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Le ciel, la fête de tous les saints

31 octobre, 2012

http://www.saint.germain.free.fr/homelies/c1998/C98toussaint.htm

Le ciel, la fête de tous les saints    

(1 Novembre 1998 )     

Introduction : La fête de Toussaint est une proclamation osée de notre part . Tous ceux et celles qui sont disparus, morts, nous disons que nous les voyons glorifiés de la vie en Dieu. Il y a donc un autre monde qui est là, tout près de nous, séparé seulement par la notion de temps. Car ils sont dans le monde de l’Eternel. Nous invoquons le Seigneur. Qu’il nous vienne en aide et réalise en nous la communion avec ce monde, lui, le Vivant, le Ressuscité.

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Nous sommes vers la fin de l’année liturgique. La liturgie suit le rythme du temps de notre calendrier, et nous fait découvrir le projet que Dieu a réalisé dans notre vie . La fête de Tous les Saints que nous célébrons aujourd’hui est la reconnaissance de cette action de Dieu réalisée dans la vie de tous les hommes. Nous Lui rendons grâce de tous ses bienfaits qui nous font vivre la dignité des enfants de Dieu.
La Fête de la Toussaint est une immense invitation à ne pas nous contenter de regarder « l’envers » du monde, à partir d’en bas…Il n’y a pas pour nous que du mal, de la souffrance ou de la mort. Aujourd’hui, nous est révélé l’endroit, le monde vu du côté de Dieu, vu d’en haut : un coin du ciel est déchiré… Et ce que nous serons est déjà apparu à travers la vie de tant de personnes qui sont parties avant nous …Tout sera plus beau encore. Aucun regard humain ne peut voir ce que Dieu a préparé pour ses enfants, dit St Paul.
Le but de l’univers n’est pas la mort, mais la vie, la joie: » Bienheureux, bienheureux ! Le Christ ne cesse de nous le redire. St Jean a vu dans son apocalypse la multitude de gens qui sont venus laver leur robe dans le sang de l’agneau. L’image est forte. Le sang est la vie. Et Dieu a l’envie de nous fait entrer dans sa vie en Jésus son Fils.
Dans la lumière du Christ Ressuscité, la fin représente le sommet qui dépasse la vie et le temps. Nous sommes amenés vers le sommet de l’histoire avec le Christ dans sa gloire. La « Préface » qui va nous introduire dans la prière eucharistique explique pour nous la vision de l’Apocalypse: » Nous célébrons aujourd’hui la cité du ciel, notre mère la Jérusalem d’en haut: c’est là que tous ceux et celles qui sont partis avant nous, rassemblés devant toi chantent sans fin ta louange. « 
La fête de la Toussaint nous plonge ainsi en ce monde merveilleux de demain. où tous sont là. Ils sont comme des reflets du Christ Ressuscité. C’est grâce à Lui qu’ils sont présents devenus comme l’Eglise nous les montre. Grâce à eux l’Evangile est annoncé, proclamé dans le monde. Ils sont la catéchèse vivante de l’Evangile. Par leur comportement, ils laissent voir Dieu agir dans la vie des hommes.
Combien de saints obscurs avons-nous connus ici-bas ? Nous les avons côtoyés sans même nous en apercevoir. Ils ne sont pas d’abord des baptisés, ni des pratiquants, comme l’on dit, mais ceux-là mêmes que le Christ a trouvés sur son chemin. Nous pouvons les trouver aussi sur nos chemins : des pauvres, des sans-histoires, des gens qui pleurent, des persécutés, des opprimés, par les autres ou par la vie, des petits, des humbles. Ils sont félicités aujourd’hui, dans l’Evangile par le Christ. Les « Béatitudes » leur apportent la grande nouvelle que dès maintenant , ils sont des fils et des filles de Dieu, ils sont les bien-aimés du Père.
La fête de la Toussaint nous fait sentir le ciel qui est là, à notre côté. Nous savons que le vide qui nous entoure, est en fait chargé de tant d’images et de sons. C’est le monde de la multimédia de notre temps. Et nous savons aussi que, dans le silence de la vie, c’est tout le ciel qui est là. Là où est Dieu, là est notre ciel. Il suffit de nous mettre en présence de Dieu pour nous retrouver avec tous ceux et celles qui sont partis avant nous.
Saint Jean nous dit l’expérience qu’il a vécue avec ce frisson de bonheur : »Mes bien-aimés, voyez comme il est grand l’amour dont le Père nous a comblés, que nous soyons appelés enfants de Dieu : et nous le sommes ! »
La sainteté c’est répondre à l’envie de Dieu d’être avec nous. Ce projet de Dieu est dans l’épaisseur même de notre existence. Comme dans l’Apocalypse, la multitude qui vient se laver dans le sang de l’agneau, nous venons fonder notre espérance sur le Christ et retrouvons notre transparence comme lui-même est transparence. Pureté de source qui devient miroir où notre visage et celui de Dieu ne font qu’un. .

Sur la terre comme au ciel – Une semaine après avoir fêté le Dieu Trinité

7 juin, 2012

http://www.esprit-et-vie.com/article.php3?id_article=2799

Sur la terre comme au ciel - Une semaine après avoir fêté le Dieu Trinité 

P. Bernard Xibaut

Lectures : Genèse 14, 18-20 ; Psaume 109 ; 1 Corinthiens 11, 23-26 ; Luc 9,11-17 (année C)

Esprit & Vie n°223 – mai 2010, p. 38-39.

Une semaine après avoir fêté le Dieu Trinité – Père, Fils et Saint-Esprit -, nous retrouvons Jésus, apparemment seul, au milieu de la foule de ceux qui le suivent. Pourtant, ce n’est pas sa propre gloire qu’il annonce, mais le Règne de Dieu son Père. Et nous pouvons sentir la présence de l’Esprit Saint à travers la bénédiction qu’il prononce en partageant le pain. N’en va-t-il pas de même lorsque, dans la première prière eucharistique, nous demandons à Dieu de sanctifier les offrandes « par la puissance de [sa] bénédiction », autrement dit, de son Esprit !
Il semble capital d’établir le lien entre le verset qui ouvre le passage d’évangile et celui qui le conclut : Jésus a passé la journée à parler du Règne de Dieu. Or, les pages de l’Évangile de Luc qui précèdent nous ont suffisamment annoncé en quoi consiste ce Règne. Au chapitre 4, dans la synagogue de Nazareth, nous avons entendu que la Bonne Nouvelle était annoncée aux pauvres. Nous avons ensuite assisté à plusieurs scènes dans lesquelles Jésus a guéri des personnes affectées de diverses maladies corporelles (un lépreux, un homme à la main paralysée, un esclave moribond, etc.) et spirituelles (un homme possédé par des démons). Par ailleurs, au chapitre 6, Jésus a proclamé les béatitudes, en direction notamment de ceux qui ont faim. La nourriture par laquelle il va à présent rassasier la foule fait nécessairement écho à sa prédication d’un Royaume où tous mangent à satiété.
Le Royaume en partage
La réaction des Douze pourrait être qualifiée de décevante si elle ne rejoignait pas de manière évidente le bon sens que nous pratiquons habituellement : n’est-il pas plus judicieux de renvoyer chacun à sa propre recherche de nourriture ? Quelques uns – toujours les mêmes – seront accueillis par les « notables » des villages et des hameaux des environs et ils y trouveront un repas plantureux. D’autres, chanceux, disposent dans la région de parents ou d’amis – car les clans sont vastes et la région peu étendue : ceux-là aussi mangeront ce soir à leur faim et ils dormiront à l’abri. Une autre partie de la foule – pas forcément la plus importante – ne bénéficiera pas de la légendaire hospitalité orientale, mais, à force de mendier avec insistance, ces derniers finiront par obtenir un quignon de pain de la part des habitants de la contrée. Mais ils auront probablement attendu longtemps avant de l’obtenir et ils ne seront sans doute pas rassasiés lorsqu’ils l’auront mangé.
En fait, la suggestion des disciples revient à renvoyer aux règles habituelles d’une société dans laquelle règnent les inégalités, en fonction des positions sociales, des solidarités familiales et… de la chance ! Jésus s’élève contre cette situation en éveillant les Douze à une responsabilité qui leur était totalement étrangère : « Donnez-leur vous-mêmes à manger. » Jamais les disciples de Jésus n’auraient pu imaginer qu’ils avaient leur part à prendre dans un problème qui, selon eux, ne les concernait pas. Disposant de cinq pains et de deux poissons, ils pensaient être exemptés de recherche de nourriture, puisqu’ils avaient prévu ce qui convenait pour eux et pour leur maître… Une grande leçon de cet évangile est probablement la prise de conscience de notre solidarité vis-à-vis de tous les hommes. La faim n’est pas seulement le problème des affamés, mais elle doit être combattue par l’humanité entière.
Fort heureusement pour les Douze, Jésus les dispense de pénibles recherches dans les environs, prenant les choses en mains. Tout au plus leur demande-t-il de participer à l’installation des cinq mille hommes par groupes d’une cinquantaine, ce qui fait cent groupes, si l’on compte bien. Les disciples s’exécutent sans rechigner, visiblement plus à l’aise dans ce rôle d’organisation de la communauté que dans celui, plus humble, du ravitaillement : il est plus facile de diriger que de servir, même dans l’Église…
Il ne faut pas être grand exégète pour remarquer la structure eucharistique que saint Luc a donnée à la suite du récit, qui apparaît spécialement dans les actions qui se succèdent. La comparaison entre Luc 9, 16 et 22, 19 (récit de l’institution) montre que les trois expressions « prendre », « rompre » et « donner » le pain s’y retrouvent. Une nuance apparaît cependant entre le « prononcer la bénédiction » du chapitre 9 et le « rendre grâce » du chapitre 22. Enfin, la mention des yeux levés vers le ciel est propre au récit de la multiplication.
La proximité de vocabulaire désigne clairement la dimension eucharistique de l’évangile de cette Fête-Dieu, qui nous invite à passer des réalités du monde ordinaire, où chacun est livré à lui-même pour sa nourriture et où tous ne mangent pas à leur faim, à celles du Règne de Dieu, où tous sont rassasiés par tous, et il reste encore douze paniers !
Les yeux au ciel
Glissons ici un regret sur la disparition de la mention des « yeux levés » dans les prières eucharistiques contemporaines, alors qu’elle figure dans le Canon romain, déjà cité plus haut. Sans doute a-t-on jugé que ce déplacement des yeux, demandé au prêtre, sentait le compassé et l’artificiel. Pourtant, ce mouvement du regard pourrait bien nous livrer la clef de tout le récit car Jésus, dans sa mission, procède à un va-et-vient permanent de son regard entre la terre et le ciel.
Parce que son regard est tourné habituellement vers la terre, il voit la difficulté de la foule, renvoyée sans nourriture alors que le jour commence à baisser. Il comprend que tous ne seront pas exaucés dans leur demande d’accueil et de nourriture. Il se préoccupe du sort de ceux qui le suivent. Il reste attentif à leurs besoins humains.
Mais Jésus lève aussi souvent les yeux vers le ciel, en même temps qu’il oriente ses pensées vers son Père. Il contemple le Règne de Dieu dans sa plénitude à venir, ce Règne dont il annonce les premiers surgissements. Voyant sur terre ce que produit l’individualisme et son cortège d’inégalités, il contemple au ciel ce que produisent le partage et la solidarité. Il peut alors prier comme il apprendra à ses disciples à le faire (Lc 11) : « Fais venir ton Règne. » À quoi saint Matthieu ajoute opportunément « sur la terre comme au ciel ».
Lisant cet évangile au jour où nous célébrons le mystère du Christ livré en nourriture dans son Corps et dans son Sang, sachons communier au souci de Jésus que notre terre reflète davantage le ciel de son Père. Rendons grâce que tant d’hommes et de femmes, depuis deux mille ans, aient été rassasiés spirituellement par le don de l’eucharistie. Ne cessons pas de porter le souci du monde brisé qui est le nôtre. Continuons de porter nos regards vers les autres, mais veillons à lever régulièrement nos yeux vers le ciel.

Fête de la Sainte Trinité (3 juin 2012)

2 juin, 2012

http://www.bible-service.net/site/434.html

Fête de la Sainte Trinité (3 juin 2012)

Nul ne pourra jamais décrire parfaitement tout ce que Dieu fait pour lui. Dieu règne sur le ciel comme sur la terre (première lecture). Le psaume prolonge cette lecture, en affirmant que Dieu donne ses bienfaits à tous ceux qui se tournent vers lui (psaume). St Paul, dans l’épître aux Romains (deuxième lecture), témoigne de l’action d’un dieu Trinité en disant que c’est avec le Fils, dans l’Esprit, que les croyants appellent Dieu “ Abba, Père ! ” C’est de ce Dieu là dont les disciples sont appelés à témoigner à toutes les nations (Evangile)

• Deutéronome 4,32-34.39-40
Dans ce discours, alors que le peuple est en vue de la Terre promise, Moïse l’invite à relire son histoire pour voir si d’autres peuples pourraient se targuer de vivre la même relation d’amour avec leur Dieu. Car il est évident que le Dieu d’Israël n’est pas comme les autres dieux. Il n’est pas dans un lieu, enfermé dans une fonction. Il aime son peuple, il vient vers lui, il agit pour lui “ par la force de sa main et la vigueur de son bras ”, le libérant de l’esclavage et lui donnant une Loi pour vivre. Dans son discours, Moïse s’appuie essentiellement sur les événements du Sinaï. Ainsi, rester fidèle à Dieu en observant ses commandements est un gage de bonheur.

• Psaume 32
Continuant la lecture du Deutéronome, ce psaume parle du Dieu Créateur, du Dieu de l’Alliance : “ Le Seigneur a fait les cieux par sa parole, l’univers, par le souffle de sa bouche… ”. Deux manières d’affirmer la même conviction : tout ce qui existe vient de Dieu. La troisième strophe précise même : tout cela vient de l’amour de Dieu.
Ensuite, le psaume évoque le Dieu de l’Alliance : celui qui prie met son espoir en Dieu, car il sait que “ Dieu veille sur ceux qui le craignent ”. Celui qui prie peut être un individu, mais également un collectif, le peuple. La certitude de vivre dans l’Alliance avec Dieu est un appui, un bouclier, une force contre toute adversité. Lors, le psalmiste peut laisser éclater sa joie (dernière strophe), qui s’exprime elle aussi en termes d’Alliance, avec ce va-et-vient qui unit terre et ciel : “ Que ton amour soit sur nous comme notre espoir est en toi ! ”.

• Matthieu 28,16-20
Pour saisir cette mention de la Trinité lors de l’envoi des disciples à la fin de l’Évangile de Matthieu, il n’est pas inutile de remonter au baptême. En effet, pour les évangiles (sauf Jean), la vie publique de Jésus commence avec son baptême dans les eaux du Jourdain.  Et, lors de sa dernière apparition à ses disciples, après sa Résurrection, il leur commande d’aller enseigner toutes les nations, d’en faire des disciples et de les baptiser “ au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ”.
Le baptême de Jésus dans le Jourdain fut le moment de la première claire manifestation – dans le Nouveau Testament, et donc dans toute la Révélation – du Dieu Père, Fils et Esprit.
Lorsque Jésus descendit dans les eaux du fleuve, pour y être baptisé par Jean-Baptiste, comme le faisaient les foules qui descendaient de Jérusalem, l’Esprit descendit sur lui sous la forme d’une colombe, et il entendit la voix du Père disant :  “ Tu es mon fils bien-aimé, en qui j’ai mis mes complaisances. ” Et dans l’Évangile d’aujourd’hui, au moment de quitter ses disciples, il leur dit de baptiser les nations et de le faire “ au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit ”.
À travers tout son enseignement Jésus témoigne de la relation privilégiée qu’il entretenait avec Dieu qu’il appelait “ Père ” ; tout son être se trouve exprimé dans cette relation de Fils à Père.  Le Père se dit tout entier dans son Verbe;  et lorsque le Verbe incarné dit “ Abba, Père ”, il exprime dans ce simple mot tout son être de Fils.  Il n’est rien d’autre.  Jésus nous enseigne aussi tout au long de l’Évangile que son Père et Lui sont un, unis par l’Esprit d’amour qui leur est commun.  Et, finalement, il révèle que les chrétiens sont appelés à vivre la même relation.  Cet appel devient une réalité à travers le baptême et le don de l’Esprit. Au contact de Jésus, les disciples ont appris une nouvelle manière de connaître Dieu et de vivre avec lui.

Le Pourim ou carnaval juif

20 février, 2012

http://judaisme.sdv.fr/perso/stauben/purim/carnaval.htm

Le Pourim ou carnaval juif

Son origine historique. – Le livre d’Esther ou la Meghila. – Le Pourim en Alsace. – La lecture de la Meghila.- Les marteaux. – La matinée du Pourim. -  L’après-midi ; le Schlach Moness. – Le repas du soir. – Un plat de rigueur. – Le personnel du repas. – Masques. – Deux représentations dramatiques.
Je voudrais, pour être le moins incomplet possible dans ces esquisses de mœurs, faire connaître au lecteur deux autres fêtes juives, moins solennelles, moins graves, beaucoup moins importantes que les précédentes fêtes et peu ou point observées d’ailleurs dans les villes ; et  pourtant ces deux fêtes ne laissent pas que d’être curieuses, moins encore à cause de leur origine historique que pour la manière toute patriarcale dont les célèbrent les pieuses populations de nos campagnes de l’Alsace.
L’une d’elles tombe à la fin, l’autre au commencement de l’hiver ou à peu près. Évoquons d’abord  les souvenirs de la première, celle du joyeux Pourim ou carnaval. Entendons-nous cependant, et n’allons pas  confondre : il y a carnaval et carnaval. Le Pourim des juifs n’a absolument rien de commun avec le carnaval chrétien ; celui-ci, on le sait, n’est après tout qu’une sorte de réminiscence des Lupercales grecques et des Saturnales romaines tempérées par l’esprit moderne.  C’est une époque de gaieté exubérante et de folies  admises comme dédommagement, soi-disant, de l’austérité du carême, gaieté, folies, arrivant à leur apogée dans les trois jours qui précèdent le lugubre mercredi  des Cendres.

Son origine historique
Tout autre est l’origine de notre Pourim, tout différent son but.  Pourim est la fête anniversaire et commémorative de la délivrance des juifs, sous le règne d’Assuérus, alors que la belle et vertueuse Esther fit révoquer le sanglant édit que le cruel Haman avait arraché au roi contre tous les juifs répandus, depuis la Captivité, dans le vaste empire des rois Persans successeurs des rois de Babylone.
Cet événement, qui ne le connaît ? Grâce au livre d’Esther et grâce aussi aux vers immortels de Racine qui a mis en drame la chronique sacrée.

Le livre d’Esther ou la Meghila
Résumons et feuilletons un peu, tour à tour, cette chronique connue encore dans le rite juif sous le nom de Meghila, et voyons qu’elle nous apprend :
Haman l’Amalécite, devenu tout puissant, ne peut pardonner au juif Mardochée, un des nobles descendants la tribu de Benjamin, le dédain et le mépris dont il accable le ministre parvenu ; il calomnie donc auprès du roi les juifs ses nouveaux sujets, et obtient l’autorisation de les faire massacrer, à un jour donné, dans toute l’étendue de l’empire. Cependant Esther, la fille adoptive de Mardochée, avait remplacé sur le trône l’altière Vasthi, et le roi qui ignorait sa religion jusqu’à ce jour, l’aimait tendrement.
«Et Mardochée, ayant appris ce qui avait été arrêté, déchira ses vêtements, se couvrit d’un sac, répandit des cendres sur sa tête, et parcourut les rues en poussant des cris lamentables» (Esther 4:1).
«Il arriva ainsi devant le palais, mais vêtu comme il l’était, il ne lui était pas permis d’y pénétrer» (Esther 4:2).
«Et Mardochée fit dire à Esther ce qui s’était passé et lui communiqua une copie du décret de proscription rendu contre les juifs de Suze, et lui ordonna d’entrer chez le roi afin de le supplier et de lui demander grâce pour son peuple» (Esther 4:8).
Mais il n’était permis à personne de pénétrer auprès du prince sans en avoir été mandé, et si on pénétrait néanmoins, on était condamné à mort, à moins qu’à l’instant même, en signe de grâce, il ne tendît son sceptre vers cette même personne. Esther hésita donc un instant mais Mardochée lui ayant fait comprendre qu’elle devait tout risquer pour sauver les siens,
«Esther fit  répondre à Mardochée  : Va, rassemble tous les juifs de Suze, qu’ils jeûnent à mon intention…, je jeûnerai de  même avec mes filles, et ainsi préparée, j’irai trouver le roi, contente de mourir, si je dois mourir» (Esther 4:16).
Esther parut devant le roi et obtint grâce à ses yeux  ; elle l’instruisit de tout, démasqua les odieuses menées d’Haman que le roi fit pendre au gibet même préparé par Haman pour Mardochée, et le terrible édit fut révoqué.
«Et ils firent appeler les écrivains du roi qui écrivirent tout ce que Mardochée ordonna concernant les juifs, aux pachas et gouverneurs des cent vingt-sept provinces de l’empire, à chaque pays suivant son langage et aux juifs selon leur langue. Et l’on écrivit au nom du roi, on scella les dépêches, et on les fit porter par des courriers montés sur des chevaux, des mulets ou des dromadaires» (Esther 8:9-10).
L’ordre de suspendre l’exécution était arrivé partout à temps. Et le quatorzième jour du douzième mois, du mois d’Adar (février-mars), jour fixé pour l’exécution ainsi arrêtée,
«Les juifs firent des illuminations, des  fêtes joyeuses, des réjouissances et des festins… et s’envoyèrent réciproquement des présents…, et firent des dons aux pauvres. Car Haman, fils d’Hamdatha, de la race d’Agag, persécuteur de tous les juifs, avait eu le projet de les exterminer tous, et il avait jeté des pour c’est-à-dire des sorts  pour connaître le jour qui lui serait le plus favorable pour les anéantir…, c’est pour cela que ces jours de fêtes s’appellent Pourim» (Esther 9:22-26).
Et l’on comprendra maintenant pourquoi on appelle encore le Pourim des juifs, assez improprement cependant, du nom de carnaval. On a voulu marquer ainsi, par ce rapprochement, toute la joie et toutes les réjouissances qui caractérisent le Pourim.

Le Pourim en Alsace

Nous sommes dans nos villages de l’Alsace ; aujourd’hui c’est le 14  du mois d’Adar, veille du Pourim. Hommes, femmes et enfants, tout le monde jeûne dans la communauté en souvenir du jeûneauquel s’étaient livrés les juifs de Suze, avec Mardochée et Esther pendant que la juive devenue reine, se préparait à obtenir du sévère Assuérus une audience favorable. Heureusement pour nos jeûneurs villageois que la journée du 14 Adar, qui correspond à fin février ou au commencement de mars, est assez courte ; et pourtant on l’a passablement allongée, attendu qu’il n’est permis de rompre le jeûne qu’une heure après la nuit close. Et pourquoi cela ? Parce que l’on inaugure le Pourim par la lecture faite en pleine synagogue, du livre d’Esther ; cette lecture ne peut commencer que lorsque le jour a complètement disparu, et elle dure au moins une bonne heure.
Entrons au temple. La kehila (communauté) tout entière est assemblée. Des cierges dits cierges de Pourim éclairent l’édifice sacré. Les hommes sont debout derrière leurs pupitres ; les femmes, dans des tribunes à elles réservées ; tous les gamins de la kehila sont rangés sous les yeux de leurs parents et tiennent dans leurs mains de superbes marteaux de bois tout frais fabriqués. En face du hazan, sur l’estrade sacrée se trouve étendu un rouleau de parchemin que le schamess déroulera tout à l’heure devant lui, au fur et à mesure qu’il en sera besoin. Sur ce parchemin se trouve écrit en caractères manuscrits le livre d’Esther appelé encore Méghila. Chacun des fidèles a devant soi un rouleau du même genre.

La lecture de la Meghila

Soudain le ministre-officiant, sur un ton particulier et traditionnel, commence la lecture. Avec quel art le hazan sait interpréter les passages les plus saillants ce curieux et piquant récit ! Avec quel talent il en sait rendre toutes les intentions, toutes les nuances ! semblable en cela à quelque excellent acteur commentant de la voix et du geste les moindres paroles de son auteur. Arrive-t-il à l’endroit de la Meghila où, en parlant du festin donné par Assuérus à tous les grands de la cour, l’auteur sacré raconte que le vin le plus généreux circulait dans les coupes d’or, et que «ces coupes étaient plus riches les unes que les autres» (Esther 1:7), la voix du hazan, en prononçant ces derniers mots, devient triste et mélancolique. Ces coupes en effet n’étaient-elles pas celles-là mêmes, que les rois d’Assyrie avaient autrefois pillées dans le temple de Jérusalem ?
Avec quelle malice, au contraire, et quelle verve comique, il lit la scène fameuse de la déconvenue d’Haman, scène qui devrait servir de leçon à tous les courtisans : Le roi avait trop longtemps laissé sans récompense le dévouement du juif Mardochée, qui l’avait jadis soustrait aux coups de deux conspirateurs. Il mande Haman, ministre favori et tout-puissant, pour lui demander ce qu’Assuérus pourrait bien faire pour celui qu’il voudrait combler du plus insigne honneur.

«Haman se dit, dans son coeur : « Qui le roi peut-il songer d’honorer ainsi, si ce n’est moi ?» Et il dit au prince : «L’homme que le roi veut honorer… il faut le revêtir des habits royaux, et lui faire monter le cheval que le roi montait lui-même le jour de son couronnement, et le grand maréchal du palais conduisant le cheval par la bride, parcourra les places de Suze en criant : Voilà ce que l’on fait à l’homme que le roi veut honorer !» Et le roi dit à Haman : «Vite, prends les habits royaux et le cheval du roi, et fais ce que tu as dit au juif Mardochée, qui est assis à la porte du palais ; que rien ne manque à ce que tu as dit.» (Esther 6:6-10)
Haman, pris ainsi dans son propre piège, dut s’exécuter, sans mot dire. Et il faut entendre le hazan quand, remplissant le rôle plaisamment ridicule d’Haman, il crie, devant son public de village enthousiasmé, le fameux : « Voilà ce que l’on fait à l’homme que le roi veut honorer ! » (Esther 6:11)
Et plus loin, quand Haman, dénoncé au roi par Esther, veut profiter de l’absence momentanée du roi de la salle du festin, pour solliciter sa grâce aux pieds d’Esther, et que le roi, en rentrant soudain, s’écrie, en voyant Haman incliné vers le divan de la reine : «Comment, oserait manquer de respect à la reine dans mon palais ?» (Esther 7:8). Ces derniers mots, le hazan les prononce sur un ton de jalousie dédaigneuse et de despotisme conjugal, qui, dans cette grave réunion, fait sourire les maris et frémir les femmes.

Les marteaux

Est-ce là tout ? et cette lecture n’offre-t-elle pas d’autres incidents ? Il en est encore un surtout, qu’il est de notre devoir d’historien de mentionner. Vous n’avez pas oublié nos gamins armés de marteaux de bois ? Ils se sont tenus là, suivant avec la plus minutieuse attention la voix du hazan, et à chaque fois qu’il a prononcé le nom d’Haman, fils d’Amdatha, vous les auriez pu voir, comme un seul homme, se courber à terre et faire pleuvoir, sans trêve ni merci, au moins pendant cinq minutes, sur le plancher de la synagogue, d’innombrables coups de marteau. Tous ces coups sont censés retomber sur Haman ; c’est un tribut régulier que la jeunesse juive de nos villages lui paie, chaque année, avec la même monnaie. Et si depuis plus de deux mille deux cents ans qu’on lui inflige cette punition, l’ancien ministre d’Assuérus n’en a pas le dos aplati, il faut convenir que la faute n’en est pas à ses jeunes ennemis, et qu’il a les épaules solides.
La lecture de la Méghila terminée, on rentre chez soi pour rompre le jeûne, et le Pourim est commencé.

La matinée du Pourim

Le lendemain, à l’office du matin, le hazan relit la Méghila avec le même cérémonial et les mêmes inflexions de voix ; et les infatigables ennemis du fils d’Amalec, à certains moments donnés, frappent de plus belle le dos imaginaire d’Haman, et chantent en chœur avec le hazan, ce verset du livre d’Esther : «Et l’on pendit Haman au gibet qu’il avait préparé pour Mardochée» (Esther 7:10)

Avant de quitter le temple, la foule ne manque pas de passer devant l’arche sainte, où l’administration a eu soin de faire placer deux urnes portant, l’une, l’inscription de machzé hasekel, l’autre, celle de mavet Pourim. Dans la première, les fidèles déposent une valeur de 25 centimes à peu près ; cet argent sera envoyé aux pauvres israélites de la Palestine. Dans l’autre, chacun dépose une somme proportionnée à ses moyens ou à sa bonne volonté ; elle est destinée aux frères nécessiteux de la localité même. C’est encore et toujours le même esprit de solidarité que nous avons signalé et admiré ailleurs. Les Juifs, dans leurs jours de joie, n’oublient jamais leurs coreligionnaires malheureux !

Et, maintenant, règne partout le bruyant et joyeux Pourim. Aujourd’hui, bien que la loi ne défende aucun travail, on laisse là les affaires ; et en attendant le grand repas de Pourim, qui aura lieu le soir, et dont nous parlerons tout à l’heure, on a mille et mille moyens de passer gaîment la journée. De toutes les maisons juives, quelque modeste que soit la fortune de leurs habitants,s’exhalent de délicieux fumets de pâtisseries de toutes sortes ; les gâteaux, dits gâteaux de Pourim, consistent en babas, en beignets, en gaufres, dont un chacun fait son déjeuner. Puis, si le temps le permet, les jeunes gens sortent du village pour jouer au bouchon, tandis que les jeunes filles font un brin de  toilette et vont jacasser à droite et à gauche. Et la matinée se passe ainsi.

L’après-midi ; le Schlach Moness

L’après-midi est consacrée aux courses du schlach moness. Qu’est-ce que le schlach moness ? On va le voir. la meghila nous a appris que, dans l’excès de la joie que leur avait causée leur miraculeuse délivrance, les Juifs de Suze «s’envoyèrent réciproquement des présents», et le texte ajoute que Mardochée et Esther ordonnèrent  à tous les Juifs d’en agir ainsi à perpétuité, en commémoration du Pourim. Donc, cet ordre est encore aujourd’hui observé, à la lettre, dans nos villages. Voyez ces jeunes filles allant et venant, en habits de fête, et portant très gracieusement, dans leurs mains, des assiettes en faïence verte ou brune, recouvertes d’une blanche serviette. Ce sont les filles de la bourgeoisie qui apportent réciproquement, dans les familles, le schlach moness ou cadeaux. Ces cadeaux consistent en confiseries et bonbons de toute nature, fabriqués à Colmar ou à Strasbourg, selon qu’on demeure dans le Haut ou le Bas-Rhin, et arrivés tout frais, le matin même, au village.
Comme choix de cadeaux de ce genre, la tradition ne permet que très peu d’innovations, et les dons innombrables qui se font ainsi en ce jour, de bourgeois à bourgeois du moins, ne sont autre chose, si l’on veut me permettre cette expression, qu’une variation infinie sur un même thème ; ce thème est un gâteau de Savoie affectant tour à tour, avec plus ou moins de grandeur dans les proportions, la forme d’un melon à tranches bien marquées, d’un dôme, d’une étoile, d’un cercle, d’un cône ou d’une pyramide. Cet usage permet, on même temps, de faire, d’une manière délicate et sans les blesser, l’aumône à des pauvres d’une certaine classe : Ceux-ci, en vertu de la joie de commande régnant ce jour en Israël, font, dès la veille, provision d’un schlach moness à leur goût, le portent dans les maisons aisées, et, on rentrant, trouvent toujours sous la serviette de leur assiette quelques pièces d’argent. Les maîtresses de maisons y ont glissé cela après en avoir enlevé, non sans une feinte admiration, le schlach moness consistant, en général, en bonshommes, en pralines, en bottes ou souliers glacés à nœuds rouges, ou encore en bergères, ou en papillotes à devises. En retour de quoi les pauvres ont reçu leurs dons. C’est ce qu’a ordonné, on se le rappelle, le livre d’Esther.

Le repas du soir – Un plat de rigueur

Mais le jour a baissé, la nuit est survenue, et dans chaque maison aisée se prend et se donne maintenant le repas de Pourim. Il y a là comme deux actes bien distincts. – Dans le premier, on ne voit apparaître que la famille se régalant d’un dîner confortable. Au second, c’est le festin proprement dit. « Ils (Mardochée et Esther) ordonnèrent à tous les Juifs de faire en ce jour des festins» (Esther 9:22). Le second service ne se sert qu’à neuf heures, alors que sont arrivés les convives de rigueur : étrangers, amis, voisins et quelques personnages ­officiels faisant, ces derniers, leur apparition dans toutes les maisons riches.
A ce second service figure un plat indispensable, dit le Plat d’Haman, ou tout simplement le haman. Ce plat consiste on un morceau de bœuf fumé très gras et très gros. Tout bon croyant est tenu de le faire servir à sa table, et tout convive présent, d’en goûter. Le hazan, les aides-chanteurs, l’ins­tituteur, le schamess arrivent à un moment donné, s’attablent, rompent la croûte, choquent le verre, et ensuite se lèvent pour en faire autant dans maintes et maintes maisons. Comme fonctionnaires publics, ils n’appartiennent à personne en particulier, et se doivent à tout le monde.

Masques

A un certain moment aussi, la maison, dont les portes hospitalières restent toutes grandes ou­vertes, est envahie par un flot de jeunes gens déguisés. Ils viennent chanter une chanson de circonstance dont le pauvre Haman fait tous les frais ; puis avec l’autorisation du maître de la maison, quelques masques se détachent du groupe pour donner une représentation dramatique.

Deux représentations dramatiques

On se range et la troupe ambulante vous joue très proprement les deux pièces d’usage, l’une, toute de circonstance, l’autre, essentiellement juive. La première est l’histoire découpée en actes de la délivrance des Juifs par Esther et Mardochée et à laquelle la fête présente donne un singulier à-propos ; la seconde a pour sujet le sacrifice d’Isaac, selon le récit de la Bible. Les acteurs qui représentent les différents personnages historiques, se laissent aller à leur verve et à leur entrain. Il faut voir arriver Mardochée revêtu des insignes de la royauté, monté sur un camarade faisant le rôle du cheval, et précédé d’un autre, jouant Haman déconcerté et s’écriant en hébreu et d’une voix qu’étoffent la honte et le dépit :« Voilà ce que l’on fait à l’homme que le roi veut honorer !» (Esther 6:11).
Quel moment aussi que celui où Abraham étend la main pour immoler, avec un immense couteau de bois, son fils Isaac étendu sur une chaise et garrotté, et quand l’acteur représentant l’ange du Seigneur accourt, non pas du haut du ciel, mais du fond du corridor où il s’était tenu caché, quand il accourt avec ses ailes de papier blanc cousues aux épaules, et s’écrie, cette fois on patois judaïco-alsacien, et sur un. ton qu’il s’efforce de rendre solennel : «Ne porte pas la main sur ton fils, et lui fais aucun mal ; je suis convaincu que tu crains Dieu, puisque tu ne lui as pas refusé ton fils unique ! » (Genèse 22:12).

Les applaudissements alors retentissent dans la salle ; on régale la jeune troupe, on lui distribue d’immenses tranches d’Haman qu’elle dévore avec une sainte gloutonnerie ; les verres se vident et se remplissent aussitôt et la joie se prolonge jusqu’à une heure avancée dans la nuit, et ainsi se trouvent mises à exécution les recommandations finales de la Meghila :

«Mardochée ordonna à tous les juifs de célébrer tous les ans le quatorzième et le quinzième jour du douzième mois, en commémoration de ce qu’en ces jours, les Juifs ont eu raison de leurs ennemis ; que les jours de douleur se sont changés en jours de fête, et il recommanda d’en faire des jours de joie et de festin» (Esther 9:20-22).
Dans chaque maison, les festins ont été si abondants, qu’ils défraient largement encore le jour suivant ; de là, dans le pays, cette maxime : « Voulez-vous voyager ? Que ce soit au lendemain du Pourim. » En d’autres termes : ce jour-là vous trouverez partout en Israël, joyeuse humeur et bons reliefs.

22 février – Fête de la Chaire de St Pierre

20 février, 2012

http://missel.free.fr/Sanctoral/02/22.php

22 février – Fête de la Chaire de St Pierre

Sommaire :

  Historique
  Homélie de Saint Léon le Grand

Historique
Il convient ici de rappeler que la chaire est le siège éminent réservé à l’évêque lorsqu’il préside une assemblée. Il importe peu de savoir s’il y eut jamais, à Rome, une chaire regardée comme la vraie chaire de saint Pierre, mais il faut souligner que l’on y fit grand cas de chaires qui rappelaient le magistère suprême de Pierre que, dès le IV° siècle on célébrait par une fête particulière, Natale Petri de Cathedra, fixée au 22 février.
On se souvient que les anciens Romains, comme en témoignent les vestiges du Cœmeterium Maius, creusaient dans le tuf des sièges qui, aux banquets funéraires (refrigeria), symbolisaient la présence du défunt et sur lesquels ils déposaient de la nourriture. Jusqu’au V° siècle, les chrétiens, dans un tout autre esprit, poursuivirent ces usages et attribuèrent la nourriture déposée aux pauvres. Cette célébration pour les défunts se déroulait au 22 février ; les anciens gallicans qui refusaient toute festivité pendant le Carême qui, parfois, était déjà commencé le 22 février, la reportèrent au 18 janvier, ce qui explique les deux fêtes de la Chaire de saint Pierre dont un scribe besogneux du diocèse d’Auxerre fit maladroitement de la deuxième une fête de la Chaire de saint Pierre à Antioche. Ces antiques fêtes de la Chaire de saint Pierre furent remises à l’honneur par Paul IV, en 1547, qui, par la bulle Ineffabilis, décréta que l’on célébrerait désormais la chaire de saint Pierre à Rome le 18 février et celle d’Antioche le 22 février. La réforme du calendrier par Paul VI n’a laissé qu’une seule de ces fêtes, le 22 février, qui les conjugue toutes les deux.
Le meuble de bois et d’ivoire que renferme la Gloire du Bernin, loin de pouvoir être réputé la vraie chaire de saint Pierre, fut offert au pape Jean VIII par Charles le Chauve, sans doute pour son couronnement impérial, à la Noël 875 : comme on peut le voir sur la reproduction qui se trouve dans le musée historique de la sacristie, le buste de l’Empereur est représenté au centre de la partie transversale horizontale du tympan ; les plaques d’ivoire qui datent du troisième ou du quatrième siècle, grossièrement assemblées, montrent les douze travaux d’Hercule et des animaux fantastiques.
Alexandre VII Chigi ordonna que l’on mît la prétendue chaire de saint Pierre dans l’abside de la basilique (3 mars 1656) pour que les fidèles pussent la vénérer. Depuis 1667, la chaire de saint Pierre ne fut exposée qu’une seule fois, en 1867, pour le dix-huitième centenaire du martyre des saints apôtres Pierre et Paul.
Gloire du Bernin, faite de marbres colorés, de bronze et de stuc dorés, montre le trône pontifical qui, porté par les nuées, descend du ciel comme la nouvelle Jérusalem, au grand émerveillement des docteurs dont il est bon de souligner qu’ils ne la soutiennent pas mais en reçoivent les splendeurs. Portant le regard de haut en bas, le spectateur est progressivement emporté de la terre vers la lumière céleste ; les marbres sont la terre, où le regard est limité par les deux colonnes de marbre précieux, tandis que le ciel ne connaît aucune limite. Le lien entre la terre et le ciel se fait par les quatre docteurs émerveillés par la vérité que le Seigneur a révélée et qu’enseigne l’Eglise par le magistère de Pierre (saint Augustin, mitré, et saint Jean Chrysostome, tête nue, d’une part et, d’autre part, saint Ambroise, mitré, et saint Athanase, tête nue). La mître de saint Ambroise, comme celle de saint Augustin, mesure 1,80 mètre de haut. Sur le dossier de la chaire, le Seigneur communique à saint Pierre le pouvoir de paître ses ouailles. Au sommet de la chaire deux anges présentent la tiare et les clefs. Le Saint-Esprit, figuré sous la forme de la colombe, irradie le trône du pontife romain de lumière divine. La colombe est haute de 95 centimètres et ses ailes ont 1,75 mètre d’envergure.

Homélie pour l’anniversaire de son sacre épiscopal (IV 2-3)
Dans tout l’univers, Pierre seul est choisi pour présider à la vocation de tous les peuples, à la direction de tous les Apôtres et de tous les Pères de l’Eglise. Ainsi, bien qu’il y ait dans le peuple de Dieu beaucoup de prêtres et beaucoup de pasteurs, Pierre en personne les gouvernerait tous, alors que le Christ les gouverne aussi à titre de chef. Dieu a daigné remettre à cet homme une grande et admirable participation à sa puissance. Et s’il a voulu que les autres chefs aient quelque chose de commun avec lui, tout ce qu’il n’a pas refusé aux autres, c’est toujours par lui qu’il le leur a donné.
Le Seigneur demande à tous les Apôtres quelle est l’opinion des hommes à son sujet. Et ils disent tous la même chose aussi longtemps qu’ils exposent les doutes venus de l’ignorance humaine.
Mais lorsque le Seigneur exige de connaître le sentiment des disciples eux-mêmes, le premier à confesser le Seigneur est celui qui est le premier dans la dignité d’Apôtre. Comme il avait dit : « Vous êtes le Messie, le Fils du Dieu vivant », Jésus lui répondit : « Heureux es-tu, Simon, fils de Yonas, car ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révété cela, mais mon Père qui est aux cieux. » C’est-à-dire : Heureux es-tu parce que c’est mon Père qui t’a enseigné ; l’opinion de la terre ne t’a pas égaré, mais c’est une inspiration céleste qui t’a instruit ; et ce n’est pas la chair et le sang, mais celui dont je suis le Fils unique qui t’a permis de me découvrir.
« Et moi, dit-il, je te le déclare », c’est-à-dire : de même que mon Père t’a manifesté ma divinité, de même moi, je te fais connaître ta supériorité. « Tu es Pierre », c’est-à-dire : moi, je suis le rocher inébranlable, la pierre d’angle, qui fais l’unité de deux réalités séparées, le fondement tel que nul ne peut en poser un autre ; mais toi aussi, tu es pierre, car tu es solide par ma force, et ce que j’ai en propre par ma puissance, tu l’as en commun avec moi du fait que tu y participes.
« Et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et la puissance de la mort ne l’emportera pas sur elle. » Sur cette solidité j’érigerai un temple éternel, et la hauteur de mon Église, qui doit la faire pénétrer dans le ciel, s’élèvera sur la fermeté de cette foi.
Les puissances de l’enfer n’arrêteront pas cette confession, les liens de la mort ne l’enchaîneront pas : car cette parole est une parole de vie. Et de même qu’elle porte jusqu’au ciel ceux qui la confessent, de même plonge-t-elle dans les enfers ceux qui la refusent.
C’est pourquoi il est dit à saint Pierre : « Je te donnerai les clefs du Royaume des Cieux ; tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les Cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les Cieux. »
Sans doute, la possession de ce pouvoir a passé encore aux autres Apôtres et l’institution née de ce décret s’est étendue à tous les chefs de l’Eglise. Mais ce n’est pas en vain que ce qui doit être signifié à tous est confié à un seul. En effet, ce pouvoir est remis à Pierre personnellement, parce que Pierre est donné en modèle à tous ceux qui gouvernent l’Église.
Saint Léon le Grand

Le dynamisme de l’espérance chez saint Paul – pour la fête de la Conversion de saint Paul Apôtre

24 janvier, 2012

http://www.esprit-et-vie.com/breve.php3?id_breve=607

Édouard Cothenet

Le dynamisme de l’espérance chez saint Paul

Le mythe du progrès indéfini a fait son temps. Il suffit d’interroger les gens autour de soi, de regarder la télévision pour constater que les motifs d’inquiétude s’accroissent de jour en jour : réchauffement climatique, hausse des matières premières et surtout du pétrole, spectre de la famine dans de nombreux pays, sans parler de la violence qui gangrène nos sociétés. Programmé avant le cyclone de Birmanie et les tremblements de terre de Chine, le numéro de mars-avril 2008 de la revue Esprit s’intitule « Le temps des catastrophes ». Inutile de poursuivre… Dans cette situation, beaucoup ont tendance à se replier sur eux-mêmes, cherchant à se préserver un petit coin de bonheur tant que ce sera possible, sans trop s’occuper des autres.
Un tel constat donne à l’encyclique de Benoît XVI, Sauvés en espérance, toute son actualité. Qu’est-ce que la foi chrétienne peut nous apporter pour émerger du brouillard ambiant ? Peut-elle nous motiver pour apporter notre contribution à la lutte contre tous les facteurs de misère et pour un rapprochement entre les hommes ? L’en-tête du texte pontifical est tiré du chapitre 8 de l’épître aux Romains, le grand chapitre de Paul sur l’espérance, suscitée en nous par l’Esprit Saint. Au seuil de l’Année saint Paul, ne vaut-il pas la peine d’élargir le sujet en montrant non pas seulement comment Paul a parlé de l’espérance, mais plus encore comment il l’a vécue au cours d’une vie traversée de multiples épreuves ? [1]
L’espérance de Saul de Tarse, disciple de Gamaliel
Pour comprendre l’itinéraire spirituel de Paul il est très important de prendre en compte ses années de formation à Tarse, sa ville natale, et à Jérusalem où il s’adonna à l’étude de la Torah. Dans sa lettre aux Philippiens, l’apôtre nous donnera lui-même sa carte d’identité religieuse : « Circoncis le huitième jour, de la race d’Israël, de la tribu de Benjamin, Hébreu, fils d’Hébreux… » (Ph 3, 5.)
Dans une déclaration faite lors de son arrestation, Paul se présente comme citoyen romain, un titre fort envié à l’époque, et cela par naissance (Ac 22, 25-29), ce qui atteste que la famille de Paul occupait une place enviée dans la grande ville commerciale de Tarse, célèbre aussi par ses philosophes stoïciens.
La situation aisée de la famille de Saul n’enlevait rien à sa ferveur religieuse, puisque Paul se déclare fils d’Hébreux ; comprenons que l’hébreu ou l’araméen était la langue parlée à la maison, tandis que, dans les rapports sociaux ordinaires, le grec s’imposait comme la langue véhiculaire. Comme dans toutes les familles juives, la pratique du sabbat et des fêtes scandait le déroulement de l’année, tandis que l’observance stricte des lois alimentaires fixait la séparation d’avec les familles païennes (les goyîm). Converti, Paul se considérera toujours comme membre du peuple d’Israël. À ses détracteurs, il pourra répondre avec fierté : « Ils sont Hébreux ? Moi aussi ! Israélites ? Moi aussi ! De la descendance d’Abraham ? Moi aussi ! » (2 Co 11, 22.) On sait aussi quelle souffrance lui causera l’incrédulité de la majorité de ses compatriotes (Rm 9, 1 s.).
Vivant en diaspora, la famille du jeune Saul n’en devait pas moins être tendue vers la grande intervention de Dieu qui mettrait fin à une trop longue période d’humiliation. Donnons en exemple les Psaumes de Salomon, écrits au lendemain de la prise de Jérusalem par Pompée (63 av. J.-C.) par un Juif de la mouvance pharisienne. Ils expriment l’attente très vive d’un fils de David qui rétablira le royaume d’Israël.
Vois, Seigneur, et suscite pour eux leur roi fils de David, au temps que tu connais, ô Dieu,
pour qu’il règne sur Israël, ton serviteur.
Et ceins-le de force pour briser les chefs injustes.
Purifie Jérusalem des nations qui la foulent en les faisant périr ;
Qu’avec sagesse et justice il chasse les pécheurs de l’héritage,
Brise l’orgueil des pécheurs comme des vases de potier,
Fracasse avec un sceptre de fer toute leur suffisance,
Détruise les nations impies par une parole de sa bouche.
Qu’à sa menace les nations fuient devant sa face et qu’il réprimande les pécheurs
Par la parole de leur cœur ! (Psaume de Salomon 17.) [2]
Même s’il exprime d’ordinaire sa foi au Christ en d’autres termes, Paul n’oubliera pas le titre de « fils de David » qu’il reprend au début de sa lettre aux Romains : l’Évangile, que Dieu avait promis par ses prophètes dans les Écritures Saintes, concerne son Fils « issu selon la chair de la lignée de David… » (Rm 1, 2.)
Après ses années de formation scolaire à Tarse où il apprendra les règles fondamentales de la rhétorique si prisée en ce temps, Paul se rend à Jérusalem pour se mettre à l’école d’un maître pharisien très renommé, Gamaliel. Écoutons le récit que Paul lui-même a fait devant le Sanhédrin : « C’est dans cette ville que j’ai été élevé et que j’ai reçu aux pieds de Gamaliel une formation stricte à la Loi de nos pères. J’étais un partisan farouche de Dieu comme vous l’êtes tous aujourd’hui… » (Ac 22, 3.)
On ne peut dire si le jeune Saul a rencontré Jésus de Nazareth. Par contre il s’est élevé avec force contre la première communauté de Jérusalem, ainsi qu’il l’avoue lui-même : « Vous avez entendu parler de mon comportement naguère dans le judaïsme ; avec quelle frénésie je persécutais l’Église de Dieu et je cherchais à la détruire ; je faisais des progrès dans le judaïsme, surpassant la plupart de ceux de mon âge et de ma race par mon zèle débordant pour les traditions de mes pères. » (Ga 1, 13 s.)
Pour quelle raison le zèle de Paul s’est-il ainsi déployé contre les premiers chrétiens ? Ce ne pouvait être l’enseignement de Jésus, surprenant sans doute, mais explicable pour une part selon la tradition rabbinique, comme nous le rappelle Jacob Neusner [3]. Par contre semblait intolérable l’autorité souveraine que Jésus réclamait : « Moi, je vous dis… » Surtout la condamnation à la croix, l’abandon dans lequel le condamné avait été laissé par Dieu ne pouvait que signifier le rejet par Dieu du prétendu prophète de Galilée. Un texte du Deutéronome semble avoir joué un grand rôle dans la polémique antichrétienne. Paul y fait allusion dans son épître aux Galates : « Maudit quiconque pend au bois. » (Dt 21, 23 cité en Ga 3, 13.)
Le zèle de Paul s’inscrit dans la tradition juive, illustrée par Élie, le prophète de feu (1 R 19, 10). À l’époque de la persécution d’Antiochus Épiphane, Mattathias « fut embrasé de zèle pour la Loi » (1 M 2, 26) et déclencha la résistance armée contre les persécuteurs. Tel est le climat spirituel qui explique le zèle de Paul, un zèle sincère, mais mal éclairé. Sa propre expérience permettra à l’apôtre d’excuser le refus de ses frères de race : « J’en suis témoin, ils ont du zèle pour Dieu, mais c’est un zèle que n’éclaire pas la connaissance. » (Rm 10, 2.)

étude sur l’hymne de Saint Paul dans l’Epitre aux Philippiens pour la fête de la Conversion de saint Paul Apôtre

24 janvier, 2012

http://www.spiritains.org/pub/esprit/archives/art1941.htm

MORT ET RÉSURRECTION

(…’hymne de Saint Paul dans l’Epitre aux Philippiens :  » Jésus, de condition divine…  » Ph 2, 6-11)

P. Lucien Deiss

Nous entrons dans la contemplation du mystère pascal par une grande porte que nous ouvre le Père Lucien Deiss, l’hymne de Saint Paul dans l’Epitre aux Philippiens :  » Jésus, de condition divine…  » Ph 2, 6-11

Grégorien et Parole de Dieu
Jadis, avant la réforme liturgique de Vatican 11, un des sommets de l’Office de la semaine Sainte. culminait dans le chant de l’antienne  » Christus factus est pro nobis « . Quelques 120 voix jeunes, entre 20 et 25 ans, chantant le grégorien dans notre scolasticat avec une virile beauté: célébration d’une intense splendeur! La première partie de l’antienne, dans une mélodie grave et solennelle, invite à la contemplation du Christ  » obéissant jusqu’à la mort, et la mort sur la croix.  » La seconde partie, dans une envolée exultante et jubilante célèbre sa résurrection et sa seigneurie universelle:  » C’est pourquoi Dieu l’a exalté…  » Le grégorien se mettait au service du mystère, les neumes acclamaient la Parole de Dieu selon l’hymne aux Philippiens 2, 6-11.
Certaines communautés, depuis la réforme liturgique, n’ont pas pu sauvegarder la richesse de leur grégorien. En retour, elles ont récupéré un trésor d’une incomparable beauté celui de la Parole de Dieu dans son intégralité. Le texte en effet, d’une émouvante splendeur, est une hymne que Paul cite dans sa lettre aux Philippiens 2, 6-11. L’exégèse allemande l’appelle « Christuslied », chant du Christ . On la divise tout naturellement en deux parties, et les commentateurs subdivisent ordinairement chaque partie en trois strophes. La voici dans une traduction qui veut imiter autant que possible la superbe splendeur de l’original grec que cite Paul :
Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais lui-même s’anéantit prenant condition d’esclave, devenant semblable aux hommes.
Et s’étant comporté comme un homme il s’humilia plus encore, obéissant jusqu’à la mort, la mort sur une croix.
C’est pourquoi Dieu l’a exalté et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom
Afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse au plus haut des cieuxsur la terre et dans les enfers,
Et que toute langue proclame : le Seigneur, c’est Jésus Christ à la gloire de Dieu le Père.
Parole de Dieu et grégorien soulignent donc, chacun à sa manière, la révélation du mystère de Jésus.

Une des premières professions de foi
La lettre aux Philippiens date des années 53. La mort même de Jésus remonte aux années 30. Cette lettre fut donc rédigée quelques 23 années après la mort de Jésus. L’hymne représente ainsi une des premières professions de foi de la communauté primitive. C’est une merveille de simplicité et de force:  » Le Seigneur, c’est Jésus Christ à la gloire de Dieu le Père  » .
« Tel est le caractère fascinant et énigmatique de ce joyau de la foi chrétienne primitive qu’il n’a pas encore dévoilé tous ses secrets. » L’une des sources les plus proches semble être le quatrième chant du Serviteur de Yahvé selon Is 52,13 à 53,12. Ce chant célèbre le Serviteur, homme de douleur écrasé par la souffrance pour les péchés de son peuple, exalté ensuite comme son Fils pour son sacrifice (Is 53,10-12). On peut ajouter à cette source le thème du Nouvel Adam . Jésus est « de condition divine », littéralement « dans la forme de Dieu » (2,6). Or dans le vocabulaire biblique grec, le mot « forme » équivaut à « image ». Adam, créé à l’image de Dieu (Gn 1,27) cherche à devenir son égal. D’où sa chute. Jésus, lui qui est Fils de Dieu, n’a pas gardé jalousement le rang qui l’égalait à son Père . Il a choisi l’humilité et l’obéissance. D’où son exaltation.

En suivant le texte mot à mot
Le texte de l’hymne est particulièrement riche et dense. On donne ici, comme pour toucher le texte primitif, la transposition littérale de l’original grec.

Première partie ( 2,6-8)
Verset 6 :  » Lui (= le Christ) se trouvant en forme de Dieu, ne retint pas comme une proie d’être égal à Dieu « .
La lourdeur de la phrase s’explique par le désir d’évoquer l’image du Christ en tant nouvel Adam. Le premier Adam en effet se laissa séduire précisément par la tentation de devenir égal à Dieu:  » Vous serez comme des dieux  » (Gn 3,5), lui avait promis le démon. Le Christ , lui, réalise l’égalité avec Adam, mais au coeur même de son humilité. Nouvel Adam, il restaure ainsi l’image de Dieu en toute l’humanité.
Verset 7.  » Mais lui-même s’anéantit ( littéralement : se vida)  » prenant forme d’esclave, devenant semblable aux hommes . Quant à son aspect, il fut reconnu comme un homme.
 » Il s’anéantit  » nous comprenons : il renonça à ce qui lui appartenait en tant que Dieu, c’est-à-dire l’infinie splendeur de sa divinité. « Prenant forme d’esclave »: le mot  » esclave  » y rend servilement le grec  » doulos  » mais peut paraître trop fort dans le contexte. Il semble préférable de le rendre par le terme de  » serviteur  » On se souviendra que dans le vocabulaire de l’Ancien Testament, le serviteur peut resplendir d’une certaine noblesse en tant apparaît comme l’image et le remplaçant de son maître. C’est bien dans cette noblesse d’amour entre serviteur et maître qu’il faut comprendre la relation entre Jésus et son Père. C’est aussi dans cette noblesse d’amour que nous sommes nous-mêmes serviteurs du Père .
L’hymne affirme avec force la réalité de l’humanité de Jésus. Elle barre ainsi la route à tout docétisme. Cette hérésie, à l’oeuvre dès les premiers temps de l’Eglise, prétendait que Jésus n’était pas vraiment homme mais n’avait que la ressemblance humaine (dokein, ressembler). Elle pensait ainsi enlever le caractère scandaleux à l’incarnation et sauvegarder en même temps l’impassibilité divine: Dieu ne peut pas souffrir. Mais elle ruinait en même temps le mystère de l’incarnation de Dieu au milieu de la pauvreté humaine. Telle est la distance abyssale entre l’humilité de la condition humaine et l’infinie splendeur de la divinité. Telle est justement aussi l’infini de l’amour de Dieu pour nous.
Verset 8.  » il s’abaissa lui-même, devenant obéissant jusqu’à la mort, la mort de la croix. « 
Cette troisième strophe proclame l’humiliation extrême de Jésus et son obéissance parfaite dans sa mort sur la croix. Elle évoque l’image émouvante du Serviteur de Yahvé, homme de douleurs , familier de la souffrance (Is 53,43), portant le poids de nos péchés et souffrant pour nos fautes. L’affirmation fondamentale dans la théologie paulinienne selon laquelle c’est par le péché que souffrance et mort sont entrées dans le monde (Rm 5,12) n’est pas niée dans l’hymne, elle n’est simplement pas reprise. Il y a donc possibilité dans le message chrétien d’évoquer souffrance et mort simplement comme liées à la condition humaine.
Relevons enfin la beauté de l’adjectif hypèkoos, obéissant, du verbe
hypakouein obéir et du substantif hypakoè, obéissance. Ces mots sont formés du verbe akouein, du préfixe hypo, dessous, d’où  » écouter en penchant la tête  » (Bailly). L’obéissance de Jésus, comme l’obéissance chrétienne , n’est pas l’exécution servile de la volonté d’un maître intraitable, mais bien l’humble écoute de la Parole de Dieu en penchant la tête en signe de vénération et d’amour. Au coeur de sa souffrance, dans l’agonie de sa mort, cette obéissance d’amour fut la seule réponse de Jésus à son Père. Elle est aussi pour nous aujourd’hui notre seule réponse.

Deuxième partie ( 2, 9-11)
Verset 9 : « C’est pourquoi aussi Dieu l’a exalté et lui (a donné) par grâce le nom celui au-dessus de tout nom. »
La première partie présentait Jésus comme sujet de la phrase, on s’attendait donc à ce que la seconde partie proclamât sa résurrection. En fait, la résurrection, toujours présente, n’est même pas mentionnée ici. L’hymne préfère parler plutôt de l’exaltation de Jésus. Elle célèbre donc non pas simplement le retour à la vie du Seigneur , mais bien son entrée dans la gloire du Père. Elle souligne non pas un mérite du Christ, mais un don gratuit, une grâce (echarisato) du Père. Elle s’enracine dans l’amour merveilleux du Père. C’est lui, le Père, qui est au centre de sa louange.
Verset 10:  » Afin que dans le nom de Jésus tout genou fléchisse (dans ) les cieux, et les terres et sous les terres. « 
Dans l’univers biblique le nom n’est pas d’abord indication de l’identité de la personne, mais bien la révélation de ce qu’est sa personne devant Dieu. On peut donc affirmer ainsi que le nom de Dieu, comprenons : Dieu lui-même, habitait le Temple ( Dt 12,5). C’est pour cela que le fidèle de la Première Alliance évitait de prononcer le nom de Dieu pour ne pas se trouver comme par surprise devant le Dieu d’infinie majesté. Il remplaçait ce nom par des équivalences comme « Tout-Puissant » ou  » Très Haut « . Le nom « Yahvé » lui-même fut révélé a Moïse au Sinaï ( Ex 3,14) . Il représentait au coeur de l’Ancien Testament la richesse de son amour.
Le fidèle de la Nouvelle Alliance au contraire aime prononcer le nom de Jésus . Ce nom est proclamation de son salut. Il signifie en effet selon l’hébreu « Yéhoshua » : Yahvé sauve . C’est ce que l’ange avait expliqué à Joseph quand il lui avait demandé d’accueillir chez lui l’enfant de son épouse Marie :  » Tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés  » (Mt 15, 21).
Verset 11 : « Et que toute langue proclame que Seigneur (est) Jésus Christ pour la gloire de Dieu le Père
Le texte reprend l’acclamation de l’Eglise primitive qui est en même temps sa profession de foi: « Jésus Christ (est) Seigneur! » On notera l’inversion des mots  » Seigneur (est) Jésus Christ » pour souligner avec puissance la seigneurie de Jésus. Elle devait être familière à la communauté primitive ( cf. Col 2,9)
Cette finale renvoie à l’hymne citée en Is 45, 20-25. Dans cette hymne Dieu apparaît comme Dieu unique, juste et sauveur » devant qui se rassemblent toutes les nations et devant qui tout genou doit fléchir. Telle est bien la seigneurie de Dieu le Père, telle est également la seigneurie de Jésus.
Au coeur de la foi chrétienne se trouve donc la profession de foi en la seigneurie de Jésus « à la gloire de Dieu le Père ». Cette gloire du Père, c’est d’être reconnu et aimé , d’abord et essentiellement en tant que Père de Jésus, puis, à travers lui, de toute la création, donc de toute beauté, de tout amour, de toute joie.

En conclusion nous voyons là une hymne unique dans la littérature du Nouveau Testament, éblouissante de simplicité et d’optimisme théologique, parfaitement adaptée à notre époque ! Elle évite même de mentionner le péché de l’homme et du rachat de ce péché par la croix et préfère célébrer plutôt l’invitation de toute l’humanité, par le Christ, à la louange du Père. La résurrection ellemême de Jésus n’est pas décrite comme sa levée du séjour des morts après l’ignominie de la croix, mais bien comme son exaltation  » à la gloire de Dieu le Père.  » Aucune invitation non plus n’est faite pour présenter une prière de demande ni non plus une louange ou une action de grâce, mais il est évident que la seule réponse qui puisse être faite est cette louange ou cette action de grâce. Dieu est infinité d’amour. Toute son action dans le monde ne peut être qu’expression de son amour. Notre vie elle-même ne peut être que réalisation de ce à quoi nous avons été prédestinés, c’est-à-dire à être des vivantes  » louanges de sa gloire  » (Ep 1,5).
Nous réalisons cet idéal en marchant à la suite de Jésus, en vivant dans l’humilité devant le Père, en lui obéissant « jusqu’à la mort », c’est-à-dire en acceptant chaque instant de notre vie comme une offrande à son amour. Ainsi cette hymne s’incarne-t-elle au coeur de notre vie.

S. ANTOINE DU DÉSERT FÊTÉ AU VATICAN PAR LES ÉLEVEURS ITALIENS

17 janvier, 2012

http://www.zenit.org/article-29903?l=french

S. ANTOINE DU DÉSERT FÊTÉ AU VATICAN PAR LES ÉLEVEURS ITALIENS

La Nouvelle évangélisation et la gratitude envers le Créateur

ROME, lundi 16 janvier 2012 (ZENIT.org) – Les animaux s’invitent au Vatican à l’occasion de la fête de saint Antoine du désert (251-356), demain, 17 janvier : la Nouvelle évangélisation passe aussi par la gratitude envers le Créateur pour sa générosité dans toutes les bestioles dont parle la Genèse.
En effet, comme chaque année, l’Association italienne des éleveurs (Associazione italiana allevatori, AIA) proposera devant la Place Saint-Pierre – Piazza Pio XII – sa traditionnelle
exposition d’animaux de ferme.
Les éleveurs et leurs familles participeront à une messe votive en la basilique vaticane, puis un défilé à cheval remontera la Via della Conciliazione.
C’est le cardinal Angelo Comastri, archiprêtre de la basilique vaticane et vicaire du pape pour la Cité du Vatican, qui bénira ensuite participants et visiteurs.
Le site Internet de l’AIA rappelle les principales étapes de la vie du saint du désert de la Thébaïde d’Egypte, et cite sa vie romancée par Gustave Flaubert (1874).
« Bien qu’il n’ait pas laissé de règle écrite, Antoine fut vraiment l’initiateur du monachisme, souligne le site « Missel.free.fr ». Antoine voulut que sa tombe fût secrète pour que l’on n’honorât pas ses reliques, mais son corps fut retrouvé et transféré à Alexandrie, puis à Constantinople (vers 633) où une église fut bâtie sous son vocable. » Selon une légende la tombe du saint aurait été indiquée par des léopards.
Et parce qu’il a été un grand thaumaturge avant et après sa mort – notamment pour la guérison du « feu de saint Antoine », il a été un saint très populaire et on lui a confié la protection des personnes et des troupeaux contre les maladies.
A Rome, en la paroisse de Sant’Eusebio, près de Sainte-Marie-Majeure, les animaux sont acceptés à la messe ce jour-là – et le dimanche suivant tout le monde ne pouvant participer à une messe en semaine -: chiens, chats, lapins, oiseaux – perroquets -, et même poissons rouges. Une belle chorale, une liturgie soignée, une homélie suggestive accompagnent la célébration à laquelle participent des personnes qui parfois ne viendront qu’à cette messe-là pendant l’année, comme si ces petites créatures restaient le dernier lien visible entre eux et le Créateur.
A la fin de la célébration, sur le parvis de l’église, sous la bannière de saint Antoine, le diacre passe au milieu de la foule et bénit chaque animal avec de l’eau bénite : une façon de remercier le Créateur pour la beauté et la bonté de sa création. Ici, pas de danger d’idolâtrer ces compagnons donnés par la générosité du Créateur : chacun est à sa place.
Un parchemin au nom de l’animal est ensuite remis à chacun des participants en souvenir de cette bénédiction. Sous l’effigie de saint Antoine, on y lit deux citations bibliques: « Vous tous, fauves et troupeaux, bénissez le Seigneur : A lui, haute gloire, louange éternelle ! Et vous, les enfants des hommes, bénissez le Seigneur : A lui, haute gloire, louange éternelle ! » (Daniel 3, 81).
Et cette citation d’Evangile : « Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne moissonnent ni ne recueillent en des greniers, et votre Père céleste les nourrit ! Ne valez-vous pas plus qu’eux ? » (Matthieu 6, 26)
On a déjà vu là les chevaux des Carabiniers ou de la Garde de finance, et les chiens de la Protection civile. Parfois aussi, la fête se prolonge par une procession jusqu’au parc voisin, suivie d’un concours festif et populaire des animaux les plus sympathiques, comme ce couple d’Inséparables nommés « Point » et « Virgule », vainqueurs en 2010.
Et pour les retardataires ? Le curé ne refuse pas une bénédiction – dans la sacristie – au maître qui a manqué la messe : bénédiction pour lui et les siens avant même que pour son compagnon à quatre pattes. Et si la Nouvelle évangélisation passait aussi par ces gestes séculaires de la bénédiction des hommes et des bêtes, de tous les dons du Créateur ?

Anita Bourdin

4 octobre : Saint François d’Assise (Pape Benoît)

3 octobre, 2011

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100127_fr.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 27 janvier 2010

Saint François d’Assise

Chers frères et sœurs,

Dans une récente catéchèse, j’ai déjà illustré le rôle providentiel que l’Ordre des frères mineurs et l’Ordre des frères prêcheurs, fondés respectivement par saint François d’Assise et par saint Dominique Guzman, eurent dans le renouveau de l’Eglise de leur temps. Je voudrais aujourd’hui vous présenter la figure de François, un authentique « géant » de sainteté, qui continue à fasciner de très nombreuses personnes de tous âges et de toutes religions.
« Surgit au monde un soleil ». A travers ces paroles, dans la Divine Comédie (Paradis, chant XI), le plus grand poète italien Dante Alighieri évoque la naissance de François, survenue à la fin de 1181 ou au début de 1182, à Assise. Appartenant à une riche famille – son père était marchand drapier –, François passa son adolescence et sa jeunesse dans l’insouciance, cultivant les idéaux chevaleresques de l’époque. A l’âge de vingt ans, il participa à une campagne militaire, et fut fait prisonnier. Il tomba malade et fut libéré. De retour à Assise, commença en lui un lent processus de conversion spirituelle, qui le conduisit à abandonner progressivement le style de vie mondain qu’il avait mené jusqu’alors. C’est à cette époque que remontent les célèbres épisodes de la rencontre avec le lépreux, auquel François, descendu de cheval, donna le baiser de la paix, et du message du Crucifié dans la petite église de saint Damien. Par trois fois, le Christ en croix s’anima, et lui dit: « Va, François, et répare mon église en ruine ». Ce simple événement de la parole du Seigneur entendue dans l’église de Saint-Damien renferme un symbolisme profond. Immédiatement, saint François est appelé à réparer cette petite église, mais l’état de délabrement de cet édifice est le symbole de la situation dramatique et préoccupante de l’Eglise elle-même à cette époque, avec une foi superficielle qui ne forme ni ne transforme la vie, avec un clergé peu zélé, avec un refroidissement de l’amour; une destruction intérieure de l’Eglise qui comporte également une décomposition de l’unité, avec la naissance de mouvements hérétiques. Toutefois, au centre de cette église en ruines se trouve le crucifié, et il parle: il appelle au renouveau, appelle François à un travail manuel pour réparer de façon concrète la petite église de Saint-Damien, symbole de l’appel plus profond à renouveler l’Eglise même du Christ, avec la radicalité de sa foi et l’enthousiasme de son amour pour le Christ. Cet événement qui a probablement eu lieu en 1205, fait penser à un autre événement semblable qui a eu lieu en 1207: le rêve du Pape Innocent III. Celui-ci voit en rêve que la Basilique Saint-Jean-de-Latran, l’église mère de toutes les églises, s’écroule et un religieux petit et insignifiant la soutient de ses épaules afin qu’elle ne tombe pas. Il est intéressant de noter, d’une part, que ce n’est pas le Pape qui apporte son aide afin que l’église ne s’écroule pas, mais un religieux petit et insignifiant, dans lequel le Pape reconnaît François qui lui rend visite. Innocent III était un Pape puissant, d’une grande culture théologique, et d’un grand pouvoir politique, toutefois, ce n’est pas lui qui renouvelle l’église, mais le religieux petit et insignifiant: c’est saint François, appelé par Dieu. Mais d’autre part, il est intéressant de noter que saint François ne renouvelle pas l’Eglise sans ou contre le Pape, mais seulement en communion avec lui. Les deux réalités vont de pair: le Successeur de Pierre, les évêques, l’Eglise fondée sur la succession des apôtres et le charisme nouveau que l’Esprit Saint crée en ce moment pour renouveler l’Eglise. C’est ensemble que se développe le véritable renouveau.
Retournons à la vie de saint François. Etant donné que son père Bernardone lui reprochait sa générosité exagérée envers les pauvres, François, devant l’évêque d’Assise, à travers un geste symbolique, se dépouille de ses vêtements, montrant ainsi son intention de renoncer à l’héritage paternel: comme au moment de la création, François n’a rien, mais uniquement la vie que lui a donnée Dieu, entre les mains duquel il se remet. Puis il vécut comme un ermite, jusqu’à ce que, en 1208, eut lieu un autre événement fondamental dans l’itinéraire de sa conversion. En écoutant un passage de l’Evangile de Matthieu – le discours de Jésus aux apôtres envoyés en mission –, François se sentit appelé à vivre dans la pauvreté et à se consacrer à la prédication. D’autres compagnons s’associèrent à lui, et en 1209, il se rendit à Rome, pour soumettre au Pape Innocent III le projet d’une nouvelle forme de vie chrétienne. Il reçut un accueil paternel de la part de ce grand Souverain Pontife, qui, illuminé par le Seigneur, perçut l’origine divine du mouvement suscité par François. Le Poverello d’Assise avait compris que tout charisme donné par l’Esprit Saint doit être placé au service du Corps du Christ, qui est l’Eglise; c’est pourquoi, il agit toujours en pleine communion avec l’autorité ecclésiastique. Dans la vie des saints, il n’y a pas d’opposition entre charisme prophétique et charisme de gouvernement, et si apparaissent des tensions, ils savent attendre avec patience les temps de l’Esprit Saint.
En réalité, certains historiens du XIXe siècle et même du siècle dernier ont essayé de créer derrière le François de la tradition, un soi-disant François historique, de même que l’on essaie de créer derrière le Jésus des Evangiles, un soi-disant Jésus historique. Ce François historique n’aurait pas été un homme d’Eglise, mais un homme lié immédiatement uniquement au Christ, un homme qui voulait créer un renouveau du peuple de Dieu, sans formes canoniques et sans hiérarchie. La vérité est que saint François a eu réellement une relation très directe avec Jésus et avec la Parole de Dieu, qu’il voulait suivre sine glossa, telle quelle, dans toute sa radicalité et sa vérité. Et il est aussi vrai qu’initialement, il n’avait pas l’intention de créer un Ordre avec les formes canoniques nécessaires, mais simplement, avec la parole de Dieu et la présence du Seigneur, il voulait renouveler le peuple de Dieu, le convoquer de nouveau à l’écoute de la parole et de l’obéissance verbale avec le Christ. En outre, il savait que le Christ n’est jamais « mien », mais qu’il est toujours « nôtre », que le Christ, je ne peux pas l’avoir « moi » et reconstruire « moi » contre l’Eglise, sa volonté et son enseignement, mais uniquement dans la communion de l’Eglise construite sur la succession des Apôtres qui se renouvelle également dans l’obéissance à la parole de Dieu.
Et il est également vrai qu’il n’avait pas l’intention de créer un nouvel ordre, mais uniquement de renouveler le peuple de Dieu pour le Seigneur qui vient. Mais il comprit avec souffrance et avec douleur que tout doit avoir son ordre, que le droit de l’Eglise lui aussi est nécessaire pour donner forme au renouveau et ainsi réellement il s’inscrivit de manière totale, avec le cœur, dans la communion de l’Eglise, avec le Pape et avec les évêques. Il savait toujours que le centre de l’Eglise est l’Eucharistie, où le Corps du Christ et son Sang deviennent présents. A travers le Sacerdoce, l’Eucharistie est l’Eglise. Là où le Sacerdoce, le Christ et la communion de l’Eglise vont de pair, là seul habite aussi la parole de Dieu. Le vrai François historique est le François de l’Eglise et précisément de cette manière, il parle aussi aux non-croyants, aux croyants d’autres confessions et religions.
François et ses frères, toujours plus nombreux, s’établirent à la Portioncule, ou église Sainte-Marie des Anges, lieu sacré par excellence de la spiritualité franciscaine. Claire aussi, une jeune femme d’Assise, de famille noble, se mit à l’école de François. Ainsi vit le jour le deuxième ordre franciscain, celui des Clarisses, une autre expérience destinée à produire d’insignes fruits de sainteté dans l’Eglise.
Le successeur d’Innocent III lui aussi, le Pape Honorius III, avec sa bulle Cum dilecti de 1218 soutint le développement singulier des premiers Frères mineurs, qui partaient ouvrir leurs missions dans différents pays d’Europe, et jusqu’au Maroc. En 1219, François obtint le permis d’aller s’entretenir, en Egypte, avec le sultan musulman, Melek-el-Kâmel, pour prêcher là aussi l’Evangile de Jésus. Je souhaite souligner cet épisode de la vie de saint François, qui est d’une grande actualité. A une époque où était en cours un conflit entre le christianisme et l’islam, François, qui n’était volontairement armé que de sa foi et de sa douceur personnelle, parcourut concrètement la voie du dialogue. Les chroniques nous parlent d’un accueil bienveillant et cordial reçu de la part du sultan musulman. C’est un modèle dont devraient s’inspirer aujourd’hui encore les relations entre chrétiens et musulmans: promouvoir un dialogue dans la vérité, dans le respect réciproque et dans la compréhension mutuelle (cf. Nostra Aetate, n. 3). Il semble ensuite que François ait visité la Terre Sainte, jetant ainsi une semence qui porterait beaucoup de fruits: ses fils spirituels en effet firent des Lieux où vécut Jésus un contexte privilégié de leur mission. Je pense aujourd’hui avec gratitude aux grands mérites de la Custodie franciscaine de Terre Sainte.
De retour en Italie, François remit le gouvernement de l’ordre à son vicaire, le frère Pietro Cattani, tandis que le Pape confia à la protection du cardinal Ugolino, le futur Souverain Pontife Grégoire IX, l’Ordre, qui recueillait de plus en plus d’adhésions. Pour sa part, son Fondateur, se consacrant tout entier à la prédication qu’il menait avec un grand succès, rédigea la Règle, ensuite approuvée par le Pape.
En 1224, dans l’ermitage de la Verna, François vit le Crucifié sous la forme d’un séraphin et de cette rencontre avec le séraphin crucifié, il reçut les stigmates; il devint ainsi un avec le Christ crucifié: un don qui exprime donc son intime identification avec le Seigneur.
La mort de François – son transitus – advint le soir du 3 octobre 1226, à la Portioncule. Après avoir béni ses fils spirituels, il mourut, étendu sur la terre nue. Deux années plus tard, le Pape Grégoire IX l’inscrivit dans l’album des saints. Peu de temps après, une grande basilique fut élevée en son honneur, à Assise, destination encore aujourd’hui de nombreux pèlerins, qui peuvent vénérer la tombe du saint et jouir de la vision des fresques de Giotto, le peintre qui a illustré de manière magnifique la vie de François.
Il a été dit que François représente un alter Christus, qu’il était vraiment une icône vivante du Christ. Il fut également appelé « le frère de Jésus ». En effet, tel était son idéal: être comme Jésus; contempler le Christ de l’Evangile, l’aimer intensément, en imiter les vertus. Il a en particulier voulu accorder une valeur fondamentale à la pauvreté intérieure et extérieure, en l’enseignant également à ses fils spirituels. La première béatitude du Discours de la Montagne – Bienheureux les pauvres d’esprit car le royaume des cieux leur appartient (Mt 5, 3) a trouvé une réalisation lumineuse dans la vie et dans les paroles de saint François. Chers amis, les saints sont vraiment les meilleurs interprètes de la Bible; ils incarnent dans leur vie la Parole de Dieu, ils la rendent plus que jamais attirante, si bien qu’elle nous parle concrètement. Le témoignage de François, qui a aimé la pauvreté pour suivre le Christ avec un dévouement et une liberté totale, continue à être également pour nous une invitation à cultiver la pauvreté intérieure afin de croître dans la confiance en Dieu, en unissant également un style de vie sobre et un détachement des biens matériels.
Chez François, l’amour pour le Christ s’exprima de manière particulière dans l’adoration du Très Saint Sacrement de l’Eucharistie. Dans les Sources franciscaines, on lit des expressions émouvantes, comme celle-ci: « Toute l’humanité a peur, l’univers tout entier a peur et le ciel exulte, lorsque sur l’autel, dans la main du prêtre, il y a le Christ, le Fils du Dieu vivant. O grâce merveilleuse! O fait humblement sublime, que le Seigneur de l’univers, Dieu et Fils de Dieu, s’humilie ainsi au point de se cacher pour notre salut, sous une modeste forme de pain » (François d’Assise, Ecrits, Editrice Francescane, Padoue 2002, 401).
En cette année sacerdotale, j’ai également plaisir à rappeler une recommandation adressée par François aux prêtres: « Lorsqu’ils voudront célébrer la Messe, purs de manière pure, qu’ils présentent avec respect le véritable sacrifice du Très Saint Corps et Sang de notre Seigneur Jésus Christ » (François d’Assise, Ecrits, 399). François faisait toujours preuve d’un grand respect envers les prêtres et il recommandait de toujours les respecter, même dans le cas où ils en étaient personnellement peu dignes. Il donnait comme motivation de ce profond respect le fait qu’ils avaient reçu le don de consacrer l’Eucharistie. Chers frères dans le sacerdoce, n’oublions jamais cet enseignement: la sainteté de l’Eucharistie nous demande d’être purs, de vivre de manière cohérente avec le Mystère que nous célébrons.
De l’amour pour le Christ naît l’amour envers les personnes et également envers toutes les créatures de Dieu. Voilà un autre trait caractéristique de la spiritualité de François: le sens de la fraternité universelle et l’amour pour la création, qui lui inspira le célèbre Cantique des créatures. C’est un message très actuel. Comme je l’ai rappelé dans ma récente encyclique Caritas in veritate, seul un développement qui respecte la création et qui n’endommage pas l’environnement pourra être durable (cf. nn. 48-52), et dans le Message pour la Journée mondiale de la paix de cette année, j’ai souligné que l’édification d’une paix solide est également liée au respect de la création. François nous rappelle que dans la création se déploient la sagesse et la bienveillance du Créateur. Il comprend la nature précisément comme un langage dans lequel Dieu parle avec nous, dans lequel la réalité devient transparente et où nous pouvons parler de Dieu et avec Dieu.
Chers amis, François a été un grand saint et un homme joyeux. Sa simplicité, son humilité, sa foi, son amour pour le Christ, sa bonté envers chaque homme et chaque femme l’ont rendu heureux en toute situation. En effet, entre la sainteté et la joie existe un rapport intime et indissoluble. Un écrivain français a dit qu’il n’existe qu’une tristesse au monde: celle de ne pas être saints, c’est-à-dire de ne pas être proches de Dieu. En considérant le témoignage de saint François, nous comprenons que tel est le secret du vrai bonheur: devenir saints, proches de Dieu!
Que la Vierge, tendrement aimée de François, nous obtienne ce don. Nous nous confions à Elle avec les paroles mêmes du Poverello d’Assise: « Sainte Vierge Marie, il n’existe aucune femme semblable à toi née dans le monde, fille et servante du très haut Roi et Père céleste, Mère de notre très Saint Seigneur Jésus Christ, épouse de l’Esprit Saint: prie pour nous… auprès de ton bien-aimé Fils, Seigneur et Maître » (François d’Assise, Ecrits, 163).

Rosh Hashana 2011/5772 le 28-29 september, les rites du Nouvel An juif

30 septembre, 2011

du site:

http://carolineplume.suite101.fr/rosh-hashana-2011-les-rites-du-nouvel-an-juif-a13410

Rosh Hashana 2011, les rites du Nouvel An juif

7 juin 2010

Caroline Plume

Shofar au mur des Lamentations -
En 2011, le Nouvel An juif débute le 28 septembre. Retour sur les célébrations, traditions et rites de la nouvelle année dans le judaïsme.
Le premier et deuxième jour du mois de Tichri, septième mois du calendrier hébraïque, est célébré le Nouvel An juif ou Rosh Hashana, également appelé « fête des trompettes » : le Shofar, corne de bélier, sonne dès la prière du matin à la synagogue, en souvenir de l’épisode biblique au cours duquel Abraham sacrifia un animal à la place de son fils Isaac. Il pourra sonner près de cent fois, les sons longs alternant avec les sons courts, évoquant les sanglots du repentir pour les uns, la mise en alerte, la « convocation » pour les autres.
Que signifie le Nouvel An juif ?
Passage à la nouvelle année, Rosh Hashana est aussi le jour du jugement de la Création et du couronnement de Dieu comme Roi de l’Univers. Il s’agit d’une fête plus solennelle que joyeuse qui ouvrira, en septembre 2011, l’an 5772 du calendrier hébraïque.
Le 28 septembre au soir, un premier « Seder » ou repas cacher, véritable festin dans les communautés sépharades, marquera le début des festivités du Nouvel An. Un deuxième repas en marquera la fin le lendemain. Le troisième jour est en principe un jour de jeûne. Les deux premiers jours sont des jours chômés pour les communautés juives, qui se consacrent exclusivement à cette célébration afin de se souhaiter la bonne année (Shana Tova) dans le respect des rites.
Selon la tradition, de grands événements se sont produits à Rosh Hashana : la création du monde, la naissance des patriarches Abraham, Isaac, Jacob, les destructions du Temple, la conception d’enfants issus de femmes stériles de la Bible, la libération de Joseph des prisons égyptiennes, la fin du travail forcé des Hébreux sous le joug des Egyptiens… et un jour le Jugement Dernier, et la résurrection des morts.
Loin de la Saint-Sylvestre, une fête grave et solennelle
Les communautés sont invitées, à l’occasion de la nouvelle année, à faire le bilan de l’année écoulée, et à faire pénitence dans l’attente de Yom Kipour, le « Grand Pardon », célébré dix jours plus tard : dix jours pour les « moyens », la catégorie de personnes se situant entre les justes et les mécréants, pour faire le point sur leurs actions, reconnaître leurs torts et prendre de nouvelles résolutions pour l’année qui commence !
Les cérémonies à la synagogue sont empreintes de solennité et se déroulent sous le signe du blanc, symbole de pureté : les étoffes enveloppant les rouleaux de la Torah, la tenture de l’armoire sainte et du pupitre sont blanches. Un fidèle sonnera le shofar à plusieurs reprises, afin d’éveiller les consciences et de les inviter au repentir. Les poèmes spécialement composés et prières liturgiques sont d’une grande richesse.
Plus populaire, la cérémonie du Tashlikh : on vide ses poches dans un cours d’eau le premier jour de la fête en fin d’après-midi, comme pour se délester de ses péchés et de ses fautes au fond de la mer. On peut aussi, à titre symbolique, secouer son mouchoir au-dessus de l’eau ou y jeter une pierre.

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