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LE MONACHISME CHRÉTIEN EN OCCIDENT

7 septembre, 2015

http://www.clio.fr/bibliotheque/le_monachisme_chretien_en_occident.asp

LE MONACHISME CHRÉTIEN EN OCCIDENT

IVAN GOBRY

Professeur honoraire de l’université de Reims Ancien membre du Conseil scientifique de l’université de la Citoyenneté européenne (Conseil de l’Europe) Ancien professeur à l’Institut Catholique de Paris

Le monachisme d’Occident est issu du monachisme d’Orient. Il est d’ailleurs presque aussi ancien que lui, puisque nous en trouvons des éléments dès le début du IIIe siècle. Cependant, il est, dans ses laborieuses origines, beaucoup moins vigoureux et plus clairsemé. Il lui faudra trois siècles pour s’étendre dans la moitié de l’empire où le latin est la langue véhiculaire… Son extension, sa diversité et son devenir nous sont expliqués par Ivan Gobry, dont l’ouvrage Les Moines en Occident fait autorité.
De la Gaule à l’Italie
Le monachisme occidental vit le jour en Gaule, mais dans une Gaule où le parler du clergé était encore le grec, puisque ses premiers évêques venaient d’Orient : à Lyon. Le premier monastère attesté en Occident est en effet celui de l’île Barbe (Insula Barbara) sur la Saône, au nord de la ville. En 202, quand éclata la persécution de Septime Sévère, qui provoqua le martyre de l’évêque Irénée et de neuf mille de ses fidèles, deux chrétiens, Étienne et Pérégrin, se réfugièrent sur cette île où ils vécurent en ermites ; rejoints bientôt par plusieurs compagnons, ils formèrent une communauté qui se donna pour supérieur un nommé Dorothée – nom qu’avait porté un célèbre père des déserts d’Égypte. Vers 240, cette communauté était assez connue pour qu’un riche propriétaire, Longin, lui fît bâtir un monastère en dur et une chapelle sous le vocable de Saint-André, culte populaire en Grèce. Les moines d’Occident devançaient les fondations de Byzance et de l’Égypte.
Il fallut attendre une vingtaine d’années pour voir élever, vers 260, le monastère d’Issoire, initiative de saint Austremoine, premier évêque d’Auvergne. Dès le début du IVe siècle, cette région nous apparaît parsemée d’implantations monastiques.
Ce fut alors seulement que le monachisme pénétra à Rome, un siècle après Lyon. En 307, sainte Aglaé, richissime propriétaire convertie au christianisme après des années de luxe et de débauche, édifia sur la via Latina un oratoire sur le corps du martyr Boniface, son amant qui l’avait imitée dans la conversion, et, à côté, un monastère où elle se retira et vécut dans la pénitence avec un certain nombre de ses servantes. Quelques années plus tard, en 313, Constantin promulguait le fameux édit de Milan, qui accordait la liberté de culte aux chrétiens, et les femmes de sa famille se dévouèrent à la cause monastique. Sainte Hélène, mère de l’empereur, fit construire à Trèves, l’une des capitales de l’Occident, une bâtisse pour abriter la communauté réunie par l’abbé Jean. Vers 342, à Rome même, Constantina, fille de Constantin, éleva près du mausolée qu’elle s’était préparé (et qu’on appela plus tard Sainte-Constance) une basilique et un monastère féminin dédiés à sainte Agnès.
Huit ans plus tard, Eusèbe, évêque de Verceil, devançant l’initiative de saint Augustin à Hippone, établissait près de sa cathédrale, à son retour d’Orient, une communauté de clercs. Il fut imité en 397 par Gaudence, évêque de Novare, qui avait appartenu à ce groupe informel, dans lequel il faut voir plutôt les premiers chanoines réguliers.
Le rôle déterminant de saint Anthanase
Ce fut surtout sous l’influence de ce patriarche d’Alexandrie que se propagea le monachisme en Occident. En 335, Constantin l’ayant exilé de son siège, il se réfugia à Trèves, où il vécut pendant deux ans, psalmodiant l’office divin avec quelques moines qu’il avait amenés avec lui. À cet exemple, un certain nombre de petits groupes érémitiques se constituèrent sur les bords de la Moselle ; le plus important fut celui qu’établit à Cardo saint Castor, et qui devint une importante communauté, régie par une règle qui ne fut sans doute pas rédigée.
Ce fut probablement à cette communauté, ou à une autre moins importante, qu’appartint saint Martin quand, en 341, il demanda son congé de l’armée pour se consacrer à Dieu ; jusqu’au jour où, accompagnant à Poitiers Maximin, évêque de Trèves, il y trouva un groupe d’ascètes dirigé par saint Hilaire, futur évêque de la ville, et s’y incorpora. Puis, après un voyage en Italie durant lequel il constitua deux ermitages, il retourna à Poitiers ; il fonda alors près de Ligugé un monastère de laïcs, puis, devenu archevêque de Tours, un monastère de clercs à Marmoutier (371). En 339, Athanase, de nouveau exilé, s’arrêta à Rome ; sous son influence, sainte Marcelle, une riche veuve, transforma son palais en monastère – exemple suivi en 380 par sainte Paule.
En 370, Évagre d’Antioche, ami de saint Jérôme, traduisit en latin la fameuse Vie de saint Antoine, première de toutes les hagiographies, rédigée par saint Athanase, et fit connaître ainsi en Occident la vie des monastères d’Égypte. Elle fut lue à Rome par un clerc irlandais, saint Kiaran, qui, en 402, retourna dans sa patrie, où il fonda à Saghir le premier monastère de l’île. Quand, trente ans plus tard, le Breton saint Patrick débarqua en Irlande, il trouva le vieil abbé entouré de ses fils, et l’ordonna évêque.
Le monachisme continua à s’implanter anarchiquement dans les Gaules : en 390 avec saint Théodule à Agaune, aujourd’hui Saint-Maurice en Valais ; en 394 avec saint Paulin à Nole, dans la région de Naples ; en 405 avec saint Honorat dans l’île de Lérins en Provence ; en 410 avec saint Budoc dans l’île des Lauriers au nord de l’Armorique ; en 422 avec saint Germain à Auxerre. Il est certain qu’un mouvement plus ample, mais constitué, lui aussi, de monastères isolés, se produisit en Italie ; à notre déconvenue, contrairement à ce qui eut lieu pour la Gaule, il ne trouva pas d’historiens, et nous ne le connaissons que par un ensemble d’allusions et de déductions. Heureusement, saint Grégoire le Grand, après avoir mentionné, dans ses Dialogues, quelques monastères du centre de l’Italie à la fin du Ve siècle, nous a laissé l’histoire de saint Benoît de Nursie.
Saint Benoît, l’artisan le plus important de l’expansion du monachisme
Il se retira en solitaire à Subiaco vers l’an 500 ; trois ans plus tard, il se trouvait à la tête d’une petite communauté. Pendant ce temps, saint Fintan fondait Cluan-Ednech en Irlande, saint Pol de Léon se faisait ermite en Armorique, saint Mars bâtissait Royat, saint Césaire établissait une communauté de clercs à Arles, saint Hilaire de Galliata élevait son monastère non loin de Ravenne ; et dans toute l’Italie florissaient des maisons religieuses semblables à celle de Subiaco. En 535, six ans après avoir transporté sa communauté grandissante dans les nouveaux locaux du Mont-Cassin, Benoît rédigea la règle qui en ordonnait la vie. Elle passa inaperçue. On connaissait d’ailleurs de nombreuses règles à l’est de la Gaule et dans le nord de l’Italie : celles des Quatre Pères, de Saint-Macaire, Règle orientale, écrites successivement à Lérins ; les Institutions de Cassien à Marseille ; les règles de Saint-Césaire à Arles, de Saint-Eugippe à Lucullanum près de Naples ; celle du Maître en un lieu ignoré d’Italie centrale. Dans les trente années qui suivirent la rédaction de la règle du Mont-Cassin parurent celles de Saint-Aurélien à Arles, de Tarnat et de Saint-Ferréol dans la vallée du Rhône… sans compter l’abondance des règles des abbayes de l’Irlande. Cependant, aucune ne subsista. Deux siècles après avoir timidement régi quelques monastères italiens, la règle de saint Benoît s’imposa à l’Occident entier.
Il y avait eu pourtant, dans l’intervalle, la règle de saint Colomban. Ce fameux moine irlandais, débarqué en 590 sur la côte d’Armorique, entre Saint-Malo et Cancale, avec douze compagnons, avait élevé dans la forêt vosgienne un triple monastère, Luxeuil-Anegray-Fontaines. Puis, chassé par Brunehaut, il avait pérégriné à travers les Alpes, pour aboutir finalement à Bobbio, au sud de Milan, où il bâtit une nouvelle abbaye et mourut bientôt (615). Lui et ses premiers disciples avaient établi dix monastères. Mais, après la mort de Colomban, plus de quatre-vingt-dix autres adoptèrent sa règle. On pouvait s’attendre à une plus grande extension ; or, cette règle était à la fois terrible et imprécise sur bien des points. Petit à petit, la règle de saint Benoît, bien plus équilibrée et humaine, lentement découverte, se substitua à elle. D’ailleurs, dès 628, on constate que, dans la plupart des monastères issus de Luxeuil, s’est constituée une règle mixte, qui associe des articles de la règle bénédictine à ceux de la règle colombanienne. Ainsi les plus célèbres : les congrégations de Saint-Wandrille, de Jumièges (fondée par saint Philibert), de Saint-Amand. Pendant ce temps, le moine Augustin, prieur de l’abbaye bénédictine Saint-André de Rome, envoyé par le pape saint Grégoire le Grand pour convertir les Anglo-Saxons, fondait le premier monastère bénédictin d’Angleterre et devenait archevêque de Cantorbéry (597). En un siècle, plus de cent autres s’y ajoutèrent. En 610, le concile de Rome, convoqué par Boniface IV, confirma la règle de saint Benoît pour tous les monastères d’Angleterre. En 745, le concile national des Francs, présidé par saint Boniface, archevêque de Mayence, décréta la soumission de tous les monastères du royaume à cette même règle.
L’épanouissement du monachisme occidental se poursuivit sous la protection de Pépin le Bref, de Charlemagne et de Louis le Pieux. Mais il fut bientôt victime de deux fléaux qui produisirent sa décadence. Le premier fut l’accaparement des abbayes par des laïcs, qui disposèrent du sort et des biens des religieux. L’autre fut l’invasion des Normands païens, puis des Sarrasins musulmans, qui ruinèrent la majorité des monastères et massacrèrent un grand nombre de moines.

De Cluny à Cîteaux et Clairvaux
Après la débâcle, le renouveau de la vie monastique fut l’œuvre de Cluny. Au départ, en 909, cette modeste formation, œuvre de Guillaume Ier d’Aquitaine, passa presque inaperçue. Mais la soif de vie religieuse était telle que Cluny, en deux siècles, créa ou s’unit à douze cents monastères, dont neuf cents en France. La nouveauté du gouvernement consistait dans une centralisation qui plaçait toutes les maisons de l’ordre sous l’autorité de l’abbé de Cluny. C’était donc la valeur personnelle de celui-ci qui décidait du respect de la règle et de l’élan de la ferveur dans l’ensemble de l’ordre. Or, durant deux siècles, les abbés qui se succédèrent furent des hommes exceptionnels. En outre, ils eurent des abbatiats d’une longue durée, ce qui leur permit de donner continûment leur marque à cette puissante réforme. Après le premier abbé, saint Bernon (909-927), cette durée alla croissant : saint Odon dirigea pendant quinze ans, saint Aymar pendant vingt-trois ans, saint Mayeul pendant vingt-neuf ans, saint Odilon (994-1049) pendant cinquante-cinq ans, saint Hugues (1049-1109) pendant soixante ans.
Après la mort de ce géant du monachisme, Cluny commença à donner des marques de déclin. Le flambeau fut repris par Cîteaux. Cette abbaye, bourguignonne comme Cluny, fut fondée en 1098 par saint Robert, abbé de Molesmes, qui voulait, avec quelques compagnons, vivre intensément la vie bénédictine dans le labeur et le dénuement. Ses successeurs à la tête de la jeune abbaye, saint Aubry (1099-1109), saint Étienne Harding (1109-1133), Raynard (1133-1151), furent dignes de lui et procurèrent à l’ordre nouveau une extension dans toute l’Europe, tout en s’employant à le garder dans sa ferveur.
Mais l’artisan le plus admirable de cette multiplication et de cette sainteté fut saint Bernard, premier abbé de Clairvaux, qui compte parmi les plus fameux génies du christianisme. Fondateur, il établit soixante-neuf monastères, qui à leur tour en créèrent plus de cent. Homme d’Église, il fut un zélé serviteur de la papauté dans les luttes qu’elle eut à soutenir contre le pouvoir temporel ; prédicateur, il laissa plus de quatre cents sermons d’une puissante éloquence ; théologien, il a été rangé parmi les docteurs de l’Église.
Du XIe et XIIe siècles, une floraison d’instituts pleins de la même ferveur
Le plus célèbre est l’ordre des Chartreux, fondé en 1084 par saint Bruno dans le massif alpin de la Grande Chartreuse, et qui associe dans le même monastère la vie érémitique à la vie cénobitique. Mais d’autres ont trouvé une place prestigieuse dans l’histoire. En Italie, ce furent l’ordre des Camaldules, institué en 1012 par saint Romuald à Camaldoli en Toscane ; l’ordre de Vallombreuse, fondé en 1046 par saint Jean Gualbert à Vallombrosa, en Toscane encore ; celui de Flore (1194), par le fameux abbé cistercien Joachim, qui fut inquiété par les autorités ecclésiastiques à cause de ses fantaisies théologiques ; celui de Monte Vergine, dans les Pouilles (1119) par saint Guillaume de Verceil ; celui de Pulsano (1118), dans la même région, par saint Jean de Matera.
L’Ouest de la France fut fertile en fondations, à l’origine des ermitages. Le principal inspirateur de ce mouvement fut le bienheureux Vital de Mortain, qui suscita en 1093 l’ordre de Savigny. À son exemple, saint Robert d’Arbrissel établit en 1099 l’ordre de Fontevraud, avec cette particularité que l’autorité de cet ordre mixte revint à l’abbesse de Fontevraud, les prieurés masculins lui étant soumis comme les féminins. Autre disciple de Vital, Géraud de Salles parsema le Sud-Ouest de petits monastères, qui constituèrent les éphémères congrégations de Cadouin, de Grandselve et de Dalon. Saint Étienne de Muret fonda dans le Limousin en 1078 l’ordre de Grandmont, qui compta cent cinquante et une maisons ; saint Étienne d’Obazine, dans la même région, vers 1130, celui d’Obazine. Tous ces instituts avaient en commun la pratique d’une terrible ascèse et d’une très grande pauvreté.
Au XIIIe siècle, les ordres mendiants suscitèrent l’enthousiasme et attirèrent une multitude de recrues. Ce fut certes, numériquement, au détriment des ordres monastiques ; mais ceux-ci gardèrent en bonne partie leur ferveur.
Un déclin amorcé au XVIe siècle et confirmé au XVIIIe siècle
Il en alla autrement quand, au début du XVIe siècle, deux événements leur portèrent un coup irréparable. L’un, externe, fut la Réforme qui, dans la moitié de l’Europe, confisqua les monastères, chassa ou massacra les religieux ; l’autre, interne, fut, en 1516 le concordat de Bologne entre Léon X et François Ier, qui laissait au roi de France la nomination des évêques et des abbés dans son royaume, où se trouvaient le plus grand nombre de monastères. Le roi, évidemment, ne nomma pas les prélats les plus saints, mais les plus ambitieux et les plus dévoués à sa personne, et il s’en suivit une décadence des instituts monastiques.
Un renouveau apparut au XVIIe siècle grâce à la création de nouvelles congrégations ferventes : chez les Cisterciens, celle d’Allemagne ; en France, celle de la Stricte Observance, au sein de laquelle brilla l’abbé de Rancé, réformateur de la Trappe ; chez les Bénédictins, les congrégations de Saint-Vanne et de Saint-Maur, toujours en France. Cet essor fut combattu au XVIIIe siècle par les gouvernements des pays latins, gagnés à la franc-maçonnerie, et anéantis, en France et en Italie, par la Révolution française. Le beau mouvement de restauration du XIXe siècle ne put relever ces ruines qu’en faible partie.
Ce court exposé historique ne permet pas de dresser un bilan de l’œuvre monastique en Occident, qui fut fondamentale non seulement dans le domaine spirituel, mais dans les domaines économique, culturel et caritatif.

Ivan Gobry
Janvier 2001

INITIATION AU MONACHISME DES PREMIERS SIÈCLES CHRÉTIENS – CHAPITRE I –

18 novembre, 2013

http://www.scourmont.be/studium/dupont/

INITIATION AU MONACHISME DES PREMIERS SIÈCLES CHRÉTIENS

CHAPITRE I  -

(seule une partie des ailes 4 , suivie par jusqu’à 9 – seulement à la partie 4 , suivie par jusqu’à 9,  IVol. 1 : Égypte et Palestine)

LES ANTECEDENTS

DU MONACHISME CHRETIEN

1. DANS L’ANCIEN TESTAMENT
En scrutant l’Ancien Testament (même si vous utilisez un super ordinateur en six langues… mais rien ne vaut de faire le travail par soi-même!), on ne trouve pas de « moines » à proprement parler. Par contre, on trouve quelques traits de spiritualité monastique. C’est ce dont je vais vous entretenir présentement et qui vous permettra de mieux comprendre combien le monachisme chrétien est radicalement nouveau ; il est évangélique; il est une bonne nouvelle vécue.
Cette trace de spiritualité monastique est le naziréat. Qu’est-ce? Le mot signifie « consacré », et, très précisément le terme hébreu signifie « vœu ». Regardons tout d’abord les textes puis nous déduirons la structure de cette consécration.
- Gen. 49,26 « Que les bénédictions du Seigneur viennent sur la tête de Joseph, sur le front du consacré d’entre ses frères ». (Cf en parallèle : Dt, 33,16). Vous me direz que cela n’apporte pas grand chose! Mais tout de même on apprend ainsi que cette pratique du naziréat est très ancienne, qu’elle est antérieure à Moïse. Ce texte s’éclaire par d’autres : (Soit dit en passant, cette méthode d’étude de textes les uns par les autres est spécifiquement de la lectio divina).
- Juges 13,5-7 : « Le rasoir ne passera pas sur sa tête car l’enfant sera nazir de Dieu ».(il s’agit de Samson). Voir aussi Juges 13,13-14.
- Juges 16,17 : « Le rasoir n’a jamais passé sur ma tête car je suis nazir de Dieu depuis le sein de ma mère. »
De ces passages du Livre des Juges, on déduit que le naziréat se signale par :
. la chevelure jamais coupée
. l’abstinence même de raisin, de toute nourriture impure
. le nazir (ici Samson) est un charismatique : il est agité par l’esprit de Dieu (Juges 13,25).
. Il ne se sépare pas du reste du peuple, et ceci est radicalement différent de ce que pratiquera le monachisme chrétien.
- 1 Sam.1,11 : « Alors je le donnerai au Seigneur pour toute sa vie et le rasoir ne passera pas sur sa tête ».
- Mais le principal texte concernant le naziréat dans l’Ancien Testament se trouve dans le Livre des Nombres, 6,11 sq. :
 » Quand un homme ou une femme entend s’acquitter d’un vœu, le vœu de naziréat, par lequel il est voué au Seigneur, il s’abstiendra de vin et de boissons fermentées, il ne boira pas le vinaigre que l’on tire de l’un ou de l’autre, il ne boira aucun jus de raisin, il ne mangera ni raisins frais ni raisins secs. Durant tout le temps de sa consécration il ne prendra aucun produit du cep de vigne, depuis le verjus jusqu’au marc. Aussi longtemps qu’il sera consacré par son voeu, le rasoir ne passera pas sur sa tête; jusqu’à ce que soit écoulé le temps par lequel il s’est voué au Seigneur, il sera consacré et laissera croître librement sa chevelure. Durant tout le temps de sa consécration au Seigneur, il ne s’approchera pas d’un mort, ni par son père, ni par sa mère (…) car il porte sur sa tête la consécration de son Dieu. Durant tout le temps de son naziréat, il est consacré au Seigneur  » .
Puis aux versets 13 et suivants, vous avez le rituel du nazir. A la fin de sa consécration (car vous avez remarqué que ce vœu peut être temporaire ou définitif), le nazir est emmené à l’entrée de la tente du Rendez-vous où il offre un sacrifice pour le péché, puis un sacrifice de communion. Il reçoit du prêtre et présente au Seigneur les oblats du sacrifice de communion. Alors il peut boire du vin.
Il est encore un autre exemple de nazir, à la charnière de l’Ancien et du Nouveau Testament : c’est Jean, le Baptiste (Luc 1, 15) : « Il ne boira pas ni vin, ni boisson forte, il sera nazir dès le sein de sa mère ». Vous me direz qu’il n’est pas écrit explicitement que Jean Baptiste est nazir, et qu’en plus il n’est pas mentionné qu’il gardait sa chevelure sans la couper, signe par excellence du nazir. C’est vrai, mais souvenez-vous de Samson dont nous venons de parler : la force de Dieu (de l’Esprit de Dieu) est liée à sa chevelure. En Luc il est dit que Jean est rempli de l’Esprit-Saint. Peut-être cette force implique-t-elle que Jean ne s’est jamais coupé les cheveux (pour être signe). De plus, Jean précède le Christ, il attend sa venue; il est un veilleur, ce qui sera l’une des fonctions essentielles du moine.

EN RÉSUMÉ DE CETTE COURTE ÉTUDE, NOUS POUVONS CONCLURE QUE:
Ne pas se couper les cheveux ……………. signifie que la force de Dieu agit sur le nazir.
Ne pas boire de boisson fermentée …….. signifie le rejet de la vie facile.
Ne pas approcher un cadavre……….. .signifie que l’on appartient spécialement à Dieu.
A ces trois signes du naziréat, on peut ajouter : la durée, temporaire ou définitive, parfois dès le sein maternel, sans limite de temps.
Notons que l’on ne trouve pas toujours les trois éléments. Par exemple, pour Samuel, il n’est pas dit qu’il s’abstenait de vin.
Vous remarquerez aussi que dans son vœu le nazir n’est tenu qu’à des pratiques – ou absences de pratiques – « extérieures » et non pas forcément morales, fondamentales, ni spirituelles. Ces pratiques sont cependant des signes d’une consécration à Dieu.

1.2. Il y a d’autres traces de « monachisme » dans l’Ancien Testament. Je ne les développerai pas ici car vous étudierez cela plus en détail au cours d’Ecriture Sainte, mais je vous citerai simplement : ELIE, cette grande figure biblique. Elie, lié aussi à Jean Baptiste. Et par là, je voudrais vous faire prendre conscience (mais nous y reviendrons) que le monachisme est lié au prophétisme. Ce lien atteint son apogée avec Jésus, le prophète par excellence, le moine par excellence.

2. DANS LE NOUVEAU TESTAMENT
2.1. JESUS, plus libre dans son comportement et plus libéral que Jean Baptiste. « Il mange et boit avec les pécheurs » etc… Et pourtant, Jésus reçoit le baptême de pénitence, lui qui n’a pas péché. Il passe quarante jours au désert (avec tout le symbolisme du nombre quarante : une vie, une génération…). Il lance l’appel à tout quitter pour le suivre (cf. Mt 16,21-28 et montre en même temps l’impossibilité de suivre deux maîtres. Tout cela manifeste une rupture radicale avec la Loi, aussi radicale que celle de Jean.
2.2. Saint PAUL recommande l’état de virginité qui permet d’être au Seigneur sans partage, sans division (« simple » = monos); voyez le grand texte de 1 Co. 7. De la deuxième Lettre de Paul à Timothée (2,4), les moines vont retenir le principe que les militaires en service ne se laissent pas impliquer dans les affaires séculières. De même si les moines veulent plaire à Dieu, à Celui auquel ils se sont voués, ils sont tendus vers lui, préoccupés de lui seul : « tendu de tout mon être , je cours en avant vers le prix que Dieu m’appelle à recevoir là-haut en Christ Jésus. » (Phil. 3,13-14). Cette tension vers le Christ – que Grégoire de Nysse appellera épectase, est toute monastique.
Autrement dit, le moine est un veilleur qui attend le retour du Christ. Cette spiritualité donnera naissance aux Pères neptiques (nepsis = veille).

3. LES ESSENIENS
Avant d’aller plus loin dans les antécédents du monachisme chrétien, je voudrais vous parler d’un mouvement communautaire juif contemporain de Jean Baptiste et de Jésus, les esséniens.
3.1. Qu’est-ce que c’est ?
Pline l’Ancien, Philon en parlent. Cette secte – car c’était une secte juive – a eu une influence réelle sur la première communauté chrétienne et sur le monachisme des premiers siècles chrétiens. On connaît les esséniens non seulement par les textes anciens, mais aussi par le lieu où ils s’étaient établis : Qumrân, au bord de la Mer Morte, là où l’on a retrouvé en 1947 les restes d’un véritable monastère.
Cette communauté juive habitait un vaste bâtiment dressé sur un promontoire dominant la Mer Morte ainsi que vingt-cinq grottes. Les bâtiments, avec huit cours intérieures, comprenaient un réfectoire, une cuisine, des salles de réunion, une lingerie, deux poteries, huit citernes (de différentes tailles). L’eau y était amenée par des canaux. On a même décelé les traces d’un barrage.
En 68, lorsqu’elle dut fuir devant le général romain Vespasien et la dixième légion romaine – qui détruisirent la plupart des locaux – la communauté enveloppa ses manuscrits dans des jarres en terre cuite qu’elle cacha dans des grottes. On a retrouvé, dix-neuf siècles plus tard, toute cette précieuse bibliothèque. Le climat très sec de la région a permis la conservation intacte de ces manuscrits pendant deux mille ans.
3.2. Quel est le projet de vie de cette communauté ?
On le connaît par l’un des manuscrits qui est la Règle de la Communauté. Cette règle aurait été écrite entre 100 et 75 avant Jésus-Christ.
Le supérieur est le Maître de Justice. Les points les plus saillants de la Règle sont les suivants :
obéissance au supérieur et obéissance mutuelle
correction fraternelle
humilité
amour fraternel.
A travers tout ce texte on dégage une « spiritualité », un appel à la perfection et à la sainteté. Mais vous allez le constater, cette soif de perfection et de sainteté est assez élitiste et même « puriste ». On retrouvera cela périodiquement dans la vie de l’Eglise : des chrétiens puristes au point de devenir une secte, que ce soit au II ème siècle avec Montan et Tertullien, ou au Moyen-Age avec les cathares.
La sainteté, dans la Règle de la communauté, se traduit par la communion avec le monde céleste : Dieu et les anges. La perfection se traduit par l’observance exacte de toute la Loi.
Autre point-clé de cette Règle de vie : la conversion et le culte que l’on vit dans l’action de grâce jubilante. Enfin, le célibat fait partie de toutes ces sectes dont je vous parlais à l’instant. Les relations conjugales vont être considérées comme mauvaises (ce qui est chrétiennement faux). Mais à Qumrân, on trouvera, liée au célibat, la conviction d’exercer une fonction sacerdotale. Ceci est intéressant pour la grave question, plus tardive, du célibat des prêtres.
Signalons aussi la place, dans cette règle, de l’interprétation des Ecritures et du discernement des esprits. Vous voyez, nous avons là un ensemble très charismatique.
3.3. Comment se passait une journée?
. Avant le lever du soleil, la communauté se rassemble dans une grande salle de réunion pour la prière matinale.
. Puis chacun vaque à son travail (travail qui a lieu dans l’enceinte du monastère) : potier, teinturier, copiste, jardinier, cuisinier, boulanger…
. A 11 heures a lieu le bain de purification pour lequel on revêt un pagne de lin.
. Succède à cela le repas communautaire : élément très important de la vie à Qumrân. C’est une véritable liturgie à laquelle ne participent que ceux qui sont définitivement engagés dans la communauté. Pour ce repas on revêt des vêtements sacrés. Lorsque tous les membres sont à leur place, le boulanger distribue un pain à chacun, puis le cuisinier remet une écuelle à chacun. Ensuite a lieu la prière de bénédiction (on ne mange pas avant). A la fin du repas, on dit les grâces. A la sortie, on défait ses vêtements sacrés et on retourne au travail jusqu’au soir.
. Repas du soir.
. Veillée nocturne quand le soleil se couche jusque tard dans la nuit. Cette veillée dure trois heures et demie.
3.4. Les membres de la communauté
On commence par une année de postulat, puis une année de noviciat. Après quoi on s’engage par un serment que l’on renouvelle chaque année. Pendant les deux années probatoires, on s’initie à l’idéal d’ascèse et de sainteté de la communauté : vie de prière, vie de travail, vie d’étude de la Loi.
Cette communauté était-elle mixte? On n’a pas de certitudes absolues sur ce point. Mais on a retrouvé des ossements de femmes. Il semble donc que oui.

3.5 LE MONACHISME DE QUMRÂN ET LA SPIRITUALITÉ CHRÉTIENNE
Ils sont issus d’un même germe : l’idéal communautaire et fraternel esquissé dans l’Ancien Testament, ainsi que la vocation à être un peuple saint par une pratique parfaite de la volonté divine. Mais la différence essentielle est que les gens de Qumrân se situent dans une perspective vétéro-testamentaire, c’est-à-dire une perspective légaliste, même lorsqu’ils s’efforcent de se laisser conduire par l’Esprit de Vérité. Le monachisme chrétien se réfère à la personne de Jésus.
Jean Baptiste a peut-être cheminé quelque temps avec les esséniens. En tous cas il s’en serait séparé car tel que nous le présente l’Evangile, il ne vivait pas en communauté.
Jésus a donné à ses disciples (surtout aux Apôtres) une forme de vie communautaire et fraternelle proche de celle des esséniens. Par exemple, la déclaration de Jésus à Simon : « Tu es Pierre… » est un parallèle d’une hymne essénienne plus ancienne. Jésus apparaît comme ré-éditant, de façon nouvelle, le rôle du Maître de Justice. Mais Jésus se démarque aussi radicalement de certaines pratiques esséniennes telles celle d’éviter les souillures, celles concernant le mariage, etc….

INITIATION AU MONACHISME DES PREMIERS SIÈCLES CHRÉTIENS (Etudes sur l’Orthodoxie Copte en France)

28 mars, 2011

du site:

http://eocf.free.fr/text_cours_monachisme_egypte_8.htm

INITIATION AU MONACHISME DES PREMIERS SIÈCLES CHRÉTIENS

Égypte et Palestine
par Soeur Véronique DUPONT, osb, Venière

CHAPITRE VIII

LA PRIERE DE JESUS DANS LA TRADITION DU DESERT D’EGYPTE
L’ébauche d’une théologie du nom de Jésus, post-scripturaire, peut être discernée dans un écrit aussi ancien que Le Pasteur d’Hermas, ouvrage dans lequel on trouve cette phrase : « Le Nom du Fils est grand et immense, et c’est lui qui soutient le monde entier ». Mais c’est dans le désert d’Egypte, au IVe siècle, que se trouvent les racines de cet arbre merveilleux de la « la prière de Jésus ».

LES PLUS ANCIENS TEMOIGNAGES
On trouve dans la littérature du désert l’évocation de guérisons et d’exorcismes « au nom de Jésus », par exemple dans la vie d’Antoine ou celle de Synclétique. Mais c’est le murmure du nom de Jésus qui fera naître la prière de Jésus.
Pour les Pères du désert, la prière, c’est la prière au sens biblique, évangélique du terme, c’est-à-dire la prière vocale de demande (même si elle est silencieuse, tacite, implicite). C’est aussi une oeuvre, une activité particulière, une occupation dans la journée du moine. Et vous connaissez bien les apophtegmes, on prie en travaillant. La prière tend à devenir continuelle jusque dans le travail et dans toutes les occupations du moine. Cette prière est courte, c’est pourquoi on l’appelle monologiste : une seule parole. Elle est souvent accompagnée de gestes, mais pas toujours; on se lève, on se prosterne, on lève les mains, les yeux… Cette prière se caractérise par la brièveté de sa formule et aussi par sa répétition afin de tendre à la prière continuelle selon le précepte de l’Evangile « Priez sans cesse », repris par Paul (1Th.5,17). Cette prière courte, dont la formule peut varier, est distincte de la psalmodie ou de l’oraison.
Chez les premiers Pères du monachisme égyptien, cette prière a consisté en la répétition quasi incessante du verset du psaume 69 « Deus in adjutorium… ». Elle visait à protéger le moine de toutes les attaques du démon certes, mais elle visait aussi à le purifier « en le dépouillant des richesses de toutes les pensées et en le réduisant à la pauvreté de ce verset ». C’est une monologie verbale et mentale qui assure la continuité du souvenir de Dieu et la continuité de la prière.
Peu à peu, les Anciens du désert vont prendre non plus seulement ce verset mais l’un ou l’autre verset psalmique. Au fil de notre lecture des apophtegmes, nous en indiquons quelques-uns :
Amoun : « Reste assis dans ta cellule, mange un peu chaque jour, aie continuellement la parole du publicain dans ton cœur et tu pourras être sauvé ».

 » O Dieu, sois-moi propice à moi pécheur ».
Arsène :  » Seigneur, conduis-moi de façon que je sois sauvé ».
Lucius: « Aie pitié de moi , ô mon Dieu ».
Abba Paul : « Aie pitié de moi ».
Abba Sisoès : « Seigneur protège-moi de ma langue ».
Amma Sara: « O Dieu, donne-moi la force ».
Jean Kolobos: « Seigneur, donne-moi l’endurance dans les combats ».
Anonyme: « Seigneur, secours-moi ».
Abba Macaire: « Seigneur, comme tu veux, comme tu sais, aie pitié ».
Un Ancien : « Fils de Dieu, secours-moi ».`
Sérapion: « Seigneur, apprends-moi à faire ta volonté ».
Vous me direz que dans ces invocations il est bien peu question du nom de Jésus. En fait, Dom Régnault démontre très savamment que « Seigneur » désigne généralement le Christ. N’oublions pas, en effet, que nous sommes en pleine hérésie arienne.
Toutes ces expressions de prières ont la même structure générale, à savoir :
. C’est une formule courte et simple,
. qui est une prière, au moins implicitement sinon dans sa forme classique,
. qui est répétée fréquemment, sinon continuellement.

Marc l’Ermite lui donne le nom de monologistos parce qu’elle exclut la multiplicité des paroles et surtout la multiplicité et la variété des pensées. Cette « monologie » de la prière vocale est ordonnée à l’unification et à la purification de l’esprit en vue de la prière du coeur qui est, pour les anciens, une « vraie prière ».
Ainsi, peu à peu, la pratique des Vieillards va s’unifier, et de cela va jaillir une pratique particulière, recommandée par plusieurs Anciens et qui va se répandre de plus en plus; c’est ce que l’on va appeler « la triple formule », à savoir :

« Jésus, aie pitié de moi,
Jésus, secours-moi,
Je te bénis mon Dieu ».

Au Ve siècle, Barsanuphe dira « Kyrie eleison, je te bénis mon Dieu »; Dorothée avait appris à Dosithée, son jeune disciple de Gaza, à garder toujours le souvenir de Dieu en disant sans cesse : « Seigneur Jésus, aie pitié de moi ». Mais déjà pour Diadoque de Photicée (milieu du Ve siècle) et pour Nil (qui est sans doute Evagre, comme vous le savez), cette prière monologiste est l’invocation constante du Nom de Jésus, laquelle est la meilleure arme à employer nuit et jour contre les démons, le moyen excellent pour purifier son coeur, pour y entretenir un fervent souvenir de Dieu et l’élever à la contemplation.
Saint Augustin affirme, dans sa Lettre 20 , que les moines d’Egypte font des prières fréquentes mais brèves, pareilles à des jets « quodammodos iaculas » (d’où l’expression « prière jaculatoire »). Cassien, pour sa part, rapporte qu’il a reçu de l’Abba Isaac cette prière monologiste comme un secret transmis depuis la première génération des moines des Kellia et de Scété.
Comme l’écrit le Père Régnault, ce n’est pas un hasard si cette prière monologiste est apparue dans le monde monastique d’Egypte et si elle s’est ensuite propagée partout où les Paroles des Vieillards étaient à l’honneur (par exemple et très spécialement à Gaza au VIe siècle). Les Vieillards en effet, s’expriment avec la même concision pour s’adresser à Dieu et pour parler aux hommes. Leurs conditions de vie les y portent : dans la solitude et le silence du désert ces pionniers du monachisme sont parvenus à une merveilleuse simplicité de coeur qui se reflète dans le peu de mots de leurs frères et de leurs sentences.
Plus profondément encore, cette prière monologiste se rattache à l’esprit évangélique des pères du désert : « Quand vous priez,….. ne multipliez pas vos paroles… car votre Père sait ce dont vous avez besoin… »(Mt. 6,7-8). Ainsi une formulation brève exprime la confiance filiale du moine qui sait qu’il peut compter sur son Père et n’a pas à se tracasser, à multiplier les demandes, ni à les détailler : « Ne vous faites pas de soucis… Cherchez d’abord le Royaume de Dieu… » Cela devient l’unique nécessaire auquel aspirent ces hommes épris d’absolu. Dans leur prière simple et courte, inlassablement répétée, ils ne demandent que le salut procuré au monde par le Seigneur Jésus.
Vous vous souvenez qu’Evagre a mis par écrit l’enseignement et la pratique des pères du désert d’Egypte, c’est donc à lui que nous devons d’avoir reçu la Prière de Jésus dont il vivait lui-même. L’influence d’Evagre sur le développement ultérieur de la spiritualité monastique – et donc sur la pratique de la prière de Jésus est indéniable. Mais pour bien saisir la floraison hésychaste il conviendrait d’évoquer, avec l’influence d’Evagre, celle du pseudo-Denys, celle du pseudo-Macaire et de toute sa descendance spirituelle jusqu’à Syméon le Nouveau théologien, puis, plus tard, Grégoire Palamas. Mais cela sort du cadre de notre cours.

Etudes sur l’Orthodoxie Copte en France