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ST AUGUSTIN LIT ET COMMENTE ST JEAN – L’EGLISE ET LES PÊCHES MIRACULEU

1 août, 2014

http://peresdeleglise.free.fr/Augustin/eglise2.htm

ST AUGUSTIN LIT ET COMMENTE ST JEAN

CHAPITRE 8E : L’EGLISE (SUITE ET FIN)

L’EGLISE ET LES PÊCHES MIRACULEUSES.

Au Tr. 122, 6-7, Augustin, en rapprochant la pêche après la Résurrection avec la première pêche miraculeuse intervenue avant que Jésus ne commence sa prédication, montre que ces pêches sont des figures de l’Eglise :

ON RELIRA JN XXI, 3-11 :

Simon-Pierre leur dit: « Je m’en vais pêcher. » Ils lui dirent: « Nous venons nous aussi avec toi. » Ils sortirent, montèrent dans le bateau et, cette nuit-là, ils ne prirent rien.
Or, le matin déjà venu, Jésus se tint sur le rivage; pourtant les disciples ne savaient pas que c’était Jésus.
Jésus leur dit: « Mes enfants, n’auriez vous rien à manger? » Ils lui répondirent: « Non! »
Il leur dit: « Jetez le filet à droite du bateau et vous trouverez. » Ils le jetèrent donc et ils n’avaient plus la force de le tirer, tant il était plein de poissons.
Le disciple que Jésus aimait dit alors à Pierre: « C’est le Seigneur! » A ces mots: « C’est le Seigneur! » Simon-Pierre mit son vêtement-car il était nu-et il se jeta à l’eau.
Les autres disciples, qui n’étaient pas loin de la terre, mais à environ deux cents coudées, vinrent avec la barque, traînant le filet de poissons.
Une fois descendus à terre, ils aperçoivent, disposé là, un feu de braise, avec du poisson dessus, et du pain.
Jésus leur dit: « Apportez de ces poissons que vous venez de prendre. »
Alors Simon-Pierre monta dans le bateau et tira à terre le filet, plein de gros poissons: cent cinquante-trois; et quoiqu’il y en eût tant, le filet ne se déchira pas.
« Voici un grand mystère renfermé dans le sublime Evangile de saint Jean, et il l’a écrit en dernier lieu pour en faire ressortir l’importance à nos yeux. Les sept disciples qui prennent part à cette pêche, Pierre, Thomas, Nathanaël, les deux fils de Zébédée, et deux autres dont l’Evangéliste ne dit pas les noms, sont par leur nombre de sept la figure de la fin des temps, dont la révolution s’accomplit dans un espace de sept jours. C’est pour signifier la même vérité que le matin venu, Jésus se tient sur le rivage, car le rivage est comme l’extrémité de la mer et représente la fin du monde. Une autre figure de la fin du monde, c’est que Pierre tire le filet à terre, c’est-à-dire sur le rivage. Notre-Seigneur nous découvre lui-même le sens de cette figure, lorsque parlant dans un autre endroit de la comparaison du filet jeté dans la mer, il dit : « Et ils le tirent sur le rivage. » Qu’est-ce que ce rivage ? Il nous l’explique en ajoutant : « Il en sera ainsi à la fin du monde. » (Mt 13, 49)
Mais ce n’était là qu’un récit parabolique, et non un fait réel quoique figuratif. Or, c’est par un fait véritable que Notre-Seigneur a voulu figurer ici ce que sera l’Eglise à la fin du monde, de même qu’il a voulu figurer par une autre pêche (Luc, 5) ce qu’elle est pendant cette vie. Le premier miracle eut lieu au commencement de sa prédication, le second après sa résurrection. La première pêche représente les bons et les mauvais dont l’Eglise est maintenant composée, et la seconde les bons seulement dont elle sera exclusivement formée pour l’éternité après la résurrection des morts. Enfin la première fois Jésus ne se tenait pas comme ici sur le rivage, lorsqu’il commanda de jeter les filets, mais : « Etant monté dans une des barques qui était à Simon, il le pria de s’éloigner un peu de terre ; et s’étant assis il enseignait le peuple de dessus la barque. Lorsqu’il eut cessé de parler, il dit à Simon : Avance en pleine mer, et jetez vos filets pour pêcher. » (Ibid, 3, etc.) Les poissons qui furent pris alors, restèrent dans la barque, et on ne tira point comme ici le filet sur la terre. Toutes ces circonstances et les autres qu’on pourrait encore trouver sont autant de figures de l’Eglise tant qu’elle est dans ce monde ; la pêche actuelle représente au contraire l’Eglise à la fin du monde, voilà pourquoi l’une eut lieu avant, l’autre après la résurrection du Sauveur, d’un côté, Notre-Seigneur voulait figurer notre vocation, de l’autre notre résurrection. Dans la première pêche, les filets ne sont point jetés à droite de la barque pour n’être point le symbole exclusif des bons, ni à gauche pour n’être que la figure des mauvais, mais ils sont jetés indifféremment et sans distinction : « Jetez vos filets pour pêcher », leur dit Jésus pour nous faire comprendre le mélange nécessaire des bons et des mauvais. Ici, au contraire, il dit à Pierre : « Jetez le filet à droite de la barque », pour figurer seulement ceux qui se tiendront à la droite c’est-à-dire les bons exclusivement. La première fois le filet se rompait, image des schismes qui devaient déchirer l’Eglise ; ici ou dans la paix suprême dont jouiront des saints les schismes ne pourront plus trouver place, l’Evangéliste a pu dire : « Et malgré la grosseur des poissons, le filet ne se rompit pas. » Il semble faire allusion à la première pêche où le filet se rompit et faire ressortir par opposition la supériorité de la pêche actuelle où le filet ne se rompit pas. D’un côté, ils prirent une si grande quantité de poissons que les deux barques qui en étaient remplies étaient près de couler à fond, c’est-à-dire qu’elles étaient surchargées au point de couler à fond, car elles évitèrent en réalité ce danger dont elles avaient été menacées. D’où viennent dans l’Eglise ces scandales déplorables qui nous arrachent tant de gémissements ? C’est que nous sommes impuissants contre cette multitude innombrable qui entre dans l’Eglise et par ses mœurs diamétralement opposées à la voie que suivent les saints menace de submerger pour ainsi dire la discipline. Ici au contraire ils jetèrent le filet à la droite de la barque, « et ils ne pouvaient le tirer tant il y avait de poissons ». Que signifie cette circonstance : « Ils ne pouvaient le tirer » ? c’est que ceux qui auront part à la résurrection de la vie, en d’autres termes ceux qui sont à droite et sont morts dans les filets du nom chrétien, n’apparaîtront que sur le rivage, c’est-à-dire à la fin des siècles, après la résurrection. Aussi les disciples ne purent tirer les filets pour verser dans la barque les poissons qu’ils avaient pris, comme on avait fait pour cette multitude de poissons qui rompaient les filets et surchargeaient les barques. Ces poissons qui sont à la droite, l’Eglise les conserve cachés dans le sommeil de la paix comme dans les profondeurs de la mer, jusqu’à ce que le filet soit tiré sur le rivage distant de deux cents coudées. Dans la première pêche il y avait deux barques qui figuraient le peuple de la circoncision et les Gentils ; dans la seconde ces deux cents coudées figuraient les élus des deux peuples de la circoncision et des Gentils, composé chacun du nombre cent ; parce qu’arrivé à la somme de cent le nombre passe à droite. Enfin dans la première pêche on ne parle point du nombre des poissons, et nous y voyons comme un accomplissement de la prédiction du Roi-prophète : « J’ai voulu annoncer vos œuvres, leur multitude m’a paru innombrable ». (Ps 39, 6). Ici au contraire ce nombre est précisé, il y en avait cent cinquante-trois, et il nous faut avec la grâce de Dieu donner la raison de ce nombre. »
Augustin va commenter ce chiffre, y voyant un chiffre symbolique, dont il veut donner la raison à son auditoire : même si le goût d’Augustin pour la numérologie et les explications qu’ils donnent prêtent souvent à sourire, et sans s’arrêter sur tout le détail de sa démonstration dont l »intérêt est inégal, on y verra cependant, si l’on veut aller au bout de la lecture, en se reportant au Tr. 122, 8-9 une source supplémentaire de méditation spirituelle car Augustin découvre à nos yeux et développe de nouveaux symboles et de nouveaux sens.

Les sacrements de l’Eglise

Augustin va développer, après plusieurs Pères, l’idée que l’Eglise a été formée, comme la nouvelle Eve, du côté percé du Christ en croix. : cette blessure est la source des sacrements. Dans les Tr. IX, 10, 15, 8, 120, 2… (ci-dessous), mais ailleurs aussi (Sermons, Enn in Ps…). On a là le rapprochement mystérieux de l’épisode du coup de lance (Jn 19, 34) de la création de la femme à partir de la côte d’Adam (Gn 2, 21-24).

Augustin souligne le parallélisme des deux scènes : on a deux éléments semblables sur trois :

« Deux sont semblables, le sommeil et la mort, le côté et le côté… Mais du côté d’Adam Eve a été formée qui, en péchant, nous mènerait à la mort ; du côté du Christ l’Eglise a été formée qui, en nous enfantant, nous mènerait à la vie. »
Avec ce thème, Augustin prolonge ce qu’il a déjà dit de l’Eglise : en s’unissant à la chair humaine dans le sein de la Vierge, le Verbe a épousé l’Eglise dans son principe puisque « l’origine et les prémices de l’Eglise sont la chair du Christ » (Commentaire sur la 1ère Ep. de St Jean, Tr. 2, 2).
Noter encore que l’ouverture pratiquée sur le côté de l’arche de Noé explique ce que signifie l’ouverture du côté du Christ :
« La porte que l’arche reçut sur le côté, c’est assurément la blessure qu’ouvrit la lance dans le côté du Crucifié : par là, en vérité, entrent ceux qui viennent à lui, car de là découlèrent les sacrements par lesquels les croyants sont initiés » (De la cité de Dieu, 15, 26, 1)
« Adam dort pour qu’Eve soit formée ; le Christ meurt pour que l’Eglise soit formée. Pendant le sommeil d’Adam Eve est formée de son côté ; après la mort du Christ son côté est frappé par la lance afin que jaillissent les sacrements dont sera formée l’Eglise. Qui ne verrait que dans ces faits du passé l’avenir était figuré, puisque l’Apôtre déclare qu’Adam lui-même était le type de celui qui doit venir : Il est, dit-il, le type de celui qui doit venir. Tout était d’avance mystérieusement figuré. Il ne faut pas croire en effet que Dieu n’était pas réellement capable de tirer une côte d’Adam éveillé pour en former la femme. Ou bien pour que son côté ne souffrît pas quand la côte lui fut enlevée, était-il nécessaire qu’il dormît ? Mais qui pourrait dormir si profondément qu’on puisse lui arracher des os sans qu’il s’éveille ? Ou bien l’homme était-il insensible parce que c’était Dieu qui lui enlevait cette côte ? Il pouvait donc aussi la lui arracher sans douleur pendant qu’il était éveillé puisqu’il a pu le faire durant son sommeil. » (Tr. IX, 10, p. 531).
« Des soldats vinrent donc et rompirent les jambes du premier et de l’autre qu’on avait crucifié avec lui. Et s’approchant de Jésus, quand ils virent qu’il était déjà mort, ils ne lui rompirent point les jambes ; mais un des soldats lui ouvrit le côté avec une lance, et aussitôt il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19, 32, 34). L’Evangéliste s’est servi d’une expression choisie à dessein ; il ne dit pas : il frappa ou il blessa son côté, ou toute autre chose semblable ; mais : « Il ouvrit son côté », pour nous apprendre qu’il ouvrait ainsi la porte de la vie d’où sont sortis les sacrements de l’Eglise, sans lesquels on ne peut avoir d’accès à la véritable vie. Ce sang a été répandu pour la rémission des péchés ; cette eau vient se mêler pour nous au breuvage du salut ; elle est à la fois un bain qui purifie et une boisson rafraîchissante. Nous voyons une figure de ce mystère dans l’ordre donné à Noé d’ouvrir sur un des côtés de l’arche une porte par où pussent entrer les animaux qui devaient échapper au déluge et qui représentaient l’Eglise (Gn 6, 16). C’est en vue de ce même mystère que la première femme fut faite d’une des côtes d’Adam pendant son sommeil, et qu’elle fut appelée la vie et la mère des vivants. (Gn 2, 22). Elle était la figure d’un grand bien, avant le grand mal de la prévarication. Nous voyons ici le second Adam s’endormir sur la croix, après avoir incliné la tête, pour qu’une épouse aussi lui fût formée par ce sang et cette eau qui coulèrent de con côté après sa mort. O mort, qui devient pour les morts un principe de résurrection et de vie ! Quoi de plus pur que ce sang ? Quoi de plus salutaire que cette blessure ? » (Tr 120, 2).
L’Eglise Corps du Christ.

Il convient d’approfondir cette idée partout développée. Le Temple de Jérusalem, construction de pierres et de bois, n’était pour Augustin qu’une image du vrai Temple qu’est le Corps du Christ (en entendant alors que le Temple est l’assemblée des croyants). En tant qu’ils vivent dans la charité, les fidèles forment tous ensemble l’Eglise qui est ainsi le Corps du Christ. Tous ceux qui croient dans le Christ en aimant « sont comme les pierres vivantes dont le Temple de Dieu est bâti » (Tr. 10). Dans cette perspective prend tout son sens l’expulsion des vendeurs du Temple :
« C’est en figure que le Seigneur a chassé du Temple les hommes qui cherchaient leurs propres intérêts, c’est-à-dire qui allaient au Temple pour vendre et pour acheter. Mais si ce Temple était une figure, il est évident que le corps du Christ, qui est le vrai Temple dont l’autre était une image, renferme aussi des acheteurs et des vendeurs, c’est-à-dire des gens qui recherchent leurs propres intérêts, non ceux de Jésus-Christ. » (Enn. in Ps. 130).
L’union de la Tête et du Corps, du Christ et de l’Eglise n’est pas pour Augustin un image ou une comparaison : il prend toujours cela au sens littéral comme exprimant une réalité mystérieuse et désignant l’organisme vivant que forment ensemble le Christ et l’Eglise avec ses membres. Il dit notamment à propos de la Vigne et des sarments :
« [Le Seigneur] s’exprime en tant que le Christ Jésus homme, médiateur entre Dieu et les hommes est la Tête de l’Eglise et que nous sommes ses membres. La vigne et les sarments sont en effet d’une seule nature : c’est pourquoi, alors qu’il était Dieu, à la nature duquel nous n’appartenons pas, il s’est fait homme pour que la nature humaine soit en lui la vigne dont nous-mêmes, les hommes, nous pourrions être les sarments. » (Tr. 80, 1, vol. 74B, p. 69).
Les apôtres et l’Eglise.
Augustin insiste tout particulièrement sur Pierre et Jean tels qu’ils sont présentés dans la fin de l’Evangile de Jean (Jn, 21). Tous deux sont les figures de l’Eglise, chacun à sa façon.
Pierre à qui sont données les clefs du royaume (pour suivre Jésus : Viens, suis moi)
Jean qui reposa sur Sa poitrine (pour contempler et attendre dans le désir le retour du Christ : « s’il me plaît qu’il demeure… « )
Nous avons un commentaire concernant les caractéristiques symboliques des deux apôtres tout particulièrement dans le Tr 122, mais Augustin revient à diverses reprises sur cette « opposition » significative qui révèle le mystère de l’Eglise : chacun à sa façon est figure de l’Eglise.

Pierre
Le Christ ne confie pas les clefs à Pierre à titre personnel, mais comme un don qu’il fait à son Eglise : « En beaucoup de passages des Ecritures, il apparaît que Pierre joue le rôle de l’Eglise, mais surtout dans ce passage où il est dit : Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu lieras sur la terre sera aussi lié dans le ciel et tout ce que tu délieras sur la terre sera aussi délié dans le ciel [Mt 16, 19]. Est-ce que Pierre a reçu ces clefs et que Paul ne les a pas reçues ? Est-ce que Pierre a reçu ces clefs et que Jacques, Jean et les autres apôtres ne les ont pas reçues ? Ou bien ces clefs ne sont-elles pas dans l’Eglise où chaque jour les péchés sont remis ? Mais parce que Pierre jouait le rôle de l’Eglise en figure, ce qui lui a été donné à lui seul a été donné à l’Eglise. Pierre par conséquent figurait l’Eglise et l’Eglise est le Corps du Christ. » (Sermon 149, 6, 7)
« … si le mystère de l’Eglise ne se trouvait pas symboliquement en Pierre, le Seigneur ne lui dirait pas : Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux ; tout ce que tu délieras sur la terre sera aussi délié dans le ciel et tout ce que tu lieras sur la terre sera aussi lié dans le ciel. Si cette parole a été dite seulement à Pierre, l’Eglise ne le fait pas. Mais s’il se fait aussi dans l’Eglise que ce qui est lié sur la terre est lié dans le ciel et que ce qui est délié sur la terre est délié dans le ciel, puisque, quand l’Eglise prive de sa communion, celui qui est privé de sa communion est lié dans le ciel et que, quand il est réconcilié, celui qui est réconcilié est délié dans le ciel, si donc cela se fait dans l’Eglise, c’est que Pierre, quand il recevait les clefs, signifiait la sainte Eglise. » (Tract L, 12, p. 281).
Jean
« Le disciple que Jésus aimait ». De toute la vie de l’apôtre c’est l’épisode du dernier repas qu’Augustin rappelle le plus souvent et avec le plus d’insistance.
Augustin insiste à maintes reprises sur le type de connaissance donné à Jean qui reposait sur la poitrine du Christ. Nous avons déjà cité dans l’introduction :
« Il reposait à la Cène sur la poitrine du Seigneur pour indiquer par là en signe qu’il buvait les plus profonds secrets à l’intime de son cœur » (Tr 18, 1)
« L’évangéliste Jean ne reposait pas sans cause sur la poitrine du Seigneur, mais pour y boire les secrets de sa plus haute sagesse et reprêcher dans son Evangile ce qu’il avait bu dans son amour. » (Tr 20, 1)
« En le faisant reposer sur sa poitrine, je crois que le Seigneur recommandait plus fortement de cette manière l’excellence divine de cet Evangile qui serait prêché par lui. » (Tr 119, 2)
On peut signaler à ce propos que la traduction de la « Bible Bayard » rapproche explicitement le Prologue et Jn 13, 23-25 :
« Dieu, personne ne l’a jamais vu, mais le Fils unique, Dieu appuyé contre le cœur du Père, l’a raconté. »
« Un des disciples était appuyé contre le cœur de Jésus, le bien-aimé de Jésus : Simon-Pierre lui fait signe de s’informer : De qui peut-il bien parler ? Et lui, appuyé contre le cœur de Jésus demande : Qui est-ce, Seigneur ? » [c'est nous qui soulignons].
Ce repos sur la poitrine est ce qui explique le caractère si singulier des écrits de Jean qui est le seul à souligner aussi profondément l’intimité du Père et du Fils : Le Père et moi nous sommes un, Celui qui m’a vu a vu le Père, etc.
Augustin met explicitement en rapport avec le geste de la Cène, la solennelle proclamation qui ouvre le 4e Evangile :
« A la poitrine du Seigneur Jean buvait les secrets des mystères et, ayant bu à la poitrine du Seigneur, il a reprêché sa divinité : Au commencement était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu. » (Comment. 1ère Epître, 1, 8).
Nous avons déjà signalé le rapport entre « sein » et « secret » que l’on peut établir à partir du mot latin sinus.

 

LE PROBLÈME DE DIEU (même biblique)

30 juillet, 2014

http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Huan/probleme.html

LE PROBLÈME DE DIEU

Il y a trois problèmes dont l’examen s’impose nécessairement à tout homme qui réfléchit et plus particulièrement au Chrétien, parce que tout le destin de sa vie surnaturelle y est engagé : ce sont le problème de Dieu, le problème du Mal et le problème de la Conduite. Que savons-nous de Dieu ? Quelle place le Mal occupe-t-il dans l’ordonnance de l’Univers ? Dans quel livre est contenu le code de vie morale dont l’observance doit conférer à nos actes une valeur d’éternité ? Il ne s’agit pas ici, assurément, d’exposer des thèses philosophiques ou théoriques ni de confronter des systèmes, mais seulement de rechercher ce que signifient pour notre vie intérieure et spirituelle des notions qui possèdent évidemment, du point de vue pragmatique, une importance capitale. Dieu, le Mal, la Conduite humaine, autant de questions auxquelles il faut bien que nous donnions une réponse, si nous voulons êtres assurés de suivre le chemin de la Vérité et de la Vie. Il vaut donc la peine que nous y consacrions quelques instants de réflexion. Aussi bien, que nous le sachions ou non chacun des actes de notre vie quotidienne comporte déjà, à sa manière, une réponse à ces questions.
Nous traiterons aujourd’hui du problème de Dieu.

I Moïse avait demandé à l’Éternel de lui faire voir sa gloire : « Tu ne pourras pas voir ma face, répondit l’Éternel, car l’homme ne peut me voir et vivre. Mais voici une place à côté de moi : tu te rendras sur le rocher. Quand ma Gloire passera, je te cacherai dans le creux du rocher et je te couvrirai de ma main jusqu’à ce que j’ai passé. Puis, je retirerai ma main et tu me verras par derrière ; mais ma face ne peut être vue » (Exode, XXXIII, 20, 23). « Personne, en effet n’a vu le Père, dit Jésus, si ce n’est Celui qui vient du Père » (Jean VI, 46). La « connaissance du vrai Dieu » n’est-elle pas réservée à la vie éternelle ? (Jean, XVII, 3) « Là-haut, nous verrons face à face ; aujourd’hui nous voyons comme dans un miroir, confusément » ; là-haut « je connaîtrai comme je suis connu ; aujourd’hui, je ne connais qu’imparfaitement » (I Cor, XIII, 12).
Ainsi, il nous est donné dès la vie présente de posséder de Dieu une connaissance que l’Écriture qualifie de « vision par derrière ». « Les perfections invisibles de Dieu, dit en effet l’Apôtre, son éternelle puissance et sa divinité, sont depuis la création du monde, aperçues par notre intelligence au moyen de ses oeuvres. » ( Rom I, 20). Cette connaissance de Dieu par ses oeuvres est suffisante assurément, si elle est poussée en profondeur, à nous procurer sur sa nature, ses attributions, sa causalité, des notions dont la certitude est incontestable aux yeux de notre raison. Mais le problème est précisément de déterminer dans quelle mesure une pareille connaissance, toute conceptuelle, nous fait pénétrer dans l’intimité de la Substance divine.
Parce que tout être qui appartient à ce monde est soumis à la loi de l’universel devenir qui fait que rien de stable et de définitif ne peut subsister ici-bas, de sorte que l’être phénoménal évolue nécessairement et se transforme à chaque moment de son existence, poursuivant ainsi d’étape en étape le terme de sa destinée, la raison humaine est contrainte de conclure à la réalité d’un Être qui, situé en dehors de la durée, ne saurait avoir ni commencement ni fin et qui, demeurant de la sorte immuablement identique à lui-même, doit être défini comme l’Absolu, l’Inconditionné, l’Éternel. Mais il s’agit de savoir jusqu’à quel point nous avons dévoilé toute la signification que recèlent ces concepts, lorsque nous les appliquons à Dieu et qu’après les avoir dépouillés de leur terminologie négative, nous nous efforçons d’en saisir la valeur intrinsèque et totale. Il en est de même si, nous élevant du fini à l’Infini, nous formons la notion de l’Être qui, n’étant limité par aucun autre soit dans son essence soit dans sa puissance, possède dans sa véritable plénitude à la fois la perfection de l’essence et la toute-puissance : parce que nous avons posé Dieu en dehors et au delà de tout ce qui pourrait assujettir sa nature et son activité à des déterminations qui le particularisent, avons-nous, compris dans sa réalité profonde ce qui fait de lui l’Infini ?
Ainsi, nous ne pouvons nier que Dieu soit par définition l’Éternel et l’Infini ; mais, parce que nous demeurons en toute circonstance des êtres finis et soumis à la loi du temps, notre idée de Dieu ne peut prétendre en aucun cas s’égaler à l’être même de la Substance Divine. Nous avons bien atteint le plan dialectique où la raison pure forge en toute vérité la chaîne de ses concepts. Nous ne sommes pas allés au delà de ce qu’une intelligence humaine peut comprendre avec les seules puissances de sa nature finie. Et comment le fini pourrait-il comprendre l’Infini, ce qui passe saisir ce qui est en dehors de la .durée ? Entre Dieu et nous il n’y a pas de commune mesure et tout effort serait vain par lequel nous tenterions de nous élever au-dessus de notre raison à l’aide de cette même raison.
II Est-ce à dire que nous en sommes réduits à ne rien savoir de Dieu que ce que nous en apprend une raison enfermée dans le cadre de ses seuls concepts et dont la logique demeure à jamais impuissante à se dépasser elle-même ? Ce qui échappe nécessairement aux prises de notre raison, « Dieu, nous dit St Paul, nous l’a révélé par son Esprit, car l’Esprit pénètre tout, même les profondeurs de Dieu… Personne ne connaît ce qui est en Dieu, si ce n’est l’Esprit de Dieu ». (I Cor,II, 10-12). Et ceux-là seuls reçoivent l’Esprit de Dieu qui, ayant dépouillé le vieil homme, ont été « renouvelés pour la connaissance » (Coloss.III, 10) de sorte qu’ils ne connaissent plus Dieu selon la sagesse du monde, mais dans la sagesse même de Dieu. « Où est le sage ? demande l’Apôtre, où est le docteur ? Où est le dialecticien de ce siècle ? Dieu n’a-t-il pas convaincu de folie la sagesse du monde. Car le monde avec sa sagesse n’a pas connu Dieu dans la sagesse de Dieu x. (I Cor, 20-21).
Cette connaissance de Dieu dans la sagesse de Dieu, demeurée « mystérieuse et cachée durant tous âges », (Coloss..I, 26). mais que Dieu avant tous les siècles avait destinée à notre glorification » (I Cor II, 7) c’est proprement la révélation du Père par le Fils, telle qu’elle est contenue dans le message apporté par le Christ sur la terre à tous les hommes qui, parce qu’ils sont de Dieu, entendent la parole de Dieu.
Sans doute, une première révélation avait été faite aux enfants d’Israël par l’entremise de Moïse ; mais, s’ils ont appris du prophète ce qu’est Dieu, ils n’ont pas connu ce qui est en Dieu, car, selon le témoignage de Celui qui a vu le Père, ils n’ont jamais « entendu Sa Voix, ni contemplé Sa Face ». (Jean, V, 37). Moïse avait dit à Dieu : « J’irai vers les enfants d’Israël et je leur dirai : le Dieu de vos pères m’envoie vers vous ; mais s’ils me demandent quel est son Nom, que leur répondrai-je ? Dieu dit alors à Moïse : « je suis Celui qui suis ». ( littéralement « l’Être est l’Être »). Et Dieu ajouta : « Celui qui est m’envoie vers vous » (Exode, III, 13-14) Sous cette formule ontologique, qui définit Dieu comme l’ « Identité suprême », nous retrouvons cette notion de l’Absolu que la raison nous avait fait déjà entrevoir par la seule logique de ses concepts. Mais Dieu parla encore à Moïse et lui dit : « je suis l’Éternel. je suis apparu à Abraham, à Isaac et à Jacob ,comme le Dieu tout-puissant ; mais je ne me suis pas fait connaître à eux sous mon nom de l’Éternel » ( Exode, VI, 2-3). On lit enfin dans le Décalogue : « je suis l’Éternel ton Dieu… Tu ne prendras pas le Nom de l’Éternel, ton Dieu, en vain ; car l’Éternel ne laissera pas impuni celui qui prendra son nom en vain ». (Exode XX, 2 et 7). Cette appellation de Dieu comme l’Éternel ne se distingue pas essentiellement de celle de l’Être absolu, puisque c’est le propre de l’Être absolu d’être transcendant à toute durée et ainsi de n’avoir ni commencement ni fin ; c’est aussi le propre de l’Être absolu d’être unique, puisque deux Absolus ne pourraient coexister sans contredire la notion même de l’Absolu. Tel est le sens de ce passage du Deutéronome : « Écoute Israël ! l’Éternel, notre Dieu, est le seul Éternel » (Deut, VI, 4).
Absolu, Éternel, Unique, le Dieu qui s’est manifesté à Moïse n’est pas différent de celui-là même que nous avions déjà atteint par la voie métaphysique. Mais, remarque St-Paul, si Moïse a été « fidèle dans toute la maison de Dieu », ce fut « en qualité de serviteur pour communiquer ce qui lui avait été dit »; Celui-là seul a été « fidèle comme Fils à la tête de sa propre maison » (Hébr., III, 5-61), qui « connaît le Père, parce qu’il vient de lui et qu’il a été envoyé par lui » (Jean, VII, 28-29). Écoutons son témoignage, si nous voulons posséder « les paroles de la vie éternelle » (Jean, VI, 69).
III La dialectique de la raison pure nous a appris à connaître Dieu comme 1′Être absolu, éternel, infini, unique, l’Un primordial, l’identité suprême. La révélation faite à Moïse est conforme aux déductions de la logique rationnelle en ce qui touche l’existence de cet Être qui, parce qu’il est l’Incréé, est au-delà de toute existence. Mais suffit-il de connaître l’existence de Dieu pour le connaître vraiment tel qu’il est, c’est-à-dire pour connaître non seulement ce qu’il est, mais encore ce qui est en Lui, à savoir la vie infinie et profonde de sa Personnalité ineffable ? La révélation du Christ va sur ce point découvrir à notre pensée des horizons nouveaux et nous dévoiler quelques aspects de cette vie divine, qui est comme le jaillissement ininterrompu d’une activité débordante et éternellement féconde. Mais la question est de déterminer dans quelle mesure nous serons admis à pénétrer dans ce Saint des Saints où l’on contemple face à face Celui que l’homme ne peut voir sans mourir.
« Nul ne sait qui est le fils dit Jésus, si ce n’est le Père ; ni qui est le Père si ce n’est le Fils et celui qui le Fils a voulu le révéler » (Luc, X, 22). Et qui est le Fils ? « C’est de Dieu que je suis sorti, répond Jésus, et que je suis venu ». (Jean, VIII, 42). Mais les juifs de se récrier : « Quand le Christ viendra, personne ne saura d’où il vient ; nous savons pourtant d’où il est, celui-ci ». Et Jésus de répliquer: « Vous me connaissez et vous savez d’où je suis ! je ne suis pas venu de moi-même, mais Celui qui m’a envoyé est véritable et vous ne le connaissez pas.
Moi je le connais, car je viens de Lui et c’est Lui qui m’a envoyé » (Jean, VII, 26, 29). Aux pharisiens qui l’accusent de se rendre témoignage à lui-même, de sorte que son témoignage n’est pas digne de foi, Jésus répond avec assurance : « Quoique je me rende témoignage à moi-même, mon témoignage est digne de foi, car je sais d’où je suis venu et où je vais ; mais vous ne savez ni d’où je viens ni où je vais ». (Jean, VIII, 13-15). Alors ils lui demandèrent: « Qui donc es-tu ? » Et Jésus de déclarer : « je suis le Principe, moi qui vous parle » (Jean VIII, 25). De cette déclaration, par laquelle Jésus affirme sa divinité comme Fils du Père, rapprochons cette autre : « En vérité, en vérité, je vous le dis ; avant qu’Abraham fût, je suis » (Jean, VIII, 58). N’entendez-vous pas ici un écho de la parole de l’Éternel à Moïse : « je suis celui qui suis » (Exode,III , 13) ?
En déclarant de la sorte que Dieu était son Père, Jésus ne se faisait pas seulement « égal à Dieu », il se présentait comme étant Dieu lui-même : « Comme le Père a la vie en soi, il a donné également au Fils d’avoir la vie en soi ». « Tout ce que le Père fait, le Fils le fait pareillement… De même que le Fils ressuscite les morts et les vivifie, de même aussi le Fils vivifie ceux qu’il veut… Tout ce qu’a le Père est à moi… Celui qui me voit, voit aussi le Père… Moi et le Père, nous ne sommes qu’un » (Jean, passion). Aux scribes alors d’intervenir : « Vous avez dit, Maître, en vérité qu’il n’y a qu’un seul Dieu et qu’il n’y en a pas d’autre que Lui ». (Marc, XII, 32), A cette attaque dirigée contre sa prétention à la divinité, Jésus, enseignant dans le temple, répond par une question : « Comment les scribes disent-ils que le Christ est fils de David ? Car David lui-même a dit par le St Esprit : Le Seigneur a dit à mon Seigneur: assieds-toi à ma droite jusqu’à ce que je fasse de tes ennemis l’escabeau de tes pieds ? Ainsi, David lui-même l’appelle Seigneur ; comment donc est-il son Fils ? » ( Marc, XII, 35-37) ? Le Fils de David est aussi le Fils de Dieu et Dieu lui-même ; il est l’Homme-Dieu, « Roi des rois et Seigneur des Seigneurs » (Apoc., XIX, 16). Et Jésus de rappeler les juifs à l’étude des Écritures : « Scrutez les Écritures, puisque vous pensez avoir en elles la vie éternelle ; ce sont elles aussi qui rendent témoignage de moi ». (Jean, V, 39).
Ce n’est pas tout. Jésus, qui se proclame Dieu le Fils, en union substantielle avec Dieu le Père, nous révèle l’existence d’une troisième Personne divine le St Esprit, qui est à la fois l’Esprit du Père et l’Esprit du Fils et qui, à son tour, comme le Père, rend témoignage au Fils. « Si vous m’aimez gardez mes commandements ; et moi, je prierai le Père et il vous donnera un autre Paraclet afin qu’il demeure éternellement avec vous l’Esprit de vérité… je vous ai dit ces choses pendant que je demeurais avec vous ; mais le Paraclet, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom, vous enseignera toutes choses et vous rappellera tout ce que je vous ai dit… Lorsque le Paraclet, que je vous enverrai de la part du Père, l’Esprit de Vérité qui procède du Père, sera venu, il rendra témoignage de moi… Il vous est utile que je m’en aille, car, si je ne m’en vais pas, le Paraclet ne viendra pas à vous ; mais si je m’en vais, je vous l’enverrai… Quand cet Esprit de vérité sera venu, il vous enseignera toute vérité, car il ne parlera pas de lui-même, mais il dira tout ce qu’il aura entendu et il vous annoncera l’avenir. Il me glorifiera parce qu’il recevra de ce qui est à moi et vous l’annoncera. Tout ce qu’a le Père est à moi, c’est pourquoi j’ai dit : il recevra de ce qui est à moi et il vous l’annoncera. » (Jean, XIV, 16, 26 ; XV, 26 ; XVI, 7, 13).
Ne cherchons ici aucun enseignement dogmatique, aucune doctrine théologique ; ce que le Divin Maître nous révèle, ce sont proprement des faits de l’ordre surnaturel, dont la certitude emprunte son évidence à la qualité de Celui qui parle et qui n’est, autre que la Vérité elle-même, manifestée aux hommes. Aussi, peu nous importe de rechercher si l’Esprit procède, du Père par le Fils ou, à la fois, du Père et du Fils : il nous suffit de savoir que cet Esprit est aussi bien l’Esprit du Fils que l’Esprit du Père, c’est-à-dire qu’il participe à cette Unité substantielle en vertu de laquelle, déjà, le Père et le Fils sont un. Ainsi apparaît au sein de la Substance incréée une trinité de Personnes Divines dont l’existence est d’ailleurs explicitement affirmée dans le suprême commandement de Jésus à ses Apôtres : « Allez, enseignez toutes les Nations, les baptisant au Nom du Père et du Fils et du St Esprit., » (Matth., XXVIII,14)
IV Au nom du Père, du Fils et du St Esprit ! C’est un nom qui nous est donné, et non trois noms, comme s’il s’agissait de trois entités distinctes. Dieu n’a qu’un Nom, il s’appelle Père et Fils et St Esprit. Dans l’Ancien Testament il s’était révélé comme l’Éternel ; dans le message du Christ il se manifeste comme Père, Fils et St Esprit. Mais qu’avons-nous appris de particulier et de précis sur les trois Personnes qui, sans diviser la Substance divine, la font apparaître sous trois visages différents ? Jésus ne nous dit rien à leur sujet, si ce n’est que nous possédons par elles la vie éternelle. N’est-ce pas cela seul qui importe ? La seule chose qui soit nécessaire, tout. le reste devant nous être donné par surcroît ? Sans doute, St Jean nous dira du Fils qu’il est « le Verbe » (Jean, I, et suiv.), St-Paul qu’il est « l’image du Dieu invisible, le reflet de sa Gloire, l’empreinte de sa Substance » (Coloss. I, 15 ; Hébr., I, 3). Maïs ce ne sont là au fond que des mots par lesquels nous nous imaginons soulever le voile qui nous cache le mystère de la Vie divine. St-Paul lui-même rappelle cette parole de l’Écriture : « Ce sont là des choses que l’oeil n’a point vues, que l’oreille n’a pas entendues et qui ne sont pas montées au coeur de l’homme ». (I Cor, II, 9). Dieu n’habite-t-il pas, remarque encore l’Apôtre, une « lumière inaccessible ». (I, Tim, VII, 16) ? Ce sera la béatitude des élus de connaître Dieu tel qu’il est en soi, dans sa Vérité, car ils verront alors toutes choses et Dieu lui-même dans la lumière de Dieu. Ici-bas, nous ne pouvons que l’adorer en esprit et en vérité » (Jean, IV, 24).
Adorer Dieu, en invoquant, en exaltant, en glorifiant son Nom : telle est la seule attitude qui convienne au Chrétien sur la terre en présence de son Créateur. On sait quelle place importante occupe le NOM de Dieu dans l’Écriture sainte et en particulier .dans les Psaumes : « Louez le Nom de l’Éternel ! Que le Nom de l’Éternel soit béni dès maintenant et à perpétuité ! Loué soit le Nom de l’Éternel, du soleil levant au soleil couchant » (Psaume 112, 2-3). « O Éternel ! ton Nom demeure éternellement » (Ps. 134, 13). Le Nom de Dieu est « saint et redoutable » (Ps. 110, 9), « admirable à travers toute la terre » (Ps. 8, 2) « bon » (Ps. 53, 8) « délectable » (Ps. 134, 4) « glorieux » (Ps. 28, 2) « Je célébrerai ton Nom, O Éternel » (Ps. 53, 8) « je bénirai ton Nom, éternellement » (Ps. 144, 1) « Louez le Nom du Seigneur, car le Seigneur est suave » (Ps. 99, 4). « En ton Nom, je lèverai mes mains » (Ps. 62, 5). « En ton Nom, Seigneur, sauve-moi. » (Ps. 53, 3) « Notre secours est dans le Nom du Seigneur » (Ps. 123, 8) « À cause de ton Nom, Seigneur tu pardonneras à mon iniquité » (Ps. 24 et 78).
Ce Nom du Seigneur, qui est invoqué et exalté à toutes les pages de l’Écriture, sans que l’Écriture l’ait pourtant revêtu d’une appellation propre et définitive, (1) c’est le Christ qui nous l’a révélé pour la première fois dans sa pleine signification : « Père juste, le monde ne vous a pas connu, mais moi, je vous ai connu et ceux-ci ont connu que vous m’avez envoyé. Je leur ai fait connaître votre Nom et je le leur ferai connaître, afin que l’amour dont vous m’avez aimé soit en eux et moi aussi en eux » (Jean, XVII, 25-26) « Père… j’ai manifesté votre Nom aux hommes que vous m’avez donnés du milieu du monde » (Jean, XVII, 6). Et quel est ce nom de Dieu que le Christ a manifesté au monde ? « Lorsque vous priez, dit le Maître, n’usez pas de vaines redites, comme font les païens qui pensent être exaucés en parlant beaucoup. Vous donc, priez ainsi : Notre Père qui êtes aux cieux, que votre Nom soit sanctifié. » (Luc. VI, 7, 9)..
Sans doute, Dieu, tel qu’il est en soi, porte « un Nom secret, que personne ne connaît que lui-même » (Apoc. XIX, 13) et « Roi des Rois, Seigneur des Seigneurs » (Apoc. XIX, 16), le Père a été manifesté par le Fils, de sorte que celui qui a vu le Fils a vu aussi le Père (Jean, XIV, 9) et que quiconque aime le Fils sera aimé du Père (Jean, XIV, 21).. Ne suffit-il pas, dès lors, que nous demeurions dans le Fils pour que le Père aussi demeure en nous ? « je prie, dit Jésus, pour ceux qui doivent croire en moi, afin que tous soient un, comme vous, Père, êtes en moi et moi en vous, afin qu’ils soient, eux aussi, un en nous » (Jean XVII, 20). Et, puisque ainsi personne ne vient au Père si ce n’est par le Fils (Jean, XIV, 6), que le Fils est « la Voie, la Vérité et la Vie », il nous faut garder sa parole et ses commandements, si nous voulons posséder en Lui, par le Père, dans l’Esprit-Saint, la vie éternelle.

GABRIEL HUAN.
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(1) On rencontre dans l’Écriture dix noms différents de Dieu : Elieh, Iah, Jehovah, El, Eloha, Elohim, Jevé, Sabaoth, Shadaï, Adonaï.

LE PARADOXE DES BÉATITUDES (MATTHIEU 5,1-12)

8 juillet, 2014

http://www.bible-service.net/extranet/current/pages/523.html

LE PARADOXE DES BÉATITUDES (MATTHIEU 5,1-12)

COMMENTAIRE AU FIL DU TEXTE   Commencer

Jésus n’annonce pas un bonheur ou un malheur mais plutôt une manière paradoxale de vivre ce qui nous apparaît comme bonheur ou malheur.   Au fil du texte : Un bonheur paradoxal Selon Matthieu, c’est le début du premier discours de Jésus. La série des Béatitudes est donc un commencement. Un commencement au même titre que d’autres commencements dans la Bible ? La parole de Dieu est au commencement de toute la création (Gn 1). Elle dit et fait ce qu’elle dit, mais ce n’est pas une béatitude. Et cependant, à la fin de chaque étape de la création, Dieu voit que tout cela est bon… D’une montagne à l’autre Autre commencement majeur : le don de la Loi, l’alliance du Sinaï (Ex 19-24). Cela se passe sur la montagne et, pour la conclusion de l’alliance, Moïse est assis pour un repas avec 70 des anciens d’Israël : cela ressemble un peu à Jésus assis sur la montagne avec ses 12 disciples. Les premières phrases de l’alliance du Sinaï, ce sont les Dix Paroles (le Décalogue, Ex 20). Elles commencent par un tout petit récit :  »…je t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude » qui rappelle à tout Israël les merveilles de l’Exode. Mais il s’agit d’autre chose sur la montagne avec Jésus : non le récit des merveilles du passé, mais la déclaration des béatitudes. C’est une autre manière de faire naître un peuple, une manière qui s’adresse à tous, pas seulement à Israël libéré par YHWH (Le Seigneur). Une joie inouïe Suivons le fil du texte de Mathieu. Le mot  »heureux » revient neuf fois. Une liste à neuf termes, cela paraît une liste incomplète (rappelons-nous les Dix Paroles !). Mais la liste des béatitudes s’achève par l’injonction du v. 12 :  »Soyez dans la joie et l’allégresse… » Ainsi est explicité le mot  »heureux » : ceux et celles que Jésus déclare heureux, répondront à cette déclaration en se tenant dans la joie et l’allégresse. Paradoxe des béatitudes : ceux et celles que Jésus déclare heureux ne se croyaient sans doute pas tels ! Mais que Jésus le leur déclare et cela engendre en eux une joie inouïe. notons que les deux dernières déclarations de Jésus (v. 11-12) diffèrent des précédentes. Elles s’adressent à un  »vous » :  »Heureux êtes-vous lorsque… » Alors qu’il paraissait s’adresser à la foule, Jésus se tourne-t-il maintenant vers quelques-uns en particulier ? Difficile à savoir. L’important, c’est qu’en s’adressant à quelques-uns ( »vous »), Jésus parle aussi de lui :  »…à cause de moi ». Le secret des déclarations de Jésus tient dans la relation entre lui et ceux à qui il parle. Si les béatitudes parlent à tout homme et lui disent qu’il a vocation – paradoxale – à être heureux, la joie et l’allégresse qui couronnent ce paradoxe sont le fruit de la relation à Jésus :  »…à cause de moi ». Un avenir ouvert L’ensemble des huit premières béatitudes (v. 3-10) est délimité par la mention du Royaume des cieux (v 3.10), introduit par un verbe au présent :  »…à eux est le Royaume des cieux » alors que toutes les autres (v. 4-9) emploient un verbe au futur :  »ils hériteront… seront consolés… etc. » Les béatitudes sont des déclarations qui valent pour le présent :  »Le Royaume des cieux (ou de Dieu) est parmi vous » ne cessera de proclamer Jésus sur les routes de Galilée. Et cette présence du Royaume dans notre présent nous ouvre un avenir : hériter, être consolé, être rassasié… Les béatitudes sont formulées de manière constante :  »Heureux ceux qui… ». Ceux qui sont déclarés heureux sont caractérisés par un adjectif (par un état) : pauvre en esprit, doux, affligé, pur de cœur, ou bien par un verbe (par une action) : avoir faim et soif, faire miséricorde, faire la paix, être persécuté. Cette manière de formuler les choses rappelle, par contraste, les malédictions proclamées autrefois par les prophètes :  »Malheur à ceux qui… » (cf. par ex. Am 5,18 et 6,1 ou la liste de sept malédictions en Is 5,8-25 et 10,1-4). À leurs contemporains stigmatisés ainsi pour leurs injustices, les prophètes annoncent pour conséquence un grand malheur. Au fond, les béatitudes ont quelque chose de prophétique. A ceci près que le prophète Jésus n’annonce pas un malheur mais plutôt une manière paradoxale de vivre ce qui nous apparaît comme malheur, à savoir être persécuté à cause de lui ! Il est possible de vivre toute notre vie avec l’allégresse au cœur à cause de lui et avec lui, si nous nous attachons à lui pour apprendre de lui comment vivre ce paradoxe. La justice du Royaume De qui parle Jésus ? Les quatre premières béatitudes s’adressent à des personnes qui vivent manifestement un manque : être pauvre (ou humble, voire humilié), être doux (sans violence ?), être affligé, avoir faim et soif… de justice ! Le manque fondamental, en fait, est celui de la justice et il donne sens à tous les autres. Les quatre béatitudes suivantes restent dans la thématique de la justice, mais cette fois au niveau d’un  »engagement » : faire miséricorde, être pur de cœur, faire la paix, être persécuté à cause du combat pour la justice. Sous différentes facettes, on peut dire que les béatitudes déclarent heureux ceux et celles pour qui la justice (du Royaume, cf. Mt 5,20) est un enjeu majeur. Si les prophètes dénonçaient ceux qui pratiquaient l’injustice, Jésus déclare heureux ceux qui placent au centre de leur vie le souci de la justice. Dans cette perspective, il faut noter enfin que Jésus parle très concrètement : de l’esprit (ou du souffle), du cœur, d’avoir faim et soif, du regard (et des pleurs). Le paradoxe par lequel Jésus déclare heureux ceux et celles qui ne se pensaient pas tels, mais qui sont concernés par la justice, touche au plus intime de notre être. Car ce paradoxe a quelque chose à voir avec la relation à Dieu : voir Dieu (v. 8), être appelé fils de Dieu (v. 9). En faisant confiance aux déclarations des béatitudes, à la suite de Jésus qui nous ouvre ce chemin, ce qui nous est promis n’est rien de moins que la joie et l’allégresse d’une relation filiale avec Dieu.

Jean-Marie CARRIÈRE.

DIMANCHE 25 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – PIERRE APÔTRE 3, 15 – 18 Frères

23 mai, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

DIMANCHE 25 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT

DEUXIEME LECTURE – PREMIÈRE LETTRE DE SAINT PIERRE APÔTRE 3, 15 – 18

Frères
15 c’est le Seigneur, le Christ,
que vous devez reconnaître dans vos coeurs
comme le seul saint.
Vous devez toujours être prêts à vous expliquer
devant tous ceux qui vous demandent
de rendre compte de l’espérance qui est en vous ;
16 mais faites-le avec douceur et respect.
Ayez une conscience droite,
pour faire honte à vos adversaires
au moment même où ils calomnient
la vie droite que vous menez dans le Christ.
17 Car il vaudrait mieux souffrir pour avoir fait le bien,
si c’était la volonté de Dieu,
plutôt que pour avoir fait le mal.
18 C’est ainsi que le Christ est mort pour les péchés,
une fois pour toutes :
lui, le juste, il est mort pour les coupables
afin de nous introduire devant Dieu.
Dans sa chair, il a été mis à mort ;
dans l’esprit, il a été rendu à la vie.

A lire entre les lignes de ce texte, on peut imaginer que les interlocuteurs de Pierre connaissaient beaucoup de vexations et de moqueries de la part des païens. Ils ne rencontraient pas une persécution déclarée, mais une hostilité latente ; il leur fallait s’expliquer chaque fois qu’ils refusaient certaines pratiques païennes, comme les sacrifices aux divinités par exemple.
Pierre leur dit ici : « Frères, c’est votre tour maintenant, de vous conduire comme le Christ s’est conduit ». Lui aussi a connu les accusations, les calomnies, les menaces, mais il n’a pas dévié ; à votre tour, vous devez être capables de répondre à vos adversaires.
D’où leur viendra cette audace ? Oh, c’est bien simple : les Chrétiens n’ont qu’une source, qu’un argument, qu’un discours : le Christ est mort et ressuscité. Pierre ne dit pas autre chose : « C’est le Seigneur, le Christ que vous devez reconnaître dans vos coeurs comme le seul saint… Le Christ est mort pour les péchés, une fois pour toutes : lui, le juste, il est mort pour les coupables afin de nous introduire devant Dieu. Dans sa chair, il a été mis à mort ; dans l’esprit, il a été rendu à la vie. »
La chair, en langage biblique, cela veut dire « la faiblesse humaine », le fait d’être mortel ; ses ennemis ne pouvaient l’atteindre que là ; ils ne peuvent rien contre l’esprit d’amour qui est le principe même de la vie : parce qu’il était rempli de l’Esprit de Dieu, la mort ne pouvait le retenir en son pouvoir, comme dit Paul ; au contraire, l’Esprit lui a fait traverser la mort biologique et a fait surgir en lui la vie, parce que l’Esprit qui s’est manifesté sur lui au jour du baptême est l’Esprit de vie…
C’est ce même Esprit qui est entré en nous lors de notre Baptême : désormais, nous le savons, nous le croyons, parce que nous l’avons vu réalisé en Jésus-Christ, le mal, la haine sont vaincus, la vie est plus forte que la mort ; c’est cela l’espérance des chrétiens ; celle dont Pierre dit que nous devons pouvoir en rendre compte à tout moment ; le Christ avait bien dit à ses Apôtres : « Confiance, j’ai vaincu le monde ». Le témoignage que le monde attend de nous, c’est : le mal n’est pas une fatalité ; le monde attend de nous que nous ne baissions jamais les bras devant le mal, la haine, la violence.
Quand Pierre affirme « Le Christ est mort pour les péchés, une fois pour toutes », l’expression « une fois pour toutes » est un cri de victoire : le monde du mal et du péché est définitivement vaincu dans l’obéissance du Fils.
Pierre lie fortement les deux étapes du témoignage du chrétien : ce qui se passe dans le secret du coeur, dans la prière ; et le courage de parler ; l’un ne va pas sans l’autre. « C’est le Seigneur, le Christ que vous devez reconnaître dans vos coeurs comme le seul saint ». Voilà la première étape, ce qui se passe en nous, dans le secret de la prière.
La deuxième étape, c’est d’oser dire notre espérance, être prêts à dire « ce qui nous fait courir », dirait-on aujourd’hui. « Vous devez toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en vous ». Si je comprends bien, Pierre nous conseille de ne pas parler en premier ; pour lui, nous devons nous contenter de répondre aux questions de notre entourage. Il dit bien : « Vous devez être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent… »
Cela fait penser à une phrase dont je ne connais pas l’auteur, mais qui est très suggestive : « Ne parle que si on t’interroge, mais vis de manière à ce qu’on t’interroge. »
Les interrogations ne germeront que si notre vie tout entière est un témoignage d’espérance : alors ceux qui nous voient vivre se demanderont immanquablement d’où nous vient notre espérance indestructible. Nous ne pouvons témoigner de Jésus-Christ que si nous avons d’abord vécu l’espérance. Ce qui veut dire que notre témoignage se fait d’abord en actes et non en paroles. Etre rendus capables de mener notre vie d’une manière renouvelée est certainement le témoignage le plus urgent.
C’est peut-être dans ce sens-là qu’on peut comprendre la phrase de Jésus : « Que votre lumière brille aux yeux des hommes, pour qu’en voyant vos bonnes actions, ils rendent gloire à votre Père qui est aux cieux » (Mt 5, 16). Vous connaissez aussi la phrase de Paul VI qui est une variation sur le même thème : « Nos contemporains ont besoin de témoins et non de maîtres… et ils n’écoutent les maîtres que s’ils sont des témoins ».
Ce témoignage n’est pas fanfaronnade : « Faites-le avec douceur et respect », comme dit Pierre. Cette douceur et ce respect qui ne doivent pas nous quitter peuvent nous faire comprendre la phrase suivante : « Ayez une conscience droite pour faire honte à vos adversaires … »
« Faire honte » : curieuse expression, quand même : on ne peut évidemment pas penser que des chrétiens, vivant le commandement d’amour du Christ, n’aient d’autre but que de faire honte aux autres au sens où nous l’entendons habituellement ; ce dont il s’agit, c’est de donner un tel témoignage de foi, d’espérance et d’amour mutuel, que d’autres soient amenés à remettre en question leurs calomnies. Peut-être alors s’ouvriront-ils à la conversion.
Finalement, le programme que Pierre trace à ses disciples, c’est le programme même du Christ, c’est-à-dire le programme du Serviteur que décrivait le prophète Isaïe : le prophète disait : « Il ne crie pas, il n’élève pas le ton », Pierre en écho conseille « agissez avec douceur et respect » ; mais en même temps, quoi qu’il arrive, ce serviteur décrit par Isaïe ne se laisse pas décourager : à son tour Pierre insiste : « Vous devez toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en vous ».

 

DIMANCHE 18 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – DEUXIEME LECTURE

16 mai, 2014

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DIMANCHE 18 MAI : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – DEUXIEME LECTURE

DEUXIEME LECTURE – Première lettre de saint Pierre Apôtre 2, 4-9

Frères,
4 approchez-vous du Seigneur Jésus :
il est la pierre vivante, que les hommes ont éliminée,
mais que Dieu a choisie parce qu’il en connaît la valeur.
5 Vous aussi, soyez des pierres vivantes
qui servent à construire le Temple spirituel,
et vous serez le sacerdoce saint,
présentant des offrandes spirituelles
que Dieu pourra accepter
à cause du Christ Jésus.
6 On lit en effet dans l’Ecriture :
Voici que je pose en Sion une pierre angulaire, une pierre choisie et de grande valeur ;
celui qui lui donne sa foi ne connaîtra pas la honte.
7Ainsi donc, honneur à vous qui avez la foi,
mais, pour ceux qui refusent de croire, l’Ecriture dit : La pierre éliminée par les bâtisseurs
est devenue la pierre d’angle,
une pierre sur laquelle on bute,
8un rocher qui fait tomber.
Ces gens-là butent en refusant d’obéir à la Parole,
et c’est bien ce qui devait leur arriver.
9 Mais vous, vous êtes la race choisie,
le sacerdoce royal,
la nation sainte,
le peuple qui appartient à Dieu ;
vous êtes donc chargés d’annoncer les merveilles
de celui qui vous a appelés des ténèbres
à son admirable lumière.

C’est le même verbe en hébreu qui signifie « fonder sa famille », « fonder une société » ou « construire une maison ». Pas étonnant donc que dès l’Ancien Testament, les prophètes, et en particulier Isaïe, aient volontiers comparé la croissance de la communauté des croyants à un édifice en construction. Dieu a jeté les fondations de ce grand projet depuis le premier jour de l’histoire humaine ; et le Messie sera la pierre maîtresse de cette construction.
Pierre, à son tour, reprend cette comparaison pour parler du Christ. Imaginez un gigantesque chantier de construction : le monument se dessine déjà. Jésus, le Messie, est bien la pierre la plus précieuse que Dieu a mise au centre de l’édifice ; et à tous les hommes, il est proposé de devenir des pierres du monument ; ceux qui acceptent de faire corps avec lui sont intégrés à la construction, ils deviennent eux-mêmes des éléments porteurs.
Mais, bien sûr, c’est un choix à faire et les hommes peuvent tout aussi bien faire le choix inverse, c’est-à-dire refuser le projet et même le saboter. Tout se passe alors pour eux comme si la pierre maîtresse n’était pas au coeur de l’édifice ; elle est restée par terre, bloc admirable, mais encombrant sur le chantier : « La pierre éliminée par les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle, une pierre sur laquelle on bute, un rocher qui fait tomber. »
Notre Baptême a été l’heure du choix, si j’ose dire ; désormais, nous sommes intégrés à la construction de ce que Pierre appelle le Temple spirituel ; par opposition au Temple de pierre de Jérusalem où l’on célébrait des sacrifices d’animaux. On sait bien que depuis le début de l’histoire, l’humanité cherche à rejoindre Dieu en lui rendant le culte qu’elle croit digne de lui ; au fur et à mesure de son expérience historique, le peuple élu a découvert le vrai visage de Dieu et a appris à vivre dans son Alliance. Et peu à peu, à la lumière de l’enseignement des prophètes on a découvert que le vrai temple de Dieu est l’humanité et que le seul culte digne de lui est l’amour et le service des frères et non plus des sacrifices d’animaux.
Mais voilà qui nous engage terriblement : Le Temple de Jérusalem était le signe de la présence de Dieu dans son peuple… désormais le signe visible aux yeux du monde de la présence de Dieu, c’est nous, l’Eglise du Christ. La phrase de Pierre résonne donc à nos oreilles comme une vocation : « Vous aussi, soyez les pierres vivantes qui servent à construire le Temple spirituel. »
Encore une précision : « On lit dans l’Ecriture : Voici que je pose en Sion une pierre angulaire, une pierre choisie et de grande valeur ; celui qui lui donne sa foi ne connaîtra pas la honte… Mais pour ceux qui refusent de croire, l’Ecriture dit : La pierre éliminée par les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle, une pierre sur laquelle on bute, un rocher qui fait tomber ». Il s’agit bien d’un choix, qui met en oeuvre notre liberté, il ne s’agit pas de prédestination. Pierre distingue entre ceux qui donnent leur foi au Christ et ceux qui refusent de croire. « Donner sa foi », « refuser de croire » sont deux actes libres. Pierre ajoute « ces gens-là butent en refusant d’obéir à la Parole, et c’est bien ce qui devait leur arriver » ; cette dernière phrase dit seulement la conséquence de leur choix libre mais pas une décision arbitraire de Dieu : le Dieu libérateur ne peut que respecter notre liberté.
Lors de la Présentation de Jésus au temple, Syméon l’avait annoncé à Joseph et Marie : « Il est là pour la chute ou le relèvement de beaucoup en Israël et pour être un signe contesté. » (Luc 2, 34). Précisons tout de suite que lorsque Syméon dit « il est là pour la chute ou le relèvement de beaucoup », il dit non une nécessité exigée par Dieu, mais les conséquences de la venue de Jésus. Effectivement, sa présence a été pour certains occasion de conversion complète, tandis que d’autres se sont endurcis.
Pierre conclut : « Mais vous, vous êtes la race choisie, le sacerdoce royal, la nation sainte, le peuple qui appartient à Dieu. » Au jour de notre baptême, nous avons été greffés sur le Christ : le rituel du Baptême dit : « Vous êtes devenus membres du Christ, prêtre, prophète et roi ». Cela ne veut pas dire que chacun de nous est désormais prêtre, prophète et roi. Le Christ est le seul prêtre, prophète et roi, et nous sommes greffés sur lui, nous sommes membres de son Corps. Par le Baptême, nous avons été agrégés à ce peuple saint, « naturalisés » si vous préférez. Nous avons acquis ce jour-là une nouvelle nationalité, celle du peuple de Dieu ; notre hymne national, désormais, c’est l’Alleluia ! Pierre termine en nous disant « Vous êtes donc chargés d’annoncer les merveilles de celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière ».

L’HOMME ICÔNE DE DIEU – … selon saint Jean : (14,23-29)

15 mai, 2014

http://www.philagora.fr/religion/16-05-04.htm

L’HOMME ICÔNE DE DIEU

par Jean Baptiste Blondeau – (le 16 – 05 – 04)

Evangile de Jésus Christ selon saint Jean : (14,23-29)

À L’HEURE OÙ JÉSUS PASSAIT de ce monde à son Père, il disait à ses disciples:  » Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole; mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui. Celui qui ne m’aime pas ne restera pas fidèle à mes paroles. Or, la parole que vous entendez n’est pas de moi : elle est du Père, qui m’a envoyé.
Je vous dis tout cela pendant que je demeure encore avec vous ; mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.
C’est la paix que je vous laisse, c’est ma paix que je vous donne; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Ne soyez donc pas bouleversés et effrayés. Vous avez entendu ce que je vous ai dit : Je m’en vais, et je reviens vers vous. Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie puisque je pars vers le Père, car le Père est plus grand que moi. Je vous ai dit toutes ces choses maintenant, avant qu’elles n’arrivent ; ainsi, lorsqu’elles arriveront, vous croirez. »

L’homme icône de Dieu.
« Comment aimer quelqu’un qu’on ne voit pas ? Nous avons un si ardent besoin de présence. Et de présence sensible. Voir, sentir, toucher, étreindre. L’absence est toujours un déchirement, quoiqu’en disent les belles formules que l’on trouve pour se consoler, se faire une raison quand l’absence est inéluctable, voire définitive, comme tous ces deuils qui peu à peu retranchent de notre vie tous ceux qui y laissent l’indélébile cicatrice de leur manque.
Alors comment aimer Dieu ? Et même comment aimer Jésus sans que ce ne soit que paroles des lèvres et non du coeur ? Les mots d’amour éclatent dans la rencontre et dans l’étreinte.
D’abord en reconnaissant que dans toute présence, il y a toujours une absence. Dans tout amour, une solitude. Inévitable, plus encore nécessaire. On aime vraiment qu’en gardant les mains ouvertes. Quand la main se referme pour retenir, elle ne retient qu’un sable qui s’écoule et disparaît. Aimer l’autre, c’est le désirer, donc le garder toujours à distance. C’est son mystère que nous aimons, cette profondeur qui au coeur de son être fait qu’il ne peut jamais être un objet que nous posséderions, dont nous aurions fait le tour. Cet amour là est impossible , il est faux, il manque toujours , ce dont en définitive il cherche à faire sa proie. L’amour ne peut jamais être une possession. C’est l’esprit du mal qui « possède », ce non-amour qui divise mortellement et tue le désir dans les fausses délices des idolâtries trompeuses.
Dieu que nous aimons, parce que nous l’affirmons: l’absolu de l’amour, sera en un sens l’absolu de la distance, de l’altérité, de l’absence, pour être l’absolu de ce désir qu’il met en nos coeurs et que nous appelons la foi. Déjà la vieille Bible affirmait « nul ne peut voir Dieu sans mourir ». Le prophète Élie, modèle de la mystique amoureuse, le pressentait dans un souffle léger qui passait derrière lui, hors de son regard.
Aimer Dieu, pour un chrétien, c’est aimer le Christ. « Qui me voit, voit le Père » dira Jésus à Philippe. Le Christ est pour nous la porte du mystère, la porte de cette absence infinie qui aimante l’aspiration de notre foi, de ce désir de vie, de sens, d’éternité qui de façon poignante étreint le coeur de l’homme. Or nous dit l’Écriture, aimer le Christ c’est rester fidèle à sa parole. La parole, toujours, institue la présence. Et la parole qu’Il nous laisse, celle qui en elle contient toutes les autres, c’est « de nous aimer les uns les autres ». La parole nous dit que cet amour pour le Christ que nous ne voyons pas, et « heureux ceux qui croit sans avoir vu », se matérialise, se concrétise dans notre amour pour le prochain. Qui est mon prochain ? Tout être humain dont je « m’approche », non pour le posséder, mais pour le servir dans cette dépossession de moi-même qui est en vérité la véritable « dé-possession » du Malin. L’amour exorcise la mal. Depuis l’incarnation nous pouvons reconnaître que toute humanité est présence du Christ, et par conséquent présence de Dieu. L’amour de Dieu est ce qui me fait aller vers l’autre pour le servir mais sans jamais le retenir. L’homme, mon frère, en Christ devient la véritable icône de Dieu. Il y faut seulement l’élan de notre liberté et de notre confiance, et vouloir tendre les mains vers ces plaies qui sont la marque de l’amour. »

Père BLONDEAU

DIS-MOI, SEIGNEUR, CE QUE JE DOIS FAIRE – (JEAN 14, 7).

12 mai, 2014

http://www.interbible.org/interBible/cithare/intuitions/2005/int_050419.htm

DIS-MOI, SEIGNEUR, CE QUE JE DOIS FAIRE

PUISQUE VOUS ME CONNAISSEZ, VOUS CONNAÎTREZ AUSSI MON PÈRE (JEAN 14, 7).

Un de ces dimanches, à l’église, bien recueilli dans mon banc, j’écoutais mon pasteur parler des besoins que la paroisse avait de trouver quelques personnes pour enseigner aux adolescents les connaissances de la Bible. Dieu vint s’asseoir près de moi et me dit : « Mon fils c’est pour toi ce travail » « Mais Seigneur, c’est une chose que je ne peux faire, je suis trop gêné pour être en avant d’une classe! Je pense que c’est Robert qu’on devrait demander, il peut tout faire. Non, j’aime mieux entendre l’enseignement d’ici, de mon banc ».
Un autre dimanche, j’entendis mon pasteur dire à la communauté « Nous avons besoin d’un animateur pour faire chanter pendant les célébrations, qui se porte volontaire? » Dieu vint s’asseoir à côté de moi, dans mon banc et me dit : « Mon fils, tu peux faire ça! » « Mais Seigneur, chanter devant une foule, je ne peux pas faire cela, je chante faux, il faut demander à Paul, il a une belle voix, j’aime mieux prier et chanter d’ici, de mon banc ».
Quelques semaines plus tard, mon pasteur avait encore une demande à faire : « Nous avons besoin de personnes pour accueillir les gens, qui veut bien accepter cette tâche? » Dieu vint de nouveau s’asseoir près de moi, dans mon banc et me dit : « Mon fils, c’est pour toi cette tâche! » « Mais Seigneur, parler à des étrangers, les accueillir, je ne peux faire cela, je ne sais jamais quoi dire, il faudrait demander à Marguerite, pourquoi pas à des femmes, elles ont mieux le tour de faire ça. J’aime mieux que les gens viennent à moi, ici, dans mon banc ».
Les années ont passé bien rapidement et je n’ai plus entendu cette voix qui m’encourageait à m’impliquer. Un soir je m’endormis pour me réveiller aux portes du ciel. Nous étions quatre à entrer dans l’éternité ensemble. Dieu dit : « J’ai besoin de trois personnes : j’ai une tâche bien particulière à confier ». « Seigneur, Seigneur, je vais le faire, il n’y a rien que je ne peux faire pour vous ». Dieu me dit : « Je regrette mon ami, au ciel il n’y a pas de banc d’église » (Auteur inconnu).
LIEN : Au moment de l’adieu, Jésus dit à ses amis, qu’il a vécu au milieu d’eux de la vie même de Dieu. Il est un homme rempli de Dieu : « Je suis dans le Père et le Père est en moi ». L’Évangile qui nous révèle Jésus nous parle de Dieu et comme Philippe, nous ne sommes pas convaincus que nous percevons bien le chemin vers Dieu, la vérité sur Dieu et la vie avec et en Dieu. Pour nous, croire au Dieu de Jésus Christ implique un effort pour modeler notre vie à celle de Jésus. La vérité sur Dieu, que Jésus a révélée au monde, est proclamée aujourd’hui par l’Église qui nous invite à exprimer notre foi dans des gestes de témoignage et des gestes de service aussi, selon les capacités de chacun. La passivité, l’attente, qui font de nous des consommateurs de sacrements, ne sont pas révélateurs d’une foi vivante qui a des chances de se communiquer et d’interpeller les jeunes et ceux qui ne sont pas avec nous en ce dimanche. Le confort de notre banc d’église peut nous fermer les yeux et les oreilles aux appels à servir que la communauté nous adresse.

DIMANCHE 27 AVRIL : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT – Actes des Apôtres 2, 42-47

25 avril, 2014

http://www.eglise.catholique.fr/foi-et-vie-chretienne/commentaires-de-marie-noelle-thabut.html

DIMANCHE 27 AVRIL : COMMENTAIRES DE MARIE NOËLLE THABUT

PREMIERE LECTURE – Actes des Apôtres 2, 42-47
Dans les premiers jours de l’Eglise,
42 les frères étaient fidèles
à écouter l’enseignement des Apôtres
et à vivre en communion fraternelle,
à rompre le pain
et à participer aux prières.
43 La crainte de Dieu était dans tous les coeurs ;
beaucoup de prodiges et de signes
s’accomplissaient par les Apôtres.
44 Tous ceux qui étaient devenus croyants vivaient ensemble,
et ils mettaient tout en commun ;
45 Ils vendaient leurs propriétés et leurs biens,
pour en partager le prix entre tous
selon les besoins de chacun.
46 Chaque jour, d’un seul coeur,
ils allaient fidèlement au Temple,
ils rompaient le pain dans leurs maisons,
ils prenaient leurs repas avec allégresse et simplicité.
47 Ils louaient Dieu
et trouvaient un bon accueil auprès de tout le peuple.
Tous les jours, le Seigneur faisait entrer dans la communauté
ceux qui étaient appelés au salut.

Voilà un flash de la toute première communauté chrétienne comme Saint Luc aime en donner dans les Actes des Apôtres. A plusieurs reprises (j’en compte quatre) il dresse en une ou plusieurs lignes un portrait de ce type ; on dirait des photos de famille, en quelque sorte, des instantanés pris sur le vif.
Additionnés, ils dessinent un portrait qui nous paraît presque idyllique de la vie des premiers chrétiens : assidus à l’enseignement des apôtres et à la prière, vivant dans la louange du Seigneur et mettant tout en commun, semant sur leur passage de multiples guérisons et recrutant sans cesse de nouveaux membres…
Ce qui n’empêche pas Luc de raconter par ailleurs quelques difficultés bien concrètes de ces mêmes communautés… Ananie et Saphire par exemple, qui ont eu du mal à pratiquer jusqu’au bout le partage des biens, et, plus grave encore, les difficultés de coexistence entre Chrétiens d’origine juive et Chrétiens d’origine païenne…
On peut se demander quel message Luc veut nous faire passer en dressant ainsi ces portraits si beaux, presque irréels ? Cela fait penser aux photos de famille des jours de fête qui habillent les murs de nos maisons, les albums de photos ou les pêle-mêle que nous aimons regarder. Evidemment, on a sélectionné les meilleures photos ; en les regardant, nous prenons conscience de la beauté de nos familles et de la joie de certains jours privilégiés.
Pour saint Luc, c’est certainement cela, mais c’est aussi beaucoup plus que cela : c’est la preuve que les temps messianiques sont arrivés. Les apôtres sont devenus capables de vivre en frères, grâce au don de l’Esprit ; voilà, nous dit-il, ce que l’Esprit nous rend capables de faire : lui qui « poursuit son œuvre dans le monde et achève toute sanctification ». Voilà la marque de l’Esprit répandu sur le monde par le Messie : c’est bien ce qu’avaient promis les prophètes. La fraternité, la paix, la justice, l’abolition du mal sont les valeurs du Royaume de Dieu que devait instaurer le Messie ; or les premiers chrétiens en ont donné l’exemple à plusieurs reprises !
C’est donc la preuve que Jésus est bien le Messie attendu, la preuve qu’il a répandu l’Esprit de Dieu sur le monde. Alors on comprend la phrase : « La crainte de Dieu était dans tous les cœurs » : c’est l’émerveillement devant l’œuvre de Dieu. Luc nous dit : voyez mes frères, les premiers signes du Royaume sont bien là ; voilà ce que l’Esprit Saint nous permet de vivre dans nos familles, nos paroisses et nos communautés lorsque nous nous laissons guider par lui dans la lumière de Pâques. Depuis la Résurrection du Christ, l’humanité nouvelle est née, celle qui grandit lentement autour et à l’image du Fils de Dieu. Saint Paul dirait : regardez, nous sommes vraiment ressuscités ! C’est-à-dire « nous vivons vraiment d’une vie nouvelle, le vieil homme (l’ancien comportement) est mort ».
Luc, le païen converti, s’émerveille de l’expansion irrésistible de l’évangile : « Tous les jours, le Seigneur faisait entrer dans la communauté ceux qui étaient appelés au salut ». Je remarque, au passage, que c’est le Seigneur qui les y faisait entrer ! A nous, que nous est-il demandé ? Peut-être, tout simplement, d’être de vraies communautés chrétiennes, dignes de ce nom. Car c’est par sa vie bien concrète que la communauté porte témoignage de la Résurrection du Christ : une vie faite de partage de la Parole et du pain, de prière, de partage de tous les biens de chacun, le tout dans la joie ! C’est le monde à l’envers !
En particulier, le dépouillement personnel et le partage de tous les biens, voilà bien la chose irréalisable pour des hommes ordinaires… à moins qu’ils ne soient habités par l’Esprit de Dieu, celui que le Christ lui-même leur a insufflé. Jésus avait bien dit : « C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres que l’on vous reconnaîtra pour mes disciples ». C’est cela qui prouvera au monde entier que Jésus est vivant ; voilà qui juge une fois pour toutes nos querelles et nos médisances, nos intolérances et nos divisions, nos refus de partager.
Il ne nous est pas interdit, bien sûr, de puiser dans ces beaux portraits des critères de vérification de la qualité de nos propres communautés (familles, équipes, communautés chrétiennes). C’est un peu comme si nous Luc nous disait : A bon entendeur salut !
Car, finalement, c’est bien un programme de vie chrétienne que nous venons d’entendre ; si je compte bien, il y a quatre points : écouter l’enseignement des Apôtres, vivre en communion fraternelle, y compris le partage de tous les biens, rompre le pain et participer aux prières.
Pour finir, il me semble que la très grande Bonne Nouvelle de ce texte, c’est que ce nouveau comportement inspiré par l’Esprit Saint est possible ! Tout comme les photos des jours de fête nous rappellent les possibilités d’amour de nos familles !
Mais cela peut aussi nous inspirer quelques questions : je m’arrête à l’une des expressions de Luc : « Les frères étaient fidèles à rompre le pain ». Nous dirions aujourd’hui l’Eucharistie. Cela veut dire au moins trois choses : d’abord, la messe du dimanche (pour ceux qui ont la chance d’en avoir une à leur portée), est beaucoup plus qu’une obligation, c’est une nécessité vitale ! Parce que la pratique eucharistique est indispensable à chacun d’entre nous pour sa vie de foi ; ensuite, plus grave encore, c’est la communauté qui est privée de l’un de ses membres chaque fois que l’un d’entre nous ne participe pas à l’eucharistie.
Enfin, troisième chose, une communauté est gravement pénalisée quand elle est privée de ce ressourcement régulier : cela pose évidemment tout le problème de tant de communautés chrétiennes privées de prêtre parfois depuis longtemps, pendant que certaines paroisses de ville offrent un large échantillonnage d’heures de messes pour satisfaire toutes les exigences. Nous ne pouvons qu’admirer le dynamisme de la foi de ceux d’entre nous qui savent faire vivre leurs communautés malgré l’absence de prêtre.

L’ÉVANGILE DE JEUDI (LC 24, 35-48)

24 avril, 2014

http://villaloyola.com/fr/node/28

L’ÉVANGILE DE JEUDI (LC 24, 35-48)

24 35 Et eux-mêmes (les disciples d’Emmaüs) leur racontèrent ce qui s’était passé en chemin et comment ils avaient reconnu Jésus au moment où il rompait le pain.
36 Ils parlaient encore, quand Jésus lui-même se présenta au milieu d’eux et leur dit : « La paix soit avec vous! » 37 Ils furent saisis de crainte, et même de terreur, car ils croyaient voir un fantôme. 38 Mais Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous troublés ? Pourquoi avez-vous ces doutes dans vos coeurs ? 39 Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi ! Touchez-moi et voyez, car un fantôme n’a ni chair ni os, contrairement à moi, comme vous pouvez le constater. » 40 Il dit ces mots et leur montra ses mains et ses pieds.
41 Comme ils ne pouvaient pas encore croire, tellement ils étaient remplis de joie et d’étonnement, il leur demanda : « Avez-vous ici quelque chose à manger ? » 42 Ils lui donnèrent un morceau de poisson grillé. 43 Il le prit et le mangea devant eux.
44 Puis il leur dit : « Quand j’étais encore avec vous, voici ce que je vous ai déclaré : ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les livres des Prophètes et dans les Psaumes, tout cela devait se réaliser. » 45 Alors il leur ouvrit l’intelligence pour qu’ils comprennent les Écritures, 46 et il leur dit : « Voici ce qui est écrit : le Messie doit souffrir, puis se relever d’entre les morts le troisième jour, 47 et il faut que l’on prêche en son nom devant toutes les nations, en commençant par Jérusalem ; on appellera les humains à changer de comportement et à recevoir le pardon des péchés. 48 Vous êtes témoins de tout cela.

Commentaire
Quand nous recevons un don du Seigneur, nous ne devons jamais le conserver pour nous-mêmes ; nous avons le devoir de le partager. À la suite de l’apparition du Ressuscité, les disciples d’Emmaüs « se levèrent aussitôt et retournèrent à Jérusalem », afin de partager leur joie avec les amis du Christ Jésus. De même, l’ensemble des disciples, à Jérusalem, « remplis de joie et d’étonnement », reçoivent la mission de « prêcher en son nom devant toutes les nations. »

Une joie partagée
Revenus à Jérusalem, les disciples d’Emmaüs y retrouvent les onze apôtres, « qui étaient réunis avec leurs compagnons ». Il est significatif de noter que l’apparition du Christ ressuscité, l’enseignement et la mission que celui-ci leur adresse ne visent pas seulement un groupe restreint, mais tous les disciples. L’apparition n’est pas ici le privilège exclusif des apôtres, mais aussi de leurs compagnons, qui représentent tous les futurs chrétiens. La mission n’est pas le devoir des seuls dirigeants de l’Église, mais de tous les fidèles.
Les disciples reviennent en vitesse d’Emmaüs pour communiquer leur foi et leur joie avec ceux qui étaient demeurés à Jérusalem. Une foi solitaire est fragile et peut disparaître sous l’effet du premier doute. Luc notera régulièrement dans le Livre des Actes la joie de croire des communautés chrétiennes.

La foi ou la peur
Pourquoi la frayeur accompagne-t-elle le refus de croire? On est effrayé quand on craint pour sa sécurité, pour son existence. On ressent une impression de faiblesse devant un danger qui menace sa personne. La peur a sévi dans notre humanité depuis l’époque pré¬historique jusqu’à nos jours.
Le croyant adhère à la seule Personne absolue, le « Roc », qui offre la sécurité parfaite. Aussi la crainte de Dieu élimine toute autre crainte. Celui qui ne croit pas se coupe de cette sécurité et s’en remet à ses seules forces.
Jésus ressuscité souhaite la paix à ses disciples, mais ceux-ci, qui n’ont pas la foi, qui pensent voir un fantôme, « sont saisis de crainte et même de terreur. » Lorsque Jésus les amène à croire qu’il est réellement ressuscité, ils sont « remplis de joie et d’étonnement. »

B. Résurrection de la personne entière
La résurrection suppose que deux conditions soient remplies. C’est la même personne qui est morte et qui est ressuscité, non pas un nouvel être, après la disparition de la première. Ce n’est pas une nouvelle personne créée par Dieu, qui se substituerait à la précédente. La personne du Christ Jésus est transformée complètement (âme et corps), et non pas seu¬lement réanimée.
Selon l’hypothèse populaire de la réincarnation, l’âme immortelle revit dans un autre corps. Mais comment la personne humaine pourrait-elle se réincarner dans un autre corps et de¬meurer la même? Son corps fait-il ou non partie de son identité personnelle?
Le Christ veut prouver aux disciples qu’il est bien celui qu’ils ont connu ; il leur montre « ses mains et ses pieds ». Pour dissiper leurs derniers doutes qu’il est corporellement ressuscité, il mange devant eux. Luc est l’évangéliste qui insiste le plus sur la réalité physique du Christ ressuscité. Au début de Livre des Actes, c’est au cours d’un repas avec ses disciples qu’il leur donne ses directives. (Act 1,4) Dans sa catéchèse à la famille du centurion Corneille, Pierre déclare : « Nous avons mangé et bu avec lui après que Dieu l’a relevé d’entre les morts. » (Act 10,41)

Les vérités majeures de la mission chrétienne
Jésus ressuscité résume l’essentiel de sa mission, car il donne à ses disciples de poursuivre son propre ministère. Jésus a enseigné et œuvré pendant trois ans à peine, peut-être moins, mais il a associé ses disciples à sa mission pour la prolonger à travers les siècles. Le Livre des Actes aura précisément pour but de décrire le développement historique de cette évangélisation, dont l’Église est l’héritière jusqu’à la fin des temps.
1. Jésus affirme tout d’abord qu’il a accompli la Loi, les prophètes et les paumes. Le Christ avait développé ce même thème de l’accomplissement pour les disciples d’Emmaüs (Luc 24, 25-27). Conscients qu’ils prolongent la mission de leur Maître, les premiers disciples reprendront ce même thème. (Act 2, 23-32; 4, 10-11; 13, 28-29.33-37; 26, 22-23).
Cette insistance sur l’accomplissement des prophéties par le Christ ne répond pas seulement au besoin de montrer que l’Evangile n’est pas une innovation sans racine. On veut surtout démontrer l’unité de toute l’histoire du salut, dirigée par un seul auteur, Dieu. Cette unité de l’histoire dépend de la fidélité de Dieu à ses promesses de vie et de bonheur.
La continuité de l’histoire individuelle et collective est es¬sentielle, car l’être humain est trop pauvre pour se disperser sur des objectifs divers et successifs. Il se divise dans la mesure où il change de but dans sa vie. La seule réussite possible suppose une orientation fondamentale au début et la fidélité à cette orientation.
2. Toutes les Ecritures attestent le même schéma: l’alternance acceptée librement de mort et de résurrection, de souffrance et de bonheur (24, 7.26).
3. La conversion est la condition pour entrer en communion avec Dieu. La conversion consiste à se détourner de tout ce qui n’entre pas dans le plan de Dieu , le chemin qu’il a prévu pour le bonheur de chaque personne qu’il appelle. Les prophètes répètent le même appel à se convertir. Jean Baptiste et le Livre des Actes reprennent sans cesse ce thème fondamental. (2, 38; 3, 19; 5, 31; 10, 43; 13, 38-39; 26, 18). Le pardon des péchés exprime, sous une forme juridique, la dimension négative, qui permet l’ouverture positive de la foi, communion avec Dieu, présent dans son Fils, le Christ ressuscité.
4. « A toutes les nations ». L’universalisme est vital pour Luc. Du côté de la personne humaine, aucun individu n’a de droits, ni de privilèges devant Dieu. Du côté de Dieu, son amour infini s’étend à tous les humains, quels qu’ils soient, Juifs ou païens, libres ou esclaves.
5. « Jérusalem » est le centre géographique, où la rédemption a été accomplie, où l’Envoyé de Dieu a changé la mort en résurrection. Tout l’Évangile de Luc s’oriente vers Jérusalem, où Jésus réalisera ce miracle mystérieux. Dans le Livre des Actes, tout part de cette même ville comme une lumière de vie, pour rayonner jusqu’aux confins du monde. C’est la manière de Luc de signaler la réalité de l’incarnation du Fils de Dieu et l’unité de l’histoire du salut.
6. Etre témoin est le devoir majeur dans le Livre des Actes. Le témoin représente celui dont il témoigne, non seulement par ses paroles, mais par toute sa personne (Act 1, 8.22; 2, 32; 3, 15; 5, 32; 10, 37-43). La foi, comme la vie physique, se transmet de personne à personne (Rom 10, 14s).

Conclusion
À la suite des premiers disciples, tout chrétien a reçu la dignité de poursuivre la mission même de Jésus, le Christ. Comme tout don de Dieu, c’est à la fois une dignité et une responsabilité. « Malheur à moi si j’annonce pas la Bonne Nouvelle», s’écriait saint Paul. (1 Cor 9,16) Ce cri de Paul s’applique à chacun de nous. Le Créateur veut nous associer à son œuvre d’amour dans le monde.

Jean-Louis D’Aragon, s.j.

COMMENTAIRE DES TEXTES DU DIMANCHE DES RAMEAUX

11 avril, 2014

http://www.croire.com/Definitions/Fetes-religieuses/Rameaux/Commentaire-des-textes-du-dimanche-des-Rameaux3

COMMENTAIRE DES TEXTES DU DIMANCHE DES RAMEAUX

Un texte du Père Marc Sevin, bibliste. « HOSANNA ! » Qui s’avance pour que « beaucoup de gens » manifestent bruyamment leur joie ? Est-ce un prince aimé ou un général triomphant ?

“HOSANNA!» Qui s’avance pour que « beaucoup de gens » manifestent bruyamment leur joie ? Est-ce un prince aimé ou un général triomphant ? A-t-on disposé pour lui sur la route des tapis couverts de fleurs ? Non. Il s’agit de Jésus. Et pourtant Jésus est le plus grand de tous les grands de ce monde puisqu’il « vient au nom de Dieu » afin d’établir le « Règne de David ».
Il est le Messie attendu par tous depuis si longtemps pour relever le peuple. Le cortège qui l’entoure n’a paradoxalement rien de royal. Les « manteau » des participants et des « feuillages coupés » se substituent aux tapis et aux fleurs des victoires officielles. Et puis Jésus avance sur un « petit âne » dont il avait dit aux deux disciples : « le Seigneur en a besoin ». Pourquoi donc lui, le Seigneur, aurait-il besoin d’un « petit âne » ?

Une humble royauté
À la lumière de Pâques, les chrétiens relisent la scène comme une parabole. Le « petit âne » vient leur rappeler que la royauté de Jésus ne ressemble pas à celle de David qui s’est imposée par les armes. Jésus ne vient pas établir le Royaume de Dieu par la force, mais par le don de sa vie. Il est venu pour servir et non pas être servi.
Pour les chrétiens l’entrée de Jésus à Jérusalem devient une parabole. Le « petit âne » évoque à l’avance l’abaissement de Jésus : « Il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à mourir, à mourir sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a élevé au-dessus de tout » (2e lecture). Au cours de la semaine qui vient, gardons dans un coin de notre prière la parabole du petit âne des Rameaux.

Père Marc Sevin, bibliste ; Mars 2012

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