Archive pour la catégorie 'NOËL 2016'

GRECCIO ET LA TRADITION DES CRÈCHES

3 janvier, 2017

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(Greccio, Crèche)

GRECCIO ET LA TRADITION DES CRÈCHES

La mémoire de la naissance de Jésus s’accompagne aujourd’hui de la tradition des crèches. C’est à St François qu’on attribue la conception de la première crèche vivante de l’Histoire. La tradition hagiographique rappelle, mais sans véritable certitude historique, que François, s’étant rendu en Terre Sainte, visita Bethléem, s’en retourna avec le souvenir de la ville où le Seigneur était né, et aurait reproduit l’image de la Nativité en cette fameuse Nuit de Noël à Greccio (1 Celano 84-86).
C’est en tous cas, ce que rapportent les biographes du Saint, Thomas de Celano, ou Bonaventure de Bagnoregio : François, soucieux de rendre cette expérience du Fils de Dieu, humilié et incarné, plus concrète pour les fidèles, mit en place cette représentation. On dit qu’à cette occasion il prépara une mangeoire avec du foin, fit amener un bœuf et un âne, et c’est là qu’il fit célébrer la Sainte Messe, en présence d’une foule de personnes venues de toute la région. Son amour pour la solennité de Noël et sa dévotion pour ce que l’image de la Nativité représente, trouva sa plus grande inspiration dans le mystère de l’Incarnation, où le Saint reconnut l’humilité et la pauvreté dans la naissance du Messie.
Ce mystère se renouvelle dans le sacrement de l’Eucharistie, où Jésus se rend présent chaque jour, au travers des mains du prêtre. Le récit dépeint une scène d’une grande simplicité et tendresse, lorsque François, en cette nuit de Noël du 25 décembre 1223, préparant l’Eucharistie, demanda à son ami Giovanni Velita de rassembler les choses nécessaires pour reproduire le cadre de la naissance de l’Enfant-Jésus à Bethléem, et, comme il le dit lui-même : « voir, avec les yeux du corps, les difficultés où il s’est trouvé par le manque des choses nécessaires à un nouveau-né » (1 Celano).
Arriva la Sainte Nuit, et François, accompagné de ses frères et de quelques fidèles, se rendit dans le lieu prêt avec la mangeoire, le foin, l’âne et le bœuf. Après avoir prêché avec des « mots très doux », voici que l’on voit apparaître l’Enfant dans la crèche. Cette vision prodigieuse bouleverse l’âme et le cœur des personnes présentes, profondément touchées par l’expérience vécue. François voulut rendre plus facile aux fidèles la compréhension du mystère de l’Incarnation. La dévotion, typique de la spiritualité franciscaine, a certainement contribué à développer la représentation de la crèche, pratique encore largement répandue aujourd’hui. En guise de préparation aux solennités, le soir de la veillée de Noël, à l’intérieur de la Grotte de la Nativité, les frères franciscains évoquent l’épisode de la Crèche de Greccio, soit l’épisode de St François d’Assise en contemplation du mystère de l’Incarnation.

MESSE DE LA NUIT DE NOËL SOLENNITÉ DE LA NATIVITÉ DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS CHRIST – HOMÉLIE DU PAPE FRANÇOIS

25 décembre, 2016

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MESSE DE LA NUIT DE NOËL SOLENNITÉ DE LA NATIVITÉ DE NOTRE SEIGNEUR JÉSUS CHRIST –

HOMÉLIE DU PAPE FRANÇOIS

Basilique Vaticane

Samedi, 24 décembre 2016

« La grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes » (Tt 2, 11). Les paroles de l’apôtre Paul révèlent le mystère de cette nuit sainte : la grâce de Dieu s’est manifestée, son cadeau gratuit ; dans l’Enfant qui nous est donné l’amour de Dieu pour nous se fait concret.
C’est une nuit de gloire, cette gloire proclamée par les anges à Bethléem et aussi par nous dans le monde entier. C’est une nuit de joie, parce que depuis aujourd’hui et pour toujours Dieu, l’Eternel, l’Infini, est Dieu-avec-nous : il n’est pas lointain, nous ne devons pas le chercher dans les orbites célestes ou dans quelque idée mystique ; il est proche, il s’est fait homme et ne se détachera jamais de notre humanité, qu’il a faite sienne. C’est une nuit de lumière : cette lumière, prophétisée par Isaïe (cf. 9, 1), qui illuminerait celui qui marche sur une terre ténébreuse, elle est apparue et elle a enveloppé les bergers de Bethléem (cf. Lc 2, 9).
Les bergers découvrent simplement qu’« un enfant nous est né » (Is 9, 5) et ils comprennent que toute cette gloire, toute cette joie, toute cette lumière se concentrent en un seul point, dans ce signe que l’ange leur a indiqué : « Vous trouverez une nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (Lc 2, 12). C’est le signe de toujours pour trouver Jésus. Non seulement alors, mais aussi aujourd’hui. Si nous voulons fêter le vrai Noël, contemplons ce signe : la simplicité fragile d’un petit nouveau-né, la douceur de son être couché, la tendre affection des langes qui l’enveloppent. Là est Dieu.
Et avec ce signe, l’Evangile nous dévoile un paradoxe : il parle de l’Empereur, du Gouverneur, des grands de ce temps, mais Dieu ne se fait pas présent là ; il n’apparaît pas dans la salle noble d’un palais royal, mais dans la pauvreté d’une étable ; non dans les fastes de l’apparence, mais dans la simplicité de la vie ; non dans le pouvoir, mais dans une petitesse qui surprend. Et pour le rencontrer il faut aller là, où il se tient : il faut s’incliner, s’abaisser, se faire petits. L’Enfant qui naît nous interpelle : il nous appelle à laisser les illusions de l’éphémère pour aller à l’essentiel, à renoncer à nos prétentions insatiables, à abandonner l’insatisfaction pérenne et la tristesse pour quelque chose qui toujours nous manquera. Cela nous fera du bien de laisser ces choses pour retrouver dans la simplicité de Dieu-enfant la paix, la joie, le sens lumineux de la vie.
Laissons-nous interpeller par l’Enfant dans la mangeoire, mais laissons-nous interpeller aussi par des enfants qui, aujourd’hui, ne sont pas couchés dans un berceau et caressés par la tendresse d’une mère et d’un père, mais qui gisent dans les sordides “mangeoires de la dignité” : dans le refuge souterrain pour échapper aux bombardements, sur les trottoirs d’une grande ville, au fond d’une embarcation surchargée de migrants. Laissons-nous interpeller par les enfants qu’on ne laisse pas naître, par ceux qui pleurent parce que personne ne rassasie leur faim, par ceux qui ne tiennent pas dans leurs mains des jouets, mais des armes.
Le mystère de Noël, qui est lumière et joie, interpelle et bouleverse, parce qu’il est en même temps un mystère d’espérance et de tristesse. Il porte avec lui une saveur de tristesse, en tant que l’amour n’est pas accueilli, la vie est rejetée. C’est ce qui arrive à Joseph et Marie, qui trouvèrent les portes fermées et déposèrent l’enfant dans une mangeoire, « car il n’y avait pas de place pour eux dans la salle commune » (v. 7). Jésus naît dans le refus de certains et dans l’indifférence de la plupart. Aujourd’hui aussi il peut y avoir la même indifférence, quand Noël devient une fête où les protagonistes sont nous, au lieu de Lui ; quand les lumières du commerce jettent dans l’ombre la lumière de Dieu ; quand nous nous donnons du mal pour les cadeaux et restons insensibles à celui qui est exclus. Cette mondanité nous a pris Noël en otage, il faut s’en libérer !
Mais Noël a surtout une saveur d’espérance parce que, malgré nos ténèbres, la lumière de Dieu resplendit. Sa lumière gracieuse ne fait pas peur ; Dieu, épris de nous, nous attire par sa tendresse, naissant pauvre et fragile au milieu de nous, comme un de nous. Il naît à Bethléem, qui signifie “maison du pain”. Il semble ainsi vouloir nous dire qu’il naît comme pain pour nous ; il vient à la vie pour nous donner sa vie ; il vient dans notre monde pour nous porter son amour. Il ne vient pas pour dévorer et pour commander, mais pour nourrir et servir. Ainsi, il y a un fil direct qui relie la crèche et la croix, où Jésus sera pain rompu : c’est le fil direct de l’amour qui se donne et nous sauve, qui donne lumière à notre vie, paix à nos cœurs.
Ils l’ont compris, en cette nuit, les bergers, qui étaient parmi les exclus d’alors. Mais personne n’est exclus aux yeux de Dieu et ce furent vraiment eux les invités de Noël. Celui qui était sûr de lui, autosuffisant, était chez lui au milieu de ses affaires ; les bergers au contraire « allèrent, sans hésitation » (cf. Lc 2, 16). Nous aussi, laissons-nous interpeller et convoquer cette nuit par Jésus, allons à Lui avec confiance, à partir de ce en quoi nous nous sentons exclus, à partir de nos limites, à partir de nos péchés. Laissons-nous toucher par la tendresse qui sauve ; approchons-nous de Dieu qui se fait proche, arrêtons-nous pour regarder la crèche, imaginons la naissance de Jésus : la lumière et la paix, la plus grande pauvreté et le refus. Entrons dans le vrai Noël avec les bergers, portons à Jésus ce que nous sommes, nos exclusions, nos blessures non guéries, nos péchés. Ainsi, en Jésus, nous goûterons le véritable esprit de Noël : la beauté d’être aimés de Dieu. Avec Marie et Joseph, restons devant la crèche, devant Jésus qui naît comme pain pour ma vie. Contemplant son amour humble et infini, disons-lui simplement merci : merci, parce que tu as fait tout cela pour moi.

Joyeux Noël à tous

24 décembre, 2016

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HOMÉLIES DE NOËL – MESSE DE LA NUIT

22 décembre, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIES DE NOËL – MESSE DE LA NUIT

Is 9, 1-6 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14

Dieu nous a-t-il menti ? Nous pouvons nous le demander. Il nous a promis la paix il y a plus de deux mille ans et la paix ne règne pas dans l’univers, ni dans nos cœurs.
Dieu nous a promis la paix, c’est vrai. Promise et donnée : la paix, c’est Jésus Christ lui-même. Il en est l’incarnation, la condition et la source. Posons-nous cependant cette question : Qu’avons-nous fait de cet enfant, de ce Fils qui nous a été donné ? Merveilleux Conseiller, Prince de la Paix ?
Il est né en voyage, en des temps difficiles, dans un petit pays occupé par la plus forte armée du monde. Il s’est révélé un prophète hors série, révolutionnant les interprétations et les pratiques religieuses et morales de son temps. Et il a vaincu la mort. Il y a de cela vingt siècles. Mais il nous a laissé une charte de vie extraordinaire, simple, à taille humaine, et cependant difficile à concrétiser au fil des jours.
Aujourd’hui, nous nous déclarons ses disciples, successeurs de sa mission, rassemblés à cause de lui. En cette soirée anniversaire, de bonnes dispositions nous animent. Mais, qu’avons-nous fait de Jésus Christ ?
Certains l’ont réduit à une douce légende. Celle qui suscite des fêtes d’abondance et inspire les artistes. Un petit Jésus mignon, dont on parle aux enfants, et qui sert parfois même de menace quand ils ne sont pas sages. Jésus, prophète, a même été inscrit dans la mythologie, un symbole de contestation, le type du meneur s’immolant pour sa cause. Trop idéaliste cependant pour le commun des mortels.
Il est certes admiré, mais trop souvent de loin, et sans volonté de le suivre. Comme les superstars, on imprime son beau visage sur les shorts, les chemises et les posters. C’est plus facile que de lui offrir une place dans son cœur et son esprit. Il fait chanter, crier, pleurer, danser. La question est de savoir si on lui laisse pour autant la liberté de nous apprendre à vivre.
Pour beaucoup, il est un utopiste que l’on apaise d’un culte, d’une prière. Tout en l’écartant prudemment du quotidien concret de la vie.
Aujourd’hui, il nous est à nouveau présenté dans le réalisme de l’Evangile. Un bébé dans une mangeoire d’animaux. Des parents sans influence, sans fric, sans piston, sans réputation. Pas de milieu privilégié, pas de classe sacerdotale.
Aujourd’hui, ils auraient trouvé refuge à l’Armée du Salut, ou tout simplement sous un pont, utilisant pour berceau un emballage de boîte à conserves ou de poste de télévision…
Et cependant, la bonté et l’amour de Dieu sont entrés dans le monde par ce chemin là. Le plus beau cadeau fait par Dieu à l’humanité n’a pas eu de plus bel emballage. Pour venir parmi les siens, Dieu a choisi la place la plus ordinaire, en pleine masse. Là où les humains sont aisément les victimes des humains, de leur rapacité, de leur racisme, de leur orgueil. Là où la pauvreté est chronique et la liberté entravée.
Et pourquoi ? Pour expérimenter les réalités terrestres. Sentir dans l’être humain les conséquences du péché de la créature, afin de mieux en dénoncer les causes et les agents provocateurs.
Nos regards et nos espérances ne doivent donc pas d’abord se tourner vers les temples du veau d’or, ni vers le palais de l’ONU à New York, mais d’abord et essentiellement vers cette baraque de paysan, parce que c’est de là qu’est venu celui qui a voulu nous révéler ce qui était le meilleur pour tout être humain et pour le monde.
Or, il a dénoncé les hypocrisies, les injustices de tout genre. Il est même monté jusqu’aux marches les plus élevées pour arracher les masques. Il a bousculé les idoles du pouvoir et celles de l’argent. Il a rompu les chaînes et proposé des Béatitudes. Le vrai pouvoir est de servir, la vraie richesse le détachement, et la douceur la véritable force.
N’aurions-nous pas enterré ce Jésus-là dans l’oubli ? Ne l’aurions-nous pas enseveli sous nos dévotions ? Ne l’avons-nous pas échangé contre un Jésus fait sur mesure. A nos mesures ? Au risque de nous égarer parmi ses bourreaux, de prendre part plus ou moins inconsciemment au massacre des innocents ou de nous laver les mains, comme Pilate.
La crèche vient aujourd’hui nous aider à lui rendre la parole.
Il y a plus de 800 ans, François d’Assise confiait la réalisation d’une crèche aux paroissiens d’un petit village. Ce fut la première crèche vivante, non seulement par la présence du bœuf et de l’âne légendaires, mais parce que les chrétiens de l’endroit allaient découvrir brusquement leurs fautes et leurs erreurs, puis oublier leurs divisions. Grâce à cette représentation naïve d’un événement intraduisible, ils ont laissé naître en eux, sur la paille de leur cœur déjà pourrie par l’intérêt, la rancune et l’argent, un enfant désarmé, un Jésus de justice, de réconciliation et de paix.
Ce Noël de Greccio peut être le nôtre. Mettre au monde un nouveau « moi », laisser naître et transparaître en nous le Jésus de l’Evangile. Nous laisser séduire, conduire et stimuler, pour suivre ses traces. Afin que, modestement sans doute, mais réellement, nous puissions donner des preuves d’amour de Dieu là où nous sommes. Nous engager à être, à notre taille, des artisans de justice et de paix. Des agents de réconciliation. C’est le véritable enjeu de Noël. Un défi à relever.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

BENOÎT XVI – IL S’EST FAIT HOMME

21 décembre, 2016

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2013/documents/hf_ben-xvi_aud_20130109.html

BENOÎT XVI – IL S’EST FAIT HOMME

AUDIENCE GÉNÉRALE

Salle Paul VI

Mercredi 9 janvier 2013

Chers frères et sœurs,

En ce temps de Noël, nous nous arrêtons une fois de plus sur le grand mystère de Dieu qui est descendu de son Ciel pour entrer dans notre chair. En Jésus, Dieu s’est incarné, il est devenu homme comme nous, et ainsi, il nous a ouvert la voie vers son Ciel, vers la pleine communion avec Lui.
En ces jours, a retenti à plusieurs reprises dans nos églises le terme « Incarnation » de Dieu, pour exprimer la réalité que nous célébrons au cours du Saint Noël : le Fils de Dieu s’est fait homme, comme nous le récitons dans le Credo. Mais que signifie cette parole centrale pour la foi chrétienne ? Incarnation dérive du latin « incarnatio ». Saint Ignace d’Antioche — fin du premier siècle — et, surtout, saint Irénée, ont utilisé ce terme en réfléchissant sur le Prologue de l’Évangile de saint Jean, en particulier sur l’expression : « Et le Verbe s’est fait chair » (Jn 1, 14). Ici, la parole « chair », selon l’usage juif, indique l’homme dans son intégralité, tout l’homme, mais précisément sous l’aspect de sa caducité et temporalité, de sa pauvreté et contingence. Cela pour nous dire que le salut apporté par Dieu qui s’est fait chair en Jésus de Nazareth touche l’homme dans sa réalité concrète et dans toutes les situations où il se trouve. Dieu a assumé la condition humaine pour la guérir de tout ce qui la sépare de Lui, pour nous permettre de l’appeler, dans son Fils unique, par le nom d’« Abba, Père », et être véritablement fils de Dieu. Saint Irénée affirme : « C’est la raison pour laquelle le Verbe s’est fait homme et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : afin que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu » (Adversus haereses 3, 19, 1: pg 7, 939 ; cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 460).
« Le Verbe s’est fait chair » est l’une de ces vérités à laquelle nous nous sommes tant habitués que la grandeur de l’événement qu’elle exprime ne nous touche presque plus. Et en effet, au cours de cette période de Noël, dans laquelle cette expression revient souvent dans la liturgie, on est parfois plus attentifs aux aspects extérieurs, aux « couleurs » de la fête, qu’au cœur de la grande nouveauté chrétienne que nous célébrons : quelque chose d’absolument impensable, que seul Dieu pouvait opérer et que nous ne pouvons pénétrer que par la foi. Le Logos, qui est auprès de Dieu, le Logos qui est Dieu, le Créateur du monde (cf. Jn 1, 1), pour lequel furent créées toutes les choses (cf. 1, 3), qui a accompagné et accompagne les hommes dans leur histoire avec sa lumière (cf. 1, 4-5 ; 1, 9), devient un parmi les autres, prend demeure parmi nous, devient l’un de nous (cf. 1, 14). Le Concile œcuménique Vatican ii affirme : « Le Fils de Dieu… a travaillé avec des mains d’homme, il a pensé avec une intelligence d’homme, il a agi avec une volonté d’homme, il a aimé avec un cœur d’homme. Né de la Vierge Marie, il est vraiment devenu l’un de nous, en tout semblable à nous, hormis le péché » (Const. Gaudium et spes, n. 22). Il est alors important de retrouver l’émerveillement face à ce mystère, de nous laisser envelopper par la grandeur de cet événement : Dieu, le vrai Dieu, Créateur de tout, a parcouru comme homme nos routes, en entrant dans le temps de l’homme, pour nous transmettre sa vie même (cf. 1 Jn 1, 1-4). Et il l’a fait non pas avec la splendeur d’un souverain, qui assujettit le monde par son pouvoir, mais avec l’humilité d’un enfant.
Je voudrais souligner un deuxième élément. Pour Noël, on échange généralement quelques dons avec les personnes les plus proches. Parfois, cela peut être un geste fait par convention, mais il exprime généralement de l’affection, c’est un signe d’amour et d’estime. Dans la prière sur les offrandes de la Messe de la nuit de la solennité de Noël, l’Église prie ainsi : « Accepte, ô Père, notre offrande en cette nuit de lumière, et pour ce mystérieux échange de dons, transforme-nous dans le Christ ton Fils, qui a élevé l’homme à tes côtés dans la gloire ». La pensée du don est donc au cœur de la liturgie et rappelle à notre conscience le don originel de Noël : en cette nuit sainte, Dieu, en se faisant chair, a voulu se faire don pour les hommes, il s’est donné lui-même pour nous ; Dieu a fait de son Fils unique un don pour nous, il a assumé notre humanité pour nous donner sa divinité. Cela est un grand don. Dans notre action d’offrir également, il n’est pas important que le cadeau soit coûteux ou non ; qui ne parvient à donner un peu de soi-même donne toujours trop peu ; plus encore, on tente parfois justement de remplacer le cœur et l’effort de don de soi par l’argent, par les choses matérielles. Le mystère de l’Incarnation est là pour indiquer que Dieu n’a pas fait cela : il n’a pas donné quelque chose, mais il s’est donné lui-même dans son Fils unique. Nous trouvons ici le modèle de notre action d’offrir, pour que nos relations, en particulier les plus importantes, soient guidées par la gratuité de l’amour.
Je voudrais proposer une troisième réflexion : le fait de l’Incarnation, de Dieu qui se fait homme comme nous, nous montre le réalisme inouï de l’amour divin. L’action de Dieu, en effet, ne se limite pas aux paroles, nous pourrions même dire qu’Il ne se contente pas de parler, mais il se plonge dans notre histoire et assume en lui la fatigue et le poids de la vie humaine. Le Fils de Dieu s’est fait vraiment homme, il est né de la Vierge Marie, en un temps et en un lieu déterminés, à Bethléem sous le règne de l’empereur Auguste, sous le gouverneur Quirinius (cf. Lc 2, 1-2) ; il a grandi dans une famille, il a eu des amis, il a formé un groupe de disciples, il a instruit les apôtres pour continuer sa mission, il a terminé le cours de sa vie terrestre sur la croix. Cette manière d’agir de Dieu est un puissant encouragement à nous interroger sur le réalisme de notre foi, qui ne doit pas être limitée au domaine du sentiment, des émotions, mais doit entrer dans le concret de notre existence, doit toucher par conséquent notre vie de tous les jours et l’orienter aussi de manière pratique. Dieu ne s’est pas arrêté aux paroles, mais nous a indiqué comment vivre, en partageant notre propre expérience, à l’exception du péché. Le catéchisme de saint Pie X, que certains d’entre nous ont étudié dans leur jeunesse, avec la concision qui le caractérise, à la question : « Pour vivre selon Dieu, que devons-nous faire ? », donne cette réponse : « Pour vivre selon Dieu, nous devons croire les vérités révélées par Lui et observer ses commandements avec l’aide de sa grâce, qui s’obtiennent à travers les sacrements et la prière ». La foi a un aspect fondamental, qui intéresse non seulement l’esprit et le cœur, mais toute notre vie.
Je propose un dernier élément à votre réflexion. Saint Jean affirme que le Verbe, le Logos, était dès le début auprès de Dieu, et que tout a été fait au moyen du Verbe et rien de ce qui existe n’a été fait sans Lui (cf. Jn 1, 1-3). L’évangéliste fait clairement allusion au récit de la création qui se trouve dans les premiers chapitres du Livre de la Genèse, et il le relit à la lumière du Christ. Il s’agit d’un critère fondamental dans la lecture chrétienne de la Bible : l’Ancien et le Nouveau Testament doivent toujours être lus ensemble et, à partir du Nouveau, s’ouvre le sens le plus profond également de l’Ancien. Ce même Verbe, qui existe depuis toujours auprès de Dieu, qui est Dieu Lui-même et au moyen duquel et en vue duquel tout a été créé (cf. Col 1, 16-17), s’est fait homme : le Dieu éternel et infini s’est plongé dans la finitude humaine, dans sa créature, pour reconduire à Lui l’homme et toute la création. Le Catéchisme de l’Église catholique affirme : « La première création trouve son sens et son sommet dans la nouvelle création dans le Christ, dont la splendeur dépasse celle de la première » (n. 349). Les Pères de l’Église ont rapproché Jésus d’Adam, au point de le définir « deuxième Adam » ou l’Adam définitif, l’image parfaite de Dieu. Avec l’Incarnation du Fils de Dieu a lieu une nouvelle création, qui donne la réponse complète à la question « Qui est l’homme ? ». Ce n’est qu’en Jésus que se manifeste de manière accomplie le projet de Dieu sur l’être humain : Il est l’homme définitif selon Dieu. Le Concile Vatican ii le réaffirme avec force : « En réalité, le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe incarné… Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation » (Const. Gaudium et spes, n. 22 ; cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 359). Dans cet enfant, le Fils de Dieu contemplé dans le Noël, nous pouvons reconnaître le véritable visage, non seulement de Dieu, mais le véritable visage de l’être humain ; et ce n’est qu’en nous ouvrant à l’action de sa grâce et en cherchant chaque jour à le suivre, que nous réalisons le projet de Dieu sur nous, sur chacun de nous.
Chers amis, en cette période nous méditons la grande et merveilleuse richesse du Mystère de l’Incarnation, pour laisser le Seigneur nous illuminer et nous transformer toujours plus à l’image de son Fils fait homme pour nous.

LE NOËL DE CHESTERTON

19 décembre, 2016

http://agora.qc.ca/documents/noel–le_noel_de_chesterton_par_gk_chesterton

LE NOËL DE CHESTERTON

G.K. Chesterton

Voir enfin ce que chacun avait cru voir.

Tout agnostique ou athée dont l’enfance a connu une véritable nuit de Noël voit toujours par la suite, qu’il le veuille ou non, un lien dans sa mémoire entre ces deux idées que la plupart des hommes considèrent naturellement comme contradictoires : l’idée d’un nouveau-né et l’idée d’une force inconnue qui soutient l’univers. L’instinct et l’imagination de celui qui fut chrétien peuvent encore les relier, alors que sa raison ne voit plus la nécessité de la relation; il y aura toujours pour lui quelque chose de religieux dans la simple image d’une mère portant son enfant, – une certaine évocation de clémence et d’attendrissement à la seule mention du nom terrible de Dieu. Pourtant ces deux idées n’ont aucune connexité naturelle ou nécessaire; elles ne seraient pas forcément associées pour un ancien Grec ni pour un Chinois, s’agit-il d’Aristote ou de Confucius; il n’est pas plus naturel de relier Dieu à un petit enfant que d’associer la gravitation à un petit chat. Cette association d’idées a profondément modifié la nature humaine. Il existe une différence réelle entre l’homme qui la connaît et l’homme qui ne la connaît pas. Il est possible que ce ne soit pas une différence de valeur morale; car le musulman ou le Juif peut avoir plus de mérite eu égard aux lumières qu’il a reçues; mais c’est un fait avéré touchant l’interférence de deux lumières particulières, la conjonction, sur notre horoscope, de deux astres déterminés. Toute-puissance et extrême faiblesse, divinité et première enfance, ont fini par former une sorte de cliché dont un million de répétitions ne pourront jamais faire une platitude : Bethléem est certainement le lieu où les extrêmes se touchent.
C’est aussi à Bethléem – est-il nécessaire de le dire? – qu’a pris origine une autre influence, puissante pour l’humanisation de la chrétienté. Si le monde cherchait ce qu’on appelle un aspect indiscutable du christianisme, il choisirait probablement Noël. Et cependant Noël est inséparable de ce qu’on croit en être un aspect discutable (je n’ai jamais pu, à aucun stade de mes opinions, me représenter pourquoi) : je veux parler de l’hommage rendu à la Sainte Vierge. Quand j’étais enfant, une génération plus puritaine qu’à l’heure actuelle trouvait à redire à la statue d’une église paroissiale représentant la Vierge et l’Enfant. Après pas mal de controverses, on se mit d’accord en enlevant l’enfant. On serait fondé à croire que cette solution était encore plus entachée de mariolâtrie, à moins que la mère ne fût tenue pour moins dangereuse, une fois privée de son labarum. Mais la difficulté pratique prend ici valeur de symbole. Impossible de faire disparaître la statue de la mère, tout à l’entoure de celle d’un nouveau-né! On ne peut pas suspendre l’enfant dans le vide; il ne resterait plus la moindre statue. Il en va de même de l’idée du nouveau-né, que nul ne peut poser dans l’espace ni se représenter sans évoquer sa mère. On ne peut aller voir l’enfant sans aller voir la mère. On ne peut aller voir l’enfant sans aller voir la mère; on ne peut dans la vie quotidienne approcher un enfant sans passer par sa mère. Si nous voulons, d’une manière ou d’une autre penser au Christ sous cet aspect, la seconde idée suivra, comme elle a suivi dans l’histoire. Il faut ou supprimer le Christ de la Nativité, ou la Nativité du Christ; faute de quoi il ne reste plus qu’à admettre, au moins comme on l’admet sur un tableau de primitif, que ces têtes sacrées sont trop proches l’une de l’autre pour qu’il n’y ait pas chevauchement et confusion des auréoles.
On pourrait suggérer par une image assez brutale que rien ne s’était passé dans ce repli ou cette crevasse des grandes collines grises, sauf que l’univers entier s’était retourné comme un gant. Je veux dire par-là que tous les yeux anxieux et adorateurs, qui jusqu’à ce moment regardaient au dehors vers l’incommensurable, s’étaient retournés à l’intérieur sur l’infiniment petit. Cette figure même évoque la multiple merveille des yeux convergents, qui fait ressembler tant d’images catholiques à des plumes de paon. Mais il est vrai, en un sens, que Dieu, qui n’avait encore été qu’une circonférence, apparut comme un centre; et un centre est infiniment petit.

JEAN PAUL II – LE MESSAGE DE LA GROTTE DE BETHLÉEM

18 décembre, 2016

http://w2.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/audiences/2001/documents/hf_jp-ii_aud_20011219.html

JEAN PAUL II – LE MESSAGE DE LA GROTTE DE BETHLÉEM

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 19 décembre 2001

1. La Neuvaine de Noël, que nous célébrons au cours de ces journées, nous invite à vivre de façon intense et profonde la préparation à la grande fête, désormais proche, de la naissance du Sauveur. La liturgie trace un savant itinéraire pour rencontrer le Seigneur qui vient, en proposant jour après jour des thèmes de réflexion et de prière. Elle nous invite à la conversion et à l’accueil docile du mystère de Noël.
Dans l’Ancien Testament, les prophètes avaient préannoncé la venue du Messie et ils avaient conservé vivante l’attente vigilante du peuple élu. Avec les mêmes sentiments nous sommes invités, nous aussi, à vivre ce temps, pour pouvoir ainsi savourer la joie des fêtes de Noël désormais imminentes.
Notre attente devient la voix des espérances de l’humanité tout entière et elle s’exprime à travers une série d’invocation suggestives, que nous trouvons dans la célébration eucharistique avant l’Evangile et dans la récitation des Vêpres, avant le cantique du Magnificat. Il s’agit des antiennes « O », dans lesquelles l’Eglise s’adresse à celui qui va venir avec des titres profondément poétiques, qui manifestent bien le besoin de paix et de salut des peuples, un besoin qui ne trouve sa satisfaction pleine et définitive que dans le Dieu fait homme.
2. Comme l’antique Israël, la Communauté ecclésiale devient la voix des hommes et des femmes de tous les temps pour chanter l’avènement du Sauveur. Elle prie tour à tour: « O Sagesse qui sort de la bouche du Très-Haut », « ô Guide de la Maison d’Israël », « ô Racine de Jessé », « ô Clefs de David », « ô Astre naissant », « ô Soleil de justice », « ô Roi des nations, Emmanuel, Dieu-avec-nous ».
Dans chacune de ces invocations passionnées, riches de références bibliques, on ressent le désir ardent que les croyants ont de voir s’accomplir leurs attentes de paix. C’est pourquoi ils implorent le don de la naissance du Sauveur promis. Dans le même temps, ils ressentent cependant clairement que cela implique un engagement concret à lui préparer une demeure digne de lui, non seulement dans leur âme, mais également dans le milieu qui les entoure. En un mot, invoquer la venue de Celui qui apporte la paix au monde comporte de s’ouvrir docilement à la vérité libératrice et à la force rénovatrice de l’Evangile.
3. Sur cet itinéraire de préparation à la rencontre avec le Christ, qui vient à Noël à la rencontre de l’humanité, a été insérée la Journée spéciale de jeûne et de prière que nous avons célébrée vendredi dernier, dans le but de demander à Dieu le Don de la réconciliation et de la paix. Il s’est agi d’un moment fort de l’Avent, d’une occasion pour approfondir les causes de la guerre et les raisons de la paix. Face aux tensions et aux violences qui, hélas, ont également lieu au cours de ces journées dans diverses parties de la terre, y compris en Terre Sainte, témoin singulier du mystère de la Naissance de Jésus, il faut que nous, chrétiens, nous fassions retentir encore plus fort le message de paix qui provient de la grotte de Bethléem.
Nous devons nous convertir à la paix; nous devons nous convertir au Christ, notre paix, certains que dans la crèche son amour qui désarme l’emportera sur toute menace obscure et sur tout projet de violence. Il faut continuer à demander avec confiance à l’Enfant-Jésus, né pour nous de la Vierge Marie, que l’énergie prodigieuse de la paix chasse la haine et la vengeance qui se nichent dans l’âme humaine. Nous devons demander à Dieu que le mal soit défait par le bien et l’amour.
4. Comme la liturgie de l’Avent nous le suggère, implorons du Seigneur le don « de nous préparer avec joie au mystère de son Noël », afin que la naissance de Jésus nous trouve « vigilants dans la prière, exultants dans la louange » (Préface de l’Avent II). Ce n’est qu’ainsi que Noël sera la fête de la joie et de la rencontre avec le Sauveur qui nous donne la paix.
N’est-ce pas précisément le voeu que nous voudrions échanger lors des prochaines fêtes de Noël? Dans ce but, notre prière doit devenir plus intense et unanime au cours de cette semaine. « Christus est pax nostra – le Christ est notre paix ». Que sa paix renouvelle chaque milieu de notre vie quotidienne. Qu’elle remplisse les coeurs, pour qu’ils s’ouvrent à l’action de sa grâce transformante; qu’elle imprègne les familles, afin que, devant la crèche ou bien rassemblées autour de l’arbre de Noël, celles-ci affermissent leur communion fidèle; qu’elle règne dans les villes, au sein des nations et de la communauté internationale et se diffuse en chaque lieu du monde.
Comme les pasteurs dans la nuit de Bethléem, hâtons nos pas vers Bethléem. Nous contemplerons dans le silence de la Nuit sainte le « nouveau-né enveloppé de langes, couché dans la crèche », avec Joseph et Marie (Lc 2, 12.16). Que Marie, qui a accueilli le Verbe de Dieu dans son sein virginal et l’a serré entre ses bras maternels, nous aide à vivre avec un engagement plus actif cette dernière partie de l’itinéraire liturgique de l’Avent.
Avec ces sentiments, je présente avec affection mes voeux à vous tous ici présents, ainsi qu’à vos familles et à ceux qui vous sont chers.

Bon Noël à tous!