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OLIVIER CLÉMENT, PHILOSOPHE DE LA LUMIÈRE

31 mars, 2016

http://www.pagesorthodoxes.net/theologiens/clement/olivier-clement-intro.htm

OLIVIER CLÉMENT, PHILOSOPHE DE LA LUMIÈRE

par Rafaël Mathieu

Ce portrait d’Olivier Clément est extrait d’un recueil d’une trentaine de textes réunis par Rafaël Mathieu sous le titre Les identités remarquables, qui vient de paraître aux éditions du Moulin de l’Étoile (1). On le sait : l’art du portrait est tout entier dans l’alchimie d’une rencontre, qui suppose, de la part du chroniqueur, autant d’humilité que de psychologie et d’intelligence des situations — outre une parfaite connaissance de l’œuvre de la personnalité qui lui ouvre sa porte. Journaliste aux talents multiples, Rafaël Mathieu se fait ici tour à tour peintre, écrivain, romancier, photographe, architecte, hermétiste ou métaphysicien pour mieux nous donner à découvrir et comprendre l’itinéraire et l’œuvre d’une trentaine d’artistes, au sens premier du terme. Tous sont très éloignés des circuits balisés d’une certaine notoriété frelatée, mais tous, ou presque, sont auteurs d’une œuvre forte et originale, faite « de main d’ouvrier » — et, chacun dans son domaine, une voix libre parmi lesquels plusieurs sont de proches collaborateurs de Symbole, de Frédérick Tristan à Gérard de Sorval et de Jean Biès à Michel Random… (Jean-Marie Beaume)
« J’aime écouter les autres parler d’eux. Je n’aime pas parler de moi », écrivait Olivier Clément il y a trente ans dans l’un de ses maîtres livres, L’Autre soleil. Alors que paraissent ses Mémoires d’espérance, l’homme n’a pas tellement changé. Il a vieilli, bien sûr, les jambes ne le portent plus guère, mais l’esprit a conservé sa fraîcheur. Tellement moins préoccupé par ses propres rides « que de celles qui marquent le visage du christianisme ». Le visage, le christianisme, ces deux mots résument d’ailleurs, pour ses lecteurs, l’oeuvre de ce personnage à part dont la seule autobiographie possible semble être spirituelle. Sa vie est pourtant exemplaire. De tous les penseurs chrétiens de son temps, Olivier Clément est l’un des rares à avoir vécu le christianisme comme une nouveauté. À avoir éprouvé aussi toutes les angoisses et les contradictions du siècle, à être passé par « le grand creuset du doute ». Pour paraphraser Chesterton, l’immense avantage d’Olivier Clément sur les autres théologiens, c’est que lui a un jour été athée…

Un christianisme « libérateur »
Il est né en 1921 en pays combiste, le Languedoc, « dans une famille qui ne parlait jamais de Dieu ». Son enfance telle qu’il l’a évoquée dans L’autre soleil est celle d’un « païen méditerranéen », bercé par une culture oublieuse de ses racines chrétiennes mais vivace. « Les êtres dit-il, étaient portés, ils vivaient, sans le savoir, sur une ancienne et savoureuse cuisson des choses de la terre au feu de l’Évangile. »
Même le socialisme de son grand-père, « n’était pas une haine de classe, mais une exigence morale. Il ignorait le ressentiment. Mon grand-père était socialiste à l’intérieur d’une civilisation. » Par certains côtés, son parcours fait écho à celui des chrétiens convertis des premiers siècles : la Méditerranée, une culture laïque ou plutôt publique, des hommes enracinés dans leur terre, et puis ici et là, la marque du christianisme, autrefois naissant, désormais disparaissant, malgré les églises romanes de Saint-Guilhem-le-Désert ou de Maguelone. Lui revient un lointain souvenir, une immense croix vert-de-grisée. Sur la croix, un homme mort. Au-dessus de sa tête, une inscription : I.N.R.I. « Je pensais que c’était le nom de l’homme. » Pourtant c’est aussi ce monde qui l’éveille au premier stade de sa vie spirituelle, la découverte de la beauté : « Comme j’ai pu haïr la trop verte Île-de-France, où tout est végétal, mouillé, même la roche, même le ciel – une chair opaque, omnipotente. Tandis qu’en pays méditerranéen, dès qu’on accède aux plateaux solitaires, c’est le feu qui se cristallise. La chair elle-même est céleste. »
Pour passer de cette lumière de l’enfance, à celle, incréée, des Pères de l’Église, il devra pourtant encore se libérer des « maîtres du soupçon » (Marx, Nietzsche, Freud), vaincre son nihilisme, surmonter la tentation du suicide. Si certains doutent encore qu’un livre peut changer une vie, il faut l’entendre parler de sa découverte, pendant la guerre, d’Esprit et Liberté du philosophe russe Nicolas Berdiaev. Le jeune homme s’apprêtait à rejoindre la Résistance. Le germe de sa re-naissance était planté même si toutes les digues de son éducation « laïciste » n’étaient pas encore rompues à commencer par cette « répugnance instinctive et qui s’enracinait dans (s)on enfance ».
« Le catholicisme, on me l’avait présenté comme une énorme et sournoise puissance terrestre, répressive, castratrice. La lecture de Nicolas Berdiaev a été pour moi déterminante car elle m’a permis d’entrevoir un christianisme non pas moralisateur – tel que mes parents et tant d’autres l’imaginaient –, mais profondément libérateur ». Ce n’est donc pas vers le catholicisme qu’il se tournera, ni vers le protestantisme de ses ancêtres cévenols, mais vers cette église orthodoxe et ses grands penseurs (Berdiaev, Lossky, Boulgakov…) exilés par la révolution d’Octobre, dont il est devenu – ironie du destin – l’un des principaux continuateurs.

Une relation charnelle avec le divin
Olivier Clément reçoit le baptême à trente ans (« désormais la lumière était en dedans »); l’agrégé d’histoire – il enseignera longtemps au lycée Louis-le-Grand – se révèle un philosophe religieux de premier plan, affranchi des scléroses et des tabous du christianisme occidental. Le sien passe par le mystère des visages, une relation presque charnelle avec le divin comme dans ses traditions de l’Inde au sein desquelles il dit s’être un temps « dilaté ». Car Olivier Clément n’a rien du penseur en chambre, rien d’éthéré. Chez lui la révélation chrétienne est d’abord une révélation de l’humain, l’avènement de la personne, « un accomplissement de l’humain dans le divin ». Il n’est pas sûr d’ailleurs qu’au sein même du monde orthodoxe, ses audaces aient toujours été jugées très canoniques à commencer par son rejet du confessionnalisme… Peu importe d’ailleurs, c’est à travers lui que toute une tradition théologique négligée a été diffusée en France. De même que la découverte de ses livres et d’un christianisme débarrassé des scories de l’histoire ou des pesanteurs sociologiques a été pour beaucoup une décisive révélation. Mais Olivier Clément est plus qu’un passeur. Son œuvre est une invitation à revenir à la source, souvent ignorée des chrétiens eux-mêmes, du message évangélique. Dans une perspective de sursaut créateur.
Ses contemporains se tournent-ils vers les philosophies orientales, qu’il y puise une nouvelle espérance : « On peut imaginer un christianisme renouvelé par cette connaissance des Orients, comme les Pères de l’Église ont été irrigués par la pensée antique… » Dans les dernières pages des Mémoires d’espérance il évoque Plotin. « Âgé, malade, il parlait de la beauté d’une telle manière que les disciples affluaient. »
Olivier Clément n’est peut-être pas Plotin mais de la beauté, ce vieil homme irradié du dedans en parle comme personne. Témoin ce jour en Grèce, où, dit-il, « baigné par une lumière encore plus intense que celle de mon enfance, je suis entré dans la fraîcheur d’une église : la coupole reprenait la ronde bénédiction du ciel, mais un visage s’y inscrivait. Entrer dans cette église avait résumé mon chemin : de l’azur vide à l’azur plein, de l’azur fermé sur sa propre beauté, mais au-delà tout est ténèbres, à l’azur rayonnant autour du Visage des visages. De la lumière à l’autre Lumière. »

MÉDITATIONS POUR LE TEMPS PASCAL – P. MICHEL HUBAUT, FRANCISCAIN

29 mars, 2016

http://www.croire.com/Definitions/Fetes-religieuses/Paques/Meditations-pour-le-temps-pascal

MÉDITATIONS POUR LE TEMPS PASCAL – P. MICHEL HUBAUT, FRANCISCAIN

Pour approfondir le sens de la Résurrection dans nos vies, voici quelques textes de croyants contemporains.

Chaque fête de Pâques est l’occasion de se rappeler que la résurrection n’est pas ce qui doit arriver après notre mort, mais une réalité nouvelle qui commence aujourd’hui. Chacun de nous façonne, jour après jour, son visage d’éternité. Comme pour le papillon qui sort de sa chrysalide, il faut du temps pour que l’homme ressuscite, émerge de sa gangue de terre et devienne un fils de Dieu, un enfant de lumière. Maurice Zundel se demandait souvent combien d’hommes et de femmes émergent consciemment de leur « moi » biologique préfabriqué pour devenir réellement des hommes vivants, des personnes libres et responsables de leur destin. Sans doute, toutes leurs potentialités spirituelles arriveront-elles, un jour, à maturité, mais probablement pas sur terre ! Il est inutile de chercher à imaginer ce que nous devenons après notre mort, si, en accueillant le Christ pascal, nous ne commençons pas dès maintenant à devenir des vivants. Rappelons-nous que dans la tradition chrétienne il y a deux naissances. La première, biologique, que nous n’avons pas choisie, qui nous est donnée. Et une « seconde naissance », celle dont parle le Christ, quand il nous dit qu’il nous faut « renaître d’en-haut » par l’accueil et la croissance de son Esprit. La résurrection est une victoire quotidienne sur les forces de mort. L’au-delà est une réalité déjà présente, intérieure à nous-mêmes. Cette vie nouvelle du Christ ressuscité doit devenir « l’au-dedans » de notre vie quotidienne. Se convertir, c’est sans cesse passer du dehors, de l’écorce superficielle des choses au « dedans », rencontrer l’intimité de Dieu au plus intime de nous-mêmes, lui qui est la vie de notre vie. Rencontrer le Christ de Pâques, c’est déjà re-naître, c’est s’affranchir de toutes nos servitudes. L’homme qui accueille, jour après jour son amour vivant et créateur, devient lui aussi un vivant et un créateur. Notre avenir se joue dans notre réponse à cet amour victorieux qui s’offre gratuitement à nous. C’est ce don de nous-mêmes qui nous construit, nous structure comme homme, nous ressuscite comme fils de Dieu. La résurrection, l’au-delà, c’est Dieu intime à nous-mêmes qui nous intériorise et nous libère du moi préfabriqué. Devenir un homme, une personne, sortir de son moi infantile, biologique, égocentrique et mortel, c’est rencontrer le Dieu vivant. Naître, c’est centrer toutes ses énergies pour aimer comme lui, faire de toute son existence un don de soi-même. La Résurrection de l’homme s’enracine dans ce dynamisme de l’amour qui « humanise » notre moi biologique, nous fait « passer » du moi possessif, fermé sur lui-même, au moi oblatif. Celui qui naît à l’amour, par l’amour, devient immortel puisque l’amour est l’être même de Dieu. Cet amour est notre devenir. C’est lui qui personnalise et divinise l’homme qui, comme saint François, n’est plus terrorisé par la mort biologique, car elle n’est plus qu’un « passage » de notre liberté d’aimer à un autre niveau, d’une ampleur nouvelle. Dieu nous a créés pour devenir des créateurs. Nous devons nous libérer de la pesanteur des déterminismes pour devenir le sanctuaire de la lumière et de l’amour. Telle est le mystère de la transfiguration chrétienne, qui est un mystère d’intériorisation, de personnalisation, de divinisation. Il s’agit de devenir véritablement un « homme » dont l’espace intérieur est devenu assez grand pour accueillir la vie même de Dieu. Et accueillir Dieu, c’est devenir un vivant qui possède en lui tout l’univers. L’immortalité n’est pas ce qui arrive après la mort, elle advient, aujourd’hui et maintenant, chaque fois que l’homme se dépasse pour aimer. C’est chaque jour que nous « immortalisons » notre vie. C’est chaque jour que nous ressuscitons un peu plus. Voilà la nouvelle naissance à laquelle le Christ nous invite quand on atteint sa maturité spirituelle. Maturité qui entraînera aussi notre corps, car les énergies de l’amour vont aussi transfigurer notre corps, comme celui du Christ, libéré des contraintes de notre univers, sans être pour autant désincarné. Notre mort n’est pas un anéantissement, mais un mûrissement, un accomplissement, un passage -une Pâque- vers notre véritable identité.

 

L’ESPÉRANCE DE LA VIE NOUVELLE EN JÉSUS-CHRIST – D’UNE HOMÉLIE DE SAINT EPHREM,

17 mars, 2016

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20010424_sant-efrem_fr.html

L’ESPÉRANCE DE LA VIE NOUVELLE EN JÉSUS-CHRIST  – D’UNE HOMÉLIE DE SAINT EPHREM,

D’une homélie de saint Ephrem, diacre (Sermo 3, De fine et admonitione 2. 4-5: Oeuvres, Editions Lamy 3, 216-222)

« Chasse les ténèbres nocturnes de notre esprit, Seigneur, par la lumière diurne de ta connaissance, pour que notre esprit ainsi éclairé te serve par son renouvellement dans la pureté. Lorsque le soleil entreprend sa course, les mortels commencent leur travail; fais de nos esprits, Seigneur, une belle demeure pour ce jour qui ne connaît pas de déclin. Accorde-nous de voir en nous-mêmes la vie apportée par la résurrection, et que rien ne détourne nos esprits de tes beautés. Imprime en nous, Seigneur, la trace de ce jour, qui ne dépend pas du mouvement et de la course du soleil, en nous donnant de te chercher assidûment. Par tes sacrements puissions-nous t’embrasser chaque jour en te recevant dans notre corps. Rends-nous capables d’expérimenter en nous-mêmes la résurrection que nous espérons. Nous avons caché ce trésor dans notre corps avec la grâce du baptême; que ce trésor s’enrichisse encore à la table de tes sacrements. Donne-nous la joie de ta grâce. Nous recevons ton mémorial dan ton banquet spirituel; puissions-nous le posséder effectivement lors du renouvellement futur. Puissions-nous comprendre à quelle beauté nous sommes appelés, en découvrant cette beauté spirituelle que ta volonté immortelle fait éclore au sein de la mortalité elle-même. Ton crucifiement, ô notre Sauveur, a mis fin à ta vie corporelle; accorde-nous de crucifier notre esprit pour préfigurer la vie de l’Esprit. Que ta résurrection, ô Jésus, confère sa grandeur à notre homme spirituel; que la contemplation de tes sacrements soit le miroir dans lequel nous le connaîtrons. Ton plan divin, ô notre Sauveur, préfigure le monde de l’Esprit; accorde-nous de le parcourir comme il convient à l’homme spirituel.  Ne prive pas notre âme, Seigneur, de ta manifestation spirituelle et n’éloigne pas de nos membres la chaleur de ton amour. La mortalité qui se cache dans notre corps répand en nous la corruption; que l’épanchement de ton amour spirituel purifie notre cœur des effets de cette condition mortelle. Accorde-nous, Seigneur, de nous hâter vers notre cité et de la contempler pour en prendre possession, comme Moïse du haut de la montagne. »

Prière

Chaque année, Seigneur, tu nous fais revivre le mystère pascal où l’homme, rétabli dans sa dignité, trouve l’espérance de la résurrection; donne-nous de toujours accueillir avec amour ce que nous célébrons dans la foi. Par Jésus, le Christ, notre Seigneur. Amen

« Préparé par le Département de Théologie Spirituelle de L’Université Pontificale de la Sainte-Croix »

                             

LE PSAUME, LOUANGE DE L’UNIVERS : COMMENTAIRE DE SAINT AMBROISE SUR LE PSAUME 1

8 mars, 2016

http://home.nordnet.fr/caparisot/meditation/trentetroistrad.html

LE PSAUME, LOUANGE DE L’UNIVERS : COMMENTAIRE DE SAINT AMBROISE SUR LE PSAUME 1     

 La Sainte Trinité  Qu’y a-t-il de meilleur qu’un psaume ? C’est pourquoi David dit très bien : Louez le Seigneur, car le psaume est une bonne chose : à notre Dieu, louange douce et belle ! Et c’est vrai. Car le psaume est bénédiction prononcée par le peuple, louange de Dieu par l’assemblée, applaudissement par tous, parole dite par l’univers, voix de l’Eglise, mélodieuse profession de foi, complète célèbration par la hiérarchie, allégresse de la liberté, exclamation de joie, tressaillement d’enthousiasme. Il calme la colère, éloigne les soucis, soulage la tristesse. Il nous protège pour la nuit, il nous instruit pour le jour. Il est bouclier des craintifs, fête des hommes religieux, rayon de tranquilité, gage de paix et de concorde. Comme une cithare, il réunit en un seul chant des voix diverses et inégales. Le lever du jour répercute le psaume, et son déclin en résonne encore. Dans le psaume, enseignement et agrément rivalisent : on le chante pour se réjouir et en même temps on l’apprend pour s’instruire. Lorsque tu lis les psaumes, que de richesses tu rencontres ! Lorsque je lis dans les psaumes : Cantique pour le bien-aimé, je suis embrasé par un désir d’amour divin. Chez eux, je trouve rassemblés la grâce des révélations, les prophéties de la résurrection, le trésor des promesses. Chez eux, j’apprends à éviter le péché, je désapprends la honte de faire pénitence pour mes fautes.     Qu’est-ce donc que le psaume ? C’est un instrument de musique dont joue le saint Prophète avec l’archet du Saint-Esprit et dont il fait résonner sur la terre la douceur céleste. Avec les lyres et leurs cordes, c’est-à-dire avec des restes morts, il rythme les voix différentes et inégales et dirige le cantique de louange divine vers les hauteurs du ciel. En même temps, il nous enseigne qu’il faut commencer par mourir au péché ; qu’ensuite seulement il faudra exercer les oeuvres des différentes vertus qui feront parvenir jusqu’au Seigneur l’agrément de notre piété. David nous a enseigné à chanter intérieurement, à psalmodier intérieurement ; c’est ainsi que Paul lui-même chantait, puisqu’il dit : Je prierai avec mon esprit, mais je prierai aussi avec mon intelligence ; je psalmodierai avec mon esprit, mais aussi avec mon intelligence. David nous enseigne encore à orienter notre vie et nos actions vers la perspective des biens d’en haut, de crainte que le plaisir qu’on éprouve à chanter n’excite les passions du corps, car celles-ci, bien loin de racheter notre âme, l’appesantissent. C’est ainsi que le saint Prophète David se rappelle que son âme doit psalmodier pour son rachat, lorsqu’il dit : Je jouerai le psaume pour toi, Dieu, sur la cithare, Saint d’Israël ! Mes lèvres jubileront lorsque je chanterai pour toi, et mon âme que tu as rachetée.

(‘Sur les psaumes : commentaire sur le psaume 1′ / St Ambroise de Milan)

AIMER QU’EST-CE QUE C’EST ?

3 mars, 2016

http://www.1000questions.net/fr/50q/50q01-fr.htm

AIMER QU’EST-CE QUE C’EST ?

C’est génial ! Comment vivre sans être aimé ? Et sans aimer ? Mais gare au toc. Le reflet n’est pas la lumière, le miroir n’est pas le visage. La femme de ma vie n’est pas la femme d’un instant. Se contenter de peu en amour, ce n’est pas connaître l’amour.  Parmi beaucoup de façons d’aimer, il y a l’amitié, l’amour des parents pour leurs enfants, l’amour de dévouement. L’amour exclusif d’une femme et d’un homme qui s’unissent par le mariage. L’amour qui nous saisit pour le bien ultime.  Pour trouver la vérité de l’amour entre un homme et une femme, première question : qu’est-ce qui en lui, en elle, exerce sur moi cette attraction ? • Est-ce l’utilité ou les services qu’il peut me rendre ? • Est-ce le plaisir (quel qu’il soit) que j’éprouve auprès de lui ou que nous pouvons partager ensemble ? • Est-ce les sentiments que j’éprouve à son égard ? Une relation ainsi fondée, on le sent bien, serait imparfaite : l’autre tend à y être réduit à un objet. Il est un moyen pour moi. Paradoxalement, c’est en fait vers moi que je suis tourné…  Aimer vraiment, c’est aimer l’autre pour lui-même. Un amour profond, c’est d’abord être attiré par l’autre de telle manière que je désire son bonheur. Je ne l’aime pas seulement pour ce qu’il peut m’apporter, mais je l’aime en premier lieu parce que c’est lui (ou elle). A plus forte raison, dans une telle relation, les deux personnes seront susceptibles d’éprouver des sentiments, du plaisir ou de se rendre mutuellement service. Mais ce qui fonde la relation, c’est la personne elle-même, au-delà de ses qualités ou défauts apparents.  Aimer, cela implique donc de ma part un choix libre : c’est décider d’aimer l’autre, de me tourner librement et résolument vers lui. On ne peut véritablement aimer sans un certain don de notre liberté à l’autre. Cette décision suppose d’être réciproque, car c’est la condition de la relation. Ainsi chercher le bonheur de celui ou celle qui m’aime, c’est contribuer à mon propre bonheur. Tel est l’amour, don mutuel et libre.  Bien sûr, cela n’est pas toujours facile pour autant. Nous sommes tous soumis aux changements d’humeur, à la routine de la vie quotidienne, aux épreuves qui peuvent subvenir, à notre égoïsme aussi. L’amour est fragile… Est-ce que je l’aimerai encore dans vingt ans ? Suis-je capable de supporter tel ou tel de ses défauts ? L’amour est-il possible pour la vie ? Dans l’épreuve, la maladie ?  En réalité, si notre relation s’enracine dans une décision libre et réciproque, elle peut grandir. Car l’amour, cela n’est pas donné une fois pour toutes. Méfions-nous du “coup de foudre” qui, même s’il est exaltant, n’est en définitive qu’une émotion très forte qui ne manifeste pas forcément un amour profond.  Si l’amour est une relation personnelle, alors il se construit et s’approfondit avec le temps et dans une confiance de plus en plus grande l’un pour l’autre. Cela s’entretient, se renouvelle au jour le jour à travers des gestes et des attitudes qui manifestent à l’autre la place privilégiée qu’il occupe dans notre vie. Et les événements, les épreuves ou les joies partagées peuvent ainsi contribuer à une intimité de plus en plus grande, dans la mesure où, par-delà les difficultés, nous nous tournons l’un vers l’autre.  L’amour n’est donc pas simple fusion de deux personnes, mais don mutuel de deux êtres libres avec tout ce qu’ils sont : corps, cœur et esprit, ainsi que ce bien très précieux qu’est notre vie. La logique de l’amour, c’est d’aspirer à un don définitif. Seule une décision réciproque et pour la vie permet à l’amour humain d’atteindre un certain absolu et est susceptible de combler notre cœur.  Pour le chrétien, la source et le modèle de tout amour, c’est Dieu. Il est l’amour au-delà de tout amour, réussi ou malheureux. Il nous aime avant que nous n’aimions et il nous aime encore quand nous ne sommes plus aimés. N’est-il pas ce bien ultime que nous cherchons ? 

Témoignage A douze ans, l’adolescence a été pour moi comme un raz de marée. Bouleversée intérieurement par des tensions nouvelles très fortes — désir sexuel, recherche de moi-même dans le regard des autres, besoin de paraître adulte, etc. — j’ai été aussi confrontée en camp de jeunes à une conception de l’amour (relations garçons-filles, pornographie…) que je ne connaissais pas dans ma famille, très sobre sur le sujet. Ce cocktail m’a complètement destructurée. J’ai commencé à appeler BIEN ce qui auparavant me semblait MAL. Inversion des valeurs qui m’a permis, en vrac, de vivre des expériences sexuelles diverses et variées, d’abandonner mes projets d’études, de trahir la confiance de mes parents, de faire l’expérience de la drogue et de l’alcool, etc. Je vivais alors selon deux principes : — plus je vivrai d’expériences, plus ma vie sera intéressante, — tout, tout de suite. J’ai été stoppée dans ma course étourdissante par une aventure qui a très mal tourné, quand, partie pour m’amuser, je me suis trouvée en face d’une bande de gars qui eux ne rigolaient pas et qui voulaient régler son compte à une petite minette inconséquente. Première traversée du désert, fracture, dégoût de moi et des autres.

La phase suivante, à partir de 16 ans, a consisté en une recherche de l’amour de plus en plus profonde, mais aussi biaisée. Etre aimée, tout faire pour cela. Aimer aussi, mais en me faisant piéger très vite par le mélange des sentiments (amitié/attirance), et toujours le “tout tout de suite” et “rien demain”. Au total, un champ de ruines, souvenir d’amitiés désagrégées, de grand amour tournant en eau de boudin, de beaux principes qui ne tiennent pas la route… Deuxième rupture intérieure, deuxième traversée du désert. Un désert sans Dieu, car je ne me sentais concernée en rien par la question de Dieu, la spiritualité, ou une quelconque inquiétude métaphysique. Un dossier classé avant d’avoir été ouvert. Pourtant, j’avais au fond de moi, depuis toujours, un grand désir d’aimer et de vivre un grand amour, définitif et radical. Mais qu’est-ce que j’en faisais ? Et comment faire ?

 Christine 

L’AGNEAU SANS DÉFAUT ET SANS TACHE – HOMÉLIE DE MÉLITON DE SARDES SUR LA PÂQUE

2 mars, 2016

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20010412_melitoni_fr.html  

L’AGNEAU SANS DÉFAUT ET SANS TACHE

HOMÉLIE DE MÉLITON DE SARDES SUR LA PÂQUE

« Bien des choses ont été annoncées par de nombreux prophètes en vue du mystère de Pâques qui est le Christ: à lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen. C’est lui qui est venu des cieux sur la terre en faveur de l’homme qui souffre; il a revêtu cette nature dans le sein de la Vierge et, quand il en est sorti, il était devenu homme; il a pris sur lui les souffrances de l’homme qui souffre, avec un corps capable de souffrir, et il a détruit les souffrances de la chair; par l’esprit incapable de mourir, il a tué la mort homicide. Conduit comme un agneau et immolé comme une brebis, il nous a délivrés de l’idolâtrie du monde comme de la terre d’Egypte; il nous a libérés de l’esclavage du démon comme de la puissance de Pharaon; il a marqué nos âmes de son propre Esprit, et de son sang les membres de notre corps. C’est lui qui a plongé la mort dans la honte et qui a mis le démon dans le deuil, comme Moïse a vaincu Pharaon. C’est lui qui a frappé le péché et a condamné l’injustice à la stérilité, comme Moïse a condamné l’Egypte. C’est lui qui nous a fait passer de l’esclavage à la liberté, des ténèbres à la lumière, de la mort à la vie, de la tyrannie à la royauté éternelle, lui qui a fait de nous un sacerdoce nouveau, un peuple choisi, pour toujours. C’est lui qui est la Pâque de notre salut. C’est lui qui endura bien des épreuves en un grand nombre de personnages qui le préfiguraient: en Abel il a été tué; en Isaac il a été lié sur le bois; en Jacob il a été exilé; en Joseph il a été vendu; en Moïse il a été exposé à la mort; dans l’agneau il a été égorgé; en David il a été en butte aux persécutions; dans les prophètes il a été méprisé. C’est lui qui s’est incarné dans une vierge, a été suspendu au bois, enseveli dans la terre, ressuscité d’entre les morts, élevé dans les hauteurs des cieux. C’est lui, l’agneau muet; c’est lui, l’agneau égorgé; c’est lui qui est né de Marie, la brebis sans tache ; c’est lui qui a été pris du troupeau, traîné à la boucherie, immolé sur le soir, mis au tombeau vers la nuit. Sur le bois, ses os n’ont pas été brisés; dans la terre, il n’a pas connu la corruption; il est ressuscité d’entre les morts et il a ressuscité l’humanité gisant au fond du tombeau. »

Prière Notre Père Dieu qu’il est juste d’aimer par-dessus tout, multiplie en nous les dons de ta grâce; dans la mort de ton Fils, tu nous fais espérer ce que nous croyons, accorde-nous, par sa résurrection, d’atteindre ce que nous espérons. Préparé par l’Institut de Spiritualité: Université Pontificale Saint Thomas d’Aquin

 

GRATITUDE, PATIENCE, ATTENTE. TROIS MOTS POUR L’ÉGLISE DE CHINE

22 février, 2016

http://www.30giorni.it/articoli_id_78301_l4.htm

GRATITUDE, PATIENCE, ATTENTE. TROIS MOTS POUR L’ÉGLISE DE CHINE

interview du cardinal John Tong Hon par Gianni Valente

Le cardinal John Tong Hon se présente comme une personne simple et souriante. Il privilégie les rapports paisibles et un style low profile. Parmi les nouveaux cardinaux créés par Benoît XVI dans le Consistoire du 18 février 2012, il se distingue par plus d’un trait: c’est en particulier un joueur de basket, un spécialiste de la pensée taoïste et confucéenne et un chrétien de “deuxième génération”. Mais l’actuel évêque de Hong Kong sera surtout, désormais, pour tout le monde, le septième cardinal chinois dans l’histoire de l’Église. Un cardinal appelé à offrir, du haut de son autorité, de nombreux conseils et des évaluations équilibrées concernant la question cruciale des rapports entre le Saint-Siège, l’Église de Chine et le gouvernement chinois.. JOHN TONG HON: Oui c’est vrai. C’est ma mère qui a eu, la première, l’occasion d’entrer en contact avec la foi catholique. Quand elle était adolescente, elle fréquentait le lycée tenu par les sœurs canossiennes et, parmi ces sœurs, se trouvaient de nombreuses religieuses italiennes. Il lui est arrivé une fois de rencontrer le nonce en Chine, qui était en visite dans son école. Les sœurs l’avaient choisie pour offrir des fleurs au représentant du Pape et elle en était très fière. Elle avait aussi commencé à étudier le catéchisme, mais elle n’avait pas reçu tout de suite le baptême parce que, dans sa famille, il n’y avait jamais eu aucun catholique. Elle s’est fait baptiser seulement après la Seconde Guerre mondiale, quand j’étais déjà né et avais six ans. Les années de votre enfance ont été des années terribles. Quand les Japonais ont conquis Hong Kong, nous avons fui à Macao. J’ai ensuite été confié à ma grand-mère paternelle qui vivait dans un village du Guangdong. Ce n’est qu’à la fin de la guerre que j’ai pu retrouver mes parents à Canton. C’étaient les années de la guerre civile. Les communistes et les nationalistes se battaient au nord tandis que, dans les provinces du sud, arrivaient les réfugiés et les soldats blessés. Les missionnaires américains qui étaient à Canton accueillaient et aidaient tous ceux qui en avaient besoin, quelque fût le côté dont ils provenaient. Ma mère et moi, nous les aidions à porter secours aux rescapés et aux réfugiés. En regardant le témoignage du curé de ma paroisse Bernard Meyer et de ses confrères missionnaires de Maryknoll, j’ai commencé à penser que moi aussi, quand je serais grand, je pourrais devenir prêtre. Il se trouve que vous étiez à Rome pour faire vos études justement pendant les années du Concile Vatican II. Le Concile m’a beaucoup aidé à élargir mon horizon. J’ai été ordonné prêtre quelques semaines après la fin du Concile par le pape Paul VI, le 6 janvier 1966, avec soixante et un autres diacres de 23 pays de mission, tous étudiants de Propaganda Fide. Presque un demi-siècle plus tard, au dernier Consistoire, c’est vous qui avez fait une intervention devant le Sacré Collège pour expliquer la situation de l’Église en Chine. Qu’avez-vous dit à vos collègues cardinaux? Pour décrire la situation en Chine, j’ai utilisé trois mots. Le premier est wonderful, surprenant. C’est un fait surprenant que, dans les dernières décennies, l’Église de Chine ait grandi et qu’elle continue à grandir, même si elle est soumise à un grand nombre de pressions et de restrictions. C’est une donnée objective que l’on peut vérifier à l’aide des chiffres. En 1949, les catholiques en Chine étaient 3 millions, ils sont aujourd’hui au moins 12 millions. En 1980, après le début de la réouverture voulue par Deng Xiaoping, il y avait 1300 prêtres. Aujourd’hui ils sont 3500. Et puis, il y a 5000 sœurs dont les deux tiers appartiennent aux communautés enregistrées auprès du gouvernement. On compte aussi 1400 séminaristes dont mille sont en formation dans les séminaires financés par le gouvernement. Il y a dix grands séminaires reconnus par le gouvernement et six établissements similaires liés aux communautés clandestines. De 1980 à aujourd’hui, trois mille prêtres ont été ordonnés et 4500 sœurs ont prononcé leurs vœux. 90% des prêtres a un âge compris entre vingt-cinq et cinquante ans. Tout va donc bien? Le second mot dont je me suis servi pour décrire la situation de l’Église en Chine est difficult, difficile. Et l’épreuve la plus difficile que doit affronter l’Église est celle du contrôle de la vie ecclésiale imposé par le gouvernement à travers l’Association patriotique des catholiques chinois (AP). J’ai cité une lettre qui m’a été envoyée par un évêque très respecté en Chine continentale, qui a écrit: «Dans chaque pays socialiste, le gouvernement recourt à la même méthode qui consiste à se servir de quelques prétendus chrétiens pour donner vie à des organisations étrangères aux structures propres de l’Église et leur confier le contrôle de l’Église elle-même». L’Association patriotique est un exemple de cette façon de faire. Et dans la Lettre du Pape aux catholiques chinois publiée en juin 2007, il est écrit que ces organismes ne sont pas compatibles avec la doctrine catholique. On l’a vu de nouveau dans les ordinations épiscopales illégitimes imposées à l’Église entre 2010 et 2011. John Tong Hon pendant la procession du Dimanche des Rameaux de 2010, devant la cathédrale Immaculée Conception de Hong Kong John Tong Hon pendant la procession du Dimanche des Rameaux de 2010, devant la cathédrale Immaculée Conception de Hong Kong Mais pourquoi la superpuissance chinoise sent-elle encore le besoin de contrôler si étroitement la vie de l’Église? Selon les analyses de Leo Goodstadt – le célèbre chercheur de Hong Kong qui a été aussi conseiller du dernier gouverneur britannique Chris Patten –, il y a à cela différentes raisons. Les régimes communistes craignent la compétition de la religion pour ce qui est de l’influence exercée sur les esprits, les idées et éventuellement les actions des gens. Ils s’aperçoivent que les religions ne sont pas en train de disparaître de l’horizon des sociétés humaines et qu’au contraire le nombre des adeptes des religions ne fait qu’augmenter. Et après le 11 septembre, l’inquiétude a grandi parce qu’on a vu de nouveau que les idées religieuses peuvent pousser à faire la guerre. Et, pour finir, les nouveaux leaders qui s’apprêtent à entrer en charge en 2012 doivent donner la preuve en ce moment qu’ils sont de loyaux communistes. Comme l’a écrit clairement le Pape dans sa Lettre aux catholiques chinois, «l’Église catholique qui est en Chine a la mission, non de changer la structure ou l’administration de l’État, mais d’annoncer aux hommes le Christ». Comment est-il possible que le gouvernement d’un pays aussi puissant que la Chine ait peur des ingérences politiques du Vatican? Nous vivons dans la société et notre vie réelle a nécessairement à voir avec la dimension politique. Mais L’Église n’est sûrement pas une entité politique. Ce n’est vraiment pas notre problème de changer les systèmes politiques. Et, de plus, dans notre cas, ce serait totalement impossible. Revenons à votre intervention au Consistoire. Quel est le troisième mot dont vous vous êtes servi? Le troisième mot que j’ai utilisé pour décrire la situation de l’Église en Chine est le mot possible, possible. Pour faire comprendre le motif de ce choix, j’ai lu d’autres passages de la lettre de l’évêque dont j’ai parlé précédemment. Cet évêque se déclarait serein et confiant face au présent, entre autres parce que le regard qu’il jetait sur les problèmes d’aujourd’hui était en partie fondé sur les expériences qu’il avait vécues dans les décennies orageuses de la persécution, entre 1951 et 1979. Durant ces dures épreuves du passé, il avait fait l’expérience que toute chose est dans les mains de Dieu. Et Dieu peut disposer les choses de manière que les difficultés puissent elles-mêmes, pour finir, concourir au bien de l’Église. Nous voyons ainsi que ce n’est pas l’augmentation des contrôles qui peut éteindre la foi. Il peut arriver au contraire que les contrôles aient pour effet de renforcer l’unité de l’Église, et, dans ce cas, l’avenir peut apparaître lumineux. Et nous pouvons attendre avec confiance la grâce de Dieu. La solution de certains problèmes n’arrivera peut-être pas demain mais il ne faudra pas non plus attendre des temps très lointains. Selon certains, il faut, pour affronter les problèmes, choisir entre deux voies: celle du dialogue et celle de la défense des principes. Mais, selon vous, ces deux voies sont-elle vraiment incompatibles? J’essaie, en ce qui me concerne, d’être modéré. Il vaut mieux être patient et ouvert au dialogue avec tous, y compris avec les communistes. Je suis persuadé que, sans le dialogue, aucun problème ne peut être vraiment résolu. Mais tout en dialoguant avec tous, nous devons continuer à être fermes sur les principes, ne pas les sacrifier. Cela veut dire, par exemple, qu’un évêque ne peut accepter son ordination épiscopale que si le Pape y consent. Nous ne pouvons pas renoncer à ce principe. Il fait partie de notre Credo dans lequel nous confessons l’Église comme une, sainte, catholique et apostolique. Et puis, il y a aussi la défense de la vie, les droits inviolables de la personne, l’indissolubilité du mariage… Nous ne pouvons renoncer aux vérités de foi et de morale telles qu’elles sont exposées dans le Catéchisme de l’Église catholique. On a parfois l’impression que certains milieux catholiques de Hong Kong ont pour tâche de “mesurer” le degré de catholicité de l’Église de Chine. L’Église de Hong Kong a-t-elle cette mission? La foi ne vient pas de nous. Elle vient toujours de Jésus. Et nous, nous ne sommes ni les contrôleurs ni les juges de la foi de nos frères. Nous sommes simplement un diocèse frère des diocèses du continent. Si ceux-ci le désirent, nous serons heureux de partager avec eux notre chemin et notre travail pastoral. Et s’ils se trouvent dans une situation plus difficile que la nôtre et que nous jouissons d’une plus grande liberté, nous n’avons d’autre intention que d’essayer de les aider en priant que tout les fidèles puissent garder la foi, même quand ils sont soumis à des pressions. Certains commentaires laissent entendre qu’une vaste zone ecclésiale en Chine est en marge de la fidélité à l’Église. La grande dévotion des catholiques chinois est, par ailleurs, reconnue. Comment ces deux constatations peuvent-elles se concilier? Il ne me semble jamais approprié de parler de la Chine, qui est si grande, de façon aussi globale que générique. Je ne suis en effet pas convaincu par les affirmations selon lesquelles «en Chine, la foi est forte», mais pas non plus par celles qui exagèrent en sens contraire. Tout dépend des personnes. Il y a beaucoup de bons témoins de la foi qui offrent leur vie et aussi leurs souffrances à Jésus. Et puis on trouve aussi quelques personnes qui, sous l’effet de la pression du milieu, sacrifient les principes. Ces personnes ne sont pas nombreuses. Par exemple, ces prêtres qui ont accepté de recevoir l’ordination épiscopale sans l’approbation du Pape. Ça, ça ne va pas et nous devons le dire. L’attention de beaucoup de gens se concentre justement sur les jeunes évêques. Selon certains observateurs, ils seraient fragiles et il y aurait dans leurs rangs quelques opportunistes. Que faut-il faire de ces jeunes-là? Les isoler? Les condamner? Les justifier toujours et partout? Non, non, pas d’isolement. Notre première action est de prier pour eux et aussi pour ceux qui ont commis des erreurs évidentes. Et si quelqu’un peut s’approcher d’eux et être leur ami, qu’il les exhorte à reconnaître ce qu’il y a eu d’incorrect dans leurs choix. Qu’il les exhorte aussi à envoyer une lettre aux autorités pour expliquer ce qui s’est passé et éventuellement demander pardon. C’est simplement-là une forme de correction fraternelle. Les divisions entre les deux groupes de catholiques, ceux qu’on appelle “officiels” et ceux qu’on appelle “clandestins” sont-elles dues seulement aux pressions du gouvernement et aux soumissions qu’il exige? Malheureusement, non. Il y a aussi beaucoup d’autres raisons. En Chine aussi croît le phénomène des sites internet qui attaquent les catholiques – à commencer par les évêques – avec des arguments doctrinaux et moraux. On les accuse d’avoir cédé aux prétentions illicites du régime et d’avoir ainsi trahi la foi et l’Église par opportunisme ou couardise. Qu’en pensez-vous? Je pense que la correction fraternelle dont je parlais tout à l’heureexige le dialogue et refuse les attaques via internet. Les difficultés dans lesquelles vit l’Église de Chine peuvent se répercuter sur le lien de communion avec l’évêque de Rome. Pensez-vous qu’avec le temps ce lien risque d’être perçu dans le clergé et chez les fidèles avec moins d’intensité? Je continue à noter en Chine une grande dévotion pour le Pape. Les Chinois aiment le Saint-Père, c’est sûr. Mais sur ce point, ils sont soumis à des pressions. Leur désir d’avoir des contacts normaux avec le successeur de Pierre est contrarié, ce qui ne fait que rendre plus fort ce désir; c’est une réaction presque naturelle, selon moi. John Tong Hon salue les cardinaux dans la basilique Saint-Pierre, après avoir reçu la barrette cardinalice des mains de Benoît XVI, dans le Consistoire du 18 février 2012 <BR>[© Reuters/Contrasto] John Tong Hon salue les cardinaux dans la basilique Saint-Pierre, après avoir reçu la barrette cardinalice des mains de Benoît XVI, dans le Consistoire du 18 février 2012 [© Reuters/Contrasto] Je voudrais vous poser une question sur une histoire désormais ancienne. Est-il vrai, Éminence, que vous étiez présent, il y a maintenant vingt-sept ans, à l’ordination épiscopale de l’évêque Aloysius Jin Luxian? Oui, j’étais présent à cette messe. C’était en 1985. J’étais alors un prêtre du diocèse de Hong Kong et je dirigeais depuis 1980 l’Holy Spirit Study Centre [l’éminent centre de recherche sur la vie de l’Église en Chine]. Jin m’a demandé d’être présent. Il voulait avoir mon soutien dans cette circonstance. Il m’a raconté qu’il avait été en prison, qu’il voulait garder la foi et la communion avec l’Église universelle et qu’il allait envoyer des lettres à Rome pour réaffirmer sa soumission au Siège apostolique et à la primauté du Pape. Il disait avoir tout pesé en conscience et que, dans ce moment historique, il lui semblait qu’il n’y avait pas d’autre voie que d’accepter l’ordination épiscopale. Vu les circonstances, il lui semblait qu’il devait faire ce choix pour que le diocèse de Shanghai puisse continuer à vivre et pour sauver le séminaire. Il y a sept ans, le Saint-Siège a accueilli ses requêtes et l’a reconnu comme évêque légitime de Shanghai. Mais ça, c’est le passé. Il faut maintenant regarder vers l’avenir… À propos d’avenir, quelles leçons avez-vous tirées des expériences de ces temps-là? J’ai appris que time can prove, le temps peut permettre de juger les choses. Parfois, ce n’est qu’avec le temps que l’on ne peut comprendre si une chose a été juste ou non, si les raisons qui ont dicté un choix étaient bonnes ou non. Dans l’immédiat, au moment où les choses se passent, on ne peut juger clairement des situations. Dans la longue durée, en revanche, on arrive au moins à voir si l’intention du cœur était bonne. Parfois, en Chine, les situations sont compliquées. On est soumis à des pressions, on n’a personne avec qui confronter ses idées. Mais si l’on fait des choix en ayant dans le cœur l’amour de Jésus et de l’Église, tout le monde peut, à la longue, vérifier que les intentions étaient droites. Et cela, par rapport aux événements controversés dans lesquels est impliquée la catholicité chinoise, qu’est-ce que ça comporte? On ne peut se fixer sur des points particuliers, on ne peut contrôler toutes les décisions et prétendre que tous les gestes, tous les choix opérés par les membres de l’Église en Chine soient toujours parfaits, à tout instant, dans toutes les situations. Nous sommes des êtres humains, nous sommes des êtres humains! Nous faisons tous des erreurs et nous tombons bien des fois le long de notre chemin. Mais après, on peut demander pardon. Si, au contraire, chaque erreur est isolée et devient un motif de condamnation sans appel, qui peut être sauvé? C’est avec le temps que l’on voit si un prêtre ou un évêque ont dans le cœur de bonnes résolutions. On voit si ce qu’ils font, ils le font par amour de Dieu, de l’Église et du peuple, malgré toutes leurs erreurs humaines. Voici ce qui est important: découvrir que les gens persévèrent dans la fidélité, parce qu’ils sont animés, même dans les situations difficiles, par l’amour de Jésus. À la fin, tout le monde le verra. Et assurément Dieu, qui scrute les cœurs de chacun de nous, le voit.

PENSÉES – VIEILLESSE – ÂGE MÛR

15 février, 2016

http://www.bible-notes.org/pensee-933-vieillesse-amp-nbsp-amp-nbsp-age-amp-nbsp-mur.html#content

PENSÉES – VIEILLESSE – ÂGE MÛR

Ces pensées, exprimées par différents serviteurs de Dieu, sont destinées à l’encouragement des lecteurs chrétiens.

Même les petits efforts deviennent des fardeaux, « quand les deux battants de la porte se referment sur la rue… Quand aussi on craint ce qui est haut, et qu’on a peur sur le chemin… et que la sauterelle devient pesante » (Ecc. 12 : 4-5). Mais le Seigneur ne nous demande pas au delà de ce qu’Il nous a donné. Il dit : « Va avec cette force que tu as » ( Jug. 6 : 14). La requête présentée par le psalmiste est touchante : « Ne me rejette pas au temps de ma vieillesse ; ne m’abandonne pas quand ma force est consumée » (Ps. 71 : 9). La réponse divine se trouve au chapitre 46 d’Esaïe : « Jusqu’à notre vieillesse je suis le Même, et jusqu’aux cheveux blancs, je vous porterai… et je délivrerai » (v. 4). Dieu pourrait-il délaisser son serviteur lassé par un pèlerinage éprouvant ? C’est impossible (Ps. 37 : 25). Soyons prêts à encourager un frère âgé, affaibli, découragé peut-être en marchant sur les traces de notre Modèle (Luc 7 : 13). Pour tout serviteur de Dieu, voir ses forces décliner est un moment difficile. La sollicitude affectueuse et respectueuse de ses frères plus jeunes peut l’atténuer (Lév. 19 : 32). Quelles que soient nos infirmités, ne baissons pas les bras. Dieu veut être notre force. La Parole de Dieu abonde en exemples d’une vieillesse qui porte des fruits pour Dieu (Ps. 92: 14). Citons Caleb. Il peut s’écrier, à 85 ans : « Telle que ma force était alors (45 ans auparavant), telle ma force est maintenant, pour la guerre, et pour sortir et entrer » (Jos. 14 : 9-15). Citons aussi Barzillaï (2 Sam. 17 : 27-29 ; 19 : 19) et Anne (Luc 2 : 36-38). Tous ceux qui avancent en âge peuvent prendre part à plus d’un service précieux. Tel celui cité au Psaume 71 : « annoncer ton bras à cette génération, ta puissance à ceux qui viendront » (v. 18). La louange aussi (v. 8, 14, 22-23). L’intercession ne connaît aucune limitation liée à l’âge. Paul nous a laissé un exemple bienfaisant d’une telle activité soutenue en faveur de ses frères. « Jusqu’à votre vieillesse, je suis le Même, et jusqu’aux cheveux blancs, je vous porterai » (Es. 46 : 3). Vieillir, c’est accepter les rides du visage, la neige des cheveux, comme de chers présents qui veulent nous dire, en leur simple langage : « le déclin est venu ; sur toi, la nuit descend ». Vieillir, c’est constater la faiblesse croissante de nos corps lassés par de rudes travaux, notre oeil moins assuré, notre marche plus lente, et les moindres ennuis devenant des fardeaux. Vieillir, c’est aussi revenir en arrière, revivre le passé si riche en souvenirs, songer aux disparus, partis dans la lumière, vers laquelle, souvent, tendent tous nos désirs. Vieillir, c’est regarder la route parcourue, regretter nos erreurs, notre manque de foi, et bénir notre Dieu qui prépare l’issue de nos sombres tunnels, en calmant notre émoi. Vieillir, c’est par la foi, voir la porte entr’ouverte, que Dieu dans son amour révèle à notre c½ur ; c’est faire toujours plus l’heureuse découverte que ceux qui L’ont aimé possèdent le bonheur. Vieillir c’est avancer sans regrets, sans alarmes, en nous réjouissant des dernières clartés qui nous font oublier nos peines et nos larmes, répandant en nos c½urs paix et sérénité.

TAIZÉ 2006 – QUE SIGNIFIE « ACCUEILLIR LE RÈGNE DE DIEU COMME UN ENFANT » ?

3 février, 2016

http://www.taize.fr/fr_article3261.html

TAIZÉ 2006 – QUE SIGNIFIE « ACCUEILLIR LE RÈGNE DE DIEU COMME UN ENFANT » ?

Un jour, des gens amènent à Jésus des enfants pour qu’il les bénisse. Les disciples s’y opposent. Jésus se fâche et leur enjoint de laisser les enfants venir à lui. Puis il leur dit : « Quiconque n’accueille pas le règne de Dieu comme un petit enfant, n’y entrera certainement pas » (Marc 10,13-16). Il est utile de se rappeler que, plus tôt, c’est à ces mêmes disciples que Jésus avait dit : « Le mystère du règne de Dieu vous a été donné » (Marc 4,11). À cause du règne de Dieu, ils ont tout quitté pour suivre Jésus. Ils cherchent la présence de Dieu, ils veulent faire partie de son règne. Mais voilà que Jésus les avertit qu’en repoussant les enfants, ils sont justement en train de se fermer la seule porte d’entrée dans ce royaume de Dieu tant désiré ! Mais que signifie « accueillir le règne de Dieu comme un enfant » ? On comprend en général : « accueillir le règne de Dieu comme un enfant l’accueille ». Cela correspond à une parole de Jésus en Matthieu : « Si vous ne retournez pas et ne devenez pas comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le règne des cieux » (Matthieu 18,3). Un enfant fait confiance sans réfléchir. Il ne peut pas vivre sans faire confiance à ceux qui l’entourent. Sa confiance n’a rien d’une vertu, elle est une réalité vitale. Pour rencontrer Dieu, le meilleur dont nous disposons, c’est notre cœur d’enfant qui est spontanément ouvert, ose demander simplement, veut être aimé. Mais on peut aussi bien comprendre : « accueillir le règne de Dieu comme on accueille un enfant ». Car le verbe « accueillir » a en général le sens concret d’« accueillir quelqu’un », comme on peut le constater quelques versets plus tôt où Jésus parle d’« accueillir un enfant » (Marc 9,37). Dans ce cas, c’est à l’accueil d’un enfant que Jésus compare l’accueil de la présence de Dieu. Il y a une connivence secrète entre le règne de Dieu et un enfant. Accueillir un enfant, c’est accueillir une promesse. Un enfant croît et se développe. C’est ainsi que le règne de Dieu n’est jamais sur terre une réalité achevée, mais une promesse, une dynamique et une croissance inachevée. Et les enfants sont imprévisibles. Dans le récit d’Evangile, ils arrivent quand ils arrivent, et de toute évidence ce n’est pas au bon moment selon les disciples. Mais Jésus insiste qu’il faut les accueillir puisqu’ils sont là. C’est ainsi qu’il nous faut accueillir la présence de Dieu quand elle se présente, que ce soit au bon ou au mauvais moment. Il faut jouer le jeu. Accueillir le règne de Dieu comme on accueille un enfant, c’est veiller et prier pour l’accueillir quand il vient, toujours à l’improviste, à temps ou à contretemps. Pourquoi Jésus a-t-il montré une attention si particulière aux enfants ? Un jour, les douze apôtres discutent pour savoir qui est le plus grand (Marc 9,33-37). Jésus, qui a deviné leurs réflexions, leur dit une parole déroutante qui bouleverse et ébranle leurs catégories : « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous ». À sa parole, il joint le geste. Il va chercher un enfant. Est-ce un enfant qu’il trouve abandonné au coin d’une rue de Capharnaüm ? Il l’amène, le « place au milieu » de cette réunion de futurs responsables de l’Eglise et leur dit : « Quiconque accueille un enfant comme celui-ci en mon nom, c’est moi qu’il accueille ». Jésus s’identifie à l’enfant qu’il vient de prendre dans ses bras. Il affirme que c’est « un enfant comme celui-ci » qui le représente le mieux, à tel point qu’accueillir un tel enfant revient à l’accueillir lui-même, lui, le Christ. Peu avant, Jésus avait dit cette parole énigmatique : « Le fils de l’homme est livré aux mains des hommes » (Marc 9,31). « Le fils de l’homme », c’est lui-même, et ce sont en même temps tous les fils d’homme, c’est-à-dire tous les humains. Le mot de Jésus peut se comprendre : « les humains sont livrés au pouvoir de leurs semblables ». C’est en particulier lors de l’arrestation et des mauvais traitements infligés à Jésus que se vérifiera une fois de plus que les hommes font n’importe quoi avec leurs semblables qui sont sans défense. Que Jésus se reconnaisse dans l’enfant qu’il est allé chercher, n’est alors pas étonnant, car, si souvent, les enfants aussi sont livrés sans défense à ceux qui ont pouvoir sur eux. Jésus a montré une attention si particulière aux enfants car il veut, parmi les siens, une attention prioritaire pour les démunis. Jusqu’à la fin des temps, ils seront ses représentants sur la terre. Ce qu’on leur fera, c’est à lui, le Christ, qu’on le fera (Matthieu 25,40). Les « plus petits de ses frères », ceux qui comptent peu et que l’on traite comme on veut car ils n’ont ni pouvoir ni prestige, sont le chemin, le passage obligé, pour vivre en communion avec lui. Si Jésus a placé un enfant au milieu de ses disciples réunis, c’est aussi afin qu’eux-mêmes acceptent d’être des petits. Il le leur explique, dans l’enseignement qui suit : « Quiconque vous donne à boire un verre d’eau au nom de ce que vous êtes de Christ, amen, je vous le dis qu’il ne perd pas sa récompense » (Marc 9,41). Allant sur les chemins pour annoncer le règne de Dieu, les apôtres seront aussi « livrés aux mains des hommes ». Ils ne sauront jamais à l’avance comment ils seront accueillis. Mais même pour ceux qui les accueilleront avec un simple verre d’eau fraîche, sans même les prendre très au sérieux, ils auront été porteurs d’une présence de Dieu.

 

LA PLUS GRANDE VERTU EST LA CHARITÉ – bienheureux Jean Dominici

2 février, 2016

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20010130_dominici_fr.html 

LA PLUS GRANDE VERTU EST LA CHARITÉ

Du Traité de l’amour de charité du bienheureux Jean Dominici

Préparé par l’Université Pontificale URBANIANA,

« La foi et l’espérance n’ont leur raison d’être que pour l’homme; la charité existe en Dieu. La foi peut transporter les montagnes; la charité crée les montagnes, le ciel et la terre. La foi exhorte la créature à faire tous ses efforts pour s’acheminer vers le paradis; la charité demande à Dieu de la faire descendre sur la terre pour que l’homme parvienne au ciel par la route de sa propre charité. La foi dit à l’homme: Sers Dieu, comme c’est ton devoir. La charité dit à Dieu: Fais-toi homme et mets-toi au service de l’homme car il te doit plus qu’il ne peut te donner. La foi dit à l’homme: Frappe à la porte du ciel, pour qu’il s’ouvre à toi. La charité dit à Dieu: Déchire le ciel pour que l’homme le trouve ouvert.La foi enseigne à l’homme à mourir par amour pour Dieu. La charité invite Dieu à mourir pour l’homme, et l’homme à mourir pour son Dieu.La foi montre Dieu à l’homme, mais de loin. La charité rapproche l’homme de Dieu; elle qui a fait de Dieu un homme, elle fait que l’homme soit Dieu. La foi est une dame parce qu’elle règne seulement ici-bas où nous n’avons pas de cité permanente, mais où nous attendons la cité future. La charité est l’impératrice du ciel et de la terre. La foi est paysanne, la charité est citadine.La foi est l’impératrice de beaucoup d’humbles créatures; la charité est l’impératrice des anges. La foi est située au-dessus des esclaves; la charité au-dessus des enfants bien-aimés et des saints. Réfléchissez bien à ceci.S’il y avait dans le soleil un monde pareil au nôtre, par quoi ce monde serait-t-il éclairé, chauffé, réjoui et dirigé? Nullement par les rayons du soleil, mais par sa substance seulement, puisque le soleil contiendrait dans sa substance cet univers entier. En fait, il éclaire, chauffe, réjouit et dirige notre monde non par lui-même, car il ne peut venir jusqu’à nous, mais par son rayon. La raison pour laquelle le soleil accom­plit tout cela par son rayon est qu’il ne peut venir à nous. Songe que cela est encore plus vrai de Dieu. Le Père, comparable au soleil, engendre son rayon, qui est son Verbe éternel et essentiel. Le Père et le Verbe, comme le soleil et le rayon, pro­duisent la chaleur essentielle qui est l’Esprit Saint, si bien que ce soleil divin est puissance, lumiere et feu; Père, Fils et Saint-Esprit; puissance, vérité et charité; un seul Dieu et trois personnes; et ce soleil divin est tout entier puissant, tout entier brillant, tout entier ardent.Non pas trois puissant mais une seule; non pas trois lumières, mais une seule, non pas trois feux, mais un seul. Néanmoins, ici peut naître un léger doute, On a dit que nous tous sommes en Dieu, et que Dieu est amour; il peut donc sembler que nous sommes tous dans l’amour de charité et qu’ainsi nous sommes tous dans la vérité, et tous dans la vraie puissance. Mais cela est faux, parce que peu d’hommes sont dans la charité; beaucoup, au contraire, vivent dans l’erreur et le mensonge, et le plus grand nombre est faible et paralysé par sa fragilité. Je réponds d’abord par un exemple. Beaucoup de poissons sont au soleil, mais comme ils sont protégés par l’eau, ils ne succombent pas à la chaleur. Beaucoup d’aveugles sont dans la lumière et ne voient pas; beaucoup de récipients contiennent des aliments et ne mangent pas.Vous voyez donc qu’il ne suffit pas d’être dans un lieu pour participer à sa vertu, si l’on n’y est pas disposé. Un malade mange sans profit, un mort approché du feu ne sent pas la chaleur. Quelqu’un qui se trouve au soleil et qui se fait asperger sans cesse d’eau glacée ne se réchauffe pas et ne cesse de frissonner. Ainsi, bien que nous soyons placés dans le feu divin, qui ne réchauffe pas le corps mais qui embrase l’âme, nous ne retirons aucun bénéfice de ce feu divin si l’on ne cesse de jeter sur notre âme la grêle des désirs charnels, la glace de l’esprit du monde, la bise des tentations. Il est nécessaire que nous tenions notre âme éloignée de tout cela et alors il sera vrai, comme dit le psalmiste, que nul n’échappe à son ardeur. » 

avec la collaboration des Instituts Missionnaires

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