Archive pour la catégorie ''

HOMÉLIE POUR LE 12E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « SOYEZ DONC SANS CRAINTE » TEXTES : JÉRÉMIE 20, 10-13, ROMAINS 5, 12-15 ET MATHIEU 10, 26-33.

19 juin, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-12e-dimanche-du-temps-ordinaire-Annee-A-Soyez-donc-sans-crainte_a956.html

fr non temete

N’ai pas peur

HOMÉLIE POUR LE 12E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « SOYEZ DONC SANS CRAINTE »
TEXTES : JÉRÉMIE 20, 10-13, ROMAINS 5, 12-15 ET MATHIEU 10, 26-33.

Dans les évangiles qui sont des écrits qui veulent nous résumer l’activité et le message de Jésus, on suit un certain plan et on vise aussi certaines clientèles. L’évangile de saint Mathieu a eu plusieurs versions, semble-t-il, et celle qui nous est restée s’adresse avant tout aux juifs convertis à la foi chrétienne.
Dans le texte qui nous est présenté aujourd’hui par la liturgie nous reprenons une lecture suivie de cet évangile pour les prochains dimanches. Nous sommes arrivés dans le plan de saint Mathieu à ce que les experts appellent le « Discours aux disciples ». On y a rassemblé dans un discours – un long entretien – plusieurs observations prononcées en diverses circonstances concernant l’attitude des disciples dans leur mission de porter la Bonne Nouvelle aux extrémités du monde.
L’évangile d’aujourd’hui met ensemble des conseils que Jésus a donnés en diverses occasions. Ces conseils pourraient avoir comme thème « Ne craignez pas, soyez sans crainte ». Les paroles de Jésus nous projettent dans des situations inédites qui attendent ses disciples. Il les a envoyés proclamer la Bonne nouvelle du Salut, mais il tient à les avertir des difficultés et des murs qu’ils rencontreront. « Le disciple n’est pas au-dessus du maître ». (Luc 6, 40)

I – Ce qui ne se voit pas
En ce qui concerne les disciples, les paroles de Jésus invitent à faire confiance à ce qui est en eux comme don de Dieu. « Rien n’est voilé qui ne sera dévoilé, rien n’est caché qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière » avons-nous entendu il y a un instant. En d’autres termes, ce qui est là n’est pas toujours visible au grand jour. Les débuts d’une semence sont modestes, cachés. Combien de Mozart, de futurs ingénieurs, d’hommes d’affaires talentueux dans ces jeunes qui sont ici ? Ce qu’il y a en eux n’est pas encore révélé, et pourtant la semence est là. Il en est ainsi de la Bonne nouvelle lorsqu’elle a été accueillie comme une semence. On n’en voit pas toujours les fruits. Parfois même, elle semble écrasée. Elle suscite les oppositions. Elle provoque. Mais elle est bien présente. Elle est là.
Ce qui est là dans le secret, même si on ne le voit pas, est présent. C’est souvent là que se vit la vraie vie. Le secret de nos cœurs, de notre générosité, de notre amour sera révélé un jour. « Ne craignez pas, dit Jésus d’aimer, de semer de belles choses, ayez confiance. La confiance, la foi, chasse la crainte. Cela sera révélé autour de vous. Cela se verra un jour ou l’autre ».
On pourrait en témoigner pour plusieurs d’entre nous par rapport à nos parents. Leur amour de couple a été une inspiration, leur dévouement pour leur famille aussi. Et combien d’autres personnes de divers horizons, de diverses conditions, d’époques différentes. La Vierge Marie en est un bel exemple. Elle a simplement été elle-même. Une jeune fille choisie par Dieu pour être la mère de son Fils, une épouse attentive, une mère présente jusqu’à la fin.

II– Pas de crainte de notre Dieu
Dans cet univers changeant et instable, il y a un roc solide. Le Seigneur notre Dieu est le rocher sur lequel on peut s’appuyer en tout temps. Comme le prophète Jérémie persécuté dont fait était la première lecture nous pouvons dire : « le Seigneur est avec moi, tel un guerrier redoutable ». Après nous avoir permis de regarder ce qu’il y a en nous avec confiance, le « N’ayez pas peur » de Jésus nous tourne maintenant vers Dieu lui-même. « Ne craignez pas, nous répète Jésus ce matin, votre Dieu, celui en qui vous croyez, est un Dieu de bonté et de miséricorde. Vous pouvez vous fier à lui en tout temps et lui faire confiance ».
Notre Dieu n’est pas seulement un Dieu de majesté, un Dieu grand, qui sait juger ce qu’il y a en nous, qui rétribue nos bons coups et qui est juste, mais il est aussi un Père, proche et familier. Il nous soutient. Il croit en nous. Il veut notre bien. Il ne cherche pas à nous écraser, au contraire, il s’intéresse à tout…même à nos cheveux…nos plus petits soucis ne lui sont pas étrangers. « Quant à vous, même les cheveux de votre tête sont tous comptés. Soyez donc sans crainte : vous valez bien plus qu’une multitude de moineaux ». (Mathieu 10, 30-31)
Les paroles de Jésus ici respirent la confiance et l’abandon sans crainte.

III – Application : les disciples
ans la troisième partie de l’évangile d’aujourd’hui, Jésus nous fait une promesse. « Celui qui se prononcera pour moi devant les hommes moi aussi je prononcerai pour lui devant mon Père qui est dans les cieux ».
En d’autres mots, Jésus nous dit : « Ne craignez pas de vous prononcer pour moi dans vos milieux de vies, au travail, dans vos familles, à la maison. Ne craignez pas de témoigner de votre foi, de vos valeurs, de ce qui est beau et grand pour vous. Dites-le, même si parfois ce n’est pas entendu ». C’est cela « confesser Jésus-Christ ».
« Bien sûr, écrit un auteur spirituel, décédé il y a quelques années, l’abbé Jules Beaulac, nous ne subirons sans doute pas le martyre pour le simple fait que nous sommes baptisés, mais il peut nous arriver d’éprouver toutes sortes d’ennuis à cause de notre foi à la face du monde. Ainsi venir à la messe le dimanche, faire baptiser ses enfants, participer à la préparation de leur première communion etc. peut en faire sourire quelques-uns qui ne croient pas à ces démarches… Sans verser dans l’ostentation spectaculaire, n’ayons pas peur de montrer que nous sommes chrétiens et heureux de l’être ».

Conclusion
C’est mon souhait le plus cher. Que cette messe nous rende plus forts, plus accueillants et plus heureux d’être disciples de Jésus.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P. H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DE LA PENTECÔTE ANNÉE A « TOUS FURENT REMPLIS DE L’ESPRIT SAINT TEXTES : ACTES 2, 1-11, 1 CORINTHIENS 12, 3B-7.12-13 ET JEAN 20, 19-23.

29 mai, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-Dimanche-de-la-Pentecote-Annee-A-Tous-furent-remplis-de-l-Esprit-Saint_a953.html

fr pentecoste

HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DE LA PENTECÔTE ANNÉE A « TOUS FURENT REMPLIS DE L’ESPRIT SAINT
TEXTES : ACTES 2, 1-11, 1 CORINTHIENS 12, 3B-7.12-13 ET JEAN 20, 19-23.

Il y a des choses qu’on ne souhaite pas comme, par exemple, l’épidémie de coronavirus qu’on est en train de vivre. Il y en a d’autres qu’on souhaite ardemment. C’est le cas de la venue de l’Esprit Saint sur nous qu’on appelle familièrement une effusion de l’Esprit Saint.
C’est ce qui se produit pour les Apôtres et les disciples réunis autour de Marie dans la Chambre haute au Cénacle où pendant 10 jours après l’Ascension ils attendent dans la prière la venue de l’Esprit promis par Jésus .

I- Ce qui a été vécu au Cénacle
La première lecture nous raconte ce qui est vécu par eux, au terme de cette attente, le jour la Pentecôte. Il s’agit d’une manifestation de l’Esprit Saint qui se produit avec éclat. « Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent » écrit saint Luc qui dans les Actes des Apôtres où il fait le récit de ce qui s’est passé. « Alors, continue-t-il, la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint ; ils se mirent à parler en d’autres langues et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit. »
Ce récit souligne trois choses : l’irruption surprise de l’Esprit, les langues de feu et le don de l’Esprit
Premièrement, on voit dans ce récit que l’Esprit est donné à la Pentecôte de façon directe et quasi palpable. Sa présence se fait avec fracas même. Impossible de passer à côté de ce don qui, comme on le verra par la suite, transformera ceux et celles qui le reçoivent.
Deuxièmement, saint Luc utilise une image pour exprimer l’action de l’Esprit celle des langues de feu. C’est une image très suggestive. De petites flammes se déposent sur chacune des personnes présentes pour montrer que ce don de l’Esprit est personnel, qu’il s’inscrit dans le cheminement et la vie de la personne avec tout ce qu’elle est et ce qu’elle désire,
Troisièmement, l’Esprit est un don il n’est pas quelque chose qu’on produit par nous-mêmes. Il vient d’ailleurs. Il est l’Esprit de Jésus que le Père envoie. Il en est toujours ainsi. L’Esprit Saint demande de chaque personne une attitude d’accueil. Il ne s’impose pas, mais il est donné à qui se dispose à le recevoir. Ce don ici est souligné par saint Luc par un de ses effets, un phénomène particulier qui est décrit comme un don de parler des langues nouvelles pour permettre aux disciples de rejoindre toutes les nations.
Cette scène du Cénacle éclaire pour nous ce que sera la mission des disciples par la suite.

II- L’action de l’Esprit Saint
Cette mission est on ne peut plus claire. Quelque temps auparavant comme il est rapporté dans l’évangile, Jésus envoie ses disciples, les Douze, en disant : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Puis il souffle sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus ».
Voila! C’est toute une mission qui tombe sur les épaules de ces pêcheurs de Galilée. On sait par la suite de l’histoire qu’ils ont parcouru diverses parties du monde de leur temps et qu’ils ont, avec l’assistance de l’Esprit, répandu avec succès le message de Jésus au point où le monde connu de leur temps est devenu en quelques générations un monde chrétien et où le paganisme est disparu. En leur imposant les mains Jésus savait que par ce geste l’Esprit viendrait sur eux et que, grâce à son action, la Bonne Nouvelle du don de Dieu pour toute l’humanité se répandrait.
Saint Pierre dans son discours aux témoins de l’événement de la Pentecôte qu’on peut lire une plus loin dans le livre des Actes des Apôtres en tire des leçons pour eux. Il commence par affirmer sa foi en Jésus fait Seigneur et Christ par Dieu. Et aux auditeurs qui lui demandent quoi faire, il répond simplement : « Convertissez-vous et soyez baptisés au nom de Jésus Christ pour le pardon de vos péchés. Vous recevrez alors le don du Saint-Esprit »,( Actes 2, 37-38)
On peut appliquer ce conseil de saint Pierre à chacune et chacune de nous en ce jour de la fête de la Pentecôte si nous prenons la peine de nous demander nous aussi que devons-nous faire ?

III- Application
« Convertissez-vous ». Le cheminement de notre réponse suivra celui d’une conversion renouvelée qui nous éloigne des voies et des routes où règne le Dieu du pouvoir, de l’argent et de l’orgueil. Notre chemin sera plutôt celui où Jésus est choisi comme le Seigneur de nos vies. Vous ne pouvez suivre Dieu et l’argent, vous n’avez qu’un seul maître dit Jésus à ses disciples (cf. Mathieu 6, 24).
Souhaiter recevoir l’Esprit Saint c’est souhaiter suivre Jésus et mettre nos pas dans les siens. Nul n’est au-dessus de son maître. Si nous voulons être des disciples de Jésus nous devons regarder ses exemples et écouter ses enseignements. Ils seront notre nourriture.
La Pentecôte a ouvert pour nous le temps de la Bonne Nouvelle, de l’Évangile de la grâce de Dieu (cf. Actes 20, 24) proclamé par Jésus, un temps qui dure encore. Cette Bonne Nouvelle, grâce à l’Esprit s’est répandue dans le monde entier. Elle a franchi toutes les barrières et toutes les frontières physiques, morales et spirituelles.
C’est ainsi qu’apparaît toute ta beauté et la richesse de salut apporté par Jésus à toute l’humanité. Il est ressuscité comme le Premier-né de cette humanité nouvelle et il nous entraîne avec lui. Pour nous faire entrer dans ce mouvement, il nous envoie l’Esprit qui devient la force et l’aide dont nous avons besoin. Cette aide se manifeste par les multiples dons que l’Esprit répand chez les personnes croyantes comme le dit si bien saint Paul dans la deuxième lecture : « Les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit. Les services sont variés, mais c’est le même Seigneur ».
Ce dimanche de la Pentecôte est pour nous l’occasion de redécouvrir que l’action de l’Esprit est toujours là. L’Esprit repose sur chacun et chacune de nous comme il l’a fait pour les disciples au Cénacle. Il est source d’inspiration et nous enrichit de tous les dons nécessaires pour avancer dans notre suite de Jésus.

Conclusion

Reprenons en terminant la belle prière de la séquence de la fête de la Pentecôte :

Viens, Esprit Saint, en nos cœurs
et envoie du haut de ciel
un rayon de ta lumière.

Viens en nous, père des pauvres,
viens, dispensateur des dons,
viens, lumière de nos cœurs.

Ô lumière bienheureuse,
viens remplir jusqu’à l’intime
le cœur de tous tes fidèles.

Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

HOMÉLIE POUR LE 7E DIMANCHE DE PÂQUES (ANNÉE A) 24 MAI 2020

22 mai, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-7e-dimanche-de-Paques-Annee-A-Pere-glorifie-moi-je-trouve-ma-gloire-en-eux_a952.html

fr si

HOMÉLIE POUR LE 7E DIMANCHE DE PÂQUES (ANNÉE A) 24 MAI 2020 (SAUF AU CANADA OÙ CE DIMANCHE-LÀ ON CÉLÈBRE LA SOLENNITÉ DE L’ASCENSION QUI N’A PAS ÉTÉ CÉLÉBRÉE LE JEUDI 21 MAI 2020)

Textes: Actes des Apôtres 1, 12-14, 1 Pierre 4, 13-16 et Jean 17, 1-11a.

Entre l’Ascension et la Pentecôte, ce dimanche est un dimanche de méditation et de recueillement en union avec le groupe des disciples de Jésus revenus au Cénacle. Ils se laissent habiter par une absence qu’ils sentent remplie de fruits qu’ils n’ont pas encore découverts.
C’est pourquoi, ils se recueillent en communauté de foi en Celui qu’ils ont fréquenté, avec qui ils ont mangé et bu et qui les as laissés lors de l’Ascension dont nous avons célébré la solennité jeudi dernier.
Les textes de la messe d’aujourd’hui veulent nous aider à entrer dans ce temps de recueillement avant la fête de la Pentecôte.

I – Les fruits de l’absence
La deuxième lecture tirée de la première lettre attribuée à saint Pierre nous invite à entrer dans la participation vécue et intime au mystère de la Passion du Christ. « Communiez aux souffrances du Christ ».
Cette invitation n’est pas de trop car les premiers chrétiens auxquels s’adresse la lettre de saint Pierre connaissent le rejet de leurs frères et sœurs juifs comme Jésus l’a connu. Ils apportent un message renversant qui contredit toutes les aspirations du peuple élu et qui est un scandale pour les païens. Ils sont insultés à cause du nom du Christ. Ils souffrent, non pour des crimes réels : vols, meurtres etc., mais parce qu’ils sont identifiés comme « chrétiens », nouveau nom qu’on leur applique qui vient du mot « Christ ».
Que faire alors, si ce n’est de regarder vers leur Maître qui est venu comme un agneau souffrant pour le péché du monde et mourant sur une croix dans de terribles souffrances. La croix devient ainsi le symbole de ce nouveau peuple de Dieu que sont les disciples de Jésus, les « chrétiens ».
Ce contexte réel et concret de l’action de Dieu pour son peuple ne conduit pas à la mort pour autant. Il est, au contraire, signe de vie. Jésus est ressuscité et son Père le glorifie pour son obéissance et pour le don de sa vie. Ses disciples, les « chrétiens », témoignent d’une gloire à venir, d’une glorification dont ils ont reçu les prémices dans la résurrection de Jésus et dans leur baptême qui les unit à lui dans le passage de la mort à la vie.
C’est pourquoi, ils peuvent se réjouir et être dans l’allégresse. Ils ne sont pas écrasés par le péché. Jésus l’a vaincu. Il a triomphé du mal et le Père l’a accueilli près de lui dans la gloire pour l’éternité.

Il – Le sens de la glorification de Jésus
Cette glorification de Jésus est décrite avec emphase et avec amour par l’extrait de l’évangile de saint Jean qui situe ces réflexions avant la mort de Jésus. Elles gardent pour nous toute leur actualité car elles décrivent une absence qui est loin d’être le vide et la noirceur.
L’absence physique du Maître ouvrira la porte à ce que Jésus décrit comme sa « gloire ». Ce mot nous est assez étranger. Il est encore utilisé pour les sportifs des Jeux Olympiques, les stars des prix de cinéma et que sais-je? Au Québec, une équipe de hockey très célèbre, les Canadiens de Montréal, porte le surnom « les Glorieux ».
Saint Jean décrit la « gloire du Fils » non comme un cadeau personnel ou une récompense pour une performance, mais comme une mission qui le tourne vers les autres.
Le Fils a tout reçu du Père. Il donnera la vie éternelle à tous ceux et celles qui l’accueilleront les faisant entrer dans la connaissance personnelle du seul et vrai Dieu et de son envoyé, Jésus-Christ.
La mission du Fils s’inscrit dans la vie des disciples de Jésus. Ils sont remplis de Lui et ils en témoignent dans leur vie. Sans être retirés du monde, ils témoignent d’une vie autre, d’un monde autre, que Jésus ailleurs appelle le Royaume de Dieu. Nous le demandons à chaque fois que nos récitons le Notre Père lorsque nous disons « Que ton règne vienne. Que ta volonté soit faite ».

III – Application
Dans l’attente de méditer sur le mystère de la Pentecôte que nous célèbrerons dimanche prochain, restons, nous aussi, au Cénacle pour approfondir tout ce qui nous a été présenté dans les dimanches du carême et les dimanches de Pâques.
Laissons retomber nos émotions et nos pensées. Mettons-nous à l’écoute de l’Esprit qui est en nous. Ouvrons la Parole de Dieu à l’occasion pour nous en nourrir. Regardons autour de nous pour voir comment mettre en pratique les suites de nos méditations. Car nous savons que désormais nous sommes envoyés pour partager ce qui nous fait vivre dans la foi au Christ mort et ressuscité.

Conclusion
Ces invitations que je viens de vous faire prendrons corps si nous savons nous approcher avec confiance de celui qui s’est fait notre nourriture dans son Corps et son Sang auxquels nous communions à chaque messe.
Reprenant le début de la deuxième lecture, je vous dis en le transposant un peu : « Puisque nous avons communié aux souffrances du Christ, réjouissons-nous, afin d’être dans la joie et l’allégresse que sa gloire se révélera parfaitement un jour. »
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

JEUDI DE L’ASCENSION DE NOTRE-SEIGNEUR (21.5.20)

22 mai, 2020

Homélie de la solennité de l’Ascension du Seigneur
Sermons – Homélie – Méditations

Voici une Homélie pour la solennité de l’Ascension du Seigneur « Dieu qui élèves le Christ au-dessus de tout, ouvre-nous à la joie et à l’action de grâce » de Monsieur l’Abbé Michel Steinmetz (1977-….), Docteur en théologie de l’Institut Catholique de Paris (ICP) et Prêtre de la Communauté de Paroisses Sainte Edith Stein dans le Diocèse de Strasbourg.

http://site-catholique.fr/index.php?post/Homelie-Ascension-de-Michel-Steinmetz

JEUDI DE L’ASCENSION DE NOTRE-SEIGNEUR.jpg (21.5.20)

« Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? » (Actes 1, 11)

L’Homélie du P. Michel Steinmetz pour l’Ascension « Dieu qui élèves le Christ au-dessus de tout, ouvre-nous à la joie et à l’action de grâce » :

Quarante jours après Pâques, Jésus monte au ciel. Quarante, voilà bien un chiffre éminemment biblique. Quarante ans d’exode au désert pour le peuple élu, quarante jours de jeûne pour Jésus au désert. Quarante, le chiffre des nouveaux départs. Quarante jours donc après sa Résurrection, Jésus quitte définitivement la terre pour rejoindre son Père dans les Cieux. Après être demeuré présent aux siens sous des modalités certes nouvelles et déroutantes pour eux, Il les quitte définitivement, tout en prenant le soin de les réconforter et de les inviter à la joie.
Tout le sens de cette fête nous était déjà donné, il y a quelques instants, dans l’oraison d’ouverture de cette célébration :
« Dieu qui élèves le Christ au-dessus de tout, ouvre-nous à la joie et à l’action de grâce, car l’Ascension de ton Fils est déjà notre victoire : nous sommes les membres de Son corps, Il nous a précédés dans la Gloire auprès de Toi, et c’est là que nous vivons en espérance ».
L’Ascension du Christ n’est pas une évasion. Elle participe à la dynamique induite par la Résurrection. Elle nous ouvre ce mouvement en même temps qu’elle est un appel à Le rejoindre.
I.- L’Ascension de Jésus n’est pas une évasion.
A en croire, n’est-ce pas ? La réaction mitigée des disciples que les « hommes en vêtements blancs » doivent rappeler à leur mission, on pourrait se poser la question : Jésus n’abandonne-t-Il pas les siens ? Ne fuit-Il pas l’humanité pour laquelle, pourtant, Il s’est livré ?
Après le traumatisme infligé aux siens par Sa mort et le bouleversement de l’annonce de Son réveil d’entre les morts, Jésus a continué de se rendre présent en leur apparaissant : Il les a rejoints sur la route vers Emmaüs, Il les a attendus sur le bord du lac ou au milieu de leur demeure. Bref, pour les disciples, il a certes fallu se familiariser à cette Présence nouvelle, mais Jésus demeurait présent quoi qu’il en soit. Le sentiment d’être livré à eux-mêmes était atténué par cette discrète mais efficace Présence.
Aujourd’hui, Jésus échappe à leur regard. Il est enlevé dans les nuées du ciel après avoir pris congé d’eux par quelques dernières et brèves Paroles. Il serait vain pour les disciples de pouvoir retenir Jésus : d’abord il ne le pourrait évidemment pas, ensuite il faut qu’Il s’en aille pour que s’accomplisse pleinement les Promesses de l’Ecriture.
II.- L’Ascension de Jésus dans la dynamique de sa Résurrection.
Au matin de Pâques, alors que Marie-Madeleine, à l’appel de son nom, reconnaît Jésus en la personne de celui qu’elle avait pris jusqu’alors pour le jardinier, le Ressuscité lui lance cette appel : « Ne me retiens pas ! », comme s’il fallait accepter cette condition nouvelle sans désir aucun de revenir en arrière. Car la Résurrection est bien une nouveauté qui n’a rien à voir avec un retour à la vie humaine : Jésus ne revit pas pour re-mourir encore. Il est à jamais Vivant.
A l’Ascension, la recommandation des anges aux disciples est du même ordre : « Pourquoi restez-vous là à regarder le ciel ? ». C’est-à-dire : cessez de fixer le ciel comme si vos regards, à défaut de vos mains impuissantes, voulaient retenir Jésus. Votre mission désormais est tournée vers les hommes et les femmes que vous rencontrerez. Ne restez passifs et cois. Vous savez que Dieu, en Jésus, a tenu Ses promesses. Il a même tenues jusqu’au bout. Il vous enverra son Esprit pour que vous alliez vous aussi dire cette nouvelle. Votre mission sera de guider et d’orienter tous ces regards perdus vers le Christ de gloire.
III.- L’Ascension de Jésus nous renvoie à notre mission.
Plus encore qu’un évènement, l’Ascension du Christ célèbre un Mystère, celui de l’accomplissement de la Pâque dans le Corps total du Christ. En effet, pour reprendre les termes de Paul, dans ce Corps que nous formons, le Christ est la Tête et nous en sommes les membres. Or la Pâque ne concerne pas Jésus seul : s’Il est ressuscité, c’est bien pour nous entraîner à Sa suite. « Là où je m’en vais, vous irez aussi », dit-Il. En ce jour, Il fait entrer notre nature dans l’éternité et la gloire de Dieu. En ce jour, notre faiblesse s’unit à la Force de Dieu. La préface de la Messe nous fera chanter : « Il est monté au ciel pour nous rendre participants de Sa divinité ». La liturgie ne cesse de nous réjouir en nous rappelant ce message. C’était le cas, déjà, dans l’oraison d’ouverture : « Il nous a précédés dans la gloire et c’est là que nous vivons en espérance ».
Pour nous chrétiens, la contemplation du ciel, à laquelle nous invite cette Fête, n’est pas une évasion : si les anges rappellent aux apôtres que leur Seigneur reviendra, c’est pour les renvoyer à leurs tâches, à la mission qu’ils ont reçue de témoigner de tout ce qu’ils ont vu. Nous-mêmes, nous sommes pareillement renvoyés en ce jour à la mission qui est la nôtre.
En montant au ciel, le Christ nous donne une preuve nouvelle et supplémentaire de Sa confiance et de Son amour : il confie l’annonce du Royaume à notre pauvreté et à notre faiblesse transcendées dans la force de l’Esprit. Il nous passe le relais. Ne craignons pas de le saisir à pleine main ! Demandons, en nous préparant à la Fête de la Pentecôte, la Grâce de l’Esprit pour nous en retourner à nos tâches humaines, « remplis de joie ».

Ainsi soit-il.

Abbé Michel Steinmetz (1977-….) – Homélie de la solennité de l’Ascension du Seigneur – 13 mai 2010

HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « MOI, JE SUIS LA PORTE DES BREBIS »

1 mai, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-4e-dimanche-de-Paques-Annee-A-Moi-je-suis-la-porte-des-brebis_a948.html

fr Sieger Köder (1925-2015), Gesù Buon Pastore

Sieger  Koder, (1925,2015) Jesus le Bon Pasteur

HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « MOI, JE SUIS LA PORTE DES BREBIS »

Textes : Actes 2, 14a.36-41, 1 Pierre 2, 20b-25 et Jean 10, 1-10 le Bon Pasteur.

Dans sa prédication et ses enseignements, Jésus aime les images qui parlent aux gens. Souvenez-vous de celles du sel, du levain dans la pâte, de la semence jetée dans la bonne terre.
Dans cette péricope de l’évangile de saint Jean qui vient d’être lue, Jésus se présente comme le bon berger ou le bon pasteur. Et à la fin de cet enseignement, Jésus ajoute à l’image du berger et des brebis, celle de la porte. « Moi, je suis la porte des brebis ». J’ai donc choisi de m’arrêter sur cette image qui souligne un aspect essentiel de la mission de Jésus : il est le seul et unique médiateur ente Dieu et l’humanité. Regardons-y de plus près en commençant par l’Ancien Testament puis, ensuite, en approfondissant cette image pour nous aujourd’hui.

I – L’image de la porte
L’image de la porte très souvent utilisée dans l’Ancien Testament l’est toujours en lien avec la présence de Dieu. Quand le prophète Isaïe parle du jour de la paix universelle, il décrit un temps où la présence de Dieu sera toujours là, où « tes portes seront toujours ouvertes, le jour ni la nuit elles ne seront fermées » (Isaïe 60, 11). Dans le temple de Jérusalem, l’autel pour les sacrifices se trouvait à la porte de la partie la plus sacrée, le Saint des Saints où résidait la présence du Seigneur « devant l’entrée de la Demeure, de la Tente de Réunion » (Exode 40, 6). Dans le psaume 24 aux versets 7 à 10 que nous utilisons beaucoup dans le temps de Noël, le psalmiste s’exclame : « Portes, levez vos frontons élevez-vous, portes éternelles : qu’il entre, le roi de gloire! »
Ici, dans notre texte, Jésus s’applique à lui-même l’image de la porte. Ce faisant, il se présente comme le seul et unique médiateur auprès de Dieu. Il n’y a pas d’autre porte que Lui pour aller vers Dieu. Il est LA PORTE à travers laquelle nous avons « accès au Père » (Éphésiens 2, 18). Il est le «chemin nouveau et vivant » pour rejoindre Dieu : « C’est avec assurance que nous pouvons entrer dans le véritable sanctuaire grâce au sang de Jésus : nous avons là un chemin nouveau et vivant.» (Hébreux 10, 20).
Cette porte grande ouverte offre un espace de liberté et non de domination. Ceux qui ont précédé Jésus opprimaient les gens, – ce qui est encore le cas souvent aujourd’hui – « des voleurs et des bandits » dit Jésus. Lui, il ouvre la porte du Salut, une présence du Seigneur qui est offerte gratuitement à tous et que l’on accepte librement. Tu peux entrer, tu peux sortir quand tu le veux : « Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé; il pourra entrer; il pourra sortir et trouver un pâturage. Le voleur ne vient que pour voler, égorger, faire périr. Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie en abondance. » La présence de Dieu est une présence de vie, une vie en abondance, porteuse de vie éternelle.
« Je suis venu pour que les brebis aient la vie en abondance ». Quelle belle promesse!

II – La réalisation de la promesse
Quelles sont les retombées de cette image où Jésus se présente comme LA PORTE des brebis ? Les premiers chrétiens qui entendaient la lettre de saint Pierre dont nous avons lu un extrait dans la deuxième lecture étaient conscients de vivre ces retombées. Guéris et sauvés par les blessures et la mort de Jésus, ils ne se sentent pas laissés à eux-mêmes errants dans le monde sans savoir où aller. Ils regardent vers leur Berger qui est Jésus, le « gardien de leurs âmes », la porte par où ils peuvent aller à Dieu.
Tous les disciples de Jésus, d’alors et d’aujourd’hui, sont des personnes en cheminement. Nous en sommes. Nous cherchons le chemin de l’enclos dont il est question au début de l’évangile où se trouve la rencontre avec Dieu dans nos vies. Cet enclos, dit-on, servait au repos des brebis. Le berger se tenait dans la porte en se couchant parfois sur le sol pour les garder avec lui et les protéger. Voilà où nous attend le Bon Pasteur, le « gardien de nos âmes » comme le dit la Lettre de saint Pierre.
Plusieurs chemins s’offrent à nous. On peut être tentés d’escalader, d’entrer par nous-mêmes dans des paradis artificiels sans passer par Jésus. C’est une tentation qu’on retrouve partout de nos jours. Jésus disparaît de l’horizon. Il devient pour plusieurs un bon garçon, un personnage hors normes, mais on ne lui reconnaît pas le rôle de médiateur entre Dieu et les hommes. Il n’est plus LA PORTE. On en fait un sage qu’on respecte. Un point c’est tout. Alors que ce que Jésus désire, c’est d’être celui qui ouvre la porte d’un enclos à nul autre pareil, celui du Royaume de Dieu présent parmi nous.

III –Application pratique
Comment entrer dans ce Royaume de Dieu dont Jésus est la PORTE ? Cette question n’est pas nouvelle. La première lecture nous montre qu’elle se posait déjà lors des premières prédications des apôtres après la Pentecôte. « Frères, que devons-nous faire? » demandait-on à saint Pierre et aux Apôtres.
Et quelle était la réponse – qui est toujours valable aujourd’hui – « Convertissez-vous, et que chacun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ pour le pardon de ses péchés, vous recevrez alors le don du Saint-Esprit…car la promesse est pour vous, pour vos enfants et pour tous ceux qui sont loin, aussi nombreux que le Seigneur, notre Dieu les appellera ».
Voyez-vous, le mystère de la porte des brebis implique que les brebis que nous sommes se déplacent par elles-mêmes et qu’elles fassent le chemin nécessaire pour accueillir le don de Dieu qui leur permettra d’entrer dans le Royaume. C’est cela le « Convertissez-vous » que propose saint Pierre, une transformation qui change la vie et fait du Ressuscité le Maître et Seigneur de notre vie.
Nous sommes encore dans la célébration de la Fête de Pâques qui se prolonge jusqu’à l’Ascension. Profitons de ce temps de Pâques pour vivre une nouvelle conversion en renonçant à ce qui nous éloigne de Dieu et en ouvrant notre cœur à l’action de l’Esprit Saint qui nous fera vivre comme un second baptême nous remplissant d’élan et d’ardeur dans notre vie chrétienne.

Conclusion
Nous sommes chanceux et chanceuses d’avoir une « PORTE » pour aller à Dieu comme celle qu’est Jésus. Nous pouvons être sûrs de sa présence constante à notre vie même lorsque nous ne la sentons pas. Laissons monter notre action de grâces pour ce don de Dieu.
Au cours de cette Eucharistie, dans la foi, passons la « PORTE » et réitérons notre désir d’union à Dieu par Jésus qui est toujours vivant avec le Père et l’Esprit Saint « pour les siècles des siècles ».
Amen!

Mgr Hermann Giguère P. H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « ILS LE RECONNURENT »

24 avril, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-3e-dimanche-de-Paques-Annee-A-Ils-le-reconnurent_a947.html

fr si

Emmaus

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « ILS LE RECONNURENT »

Textes : Actes 2, 14.22b-33, 1 Pierre 1, 17-21 et Luc 24, 13-3 Disciples d’Emmaüs.

Marchons, si vous le voulez bien avec les deux disciples qui s’en vont pensifs et remplis des événements des derniers jours qu’ils ont vécus. Ils en font comme la synthèse. Ils se remémorent les évènements. Ce faisant ils cherchent, comme il nous arrive de le faire assez souvent, quel est le sens de ce qui vient de se passer.

I – La route
En marchant sur la route vers Emmaüs, les deux disciples partagent en s’inspirant des Écritures qu’ils connaissent bien. Ils se rappellent aussi les enseignements de Jésus qu’ils ont côtoyé avant sa mort, mais la lumière ne vient pas. Ils se sentent accablés et même perplexes, car ils ne comprennent pas. Survient alors un voyageur comme eux. Il les suit et finalement la conversation s’engage. Les deux disciples se laissent aller à raconter leurs déboires et leurs inquiétudes. Ils partagent même leur désespoir. Car ils avaient mis leur confiance et leur espérance en celui qui est mort sur une croix le vendredi précédent. Leur chemin est un chemin de croix, pourrait-on dire. Ils ne comprennent pas.
Ils ne savent pourquoi, mais ils sentent maintenant que cet étranter s’est joint à eux une présence qui leur fait du bien. Avec la mort de Jésus, ils ont vécu le mystère du deuil et de l’absence. Ce mystère de l’absence les écrase. Ils n’en sortent pas. Ils ont beau parler de lui, se rappeler les moments heureux vécus avec lui, l’absence leur pèse lourd.
Et maintenant à mesure que la route avance leurs cœurs vibrent. Une rencontre à nulle autre comparable se prépare. Écoutons saint Luc qui nous la décrit en détail.

II – La rencontre
Le compagnon qui marche avec eux les apostrophe : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? » Par le jeu des retours à l’Écriture et à la Parole de Dieu, leur compagnon donne sens à ce qu’ils ont vécu. « Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture ce qui le concernait ». Les deux disciples perçoivent alors le renversement que Dieu provoque pour son Peuple qui attendait un souverain triomphant et à qui il donné un Serviteur souffrant qui se présente comme l’Agneau sacrifié pour le salut de toutes et de tous. Ces paroles relues dans le prophète Isaïe les éclairent. Elles contribuent à changer leur perspective et leur vision.
Lorsqu’il est l’heure de souper, ils cassent la croûte avec leur compagnon et là tout se dévoile. Lorsque les gestes que Jésus a légués à ses disciples sont reproduits – la fraction du pain – ils perçoivent dans leur foi en la Parole de Dieu que c’est le Christ qui est avec eux. Alors leurs yeux s’ouvrent et ils le reconnaissent. Ils ne seront plus les mêmes. Ils ont rencontré le Seigneur ressuscité.
À mesure qu’ils partageaient avec l’étranger qui les avait rejoints, ils avaient senti en eux non pas seulement des mots qui montaient, mais un je ne sais quoi de plus. « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » constatent-ils alors.
Eh oui! pour eux dans la fraction du pain, les mots laissent place à une relation de personne à personne, à une rencontre inexprimable, mais bien réelle. L’absence physique demeure bien sûr, mais elle n’empêche pas une présence autre de la personne aimée. C’est ce dont ils témoignent aux autres disciples. « Ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain ».
Ayant vécu la fin tragique de Jésus qui les a privés d’une présence physique qui soutenait leur attachement à lui : « Nous pensions qu’il était celui qui nous sauverait, qui rétablirait la gloire d’Israël », les deux disciples marchaient sans but. Et maintenant ils reconnaissent Jésus bien vivant et présent par les gestes de la fraction du pain.

III – La foi renouvelée
Jésus est bien vivant, telle est le coeur de la foi chrétienne. Saint Pierre l’explique aux gens de Jérusalem le matin de la Pentecôte dans ce merveilleux texte que nous avons dans la première lecture. Après avoir lui aussi, comme le compagnon des disciples d’Emmaüs, reprit le message des Écritures, il en dégage les mots de David qui annoncent la résurrection de Jésus.
Je vous cite ses paroles : « En effet, c’est de lui que parle David dans le psaume : Je voyais le Seigneur devant moi sans relâche : il a vu d’avance la résurrection du Christ, dont il a parlé ainsi : il n’a pas été abandonné à la mort, et sa chair n’a pas vu la corruption. Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit Saint qui était promis, et il l’a répandu sur nous, ainsi que vous le voyez et l’entendez ».
Saint Pierre met le doigt sur le message essentiel de la Bonne Nouvelle qu’il prêche : la résurrection de Jésus. Parce que Jésus est Ressuscité les limites du temps et de l’espace sont tombées. Toute personne peut, en quelque temps et dans n’importe quel lieu, le rencontrer elle aussi comme les disciples d’Emmaüs ont eu la chance de le faire. Cette rencontre avec le Ressuscité se fait par la Parole de Dieu et par le partage du Pain. La Parole et le Pain sont pour nous des signes de la présence du Ressuscité et en même temps un envoi vers nos frères et sœurs. Les disciples d’Emmaüs nous amènent sur un chemin combien stimulant : celui de la foi au Christ Ressuscité.
Le chrétien, sans avoir toutes les réponses, prend le beau risque de la foi. Ce « beau risque » c’est celui de l’attachement à la personne de Jésus que nous reconnaissons toujours vivant et que nous retrouvons de diverses manières : dans l’autre que je regarde comme un frère et une sœur, dans le pain et le vin partagés dans l’Eucharistie, dans le souffle de l’Esprit au cœur du plus petit, dans l’étranger, dans l’enfant qui pleure, dans le jeune qui se cherche etc.
Quel beau risque de chercher Jésus et de le chercher sans se lasser ! La vie d’un chrétien n’est pas une « assurance tous risques ». Elle comporte ses moments d’hésitations, de doutes, de retards, de lenteurs, mais elle est remplie d’une espérance fondée sur la foi en la Résurrection du Jésus.

Conclusion
Pâques se continue et nous avons-nous aussi comme les disciples d’Emmaüs à cheminer avec la Parole de Dieu, ce que nous faisons en particulier à chaque dimanche dans l’Eucharistie dont le souper d’Emmaüs est une belle image.
C’est en partageant les signes de la présence du Ressuscité que les disciples ont pu reprendre, joyeux et rassurés, leur route de tous les jours. C’est en partageant dans l’Eucharistie que nous le ferons nous aussi assurés que le Seigneur Ressuscité est toujours présent avec nous.
N’ayons pas peur de lui redire comme les disciples d’Emmaüs : « Reste avec nous ! »
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A OU DIMANCHE DE LA MISÉRICORDE DIVINE « VIVANT POUR DIEU ÉTERNELLEMENT »

17 avril, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-2e-dimanche-de-Paques-Annee-A-ou-Dimanche-de-la-Misericorde-divine-Vivant-pour-Dieu-eternellement_a946.html

fr si

HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A OU DIMANCHE DE LA MISÉRICORDE DIVINE « VIVANT POUR DIEU ÉTERNELLEMENT »

Textes : Actes 2, 42-47, 1 Pierre 1, 3-9 et Jean 20, 19-31.

Habituellement, le 2e dimanche de Pâques que nous vivons met devant nos yeux les nouveaux baptisés qui depuis la Vigile pascale ont été revêtus d’un vêtement blanc marquant leur passage avec le Christ ressuscité vers une vie nouvelle pour Dieu. Hélas en 2020, en raison de la pandémie de la maladie du coronavirus COVID-19 les baptêmes dans la Nuit de Pâques n’ont pas eu lieu. Quoiqu’il en soit, le symbolisme de la liturgie demeure. Dans les temps anciens, les nouveaux baptisés portaient leur vêtement blanc, leur aube blanche, pendant toute la semaine et le huitième jour ils le déposaient à l’église et on donnait au 2e Dimanche de Pâques le nom de Dimanche « in albis ».
Depuis 2008, ce 2e dimanche de Pâques a été nommé par saint Jean-Paul II le Dimanche de la Miséricorde divine. Ce faisant il donnait suite au message diffusé par sainte Faustine Kowalska (25 août 1905-5 octobre 1938), religieuse polonaise du diocèse de Cracovie, lui demandant de répandre une image de Jésus miséricordieux où il est écrit « Jésus, j’ai confiance en toi » et de proposer que le 2e dimanche de Pâques soit celui de la Miséricorde divine.

Comment vivre les beautés de ce 2e Dimanche de Pâques dont les lectures sont des plus stimulantes ?

I – Pâques dure cinquante jours
Commençons par prendre conscience que la fête de Pâques s’étend sur cinquante jours que nous appelons le « Temps de Pâques ». On ne peut découvrir et expliciter toutes les richesses de Pâques en une seule fois. Il fait bon de se laisser habiter en profondeur par ce mystère fondamental de la foi chrétienne. En effet, comme dit saint Paul, si le Christ n’est pas ressuscité, ma foi est vaine (I Corinthiens 15, 14). Elle n’a pas de sens.
Au cours des jours du Temps pascal, nous sommes replongés dans les eaux de notre baptême, nous revivons les découvertes des Apôtres et des disciples après la Pentecôte, nous relisons les Écritures avec une lumière nouvelle et nous comprenons que Celui dont parlaient les Écritures de l’Ancien Testament depuis Abraham en passant par Moïse et les prophètes c’est Jésus.
Comme le proclame saint Pierre aux gens réunis autour de lui et des apôtres le jour de la Pentecôte « ce Jésus que vous avez crucifié, Dieu a fait de lui le Seigneur et le Christ » (Actes 2, 37). Oui! dans son abaissement sur la croix, Jésus a porté toutes les fragilités et les péchés du monde. Il a été relevé par Dieu qui l’a exalté et nous l’a donné comme « premier ressuscité parmi ceux qui se sont endormis » (I Corinthiens 15, 20), notre frère Premier-né « vivant pour Dieu éternellement ». Il « est revenu à la vie, et c’est pour Dieu qu’il vit », écrit saint Paul (Romains 6, 10).
De même, comme baptisés, nous le suivons dans sa mort et sa résurrection. « Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur » (Romains 14, 8). C’est dans ce contexte baptismal que nous sommes passés avec Jésus de la mort à la vie, d’une mortalité marquée par la finitude à une vie qui ne finit plus, à la vie éternelle.
Comment recevoir ce Mystère de la Résurrection dans nos vies ?

II – La Résurrection de Jésus, une grâce à découvrir
Les trois lectures entendues seront ici pour nous autant de voies pour nous aider à entrer dans le Mystère de la Résurrection de Jésus.
La première nous indique que c’est en communauté que nous faisons une véritable rencontre du Christ ressuscité. Voyez la petite communauté naissante celle de de tous les croyants qu’on nous présente unie dans la même foi : « Les frères étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. La crainte de Dieu était dans tous les cœurs à la vue des nombreux prodiges et signes accomplis par les Apôtres. Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; se tenant dans le Temple et attirant de plus en plus de personnes qui adhèrent au Seigneur par la foi ». Le témoignage que nous avons à rendre encore aujourd’hui est le même. C’est celui d’une foi commune vécue en communauté qui interpelle dans notre monde éclaté et invite à reconnaître Jésus comme Seigneur et Sauveur.
La seconde lecture tirée de la Première Lettre attribuée a saint Pierre invite les personnes croyantes à exprimer sans peur leur foi dans l’héritage reçu de Jésus, un héritage de vie éternelle que les soucis et le temps ne peuvent amoindrir, un héritage qui mène dans l’intimité de Dieu en union avec Jésus Ressuscité. Comme dit saint Pierre, c’est « un héritage qui ne connaîtra ni corruption, ni souillure, ni flétrissure. Cet héritage vous est réservé dans les cieux, à vous que la puissance de Dieu garde par la foi, pour un salut prêt à se révéler dans les derniers temps. Aussi vous exultez de joie ». Nous sommes les héritiers et les héritières d’une Bonne Nouvelle dont notre monde a un grand besoin. Que notre vie laisse paraître la joie qui nous habite. Oui! Exultons de joie. Ceux et celless qui nous croiseront le remarqueront. C’est le plus beau témoignage que nous pouvons donner et qui est à la portée de toutes les personnes quelles qu’elles soient.
Enfin en troisième lieu, l’évangile nous présente deux visites de Jésus Ressuscité qui sont des rencontres inoubliables pour les disciples. L’une à tout le groupe au soir de Pâques sans la présence de Thomas et l’autre une semaine plus tard. Thomas en apprenant que les autres apôtres avait rencontré le Ressuscité ne voulait pas croire ce qu’on lui racontait. Et une semaine plus tard nous le retrouvons à genoux devant le Ressuscité lui disant « Mon Seigneur et mon Dieu ». Les hésitations et les doutes de Thomas ressemblent aux nôtres parfois. Nos sens et notre raison cherchent des preuves de la résurrection. Ils n’en auront jamais. C’est une affaire de foi, une foi qui s’appuie sur des témoins qui ont fait une rencontre avec le Ressuscité qui remplit leur cœur d’une présence à nulle autre pareille. C’est ce qu’ont vécu les premiers témoins : les apôtres, Marie-Madeleine, les disciples d’Emmaüs et c’est ce que nous sommes invités à vivre. « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ».
Nous sommes donc invités ce matin à recevoir le mystère de la Résurrection dans la foi à travers des questionnements parfois semblables à ceux de l’apôtre Thomas, mais avec une confiance absolue dans le témoignage des premiers disciples qui ont vu et reconnu la présence de Jésus Ressuscité toujours vivant.

III- La fête de la Miséricorde divine
Ajoutons en terminant un mot sur la fête de la Miséricorde divine associée au 2e Dimanche de Pâques. La prière « Jésus, j’ai confiance en toi » (Jezu ufam tobie en polonais) qui figure sur l’image de Jésus miséricordieux de sainte Faustine exprime notre assurance que Dieu ouvre ses bras à toutes les personnes sans faire de distinction car « la puissance de Dieu est amour et sa justice est miséricorde » dit justement le pape François dans un tweet posté sur son compte Twitter. Notre attitude de confiance est l’expression concrète de notre abandon à la Miséricorde divine. En nous jetant dans les bras de Jésus nous nous remettons totalement entre les mains de la Miséricorde divine.
Sainte Faustine propose des moyens concrets pour développer ce sens de la Miséricorde divine comme le chapelet de la miséricorde, l’arrêt pour un moment de prière dans l’après-midi à 15 heures l’heure de la mort du Christ en croix, la prière devant l’image de Jésus miséricordieux, la neuvaine de la miséricorde du Vendredi Saint au 2e dimanche de Pâques.
Ces gestes de dévotion ont été entérinés par l’autorité de l’Église en nommant le 2e dimanche de Pâques le Dimanche de la Miséricorde divine. Ils rejoignent plusieurs chrétiens et chrétiennes.

Conclusion
Que la célébration eucharistique de ce dimanche vécue soit en famille soit par internet ou par la télévision à cause du confinement où nous relègue la COVID-19 nous garde malgré tout dans la joie de Pâques et la confiance dans le Père qui a ressuscité Jésus pour en faire le Seigneur et le Sauveur de l’humanité.
Ainsi nous pourrons, chacun et chacune dans nos milieux de travail, dans nos familles, dans nos lieux de loisirs et/ou de retraite être des témoins que Jésus est vivant et que la puissance de Dieu qui l’a ressuscité des morts se manifeste principalement dans la miséricorde.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Séminaire de Québec
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval

14 avril 2020

« La Fête de la Miséricorde est issue de mes entrailles, je désire qu’elle soit fêtée solennellement le premier dimanche après Pâques. Le genre humain ne trouvera pas la paix tant qu’il ne se tournera pas vers la source de ma Miséricorde. » (Petit Journal de saint Faustine Kowalska, § 699).
« Dis, ma fille, que la fête de la Miséricorde a jailli de mes entrailles pour la consolation du monde entier. » (Ibidem § 1517).

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 1er avril 2020

8 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/francesco/fr/audiences/2020/documents/papa-francesco_20200401_udienza-generale.html

fr GiudaDecideDiTradireGesu-900x600_c

La trahison de Judas, l’évangile d’aujourd’hui

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 1er avril 2020

Bibliothèque du palais apostolique

Chers frères et sœurs, bonjour!

Nous lisons aujourd’hui ensemble la sixième béatitude, qui promet la vision de Dieu et qui a comme condition la pureté du cœur.
Un Psaume dit: «De toi mon cœur a dit: “Cherche sa face”. C’est ta face, Yahvé, que je cherche, ne me cache point ta face» (27, 8-9).
Ce langage manifeste la soif d’une relation personnelle avec Dieu, pas mécanique, pas un peu nébuleuse, non: personnelle, que le livre de Job exprime également comme le signe d’une relation sincère. Le livre de Job dit ainsi: «Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu» (Jb 42, 5). Et très souvent je pense que c’est le chemin de la vie, dans nos relations avec Dieu. Nous connaissons Dieu par ouï-dire, mais avec notre expérience nous allons de l’avant, de l’avant, de l’avant et, à la fin, nous le connaissons directement, si nous sommes fidèles… Et cela est la maturité de l’Esprit.
Comment arriver à cette intimité, à connaître Dieu avec les yeux? On peut penser aux disciples d’Emmaüs, par exemple, qui ont le Seigneur Jésus à côté d’eux, «mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître» (Lc 24, 16). Le Seigneur ouvrira leur regard au terme d’un chemin qui atteint son sommet dans la fraction du pain et qui avait commencé par un reproche: «Cœurs sans intelligence, lents à croire tout ce qu’ont annoncé les prophètes» (cf. Lc 24, 25). C’est le reproche du début. Voilà l’origine de leur cécité: leur cœur sans intelligence et lent. Et quand le cœur est sans intelligence et lent, on ne voit pas les choses. On voit les choses comme embrumées. C’est là que se trouve la sagesse de cette béatitude: pour pouvoir contempler, il est nécessaire de rentrer en nous et de laisser place à Dieu, car, comme le dit saint Augustin, «Dieu m’est plus intime que moi-même» («interior intimo meo»: Confessions, iii, 6, 11). Pour voir Dieu, il n’y a pas besoin de changer de lunettes ou de point d’observation, ou de changer les auteurs théologiens qui enseignent le chemin: il faut libérer le cœur de ses tromperies! C’est la seule route.
C’est une maturation décisive: lorsque nous nous rendons compte que, souvent, notre pire ennemi est caché dans notre cœur. La bataille la plus noble est celle contre les tromperies intérieures qui engendrent nos péchés. Car les péchés changent la vision intérieure, ils changent l’évaluation des choses, ils font voir des choses qui ne sont pas vraies, ou tout au moins qui ne sont pas aussi vraies.
Il est donc important de comprendre ce qu’est la «pureté du cœur». Pour le faire, il faut rappeler que pour la Bible, le cœur ne consiste pas seulement dans les sentiments, mais qu’il est le lieu le plus intime de l’être humain, l’espace intérieur ou une personne est elle-même. Cela, selon la mentalité biblique.
L’Evangile de Matthieu dit: «Si donc lalumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ce sera!» (6, 23). Cette «lumière» est le regard du cœur, la perspective, la synthèse, le point à partir duquel on lit la réalité (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 143).
Mais que veut dire un cœur «pur»? Celui qui a un cœur pur vit en présence du Seigneur, en conservant dans son cœur ce qui est digne de la relation avec Lui; ce n’est qu’ainsi qu’il possède une vie «unifiée», linéaire, qui n’est pas tortueuse mais simple.
Le cœur purifié est donc le résultat d’un processus qui implique une libération et un renoncement. Le pur de cœur ne naît pas tel, il a vécu une simplification intérieure, en apprenant à renier le mal en lui, une chose qui dans la Bible est appelée la circoncision du cœur (cf. Dt 10, 16; 30, 6; Ez 44, 9; Jr 4, 4).
Cette purification intérieure implique la reconnaissance de cette partie du cœur qui est sous l’influence du mal — «Vous savez, Père, je sens ainsi, je pense ainsi, je vois ainsi, et c’est laid»: reconnaître la partie laide, la partie qui est embrumée par le mal — pour apprendre l’art de se laisser toujours enseigner et conduire par l’Esprit Saint. Le chemin du cœur malade, du cœur pécheur, du cœur qui ne peut pas bien voir les choses, parce qu’il est dans le péché, est l’œuvre de l’Esprit Saint qui conduit à la plénitude de la lumière du cœur. C’est lui qui nous guide pour accomplir ce chemin. Voilà, à travers ce chemin du cœur, nous arrivons à «voir Dieu».
Dans cette vision béatifique, il y a une dimension future, eschatologique, comme dans toutes les Béatitudes: c’est la joie du Royaume des cieux vers lequel nous allons. Mais il y a aussi l’autre dimension: voir Dieu signifie comprendre les desseins de la Providence dans ce qui nous arrive, reconnaître sa présence dans les sacrements, sa présence dans nos frères, en particulier pauvres et qui souffrent, et le reconnaître là où Il se manifeste (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2519).
Cette béatitude est un peu le fruit des précédentes: si nous avons écouté la soif de bien qui nous habite et que nous sommes conscients de vivre de miséricorde, un chemin de libération commence qui dure toute la vie et qui conduit jusqu’au Ciel. C’est un travail sérieux, un travail que fait l’Esprit Saint si nous lui laissons place pour qu’il le fasse, si nous sommes ouverts à l’action de l’Esprit Saint. C’est pourquoi nous pouvons dire que c’est une œuvre de Dieu en nous — dans les épreuves et dans les purifications de la vie — et cette œuvre de Dieu et de l’Esprit Saint conduit à une grande joie, à une vraie paix. N’ayons pas peur, ouvrons les portes de notre cœur à l’Esprit Saint pour qu’il nous purifie et nous fasse avancer sur ce chemin vers la joie en plénitude.
Je salue cordialement les personnes de langue française. Frères et sœurs, profitons de ce temps de carême pour entendre cette soif de Dieu qui habite en nous. Poursuivons notre chemin de libération, à travers les épreuves et les purifications de la vie, qui nous conduise à la gloire du ciel. Que Dieu vous bénisse.

 

MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – 21 avril 2011

6 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2011/documents/hf_ben-xvi_hom_20110421_coena-domini.html

fr si

MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – 21 avril 2011

Basilique Saint-Jean-de-Latran

Chers frères et sœurs,

«J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir!» (Lc22, 15). Par ces mots, Jésus a ouvert la célébration de son dernier banquet et de l’institution de la sainte Eucharistie. Jésus est allé au devant de cette heure, en la désirant. Au fond de lui-même, il a attendu ce moment où il se donnerait lui-même aux siens sous les espèces du pain et du vin. Il a attendu ce moment qui aurait dû être en quelque sorte les véritables noces messianiques: la transformation des dons de cette terre et le fait de devenir un avec les siens, pour les transformer et inaugurer ainsi la transformation du monde. Dans le désir de Jésus, nous pouvons reconnaître le désir de Dieu lui-même – son amour pour les hommes, pour sa création, un amour en attente. L’amour qui attend le moment de l’union, l’amour qui veut attirer les hommes à soi, pour ainsi réaliser entièrement le désir de la création elle-même: en effet, celle-ci est tendue vers la manifestation des fils de Dieu (cf. Rm 8, 19). Jésus nous désire, il nous attend. Et nous, le désirons-nous vraiment? Nous sentons-nous poussés intérieurement à le rencontrer? Désirons-nous ardemment sa proximité, devenir un avec lui, don qu’il nous fait dans la sainte Eucharistie? Ou bien sommes-nous indifférents, distraits, remplis d’autres choses? D’après les paraboles de Jésus sur les banquets, nous savons qu’il connaît la réalité des places restées vides, la réponse négative, le désintérêt pour lui et pour sa proximité. Les places vides au banquet nuptial du Seigneur, avec ou sans excuses, sont pour nous, depuis longtemps désormais, non pas une parabole, mais une réalité présente, précisément dans ces pays auxquels il avait manifesté sa proximité particulière. Jésus savait aussi que des invités seraient venus, oui, mais sans être revêtus de l’habit nuptial – sans la joie de sa proximité, suivant seulement une habitude, et avec une tout autre orientation de leur vie. Saint Grégoire le Grand, dans une de ses homélies, se demandait: quel genre de personnes sont celles qui viennent sans habit nuptial? En quoi consiste cet habit et comment l’acquiert-on? Sa réponse est: ceux qui ont été appelés et viennent ont en quelque sorte la foi. C’est la foi qui leur ouvre la porte. Mais il leur manque l’habit nuptial de l’amour. Celui qui ne vit pas la foi en tant qu’amour n’est pas préparé pour les noces et il est jeté dehors. La communion eucharistique requiert la foi, mais la foi requiert l’amour, autrement elle est morte aussi comme foi.
À travers les quatre Évangiles, nous savons que le dernier banquet de Jésus, avant sa Passion, a été aussi un lieu d’annonce. Jésus a proposé encore une fois avec insistance les éléments fondamentaux de son message. Parole et Sacrement, message et don sont inséparablement unis. Cependant, durant son dernier banquet, Jésus a surtout prié. Matthieu, Marc et Luc utilisent deux mots pour décrire la prière de Jésus au moment central de la Cène: «eucharistesas» et «eulogesas» – «remercier» et «bénir». Le mouvement ascendant du remerciement et celui descendant de la bénédiction vont ensemble. Les paroles de la transsubstantiation font partie de cette prière de Jésus. Ce sont des paroles de prière. Jésus transforme sa Passion en prière, en offrande au Père pour les hommes. Cette transformation de sa souffrance en amour possède une force transformante pour les dons dans lesquels, à présent, il se donne lui-même. Il nous les donne afin que nous-mêmes et le monde soyons transformés. Le but véritable et dernier de la transformation eucharistique c’est notre transformation elle-même dans la communion avec le Christ. L’Eucharistie vise l’homme nouveau, le monde nouveau tel qu’il peut naître uniquement à partir de Dieu à travers l’œuvre du Serviteur de Dieu.
Grâce à Luc et surtout à Jean, nous savons que Jésus dans sa prière durant la Dernière Cène a aussi adressé des suppliques au Père – suppliques qui, en même temps, contiennent des appels à ses disciples d’alors et de tout temps. En cette heure, je voudrais choisir uniquement une supplique que, selon Jean, Jésus a répétée quatre fois au cours de sa Prière sacerdotale. Combien a-t-elle dû le préoccuper en son for intérieur! Elle reste constamment sa prière au Père pour nous: c’est la prière pour l’unité. Jésus dit explicitement que cette supplique n’est pas valable seulement pour les disciples présents à ce moment-là, mais qu’elle concerne tous ceux qui croiront en lui (cf. Jn 17, 20). Elle demande que tous soient un «comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, afin que le monde croie» (Jn 17, 21). L’unité des chrétiens ne peut se réaliser que si les chrétiens sont intimement unis à lui, à Jésus. Foi et amour pour Jésus, foi dans son être un avec le Père et ouverture à l’unité avec lui sont essentiels. Cette unité n’est donc pas seulement quelque chose d’intérieur, de mystique. Elle doit devenir visible, visible au point de constituer pour le monde la preuve que Jésus a été envoyé en mission par le Père. C’est pour cela que cette supplique a un sens eucharistique caché que Paul a clairement mis en évidence dans la Première Lettre aux Corinthiens: «Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, à plusieurs nous ne sommes qu’un corps, car tous nous participons à ce pain unique.» (1 Co 10, 16s). Avec l’Eucharistie naît l’Église. Nous tous nous mangeons le même pain, nous recevons le même corps du Seigneur, ce qui signifie qu’Il ouvre chacun de nous, au-delà de lui-même. Il nous rend tous un. L’Eucharistie est le mystère de la proximité et de la communion intimes de chacun avec le Seigneur. Et, en même temps, elle est l’union visible de tous. L’Eucharistie est Sacrement de l’unité. Elle parvient jusque dans le mystère trinitaire, et elle crée ainsi, en même temps, l’unité visible. Disons-le encore une fois: elle est la rencontre très personnelle avec le Seigneur et, toutefois, elle n’est jamais seulement un acte individuel de dévotion. Nous la célébrons nécessairement tous ensemble. Dans chaque communauté, le Seigneur est présent de manière totale. Mais il est un seul dans toutes les communautés. C’est pourquoi les paroles: «Una cum Papa nostro et cum Episcopo nostro» font nécessairement partie de la prière eucharistique de l’Église. Ce n’est pas un ajout extérieur à ce qui se produit intérieurement, mais une expression nécessaire de la réalité eucharistique elle-même. Et nous mentionnons le Pape et l’Évêque par leur nom: l’unité est tout-à-fait concrète, elle porte des noms. Ainsi l’unité devient visible, elle devient signe pour le monde et elle établit pour nous-mêmes un critère concret.
Saint Luc a conservé pour nous un élément concret de la prière de Jésus pour l’unité: «Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment; mais moi j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères» (Lc 22, 31s). Aujourd’hui nous constatons de nouveau avec douleur qu’il a été concédé à Satan de cribler les disciples, de manière visible, face au monde entier. Et nous savons que Jésus prie pour la foi de Pierre et de ses successeurs. Nous savons que Pierre qui, à travers les eaux agitées de l’histoire va à la rencontre du Seigneur et risque de couler, est toujours à nouveau soutenu par la main du Seigneur et guidé sur les eaux. Mais après suit une annonce et une tâche. «Toi donc, quand tu seras revenu…»: Tous les êtres humains, excepté Marie, ont continuellement besoin de conversion. Jésus prédit à Pierre sa chute et sa conversion. De quoi Pierre a-t-il dû se convertir? Au début, lors de son appel, effrayé par le pouvoir divin du Seigneur et par sa propre misère, Pierre avait dit: «Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur!» (Lc 5, 8). À la lumière du Seigneur, il reconnaît son imperfection. C’est précisément ainsi, dans l’humilité de celui qui se sait pécheur, qu’il est appelé. Il doit toujours retrouver à nouveau cette humilité. Près de Césarée de Philippe, Pierre n’avait pas voulu accepter que Jésus ait à souffrir et à être crucifié. Cela n’était pas conciliable avec l’image qu’il se faisait de Dieu et du Messie. Au Cénacle, il n’a pas voulu accepter que Jésus lui lave les pieds: cela n’allait pas avec son idée de la dignité du Maître. Au Jardin des Oliviers, il a frappé de son glaive. Il voulait démontrer son courage. Cependant, devant la servante, il a affirmé ne pas connaître Jésus. À ce moment-là, cela ne lui semblait qu’un petit mensonge, pour pouvoir rester près de Jésus. Son héroïsme s’est effondré à cause d’un jeu mesquin pour une place au centre des évènements. Nous tous nous devons toujours à nouveau apprendre à accepter Dieu et Jésus Christ tel qu’il est, et non tel que nous voudrions qu’il soit. Nous aussi nous avons du mal à accepter qu’il se soit lié aux limites de son Église et de ses ministres. Nous non plus nous ne voulons pas accepter qu’il soit sans pouvoir en ce monde. Nous aussi nous nous cachons derrière des prétextes, lorsque notre appartenance au Christ devient trop coûteuse et trop dangereuse. Nous tous nous avons besoin de conversion pour accueillir Jésus dans son être-Dieu et son être-Homme. Nous avons besoin de l’humilité du disciple qui observe la volonté du Maître. En cette heure, nous voulons le prier de nous regarder nous aussi comme il a regardé Pierre, au moment propice, avec ses yeux bienveillants, et de nous convertir.
Pierre, le converti, est appelé à affermir ses frères. Ce n’est pas un fait extérieur que cette tâche lui soit confiée au Cénacle. Le service de l’unité a son lieu visible dans la célébration de la sainte Eucharistie. Chers amis, pour le Pape c’est un grand réconfort que de savoir qu’au cours de chaque Célébration eucharistique, tous prient pour lui; que notre prière s’unit à la prière du Seigneur pour Pierre. C’est seulement grâce à la prière du Seigneur et de l’Église que le Pape peut accomplir sa tâche d’affermir ses frères – de paître le troupeau de Jésus et de se porter garant de cette unité qui devient témoignage visible de la mission de Jésus de la part du Père.
«J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous». Seigneur, tu nous désires, tu me désires. Tu désires te donner toi-même à nous dans la sainte Eucharistie, t’unir à nous. Seigneur, suscite aussi en nous le désir de toi. Renforce-nous dans l’unité avec toi et entre nous. Donne à ton Église l’unité, afin que le monde croie. Amen.

 

HOMÉLIE (05-04-2020) PÈRE ERMES RONCHI

3 avril, 2020

http://www.lachiesa.it/calendario/omelie/pages/Detailed/48405.html

fr

HOMÉLIE (05-04-2020) PÈRE ERMES RONCHI

(traduction google de l’italien)

La croix est le greffage du ciel sur la terre Nous entrons dans un temps qui nous fait réfléchir. «Tous les hommes vont à Dieu dans leurs souffrances, crient au secours, demandent du bonheur et du pain, le salut de la maladie, de la mort. Tout le monde aussi, tout le monde, chrétiens et païens … Les hommes vont à Dieu dans sa souffrance, ils le trouvent pauvre, outré, sans toit ni pain, épuisé … Les chrétiens sont proches de Dieu dans sa souffrance « (D. Bonhoeffer) . Cette souffrance qui brûlait alors dans la passion de Jésus et brûle aujourd’hui dans d’innombrables croix où le Christ est encore crucifié dans ses frères. C’est la semaine de la proximité suprême, on y entre en tant que mineurs d’or. Même isolés chez eux, les chrétiens sont proches, ils sont en empathie proche des souffrances de ceux qui demandent la vie, la santé, le pain, le confort; voisins comme radiesthésistes de douleur et d’amour. Et là où ils respirent le mieux, c’est la croix. Je regarde le Calvaire et je vois un homme nu, cloué et mourant. Un homme avec ses bras grands ouverts dans une étreinte qui ne niera jamais. Un homme qui ne demande rien pour lui-même, ne crie pas dessus: se souvenir de moi, essayer de comprendre, me défendre … Il oublie, et s’inquiète pour ceux qui meurent à côté de lui: aujourd’hui, avec moi, vous serez au paradis. Le fondement de la foi chrétienne est la plus belle chose au monde: un acte d’amour total. La beauté suprême de l’histoire est celle qui s’est produite hors de Jérusalem, sur la colline, où le Fils de Dieu se laisse clouer, pauvre et nu comme un ver dans le vent, pour mourir d’amour. La croix est le greffage du ciel sur la terre, le point où l’amour éternel pénètre dans le temps comme une goutte de feu et s’enflamme. Et il écrit son histoire avec l’alphabet des blessures, le seul qui ne trompe pas. D’où l’émotion, l’étonnement, la chute amoureuse. Après deux mille ans, nous nous sentons aussi comme des femmes, le centurion, le voleur, qui est l’attraction suprême de Dieu sur la croix. Je sais aussi que je ne comprends pas. Mais au final je ne suis pas convaincu par un raisonnement subtil, mais par l’éloquence du cœur: « Pourquoi la croix / le sourire / la punition inhumaine? / Croyez-moi / c’est si simple / quand on aime » (J. Twardowski). Vous qui avez sauvé les autres, sauvez-vous si vous êtes le Christ. Tout le monde dit, patrons, soldats, voleurs: faites un miracle, conquérez-nous, imposez-nous, descendez de la croix, et nous vous croirons. N’importe quel homme, n’importe quel roi, s’il le pouvait, descendrait de la croix. Lui, non. Seul un Dieu ne descend pas du bois (D.M. Turoldo), notre Dieu, car ses enfants ne peuvent pas en descendre. Je cherche ici une proximité absolue: de Dieu à moi, de moi à Dieu; sur la croix tremble cette passion de communion qui a la force de faire trembler la pierre de chacun de nos sépulcres et de vous laisser respirer le matin.

1...34567...79