, il nous a élus pour être « fils adoptifs par Jésus-Christ », pour être incorporés dans son Fils unique. L’apôtre souligne la gratuité de ce merveilleux dessein de Dieu sur l’humanité. Dieu nous choisit, non pas parce que nous sommes bons, mais parce que Lui est bon. Dans l’antiquité, on disait de la bonté : bonum est diffusivum sui ; le bien se communique, cela fait partie de l’essence du bien de se communiquer, de se diffuser. Et parce que Dieu est bonté, il est communication de bonté, il veut communiquer ; il crée parce qu’il veut nous communiquer sa bonté et nous rendre bons et saints.
Au centre de la prière de bénédiction, l’apôtre illustre la manière dont se réalise le plan du salut de notre Père dans le Christ, dans son Fils bien-aimé. Il écrit : « En lui nous trouvons la rédemption, par son sang, la rémission des fautes, selon la richesse de sa grâce » (Ep 1, 7). Le sacrifice de la croix du Christ est l’événement unique et inégalable par lequel le Père a montré de façon lumineuse son amour pour nous, non seulement par des paroles, mais de manière concrète. Dieu est si concret et son amour est si concret qu’il entre dans l’histoire, il se fait homme pour sentir ce que c’est que de vivre dans ce monde créé, et il accepte de prendre le chemin de la souffrance de la passion et de subir la mort. L’amour de Dieu est si concret qu’il ne participe pas seulement à notre être mais à notre souffrance et à notre mort. Le sacrifice de la croix fait que nous devenons « propriété de Dieu », parce que le sang du Christ nous a rachetés de la faute, nous lave du mal, nous arrache à l’esclavage du péché et de la mort.
Saint Paul invite à considérer la profondeur de l’amour de Dieu qui transforme l’histoire, qui a transformé sa propre vie, faisant du persécuteur des chrétiens un apôtre infatigable de l’Evangile. Laissons résonner encore une fois les paroles rassurantes de la Lettre aux Romains : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?Lui qui n’a pas épargné son propre Fils mais l’a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute faveur ?… Oui, j’en ai l’assurance, ni mort ni vie, ni anges ni principautés, ni présent ni avenir, ni puissances,ni hauteur ni profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté dans le Christ Jésus notre Seigneur » (Rm 8, 31-32.38-39). Cette assurance – Dieu est pour nous, et aucune créature ne peut nous séparer de lui, parce que son amour est plus fort – nous devons l’inscrire dans notre être, dans notre conscience de chrétiens.
Enfin, la bénédiction divine se termine par l’allusion à l’Esprit-Saint qui a été répandu dans nos cœurs ; le Paraclet que nous avons reçu comme le sceau de la promesse, lui « qui constitue les arrhes de notre héritage, et prépare la rédemption du Peuple que Dieu s’est acquis, à la louange de sa gloire » (Ep 1, 14). La rédemption n’est pas encore achevée, nous le sentons bien, mais elle aura son plein achèvement quand ceux que Dieu s’est acquis seront entièrement sauvés. Nous sommes encore sur le chemin de la rédemption, dont la réalité essentielle nous est donnée par la mort et la résurrection de Jésus. Nous sommes en chemin vers la rédemption définitive, vers la pleine libération des enfants de Dieu. Et l’Esprit-Saint est la certitude que Dieu portera à son achèvement son dessein de salut, quand il ramènera « toutes choses sous un seul Chef, le Christ, les êtres célestes comme les terrestres » (Ep 1, 10). Saint Jean Chrysostome fait ce commentaire : « Dieu nous a élus par la foi et il a imprimé en nous le sceau de l’héritage de la gloire à venir » (Homélie sur la Lettre aux Ephésiens 1, 11-14). Nous devons accepter que le chemin de la rédemption soit aussi notre chemin, parce que Dieu veut des créatures libres, qui disent « oui » librement ; mais c’est d’abord et surtout son chemin. Nous sommes dans ses mains et maintenant il appartient à notre liberté de marcher sur la route qu’il nous a ouverte. Nous marchons sur cette route de la rédemption, avec le Christ, et nous sentons que la rédemption se réalise.
La vision que saint Paul nous présente dans cette grande prière de bénédiction nous a amenés à contempler l’action des trois personnes de la Sainte Trinité : le Père, qui nous a choisis avant la création du monde, qui a pensé à nous et nous a créés ; le Fils qui nous a rachetés par son sang et le Saint-Esprit qui est le gage de notre rédemption et de notre gloire future. Dans une prière constante, dans un rapport quotidien avec Dieu, nous apprenons nous aussi, comme saint Paul, à entrevoir toujours plus clairement les signes de ce dessein et de cette action : dans la beauté du créateur, qui apparaît dans ses créatures (cf. Ep 3, 9), comme le chante saint François d’Assise : « Loué sois-tu, mon Seigneur, avec toutes tes créatures » (FF 263).
Il est important d’être attentifs, en particulier maintenant, et pendant la période des vacances, à la beauté de la création et de voir transparaître dans cette beauté le visage de Dieu. Dans leur vie, les saints montrent de manière lumineuse ce que peut faire la puissance de Dieu dans la faiblesse de l’homme. Et il peut aussi le faire pour nous. Dans toute l’histoire du salut, où Dieu s’est fait proche de nous et attend patiemment notre heure, il comprend nos infidélités, il encourage nos efforts et nous guide.
Dans la prière, nous apprenons à voir les signes de ce dessein miséricordieux dans le cheminement de l’Eglise. Nous grandissons ainsi dans l’amour de Dieu, ouvrant la porte afin que la Sainte Trinité vienne habiter en nous, éclaire, réchauffe et guide notre existence. « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, et mon Père l’aimera et nous viendrons vers lui et nous ferons chez lui notre demeure» (Jn 14, 23), dit Jésus, en promettant aux disciples le don de l’Esprit-Saint qui leur enseignera toute chose. Saint Irénée a dit une fois que, dans l’Incarnation, l’Esprit-Saint s’était habitué à être dans l’homme. Dans la prière, nous devons nous habituer à être avec Dieu. C’est très important, que nous apprenions à être avec Dieu car ainsi nous voyons combien il est beau d’être avec lui, et c’est cela la rédemption.
Chers amis, quand la prière nourrit notre vie spirituelle, nous devenons capables de conserver ce que saint Paul appelle « le mystère de la foi » avec une conscience pure (cf. Tm 3, 9). La prière, qui est une « habitude » d’être avec Dieu, engendre des hommes et des femmes animés non pas par l’égoïsme, le désir de posséder, la soif du pouvoir, mais par la gratuité, le désir d’aimer, la soif de servir, c’est-à-dire animés par Dieu ; et c’est seulement ainsi que l’on peut apporter la lumière dans l’obscurité de ce monde.
Je voudrais conclure cette catéchèse par l’épilogue de la Lettre aux Romains. Avec saint Paul, nous aussi nous rendons gloire parce qu’en Jésus-Christ il nous a donné tout ce qu’il est et il nous a donné le Consolateur, l’Esprit de vérité. Paul écrit, à la fin de la Lettre aux Romains « A Celui qui a le pouvoir de vous affermir conformément à l’Evangile que j’annonce en prêchant Jésus Christ, révélation d’un mystère enveloppé de silence aux siècles éternels,mais aujourd’hui manifesté, et par des Ecritures qui le prédisent selon l’ordre du Dieu éternel porté à la connaissance de toutes les nations pour les amener à l’obéissance de la foi ;à Dieu qui seul est sage, par Jésus Christ, à lui soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen » (16, 25-27). Merci.
Synthèse en français de la catéchèse :
Chers frères et sœurs,
Notre prière devrait être surtout louange, remerciement, action de grâce à Dieu qui est Père, et nous montre chaque jour son amour. En écrivant aux Éphésiens, saint Paul bénit Dieu de nous avoir fait connaître en Jésus-Christ le mystère de sa volonté (cf. 1, 9). Pour les croyants, ce mystère n’est pas l’inconnu, mais la volonté miséricordieuse de Dieu, son dessein d’amour qui permet de comprendre avec tous les saints, … et de connaître l’amour du Christ (cf. 3, 18). Les motifs de la bénédiction sont le choix gratuit de Dieu qui nous a appelés à l’existence, à la sainteté dans la vie chrétienne, et à le servir dans l’Église. Nous sommes depuis toujours dans le dessein de Dieu, qui n’exclut personne. Il nous a créés par amour. Cet amour nous rend bons, nous sanctifie et nous sauve. Le plan du Salut passe par la souffrance de la passion et le sacrifice du Christ sur la croix. Par lui nous sommes rachetés et devenons ‘propriété de Dieu’. Saint Paul nous entraîne à découvrir la profondeur de l’amour de Dieu qui transforme l’histoire, et qui a fait de lui, l’ancien persécuteur des chrétiens, un apôtre de l’Évangile. L’Esprit Saint nous a été donné pour que la Rédemption réalisée par le Christ se poursuive jusqu’à son plein accomplissement. Comme membres du Corps du Christ, nous marchons vers la pleine liberté des fils de Dieu, et le jour promis où Dieu sera tout en tous. Rendons-Lui grâce car son amour nous appelle tous à la communion avec Lui !

Salutations en français :
Je salue les pèlerins francophones, en particulier le groupe de l’École de la Croix de Paris. Que la prière nous aide à contempler le grand mystère d’amour de Dieu à l’œuvre dans l’histoire de l’humanité et dans notre vie personnelle. Bon pèlerinage à tous!

Appel de Benoît XVI pour la paix au Nigeria:
Je suis avec une grande préoccupation les nouvelles qui arrivent du Nigeria, où les attentats terroristes dirigés surtout contre les fidèles chrétiens continuent. Alors que j’élève ma prière pour les victimes et pour toutes les personnes qui souffrent, j’adresse un appel aux responsables des violences, afin que cesse immédiatement l’effusion de sang de tant d’innocents. Je souhaite, en outre, la pleine collaboration de tous les acteurs sociaux du Nigeria, pour qu’on renonce à la voix de la vengeance et que tous les citoyens coopèrent à l’édification d’une société pacifique et réconciliée, dans laquelle soit réellement protégé le droit de professer librement sa foi.

Traduction de Zenit, par Hélène Ginabat

Pape Benoît: catéchèse 17 décembre : Noël

18 décembre, 2008

du site:

http://www.zenit.org/article-19654?l=french

Audience générale du 17 décembre : Noël

Texte intégral

ROME, Jeudi 11 décembre 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse prononcée ce mercredi par le pape Benoît XVI au cours de l’audience générale, dans la salle Paul VI du Vatican.

Chers frères et sœurs,

C’est précisément aujourd’hui que commencent les jours de l’Avent qui nous préparent immédiatement au Noël du Seigneur : nous sommes dans la Neuvaine de Noël, qui dans de nombreuses communautés chrétiennes est célébrée avec des liturgies riches de textes bibliques, tous orientés pour nourrir l’attente de la naissance du Sauveur. En effet, l’Eglise entière concentre son regard de foi vers cette fête désormais proche en se prédisposant, comme chaque année, à s’unir au cantique joyeux des anges, qui au cœur de la nuit annonceront aux pasteurs l’événement extraordinaire de la naissance du Rédempteur, en les invitant à se rendre dans la grotte de Bethléem. C’est là que se trouve l’Emmanuel, le Créateur qui s’est fait créature, enveloppé de langes et couché dans une pauvre mangeoire (cf. Lc 2, 13-14).

En raison de l’atmosphère qui le caractérise, Noël est une fête universelle. En effet, même ceux qui ne se professent pas croyants peuvent percevoir dans cet événement chrétien annuel quelque chose d’extraordinaire et de transcendant, quelque chose d’intime qui parle au cœur. C’est la fête qui chante le don de la vie. La naissance d’un enfant devrait toujours être un événement qui apporte de la joie ; prendre un nouveau-né dans ses bras suscite normalement des sentiments d’attention et de sollicitude, d’émotion et de tendresse. Noël est la rencontre avec un nouveau-né qui pleure dans une pauvre grotte. En le contemplant dans la crèche, comment ne pas penser aux nombreux enfants qui aujourd’hui encore viennent au monde dans une grande pauvreté, dans de nombreuses régions du monde ? Comment ne pas penser aux nouveau-nés qui ne sont pas accueillis mais refusés, à ceux qui ne réussissent pas à survivre en raison du manque de soins et d’attention ? Comment ne pas penser également aux familles qui voudraient connaître la joie d’un enfant et qui ne voient pas leur attente comblée ? Sous la poussée d’un consumérisme hédoniste, Noël risque malheureusement de perdre sa signification spirituelle pour se réduire à une simple occasion commerciale d’achats et d’échange de dons ! Mais en vérité, les difficultés, les incertitudes et la crise économique elle-même que de si nombreuses familles vivent au cours de ces mois, et qui touche l’humanité tout entière, peuvent être un stimulant pour redécouvrir la chaleur de la simplicité, de l’amitié et de la solidarité, des valeurs propres à Noël. Dépouillé des résidus du consumérisme et du matérialisme, Noël peut ainsi devenir une occasion pour accueillir, comme cadeau personnel, le message d’espérance qui émane du mystère de la naissance du Christ.

Mais tout cela ne suffit pas pour saisir dans sa plénitude la valeur de la fête à laquelle nous nous préparons. Nous savons que celle-ci célèbre l’événement central de l’histoire : l’Incarnation du Verbe divin pour la rédemption de l’humanité. Saint Léon le Grand, dans l’une de ses nombreuses homélies de Noël, s’exclame ainsi : « Exultons dans le Seigneur, ô mes chers amis, et ouvrons notre cœur à la joie la plus pure. Car est venu le jour qui pour nous signifie la nouvelle rédemption, l’antique préparation, le bonheur éternel. En effet, le grand mystère de notre salut, qui, promis au début et accordé à la fin des temps, est destiné à durer sans fin (Homilia XXII) se renouvelle pour nous dans le cycle annuel récurrent. Saint Paul revient plusieurs fois dans ses lettres sur cette vérité fondamentale. Il écrit par exemple aux Galates : « Mais lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils ; il est né d’une femme, il a été sous la domination de la Loi de Moïse… pour faire de nous des fils » (4, 4). Dans la Lettre aux Romains, il souligne les conséquences logiques et exigeantes de cet événement salvifique : « Puisque nous sommes ses enfants [de Dieu], nous sommes aussi ses héritiers ; héritiers de Dieu, héritiers avec le Christ, si nous souffrons avec lui pour être avec lui dans la gloire » (8, 17). Mais c’est surtout saint Jean, dans le Prologue du quatrième Evangile, qui médite profondément sur le mystère de l’Incarnation. Et c’est pour cela que le Prologue fait partie de la liturgie de Noël dès les temps les plus anciens : on y trouve en effet l’expression la plus authentique qui est la synthèse la plus profonde de cette fête et du fondement de sa joie. Saint Jean écrit : « Et Verbum caro factum est et habitavit in nobis / Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » (Jn 1, 14).

A Noël, nous ne nous limitons donc pas à commémorer la naissance d’un grand personnage ; nous ne célébrons pas simplement et de façon abstraite le mystère de la naissance de l’homme ou le mystère de la vie en général ; pas plus que nous ne fêtons seulement le début de la nouvelle saison. A Noël, nous rappelons quelque chose de très concret et d’important pour les hommes, quelque chose d’essentiel pour la foi chrétienne, une vérité que saint Jean résume dans ces quelques paroles : « Le Verbe s’est fait chair ». Il s’agit d’un événement historique que l’évangéliste Luc se préoccupe de situer dans un contexte bien déterminé : au cours des jours où parut l’édit du premier recensement de César Auguste, lorsque Quirinius était déjà gouverneur de Syrie (cf. Lc 2, 1-7). C’est donc dans la nuit d’une date historique qu’eut lieu l’événement de salut qu’Israël attendait depuis des siècles. Dans l’obscurité de la nuit de Bethléem s’alluma réellement une grande lumière : le créateur de l’univers s’est incarné, s’unissant de façon indissoluble à la nature humaine, au point d’être réellement « Dieu de Dieu, lumière de lumière », et dans le même temps homme, vrai homme. Ce que Jean appelle en grec « ho logos » – traduit en latin « Verbum » – « le Verbe » – signifie également « le Sens ». Nous pourrions donc comprendre ainsi l’expression de Jean : le « Sens éternel » du monde est devenu tangible à nos sens et à notre intelligence ; nous pouvons à présent le toucher et le contempler (cf. 1 Jn 1, 1). Le « Sens » qui s’est fait chair n’est pas simplement une idée générale présente dans le monde ; il s’agit d’une « Parole » qui nous est adressée. Le Logos nous connaît, nous appelle, nous guide. Il ne s’agit pas d’une loi universelle, au sein de laquelle nous accomplissons un rôle, mais il s’agit d’une Personne qui s’intéresse à chaque personne : c’est le Fils du Dieu vivant, qui s’est fait homme à Bethléem.

A beaucoup hommes, et d’une certaine façon à nous tous, cela semble trop beau pour être vrai. En effet, on nous répète ici : oui, il existe un sens, et le sens n’est pas une protestation impuissante contre l’absurde. Le Sens a un pouvoir : c’est Dieu. Un Dieu bon qui ne doit pas être confondu avec un quelconque être très-haut et lointain, auquel il ne nous serait jamais donné d’arriver, mais un Dieu qui s’est fait notre prochain et qui est très proche de nous, qui a du temps pour chacun de nous et qui est venu pour demeurer avec nous. Et alors, nous nous demandons spontanément : « Une telle chose est-elle possible ? Est-ce digne de Dieu de se faire enfant ? » Pour tenter d’ouvrir le cœur à cette vérité qui illumine l’existence humaine tout entière, il faut plier l’esprit et reconnaître la limite de notre intelligence. Dans la grotte de Bethléem, Dieu se montre à nous comme un humble « enfant » pour vaincre notre orgueil. Peut-être nous serions-nous inclinés plus facilement devant la puissance, devant la sagesse ; mais Lui ne veut pas que nous nous inclinions ; il fait au contraire appel à notre cœur et à notre libre choix d’accepter son amour. Il s’est fait petit pour nous libérer de cette prétention humaine de grandeur qui jaillit de l’orgueil ; il s’est incarné librement pour nous rendre véritablement libres, libres de l’aimer.

Chers frères et sœurs, Noël est une occasion privilégiée pour méditer sur le sens et la valeur de notre existence. La proximité de cette solennité nous aide à réfléchir, d’une part, sur l’aspect dramatique de l’histoire dans laquelle les hommes, blessés par le péché, sont constamment à la recherche du bonheur et d’un sens satisfaisant de la vie et de la mort ; de l’autre, elle nous exhorte à méditer sur la bonté miséricordieuse de Dieu, qui est venu à la rencontre de l’homme pour lui communiquer directement la Vérité qui sauve, et pour le faire participer à son amitié et à sa vie. Préparons-nous donc à Noël avec humilité et simplicité, en nous disposant à recevoir en don la lumière, la joie et la paix, qui émanent de ce mystère. Accueillons le Noël du Christ comme un événement capable de renouveler aujourd’hui notre existence. Que la rencontre avec l’Enfant Jésus fasse de nous des personnes qui ne pensent pas seulement à elles-mêmes, mais qui s’ouvrent aux attentes et aux nécessités de leurs frères. De cette façon, nous deviendrons nous aussi témoins de la lumière que Noël irradie sur l’humanité du troisième millénaire. Demandons à la Très Sainte Vierge Marie, tabernacle du Verbe incarné, et à saint Joseph, témoin silencieux des événements du salut, de nous communiquer les sentiments qu’ils ressentaient alors qu’ils attendaient la naissance de Jésus, de façon à ce que nous puissions nous préparer à célébrer saintement le prochain Noël, dans la joie de la foi et animés par l’engagement d’une conversion sincère.

Joyeux Noël à tous !

Puis le pape a proposé une synthèse de sa catéchèse, en français :

Chers frères et sœurs,

Nous entrons aujourd’hui dans la neuvaine de préparation à la grande fête de Noël et nos cœurs se disposent à accueillir l’Emmanuel. En contemplant déjà la pauvreté de la crèche, nous devenons sensibles aux incertitudes et à la crise économique qui frappent tant de familles et qui concernent l’humanité entière. Ces difficultés peuvent, cependant, être une occasion favorable pour redécouvrir la chaleur de la simplicité, de l’amitié et de la solidarité qui sont les valeurs propres de Noël.

Si cette fête a la vertu de rapprocher les hommes, au-delà même de leurs croyances, elle suscite plus profondément encore l’émerveillement à l’égard de la naissance et de la venue dans notre histoire humaine du Fils de Dieu. Cet événement, que saint Luc prend soin, dans son Evangile, de situer dans un contexte historique détaillé, saint Jean le résume en une formule : «Le Verbe s’est fait chair ». Cette expression de saint Jean, nous pouvons la traduire ainsi : «Le Sens éternel » du monde s’est manifesté de façon tangible à nos sens et à notre intelligence. Ce qui est devenue chair, ce n’est pas une idée, c’est une «Parole » qui nous est adressée, qui nous cherche et qui nous guide. A Bethléem, dans l’enfant de la crèche, Dieu ne s’impose à l’homme ni par sa puissance, ni par sa sagesse, mais il fait appel à son cœur et à sa libre et humble décision d’accepter son amour.

Je salue les pèlerins francophones présents aujourd’hui et d’une façon particulière les pèlerins du diocèse de Tarbes et Lourdes que je désire remercier une nouvelle fois pour la qualité de leur accueil au mois de septembre dernier. Que la Vierge Marie, Arche de la Nouvelle Alliance, et saint Joseph, gardien du mystère de la Rédemption, nous aident à bien recevoir Celui qui fait toute chose nouvelle. Bon Noël à tous !

La Liturgie céleste (Benoît XVI, Jean Hani, Frank-Duquesne)

25 mai, 2008

Cet article je le doit traduire pour mon Blog Saint Paul apôtre, je le mets sur ce Blog parce que est, oui, du Pape Benoît, mais, aussi, l’étude sur la « La Liturgie céleste », extrait da le livre L’Esprit de la liturgie (de « Joseph Ratzinger ») se livre c’est, pour moi, une d’étude plus profonde, plus admirable, je l’ai lis et relis plusieurs fois,

du site:

http://www.sombreval.com/La-Liturgie-celeste-Benoit-XVI,-Jean-Hani,-Frank-Duquesne-_a652.html

La Liturgie céleste (Benoît XVI, Jean Hani, Frank-Duquesne)

Un des grands mérites du théologien Joseph Ratzinger est d’avoir redécouvert la notion éminemment biblique de «liturgie céleste», ancrée dans l’Ecriture sacrée mais perdue de vue par de nombreux catholiques qui, pour la plupart, ont cessé de voir dans la liturgie un «mystère, une réalité cachée en Dieu» pour reprendre les mots mêmes du pape. Il est à prévoir que, dans les années à venir, elle prenne une place plus importante dans l’enseignement magistériel de l’Eglise. Pour Benoît XVI, la liturgie doit être comprise comme liturgie céleste. Nous lisons dans le rapport établi par le cardinal Scola avant la réunion générale du Synode des Evêques sur l’Eucharistie (octobre 2005) ceci : Dans l’action eucharistique, la liturgie terrestre est intimement unie à la liturgie céleste». Cette conception peut être inférée de nombreux textes bibliques (nous y reviendrons), de prières eucharistiques de l’ancien et du nouveau missel mais aussi d’Encycliques (Mediator Dei) et de documents conciliaires (Sacrosanctum Concilium 8 : «dans la liturgie terrestre, nous participons par un avant-goût à cette liturgie céleste qui se célèbre dans la sainte cité de Jérusalem…»).
Dans L’Esprit de la Liturgie, le pape note que
«la théologie chrétienne du culte, à la suite de Jean-Baptiste, a reconnu dans le Christ l’Agneau donné par Dieu, que l’Apocalypse présente, à la fois vivant et sacrifié , comme le centre de la liturgie céleste». Benoît XVI conclut que par le sacrifice du Christ, préfiguré par les sacrifices lévitiques, «cette liturgie est maintenant présente au milieu du monde», historiquement, effectivement, par le sacrifice du calvaire, accompli une fois pour toutes au Golgotha, et hinc et nunc par le canal de la messe. Plus loin, précisant sa pensée, il écrit : «La liturgie chrétienne nous donne accès à la liturgie céleste, par la médiation de signes terrestres que le Rédempteur nous a donnés comme gages du monde à venir»
.

Le Sacrifice du Christ est un fait qui relève de l’histoire mais qui appartient aussi au monde éternel et transcendant. C’est une réalité intemporelle manifestée dans le cadre du temps La Nouvelle Alliance, signifiée par le déchirement du voile du temple, a été fondée par le sacrifice du Golgotha mais celui-ci tire son sens, sa portée, son efficace du sacrifice offert par le Christ-Verbe, hors de l’espace du temps, donc «avant même la création du monde », dans les cieux, « par son éternel (et immuable) esprit» (Hebr, 9:14 ; 13:9). Autrement dit : «dès avant la création du monde» et du temps, donc éternellement, le Christ «a été désigné», indiqué au sein de la Trinité, vu par le Père et montré à l’Esprit, «comme l’Agneau sans tache et sans défaut», «autant dire immolé» (1 Pierre, 1:19-20 ; Apoc, 5:7). De telles affirmations sont récurrentes dans le magnifique Via Crucis d’Albert Frank-Duquesne, aujourd’hui presque introuvable. De même le Père Boulgakov, dans son Verbe incarné résume cette doctrine par une formule riche d’intuitions mystiques : «La Croix de la voie terrestre réalise la Croix de la kénose céleste». Le sacrifice de la Croix, en effet, «n’est pas seulement un événement terrestre se situant dans le cadre de la vie humaine, mais aussi un événement céleste accompli dans les profondeurs de la Divinité même : la kénose du Dieu-Verbe» (sur la kénose crucigène du Verbe je vous renvoie à mon article sur l’Apocalypse).
Toute r
éflexion sur les sacrifices doit prendre en compte cet aspect métaphysique du problème. On ne comprend rien à la messe si l’on s’en tient à une représentation strictement temporelle du drame salvifique. Comme l’écrit Jean Hani, «le fondement métaphysique du sacrifice, c’est le sacrifice éternel de Dieu». Dans sa Divine Liturgie, publié en 1981, ce même Jean Hani a exposé des vues très profondes sur la liturgie céleste à laquelle, comme j’ai écrit dans un article récent, nos offices offrent un «débouché» sur le plan de la «chair». Il insiste sur la nécessité d’adopter un point de vue métaphysique, dégagé de la temporalité, pour comprendre comment à chaque messe peut se reproduire le sacrifice du Golgotha et surtout comment celui-ci réfracte le sacrifice céleste du Verbe. Il cite ce passage de M. Olier, fondateur du premier séminaire français, qui, au XVIIe siècle, rapprochait déjà la messe de la liturgie céleste : «Pour faire entendre le mystère du très saint sacrifice de la messe, il faut savoir que ce sacrifice est le sacrifice du ciel il y a un sacrifice dans le Paradis, lequel, en même temps, est offert en la terre, et il est différent en cela seulement qu’il se présente ici-bas sous les voiles». M. Olier se référait pour corroborer son propos à cette grande scène entrevue par saint Jean dans son Apocalypse : l’Agneau égorgé, mais vivant, sur un trône, les vingt-quatre Vieillards l’adorant en jouant de la Cithare et en brûlant de l’encens, et les multitudes d’anges ainsi que toutes les cré
atures chantant les louanges de l’Agneau (Apo, 5:6-14).
Suivent des d
éveloppements très intéressants, incontournables, où Jean Hani s’emploie à réfuter l’objection selon laquelle cette conception «métaphysique» tendrait à «déréaliser» la liturgie terrestre : «Cette façon de comprendre le sacrifice de la messe, écrit-il, n’est pas une théorie personnelle qui n’engagerait que les théologiens dont nous parlons. Elle est attestée par les plus anciennes liturgies où nous trouvons des prières telles que celle-ci : Elevez vos regards vers les réalités célestes et contemplez les mystères actuellement célébrés : les séraphins, dans une crainte respectueuse, se tiennent devant le Trône de gloire du Christ, chantant les louanges du Corps offert, du Calice mélangé. Et ici-bas le peuple implore, le prêtre supplie et demande miséricorde pour le monde entier (Prière après la consécration à la messe assyro-chaldéenne)»
.

En dehors des textes bibliques mentionnés ci-dessus, l’idée du sacrifice céleste se retrouve dans l’épitre aux Hébreux où saint Paul affirme que le Christ, lors de son Ascension, est monté au ciel pour y être le suprême Pontife (Hébr, 6:1 ; 20:20).
La cons
écration de la messe, dans cette perspective, doit être regardée comme «la manifestation visible d’un acte éternel». La suite de son analyse rappelle certaines lignes superbes de Frank-Duquesne sur la messe, considéré
e sous son double aspect : temporel et intemporel, visible et invisible.

Citons d’abord Jean Hani pour qui l’intelligence du symbolisme conditionne celle de la liturgie :
« La messe a son prototype dans le sacrifice céleste de l’Agneau décrit par l’Apocalypse. Il est vain d’objecter comme le font certains d’un point de vue profane, que cette façon de concevoir les choses, n’est qu’une projection de la liturgie terrestre, qu’on s’imagine se dérouler ainsi dans le ciel. Pour le spirituel, en effet, c’est l’inverse qui est vrai, car il sait que la liturgie visible n’est que la réfraction symbolique, dans le plan de la corporéité sur lequel l’homme se meut pendant l’existence terrestre, de la réalité invisible d’En-haut, de même que la musique n’est que l’expression approximative, comme l’a écrit Marcel de Corte, d’un silence essentiel. Les textes de l’écriture que nous avons cités nous décrivent sous une forme sensible une réalité spirituelle et nous présentent dans un déroulement temporel quelque chose qui, en réalité, n’a jamais cessé d’exister et appartient à l’éternité. Ce qui ressort d’un autre passage, essentiel, de l’Apocalypse, où nous lisons que l’agneau est immolé dès le commencement (Apo.13:8) et également d’un passage de saint Pierre disant que le Christ est l’Agneau sans défaut et sans tache ; celui qui, prédestiné dès avant la création du monde, a été manifesté pour nous en ces derniers temps (1 Pi, 1:19), termes qui rejoignent l’enseignement de saint Paul sur le mystère caché depuis l’origine”»
.

Citons maintenant ces quelque lignes du grand écrivain catholique Albert Frank-Duquesne, tirées de Via Crucis (publié quelques mois avant sa mort en 1955) :
« Le sacrifice offert ici-bas au Calvaire, l’unique oblation, suffisante à réparer la faute universelle et les fautes de chacun, cette offrande terrestre qui réverbéra sur le Golgotha, par voie d’identifiante analogie, le parfait holocauste offert par l’éternel esprit de l’Agneau autant dire immolé dès avant la création du monde, le Christ le présente, dans l’immobile Maintenant de la Divinité, en guise de Liturgie céleste à la gloire du Père. Nous-mêmes, attirés en-haut par Celui qui S’est élevé de terre dans les cieux, tout en “évoquant, en re-présentant, en rendant mystiquement présente cette Vie sacrifiée du Médiateur, tout en nous associant ici-bas comme des ombres à l’Eucharistie-modèle célébrée là-haut, nous signifions, notifions efficacement, exprimons en concepts, paroles et gestes symboliques c’est-à-dire tout chargés de réalité mystérieuse ce que le Christ accomplit sur la Croix, parce que la Crucifixion est elle-même, avec la Cène dont elle est inséparable, la première Messe, la manifestation terrestre du Sacrifice in aeternum. Si le Christ eucharistique descend parmi nous, c’est parce que nous-mêmes, attirés par l’Elevé de terre, d’ores et déjà siégeons avec Lui, en Lui, dans les cieux, la Messe réalisant inchoativement et mystiquement notre parution avec le Christ, notre vie, dans la gloire. Aller à la Messe, c’est donc se tenir, avec Marie et Jean, aux pieds de la Croix, après avoir pris part au banquet d’adieux. Aller à la Messe, cette pieuse corvée, c’est figurer à la table des Douze, c’est se nourrir du Pain céleste, je ne dis pas : recevoir en soi Jésus-Christ, L’héberger, L’avoir en soi comme un contenu dans un contenant, mais Le recevoir comme nourriture, en tant qu’aliment pour la vie divine, éternelle, et plutôt être présent au Christ que de Le posséder, bref : devenir, sinon le Christ Lui-même, du moins une seule plante, un seul esprit avec Lui, être rendu conforme au Christ, l’Esprit-Saint réalisant en nous l’image du Fils, et l’Eucharistie servant, sur ce plan d’incarnation, à
nous L’inoculer.
Mais il y a plus : comme Sa
ül avait approuvé le meurtre d’Étienne en acceptant le dépôt, par les assassins du Protomartyr, de leurs vêtements à ses pieds, ainsi, la manducation du Christ eucharistique est celle d’une Victime sacrifiée ; nos actions de grâces après la Communion, au lieu de s’absorber dans la gratitude et la joie d’avoir en soi le Christ, feraient peut-être mieux de L’offrir en nous au Père, Lui, comme crucifié satisfactoire et ressuscité, comme victime propitiatoire, et de nous offrir nous-mêmes, filii in Filio, comme suffisamment identifiés à l’Agneau par l’adhé
sion vitale qu’exprime la manducation de sa chair.

Sources :

L’Esprit de la liturgie de Joseph Ratzinger
Le Verbe incarn
é
de Serge Boulgakov
Via Crucis d’Albert Frank-Duquesne
La Divine liturgie de Jean Hani. A propos de ce livre, Jean Borella
écrit : « Avec La divine liturgie Jean Hani aborde ce qui est le sommet de l’Activité divine, de la théurgie au sens étymologique de ce terme, c’est-à-dire la réalisation sacramentelle de la dramaturgie salvatrice du Christ. C’est pourquoi cet ouvrage (Trédaniel, 1981) revêt une importance exceptionnelle et devrait figurer dans la bibliothèque de tout chrétien. Car nous ne saurions nous dispenser de comprendre ce qui se passe à la messe dominicale, centre et sommet de la vie du chrétien. En écrivant ce livre, Jean Hani, qui connaît directement la liturgie catholique orientale, renoue avec la tradition grecque et russe des laïcs liturgistes, tels Nicolas Cabasilas et Gogol. Toutefois il ne se contente pas de nous informer sur certains rites propres aux églises syriennes, copte, maronite, etc. Il prend en compte également les rites de la liturgie romaine. Sur la symbolique de tous les gestes de cette dramaturgie sacrée, de toutes ses paroles, de toutes les pièces du mobilier liturgique (autel, chandeliers, linges, encens, chants, cloches, vêtements sacerdotaux, etc.), il n’existe rien de plus juste et de plus profond. Disons le clairement, nous sommes convaincu que la vie tout entière de la chrétienté est suspendue à l’accomplissement exact du rite de la messe. Plaise au ciel que ce livre béni serve à la restauration du culte catholique !»


Dimanche 27 Janvier 2008

Sombreval

Benoît à Naples

21 octobre, 2007

 du site: 

http://www.santegidio.org/fr/ecumenismo/uer/2007/intro.htm

Introduction

Benoît XVI, dans le message envoyé à la rencontre interreligieuse pour la paix d’Assise, en septembre 2006, a écrit : « L’initiative promue il y a vingt ans par Jean-Paul II assume le caractère d’une prophétie ».

La Communauté de SantEgidio a voulu soutenir et diffuser, au cours de ces vingt années, cet esprit dAssise contenu dans linvitation que Jean-Paul II avait faite à tous à lissue de la journée historique de prière du 27 octobre 1986 : « continuons à diffuser le message de paix et à vivre lesprit dAssise ». Un pèlerinage de paix, qui a fait halte année après année dans des villes européennes et de la Méditerranée, en est né. Aux deux rencontres de Rome (1987-1988) a suivi celle de Varsovie sur le thème « War never again », en septembre 1989, à loccasion des cinquante ans du début de la seconde guerre mondiale. Puis, ont suivi les rencontres de Bari, Malte et Bruxelles, en 1992, avec le thème « Europe, religions et paix ». En 1993, le pèlerinage sest arrêté à Milan et les années suivantes, à Assise et à Florence.Une réunion particulière sest tenue à Jérusalem, en 1995, au cœur de la Ville Sainte, sur le thème « Ensemble à Jérusalem : juifs, chrétiens et musulmans ». En 1998, lexceptionnelle rencontre de Bucarest « La paix est le nom de Dieu : Dieu, l

homme et les peuples » a ouvert la voie à la première visite de Jean-Paul II dans un pays orthodoxe, quelques mois plus tard.Des rencontres ont aussi eu lieu à Lisbonne, Barcelone, Palerme, Aix-la-Chapelle, Milan et Lyon. Pour se souvenir de lanniversaire des vingt de la Journée de prière de 1986, des rencontres ont eu lieu à Washington et Assise.

La prochaine rencontre du 21 au 23 octobre se tiendra à Naples, ville significative par son histoire et sa situation au cœur de la Méditerranée, croisement de différentes traditions religieuses.Le thème sera « Pour un monde sans violence : religions et culture en dialogue ».


Face à la violence présente dans la société, à la situation conflictuelle au niveau international, mais aussi au déracinement vécu par l’homme contemporain, au Nord comme au Sud du monde, il existe une urgence à réaffirmer avec courage la voie du dialogue et de la coopération entre les religions et les cultures.

A Naples, dans des langues et des cultures différentes, on rappellera que seuls le dialogue et la rencontre avec l’autre sont possibles pour construire une véritable civilisation de la cohabitation nécessaire aux sociétés contemporaines. Naples, au cœur de la Méditerranée, du 21 au 23 octobre, accueillera des représentants des religions et des cultures mondiale et deviendra capitale de la paix en affrontant les défis, les questions et les attentes des hommes et des femmes, de peuples entiers.Trois jours de rencontre, de prière et d’échanges pour construire ensemble, dans le dialogue, « un monde sans violence ».

catéchèse du mercredi 29.8.07 sur Saint Grégoire de Nysse

30 août, 2007

du site: 

http://www.zenit.org/article-16031?l=french

Catéchèse sur saint Grégoire de Nysse

 Texte intégral

ROME, Mercredi 29 août 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de l’audience générale, ce mercredi, place Saint-Pierre.

* * *

Chers frères et sœurs ! Dans les dernières catéchèses, j’ai parlé de deux grands docteurs de l’Eglise du IVe siècle, Basile et Grégoire de Nazianze, évêque de Cappadoce, dans l’actuelle Turquie. Aujourd’hui, nous en ajoutons un troisième, le frère de Basile, saint Grégoire de Nysse, qui s’est révélé un homme au caractère réfléchi, avec de grandes capacités de méditation, et d’une vive intelligence, ouverte à la culture de son temps. Il s’est ainsi révélé comme un penseur original et profond dans l’histoire du christianisme. Il naquit autour de 335 ; sa formation chrétienne fut suivie en particulier par son frère Basile – qu’il définit comme « père et maître » (Ep 13, 4: SC 363, 198) – et par sa sœur Macrine. Il fit ses études en appréciant particulièrement la philosophie et la rhétorique. Dans un premier temps, il se consacra à l’enseignement et se maria. Ensuite, il se consacra lui aussi entièrement, comme son frère et sa sœur, à la vie ascétique. Plus tard, il fut élu évêque de Nysse, et se démontra un pasteur zélé, ce qui lui valut l’estime de la communauté. Accusé de malversations financières par ses adversaires hérétiques, il dut abandonner le siège épiscopal pendant une brève période, mais il y revint ensuite triomphalement (cf. Ep. 6: SC 363, 164-170), et il continua à se consacrer à la lutte pour défendre la vraie foi. En particulier après la mort de Basile, recueillant presque son héritage spirituel, il coopéra au triomphe de l’orthodoxie. Il participa à divers synodes ; il chercha à résoudre les conflits entre les Eglises ; il participa activement à la réorganisation ecclésiastique et, en tant que « pilier de l’orthodoxie », il fut l’un des acteurs du Concile de Constantinople de 381, qui définit la divinité de l’Esprit Saint. Il reçut diverses charges officielles de la part de l’empereur Théodose, il prononça d’importants discours et homélies funèbres, il se consacra à la rédaction de diverses œuvres théologiques. En 394, il participa encore à un synode qui se déroula à Constantinople. On ne connaît pas la date de sa mort. Grégoire explique avec clarté la finalité de ses études, le but suprême auquel il aspire dans son travail de théologien : ne pas employer sa vie en choses vaines mais trouver la lumière qui permet de discerner ce qui est vraiment utile (cf. In Ecclesiasten hom. 1: SC 416, 106-146). Il trouva ce bien suprême dans le christianisme, grâce auquel est possible « l’imitation de la nature divine » (De professione christiana: PG 46, 244C). Avec sa vive intelligence et ses vastes connaissances philosophiques et théologiques, il défendit la foi chrétienne contre les hérétiques, qui niaient la divinité du Fils et de l’Esprit Saint (comme Eunomios et les Macédoniens), ou mettaient en doute la parfaite humanité du Christ (comme Apollinaire). Il commenta l’Ecriture Sainte, s’arrêtant sur la création de l’homme. Cela était pour lui un thème central : la création. Il voyait dans la créature le reflet du Créateur et trouvait là le chemin vers Dieu. Mais il écrivit également un livre important sur la vie de Moïse, qu’il présente comme un homme en marche vers Dieu : cette montée vers le Mont Sinaï devient pour lui une image de notre ascension dans la vie humaine, vers la vraie vie, vers la rencontre avec Dieu. Il a interprété également la prière du Seigneur, le Notre-Père, et les Béatitudes. Dans son « Grand discours catéchétique » (Oratio catechetica magna) — il exposa les lignes fondamentales de la théologie, non pas pour une théologie académique refermée sur elle-même, mais pour offrir aux catéchistes un système de référence dont tenir compte dans leurs instructions, comme un cadre dans lequel s’inscrit ensuite l’interprétation théologique de la foi. En outre, Grégoire est célèbre pour sa doctrine spirituelle. Toute sa théologie n’était pas une réflexion académique, mais l’expression d’une vie spirituelle, d’une vie de foi vécue. En tant que grand « père de la mystique » il exposa dans divers traités – comme le De professione christiana et le De perfectione christiana – le chemin que les chrétiens doivent entreprendre pour atteindre la vraie vie, la perfection. Il exalta la virginité consacrée (De virginitate), et en proposa un modèle éminent dans la vie de sa sœur Macrine, qui est toujours restée pour lui un guide, un exemple (cf. Vita Macrinae). Il tint divers discours et homélies, et écrivit de nombreuses lettres. En commentant la création de l’homme, Grégoire souligne que Dieu, « le meilleur des artistes, forge notre nature de manière à la rendre adaptée au service de la royauté. A travers la supériorité établie de l’âme, et au moyen de la conformation même du corps, il dispose les choses de manière à ce que l’homme soit réellement adapté au pouvoir royal » ( De hominis opificio 4: PG 44, 136B). Mais nous voyons que l’homme, pris dans les mailles des péchés, abuse souvent de la création et n’exerce pas une véritable royauté. C’est pourquoi, afin d’exercer une véritable responsabilité envers les créatures, il doit être pénétré par Dieu et vivre dans sa lumière. En effet, l’homme est un reflet de cette beauté originelle qui est Dieu : « Tout ce que Dieu créa était excellent », écrit le saint évêque. Et il ajoute : « Le récit de la création en témoigne (cf. Gn 1, 31). Parmi les choses excellentes se trouvait aussi l’homme, orné d’une beauté largement supérieure à toutes les belles choses. En effet, quelle chose pouvait être aussi belle que celui qui est semblable à la beauté pure et incorruptible ?… Reflet et image de la vie éternelle, il était véritablement beau, et même très beau, comme le signe rayonnant de la vie sur son visage » (Homilia in Canticum 12: PG 44, 1020C). L’homme a été honoré par Dieu et placé au dessus de toute autre créature : « Le ciel n’a pas été fait à l’image de Dieu, ni la lune, ni le soleil, ni la beauté des étoiles, ni aucune des choses qui apparaissent dans la création. Seule toi (anima umana) tu as été rendue l’image de la nature qui domine toute intelligence, ressemblance de la beauté incorruptible, empreinte de la vraie divinité, réceptacle de la vie bienheureuse, image de la véritable lumière ; et lorsque tu la regardes, tu deviens ce qu’Il est, car à travers le rayon reflété provenant de ta pureté, tu imites Celui qui brille en toi. Aucune des choses qui existe n’est grande au point de pouvoir être comparée à ta grandeur » (Homilia in Canticum 2: PG 44, 805D). Méditons cet éloge de l’homme. Voyons également à quel point l’homme est dégradé par le péché. Et cherchons à revenir à la grandeur originelle : ce n’est que si Dieu est présent que l’homme arrive à sa véritable grandeur. L’homme reconnaît donc en lui-même le reflet de la lumière divine : en purifiant son cœur, il redevient comme il était au début, une image limpide de Dieu, Beauté exemplaire (cf. Oratio catechetica6: SC 453, 174). Ainsi, l’homme, en se purifiant, peut voir Dieu, comme les cœurs purs (cf. Mt 5, 8) : « Si, avec un style de vie diligent et attentif, tu effaces les choses laides qui se sont déposées sur ton cœur, alors resplendira en toi la beauté divine… En te contemplant toi-même, tu verras en toi celui qui est le désir de ton cœur et tu seras bienheureux » (De beatitudinibus, 6: PG 44, 1272AB). Il faut donc laver les choses laides qui se sont déposées sur notre cœur et retrouver en nous-même la lumière de Dieu. L’homme a donc comme objectif la contemplation de Dieu. Ce n’est qu’en celle-ci qu’il peut trouver sa réalisation. Pour anticiper, dans une certaine mesure, cet objectif, déjà au cours de cette vie, il doit progresser sans cesse vers une vie spirituelle, une vie de dialogue avec Dieu. En d’autres termes – et telle est la leçon la plus importante que saint Grégoire de Nysse nous transmet – la pleine réalisation de l’homme consiste dans la sainteté, dans une vie vécue dans la rencontre avec Dieu, qui devient ainsi lumineuse également pour les autres, et pour le monde. Voici le résumé de la catéchèse, en français, lu par le pape Chers Frères et Sœurs, Avec son frère Basile et son ami Grégoire de Nazianze, dont nous avons déjà parlé, Grégoire de Nysse fut l’un des grands théologiens de la Cappadoce au quatrième siècle. Formé dans la foi par son frère et sa sœur Macrine, il se mariera et se destinera d’abord à l’enseignement. Puis, il choisira la vie ascétique. Plus tard, élu évêque de Nysse, il sera un pasteur zélé, estimé de la communauté. Après la mort de Basile, dont il recueillera l’héritage spirituel, il contribuera à la victoire de l’orthodoxie. Protagoniste du Concile de Constantinople de 381, qui définira la divinité du Saint-Esprit, il participera à la réorganisation de l’Église et assumera diverses charges confiées par l’empereur Théodose. Dans son œuvre théologique, Grégoire met particulièrement en évidence la grandeur et la beauté de l’homme, dont la nature a été conçue pour exercer la royauté sur la création. Sa beauté est le reflet de la beauté de Dieu. Le but de son existence est de contempler Dieu ; en Lui seul il peut trouver sa satisfaction. Pour anticiper cet objectif déjà ici-bas, l’homme est tenu de progresser dans une vie spirituelle toujours plus parfaite car, pour saint Grégoire, la pleine réalisation de l’homme se trouve dans la sainteté. Je souhaite la bienvenue aux pèlerins de langue française, et je salue particulièrement les membres du groupe œcuménique, catholique et orthodoxe, venus d’Athènes, ainsi que les jeunes de Tarse-Mersin, en Turquie. A la suite de saint Grégoire, je vous invite tous à vous faire serviteurs de ce qu’il y a de beau et de noble dans le cœur de l’homme, pour qu’il puisse contempler Dieu. Avec ma Bénédiction apostolique. A l’issue de l’audience générale, le pape a lancé un appel concernant les graves catastrophes naturelles qui ont eu lieu récemment dans plusieurs pays Ces jours derniers, plusieurs zones géographiques ont été dévastées par de graves catastrophes : je fais référence aux inondations dans certains pays orientaux, ainsi qu’aux incendies désastreux en Grèce, en Italie et dans d’autres pays européens. Devant des urgences aussi dramatiques, qui ont causé de nombreuses victimes et d’importants dommages matériels, on ne peut qu’être préoccupé par le comportement irresponsable d’individus qui mettent en péril la sécurité des personnes et détruisent le patrimoine naturel, bien précieux de l’humanité tout entière. Je m’unis à ceux qui, à juste titre, condamnent ces actions criminelles et j’invite chacun à prier pour les victimes de ces tragédies.

Lorette : Programme du voyage de Benoît XVI (1-2 septembre)

25 août, 2007

du site:

http://www.zenit.org/article-16005?l=french

Lorette : Programme du voyage de Benoît XVI (1-2 septembre)

ROME, Vendredi 24 août 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le programme du voyage de Benoît XVI, les 1er et 2 septembre, au sanctuaire marial de Lorette, en Italie, où il rencontrera les jeunes (cf. Zenit 21 août) . Le programme est distribué par la salle de presse du Saint-Siège. Samedi 1er septembre16.10 : Départ en hélicoptère de l’héliport des villas pontificales de Castel Gandolfo pour Lorette
17.15 : Arrivée au « Centre Jean-Paul II » à Montorso di Loreto. Transfert en voiture panoramique jusqu’au podium de l’esplanade de Montorso.
18.00 : Veillée de prière avec les jeunes sur l’esplanade de Montorso.
Le Saint-Père répond aux questions des jeunes et prononce un discours
21.15 : Visite au Sanctuaire de Lorette
21.25 : Moment de prière en privé dans la « Sainte Maison ».
Liaison télévisée avec l’esplanade de Montorso où les jeunes suivront ce moment qui marquera le lancement de leur veillée nocturne. Prière du Saint-Père.

Dimanche 2 septembre 2007

9.30 : Concélébration eucharistique sur l’esplanade de Montorso. Homélie du Saint-Père. Prière de l’Angelus Domini. Paroles du Saint-Père.
16.30 : Salutation au comité promoteur, à la délégation pontificale et à la protection civile, sur la loggia du palais apostolique de Lorette.
17.00 : Rencontre avec les fidèles de Lorette sur le parvis du Sanctuaire de Lorette. Paroles du Saint-Père.
17.45 : Départ en hélicoptère du « Centre Jean-Paul II » à Montorso di Loreto.
18.45 : Arrivée à l’héliport des villas pontificales de Castel Gandolfo.

Angélus du 10 juin : la « Fête-Dieu », une invitation à contempler l’Eucharistie

11 juin, 2007

du site: 

http://www.zenit.org/article-15591?l=french

Angélus du 10 juin : la « Fête-Dieu », une invitation à contempler l’Eucharistie

Texte intégral

ROME, Dimanche 10 juin 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de la méditation que le pape a prononcée à l’occasion de la prière de l’Angélus, ce dimanche, du palais apostolique du Vatican.

AVANT L’ANGELUS

La solennité d’aujourd’hui, la Fête-Dieu, célébrée jeudi dernier au Vatican et dans d’autres Nations, nous invite à contempler le plus grand mystère de notre foi : la très sainte Eucharistie, présence réelle du Seigneur Jésus Christ dans le Sacrement de l’autel. Chaque fois que le prêtre renouvelle le sacrifice eucharistique, il répète dans la prière de consécration : « Ceci est mon corps… ceci est mon sang ». Il le dit en prêtant sa voix, ses mains et son cœur au Christ, qui a voulu demeurer avec nous et être le cœur de l’Eglise qui bat. Mais le Seigneur Jésus reste vivant dans le tabernacle même après la célébration des mystères divins ; c’est pour cette raison qu’on Le loue, spécialement dans l’adoration eucharistique, comme j’ai voulu le rappeler dans ma récente exhortation apostolique post-synodale Sacramentum caritatis (cf. nn. 66-69). Il existe même un lien intrinsèque entre la célébration et l’adoration. La messe est en effet en elle-même le plus grand acte d’adoration de l’Eglise : « Personne ne mange cette chair – écrit saint Augustin – s’il ne l’a pas d’abord adorée » (Enarr. in Ps. 98,9: CCL XXXIX, 1385). L’adoration en dehors de la messe prolonge et intensifie ce qui s’est produit lors de la célébration liturgique et permet un accueil véritable et profond du Christ.Aujourd’hui, dans toutes les communautés chrétiennes se déroule par ailleurs la procession eucharistique, forme particulière d’adoration publique de l’Eucharistie, enrichie de belles et traditionnelles manifestations de dévotion populaire. Je voudrais saisir l’occasion qui m’est offerte par la solennité d’aujourd’hui pour recommander vivement la pratique de l’adoration eucharistique aux pasteurs et à tous les fidèles. J’encourage les Instituts de Vie consacrée ainsi que les associations et les confraternités qui s’y consacrent de manière spéciale : ils rappellent à tous le caractère central du Christ dans notre vie personnelle et ecclésiale. Je me réjouis par ailleurs de constater que de nombreux jeunes découvrent la beauté de l’adoration aussi bien personnelle que communautaire. J’invite les prêtres à encourager les groupes de jeunes dans ce sens, mais également à les suivre afin que les formes d’adoration communautaire soient toujours appropriées et dignes, avec des temps adaptés de silence et d’écoute de la Parole de Dieu. Dans la vie d’aujourd’hui, souvent bruyante et chaotique, il est plus important que jamais de retrouver la capacité de silence intérieur et de recueillement : l’adoration eucharistique permet de le faire non seulement autour du « moi » mais en compagnie de ce « Tu » plein d’amour qui est Jésus Christ, « le Dieu qui nous est proche ».

Que la Vierge Marie, Femme eucharistique, nous introduise dans le secret de la véritable adoration. Son cœur, humble et simple, était toujours recueilli autour du mystère de Jésus, dans lequel elle adorait la présence de Dieu et de son Amour rédempteur. Que par son intercession grandissent dans toute l’Eglise la foi dans le Mystère eucharistique, la joie de participer à la messe, spécialement le dimanche, et l’élan pour témoigner de l’immense charité du Christ.

APRES L’ANGELUSOn me demande malheureusement souvent d’intervenir en faveur de personnes, parmi elles également des prêtres, enlevées pour diverses raisons et dans diverses parties du monde. Je les porte toutes dans mon cœur et dans ma prière, en pensant, entre autres, au cas douloureux de la Colombie. J’adresse un appel pressant aux auteurs de ces actes exécrables afin qu’ils prennent conscience du mal qu’ils font et rendent au plus vite à l’affection des leurs ceux qu’ils détiennent prisonniers. Je confie les victimes à la protection maternelle de la très sainte Vierge Marie, Mère de tous les hommes.

Benoît XVI a ensuite salué les pèlerins en français, anglais, allemand, espagnol, polonais, et italien.Voici ce qu’il a dit en français :

Je salue cordialement les pèlerins francophones présents ce matin pour la prière de l’Angelus, en particulier les responsables de la Communauté de Sant’Egidio, provenant d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, réunis pour un temps de formation sur le thème : « »Acclamez Dieu, toute la terre » (Ps 66,1). Chant et Parole de Dieu dans la prière de la Communauté». Puissiez-vous tous, dans le Sacrement de l’Eucharistie, acquérir des forces nouvelles, pour être toujours davantage des témoins vivants de la paix et de la miséricorde du Seigneur. Avec ma Bénédiction apostolique.
Et en polonais :

Je salue cordialement tous les Polonais. Le mois de juin est particulièrement dédié au Cœur de Jésus. En adorant le Christ présent dans l’Eucharistie nous rappelons que son Cœur est rempli d’amour, de bonté et de miséricorde. En honorant le sacré Cœur, nous comprenons mieux le mystère de la rédemption qui y est présent. Que Jésus, dont le Cœur est généreux avec tous ceux qui L’invoquent, vous accordent d’abondantes grâces et sa bénédiction.

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