Archive pour la catégorie 'Liturgie Sacrementaire'

QU’EST-CE QUE LA RÉCONCILIATION ?

11 janvier, 2016

http://www.eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/les-sacrements/la-penitence-et-la-reconciliation/372314-penitence-et-reconciliation-en-questions/

QU’EST-CE QUE LA RÉCONCILIATION ?

La vie n’est possible que si nous savons pardonner, nous réconcilier avec nous mêmes, avec les autres et avec Dieu. Le sacrement de la réconciliation nous invite à reconnaître que l’amour de Dieu nous permet de dépasser les conflits.

Source: Site internet du diocèse de Belfort

Pourquoi se confesser ?
Au sujet du sacrement de réconciliation, nous sommes souvent partagés entre la conception d’autrefois et les idées actuelles. Jadis, la confession était très importante pour rester en état de grâce car le péché mortel entraînait le châtiment éternel de l’enfer. Cette perspective entraînait l’inquiétude et parfois le scrupule. Actuellement la confession apparaît à beaucoup comme une routine inutile. Pour comprendre pourquoi il faut se confesser, il faut d’abord avoir une juste conception du péché.
Or actuellement, le mot péché n’est pas très bien vu; il évoque le moraliste qui donne des leçons. On hésite a appeler quelque chose « péché ». La notion de péché semble s’opposer au respect de la liberté humaine et à l’épanouissement de la personnalité. Le sentiment de culpabilité apparaît comme le résultat maladif de tabous inconscients.. L’Évangile ne parle pas souvent du péché, mais plutôt du pardon. Il aborde le péché à partir de l’initiative divine qui vient manifester sa miséricorde. Jésus appelle à la conversion pour accueillir la Bonne nouvelle du Royaume (Mc 1,15). Jésus va au devant des pécheurs, car il n’est pas venu pour les biens portants, mais pour les malades. Il pardonne au paralytique (Mc 2,5), à la femme pécheresse (Luc 7,48), à la femme adultère (Jn 8,11), à Zachée (Luc 19,9-10) et sur la croix à ses bourreaux (Luc 23,34).
Il montre la miséricorde divine par les paraboles de la brebis perdue et du fils prodigue (Luc 15). Ce qui montre le mieux dans l’Évangile la gravité du péché, c’est que Jésus affirme à la Cène que son sang est versé pour le pardon des péchés (Mt 26/28). C’est un aspect de l’Évangile que l’on oubli souvent. Le péché est, un manque d’amour de Dieu qui atteint la relation entre l’homme et Dieu. On se reconnaît pécheur non pas en se regardant, mais en regardant l’amour de Dieu pour nous. On se demande parfois pourquoi confesser ses péchés à un prêtre. L’essentiel n’est il pas de demander à Dieu son pardon ? Ne pouvons-nous pas nous confesser directement à Dieu ? En fait Jésus a voulu donner à son Église la mission de pardonner les péchés.
Il a promis à Pierre et aux apôtres le pouvoir de » lier et de délier « (Mt 16,19) càd, de condamner ou d’absoudre. Après sa résurrection, lors qu’il est apparu à ses disciples, qu’il leur a donné l’Esprit Saint et qu’il leur a dit : « Recevez le Saint Esprit. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. » (Jean 20, 22-23) Jésus leur a donné la mission de pardonner. Le symbole central du sacrement du pardon est la rencontre entre le prêtre et le pénitent qui exprime la rencontre personnelle du pécheur avec Dieu.
Source: Site internet du diocèse de Nanterre

Comment se confesser ?
On commence habituellement a préparer sa confession en faisant son examen de conscience et la liste de ses péchés, mais il y a quelque chose à faire avant. Il faut d’ abord se mettre devant la Parole de Dieu en lisant un passage de la Bible. L’écoute de la Parole en nous révélant la miséricorde de Dieu nous dévoile en même temps notre propre péché. Il y a des manières diverses de faire son examen de conscience.
On peut chercher ce que le Seigneur nous demande le plus actuellement, ce qui nous paraît le plus important à ses yeux… Se préparer à la confession, ce n’est seulement faire son examen de conscience. Il y a quelque chose de plus important que l’on néglige parfois. C’est de les regretter avec humilité en comprenant qu’ils ont offensé Dieu, qu’ils sont un manque d’amour de Dieu, c’est avoir la « contrition » C’est enfin être décidé à prendre les moyens pour ne plus retomber dans le péché, c.à.d. prendre des résolutions concrètes.
On est parfois découragé de se confesser en pensant que l’on recommencera les mêmes péchés. Il est certain que la confession ne nous transforme pas complètement. Mais le sacrement du pardon nous met dans l’humilité devant Dieu qui nous aime malgré notre faiblesse et cette rencontre est essentielle. Parfois, on ne voit pas en quoi consistent nos péchés, on ne sait pas quoi dire.
On n’a parfois l’impression que l’on n’a pas de péchés. Cependant, si nous ne voyons pas nos péchés, nos voisins, eux, les connaissent. St Jean dit » Si nous disons que nous n’avons pas péché, la vérité n’est pas en nous » (1 Jn 1,8-10). Si on a l’impression de n’avoir rien a dire, c’est le signe qu’il y a quelque chose à changer dans sa vie. Il arrive que l’on se confesse rarement par ce qu’on n’en éprouve pas le besoin. Si on comprend bien ce qu’est ce sacrement… Notre participation ne repose pas seulement sur un besoin ressenti, mais sur la conviction de son importance pour notre relation avec Dieu.
Le sacrement de réconciliation répond à un besoin. Il nous procure la paix du cœur, allège notre conscience sur la quelle pèse parfois une forte culpabilité. Cet aveu est parfois pénible, humiliant, mais il nous libère d’un poids, c’est une libération. De plus en nous faisant formuler nos péchés, il nous aide à voir plus clair en nous, à faire la vérité sur nous-mêmes. Le sacrement de réconciliation nous donne aussi une force pour nous guérir de nos faiblesses et apporte un élan à notre vie chrétienne. On éprouve la paix et la joie après s’être confessé.
Source: Site internet du diocèse de Nanterre

Qu’est-ce que le péché ?
Aujourd’hui dans le langage courant, le péché fait sourire quand on l’associe à la gourmandise ou il fait peur quand on l’associe au « péché mortel ». Le péché de l’homme est en fait tout manquement à l’amour.
Le Dieu que nous adorons s’est révélé en Jésus-Christ comme le Dieu d’amour. La loi du Christ est la loi d’amour : « Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés ; comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres » dit Jésus dans son discours après la Cène. Déjà, dans l’Ancien Testament, on pouvait lire : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces et de tout ton esprit ; tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
Le péché est toujours un manquement à l’amour :
• Soit à l’amour que nous vient de Dieu : refus d’accueillir cet amour, d’écouter sa parole et d’y conformer notre vie ;
• Soit à l’amour envers notre prochain et envers nous-même. Ces manquement à l’amour vont être plus précisément des manquements à la foi envers Dieu, à la charité envers notre prochain et à l’espérance envers nous-mêmes et ils pourront se décliner de mille façons, en pensée, en parole, par action et par omission.
Le chapitre 15 de l’Evangile selon Saint Luc, en particulier la parabole du fils prodigue, illustre fort bien tout à la fois notre péché et la miséricorde de Dieu.R : Le péché n’est ni une faute ni une erreur. Il s’agit d’un manque d’amour conscient et volontaire. Cette rupture blesse son auteur, son entourage et sa relation à Dieu. C’est la Parole de Dieu qui éclaire la conscience du baptisé et lui révèle ainsi son besoin impérieux de bénéficier de la miséricorde de Dieu.
Source: Site internet du diocèse de Paris

Comment reçoit-on le sacrement de Pénitence et de Réconciliation ?
Celui qui veut obtenir la réconciliation avec Dieu et avec l’Église doit dire au prêtre tous les péchés graves qu’il n’a pas encore confessés et dont il se souvient, après avoir examiné soigneusement sa conscience. Il est aussi recommandé de confesser ses péchés moins graves : péchés véniels.
Le confesseur propose une pénitence pour réparer les dommages causés par les péchés et rétablir une manière de vivre propre aux disciples du Christ.
Source : Le petit guide de la Foi Catholique, Mgr André Vingt-trois, Editions Le Sénevé / Cerp

Qu’apporte le sacrement de la Pénitence ?
Le sacrement de la Pénitence nous réconcilie avec Dieu et nous fait rentrer dans la pleine communion avec Lui. Il nous réconcilie aussi avec l’Église et avec nos frères. Il nous donne la paix et la sérénité et fait grandir nos forces spirituelles pour vivre en chrétiens.
Source : Le petit guide de la Foi Catholique, Mgr André Vingt-trois, Editions Le Sénevé / Cerp

LE TRÉSOR CACHÉ DU PAPE RATZINGER: SES HOMÉLIES À PROPOS DU BAPTÊME – par Sandro Magister

8 janvier, 2015

http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1350270?fr=y

LE TRÉSOR CACHÉ DU PAPE RATZINGER: SES HOMÉLIES À PROPOS DU BAPTÊME

La plus récente, qu’il a prononcée il y a quelques jours, est la quinzième de la série. Elle comporte un passage fulgurant contre les « pompes du diable » qui triomphent dans la mentalité courante. Un « spectacle » auquel tout baptisé a promis de renoncer

par Sandro Magister

ROME, le 18 juin 2012 – Elle a été à peine remarquée par le grand public. Mais la « lectio divina » que Benoît XVI a prononcée, le soir du lundi 11 juin, à la basilique Saint-Jean-de-Latran, qui est la cathédrale de Rome, constitue l’un des sommets parmi ces chefs-d’œuvre que sont ses homélies consacrées au Baptême. Que Benoît XVI soit destiné à entrer dans l’histoire en raison de sa prédication liturgique, comme l’a fait avant lui le pape Léon le Grand, c’est désormais une hypothèse plus que consolidée. Mais, dans le grand « corpus » de ses homélies, celles qui sont consacrées au Baptême ont une place d’une importance unique. Le commandement de baptiser « au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » figure parmi les dernières paroles prononcées par Jésus sur cette terre. L’Église les a prises extrêmement au sérieux et c’est ainsi qu’elle fait naître ses enfants, depuis toujours. Par conséquent, le Baptême est l’acte de naissance et la carte d’identité de tout chrétien. Voilà pourquoi il occupe une place tellement centrale dans la prédication de Benoît XVI. À une époque où l’analphabétisme religieux est largement répandu, où la foi est vacillante et où les baptêmes sont en baisse dans les pays de vieille chrétienté, le pape Joseph Ratzinger veut repartir des fondements de la vie chrétienne et les présenter de nouveau aux regards de tous dans leur beauté éclatante. Ses homélies baptismales en sont un exemple évident. Ainsi que la « lectio divina » qu’il a adressée, le 11 juin dernier, aux fidèles de Rome qui remplissaient la cathédrale de cette ville. Benoît XVI a parlé en improvisant, comme le faisaient jadis les Pères de l’Église. Au-dessus de lui, ses auditeurs pouvaient admirer, au centre de l’antique mosaïque de l’abside, une croix ornée de pierres précieuses, de laquelle jaillissait en abondance de l’eau vive. Et le lien entre le Baptême et la croix a bien été l’un des points saillants de la « lectio divina » prononcée par le pape, qui a pris comme point de départ le « commandement » que Jésus donna à ses apôtres avant de monter au ciel : « Allez, de toutes les nations faites des disciples, en les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». Un autre passage de la « lectio » qui a beaucoup frappé les personnes présentes est celui où le pape a redonné du sens et une fraîcheur actuelle à une vieille formule du rite : la renonciation de celui qui reçoit le baptême « à Satan et à ses pompes », formule qui est aujourd’hui affaiblie en renonciation « aux séductions du mal ». Depuis qu’il a été élu pape, il y a sept ans, Benoît XVI a administré quatorze fois le Baptême, dont il a fait à chaque fois le sujet de son homélie de ce jour-là. Il l’a fait sept fois le dimanche où l’on fête le Baptême de Jésus dans le Jourdain, dimanche qui, chaque année, suit l’Épiphanie. Et les sept autres fois, il l’a fait au cours de la veillée pascale. Dans le premier cas, en baptisant des enfants, presque toujours romains, à la Chapelle Sixtine, et dans le second cas, en baptisant des adultes, provenant de toutes les parties du monde, à la basilique Saint-Pierre. On peut lire ci-dessous la transcription intégrale de la « lectio divina » que le pape a prononcée à la basilique Saint-Jean-de-Latran, le 11 juin 2012, en ouverture d’un colloque organisé par le diocèse de Rome, son diocèse, et consacré précisément au Baptême et à sa « pastorale ». Mais, à la suite de ce texte, le lecteur trouvera les liens permettant d’accéder à la totalité du « corpus » d’homélies baptismales prononcées par Benoît XVI : les sept qu’il a jusqu’à présent prononcées les dimanches où l’on fête le Baptême de Jésus et les sept autres correspondant aux veillées pascales. _________

S’IMMERGER DANS LE PÈRE, DANS LE FILS, DANS LE SAINT-ESPRIT

par Benoît XVI Chers frères et sœurs, [...] les dernières paroles que le Seigneur ait adressées sur cette terre à ses disciples ont été celles-ci : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, en les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit » (cf. Mt 28, 19). Faites des disciples et baptisez. Pourquoi n’est-il pas suffisant, pour être son disciple, de connaître les doctrines de Jésus, de connaître les valeurs chrétiennes ? Pourquoi est-il nécessaire d’être baptisé ? C’est là le thème de notre réflexion, afin de comprendre la réalité, la profondeur, du sacrement du Baptême. Une première porte s’ouvre si nous lisons attentivement ces paroles du Seigneur. Le choix de l’expression « au nom du Père » dans le texte grec est très important : le Seigneur dit « eis » et non pas « èn », c’est-à-dire qu’il ne dit pas « au nom » de la Trinité, comme nous disons, nous, qu’un sous-préfet parle « au nom » du préfet ou qu’un ambassadeur parle « au nom » du gouvernement. Non. Il dit : « eis to onoma ». Cela signifie une immersion dans le nom de la Trinité, le fait que nous sommes insérés dans le nom de la Trinité, une interpénétration de l’être de Dieu et de notre être, le fait que nous sommes immergés dans le Dieu Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, de même que dans le mariage, par exemple, deux personnes deviennent une seule chair, qu’elles deviennent une réalité unique et nouvelle, avec un nom unique et nouveau. Le Seigneur nous a aidés à comprendre encore mieux cette réalité par sa discussion avec les sadducéens à propos de la résurrection. Les sadducéens ne reconnaissaient, du canon de l’Ancien Testament, que les cinq Livres de Moïse, dans lesquels la résurrection n’apparaît pas ; c’est pourquoi ils la niaient. Le Seigneur, précisément à partir de ces cinq Livres, démontre la réalité de la résurrection et dit : Ne savez-vous pas que Dieu s’appelle Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ? (cf. Mt 22, 31-32). Donc, Dieu prend ces trois noms et c’est bien en son nom qu’ils deviennent « le » nom de Dieu. Pour comprendre qui est ce Dieu, il faut voir ces personnes qui sont devenues le nom de Dieu, un nom de Dieu, qui sont immergées en Dieu. Et ainsi nous voyons que ceux qui sont dans le nom de Dieu, qui sont immergés en Dieu, sont vivants, parce que Dieu – dit le Seigneur – est un Dieu non pas des morts, mais des vivants et, s’il est le Dieu de ceux-là, il est le Dieu des vivants. Les vivants sont vivants parce qu’ils sont dans la mémoire, dans la vie de Dieu. Et c’est bien cela qui se produit dans le fait que nous sommes baptisés : nous devenons insérés dans le nom de Dieu, de telle sorte que nous appartenons à ce nom, que son nom devient notre nom et que, nous aussi, nous pourrons, par notre témoignage – comme les trois personnages de l’Ancien Testament – être des témoins de Dieu, signe de qui est ce Dieu, nom de ce Dieu. C’est pourquoi être baptisé, cela signifie être uni à Dieu. Dans une unique et nouvelle existence, nous appartenons à Dieu, nous sommes immergés en Dieu lui-même. Lorsque nous pensons à cela, nous pouvons immédiatement en percevoir plusieurs conséquences. La première, c’est que Dieu n’est plus très lointain pour nous, qu’il n’est pas une réalité à discuter – existe-t-il ou non ? – mais que nous sommes en Dieu et que Dieu est en nous. La priorité, la centralité, de Dieu dans notre vie, c’est une première conséquence du Baptême. À la question : « Dieu existe-t-il ? », la réponse est : « Oui, il existe et il est avec nous ; cette proximité de Dieu, ce fait d’être en Dieu lui-même, qui n’est pas une étoile lointaine mais le cadre de ma vie, cela a quelque chose à voir avec notre vie ». Ce serait la première conséquence et elle devrait donc nous dire que nous devons tenir compte de cette présence de Dieu et vivre réellement en sa présence. Une seconde conséquence de ce que je viens de dire est que ce n’est pas nous qui nous faisons chrétiens. Devenir chrétien, ce n’est pas le résultat d’une décision que j’ai prise : « Maintenant je me fais chrétien ». Bien évidemment, ma décision est également nécessaire, mais il s’agit avant tout d’une action de Dieu en moi : ce n’est pas moi qui me fais chrétien, c’est Dieu qui m’engage, qui me prend en main, et c’est comme cela, en disant « oui » à cette action de Dieu, que je deviens chrétien. Devenir chrétien, en un certain sens, est quelque chose de « passif » : ce n’est pas moi qui me fais chrétien, c’est Dieu qui fait de moi l’un des siens, c’est Dieu qui me prend en main et qui réalise ma vie dans une nouvelle dimension. De même que ce n’est pas moi qui me fais vivre, mais c’est la vie qui m’est donnée ; je ne suis né non pas parce que je me suis fait homme, mais parce qu’il m’est donné d’être homme. De même, le fait d’être chrétien est également un don que je reçois, c’est pour moi un « passif », qui devient un « actif » dans notre vie, dans ma vie. Et ce fait du « passif », ce fait que l’on ne se fait pas chrétien soi-même mais que l’on est fait chrétien par Dieu, implique déjà un peu le mystère de la croix : ce n’est qu’en mourant à mon égoïsme, en sortant de moi-même, que je peux être chrétien. Un troisième élément qui s’ouvre tout de suite dans cette façon de voir est que, bien entendu, étant immergé en Dieu, je suis uni à mes frères et à mes sœurs, parce que tous les autres sont en Dieu et que, si je suis tiré de mon isolement, si je suis immergé en Dieu, je suis immergé dans la communion avec les autres. Être baptisé n’est jamais un acte solitaire de « moi », mais c’est toujours, nécessairement, une façon d’être uni à tous les autres, d’être en union et en solidarité avec tout le corps du Christ, avec toute la communauté de mes frères et sœurs. Ce fait que le Baptême m’insère dans la communauté rompt mon isolement. Nous devons en tenir compte dans notre façon d’être chrétiens. Et enfin, revenons à ce que le Christ dit aux sadducéens : « Dieu est le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob » (cf. Mt 22, 32) ; par conséquent ceux-ci ne sont pas morts ; s’ils sont de Dieu, ils sont vivants. Cela veut dire que par le Baptême, par l’immersion dans le nom de Dieu, nous sommes, nous aussi, déjà immergés dans la vie immortelle, nous sommes vivants pour toujours. Autrement dit, le Baptême est une première étape de la résurrection : immergés en Dieu, nous sommes déjà immergés dans la vie indestructible, la résurrection commence. De même qu’Abraham, Isaac et Jacob, étant « nom de Dieu », sont vivants, de même nous, étant insérés dans le nom de Dieu, nous sommes vivants dans la vie immortelle. Le Baptême est le premier pas de la résurrection, l’entrée dans la vie indestructible de Dieu. Donc, dans un premier temps, à travers la formule baptismale de saint Matthieu, à travers les dernières paroles du Christ, nous avons déjà un peu vu l’essentiel du Baptême. Maintenant examinons le rite sacramentel, afin de pouvoir comprendre encore plus précisément ce qu’est le Baptême. Ce rite, comme celui de presque tous les sacrements, se compose de deux éléments : la matière – de l’eau – et la parole. C’est très important. Le christianisme n’est pas quelque chose de purement spirituel, quelque chose d’uniquement subjectif, ce n’est pas une affaire de sentiment, de volonté, d’idées, c’est une réalité cosmique. Dieu est le Créateur de toute la matière, la matière entre dans le christianisme, et ce n’est que dans ce grand contexte réunissant la matière et l’esprit que nous sommes chrétiens. Il est donc très important que la matière fasse partie de notre foi, que le corps fasse partie de notre foi. La foi n’est pas purement spirituelle, mais Dieu nous insère ainsi dans toute la réalité du cosmos et il transforme le cosmos, il le tire à lui. Et avec cet élément matériel – l’eau – c’est non seulement un élément fondamental du cosmos qui entre en jeu, une matière fondamentale créée par Dieu, mais c’est aussi tout le symbolisme des religions, parce que dans toutes les religions l’eau a quelque chose à dire. La démarche des religions, cette recherche de Dieu selon diverses formes – elles peuvent être erronées, mais il s’agit toujours d’une recherche de Dieu – est intégrée dans le sacrement. Les autres religions, par leur cheminement vers Dieu, sont présentes, elles sont intégrées, et c’est ainsi que se fait la synthèse du monde. C’est toute la recherche de Dieu qui s’exprime dans les symboles des religions et surtout, bien évidemment, dans le symbolisme de l’Ancien Testament et qui, avec toutes ses expériences du salut et de la bonté de Dieu, devient ainsi présente. Nous reviendrons sur ce point. L’autre élément, c’est la parole, et cette parole se présente sous trois aspects : des renonciations, des promesses, des invocations. Il est donc important que ces paroles ne soient pas seulement des paroles, mais qu’elles soient aussi une démarche de vie. En elles une décision se concrétise, c’est en elles qu’est présente toute notre démarche baptismale, mais aussi pré-baptismale et post-baptismale. Par conséquent, avec ces paroles et aussi avec les symboles, le Baptême s’étend sur toute notre vie. Cette réalité des promesses, des renonciations, des invocations, est une réalité qui dure toute notre vie, parce que nous sommes sans cesse dans une démarche baptismale, dans une démarche catéchuménale, à travers ces paroles et la concrétisation de ces paroles. Le sacrement du Baptême n’est pas l’affaire d’un moment, c’est une réalité de toute notre vie, c’est une démarche qui dure toute notre vie. En fait, derrière le baptême il y a aussi la doctrine des deux chemins, qui était fondamentale dans le premier christianisme : un chemin auquel nous disons « non » et un chemin auquel nous disons « oui ». Commençons par le premier point, les renonciations. Il y en a trois et je vais m’intéresser d’abord à la deuxième : « Renoncez-vous aux séductions du mal pour ne pas vous laisser dominer par le péché ? ». Que sont ces séductions du mal ? Dans l’Église ancienne, et encore pendant des siècles, on employait ici l’expression : « Renoncez-vous au diable et à ses pompes ? » et aujourd’hui nous savons ce que l’on entendait par cette expression « pompes du diable ». Les pompes du diable étaient surtout les grands spectacles sanglants, dans lesquels la cruauté devient divertissement, dans lesquels tuer des hommes devient quelque chose de spectaculaire : on fait un spectacle de la vie et de la mort d’un homme. Ces spectacles sanglants, cet amusement dans le mal, ce sont les « pompes du diable », où celui-ci se manifeste avec une beauté apparente et où il se manifeste, en réalité, dans toute sa cruauté. Mais, au-delà de cette signification immédiate de l’expression « pompes du diable », on voulait parler d’un type de culture, d’une « way of life », d’une façon de vivre, dans laquelle ce qui compte, ce n’est pas la vérité mais l’apparence, dans laquelle on ne recherche pas la vérité mais l’effet, la sensation, et dans laquelle, sous prétexte de vérité, en réalité on détruit des hommes, on veut détruire et ne créer que soi-même comme vainqueur. Par conséquent, cette renonciation était très réelle : c’était la renonciation à un type de culture qui est une anti-culture, contre le Christ et contre Dieu. On prenait parti contre une culture qui, dans l’Évangile de saint Jean, est appelée « kosmos houtos », « ce monde ». En disant « ce monde », bien évidemment, Jean et Jésus ne parlent pas de la création de Dieu, de l’homme en tant que tel, mais ils parlent d’une certaine créature qui est dominante et qui s’impose comme si le monde, c’était cela, et comme si la façon de vivre qui s’impose, c’était celle-là. Maintenant, je laisse chacun de vous réfléchir à ces « pompes du diable », à cette culture à laquelle nous disons « non ». Être baptisé, cela signifie justement, en substance, s’émanciper, se libérer de cette culture. Nous connaissons aussi, aujourd’hui, un type de culture dans lequel la vérité ne compte pas. Même si, apparemment, on veut faire apparaître toute la vérité, il n’y a que la sensation et l’esprit de calomnie et de destruction qui comptent. Une culture qui ne cherche pas le bien, dont le moralisme est, en réalité, un masque pour embrouiller, pour créer la confusion et la destruction. Contre cette culture, dans laquelle le mensonge se présente sous les apparences de la vérité et de l’information, contre cette culture qui cherche uniquement le bien-être matériel et qui nie Dieu, nous disons « non ». Nous connaissons bien, notamment grâce à de nombreux Psaumes, ce contraste d’une culture dans laquelle on paraît à l’abri de tous les maux du monde, dans laquelle on se place au-dessus de tout le monde, au-dessus de Dieu, alors que c’est, en réalité, une culture du mal, une domination du mal. Voilà pourquoi la décision du Baptême, cette partie de la démarche catéchuménale qui dure toute notre vie, est justement ce « non », dit et concrétisé de nouveau chaque jour, y compris par les sacrifices que demande le fait de s’opposer à la culture dominante en beaucoup de points, même si elle s’imposait comme étant le monde, ce monde : ce qui n’est pas vrai. Et il y a également un très grand nombre de gens qui désirent vraiment la vérité. Nous en arrivons ainsi à la première renonciation : « Renoncez-vous au péché pour vivre dans la liberté des enfants de Dieu ? ». Aujourd’hui la liberté va en sens inverse de la vie chrétienne et de l’observance des commandements de Dieu. Être chrétien serait comme un esclavage ; la liberté, c’est de s’émanciper de la foi chrétienne, c’est de s’émanciper – en fin de compte – de Dieu. Le mot péché paraît presque ridicule à beaucoup de gens, parce qu’ils disent : « Comment ! Dieu, nous ne pouvons pas l’offenser ! Dieu est si grand, qu’est-ce que cela peut faire à Dieu si je commets une petite erreur ? Nous ne pouvons pas offenser Dieu, son intérêt est trop grand pour qu’il soit offensé par nous ». Cela paraît vrai, mais ce n’est pas vrai. Dieu s’est fait vulnérable. Dans le Christ crucifié nous voyons que Dieu s’est fait vulnérable, qu’il s’est fait vulnérable jusqu’à la mort. Dieu s’intéresse à nous parce qu’il nous aime et l’amour de Dieu est vulnérabilité, l’amour de Dieu est intérêt pour l’homme, l’amour de Dieu signifie que notre première préoccupation doit être de ne pas blesser, de ne pas détruire son amour, de ne rien faire contre son amour parce que, sinon, nous vivons aussi contre nous-mêmes et contre notre liberté. Et, en réalité, cette apparente liberté que l’on trouve dans l’émancipation par rapport à Dieu devient immédiatement un esclavage par rapport à un grand nombre de dictatures de l’époque, auxquelles on doit se soumettre pour être considéré comme étant à la hauteur de l’époque. Et enfin : « Renoncez-vous à Satan ? ». Cela nous dit qu’il y a un « oui » à Dieu et un « non » au pouvoir du Malin, lui qui coordonne toutes ces activités et qui veut se faire le dieu de ce monde, comme le dit encore saint Jean. Mais il n’est pas Dieu, il est seulement l’adversaire et nous ne nous soumettons pas à son pouvoir. Nous disons « non » parce que nous disons « oui », un « oui » fondamental, le « oui » de l’amour et de la vérité. Ces trois renonciations, dans le rite du Baptême, étaient accompagnées, dans l’antiquité, de trois immersions : des immersions dans l’eau en tant que symbole de la mort, d’un « non » qui est véritablement la mort d’un type de vie et une résurrection à une autre vie. Nous reviendrons sur ce point. Ensuite vient la confession, à partir de trois questions : « Croyez-vous en Dieu le Père tout-puissant, créateur, en Jésus-Christ et, enfin, en l’Esprit-Saint et en l’Église ? ». Cette formule, ces trois parties, ont été développées à partir de la Parole du Seigneur : « Baptisez au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». Ces mots sont concrétisés et approfondis : ce que signifie Père, ce que signifie Fils – toute la foi en Jésus-Christ, toute la réalité du Dieu fait homme – et ce que signifie croire que l’on est baptisé dans le Saint-Esprit, c’est-à-dire toute l’action de Dieu dans l’histoire, dans l’Église, dans la communion des Saints. Ainsi la formule positive du Baptême est également un dialogue : ce n’est pas simplement une formule. Surtout la confession de la foi n’est pas seulement quelque chose qu’il faut comprendre, quelque chose d’intellectuel, quelque chose qu’il faut mémoriser – bien sûr, c’est aussi cela – mais elle touche aussi l’esprit et surtout elle touche aussi notre façon de vivre. Et cela me paraît très important. Ce n’est pas quelque chose d’intellectuel, une pure formule. C’est un dialogue de Dieu avec nous, une action de Dieu avec nous, et une réponse de notre part, c’est une démarche. On ne peut comprendre la vérité du Christ que si l’on comprend sa voie. Ce n’est que si nous acceptons le Christ comme voie que nous commençons réellement à être dans la voie du Christ et que nous pouvons également comprendre la vérité du Christ. La vérité qui n’est pas vécue ne s’ouvre pas ; seule la vérité vécue, la vérité acceptée comme façon de vivre, comme démarche, s’ouvre aussi comme vérité dans toute sa richesse et toute sa profondeur. Par conséquent cette formule est une voie, elle exprime notre conversion, elle exprime une action de Dieu. Et nous, nous voulons vraiment avoir présent à l’esprit, pendant toute notre vie, le fait que nous sommes en communion de démarche avec Dieu, avec le Christ. Et voici comment nous sommes en communion avec la vérité : en vivant la vérité, la vérité devient vie et, en vivant cette vie, nous trouvons aussi la vérité. Maintenant passons à l’élément matériel : l’eau. Il est très important de percevoir deux significations de l’eau. D’une part, l’eau fait penser à la mer, surtout à la Mer Rouge, à la mort dans la Mer Rouge. Avec la mer, on se représente la force de la mort, la nécessité de mourir pour arriver à une nouvelle vie. Cela me paraît très important. Le Baptême n’est pas seulement une cérémonie, un rituel introduit il y a longtemps, et il n’est pas non plus un simple lavage, une opération cosmétique. Il est beaucoup plus qu’un lavage : il est mort et vie, il est mort d’une certaine existence et renaissance, résurrection à une nouvelle vie.. Être chrétien est quelque chose de profond parce que non seulement c’est quelque chose qui vient s’ajouter, mais aussi parce que c’est une nouvelle naissance. Après avoir traversé la Mer Rouge, nous sommes des êtres nouveaux. C’est pour cela que la mer, dans toutes les expériences de l’Ancien Testament, est devenue pour les chrétiens le symbole de la croix. Parce que c’est seulement à travers la mort, une renonciation radicale dans laquelle on meurt à un certain type de vie, que la renaissance peut se réaliser et qu’il peut réellement y avoir une vie nouvelle. Une partie du symbolisme de l’eau est qu’elle symbolise – surtout dans les immersions de l’antiquité – la Mer Rouge, la mort, la croix. Ce n’est qu’à partir de la croix que l’on arrive à la nouvelle vie et cela se réalise chaque jour. Sans cette mort toujours renouvelée, nous ne pouvons pas renouveler la vraie vitalité de la nouvelle vie du Christ. Mais l’autre symbole est celui de la source. L’eau est à l’origine de toute la vie ; elle symbolise non seulement la mort, mais aussi la nouvelle vie. Toute vie vient aussi de l’eau, de l’eau qui vient du Christ comme la vraie vie nouvelle qui nous accompagne vers l’éternité. Enfin il faut aborder la question – mais je n’en dirai que quelques mots – du Baptême des enfants. Est-ce une bonne chose de baptiser les enfants, ou bien serait-il plutôt nécessaire de commencer par la démarche catéchuménale pour arriver à un Baptême vraiment réalisé ? Et l’autre question qui se pose toujours est : « Peut-on ou non imposer à un enfant la religion dans laquelle il voudra vivre ? N’a-t-on pas le devoir de laisser le choix à cet enfant ? ». Ces questions montrent que nous ne voyons plus dans la foi chrétienne la vie nouvelle, la véritable vie, mais que nous y voyons un choix parmi d’autres et même un poids que l’on ne devrait pas imposer à un individu si on n’a pas obtenu son assentiment. La réalité est différente. La vie elle-même nous est donnée sans que nous puissions choisir si nous voulons vivre ou non. On ne peut demander à personne : « Veux-tu ou non être né ? ». La vie elle-même nous est nécessairement donnée sans notre consentement préalable, elle nous est donnée comme cela et nous ne pouvons pas décider préalablement : « Oui ou non, est-ce que je veux vivre ? ». Et, en réalité, la vraie question, c’est : « Est-il juste de donner la vie dans ce monde sans avoir obtenu un assentiment en réponse à la question : veux-tu vivre ou non ? Peut-on vraiment anticiper la vie, donner la vie sans que le sujet ait eu la possibilité de décider ? ». Je dirais : c’est possible et c’est juste seulement si, avec la vie, nous pouvons donner aussi la garantie que la vie, avec tous les problèmes du monde, est bonne, qu’il est bon de vivre, qu’il y a une garantie que cette vie est bonne, protégée par Dieu, et qu’elle est un véritable don. Il n’y a que l’anticipation du sens qui justifie l’anticipation de la vie. Et c’est pour cette raison que le Baptême, en tant que garantie du bien de Dieu, en tant qu’anticipation du sens, du « oui » de Dieu qui protège cette vie, justifie également l’anticipation de la vie. Par conséquent le Baptême des enfants n’est pas contraire à la liberté. Il est vraiment nécessaire de le donner, afin de justifier aussi le don – qui, sans cela, serait discutable – de la vie. Seule la vie qui est dans les mains de Dieu, dans les mains du Christ, qui est immergée dans le nom du Dieu trinitaire, est certainement un bien que l’on peut donner sans scrupules. Soyons donc reconnaissants à Dieu qui nous a fait ce don, qui s’est donné à nous. Et le défi qui nous est lancé est de vivre ce don ; de vivre réellement, dans une démarche post-baptismale, à la fois les renonciations et le « oui » ; de vivre toujours dans le grand « oui » de Dieu ; et ainsi de vivre bien.

LES ORIGINES DU BAPTÊME DANS L’ANCIEN TESTAMENT

8 janvier, 2015

http://www.dominique-le-tourneau.fr/Les-origines-du-bapteme-dans-l,155

LES ORIGINES DU BAPTÊME DANS L’ANCIEN TESTAMENT

Le baptême est la porte qui donne accès à la vie chrétienne, à la vie en Dieu. Il est « le fondement de toute la vie chrétienne, le porche de la vie dans l’Esprit (vitæ spiritualis ianua [« la porte de la vie spirituelle »]) et la porte qui ouvre l’accès aux autres sacrements » (Catéchisme de l’Église catholique, n° 1213). C’est « le sacrement de la régénération par l’eau et dans la parole », comme le disait le catéchisme de Trente. C’est le premier sacrement dans l’ordre de réception, celui qui fait de quelqu’un un chrétien. Aucun autre sacrement ne peut être reçu sans que le baptême l’ait été au préalable.
Nous avons recours ici à la typologie qui permet « d’éclairer l’unité du plan divin dans les deux Testaments ». La typologie, du grec tupos, « coup », « empreinte d’un coup », « discerne dans les œuvres de Dieu sous l’Ancienne Alliance des préfigurations de ce que Dieu a accompli dans la plénitude des temps, en la personne de son Fils incarné » (Catéchisme de l’Église catholique, n° 128). Par exemple, Adam est le type du nouvel Adam, le Christ ; la manne, mangée par les Hébreux dans le désert, celui de l’Eucharistie ; Josué, faisant entrer les Hébreux dans la Terre promise, celui du Christ qui fait entrer au ciel, etc. La première figure du baptême est donnée par les eaux primitives, de la Création du monde par Dieu. J’emprunte à Jean Daniélou, Bible et liturgie, Paris, 1950, les citations des Pères de l’Église qui suivent. « Une fois les éléments du monde ordonnés, quand il fallut leur donner des habitants, c’est aux eaux primordiales qu’il fut donné de produire des vivants. L’eau primitive a engendré la vie, pour qu’on ne s’étonne pas que dans le baptême les eaux soient capables de vivifier » (Tertullien, De baptismo 2). Or, « l’Esprit planait sur les eaux » (Genèse 1, 2). Moyennant quoi, « tu as vu l’eau, mais toute eau ne guérit pas, si l’Esprit ne descend pas et ne consacre pas cette eau » (saint Ambroise, De Sacramentis 1, 15). Cet Esprit, je l’ai rappelé, planait au-dessus de Jésus au moment de son baptême dans le Jourdain (cf. Matthieu 3, 16-17). Ainsi, tout comme l’Esprit Saint suscite la création première, il suscite également la nouvelle création qu’est la régénération dans l’eau baptismale. Cette eau baptismale engendre « des petits poissons », comme les eaux primordiales avaient engendré les poissons. Ce symbole, évoqué par Tertullien (De baptismo 1), est intéressant si l’on se rappelle que le poisson, ichtus en grec, est le symbole du Christ et donc du chrétien (ichtus est l’acrostiche de Iesous CHristos THeou Uios Sôter, « Jésus, Fils de Dieu, Sauveur »).
Le Déluge apparaît fréquemment pour évoquer le baptême. Saint Pierre y a recours : « La Christ a souffert la mort, lui juste pour des injustes, ayant été mis à mort selon la chair, mais rendu à la vie selon l’Esprit. C’est aussi dans cet Esprit qu’il est allé faire une proclamation aux esprits en prison, rebelles autrefois lorsqu’aux jours de Noé la longanimité de Dieu temporisait tandis que se construisait l’arche dans laquelle un petit nombre, savoir huit personnes, furent sauvés à travers l’eau. C’est elle aujourd’hui qui vous sauve par son antitype, le baptême » (1 Pierre 3, 18-21). Cette typologie est très riche. Je n’en donnerai qu’une exemple : « De même que, après que les eaux du Déluge, par lesquelles l’antiquité inique fut purifiée, après le baptême, pour ainsi dire, du monde, la colombe, envoyée de l’arche et revenant avec une branche d’olivier, signe encore maintenant de paix chez les peuples, a annoncé la paix aux terres ; suivant la même économie sur le plan spirituel, la colombe du Saint-Esprit descend sur la terre, c’est-à-dire sur notre chair, émergeant de la piscine baptismale après les anciens péchés, pour apporter la paix de Dieu envoyée du haut des cieux où est l’Église figurée par l’arche » (Tertullien, Ibid. 8). Ajoutons encore la descente de Jésus aux enfers le Vendredi saint, associée au Déluge : « Il s’agit des mêmes voies de Dieu : dans les trois cas, il y a un monde pécheur qui doit être anéanti par le châtiment et dans les trois cas un juste est épargné : ce juste est, dans le déluge, Noé ; dans la descente aux Enfers, Jésus-Christ ; dans le baptême, le chrétien, par la configuration à Jésus-Christ » (J. Daniélou, Bible et liturgie, Paris, 1950, p. 108).
Le passage de la Mer Rouge symbolise aussi le baptême. La Mer Rouge est identifiée à la piscine baptismale. Le fondement de cette typologie se trouve chez saint Paul : « Nos Pères ont été cachés sous les nuages et ont traversé la mer. Ils ont été baptisés, par le ministère de Moïse, dans la nuée et dans la mer. C’est nous qui étions préfigurés dans ces choses » (1 Corinthiens 10, 2-6). Or, Dieu accompagne le peuple hébreu dans son exode la nuit sous la forme d’une colonne de nuée (cf. Exode 14, 24). Origène interprète le texte de la première épître aux Corinthiens en disant : « Ce qu’ils [les Hébreux] croient être une nuée, saint Paul établit que c’est l’Esprit Saint. Et il veut que ce passage soit interprété dans le même sens que le précepte du Seigneur : Si quelqu’un ne renaît de l’eau et de l’Esprit Saint, il ne peut entrer dans le royaume des cieux » (Homélies sur l’Exode 5, 1).
Le prophète Élie qui demande à Dieu d’être juge entre lui et les cinq cents prêtres de Baal, symbolise aussi le baptême, car, avant de sacrifier, il fait verser sur la victime à immoler trois fois quatre cruches d’eau (cf. 1 R 18, 38). « Par là, Élie prophétisait clairement à l’avance le sacrement du baptême qui devait avoir lieu plus tard. Le feu descendit sur l’eau répandue trois fois, afin de montrer que là où est l’eau sacramentelle, là est aussi l’Esprit, vivifiant, ardent, enflammé, qui consume les impies et illumine les fidèles » (saint Grégoire de Nysse, Homélie sur le baptême).
La hache d’Élisée flottant sur le Jourdain (cf. 2 R6, 1-7) est un autre élément figuratif du baptême. « Élisée jeta un morceau de bois dans le cours du Jourdain. Il repêcha ainsi le fer de la hache avec laquelle les fils des prophètes voulaient couper le bois destiné à bâtir leur maison. De même notre Christ nous a rachetés au baptême des péchés les plus pesants, par sa crucifixion sur le bois et le baptême dans l’eau » (saint Justin, Dialogue avec Tryphon 86, 6).
Enfin l’épisode de Naaman le Syrien amené à se baigner sept fois dans le Jourdain pour être guéri de sa lèpre (cf. 2 R 5, 9-20) est un type idéal du baptême. « Le peuple, composé d’étrangers, qui était lépreux, avant d’être baptisé dans le fleuve mystique, celui-là, après le sacrement du baptême, est purifié des souillures de l’âme et du corps. Dans la figure de Naaman, en effet, le salut futur est annoncé aux nations. Pourquoi reçoit-il l’ordre de se plonger un nombre chargé de mystère ? Pourquoi est-ce le Jourdain qui est choisi ? Reconnais la grâce du baptême salutaire » (saint Ambroise, Homélies sur saint Luc 4, 50-51).
Ajoutons le type de l’agneau pascal, que les Hébreux ont mangé avant de sortir d’Égypte. « La Passion du Christ, dit saint Augustin, a été figurée par le peuple juif, lorsqu’il a reçu l’ordre de marquer les portes des maisons avec son sang. C’est par le signe de sa Passion et de sa Croix [la sphragis] que tu dois être marqué aujourd’hui sur le front, comme sur une porte, et que tous les chrétiens sont marqués » (De catechizandis rudibus, PL 40, 335). La théologie de la sphragis apparaît ici « comme signe qui écarte l’ange exterminateur, et donc comme expression de l’amour gratuit de Dieu épargnant ceux qui sont marqués du sang de son Fils » (J. Daniélou, Bible et liturgie, Paris, 1950, p. 227).
Le poisson, ichtus en grec (dont les lettres forment l’expression Iesous Christos THeou Uios Sôter, « Jésus, Fils de Dieu, Sauveur ») désigne le chrétien, rené du baptême : « Nous sommes de petits poissons selon l’ichtus, Jésus-Christ, en qui nous naissons, et nous ne sommes vivants qu’en demeurant dans l’eau » (Tertullien, De baptismo 1). L’eau du baptême engendre donc ces poissons comme les eaux primitives de la Création avaient engendré les poissons.
Il serait possible de citer d’autres symboles. Je me limiterai à celui de la colombe, mis également en rapport avec le baptême de Jésus, « où l’Esprit Saint descendu sur le Seigneur en forme de colombe, repose sur les eaux du baptême où il reconnaît son antique séjour » (Tertullien, De baptismo 8), celui des eaux primordiales.

CIERGES ET BOUGIES: LEUR SIGNIFICATION ET SYMBOLISME (IERA MONI VATOPEDI)

16 septembre, 2014

http://stmaterne.blogspot.it/2011/03/cierges-et-bougies-leur-signification.html

CIERGES ET BOUGIES: LEUR SIGNIFICATION ET SYMBOLISME (IERA MONI VATOPEDI)

http://vatopaidi.wordpress.com/2009/09/16/%E2%80%9Cthese-truths-we-hold%E2%80%9D-part-ix/

Allumer un cierge et des lampes d’icônes (lampadas) a une signification symbolique spéciale dans l’Église Chrétienne, et on ne saurait accomplir d’Office Chrétien sans cela. Dans l’Ancien Testament, lorsque le premier Temple de Dieu a été construit sur terre – le Tabernacle – les Offices y étaient célébrés avec des lampes, comme le Seigneur Lui-même l’avait ordonné (Exode 40,5; 40,25). Suivant l’exemple de l’Église de l’Ancien Testament, l’allumage des cierges et des lampadas n’a pas manqué d’être inclus dans les Offices de l’Église du Nouveau Testament.
Le Livre des Actes d’Apôtres mentionne l’allumage de lampes pendant les Offices à l’époque des Apôtres. Ainsi, à Troas, où les disciples du Christ se réunissaient le premier jour de la semaine (dimanche), afin de « rompre le Pain, » à savoir célébrer l’Eucharistie, il y avait beaucoup de lampes dans la chambre haute (Actes 20,8). Cette référence à un grand nombre de lampes signifie qu’elles ne servaient pas qu’à l’éclairage mais pour leur signification spirituelle.
L’antique rituel Chrétien d’apporter une lampe pour l’office vespéral a mené à l’actuel ordo des Vêpres avec son entrée et au chant de l’ancien hymne « Joyeuse Lumière, » qui exprime l’enseignement Chrétien de la lumière spirituelle qui illumine l’homme – le Christ, la Source de la Lumière qui donne la grâce. L’ordo de l’Office des Matines est aussi lié à l’idée de la Lumière Incrée du Christ, manifestée dans Son Incarnation et Sa Résurrection.
Les Pères de l’Église témoignent aussi de la signification spirituelle des cierges. Au 2ème siècle, Tertullien écrivait « Nous ne célébrons jamais un Office sans cierges, et pourtant nous ne les utilisons pas simplement pour disperser les ténèbres de la nuit – nous célébrons aussi nos Offices en plein jour – mais afin de représenter de la sorte le Christ, la Lumière Incréée, sans Qui en plein jour nous errerions comme si nous étions perdus dans les ténèbres de la nuit » (Oeuvres, 3ème éd., Kiev, 1915, p.76). Saint Jérôme écrivait au 4ème siècle que « dans toutes les Églises d’Orient, on allume des cierges même quand il fait jour, lorsque l’on va lire les Évangiles, en vérité non pas pour dissiper les ténèbres, mais comme signe de joie.. afin que par cette lumière matérielle nous puissions ressentir la Lumière dont nous lisons dans les Psaumes (119,105) : Ta Parole, lampe à mes pieds, et lumière sur mon chemin » (Oeuvres, 4ème partie, 2ème édition, Kiev, 1900) [Traité contre Vigilantius, ndt]
Saint Sophrone, patriarche de Jérusalem, écrivait au 7ème siècle : « Les lampadas et les cierges représentent la Lumière Éternelle, et aussi la lumière qui rayonne du juste » (« écrits des saints pères, Saint-Petersbourg 1855, vol 1). Suite au « horos » des saints pères du 7ème Concile Oecuménique, dans l’Église Orthodoxe, les saintes Icônes et reliques, la Croix du Christ et le saint Évangile ont à être honorés par encensement et bougies.
Et saint Siméon de Thessalonique (15ème siècle) écrivait que « l’on allume aussi des cierges devant les Icônes des saints, par honneur pour leurs bonnes oeuvres qui resplendissent en ce monde » (oeuvres, Moscou, 1916, p. 108).
Le fidèle Orthodoxe allume des cierges devant les Icônes comme signe de sa foi et de son espérance dans l’aide de Dieu, qui est toujours accordée à ceux qui se tournent vers Lui et vers Ses saints avec foi et prières. La bougie est aussi un symbole de notre amour brûlant et reconnaissant envers Dieu. Pendant la lecture des 12 Évangiles de la Passion, lors des Matines du Vendredi Saint, les fidèles se tiennent avec une bougie ou un cierge à la main, remémorant les souffrances du Seigneur et brûlant d’amour pour Lui. Une ancienne coutume chez les Chrétiens Orthodoxes de tradition russe est de ramener à la maison un cierge allumé durant cet Office, et de tracer un Signe de Croix avec sa flamme sur leur porte, en souvenir des souffrances de notre Seigneur et comme protection contre le mal.
Lors des Vêpres du Vendredi Saint, quand l’Epitaphion / Plashchanitsa (linceul) est amené depuis l’Autel et aussi pendant les Matines des Lamentations le Samedi Saint, les fidèles se tiennent avec une bougie allumée, comme signe d’amour pour le Christ crucifié et décédé, montrant leur foi dans Sa radieuse Résurrection. Pour Pâques, au moment de la procession autour de l’église, en mémoire des femmes Myrophores qui étaient venues avec des lampes allumées au sépulcre du Seigneur, les fidèles s’avancent avec une bougie allumée à la main, qu’ils gardent jusqu’à la fin de la Liturgie pascale, exprimant leur grande joie et le triomphe spirituel.
Depuis les temps anciens, lors des offices hiérarchiques, on emploie des porteurs de cierges. Les fidèles se courbent avec révérence lorsqu’ils sont bénis par l’évêque avec le dikeri – le cierge double représentant les deux Natures du Christ, Sa divinité et Son humanité – et le trikeri – le cierge triple représentant la Sainte Trinité. On allume aussi cierges et bougies pendant la célébration de la sainte Eucharistie.
Le saint Baptême est célébré avec le prêtre portant tous ses habits liturgiques et tous les cierges et bougies sont allumés. Trois cierges sont allumés devant le font baptismal comme signe que le Baptême est accompli au Nom de la Sainte Trinité. Et la personne qui va être baptisée (si c’est un adulte) ainsi que ses parrain et marraine, tiennent un cierge en main pendant la procession autour du font baptismal, exprimant ainsi la joie de l’entrée d’un nouveau membre dans l’Église du Christ.
Lors de la cérémonie de mariage, le prêtre remet un cierge allumé à l’époux et à l’épouse avant qu’ils n’entrent dans l’église pour y recevoir le Sacrement de Mariage; ils garderont ce cierge allumé en main tout au long de la cérémonie afin de symboliser leur profond amour l’un pour l’autre, et leur désir de vivre avec la bénédiction de l’Église.
Lors du Sacrement des Malades, on allume 7 bougies autour du récipient d’huile bénite, comme signe de l’action de la grâce venant des dons du Saint Esprit. Et lorsque le corps d’une personne décédée est apporté à l’église, on place 4 cierges autour du cercueil afin de former une croix, pour montrer que le défunt est Chrétien. Pendant l’Office des funérailles, de même que les Offices de commémoration, les fidèles se tiennent avec une bougie allumée, comme signe que l’âme du défunt a quitté ce monde et est entrée dans le Royaume des Cieux – celui de la Lumière de Dieu, celle qui jamais ne s’éteint.
Pendant la Liturgie des Présanctifiés, dans la partie Vêpres, le prêtre béni l’assemblée avec un cierge allumé et un encensoir, proclamant « La Lumière du Christ illumine tout! » La veille de la Nativité du Christ et de la Théophanie, on place un cierge allumé devant l’Icône de la fête, qui est placée au milieu de l’église, pour nous rappeler la naissance et la venue sur terre du Christ notre Sauveur, le Donateur de la Lumière. Lors de toutes les Divines Liturgies, des cierges allumés sont portés en procession dans diverses parties de l’office liturgique.
On allume donc des cierges, bougies et lampadas lors de tous les offices religieux, et cela avec une grande varité de significations spirituelles et symboliques. « En effet le Dieu qui a dit: Que des ténèbres resplendisse la lumière, est Celui qui a resplendi dans nos coeurs, pour faire briller la connaissance de la gloire de Dieu, qui est sur la face du Christ » (2 Co 4,6). Dès lors, allumer des cierges à l’église est aussi une expression pour les fidèles de leur adoration et amour de Dieu, leurs sacrifices pour Lui, et en même temps leur joie et le triomphe spirituel de l’Église. En se consummant, les cierges nous rappellent la Lumière qui ne s’éteint jamais, celle qui réjouit les âmes des justes qui sont dans le Royaume des Cieux pour avoir plu à Dieu.
Extrait de « These Truths We Hold – The Holy Orthodox Church: Her Life and Teachings ». Compiled and Edited by A Monk of St. Tikhon’s Monastery. Copyright 1986 by the St. Tikhon’s Seminary Press, South Canaan, Pennsylvania 18459.

°*°*°*°*°

Métropolite Vitaly : « Les cierges sont apparus dans toutes les églises Orthodoxes aux premiers siècles de notre ère. Eusèbe de Césarée rapporte que pendant la vigile pascale, les fidèles allumaient une telle quantité de bougies que la nuit semblait être comme le jour. C’était des cierges de cire, dont la taille les faisait ressembler plutôt à des cierges-pilliers actuels »
Parish Life, mai 1988

 

 

Un jour Abba Lot alla voir Abba Joseph, et lui dit : « Abba, selon ce que je peux, je fais mon petit Office de prière, je jeûne un peu, je prie et je médite, je vis en paix, et autant que je peux, je purifie mes pensées. Que puis-je donc faire d’autre ? » L’ancien se leva, il étendit ses mains vers le ciel, et ses doigts devinrent comme dix lampes de feu. Et il dit à Abba Lot : « Si tu le veux, tu peux devenir tout entier comme un feu ».

 

La signification des bougies dans les Offices (saint Jean de Cronstadt)
http://orthodoxservices.blogspot.com/2007/07/meaning-of-candles-in-services.html
Les cierges qui brûlent sur l’Autel représentent la Lumière incréée de la Trinité, car le Seigneur demeure dans une lumière qu’on ne saurait approcher. Ils représentent aussi le feu de la Divinité qui détruit notre impiété et nos péchés. Les bougies que l’on allume devant les icônes du Sauveur signifient qu’Il « est la Vraie Lumière qui illumine tout homme venant dans le monde » (Jean 1,9); en même temps, Il est un feu qui englobe et ravive nos âmes et nos corps. Les cierges allumés devant les icônes de la Mère de Dieu sont un symbole du fait qu’elle est la Mère de la Lumière Inapprochable, et aussi de son amour si pur et brûlant pour Dieu, et de son amour pour l’humanité. Les cierges allumés devant les icônes des saints reflètent leur ardent amour pour Dieu, pour Qui ils ont tout donné, abandonnant tout ce à quoi tiennent les hommes dans cette vie, y compris leur propre vie, comme l’ont fait les saints apôtres, les martyrs et tant d’autres. Ces bougies signifient aussi que ces saints sont des lampes qui brûlent pour nous, et nous apportent la lumière par leur propre vie de sainteté, leurs vertus, et leur ardente intercession pour nous devant Dieu par leurs constantes prières jour et nuit. Les cierges qui brûlent sont là aussi pour représenter notre ardent zèle et notre sincère sacrifice que nous faisons par dévotion et reconnaissance envers eux pour leur sollicitude en notre faveur devant Dieu.

Saint Nicolas Velimirovic : Les lampes de vigiles sont allumées pour nombre de raisons
http://96.0.18.35/forum/viewtopic.php?p=1452&hilit=deeds
1. Parce que notre foi est lumière. Le Christ a dit « Je suis la Lumière du monde » (Jean 8,12). La lumière des lampadas nous rappelle cette Lumière par laquelle le Christ illumine nos âmes.
2. Afin de nous rappeler le caractère radieux du saint devant l’icône duquel nous allumons la lampada, car les saints sont appelés « fils de la Lumière » (Jean 12,36; Luc 16,8).
3. Afin de nous servir de reproche pour nos oeuvres de ténèbres, nos mauvais désirs et pensées, et afin de nous appeler à revenir sur le chemin de la lumière évangélique; de sorte que nous nous efforcions avec plus de zèle à accomplir le commandement du Sauveur « que votre lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes oeuvres » (Mathieu 5,16).
4. Afin que la lampada soit notre petit sacrifice à Dieu, Qui S’est donné Lui-même entièrement en sacrifice pour nous, et comme petit signe de notre grande gratitude et de notre ardent amour pour Celui dont nous demandons en prière pour la vie, la santé, et le Salut, et toutes choses que seul un infini amour céleste pourrait nous donner.
5. Afin que la terreur frappe les puissances du mal, qui nous attaquent parfois même pendant la prière et nous écartent les pensées loin du Créateur. Les puissances maléfiques aiment les ténèbres et tremblent devant toute lumière, en particulier celle qui appartient à Dieu et à ceux qui Lui plaisent.
6. Afin que cette lumière nous guide vers le désintéressement. De même que l’huile et la mèche (ou la cire) brûlent dans la lampada, soumises notre volonté, que nos âmes brûlent aussi de la flamme de l’amour dans toutes nos souffrances, étant toujours soumises à la volonté de Dieu.
7. Afin de nous enseigner que de même que la lampada ne sait pas s’allumer sans notre intervention, ainsi notre coeur, qui est notre lampe intérieure, ne sait pas s’allumer sans le saint feu de la Grâce de Dieu, quand bien même nous serions remplis de toutes les vertus. Car toutes nos vertus ne sont, après tout, que comme du combustible, mais le feu qui les consomme provient de Dieu.
8. Afin de nous rappeler qu’avant toute chose, le Créateur du monde a créé la lumière, et puis ensuite tout le restant dans l’ordre : « Et Dieu dit ‘que lumière soit’, et lumière fut » (Genèse 1,3). Et cela doit aussi être un commencement pour notre vie spirituelle, afin qu’avant toute chose, la lumière de la vérité du Christ brille en nous. De cette lumière de la vérité du Christ naîtra tout bien, qui jaillira et grandira en nous.
saint Nicolas, évêque de Zica et Ochrid
et quand nous n’avons pas la possibilité d’allumer nos cierges.. ils s’allument tous seuls!

REFLEXION: LA NÉCESSITÉ DE LA CONFESSION SACRAMENTELLE

27 mars, 2014

http://www.leffortcamerounais.info/2011/09/reflexion-la-n%C3%A9cessit%C3%A9-de-la-confession-sacramentelle.html

(Journal de la Conference Episcopale Nationale du Camerun)

REFLEXION: LA NÉCESSITÉ DE LA CONFESSION SACRAMENTELLE

Abbé André Fils Mbem

Certains chrétiens ne se confessent pas auprès des prêtres. Ils prétendent qu’ils demandent directement pardon à Dieu pour leurs fautes. Une telle démarche est-elle validée par l’Eglise ? L’Abbé André Fils Mbem, Curé de Saint Michel Archange de Nyalla à Douala et Professeur de Théologie spirituelle et de Sciences Sociales à l’Université Catholique Saint Jérôme de Douala, souligne la nécessité de la confession sacramentelle.

Pourquoi doit-on aller voir un prêtre pour dire ses péchés, et ne peut-on pas le faire directement avec Dieu, qui nous connaît et nous comprend bien mieux que n’importe quel autre interlocuteur humain ? Et plus radicalement encore : pourquoi parler de mes problèmes et en particulier ceux qui me font le plus honte, à quelqu’un qui est pécheur comme moi, et qui évalue peut-être d’une manière complètement différente de la mienne ce que j’ai vécu, ou qui peut-être ne le comprend pas du tout ? Voilà des questions que beaucoup de non chrétiens et même des chrétiens se posent.
Retenons que l’on peut recevoir le pardon de nos péchés véniels par la prière ( la récitation de l’acte de contrition, le psaume 50, la récitation du confiteor : je confesse à Dieu Tout Puissant ; la participation à l’Eucharistie, les œuvres de charité, puisque la charité couvre une multitude de fautes.
Mais pour ce qui regarde les péchés graves, la confession individuelle et intégrale avec l’absolution par un prêtre ayant la faculté d’entendre les confessions, constitue l’unique mode ordinaire par lequel un fidèle conscient d’un péché grave est réconcilié avec Dieu et avec l’Eglise, sauf en cas d’impossibilité physique ou morale.
La « confession complète des péchés mortels », c’est-à-dire la confession de chaque péché mortel, de même que les circonstances morales spécifiques, est par institution divine une partie constitutive du sacrement, elle n’est en aucune manière laissée à la libre disposition des Pasteurs. Ainsi, pour que puisse être effectué le discernement sur les dispositions des pénitents en ce qui concerne la rémission ou non des péchés et l’imposition d’une pénitence opportune de la part du ministre du sacrement, il faut que le fidèle, outre la conscience des péchés commis, la contrition et la volonté de ne plus retomber, confesse ses péchés devant le prêtre. L’Église a toujours reconnu un lien essentiel entre le jugement confié aux prêtres dans ce sacrement et la nécessité pour les pénitents d’énumérer leurs péchés, excepté en cas d’impossibilité.
Le fidèle est tenu par l’obligation de confesser devant le prêtre, selon leur espèce et leur nombre, tous les péchés graves commis après le baptême, non encore directement remis par le pouvoir des clés de l’Église, et non accusés en confession individuelle, dont il aura conscience après un sérieux examen de soi-même. On doit réprouver tout usage qui limite la confession à une accusation d’ordre général, ou seulement à un ou plusieurs péchés considérés comme étant plus significatifs. D’autre part, compte tenu de l’appel de tous les fidèles à la sainteté, il leur est recommandé de confesser aussi les péchés véniels.
La confession complète des péchés graves étant par institution divine une partie constitutive du sacrement, elle n’est en aucune manière laissée à la libre disposition des Pasteurs (dispense, interprétation, coutumes locales, etc.). L’Autorité ecclésiastique compétente spécifie uniquement – dans les normes disciplinaires concernées – les critères pour distinguer l’impossibilité réelle de confesser ses péchés des autres situations dans lesquelles l’impossibilité est seulement apparente ou pour le moins surmontable.
À la lumière de ce qui précède, la demande de pardon que nous pouvons faire à Dieu en ce qui concerne nos péchés ne peut en aucun cas suppléer la confession individuelle. Par ailleurs, même l’absolution simultanée à un ensemble de pénitents, sans confession individuelle préalable, comme cela est prévu au Canon 961, § 1 du Code de droit canonique (CIC), revêt un caractère exceptionnel, et ne peut pas être donnée par mode général, de même qu’elle ne peut en aucun cas suppléer à la confession individuelle et intégrale. De manière spécifique, elle ne peut pas être accordée, à moins : qu’il y ait un danger de mort imminente, et que le prêtre ou les prêtres n’aient pas suffisamment de temps pour entendre les confessions des pénitents, ou encore qu’existe une grave nécessité.
Avec les nouvelles technologies de la communication, certaines personnes aimeraient se confesser et recevoir l’absolution par courrier électronique, faire la confession en ligne ou par le net. Nous devons cependant dire que cette pratique ne correspond pas à la nature du sacrement de pénitence et de réconciliation. Car, la confession des péchés n’est pas seulement un moyen d’effacer les péchés, mais le lieu d’une relation avec Dieu et avec la communauté chrétienne. Le sacrement exige donc une relation personnelle entre le prêtre et le pénitent. Le prêtre, avant de pouvoir pardonner, doit discerner dans le dialogue avec le pénitent, si ce dernier est prêt à recevoir l’absolution, s’il a une réelle contrition. Le dialogue virtuel par internet ou par téléphone ne peut pas remplacer le contact humain. De plus, un message internet ou la confession en ligne ne respecte pas la règle du secret de la confession.
Pourquoi la confession individuelle chez le prêtre est elle nécessaire ? Elle est nécessaire pour plusieurs raisons :
 » Elle répond à la volonté et au mandat du Christ : Dès le soir de la résurrection, le Christ donne à ses disciples l’Esprit-Saint afin qu’ils perpétuent ses gestes de miséricorde.  » Recevez l’Esprit-Saint. Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis ; tout homme à qui vous maintiendrez ses péchés, ils lui seront maintenus  » (Jn 20, 22-23). Les ministres du pardon, obéissant au Bon pasteur et au Médecin des âmes (Mc 2, 17), reçoivent donc l’aveu humble et sincère des fautes qui permet aux fidèles de rencontrer le Seigneur ressuscité dans la joie de son Esprit. Les ministres du pardon du Seigneur ne peuvent changer d’eux-mêmes les conditions établies par Lui et Son Église pour l’exercice de ce ministère.
 » On ne peut pas être juge et partie de sa propre cause.
 » Le pécheur ne peut pas savoir s’il est pardonné par Dieu ou pas après une confession directe à Dieu.
 » Dieu veut se servir de ses créatures pour communiquer sa grâce. C’est la logique de l’Incarnation. Le Christ sauve l’humanité par son Église, ses disciples, ses « membres » (1 Cor 12.27).
Il est important de noter que tous les sacrements de l’Église sont d’abord des gestes, du Christ à l’endroit d’une personne qu’il introduit dans le cadre de l’Alliance par la médiation de l’Église. Par le baptême, il touche chaque individu avec de l’eau et quelques paroles pour signifier par un signe concret son incorporation à l’Église. Il en va de même pour l’onction de l’Esprit Saint à la confirmation ou pour l’imposition des mains lors de l’ordination sacerdotale.
C’est toujours une personne singulière qui est touchée par l’amour et la grâce du Seigneur. Cela se vérifie aussi pour le sacrement du pardon où chaque personne reçoit une grâce très personnelle correspondant à l’aveu de ses manquements à l’Alliance.
Le Christ expie sur la Croix le péché de chacun, et il exprime par l’absolution, l’amour miséricordieux de Dieu pour chaque personne, qui a justement besoin de se sentir aimée et pardonnée personnellement par Dieu. Le sacrement de la réconciliation touche précisément la sphère intime des blessures et des fautes de chaque personne d’une façon qui restaure le dialogue d’amour et la relation d’amitié avec le Christ.
On comprend alors la sagesse de l’Église qui exige l’aveu des fautes comme une partie intégrante du sacrement, à moins que des circonstances très exceptionnelles ne le permettent pas et obligent le pénitent à remettre à plus tard le geste de l’aveu qui ne peut jamais être, totalement omis. D’ailleurs, même sur le plan humain, les psychologues et autres experts en sciences humaines considèrent l’expression de la personne blessée comme étant une condition de sa guérison. Nous le voyons à l’importance de l’écoute des personnes à la suite de drames de toutes sortes. Un médecin ne peut pas émettre un bon diagnostic, si la personne ne lui dit pas où elle sent le mal.

L’attitude même de Jésus dans l’Évangile nous fait comprendre cette exigence concrète du dialogue avec lui. Plusieurs scènes décrivent le Christ miséricordieux rencontrant individuellement une pécheresse ou un pécheur pour lui annoncer la Bonne Nouvelle de la miséricorde : la femme adultère, Marie Madeleine, la Samaritaine, Zachée, le paralytique descendu par le toit, le bon larron, etc… À chaque occasion, Jésus établit un lien d’amour et de tendresse qui libère la personne et la fait échapper même à la mort, comme dans le cas de la femme adultère menacée de lapidation. Par Son accueil et Sa parole de pardon, Jésus ouvre devant elle le chemin de la liberté et de la conversion :  » Va, et désormais ne pèche plus « . Confesser nos fautes, le cœur contrit, signifie confesser notre amour reconnaissant à son égard et accueillir le don de Sa paix.

Il n’existe pas de péchés privés ou personnels, tous les péchés affectent vos frères et sœurs en Christ. Si secrets soient-ils, tous nos péchés ont un effet sur notre communauté. Si je ressens de la colère contre quelqu’un, même si je ne la manifeste par aucune parole ni aucun acte, cette disposition néfaste de mon cœur a un effet destructeur sur les gens qui m’entourent. Tout péché est un péché contre la communauté, tout péché, si secret soit-il, est une pierre d’achoppement pour les autres, et leur rend le service du Christ plus difficile.
Dans l’église primitive, la confession était publique. A partir du quatrième siècle, quand la chrétienté eut grandi, cela devint cause de scandale et la confession a pris sa forme actuelle, à savoir, une ouverture du cœur devant le prêtre seul, et à condition d’être secrète. Mais il faut nous rappeler que pendant la confession, le prêtre est là, entre autres, en tant que représentant de la communauté. Le fait que nous ne nous confessions pas directement à Dieu, mais en présence d’un homme, prouve que nous reconnaissons la dimension sociale et communautaire de tous nos péchés. En nous confessant en la présence du prêtre, nous demandons aussi pardon à la communauté.
On rapporte sur plusieurs saints l’histoire suivante. Le pénitent se plaint :  » Oui, je sais que ce que j’ai fait est un péché, je demande à Dieu de me pardonner, mais mon cœur est dur comme une pierre, je ne ressens aucun regret, tout se passe dans ma tête. » Alors le saint lui dit: » Va au milieu de l’église et prosterne-toi devant le peuple, ensuite tu reviendras ». Et tandis que l’homme faisait sa prosternation devant le peuple pour lui demander pardon, quelque chose s’est brisé dans son cœur et il redevenu vivant. Il a vraiment ressenti de la componction pour ce qu’il avait fait, et il a pu recevoir l’absolution. Dans nos confessions, essayons de nous rappeler cette dimension-là en tout premier lieu.
La parole dite, la parole émise possède une grande force. Cela signifie deux choses. Premièrement nous écoutons ce que le prêtre dit, le conseil qu’il nous donne et il arrive que ce qu’il dit, si c’était écrit dans un livre ne nous frapperait pas autant, ne nous paraîtrait pas important. Mais en plus, pendant la confession, le prêtre prie et nous prions aussi pour que la lumière du Saint Esprit vienne sur nous. Le prêtre s’adresse à chacun de nous, à chaque pénitent avec des paroles qu’il prononce sous la direction du Saint Esprit. Ces paroles si on les considère de façon abstraite peuvent paraître évidentes ou même comme des lieux communs, mais elles peuvent devenir des paroles de feu lorsqu’elles me sont adressées personnellement ici et maintenant, sous l’inspiration du Saint Esprit.
L’expression verbale possède une grande force et, en confession, nous nous trouvons, par la grâce de Dieu, placés dans une situation particulière, car nous disons des choses que nous n’avions jamais dites auparavant dans nos prières personnelles. Nous sommes soudain capables de comprendre certaines choses plus profondément et de nous exprimer plus ouvertement. C’est en cela que réside en grande partie la grâce de la confession. Les pères du désert disent qu’une pensée secrète peut avoir sur nous un grand pouvoir, mais lorsque nous trouvons un moyen de l’expliciter et d’en parler, alors elle perd son pouvoir. C’est aussi ce que nous disent les psychiatres modernes, mais les pères du désert l’ont dit avant et le vivent ! Ainsi la parole exprimée que nous apportons à la confession peut avoir force de sacrement et grâce de guérison surprenantes.
Il y a encore une autre chose : pas seulement ce que le prêtre fait lorsqu’il propose un conseil et pas simplement ce que nous faisons lorsque nous essayons de dire la vérité au Christ. Il y a aussi ce que le Christ fait. La confession est un mystère de l’Eglise qui confère une grâce sacramentelle, elle a un pouvoir en elle-même, un pouvoir Divin. Lorsque le prêtre pose ses mains sur notre tête, c’est le Christ qui nous pardonne, et c’est certainement la principale raison pour laquelle nous devons aller nous confesser. Lorsqu’une telle grâce et une telle guérison nous sont offertes, comment oserait-on les refuser.

DIFFÉRENTES SORTES DE PARDON : ÉTERNEL DE DIEU, FRATERNEL, GOUVERNEMENTAL, ADMINISTRATIF

4 février, 2014

http://www.bibliquest.org/JAM/JAM-Pardon_ME2009p308.htm

LE PARDON

J.-A. Monard

DIFFÉRENTES SORTES DE PARDON : ÉTERNEL DE DIEU, FRATERNEL, GOUVERNEMENTAL, ADMINISTRATIF.

Table des matières :
1 Le pardon éternel de Dieu
2 Le pardon fraternel
3 Le pardon gouvernemental
4 Le pardon administratif
5 Quelques remarques sur le pardon dans l’Ancien Testament

Nous nous proposons de considérer différents aspects du pardon, tel qu’il nous est présenté dans le Nouveau Testament.

1 Le pardon éternel de Dieu
« Bienheureux ceux dont les iniquités ont été pardonnées et dont les péchés ont été couverts ; bienheureux l’homme à qui le Seigneur ne compte point le péché » (Rom. 4:7, 8). Tel est le merveilleux message de l’évangile.
Le Nouveau Testament nous révèle — ce que l’Ancien avait déjà annoncé sous forme de figures et de types — comment il est possible que le Dieu juste et saint pardonne les péchés. Sur la croix, Jésus Christ a porté les péchés de tous ceux qui l’ont reçu comme Sauveur. Il a été notre substitut sous le jugement divin. Il a enduré la colère de Dieu durant les trois heures de ténèbres, lorsqu’il a été abandonné de lui. Nos péchés sont pour toujours expiés, effacés, abolis. Ainsi, nous sommes justifiés devant Dieu, déclarés justes. Nous sommes des enfants de Dieu.
Ce pardon nous est acquis de façon définitive lors de notre nouvelle naissance. À ce moment décisif de notre vie, nous passons « de la mort à la vie » (Jean 5:24 ; cf. Luc 15:24), « des ténèbres à la lumière », « du pouvoir de Satan à Dieu » et nous recevons « la rémission des péchés » (Act. 26:18). Nous sommes « lavés de nos péchés » dans le sang de Christ (Apoc. 1:5).
Ce qui se passe alors en nous est au-dessus de toute compréhension humaine, mais la parole de Dieu nous montre qu’il y a deux aspects distincts :
· le côté de l’homme : la foi en Jésus et la repentance (Act. 2:37, 38 ; 1 Jean 1:9),
· le côté de Dieu : le pardon (ou la rémission) des péchés, la création d’une vie nouvelle, éternelle. Ainsi le croyant est « né de nouveau », « né de l’Esprit », « né de Dieu », « engendré de lui » (Jean 3:3, 5, 6 ; 1 Jean 5:1). Nous sommes « rachetés… par le sang précieux de Christ », « régénérés… par la vivante et permanente parole de Dieu » (1 Pierre 1:18, 19, 23).La Parole abonde en expressions qui décrivent le pardon de nos péchés. Nous sommes purifiés, lavés de nos péchés ; ils sont effacés, ôtés ; Dieu dit qu’il ne les compte pas (ou ne les impute pas, ne les met pas en compte), et qu’il ne s’en souviendra plus jamais.Par comparaison avec une dette qui est remise ou acquittée, il nous est dit que nos péchés sont remis. Nous avons la rémission de nos péchés, ce qui signifie le pardon.Dans le récit de Luc 7:36-50, deux pécheurs sont placés devant nous : Simon le pharisien, homme qui pouvait donner l’impression d’être juste, et une femme connue dans la ville pour être une pécheresse. Le premier n’était guère conscient de sa culpabilité, mais la seconde savait qu’elle avait besoin d’un Sauveur, et elle l’avait trouvé en Jésus. Dans la maison de Simon où Jésus a été invité, elle s’approche de lui et verse sur ses pieds les larmes de sa repentance et le parfum qui témoigne de sa reconnaissance et de son amour. L’étonnement du pharisien amène le Seigneur à énoncer la parabole d’un créancier qui avait deux débiteurs, lui devant l’un 500 deniers et l’autre 50. Comme ils étaient tous deux insolvables, il avait remis la dette à l’un et à l’autre. L’amour reconnaissant de celui dont la grande dette avait été acquittée était magnifiquement illustré par l’attitude de cette femme. Le Seigneur dit à son sujet : « Ses nombreux péchés sont pardonnés » et il lui confirme : « Tes péchés sont pardonnés… Ta foi t’a sauvée » (v. 47, 48, 50).Sommes-nous conscients de l’immense dette qui nous a été acquittée, et de la grâce de Dieu qui continue à s’exercer envers nous, alors que tant de faux pas marquent notre chemin de croyants ? Y a-t-il dans nos cœurs une réponse à l’amour infini du Seigneur qui s’est donné lui-même pour nous afin de nous racheter de tous nos péchés ?

2 Le pardon fraternel
Le passage de Matthieu 18:20 — « Car là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux » — est pour ainsi dire encadré par des enseignements du Seigneur concernant les torts faits par un croyant à un autre (v. 15, 21). Ceci attire notre attention sur le fait que, nos cœurs naturels étant ce qu’ils sont, la vie collective des croyants implique nécessairement d’innombrables occasions de pardonner, et l’absolue nécessité de le faire.
Pierre demande s’il faut pardonner jusqu’à sept fois les torts qu’il pourrait subir. Le Seigneur lui répond qu’il faut pardonner jusqu’à 70 x 7 (ou 490) fois, c’est-à-dire sans limite. Il fonde sa réponse sur une parabole semblable à celle de Luc 7. Un souverain remet à l’un de ses esclaves la dette colossale de 10’000 talents, parce qu’il n’a pas de quoi la payer. Ensuite, cet esclave exige impitoyablement de l’un de ses collègues le paiement d’une petite dette de 100 deniers. Lorsque le croyant agit de cette façon, il attire sur lui la discipline de Dieu dans son juste gouvernement : « Ainsi aussi mon Père céleste vous fera, si vous ne pardonnez pas de tout votre cœur, chacun à son frère » (v. 35).
Le Seigneur donne un enseignement analogue en Luc 17. Il prescrit un pardon illimité à son frère, même dans le cas où son repentir est douteux : « Si sept fois le jour il pèche contre toi, et que sept fois il retourne à toi, disant : Je me repens, tu lui pardonneras » (v. 4). Il s’agit dans ce verset des torts qui me sont faits et que je dois pardonner, et non des soins spirituels dont mon frère a besoin — ce qui est un autre sujet. La manière et la mesure du pardon que Dieu attend de ses rachetés les uns envers les autres sont mises en évidence dans deux passages des épîtres : « Soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant les uns aux autres comme Dieu aussi, en Christ, vous a pardonné » (Éph. 4:32). « Vous supportant l’un l’autre et vous pardonnant les uns aux autres, si l’un a un sujet de plainte contre un autre ; comme aussi le Christ vous a pardonné, vous aussi faites de même » (Col. 3:13). Remarquons bien le mot « comme », dans les deux versets.

3 Le pardon gouvernemental
Dans plusieurs des passages où le Seigneur demande aux siens de pardonner, il donne un avertissement très solennel quant à la discipline de Dieu envers ceux qui refusent de le faire. Nous en avons trouvé un exemple en Matthieu 18:35.
Le fait que Dieu rétribue est présenté dans toute la Bible. « Il rend à l’homme selon son œuvre » (Prov. 24:12). « Du jugement dont vous jugerez, vous serez jugés ; et de la mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré » (Matt. 7:2). « Ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera » (Gal. 6:7). C’est le principe du gouvernement de Dieu. Pour le croyant, cette rétribution n’a rien à voir avec le salut éternel. Si nous sommes nés de nouveau, si nous avons reçu la vie éternelle, il n’y pas de retour en arrière possible. Quant à la rétribution, Dieu peut l’effectuer durant notre vie sur la terre, comme encouragement ou comme discipline, mais il y aura aussi des récompenses ou des pertes à la venue de Christ. La manière dont Dieu exerce envers nous son gouvernement est diverse et complexe, car ses voies sont caractérisées aussi bien par sa grâce que par son gouvernement. Dans tous les cas il agit souverainement, selon sa sagesse et pour notre bien. Il est digne de remarque que le Seigneur lie le pardon à la prière.
Dans le Sermon sur la montagne, il enseigne à ses disciples une prière correspondant à leur situation à ce moment-là. L’une des demandes est : « Remets-nous nos dettes, comme nous aussi nous remettons à nos débiteurs » (Matt. 6:12). Ou bien, selon la formulation de Luc : « Remets-nous nos péchés, car nous-mêmes aussi nous remettons à tous ceux qui nous doivent » (11:4). Par cette déclaration, l’âme de celui qui prie est sondée, placée dans la lumière de Dieu. On ne peut pas prononcer de telles paroles tout en gardant rancune contre son prochain. Dans Matthieu, le Seigneur ajoute : « Car si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi à vous ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes leurs fautes, votre Père ne pardonnera pas non plus vos fautes » (Matt. 6:14, 15). La sévérité, l’intransigeance, la dureté que nous pouvons avoir envers autrui appelle, selon le gouvernement de Dieu, une sévérité qui est la moisson de ce que nous avons semé. Dans Marc également, on trouve ce rapport étroit entre la prière et l’état de notre cœur vis-à-vis de notre prochain. « Et quand vous ferez votre prière, si vous avez quelque chose contre quelqu’un, pardonnez-lui, afin que votre Père aussi, qui est dans les cieux, vous pardonne vos fautes. Mais si vous ne pardonnez pas, votre Père qui est dans les cieux ne pardonnera pas non plus vos fautes » (Marc 11:25, 26). Dans nos prières, Dieu ne veut pas de vaines redites, ni des paroles que nos esprits ont forgé avec plus ou moins d’adresse, mais des paroles qui viennent de cœurs droits, entièrement dans sa lumière. Avant de clore cette partie du sujet, remarquons que la prière du Seigneur sur la croix : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font » (Luc 23:34), place aussi devant nous un pardon gouvernemental. En réponse à cette intercession de Jésus, Dieu a accordé à Israël un délai supplémentaire, avant d’exercer son jugement. Bien que la culpabilité du peuple ait été entièrement démontrée dans le rejet du Messie, la grâce de Dieu lui a été offerte dans les prédications que nous trouvons au début du livre des Actes, par la puissance du Saint Esprit. Pierre s’exprime ainsi : « Et maintenant, frères, je sais que vous l’avez fait par ignorance, de même que vos chefs aussi ; mais Dieu a ainsi accompli ce qu’il avait prédit par la bouche de tous les prophètes, savoir que son Christ devait souffrir. Repentez-vous donc et vous convertissez, pour que vos péchés soient effacés : en sorte que viennent des temps de rafraîchissement de devant la face du Seigneur » (Act. 3:17-19). Cette offre de pardon n’a pas été saisie par le peuple comme tel, mais par beaucoup d’individus qui ont appris à connaître le pardon de leurs péchés et ont reçu la vie éternelle.

4 Le pardon administratif
Nous ne faisons ici que mentionner brièvement ce sujet. Il s’agit d’une compétence donnée à l’assemblée (et autrefois aux apôtres) de « remettre les péchés » ou de « délier », en rapport avec le témoignage chrétien sur la terre. Le Seigneur dit aux siens : « Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel » (Matt. 18:18), et « À quiconque vous remettrez les péchés, ils sont remis ; et à quiconque vous les retiendrez, ils sont retenus » (Jean 20:23). « Pardonner » correspond à « délier » et à « remettre ». Cela a trait à la discipline publique. Dans la première épître aux Corinthiens, l’apôtre Paul enjoint à l’assemblée d’exclure un homme dont la conduite était gravement immorale (1 Cor. 5), et dans la seconde épître, ayant appris que la discipline de l’assemblée avait produit la repentance, il écrit : « Vous devriez plutôt pardonner et consoler, de peur qu’un tel homme ne soit accablé par une tristesse excessive » (2 Cor. 2:7). Et il ajoute : « Or à celui à qui vous pardonnez quelque chose, moi aussi je pardonne » (v. 10).

5 Quelques remarques sur le pardon dans l’Ancien Testament
La forme de pardon que nous avons appelée pardon gouvernemental se trouve abondamment dans l’Ancien Testament. En réponse à l’intercession d’Abraham, l’Éternel dit : « Si je trouve dans Sodome cinquante justes, au-dedans de la ville, je pardonnerai à tout le lieu à cause d’eux » (Gen. 18:26). Pardonner signifie ici : ne pas détruire la ville. En face de l’incrédulité d’Israël, à Kadès-Barnéa, Dieu annonce à Moïse qu’il va frapper son peuple de peste et le détruire (Nomb. 14:12). Moïse supplie l’Éternel : « Pardonne, je te prie, l’iniquité de ce peuple, selon la grandeur de ta bonté, et comme tu as pardonné à ce peuple depuis l’Égypte jusqu’ici » (v. 19). Et l’Éternel répond : « J’ai pardonné selon ta parole » (v. 20). Ici de nouveau, pardonner signifie ne pas détruire le peuple. Le pardon est un acte du gouvernement de Dieu envers le peuple. Il n’est pas question de l’état des âmes. Dans le cadre de la révélation partielle que Dieu avait faite avant la venue de Christ, il ne faut pas s’étonner que le pardon ne soit pas présenté d’une manière aussi claire que dans le Nouveau Testament. On trouve toutefois des cas où une âme a été enseignée de façon très profonde quant à sa culpabilité devant Dieu, a été amenée à une véritable repentance et a connu le pardon de ses péchés dans le même sens que celui que les croyants d’aujourd’hui ont le bonheur de posséder. David en est un des exemples les plus remarquables (Ps. 51 ; Ps. 32:1-5). Il connaît le pardon entier de son péché quant à la position de son âme devant Dieu, mais il sait que, sous le gouvernement de Dieu, il subira les conséquences douloureuses de sa faute sa vie durant (2 Sam. 12:13, 14). Encore une remarque avant de clore. Nous avons considéré quatre aspects du pardon. Il ne faudrait pas en conclure que tous les passages de la Bible où il est question de pardon peuvent être mis sans hésitation dans une catégorie ou dans une autre. La profondeur de la révélation de Dieu dépasse infiniment ce que nous pouvons comprendre et exprimer.

PÈLERINAGE PÉNITENTIEL À LOUGH DERG: HOMÉLIE DU CARD. OUELLET

15 juin, 2012

http://www.zenit.org/article-31142?l=french

PÈLERINAGE PÉNITENTIEL À LOUGH DERG: HOMÉLIE DU CARD. OUELLET

Demande de pardon dans le cadre du congrès eucharistique

ROME, vendredi 15 juin 2012 (ZENIT.org) – « Je tiens à réaffirmer l’engagement de l’Eglise catholique pour créer un environnement sûr pour les enfants », déclare le cardinal Ouellet, qui exhorte aussi les chrétiens à la conversion : « Une vraie conversion ne peut se faire qu’à travers une relation personnelle profonde, restaurée, avec le Christ que nous invoquons pour toute l’Eglise ».
Le préfet de la Congrégation pour les évêques et légat du pape au Congrès eucharistique international de Dublin, a en effet effectué, au nom du pape, un pèlerinage pénitentiel au sanctuaire de saint Patrick à Lough Derg, comme c’est la tradition, dans le jeûne et la prière. On appelle ce centre de pèlerinage situé sur une île le« Purgatoire » de saint Patrick. Il a présidé la messe et a prononcé l’homélie, mardi, 12 juin, en la basilique Saint-Patrick (http://www.loughderg.org/). La célébration eucharistique a été suivie d’une prière d’intercession pour les victimes d’abus et pour l’Eglise dont nous proposons ci-dessous une traduction, après le texte de l’homélie.

Homélie du card. Ouellet :

Chers frères et sœurs,

Le pape Benoît XVI m’a demandé, en tant que Légat au 50ème Congrès eucharistique international de Dublin, de venir à Lough Derg demander pardon à Dieu pour les temps où des clercs ont agressé sexuellement des enfants non seulement en Irlande mais aussi ailleurs dans l’Eglise.
Lough Derg, en Irlande, est le symbole de la conversion, de la pénitence et du renouveau spirituel. Beaucoup de gens viennent ici pour prier, jeûner et demander pardon pour leurs péchés. Selon une longue tradition, ils suivent les pas de saint Patrick qui évangélisa le pays au cinquième siècle.
Je suis venu ici dans l’intention spécifique de chercher le pardon de Dieu et des victimes, pour la grave faute des abus sexuels sur des mineurs par des clercs. Nous avons appris au cours des dernières décennies tout le mal et le désespoir que de tels abus ont causés à des milliers de victimes. Nous avons appris aussi que la réponse de certaines autorités de l’Église à ces crimes a souvent été inadéquate et inefficace pour y mettre fin, malgré des indications claires dans le code de droit canonique.
Au nom de l’Eglise, je présente encore une fois mes excuses aux victimes, que j’ai rencontrées, pour certaines, ici même, à Lough Derg.
Je redis ici ce que le Saint-Père a dit aux victimes dans sa Lettre aux catholiques d’Irlande : « Il est compréhensible que vous trouviez difficile de pardonner ou de vous réconcilier avec l’Eglise. En son nom, j’exprime ouvertement la honte et le remords que nous éprouvons. Dans le même temps, je vous demande de ne pas perdre espoir. C’est dans la communion de l’Eglise que nous rencontrons la personne de Jésus-Christ, qui a lui-même été victime de l’injustice et du péché ».
Chers frères et sœurs, dans l’Evangile d’aujourd’hui, Jésus dit à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre. Mais si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n’est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent ».
La tragédie des abus sexuels de mineurs perpétrés par des chrétiens, surtout quand ce sont des membres du clergé, est une source de grande honte et un scandale énorme. C’est un péché contre lequel Jésus lui-même s’est indigné : « Mieux vaudrait pour lui se voir passer autour du cou une pierre à moudre et être jeté à la mer que de scandaliser un seul de ces petits » (Lc 17, 2).
En tant que membres de l’Église, nous devons avoir le courage de demander humblement le pardon de Dieu, ainsi que le pardon de ceux qui ont été blessés : nous devons rester proches d’eux sur leur chemin de souffrance et chercher tous les moyens possibles pour guérir et panser les blessures en suivant l’exemple du Bon Samaritain.
Dans le contexte de ce Congrès eucharistique international, je tiens à réaffirmer l’engagement de l’Eglise catholique pour créer un environnement sûr pour les enfants et nous prions pour qu’une nouvelle culture de respect, d’intégrité et d’amour à la manière du Christ, l’emporte au milieu de nous et pénètre la société dans son ensemble .
Que l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie et de tous les saints nous aide tous à éradiquer le fléau des abus sexuels et nous libère en vue d’un renouvellement profond et durable spirituelle de l’Eglise tout entière.
Nous sommes ici pour prier Dieu avec les paroles mêmes de saint Augustin dans les Confessions : « Tu as appelé, tu as crié et tu as brisé ma surdité ; tu as brillé, tu as resplendi et tu as dissipé ma cécité ; tu as embaumé, j’ai respiré et haletant j’aspire à toi ; j’ai goûté, et j’ai faim et j’ai soif ; tu m’as touché et je me suis enflammé pour ta paix » (Livre 10, 27).
Une vraie conversion ne peut se faire qu’à travers une relation personnelle profonde, restaurée, avec le Christ que nous invoquons pour toute l’Eglise, comme nous le rappelle la prière de Saint Patrick, l’apôtre de la foi dans ce pays :

Le Christ avec moi, le Christ en moi,
Le Christ derrière moi, le Christ devant moi,
Le Christ à côté de moi, le Christ me gagne,
Le Christ me réconforte et me redonne des forces. Amen.

Après l’homélie, l’assemblé prié aux intentions suivantes :
- Pour l’Église et ses dirigeants : que leur soient accordés sagesse et courage pour fortifier la foi des fidèles et leur donner la nourriture pour la route. Seigneur, écoute-nous.
- Pour nous tous ici présents : que nous puissions être sel de la terre pour ceux qui nous entourent et une lumière pour guider les gens sur leur chemin de pèlerin. Seigneur, écoute-nous.
- Pour les manquements à l’amour, au respect, au soutien et à l’éducation des jeunes, en particulier les plus vulnérables, nous te demandons pardon. Seigneur, écoute-nous.
- Pour les crimes et les péchés d’abus sexuels et physiques perpétrés contre des enfants et des jeunes par des prêtres ou par d’autres ministres de l’Église, en particulier dans les institutions gérées par celle-ci. Seigneur, écoute-nous.
- Pour la réponse inadéquate souvent donnée par des responsables de l’Église quand des personnes victimes de ces abus ont parlé de ce qui leur était arrivé, nous demandons pardon. Seigneur, écoute-nous.
- Que tous ceux dont la vie a été brisée par des abus de toute nature puissent recevoir un soutien et faire l’exoérience d’une guérison durable. Seigneur, écoute-nous.
- Pour des intentions personnelles, pour les intentions d’autres pèlerins et pour toutes les personnes malades. Seigneur, écoute-nous.
- Pour toutes les personnes en deuil, et pour nos morts, en particulier les membres de nos familles et tous ceux qui nous sont chers ; pour les personnes qui nous ont quittés récemment, toutes celles qui sont venues en pèlerinage à Lough Derg et pour les victimes de mort tragique ou violente. Seigneur, écoute-nous.
- Seigneur Dieu, par l’intercession de Patrick notre saint patron, entends les prières de ton peuple ici rassemblé dans la foi et l’espérance. De même que tu nous nourris par ta parole, donne-nous aussi le pain qui nous donne la vie, Jésus Christ, ton Fils notre Seigneur, qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen.

Traduction d’Hélène Ginabat

SAINT LAURENT : PROTO DIACRE DE L’EGLISE ROMAINE

9 août, 2010

du site:

http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cclergy/documents/rc_con_cclergy_doc_19022000_slaur_fr.html

SAINT LAURENT

PROTO DIACRE DE L’EGLISE ROMAINE

Don Francesco Moraglia

Docteur de théologie systématique

Gênes

L’histoire de l’Eglise nous a laissé de grandes figures d’évêques et de prêtres qui ont contribué à illustrer, sur le plan théologique et pastoral, le sens profond du ministère ordonné. Pour l’épiscopat, on distingue, entre autres, les figures d’Irénée, Augustin, Winfrid, Boniface, Bartolomé Las Casas et Ildephonse Schuster; pour la prêtrise, l’époque moderne et contemporaine a été marquée par Philippe Néri, Jean-Marie Vianney, Jean Bosco, Pierre Chanel et Maximilien Kolbe. Le ministère diaconal acquiert lui aussi des contours plus nets si on le considère à la lumière de la figure de grands diacres; c’est le cas, par exemple, du martyr Laurent, proto diacre de l’Eglise romaine qui, avec Etienne et Philippe, est certainement l’un des plus célèbres de l’antiquité.
Le diaconat considéré en lui-même, en tant que ministère permanent, non finalisé à la prêtrise, disparaît en Occident après avoir été une institution florissante jusqu’au Ve siècle; à partir de cette époque – principalement à cause de l’engagement plus grand des prêtres dans l’activité pastorale -, le premier degré du sacrement de l’ordre se réduit à une simple étape d’accès au degré suivant, la prêtrise. On peut alors aisément comprendre pourquoi l’institution diaconale, sur le plan de la réflexion théologique et de la pratique pastorale, est restée inhibée, presque fossilisée.
Dès le XVIe siècle, le concile de Trente tenta de réagir à cette situation, sans succès; il faudra attendre le concile Vatican II, dans la seconde moitié du XXe siècle, pour assister au rétablissement du diaconat « en tant que degré propre et permanent de la hiérarchie… »; le texte de la constitution dogmatique Lumen Gentium, toujours au n. 29, précise immédiatement après: « …avec l’accord du pontife romain ce diaconat pourra être conféré à des hommes mûrs, même s’ils vivent dans le mariage, ainsi qu’à des jeunes gens idoines, pour lesquels, cependant, la loi du célibat doit rester ferme » (EV. 1/360).
Paul VI, dans la lettre apostolique Sacrum diaconatus ordinem – 18 juin 1967 -, réaffirme que l’ordre du diaconat « …ne doit pas être considéré comme un pur et simple degré d’accès au sacerdoce; celui-ci, insigne par son caractère indélébile et sa grâce particulière, s’enrichit d’autant plus que ceux qui y sont appelés peuvent se consacrer de manière stable aux mystères du Christ et de l’Eglise » (EV. 2/369).
Le seul fait que pendant une période aussi longue – quinze siècles -, le diaconat ne se soit pas réalisé sous une forme permanente dans l’Eglise latine, laisse deviner qu’il est nécessaire, sur le plan de la réflexion théologique et de la pratique pastorale, de récupérer le temps perdu à travers une ample réflexion de la part de toute la communauté ecclésiale. Le diaconat permanent, en effet, représente un important enrichissement pour la mission de l’Eglise.
Naturellement, le rétablissement du diaconat permanent, sollicité avec autorité par le dernier concile, ne pourra se réaliser qu’en harmonie et continuité avec la tradition ancienne. A ce sujet, la récente déclaration conjointe – 22 fevrier 1998 – de la Congrégation pour l’Education catholique et de la Congrégation pour le Clergé est extrêmement significative; elle se trouve au début des « Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents » et du « Directoire pour le ministère et la vie des prêtres »; le contenu de cette déclaration apporte une clarification et une orientation pour le futur: « c’est la réalité diaconale toute entière (vision doctrinale fondamentale, discernement vocationnel et préparation, vie, ministère, spiritualité et formation permanente) qui postule une révision du chemin de formation jusqu’ici parcouru, pour obtenir une clarification globale, indispensable à une nouvelle impulsion de ce degré de l’Ordre sacré, en correspondance avec les vœux et les intentions du Concile Œcuménique Vatican II » (Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents, Directoire pour le ministère et la vie des diacres permanents. Cité du Vatican, page 7).
Pour reprendre ce qui a été dit au sujet des grandes figures d’évêques, de prêtres et de diacres qui ont illustré et influencé le ministère ordonné, permettant une compréhension plus vraie et plus approfondie de celui-ci, il est raisonnable de s’arrêter sur la figure du diacre Laurent dont l’histoire personnelle incite à repenser le premier degré du ministère ordonné; lequel, en raison de l’évolution historique évoquée plus haut, attend encore aujourd’hui d’être pleinement compris et mis en valeur. Il s’agit de donner une nouvelle vigueur à un ministère permanent en mesure de s’exprimer avec une plus grande fécondité dans la vie de l’Eglise.
Les vicissitudes personnelles de saint Laurent, archidiacre de l’Eglise de Rome, nous sont parvenues à travers une tradition ancienne divulguée dès le IVe siècle; cette tradition accueillie par l’Eglise a également été admise dans les textes liturgiques.
Les épisodes les plus connus du martyre de Laurent sont décrits, avec richesse de détails, dans la Passio Polychromi dont nous avons trois rédactions (V-VIIe siècle); De fait, ce récit renferme des éléments légendaires, même si certaines informations que nous rapportons ici figurent dans des témoignages précédents comme celui de saint Ambroise dans De Officiis (cf. PL XVL 89-92).
Nous commençons, avec l’intention de les développer, par les courtes annotations reportées pour la fête du martyr qui – selon la « Depositio martyrum » (année 354) – tombe le 10 août; voici les expressions du Missel Romain: « Laurent, célèbre diacre de l’Eglise de Rome, confirma son service de charité par le martyre sous Valérien (258), quatre jours après la décapitation du pape Sixte II. Selon une tradition divulguée dès le IVe siècle, il soutint, intrépide, un atroce martyre sur le gril, après avoir distribué les biens de la comunauté aux pauvres qu’il considérait comme les vrais trésors de l’Eglise… ». Ces annotations se terminent en rappelant que le nom de Laurent figure également dans le Canon Romain.
L’Eglise, dans ses textes liturgiques, prend donc à son compte ce que rapporte la tradition ancienne qui, cependant, connaît en son sein des versions différentes. Ici, nous n’avons pas l’intention d’entrer dans le vif des hypothèses récemment avancées par la critique historiographique qui aurait tendance à reporter la date du martyre de saint Laurent au début du IVe siècle et à se démarquer des contours traditionnels pour le caractériser; par exemple, Laurent ne serait pas espagnol mais romain et, à ce propos, la Prefazio della mensa XII del Sacramniario leoniano le présente comme civis romain. Mais, comme le remarque Paolo Toschi, toutes ces nouvelles études « n’enlèvent pas a priori la possibilité qu’il existe, à Rome, une véritable tradition, exposée avec d’évidents embellissements réthoriques par saint Ambroise, sur la tragique capture et la fin de saint Laurent par le feu, supplice qui a été infligé sous Valérien, comme on le sait, à saint Fructuosus et aux diacres Euloge et Augure à Tarragone. D’autre part, le verbe animadvertere utilisé dans le décret de persécution dans la rédaction de Cyprien peut également faire référence à d’autres formes d’exécutions capitales en dehors de la « décapitation » (Bibliotheca Sanctorum, vol….1539).
Nous accueillons ici les données traditionnelles telles qu’elles sont rapportées dans les textes liturgiques, en nous limitant à les proposer de manière plus articulée.
Laurent serait donc né en Espagne, à Osca une petite ville de l’Aragon qui surgit aux pieds des Pyrénées. Afin de compléter ses études humanistiques et liturgiques il fut envoyé, tout jeune encore, dans la ville de Saragosse, où il fit la connaissance du futur pape Sixte II. Ce dernier – originaire de la Grèce -, était investi d’une charge d’enseignant dans l’un des plus importants centres d’études de l’époque et, parmi ses maîtres, le pape était l’un des plus connus et des plus appréciés.
Pour sa part, Laurent, qui devait devenir un jour le chef des diacres de l’Eglise de Rome, s’imposait par ses qualités humaines, par sa délicatesse d’âme et son intelligence. Entre le maître et l’élève s’instaura une communion et une familiarité qui, avec le passage du temps, augmenta et se cimenta; entre temps, l’amour qu’il portaient tous les deux pour Rome, centre de la chrétienté et ville-siège du vicaire du Christ, augmenta au point de suivre un flux migratoire alors très intense et de quitter l’Espagne pour la ville où l’apôtre Pierre avait établi sa chaire et rendu le témoignage suprême. C’est donc à Rome, au cœur de la catholicité, que maître et élève purent réaliser leur idéal d’évangélisation et de mission… jusqu’à l’effusion du sang. Lorsque le 30 août de l’année 257, Sixte II monta sur le trône de Pierre – pour un pontificat qui devait durer moins d’un an – , immédiatement et sans hésiter, il voulut à ses côtés son ancien élève et ami Laurent, en lui confiant la charge délicate de proto diacre.
Les deux hommes, à la fin, scellèrent leur vie de comunion et d’amitié en mourant par les mains du même persécuteur, séparés seulement par quelques jours.
Nous avons des informations sur la fin du pape Sixte II dans une lettre de saint Cyprien, évêque de Carthage. Cyprien, en parlant de la situation de grande incertitude et de malaise dans laquelle versaient les Eglises à cause de l’hostilité croissante à l’égard des chrétiens, remarque: « L’empereur Valérien a envoyé au sénat son rescrit par lequel il a décidé que les évêques, les prêtres et les diacres doivent être immédiatement mis à mort… – le témoignage de Cyprien continue – … je vous communique que Sixte a subi le martyre avec quatre diacres le 6 août, alors qu’il se trouvait dans la zone du cimetière. Les autorités romaines ont pour règle que ceux qui sont dénoncés comme chrétiens doivent être jugés et subir la confiscation de leurs biens au bénéfice du trésor public impérial » (Lettre 80, CSEL 3,839-840).
Le cimetière auquel le saint évêque de Carthage fait allusion est celui de Callixte, où Sixte fut capturé tandis qu’il célébrait la sainte liturgie et où il fut enterré après son martyre.
En revanche, pour le martyre du diacre Laurent, nous possédons un témoignage particulièrement éloquent de saint Ambroise dans De Officiis (1 41, 205-2079), repris ensuite par Prudence et saint Augustin, puis par saint Maxime de Turin, saint Pierre Chrisologue, saint Léon le Grand et, enfin, par certaines formules liturgiques renfermées dans les Sacramentaux romains, dans le Missale gothicum et dans l’Ormionale Visigotico (Bibliotheca Sanctorum, vol. …, 1538-1539).
Ambroise s’étend tout d’abord sur la rencontre et sur le dialogue entre Laurent et le pape, il évoque ensuite la distribution des biens de l’Eglise aux pauvres, il mentionne enfin le gril, l’instrument du supplice, en rapportant la phrase que le proto diacre de l’Eglise de Rome prononça en s’adressant à ses bourreaux: assum est, … versa et manduca (cf. Bibliotheca Sanctorum, vol. … col. 1538-1539).
C’est au texte d’Ambroise tiré du De Officiis (chap. 41, nn. 205-206-207), bouleversant par son intensité et sa force expressive, que nous nous référons; saint Ambroise s’exprime ainsi:
205. « … saint Laurent,… voyant son évêque Sixte conduit au martyre, commença à pleurer non pas parce que celui-ci était conduit à la mort, mais parce qu’il devait lui survivre. Il commença donc à lui dire de vive voix: « Où vas-tu, père, sans ton fils? Où t’empresses-tu, o saint évêque, sans ton diacre? Tu n’offrais jamais le sacrifice sans ministre. Qu’est-ce qui t’as donc déplu en moi, o père? Tu m’as peut-être trouvé indigne? Vérifie au moins si tu as choisi un ministre approprié. Ne désires-tu pas que celui auquel tu as confié le sang du Seigneur, celui que tu as associé à la célébration des mystères sacrés, verse son sang avec toi? Sois attentif à ce que ton discernement ne vacille pas tandis que ta force est louée. Le mépris du disciple porte préjudice au maître. Faut-il rappeler que les grands hommes remportent la victoire par les épreuves victorieuses de leurs disciples plus que par les leurs? Et puis Abraham a offert son fils, Pierre a envoyé Etienne en avant. Toi aussi, o mon père, montre en ton fils ta vertu; offre celui que tu as éduqué, pour obtenir la récompense éternelle en glorieuse compagnie, sûr de ton jugement ».
206. Sixte lui répondit: « Je ne te quitte pas, je ne t’abandonne pas, o mon fils; mais des épreuves plus difficiles te sont réservées. Comme nous sommes vieux, il nous a été donné de parcourir une épreuve plus facile; Comme tu es jeune, tu es destiné à un triomphe plus glorieux sur le tyran. Tu viendras bientôt, cesse de pleurer: tu me suivras dans trois jours. Cet intervalle entre un évêque et un lévite est convenable. Tu n’aurais pas été digne de vaincre sous la conduite de ton maître, comme si tu cherchais une aide. Pourquoi demandes-tu à partager mon martyre? Je t’en laisse l’entière succession. Pourquoi exiges-tu ma présence? Les disciples encore faibles précèdent leur maître, ceux qui sont déjà forts, qui n’ont plus besoin d’enseignements, le suivent pour vaincre sans lui. C’est pourquoi Elie quitta Elisée. Je te confie la succession de ma vertu ».
207. Il existait entre eux une rivalité véritablement digne d’être combattue par un évêque et par un diacre: celui qui, le premier, devait souffrir pour Jésus-Christ. On raconte que lors des représentations tragiques, les spectateurs éclataient en applaudissements bruyants lorsque Pilade disait qu’il était Oreste et Oreste, comme c’était le cas, affirmait qu’il était Oreste, le premier pour être tué à la place d’Oreste, le second pour empêcher que Pilade fut tué à sa place. Mais ces derniers ne devaient pas vivre, car ils étaient tous les deux coupables de parricide: l’un parce qu’il l’avait commis, l’autre parce qu’il était son complice. Dans notre cas, le seul désir qui animait saint Laurent était celui de s’immoler pour le Seigneur. Et lui aussi, trois jours après, ayant ridiculisé le tyran, sera brûlé sur un gril: « Cette partie est cuite, dit-il, retourne-la et mange-la ». Il triomphait ainsi, avec sa force d’âme, de l’ardeur du feu » (saint Ambroise, De Officiis, libri tres, Milan, Bibliothèque ambrosienne, Rome Città Nuova Editrice 1977, pp. 148-151).
Si l’on s’en tient au témoignage de saint Ambroise, le diacre apparaît caractérisé ainsi:
1) comme celui qui, constitué sacramentellement au service de l’offrande (diaconie), vit son ministère diaconal en exprimant dans le martyre le témoignage suprême de Jésus-Christ, le sens théologique du service de la charité, à travers l’accueil de cet amour-charité plus grand qu’est le martyre.
2) comme celui qui, en vertu du lien structurel qui le lie sacramentellement à l’évêque, (premier degré de l’ordre), vit la « communion ecclésiale », à travers un service spécifique à l’épiscopat, à partir de l’eucharistie et en référence à celui-ci.
3) comme celui qui, en vertu du sacrement (c’est-à-dire dans la mesure où il est enraciné dans le premier degré de l’ordre), se consacre au service d’une charité intégrale, à 360 degrés – par conséquent pas seulement une solidarité humaine et sociale -, et manifeste de la sorte le caractère le plus typique de la diaconie.

Examinons l’une après l’autre ces caractéristiques:

1) Le diacre se présente comme celui qui, constitué sacramentellement au service de l’offrande (diaconie), vit son ministère diaconal en exprimant dans le martyre le témoignage suprême de Jésus-Christ, le sens théologique du service de la charité, à travers l’accueil de cet amour-charité plus grand qu’est le martyre.
Si la caractéristique principale qui identifie le diacre, en soi et dans son ministère, est celle d’être ordonné au service de la charité, le martyre – témoignage jusqu’à l’effusion du sang -, doit être considéré comme l’expression d’un amour-charité plus grand, à savoir le service d’une charité qui ne connaît pas de limites. Le ministère de la charité auquel le diacre est délégué à travers l’ordination ne s’arrête donc pas au service des « cantines » ou, comme on avait coutume de dire autrefois, dans un langage catéchétique, aux œuvres de miséricorde corporelles, ni même aux œuvres spirituelles, mais le service diaconal de la charité doit parvenir, par l’inconditionnel don de soi, à l’imitation du Christ, le témoin fidèle par antonomase (cf. Ap 1,5;3,14).
Dans le cas de Laurent – explique Ambroise- « aucun désir ne l’animait sinon le désir de s’immoler pour le Seigneur » (cf. saint Ambroise, De Officiis, I, 41, n. 207); à travers le témoignage rendu face à ses persécuteurs, il apparaît évident que l’exercice du ministère diaconal ne s’identifie pas ici avec le service du prochain, réduit aux seules nécessités matérielles; puisque dans ce geste qui exprime un amour plus grand pour Jésus-Christ et qui porte à donner sa propre vie, Laurent fait en sorte que ses bourreaux puissent également, au sens réel, faire « une certaine » expérience du Verbe incarné qui, en dernière instance, est le destin personnel et commun de tout homme; c’est le service théologique de la charité auquel chaque diacre doit tendre ou, tout au moins, rester disponible.
Ceci ne signifie pas que le diacre épuise dans son ministère le témoignage de la charité qui est, et reste toujours, vocation et mission de toute l’Eglise, mais on entend affirmer qu’en vertu de son ordination, le diacre porte en soi, de manière sacramentelle-spécifique, la « forme Christi » pour le service de la charité; ce qui revient à dire un « exercice ministériel » de la charité qui se réalise envers Jésus-Christ et les frères et qui peut aller jusqu’à exiger le don de soi… jusqu’au sacrifice de la vie. Les mots que Laurent adresse à l’évêque Sixte résonnent clairement: « Et puis Abraham a offert son fils, Pierre a envoyé Etienne en avant. Toi aussi, o mon père, montre en ton fils ta vertu; offre celui que tu as éduqué, pour obtenir la récompense éternelle en glorieuse compagnie, sûr de ton jugement » (saint Ambroise, De Oficiis, I, 41, n. 205).
Il est utile de rappeler, cependant, que le témoignage d’un « amour-charité » plus grand de la part de celui qui est ordonné au service de la charité, ne dispensera jamais l’Eglise-Epouse de s’offrir au Christ-Epoux, dans le don de la « martyria » par lequel, au delà de toute réticence et ambiguité, se manifeste la valeur absolue et l’union inséparable que « vérité » et « charité » revêtent dans la vie du disciple du Seigneur (cf. 1 Cor 13,4-5, Phil 4,15).
A cet effet, il est utile de relire le texte de Lumen Gentium 42, dans lequel on affirme. « … le martyre, par lequel le disciple est rendu semblable au maître qui accepte librement la mort pour le salut du monde, et se conforme à lui dans l’effusion du sang, est estimé par l’Eglise comme le don exeptionnel et la preuve suprême de la charité… si le martyre est accordé à peu, tous doivent cependant être prêts à confesser Jésus-Christ devant les hommes, et à le suivre sur le chemin de la croix à travers les persécutions, qui ne font jamais défaut à l’Eglise » (EV, 1/398).
A présent – malgré l’appel universel à la charité même héroïque -, un fait reste incontestable: dans l’Eglise il existe un « ministère ordonné » spécifique, par conséquent des hommes sacramentellement constitués au service de la charité.
2) Le diacre se présente comme celui qui, en vertu du lien structurel qui le lie sacramentellement à l’évêque, (premier degré de l’ordre), vit la « communion ecclésiale », à travers un service spécifique à l’épiscopat, à partir de l’eucharistie et en référence à celui-ci.
C’est l’autre caractéristique qui ressort du dialogue entre Sixte et Laurent au cimetière de Callixte; le dialogue met en évidence le fait que c’est justement dans le lien sacramentel qui unit le diacre à l’évêque, que le diacre apparaît comme l’ »homme de la communion » à travers le service spécifique qu’il rend à l’évêque; ce service, ensuite, se réalise, concrètement, par l’accomplissement fidèle de ce que l’évêque, en vertu de la plénitude du sacerdoce et du gouvernement qu’il a sur l’Eglise – toujours en communion avec l’évêque de Rome -, exige de son diacre selon les nécessités et les urgences ecclésiales.
Dans le ministère du diacre, enfin, toute chose fait référence à l’autel, dans la mesure où dans l’Eglise toute chose, à commencer par la charité, tire son origine de la S.S. Eucharistie. Voici le point où le témoignage d’Ambroise, à cet égard, se fait particulièrement significatif: « … Laurent,… voyant son évêque Sixte conduit au martyre, commença… à lui dire de vive voix: « Où vas-tu, père, sans ton fils? Où t’empresses-tu, o saint évêque, sans ton diacre? Tu n’offrais jamais le sacrifice sans ministre… ? …Ne désires-tu pas que celui auquel tu as confié le sang du Seigneur, celui que tu as associé à la célébration des mystères sacrés, verse son sang avec toi? » (saint Ambroise, De Officiis, 1.41, n.205).
La communion et l’affection entre l’évêque et le diacre, qui se manifestent dans leur commune dépendance et dans leur lien commun à l’eucharistie, expriment une vision ecclésiale profondémente théologique qui va au delà des conceptions qui abaissent et réduisent l’Eglise-Epouse à une simple dimension politique et sociologique, en l’assimilant, de fait, à l’une des nombreuses institutions humaines; il est donc nécessaire de se libérer de toute perspective secularisée et sécularisante, qui conduit inéluctablement à perdre et à compromettre le sens et la force régénérante du Mystère; le risque est celui de voir aussi bien dans le pape que dans les évêques, les prêtres et les diacres, autant de degrés d’une bureaucratie infinie semblable à celle de l’administration publique et chargée, comme cette dernière, de veiller au bon ordre de l’ensemble guère mieux précisé.
La rencontre du pape Sixte avec le diacre Laurent nous invite, le cas échéant, à renverser une telle vision et à redécouvrir au cœur de l’Institution-Eglise, toujours indispensable, et des structures ecclésiales, pareillement nécessaires, la réalité vive et vivifiante de la grâce qui les anime et, par là même, nous invite à redécouvrir le lien théologique qui les lie au Christ, unique, véritable Evêque, Prêtre et Diacre. D’autre part, dans le Nouveau Testament – dans la lettre aux Philippiens (cf. Phil 1,1) et dans la première lettre à Timothée (cf. Tim 3,1-13) -, nous trouvons associés l’évêque et le diacre; par la suite, leur lien étroit est attesté dans la « Traditio apostolica » – début du IIIe siècle (Hyppolite de Rome) -, où la grâce conférée au diacre par le rite de l’ordination est définie comme « simple service de l’évêque », sans sacerdoce; quelques années après – dans la moitié du IIIe siècle, en Syrie -, la « Didascalie des Apôtres » présente le diacre comme le « serviteur de l’évêque et des pauvres ».
Enfin, la relation qui lie structurellement le diacre à l’évêque aujourd’hui est exprimée de manière transparente à travers la liturgie de l’ordination; dans ce cérémonial, en effet, à la différence de celui de l’ordination des évêques et des prêtres, le geste de l’imposition des mains est réalisé uniquement par l’évêque qui ordonne pour indiquer le lien caractéristique et singulier qui lie le diacre à l’évêque.
3) Le diacre se présente comme celui qui, en vertu du sacrement (c’est-à-dire dans la mesure où il est enraciné dans le premier degré de l’ordre), se consacre au service d’une charité intégrale, à 360 degrés – par conséquent pas seulement une solidarité humaine et sociale -, et manifeste de la sorte le caractère le plus typique de la diaconie.
Dans son témoignage, Ambroise nous présente encore Laurent comme celui qui, en vertu du sacrement reçu, est pleinement consacré au service de la charité dans une situation concrète: la Rome impériale du troisième siècle, tandis que la persécution fait fureur; dans cette conjoncture, Laurent est appelé à réaliser, face à la communauté ecclésiale et au monde, des gestes concrets destinés à se transformer en autant de signes de l’Amour-Charité de Dieu, à savoir de cette Charité dont toute chose provient et vers laquelle toute chose se dirige; et c’est dans ce service que le diacre exprime le ministère le plus typique de sa diaconie qui consiste, justement, dans le service de la charité réalisé en vertu du mandat sacramentel; en définitive une animation qui concerne l’Eglise ou des secteurs de la vie ecclésiale et qui se présente selon les caractères de la catholicité (kat’olon = selon la totalité, sans rien exclure); l’aspiration de ce service est la totalité des hommes sans exeption, le contenu, un bien qui répond à toutes les attentes de l’homme – esprit, âme et corps (cf. I Ts 5,23) – excluant toute partialité et unilatéralité.
En outre, dans le texte ambrosien on relève une allusion qui aide à la réflexion. Sixte, désormais prisonnier, confie à Laurent, le premier de ses diacres, l’Eglise entière et la lui laisse pour une période de trois jours. « … Comme nous sommes vieux, il nous a été donné de parcourir une épreuve plus facile; comme tu es jeune, tu es destiné à un triomphe plus glorieux sur le tyran. Tu viendras bientôt, cesse de pleurer: tu me suivras dans trois jours. Cet intervalle entre un évêque et un lévite est convenable… » (saint ambroise, De Officiis, n.206). Laurent, pendant ces trois jours, et en tant que diacre, en esprit de service et d’obéissance à son évêque – désormais définitivement arraché à son peuple -, devra prendre soin de l’Eglise, et pour la dernière fois il administrera les biens de l’Epouse du Christ en le faisant par un geste qui porte en soi la force d’une définition et qui dit comment, dans l’Eglise, tout est finalisé et prend de la valeur à partir du service de la charité, réalité destinée à perdurer quand tout aura disparu et la scène de ce monde sera passée (cf. 1 Cor 13,8).
Pour ceux qui regardent de loin, de façon approximative – et, somme toute, superficielle -, ce geste peut sembler être exclusivemnet lié aux nécessités matérielles et au temps présent; il s’agit, en effet, de la distribution de biens matériels à des pauvres; en réalité, l’acte que Laurent réalise, en esprit de fidélité au dépôt qu’il a reçu de l’évêque et au ministère ecclésial dans lequel il est constitué, est un acte qui le projette, et avec lui projette toute l’Eglise – qui lui a été confiée jusqu’au moment du martyre -, au-delà de l’histoire, dans l’escathologie, c’est-à-dire dans le « temps » et dans « l’espace » dans lequel Dieu manifeste la plénitude de sa charité et de son amour.
Le diacre laurent, ministre ordonné de la charité, achève la tâche qu’il avait reçue, non seulement dans la mesure où il suit son évêque dans le martyre mais parce qu’à travers le geste par lequel il donne aux pauvres toutes les ressources de la communauté – ici exprimées par des biens matériels -, il montre comment, dans l’Eglise, chaque chose a de la valeur si elle est orientée vers la charité, si elle devient service à la charité, si elle peut se transformer en charité.
Et ce service – comme le rappelle la première lettre aux Théssaloniciens (cf. 1 Ts 5,23) -, s’étend non seulement au « corps » mais aussi à l’ »esprit » et à l’ »âme », pour se manifester en toute clarté dans la prière que – selon la Passio Polychromi (les actes du martyre de Laurent) -, le saint diacre voulut réciter pour la ville de Rome avant de monter sur le gril.
Et la ville, qui lui attribuait la victoire définitive sur le paganisme, le lui rendit en le choisissant comme son troisième patron et en célébrant sa fête dès le IVe siècle, en second, par odre d’importance, après la fête des bienheureux Pierre et Paul et en élevant, en honneur du saint diacre, dans l’antiquité et au moyen-âge, au moins trente quatre églises et chapelles, signe tangible de reconnaissance envers celui qui, fidèle à son ministère, avait été, en son sein, véritable ministre et serviteur de la charité.
A présent, au terme de ces réflexions sur le ministère du diaconat essentiellement envisagé sous sa forme « permanente », nous pouvons dire:
1) il faut savoir considérer avec un esprit critique toutes les perspectives – désormais dépassées, en vérité -, qui, de fait, interprètent et présentent le diaconat comme un ministère qui conduit à la cléricalisation des laïcs et à la laïcisation des clercs, parvenant ainsi à l’affaiblissement de l’identité des uns et des autres.
2) le diacre, qui se distingue des évêques et des prêtres dans la mesure où il n’est pas ordonné « ad sacerdotium, sed ad ministerium », est constitué dans un degré authentique de la hiérarchie et ne peut être compris comme pur accès au sacerdoce.
3) le diacre est habilité au service de la charité en étroite dépendance avec l’Eucharistie et au soin privilégié des pauvres, aussi bien par le service des « cantines » (œuvres de miséricorde corporelles), que par le service de la parole (œuvres de miséricorde spirituelles) en restant ouvert au service d’un amour-charité plus grand, le martyre.
Enfin, l’institution du « diaconat permanent », représente et marque un important enrichissement pour l’Eglise et sa mission, notamment en vue de la nouvelle évangélisation que le Saint-Père rappelle continuellement de ce début du troisième millénaire de l’ère chrétienne; et c’est la beauté, la force et le caractère héroïque de figures de diacres comme saint Laurent qui aident à découvrir et à mieux comprendre la particularité du ministère diaconal.