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LOURDES XVIII JOURNÉE MONDIALE DU MALADE – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

20 octobre, 2015

https://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2010/documents/hf_ben-xvi_hom_20100211_giornata-malato.html

MÉMOIRE DE LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE DE LOURDES XVIII JOURNÉE MONDIALE DU MALADE

HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Vaticane

Jeudi 11 février 2010

Messieurs les cardinaux, vénérés frères dans l’épiscopat, chers frères et sœurs!

Les Evangiles, dans les descriptions synthétiques de la brève, mais intense vie publique de Jésus, attestent qu’il annonce la Parole et accomplit des guérisons de malades, signe par excellence de la proximité du Royaume de Dieu. Matthieu écrit par exemple:  « Il parcourait toute la Galilée, enseignant dans leurs synagogues, proclamant la Bonne Nouvelle du Royaume et guérissant toute maladie et toute langueur parmi le peuple » (Mt 4, 23; cf. 9, 35). L’Eglise, à laquelle est confié le devoir de prolonger dans l’espace et dans le temps la mission du Christ, ne peut manquer d’accomplir ces deux œuvres essentielles:  l’évangélisation et le soin des malades dans le corps et dans l’esprit. En effet, Dieu veut guérir tout l’homme et dans l’Evangile, la guérison du corps est le signe de la guérison plus profonde qu’est la rémission des péchés (cf. Mc 2, 1-12). Il n’est donc pas surprenant que Marie, mère et modèle de l’Eglise, soit invoquée et vénérée comme « Salus infirmorum », « Salut des malades ». En tant que première et parfaite disciple de son Fils, Elle a toujours manifesté, en accompagnant le chemin de l’Eglise, une sollicitude particulière pour les personnes souffrantes. C’est ce dont témoignent les milliers de personnes qui se rendent dans les sanctuaires mariaux pour invoquer la Mère du Christ et qui trouvent en elle force et soulagement. Le récit évangélique de la Visitation (cf. Lc 1, 39-56) nous montre que la Vierge, après l’annonce de l’Ange, ne garda pas pour elle le don reçu, mais partit immédiatement pour aller aider sa cousine âgée Elisabeth, qui portait depuis six mois Jean en son sein. Dans le soutien apporté par Marie à cette parente qui vit, à un âge déjà avancé, une situation délicate comme celle de la grossesse, nous voyons préfigurée toute l’action de l’Eglise en faveur de la vie qui a besoin de soins. Le Conseil pontifical pour la pastorale des services de la santé, institué il y a 25 ans par le vénérable Pape Jean-Paul II, est sans aucun doute une expression privilégiée de cette sollicitude. J’adresse une pensée reconnaissante au cardinal Fiorenzo Angelini, premier président du dicastère et depuis toujours animateur passionné de ce milieu d’activité ecclésiale; ainsi qu’au cardinal Javier Lozano Barragán qui, jusqu’à il y a quelques mois, a poursuivi et développé ce service. J’adresse également à l’actuel président, Mgr Zygmunt Zimowski, qui a repris cet héritage significatif et important, mon salut le plus cordial, que j’étends à tous les membres et au personnel qui, au cours de ce quart de siècle, ont collaboré avec un grand mérite à cette charge du Saint-Siège. Je désire, en outre, saluer les associations et les organismes qui s’occupent de l’organisation de la Journée du malade, en particulier l’unitalsi, et l’Opera Romana Pellegrinaggi. C’est à vous, chers malades, que je souhaite la bienvenue la plus affectueuse! Merci d’être venus et merci surtout pour votre prière, enrichie par le don de vos peines et de vos souffrances. Mon salut s’adresse également aux malades et aux volontaires en liaison avec nous depuis Lourdes, Fatima, Czestochowa et d’autres sanctuaires mariaux, à tous ceux qui nous suivent à travers la radio et la télévision, en particulier des maisons de repos ou de leur propre maison. Que le Seigneur Dieu, qui veille constamment sur ses fils, apporte à tous réconfort et consolation. La Liturgie de la Parole nous présente aujourd’hui deux thèmes principaux:  le premier est à caractère marial et relie l’Evangile et la première lecture, tirée du chapitre final du Livre d’Isaïe, ainsi que le Psaume responsorial, tiré du cantique de louange à Judith. L’autre thème, que nous trouvons dans le passage de la Lettre de Jacques, est celui de la prière de l’Eglise pour les malades et, en particulier, du sacrement qui leur est réservé. Dans la mémoire des apparitions à Lourdes, lieu choisi par Marie pour manifester sa sollicitude maternelle pour les malades, la liturgie fait retentir de façon opportune le Magnificat, le cantique de la Vierge qui exalte les merveilles de Dieu dans l’histoire du salut:  les humbles et les indigents, comme tous ceux qui craignent Dieu, font l’expérience de sa miséricorde, qui renverse les destins terrestres et qui démontre ainsi la sainteté du Créateur et Rédempteur. Le Magnificat n’est pas le cantique de ceux auxquels la fortune sourit qui ont toujours « le vent en poupe »; c’est plutôt l’action de grâce de ceux qui connaissent les drames de la vie, mais qui placent leur confiance dans l’œuvre rédemptrice de Dieu. C’est un chant qui exprime la foi vécue par des générations d’hommes et de femmes, qui ont placé leur espérance en Dieu et qui se sont engagés de manière personnelle, comme Marie, pour venir en aide à leurs frères dans le besoin. Dans le Magnificat, nous entendons la voix de nombreux saints et saintes de la charité, je pense en particulier à ceux qui ont passé leur vie parmi les malades et les personnes souffrantes, comme Camille de Lellis et Jean de Dieu, Damien de Veuster et Benedetto Menni. Ceux qui passent beaucoup de temps aux côtés des personnes souffrantes, connaissent l’angoisse et les larmes, mais également le miracle de la joie, fruit de l’amour. La maternité de l’Eglise est le reflet de l’amour bienveillant de Dieu, dont parle le prophète Isaïe:  « Comme celui que sa mère console, moi aussi, je vous consolerai, à Jérusalem vous serez consolés » (Is 66, 13). Une maternité qui parle sans parole, qui suscite le réconfort dans les cœurs, une joie intime, une joie qui, paradoxalement, coexiste avec la douleur, avec la souffrance. L’Eglise, comme Marie, conserve en elle les drames de l’homme et le réconfort de Dieu, elle les garde ensemble, le long du pèlerinage de l’histoire. A travers les siècles, l’Eglise manifeste les signes de l’amour de Dieu, qui continue à accomplir de grandes choses chez les personnes humbles et simples. La souffrance acceptée et offerte, le partage sincère et gratuit, ne sont-ils pas des miracles de l’amour? Le courage d’affronter le mal désarmés – comme Judith – avec la seule force de la foi et de l’espérance dans le Seigneur, n’est-il pas un miracle que la grâce de Dieu suscite continuellement chez tant de personnes qui consacrent leur temps et leurs énergies à aider ceux qui souffrent? Pour tout cela, nous vivons une joie qui n’oublie pas la souffrance, mais qui la comprend plus encore. De cette façon, les malades et toutes les personnes qui souffrent sont dans l’Eglise non seulement les destinataires d’attentions et de soins, mais avant tout les acteurs du pèlerinage de la foi et de l’espérance, témoins des prodiges de l’amour, de la joie pascale qui jaillit de la Croix et de la Résurrection du Christ. Dans le passage de la Lettre de Jacques, qui vient d’être proclamé, l’Apôtre invite à attendre avec constance la venue désormais proche du Seigneur et, dans ce contexte, adresse une exhortation particulière concernant les malades. Cette proposition est très intéressante, car elle reflète l’action de Jésus, qui, en guérissant les malades, manifestait la proximité du Royaume de Dieu. La maladie est considérée dans la perspective des temps ultimes, avec le réalisme de l’espérance typiquement chrétien. « Quelqu’un parmi vous souffre-t-il? Qu’il prie. Quelqu’un est-il joyeux? Qu’il entonne un cantique » (Jc 5, 13). On a l’impression d’entendre des paroles semblables en écoutant saint Paul, lorsqu’il invite à vivre chaque chose en relation avec la nouveauté radicale du Christ, avec sa mort et sa résurrection (cf. 1 Co 7, 29-31). « Quelqu’un parmi vous est-il malade? Qu’il appelle les prêtres de l’Eglise et qu’ils prient sur lui après l’avoir oint d’huile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient » (Jc 5, 14-15). Le prolongement du Christ dans son Eglise apparaît ici évident:  c’est encore Lui qui agit, à travers les prêtres; c’est son esprit propre qui œuvre à travers le signe sacramentel de l’huile; c’est à Lui que s’adresse la foi, exprimée dans la prière; et, comme cela avait lieu pour les personnes guéries par Jésus, on peut dire à chaque malade:  ta foi, soutenue par la foi des frères et des sœurs, t’a sauvé. Ce texte, qui contient le fondement et la pratique du sacrement de l’Onction des malades, fait ressortir dans le même temps une vision du rôle des malades dans l’Eglise. Un rôle actif pour « provoquer », pour ainsi dire, la prière faite avec foi. « Quelqu’un parmi vous est-il malade? Qu’il appelle les prêtres ». En cette année sacerdotale, il me plaît de souligner le lien entre les malades et les prêtres, une sorte d’alliance, de « complicité » évangélique. Tous deux ont un devoir:  le malade doit « appeler » les prêtres, et ceux-là doivent répondre, pour attirer sur l’expérience de la maladie la présence et l’action du Ressuscité et de son Esprit. Ici, nous pouvons voir toute l’importance de la pastorale des malades, dont la valeur est véritablement incommensurable, en vertu du bien immense qu’elle apporte en premier lieu au malade et au prêtre lui-même, mais également à la famille, aux proches, à la communauté et, à travers des voies inconnues et mystérieuses, à toute l’Eglise et au monde. En effet, lorsque la Parole de Dieu parle de guérison, de salut, de santé du malade, elle conçoit ces concepts de façon intégrale en ne séparant jamais l’âme du corps:  un malade guéri par la prière du Christ, à travers l’Eglise, est une joie sur la terre et au ciel, les prémisses de vie éternelle. Chers amis, comme je l’ai écrit dans l’encyclique « Spe salvi », « la mesure de l’humanité se détermine essentiellement dans son rapport à la souffrance et à celui qui souffre. Cela vaut pour chacun comme pour la société » (n. 38). En instituant un dicastère consacré à la pastorale de la santé, le Saint-Siège a voulu offrir sa contribution également pour promouvoir un monde davantage capable d’accueillir et de soigner les malades comme personnes. En effet, il a voulu les aider à vivre l’expérience de la maladie de façon humaine, non pas en la reniant, mais en lui donnant un sens. Je voudrais conclure ces réflexions par une pensée du vénérable Pape Jean-Paul II, dont il a témoigné par sa propre vie. Dans la Lettre apostolique Salvifici doloris, il a écrit:  « En même temps le Christ a enseigné à l’homme à faire du bien par la souffrance et à faire du bien à celui qui souffre. Sous ce double aspect, il a révélé le sens profond de la souffrance » (n. 30). Que la Vierge Marie nous aide à vivre pleinement cette mission.

 

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LA XXIIIe JOURNÉE MONDIALE DU MALADE 2015

9 février, 2015

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/messages/sick/documents/papa-francesco_20141203_giornata-malato.html

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LA XXIIIe JOURNÉE MONDIALE DU MALADE 2015

Sapientia cordis
“J’étais les yeux de l’aveugle, les pieds du boiteux” (Jb 29,15)

Chers frères et sœurs,
À l’occasion de la XXIIIème Journée mondiale du Malade, instaurée par saint Jean-Paul II, je m’adresse à vous tous qui supportez le fardeau de la maladie et êtes unis, de diverses manières, à la chair du Christ souffrant, et à vous également, professionnels et bénévoles de la santé.
Le thème de cette année nous invite à réfléchir sur une phrase du Livre de Job : « J’étais les yeux de l’aveugle, les pieds du boiteux » (29,15). Je voudrais le faire dans la perspective de la « sapientia cordis », la sagesse du cœur.
1. Cette sagesse n’est pas une connaissance théorique, abstraite, fruit de raisonnements. Elle est plutôt, comme le décrit saint Jacques dans son épître, « pure, puis pacifique, indulgente, bienveillante, pleine de pitié et de bons fruits, sans partialité, sans hypocrisie » (3,17). Elle est donc un comportement inspiré par l’Esprit Saint dans l’esprit et le cœur de celui qui sait s’ouvrir à la souffrance des frères et reconnaît en eux l’image de Dieu. Faisons donc nôtre l’invocation du psaume : « Fais-nous savoir comment compter nos jours, que nous venions de cœur à la sagesse ! » (Ps 90,12). Dans cette sapientia cordis, qui est don de Dieu, nous pouvons résumer les fruits de la Journée mondiale du Malade.
2. La sagesse du cœur veut dire servir le frère. Dans le discours de Job qui contient les paroles « j’étais les yeux de l’aveugle, les pieds du boiteux », est mise en évidence la dimension du service à ceux qui en ont besoin, de la part de l’homme juste qui jouit d’une certaine autorité et a une place importante parmi les anciens de la ville. Sa stature morale se manifeste dans le service du pauvre qui demande de l’aide, et également en prenant soin de l’orphelin et de la veuve (v. 12-13).
Que de chrétiens rendent témoignage aujourd’hui encore, non par leurs paroles mais par leur vie enracinée dans une foi authentique, d’être « les yeux de l’aveugle » et les « pieds du boiteux » ! Des personnes qui sont proches des malades ayant besoin d’une assistance permanente, d’une aide pour se laver, s’habiller, se nourrir. Ce service, surtout lorsqu’il se prolonge dans le temps, peut devenir fatigant et pénible. Il est relativement facile de servir pendant quelques jours, mais il est difficile de soigner une personne pendant des mois, voire des années, également si celle-ci n’est plus à même de remercier. Et pourtant, voilà un grand chemin de sanctification ! Dans ces moments, on peut compter de manière particulière sur la proximité du Seigneur, et on est également un soutien spécial à la mission de l’Église.
3. La sagesse du cœur, c’est être avec le frère. Le temps passé à côté du malade est un temps sacré. C’est une louange à Dieu, qui nous conforme à l’image de son Fils, qui « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour une multitude » (Mt 20,28). Jésus lui-même a dit : « Et moi je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Lc 22,27).
Avec une foi vive, nous demandons à l’Esprit Saint de nous donner la grâce de comprendre la valeur de l’accompagnement, si souvent silencieux, qui nous conduit à consacrer du temps à ces sœurs et à ces frères qui, grâce à notre proximité et à notre affection, se sentent davantage aimés et réconfortés. En revanche, quel grand mensonge se dissimule derrière certaines expressions qui insistent tellement sur la « qualité de la vie », pour inciter à croire que les vies gravement atteintes par la maladie ne seraient pas dignes d’être vécues !
4. La sagesse du cœur, c’est la sortie de soi vers le frère. Notre monde oublie parfois la valeur spéciale du temps passé auprès du lit d’un malade, parce qu’on est harcelé par la hâte, par la frénésie de l’action, de la production et on oublie la dimension de la gratuité, de l’acte de prendre soin, de se charger de l’autre. En réalité, derrière cette attitude se dissimule souvent une foi tiède, oublieuse de cette parole du Seigneur qui déclare : « C’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,40).
Voilà pourquoi je voudrais rappeler à nouveau « la priorité absolue de “la sortie de soi vers le frère” comme un des deux commandements principaux qui fondent toute norme morale et comme le signe le plus clair pour faire le discernement sur un chemin de croissance spirituelle en réponse au don absolument gratuit de Dieu » (Exhortation apostolique Evangelii gaudium, n. 179). De la nature missionnaire même de l’Église jaillissent « la charité effective pour le prochain, la compassion qui comprend, assiste et encourage » (idem).
5. La sagesse du cœur c’est être solidaire avec le frère sans le juger. La charité a besoin de temps. Du temps pour soigner les malades et du temps pour les visiter. Du temps pour être auprès d’eux comme le firent les amis de Job : « Puis, s’asseyant à terre près de lui, ils restèrent ainsi durant sept jours et sept nuits. Aucun ne lui adressa la parole, au spectacle d’une si grande douleur » (Jb 2,13). Mais les amis de Job cachaient au fond d’eux-mêmes un jugement négatif à son sujet : ils pensaient que son malheur était la punition de Dieu pour une de ses fautes. Au contraire, la véritable charité est un partage qui ne juge pas, qui ne prétend pas convertir l’autre ; elle est libérée de cette fausse humilité qui, au fond, recherche l’approbation et se complaît dans le bien accompli.
L’expérience de Job trouve sa réponse authentique uniquement dans la croix de Jésus, acte suprême de solidarité de Dieu avec nous, totalement gratuit, totalement miséricordieux. Et cette réponse d’amour au drame de la souffrance humaine, spécialement de la souffrance innocente, demeure imprimée pour toujours dans le corps du Christ ressuscité, dans ses plaies glorieuses, qui sont un scandale pour la foi mais sont également preuve de la foi (cf. Homélie pour la canonisation de Jean XXIII et de Jean-Paul II, 27 avril 2014).
De même, lorsque la maladie, la solitude et l’incapacité l’emportent sur notre vie de don, l’expérience de la souffrance peut devenir un lieu privilégié de la transmission de la grâce et une source pour acquérir et renforcer la sapientia cordis. Donc, on peut comprendre que Job, à la fin de son expérience, en s’adressant à Dieu, peut déclarer : « Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu » (42,5). Et les personnes plongées dans le mystère de la souffrance et de la douleur, accueilli dans la foi, peuvent également devenir des témoins vivant d’une foi qui permet d’habiter la souffrance elle-même, bien que l’homme, par son intelligence, ne soit pas capable de la comprendre en profondeur.
6. Je confie cette Journée mondiale du Malade à la protection maternelle de Marie, qui a accueilli dans son sein et a donné naissance à la Sagesse incarnée, Jésus-Christ, notre Seigneur.
Ô Marie, Siège de la Sagesse, intercède comme notre Mère pour tous les malades et pour ceux qui en prennent soin. Fais que, dans le service du prochain qui souffre et à travers l’expérience même de la souffrance, nous puissions accueillir et faire croître en nous la véritable sagesse du cœur.

J’accompagne cette invocation pour vous tous de ma bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 3 Décembre 2014

Memorial de Saint François Xavier

FRANCISCUS

« ETRE UN BON SAMARITAIN POUR L’AUTRE », PAR BENOÎT XVI – XXIème Journée mondiale du malade

8 janvier, 2013

http://www.zenit.org/article-33040?l=french

« ETRE UN BON SAMARITAIN POUR L’AUTRE », PAR BENOÎT XVI

XXIème Journée mondiale du malade

ROME, Tuesday 8 January 2013 (Zenit.org).
« L’Année de la foi que nous sommes en train de vivre constitue une occasion propice pour intensifier la diaconie de la charité dans nos communautés ecclésiales, pour être chacun un bon samaritain pour l’autre, pour celui qui se tient à côté de nous », écrit Benoît XVI.
Dans son message pour la XXIème Journée mondiale du Malade, le pape propose en effet de méditer sur « la figure emblématique du Bon Samaritain (cf. Lc 10,25-37) », qui à la fois exprime « l’amour profond de Dieu envers chaque être humain, spécialement lorsqu’il se trouve dans la maladie et la souffrance », mais aussi indique « quelle est l’attitude que doit avoir chacun de ses disciples envers les autres, particulièrement s’ils ont besoin de soins ».
La Journée mondiale du Malade 2013 sera célébrée au Sanctuaire marial d’Altötting, en Bavière. Mgr Zygmunt Zimowski, président du Conseil pontifical pour la santé sera l’envoyé de Benoît XVI (cf. Zenit du 7 décembre 2012).

Message de Benoît XVI

« Va, et toi aussi, fais de même » (Lc 10, 37)

Chers frères et sœurs !
1. Le 11 février 2013, mémoire liturgique de Notre-Dame de Lourdes, on célébrera de façon solennelle au Sanctuaire marial d’Altötting la XXIème Journée mondiale du Malade. Cette journée est pour les malades, pour les personnels de santé, pour les fidèles chrétiens et pour toutes les personnes de bonne volonté « un temps fort de prière, de partage, d’offrande de la souffrance pour le bien de l’Église et un appel à tous à reconnaître dans les traits du frère malade la Sainte Face du Christ qui, par sa souffrance, sa mort et sa résurrection a opéré le salut de l’humanité » (Jean-Paul II, Lettre de création de la Journée mondiale du malade, 13 mai 1992, n. 3). En cette circonstance, je me sens particulièrement proche de chacun de vous, chers malades qui, dans les lieux d’assistance et de soins ou aussi à la maison, vivez un moment difficile d’épreuve à cause de l’infirmité et de la souffrance. Qu’à tous, parviennent les paroles rassurantes des Pères du Concile œcuménique Vatican II : «  Vous n’êtes ni abandonnés ni inutiles : vous êtes les appelés du Christ, sa transparente image » (Message aux pauvres, aux malades, à tous ceux qui souffrent).
2. Pour vous accompagner dans le pèlerinage spirituel qui de Lourdes, lieu et symbole d’espérance et de grâce, nous conduit au Sanctuaire d’Altötting, je voudrais proposer à votre réflexion la figure emblématique du Bon Samaritain (cf. Lc 10,25-37). La parabole évangélique narrée par saint Luc s’insère dans une série d’images et de récits sur la vie quotidienne, avec lesquels Jésus veut faire comprendre l’amour profond de Dieu envers chaque être humain, spécialement lorsqu’il se trouve dans la maladie et la souffrance. Mais, en même temps, avec les paroles qui concluent la parabole du Bon Samaritain, « Va, et toi aussi fais de même » (Lc 10, 37), le Seigneur indique quelle est l’attitude que doit avoir chacun de ses disciples envers les autres, particulièrement s’ils ont besoin de soins. Il s’agit donc de puiser dans l’amour infini de Dieu, à travers une relation intense avec lui dans la prière, la force de vivre quotidiennement une attention concrète, comme le Bon Samaritain, envers celui qui est blessé dans son corps et dans son esprit, celui qui demande de l’aide, même s’il est inconnu et privé de ressources. Cela vaut non seulement pour les agents de la pastorale et de la santé, mais pour tous, également pour le malade lui-même, qui peut vivre la condition qui est la sienne dans une perspective de foi : « Ce n’est pas le fait d’esquiver la souffrance, de fuir devant la douleur, qui guérit l’homme, mais la capacité d’accepter les tribulations et de mûrir par elles, d’y trouver un sens par l’union au Christ, qui a souffert avec un amour infini » (Enc. Spe salvi, 37).
3. Plusieurs Pères de l’Église ont vu dans la figure du Bon Samaritain Jésus lui-même, et dans l’homme tombé aux mains des brigands Adam, l’Humanité égarée et blessée par son péché (cf. Origène, Homélie sur l’évangile de Luc XXXIV, 1-9 ; Ambroise, Commentaire sur l’évangile de saint Luc, 71-84 ; Augustin, Discours 171). Jésus est le Fils de Dieu, Celui qui rend présent l’amour du Père, amour fidèle, éternel, sans barrières ni limites. Mais Jésus est aussi Celui qui « se dépouille  » de son « habit divin », qui s’abaisse de sa « condition » divine, pour prendre la forme humaine (Ph 2, 6-8), et s’approcher de la douleur de l’homme, jusqu’à descendre aux enfers, comme nous le récitons dans le Credo, et porter espérance et lumière. Il ne retient pas jalousement le fait d’être égal à Dieu, d’être Dieu (cf. Ph 2, 6), mais il se penche, plein de miséricorde, sur l’abîme de la souffrance humaine, pour verser l’huile de la consolation et le vin de l’espérance.
4. L’Année de la foi que nous sommes en train de vivre constitue une occasion propice pour intensifier la diaconie de la charité dans nos communautés ecclésiales, pour être chacun un bon samaritain pour l’autre, pour celui qui se tient à côté de nous. Dans ce but, je voudrais rappeler quelques figures, parmi les innombrables dans l’histoire de l’Église, qui ont aidé les personnes malades à valoriser la souffrance sur le plan humain et spirituel, afin qu’elles soient un exemple et un stimulant. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte Face, « experte en scientia amoris » (Jean-Paul II, Lett. ap. Nuovo millenio ineunte, n. 42), sut vivre «  en union profonde avec la Passion de Jésus », la maladie qui la conduira « à la mort à travers de grandes souffrances » (Benoît XVI, Audience générale, 6 avril 2011). Le Vénérable Luigi Novarese, dont beaucoup gardent vivant encore aujourd’hui le souvenir, ressentit de façon particulière dans l’exercice de son ministère l’importance de la prière pour et avec les malades et les personnes souffrantes, qu’il accompagnait souvent dans les sanctuaires mariaux, particulièrement à la grotte de Lourdes. Poussé par la charité envers le prochain, Raoul Follereau a consacré sa vie au soin des personnes atteintes de la maladie de Hansen jusque dans les endroits les plus reculés de la planète, promouvant entre autre la Journée Mondiale contre la Lèpre. La bienheureuse Thérèse de Calcutta commençait toujours sa journée en rencontrant Jésus dans l’Eucharistie, pour sortir ensuite dans les rues avec le Rosaire en main pour rencontrer et servir le Seigneur présent dans ceux qui souffrent, spécialement en ceux qui ne sont « ni voulus, ni aimés, ni soignés ». Sainte Anna Schäffer de Mindelstetten sut, elle aussi, unir de façon exemplaire ses souffrances à celles du Christ : « la chambre de malade se transforma en cellule conventuelle et la souffrance en service missionnaire… Fortifiée par la communion quotidienne, elle devint un intercesseur infatigable par la prière, et un miroir de l’amour de Dieu pour les nombreuses personnes en recherche de conseil » (Homélie pour la canonisation, 21 octobre 2012). Dans l’Évangile, émerge la figure de la bienheureuse Vierge Marie, qui suit son Fils souffrant jusqu’au sacrifice suprême sur le Golgotha. Elle ne perd jamais l’espérance dans la victoire de Dieu sur le mal, sur la souffrance et sur la mort, et elle sait accueillir avec la même tendresse pleine de foi et d’amour le Fils de Dieu né dans la grotte de Bethléem et mort sur la croix. Sa ferme confiance en la puissance divine est illuminée par la Résurrection du Christ, qui donne espérance à celui qui se trouve dans la souffrance et renouvelle la certitude de la proximité et de la consolation du Seigneur.
5. Je voudrais enfin adresser ma vive reconnaissance et mon encouragement aux institutions sanitaires catholiques et à la société civile elle-même, aux diocèses, aux communautés chrétiennes, aux familles religieuses engagées dans la pastorale de la santé, aux associations des personnels de santé et du volontariat. Puisse en tous grandir la conscience que « en accueillant avec amour et générosité toute vie humaine, surtout si elle est faible et malade, l’Église vit aujourd’hui un moment capital de sa mission » (Jean-Paul II, Exh. ap. postsynodale Christifideles laici, n. 38).
Je confie cette XXIème Journée mondiale du Malade à l’intercession de la Vierge Marie, Mère des Grâces vénérée à Altötting, afin qu’elle accompagne toujours l’humanité souffrante, en quête de soulagement et de ferme espérance ; qu’elle aide tous ceux qui sont engagés dans l’apostolat de la miséricorde à devenir des bons samaritains pour leurs frères et sœurs éprouvés par la maladie et par la souffrance. À tous j’accorde de grand cœur la Bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 2 janvier 2013.
BENEDICTUS PP XVI

La souffrance est-elle une Bonne Nouvelle ?

15 février, 2012

http://qe.catholique.org/sacrement-des-malades/30707-la-souffrance-est-elle-une-bonne-nouvelle

Questions Essentielles

La souffrance est-elle une Bonne Nouvelle ?

« L’Évangile de la souffrance » est une expression du pape Jean-Paul II, employée notamment dans sa lettre apostolique Salvifici doloris sur la valeur salvifique de la souffrance. Signé le 11 février 1984, en la fête de Notre-Dame de Lourdes, devenue dans l’Église « journée mondiale des malades », ce document prenait aussi place dans le cadre du jubilé de la Rédemption (1983-1984), qui commémorait le 1950e anniversaire de la mort et de la résurrection du Seigneur.
L’idée d’un « Évangile de la souffrance », choquante à première vue, et qui pourtant s’éloigne dans la pensée de Jean-Paul II de toute tentation doloriste, s’explique par l’idée que « la joie vient de la découverte du sens de la souffrance », une découverte qui est une plongée dans le mystère du Christ qui rejoint dans la souffrance le mystère de l’homme.

L’expérience humaine de la souffrance.
Jean-Paul II relève d’abord que l’expérience humaine, fondamentalement, est celle de la souffrance, ce que constate également Benoît XVI, et avec eux tout homme raisonnable :
« La souffrance semble être, et elle est, quasi inséparable de l’existence terrestre de l’homme. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris) « Nous devons tout faire pour surmonter la souffrance, mais l’éliminer complètement du monde n’est pas dans nos possibilités. » (Benoît XVI, Spe salvi)
Mais en même temps qu’elle renvoie l’homme à sa finitude, la souffrance « manifeste à sa manière la profondeur propre à l’homme », elle « semble appartenir à la transcendance de l’homme » :
« Seul l’homme, en souffrant, sait qu’il souffre et se demande pour quelle raison. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris) Cette question de la souffrance, l’homme se la pose bien sûr à lui-même, mais c’est aussi dans ces occasions qu’il se tourne le plus volontiers vers une transcendance : même si c’est parfois pour l’accuser, il a tendance à se tourner vers Dieu.

La souffrance, le péché et le mystère du mal
Un des éléments fondamentaux de la foi chrétienne, c’est qu’il n’est pas vrai que la souffrance a automatiquement une valeur morale individuelle, même si bien évidemment certaines conduites à risque (l’alcool par exemple) provoquent des souffrances prévisibles :
« S’il est vrai que la souffrance a un sens comme punition lorsqu’elle est liée à une faute, il n’est pas vrai, au contraire, que toute souffrance soit une conséquence de la faute et ait un caractère de punition. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris) Pour autant, la souffrance demeure liée au mal, à travers le mystère du péché originel, qui n’a pas été voulu par Dieu mais qui touche tous les hommes. À Adam et Ève, Dieu révèle que la peine sera désormais constitutive de leur vie.
« À l’homme, Dieu dit : parce que [...] tu as mangé de l’arbre dont je t’avais interdit de manger, maudit soit le sol à cause de toi ! À force de peines tu en tireras subsistance tous les jours de ta vie. » (Ge, III, 18)
Le récit de la Genèse révèle que ce n’est pas Dieu qui est la cause du mal dans le monde ; bien au contraire, le mal est l’absence du Bien, sa limitation ou son altération, un Bien dont l’être humain, cependant, garde conscience :
« Le christianisme proclame que l’existence est fondamentalement un bien, que ce qui existe est bon ; il professe la bonté du Créateur et proclame que les créatures sont bonnes. [...] L’homme souffre, pourrait-on dire, en raison d’un bien auquel il ne participe pas, dont il est, en un sens, dépossédé, ou dont il s’est privé lui-même. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)
Aussi, sur le plan individuel, le mystère de la souffrance dépasse l’entendement de l’homme.
C’est le cas dans l’exemple de Job, que Satan obtient de mettre à l’épreuve en le privant de tout. Ses amis cherchent à tout prix une explication ; si Job souffre, c’est qu’il a dû commettre une faute. Finalement, Dieu intervient pour confondre leurs discours ; il affirme la justice de sa Sagesse. Jean-Paul II commente ainsi ce livre de la Bible : « Sa souffrance doit être acceptée comme un mystère que l’intelligence de l’homme n’est pas en mesure de pénétrer à fond. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)
Jésus lui aussi dans l’Évangile associe la souffrance à la sagesse du dessein de Dieu qui au sein du mal fait éclater le bien, comme dans le cas de l’aveugle-né :
« “Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ?” Jésus répondit : “Ni lui ni ses parents n’ont péché, mais c’est afin que soient manifestées en lui les œuvres de Dieu.” » (Jn, IX, 2-3)

Souffrances des hommes, Passion du Christ
Cependant, l’Évangile va plus loin que la simple constatation du mystère du mal et de la souffrance. Il jette sur lui une lumière nouvelle. Dans le Christ innocent, toute la souffrance humaine est en effet assumée, conformément à la prophétie faite par Isaïe du Serviteur souffrant :
« C’est à cause de nos fautes qu’Il a été transpercé, c’est par nos péchés qu’il a été broyé. Le châtiment qui nous obtient la paix est tombé sur lui, et c’est par ses blessures que nous sommes guéris. » (Is, LIII, 5)
Le Christ n’a pas seulement partagé les souffrances physiques des hommes, il a aussi éprouvé l’abîme de la souffrance morale et de la détresse, aux limites du désespoir :
« “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?” » (Ps XXII, 2 & Mt, XXVII, 46)
Aussi cette oblation souffrante du Christ est-elle la plus grande preuve de l’amour de Dieu :
« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Jn, XV, 13)
« L’homme a pour Dieu une valeur si grande que Lui-même s’est fait homme pour pouvoir compatir avec l’homme de manière très réelle, dans la chair et dans le sang, comme cela nous est montré dans le récit de la Passion de Jésus. » (Benoît XVI, Spe salvi)
C’est cela que Jean-Paul II appelle l’« l’Évangile de la souffrance ». La souffrance n’est plus synonyme d’absurdité ; elle devient le lieu où Dieu a aimé l’homme :
« La souffrance humaine a atteint son sommet dans la Passion du Christ. Et, simultanément, elle a revêtu une dimension complètement nouvelle et est entrée dans un ordre nouveau : elle a été liée à l’amour. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)

La valeur salvifique de la souffrance
C’est par la croix que Dieu a voulu sauver le monde. Certes, ce n’est pas tant la souffrance du Christ qui sauve les hommes que son obéissance totale, mais cette obéissance est vécue « jusqu’à la mort sur une croix » (Ph, II, 8) :
« Il vous a réconciliés dans son corps de chair, le livrant à la mort, pour vous faire paraître devant Lui saints, sans tache et sans reproche. » (Col, I, 22)
« En opérant la Rédemption par la souffrance, le Christ a élevé en même temps la souffrance humaine jusqu’à lui donner valeur de Rédemption. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)
Ainsi, tout homme a la possibilité de faire participer sa souffrance à celle du Christ. C’est le mystère qu’exprime saint Paul :
« Je complète en ma chair ce qui manque aux souffrances du Christ pour son Corps, qui est l’Église. » (Col, I, 24)
« La souffrance du Christ a créé le bien de la Rédemption du monde. [...] Aucun homme ne peut lui ajouter quoi que ce soit. Mais en même temps, dans le mystère de l’Église qui est son corps, le Christ, en un sens, a ouvert sa souffrance rédemptrice à toute souffrance de l’homme. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)
Aussi, tout malade qui s’unit volontairement au Christ acquiert-il une valeur unique, là où une logique purement matérielle ne voit en lui qu’un poids inutile :
« Comme le Christ, celui qui souffre devient utile au salut de ses frères et sœurs, car il participe du sacrifice du Christ. » (Jean-Paul II, Salvifici doloris)
C’est cette dimension-là qui est mise en valeur par l’Onction des malades.

XXE JOURNÉE MONDIALE DU MALADE : MESSAGE DE BENOÎT XVI

27 janvier, 2012

http://www.zenit.org/article-29987?l=french

XXE JOURNÉE MONDIALE DU MALADE : MESSAGE DE BENOÎT XVI

L’onction des malades, sacrement de la guérison

ROME, jeudi 26 janvier 2012 (ZENIT.org) – « Ce sacrement mérite aujourd’hui une plus grande considération, aussi bien dans la réflexion théologique que dans l’action pastorale auprès des malades », écrit Benoît XVI à propos de l’onction des malades, dans son Message pour la XXe Journée mondiale du Malade qui aura lieu le 11 février 2012. Ce message a pour thème la parole du Christ au malade guéri de la lèpre : « Relève-toi, va ; ta foi t’a sauvé » (Lc 17,19).
Benoît XVI a en effet consacré son message aux « sacrements de la guérison », le sacrement de la pénitence et de la réconciliation, l’onction des malades, et l’eucharistie. Le pape évoque aussi le lien entre la Journée mondiale du Malade et l’Année de la foi.

MESSAGE DU PAPE BENOÎT XVI
À L’OCCASION DE LA XXe JOURNÉE MONDIALE DU MALADE
(11 FÉVRIER 2012)

« Relève-toi, va ; ta foi t’a sauvé » (Lc 17,19)

Chers frères et sœurs,

À l’occasion de la Journée Mondiale du Malade, que nous célébrerons le 11 février 2012 prochain, mémoire de Notre-Dame de Lourdes, je souhaite renouveler ma proximité spirituelle à tous les malades qui se trouvent dans des lieux de soins ou sont pris en charge par leurs familles, exprimant à chacun la sollicitude et l’affection de toute l’Église. Dans l’accueil généreux et aimant de chaque vie humaine et en particulier de celle qui est faible et malade, le chrétien exprime un aspect important de son témoignage évangélique, à l’exemple du Christ qui s’est penché sur les souffrances matérielles et spirituelles de l’homme pour le guérir.
1. En cette année qui constitue la préparation immédiate à la Journée Mondiale solennelle du Malade qui sera célébrée en Allemagne le 11 février 2013, et qui s’appuiera sur la figure évangélique emblématique du Bon Samaritain, (cf. Lc 10, 29-37), je voudrais mettre l’accent sur les « sacrements de guérison », c’est-à-dire sur le sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation et sur l’Onction des malades, qui trouvent leur accomplissement naturel dans la communion eucharistique.
La rencontre de Jésus avec les dix lépreux, racontée dans l’évangile de saint Luc (cf. Lc 17, 11-19), et en particulier les paroles que le Seigneur adresse à l’un d’entre eux : « Relève-toi, va ; ta foi t’a sauvé ! » (v. 19), aident à prendre conscience de l’importance de la foi pour ceux qui, marqués par la souffrance et la maladie, s’approchent du Seigneur. Dans leur rencontre avec Lui, ils peuvent réellement faire l’expérience que celui qui croit n’est jamais seul ! En effet, Dieu, dans son Fils ne nous abandonne pas à nos angoisses et à nos souffrances, mais Il nous est proche, Il nous aide à les porter et Il désire nous guérir au plus profond de notre cœur (cf. Mc 2, 1-12).
La foi de l’unique lépreux qui – se voyant guéri, plein de surprise et de joie – revient immédiatement à Jésus, à la différence des autres, pour manifester sa reconnaissance, nous permet de percevoir que la santé recouvrée est le signe de quelque chose de plus précieux que la simple guérison physique ; elle est le signe du salut que Dieu nous donne dans le Christ. Ceci s’exprime dans les paroles de Jésus : ta foi t’a sauvé. Celui qui invoque le Seigneur dans la souffrance et la maladie est sûr que Son amour ne l’abandonne jamais, et que l’amour de l’Église, qui prolonge dans le temps Son œuvre de Salut, ne lui manquera jamais. La guérison physique, expression d’un salut plus profond, révèle ainsi l’importance que l’homme a aux yeux du Seigneur, dans la totalité de son âme et de son corps. Du reste, chaque sacrement exprime et réalise la proximité de Dieu lui-même, qui, d’une façon absolument gratuite, « nous touche au moyen des réalités matérielles…, en en faisant des instruments de la rencontre entre nous et Lui-même » (Homélie, Messe chrismale, 1er avril 2010). « L’unité entre création et rédemption est ainsi rendue visible. Les sacrements sont l’expression du caractère corporel de notre foi, qui embrasse la personne tout entière dans son corps et dans son âme » (Homélie, Messe chrismale, 21 avril 2011).
La tâche principale de l’Église est certainement l’annonce du Royaume de Dieu, « mais cette annonce doit elle-même constituer un processus de guérison « …panser les cœurs meurtris » (Is 61,1) » (ibid), selon la charge que Jésus a confiée à ses disciples (cf. Lc 9, 1-2 ; Mt 10, 1.5-14 ; Mc 6, 7-13). Le lien entre la santé physique et la guérison des blessures de l’âme nous aide donc à mieux comprendre « les sacrements de guérison ».
2. Le sacrement de la Pénitence a souvent été au centre de la réflexion des Pasteurs de l’Église, en particulier du fait de sa grande importance sur le chemin de la vie chrétienne, puisque « toute l’efficacité de la Pénitence consiste à nous rétablir dans la grâce de Dieu et à nous unir à Lui dans une souveraine amitié » (Catéchisme de l’Église Catholique, n°1468). L’Église, en continuant de proclamer le message de pardon et de réconciliation de Jésus, ne cesse jamais d’inviter l’humanité tout entière à se convertir et à croire à l’Évangile. Elle fait sien l’appel de l’apôtre Paul : « Nous sommes donc en ambassade pour le Christ ; c’est comme si Dieu exhortait par nous. Nous vous en supplions au nom du Christ : laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20). Durant sa vie, Jésus annonce et rend présente la miséricorde du Père. Il est venu non pour condamner mais pour pardonner et sauver, pour donner de l’espérance même dans les ténèbres les plus profondes de la souffrance et du péché, pour donner la vie éternelle ; ainsi dans le sacrement de la Pénitence, dans « le remède de la confession », l’expérience du péché ne dégénère pas en désespoir mais rencontre l’Amour qui pardonne et transforme (cf. Jean-Paul II, Exhortation apostolique postsynodale Reconciliatio et Paenitentia, n°31).
Dieu, « riche en miséricorde » (Ep 2,4), comme le père de la parabole évangélique (cf. Lc 15, 11-32) ne ferme son cœur à aucun de ses fils, mais Il les attend, les recherche, les rejoint là où le refus de la communion emprisonne dans l’isolement et la division, Il les appelle à se rassembler autour de sa table, dans la joie de la fête du pardon et de la réconciliation. Le temps de la souffrance, dans lequel pourrait surgir la tentation de s’abandonner au découragement et au désespoir, peut alors se transformer en temps de grâce pour rentrer en soi-même, et comme le fils prodigue de la parabole, pour réfléchir à sa vie, en y reconnaissant des erreurs et des échecs, pour éprouver la nostalgie de l’étreinte du Père, et reprendre le chemin vers sa maison. Lui, dans son grand amour, veille toujours et partout sur nos vies et nous attend pour offrir à chacun des enfants qui reviennent à Lui le don de la pleine réconciliation et de la joie.
3. La lecture des Évangiles fait clairement apparaître que Jésus a toujours manifesté une attention particulière aux malades. Il n’a pas seulement envoyé ses disciples soigner leurs blessures (cf. Mt 10,8 ; Lc 9,2 ; 10,9), mais il a aussi institué pour eux un sacrement spécifique : l’Onction des malades. La lettre de Jacques atteste la présence de ce geste sacramentel dès la première communauté chrétienne (cf. 5, 14-16) : dans l’Onction des malades, accompagnée de la prière des Anciens, l’Église tout entière confie les malades au Seigneur souffrant et glorifié pour qu’Il allège leurs peines et les sauve ; plus encore, elle les exhorte à s’unir spirituellement à la passion et à la mort du Christ, afin de contribuer ainsi au bien du Peuple de Dieu.
Ce sacrement nous amène à contempler le double mystère du Mont-des-Oliviers, où Jésus s’est trouvé dramatiquement confronté à la voie que lui indiquait le Père, celle de la Passion, de l’acte suprême d’amour, et l’a accueillie. Dans cette heure d’épreuve, Il est le médiateur, « en portant en lui-même, assumant en lui la souffrance et la passion du monde, la transformant en cri vers Dieu, la portant devant les yeux et entre les mains de Dieu, et la portant ainsi réellement au moment de la Rédemption » (Lectio Divina, Rencontre avec le clergé de Rome, 18 février 2010). Mais « le Jardin des Oliviers est aussi le lieu d’où Il est monté vers le Père ; c’est donc le lieu de la Rédemption… Ce double mystère du Mont-des-Oliviers est aussi sans cesse « actif » dans l’huile sacramentelle de l’Église… signe de la bonté de Dieu qui nous rejoint » (Homélie, Messe Chrismale, 1er avril 2010). Dans l’Onction des malades, la matière sacramentelle de l’huile nous est offerte, pourrait-on dire, « comme un remède de Dieu… qui à ce moment nous assure de sa bonté, nous offre force et consolation, mais qui, en même temps, au-delà du temps de la maladie, nous renvoie à la guérison définitive, à la résurrection (cf Jc 5,14) » (ibid).
Ce sacrement mérite aujourd’hui une plus grande considération, aussi bien dans la réflexion théologique que dans l’action pastorale auprès des malades. Puisque l’Onction des Malades valorise le contenu des prières liturgiques adaptées aux diverses situations humaines liées à la maladie, et pas seulement à la fin de la vie, elle ne doit pas être considérée comme un « sacrement mineur » par rapport aux autres. L’attention – et le soin pastoral – des malades si elle est, d’une part, le signe de la tendresse de Dieu pour celui qui souffre, constitue également, d’autre part, un bien spirituel pour les prêtres et la communauté chrétienne tout entière, prenant conscience que ce qui est fait au plus petit est fait à Jésus lui-même (cf Mt 25,40).
4. À propos des « sacrements de guérison », saint Augustin affirme : « Dieu guérit toutes tes maladies. N’aie donc pas peur : toutes tes maladies seront guéries… tu dois seulement Lui permettre de te soigner et tu ne dois pas repousser ses mains » (Exposé sur le Psaume 102, 5 : PL 36, 1319-1320). Il s’agit d’instruments précieux de la grâce de Dieu qui aident le malade à se conformer toujours plus pleinement au mystère de la mort et de la résurrection du Christ. En soulignant l’importance de ces deux sacrements, je voudrais insister aussi sur l’importance de l’Eucharistie. Reçue dans un temps de maladie, elle contribue de manière singulière à une telle transformation, en associant la personne qui se nourrit du Corps et du Sang de Jésus à l’offrande qu’Il a faite de Lui-même au Père pour le salut de tous. La communauté ecclésiale tout entière, et les communautés paroissiales en particulier doivent s’efforcer de garantir l’accès fréquent à la communion sacramentelle à ceux qui, pour raison de santé ou d’âge, ne peuvent se rendre dans un lieu de culte. Ces frères et sœurs ont ainsi la possibilité de renforcer leur relation avec le Christ crucifié et ressuscité, en participant à la mission même de l’Église, à travers leur vie offerte par amour pour le Christ. Dans cette perspective, il importe que les prêtres qui prêtent leur service dans les hôpitaux, dans les maisons de soins et chez les personnes malades, s’estiment de vrais « ministres des malades », signe et instrument de la compassion du Christ qui entend rejoindre toute personne marquée par la souffrance » (Message pour la XVIIIe Journée Mondiale du Malade, 22 novembre 2009).
La conformation au Mystère Pascal du Christ, qui se réalise également par la pratique de la Communion spirituelle, prend une signification toute particulière lorsque l’Eucharistie est administrée et reçue comme viatique. À un tel moment de la vie, la parole du Seigneur est encore plus parlante : « Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle et je le ressusciterai au dernier jour » (Jn 6,54). De fait l’Eucharistie, surtout en tant que viatique, est – selon la définition de saint Ignace d’Antioche – « remède d’immortalité, antidote contre la mort » (Lettre aux Éphésiens, 20 : PG 5, 661), sacrement du passage de la mort à la vie, de ce monde au Père qui les attend tous dans la Jérusalem céleste.
5. Le thème de ce message pour la XXe Journée Mondiale du Malade, « Relève-toi, va ; ta foi t’a sauvé ! » oriente aussi vers la prochaine « Année de la Foi » qui commencera le 11 octobre 2012, et constituera une occasion propice et précieuse pour redécouvrir la force et la beauté de la foi, pour en approfondir les contenus et pour en témoigner dans la vie de tous les jours (cf. Lettre Apostolique Porta fidei, 11 octobre 2011). Je désire encourager les malades et les souffrants à trouver toujours un ancrage sûr dans la foi, en l’alimentant dans l’écoute de la Parole de Dieu, la prière personnelle et les Sacrements, et j’invite en même temps les pasteurs à être toujours plus disponibles pour les célébrer à l’intention des malades. À l’exemple du Bon Pasteur et comme guides du troupeau qui leur est confié, que les prêtres soient pleins de joie, attentifs aux plus faibles, aux simples, aux pécheurs, manifestant l’infinie miséricorde de Dieu par les paroles rassurantes de l’espérance (cf. saint Augustin, Lettre 95, 1 : PL 33, 351-352).
À tous ceux qui travaillent dans le monde de la santé, comme aussi aux familles qui voient dans leurs proches le visage souffrant du Seigneur Jésus, je renouvelle mes remerciements et ceux de l’Église parce que par leur compétence professionnelle et dans le silence, souvent sans même mentionner le nom du Christ, ils Le manifestent concrètement (cf. Homélie, Messe Chrismale, 21 avril 2011).
Vers Marie, Mère de miséricorde et Santé des malades, nous élevons notre regard confiant et notre prière. Puisse sa maternelle compassion, vécue à côté de son Fils mourant sur la Croix, accompagner et soutenir la foi et l’espérance de chaque personne malade et souffrante sur son chemin de guérison des blessures du corps et de l’esprit.
Je vous assure tous de mon souvenir dans la prière et j’adresse à chacun de vous une particulière Bénédiction apostolique.
Du Vatican, le 20 novembre 2011, en la Solennité de Notre Seigneur Jésus-Christ, Roi de l’Univers.

BENOÎT PP XVI

XII JOURNÉE MONDIALE DU MALADE – HOMÉLIE DU CARDINAL JAVIER LOZANO BARRAGÁN

9 décembre, 2011

du site:

http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/hlthwork/documents/rc_pc_hlthwork_doc_20040211_barragan-lourdes_fr.html
 
XII JOURNÉE MONDIALE DU MALADE

HOMÉLIE DU CARDINAL JAVIER LOZANO BARRAGÁN

Basilique Saint-Pie X, Lourdes

Mercredi, 11 février 2004

Les utopies représentent un danger:  bien qu’elles soient les signes de désirs ardents du coeur, elles restent dans le domaine de l’imagination et nous tiennent à l’écart de la réalité. Mais elles remplissent quand même un rôle de stimulateur pour progresser car, à leur manière, elles reflètent l’axe téléologique de chaque culture. Lorsque l’utopie la plus merveilleuse devient une surprenante réalité, cette « utopie » (« ou topoV ») devient « topie », (« topoV »), vie, réalité nue; elle constitue effectivement l’axe culturel authentique, seule à être digne de ce nom, vraie théologie culturelle universelle.
Cela se réalise avec la mort et la résurrection du Christ:  la culture est la vie, l’anticulture est la mort; l’unique finalité de la culture est la vie; lorsque la vie se heurte à la peur quotidienne de la mort, la véritable culture consistera à trouver l’antidote de la mort. L’homme de tous les temps et de tous les lieux a toujours cherché ce remède, mais, de nos jours, fatigué d’une recherche qui lui a semblé inutile, il se réfugie dans un scepticisme paralysant uni à l’épicurisme concomitant d’une globalisation économique prédominante, celui du « buvons et mangeons, car demain nous mourrons ». Enivré par le progrès technologique, il réagit fortement contre tout ce qui l’inviterait à lever son visage, à dépasser le quotidien et à regarder l’horizon authentique de la vie dans l’approfondissement historique du Dieu fait homme qui, à son profit, triomphe de la mort par sa résurrection. Si l’on accepte cet horizon, alors la culture trouve son vrai sens dans le mystère fécond de nouveautés insatiables, qui place la vertu d’espérance au centre moteur d’une histoire qui avance, selon un plan progressif, vers une nouveauté inattendue.
C’est bien dans ce contexte que nous avons songé à célébrer la douzième Journée mondiale du Malade à Lourdes, en partant du Dogme de l’Immaculée Conception dans son rapport avec la santé, inscrite dans les racines chrétiennes de l’Europe. C’est ainsi que nous envisageons de renouveler la Pastorale de la Santé dans le monde, et en particulier en Europe, grâce à la célébration du cent cinquantième anniversaire de la proclamation de ce dogme.
Dans son message pour cette Journée mondiale du Malade, que nous venons d’entendre, le Pape Jean-Paul II nous dit justement que « l’Immaculée Conception annonce la relation harmonieuse entre le « oui » de Dieu et le « oui » que Marie prononcera… Son « oui », au nom de l’humanité, ouvre à nouveau au monde les portes du Paradis, grâce à l’incarnation du Verbe de Dieu dans son sein, oeuvre de l’Esprit Saint (cf. Lc 1, 35). Le projet originel de la création est ainsi restauré et affermi dans le Christ et, dans ce projet, la Vierge Marie trouve, elle aussi, sa place. Là se trouve la clé de voûte de l’histoire; avec l’Immaculée Conception de Marie a commencé la grande oeuvre de la rédemption, qui s’est achevée dans le sang précieux du Christ. En lui, toute personne est appelée à se réaliser en plénitude jusqu’à la perfection de la sainteté (cf. Col 1, 28). L’Immaculée Conception est donc l’aube prometteuse du jour radieux du Christ qui, par sa mort et sa résurrection, rétablira l’harmonie complète entre Dieu et l’humanité. Si Jésus est la source de la vie qui triomphe de la mort, Marie est la mère attentive qui va au-devant des attentes de ses enfants, leur obtenant la santé de l’âme et du corps. Tel est le message que le sanctuaire de Lourdes propose constamment à ceux qui viennent prier et aux pèlerins. Tel est également le sens des guérisons corporelles et spirituelles que l’on constate à la grotte de Massabielle ». (Message du Saint-Père Jean-Paul II au Président du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé à l’occasion de la Journée mondiale du Malade, nn. 2-3).
La culture chrétienne de l’Europe comporte, parmi ses éléments les plus importants, le désir de comprendre la nature de sa constitution intime et de la transformer pour sa propre utilité; l’aspiration à une vie en commun universelle, basée sur une organisation sociale objective exprimée par des lois appropriées; la reconnaissance et le respect de la création comme un don que Dieu a fait aux hommes; et comme élément clé et théologie unique valable dans toute l’histoire de l’humanité, l’Incarnation du Fils de Dieu et sa mort et résurrection salvifique auxquelles nous nous incorporons pour vaincre le mal et obtenir le salut.
Les deux derniers éléments radicaux se sont profondément inculturés dans les deux premiers, faisant de l’ensemble des quatre la racine profonde de la culture européenne. Mais, en même temps, nous constatons que ceux-ci sont contestés dans la modernité et particulièrement dans la post-modernité. On refuse en particulier le fait central, c’est-à-dire le Christ comme unique salut et comme téléologie décisive de l’histoire et de la culture.
Dans la négation de la transcendance chrétienne, on n’est pas étonné que la santé soit définie comme « un état de bien-être parfait, physique, mental et social, et non seulement comme l’absence de maladie »:  on tombe ainsi dans une pure utopie, étant donné que ce type de santé n’est qu’une illusion.
Dans son message jubilaire pour la Journée mondiale du Malade de l’An 2000, Jean-Paul II eut plutôt recours à une description différente de la santé:  il est d’accord sur le fait qu’elle ne consiste pas seulement en l’absence de maladie, mais il ne la définit pas comme un état de bien-être parfait, mais comme une tension vers une harmonie non seulement physique, morale, mentale et sociale, mais aussi psychique et spirituelle (Message jubilaire pour la Journée mondiale du Malade, novembre 2000, n. 20)
Quand, dans son message d’aujourd’hui, le Pape nous parle de la relation entre le « oui » de Dieu dans le projet originel qu’il formait pour l’homme et le « oui » que Marie prononça, au nom de toute l’humanité, pour devenir la Mère de Dieu, c’est alors que se réalise la plénitude de l’harmonie, troublée dans l’antiquité par le péché du premier homme, et que naît le second Adam, le véritable premier homme en totale harmonie avec Dieu, le Christ Seigneur; Fils de la seconde Eve, la vraie Mère des vivants, Marie, en pleine harmonie avec le Seigneur Dieu dès le premier moment de sa conception:  dès son Immaculée Conception.
Cette harmonie mariale devra être très douloureuse, elle signifiera la passion et la croix dans l’union au Christ:  c’est le glaive de douleur prophétisé par Siméon; ce sera une harmonie souffrante, c’est vrai, mais victorieuse dans la Résurrection et dans l’Ascension du Christ:   cette  victoire  signifiera l’Assomption de Marie.
L’Immaculée Conception a amené Marie jusqu’à la pleine harmonie et à la pleine santé dans l’Assomption à travers le chemin douloureux de la croix. En elle est tracé le modèle chrétien de la véritable santé qui était suspendue à la croix dans la personne de son Fils et qui a fleuri dans la Résurrection. Dès lors, la véritable tension vers l’unique harmonie possible est la croix joyeuse. C’est pour cela que nous pouvons dire que la santé n’est pas seulement l’absence de maladie, mais la croix joyeuse, physique et psychique, sociale et spirituelle, qui est proprement la seule tension acceptable vers la véritable harmonie. Ici la croix se « spiritualise », c’est-à-dire que l’Esprit Saint, par son Amour tout-puissant, fait en sorte que la croix, après avoir été la mort horrible, soit devenue joyeuse et source de vie et de bonheur, véritable harmonie et santé véritable:  « Ubi salus mundi pependit » (là où a été suspendu le salut du monde). Cette joie nous pousse à différer et à rendre présente aujourd’hui la solide espérance de la résurrection parce que l’Amour de l’Esprit exige la guérison comme annonce de la présence, effective désormais, du Royaume de Dieu. C’est là le sens des miracles de guérison que réalise le Christ, et c’est le sens du paradigme chrétien de la santé, le Logo de notre dicastère:  le Bon Samaritain.
Comprendre l’Immaculée Conception comme plénitude d’harmonie serait revenir d’une manière vraiment nouvelle aux racines de la culture européenne. Et ce serait aussi comprendre Lourdes comme le lieu où Dieu, par l’intercession de Notre-Dame, accorde si souvent la guérison en appliquant la rédemption que le Christ nous offre. Ainsi, Lourdes devient un centre privilégié de la Nouvelle Evangélisation de la culture européenne, comme présence actuelle du Royaume de Dieu qui est harmonie, paix et santé, dans la naissance d’une nouvelle communauté de nations qui veut se constituer vigoureuse et pleine, au-delà d’un affaiblissement dû à une réduction des purs intérêts économiques.
Veuille le Seigneur Jésus, par l’intermédiaire de l’Immaculée Conception de Marie Sa Mère, donner une nouvelle vigueur à la culture européenne, accorder ses faveurs à une nouvelle évangélisation qui, partant de la santé rayonnant dans ce sanctuaire de Lourdes, inculture le message évangélique dans les racines les plus profondes de la nouvelle Europe. Que la santé, entendue  comme   harmonie,  paix,  joie, bonheur et progrès médical, technique et scientifique, respectueuse de la vie humaine, cultivée au bénéfice de tous, soit le manteau maternel avec lequel l’Immaculée Conception, Notre-Dame de Lourdes, couvre tous ses enfants qui la vénèrent avec tant d’amour.