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LE SENS DE LA TRANSFIGURATION – HOMÉLIE PAR S.B. PATRIARCHE DANIEL

5 août, 2013

http://www.spiritualite-orthodoxe.net/transfiguration_christ_orthodoxie.html

La Transfiguration de Jésus, selon l’Eglise orthodoxe: la matière est transfigurée dans le Royaume de Dieu, elle est transformée, atténuée, spiritualisée – 6 août, fête fixe- l’enseignement par une homélie du Patriarche Daniel, Primat de l’Église Orthodoxe Roumaine.

LE SENS DE LA TRANSFIGURATION

HOMÉLIE PAR S.B. PATRIARCHE DANIEL

Le Nouvel Adam, par l’obéissance jusqu’à la mort, une mort jusque sur la Croix, a montré au monde la gloire à laquelle est appelé l’homme créé à l’image de Dieu glorieux et éternel.

Transfiguration du Christ
La Transfiguration de Jésus-Christ, notre Sauveur, selon la compréhension des Saints Pères de l’Église, nous montre non seulement la gloire de Sa Résurrection des morts le troisième jour, mais aussi la gloire avec laquelle Il vient pour juger les vivants et les morts à la fin des temps. C’est pourquoi la fête est célébrée au cours du dernier mois de l’année de l’Église, car l’année liturgique se termine le 31 août et commence le 1 septembre.
Le dernier mois de l’année ecclésiastique relate les choses suprêmes avant la parousie du Seigneur à la fin du monde. Cette fête a été prévue le sixième jour, pas le septième, puisque l’homme a été créé le sixième jour. Si dans le Paradis Adam avait obéi à Dieu et n’avait pas péché, il aurait atteint la gloire du Royaume de Dieu.
Le Nouvel Adam, par l’obéissance jusqu’à la mort, une mort jusque sur la Croix, a montré au monde la gloire à laquelle est appelé l’homme créé à l’image de Dieu glorieux et éternel.

La Transfiguration est un moment prophétique elle-même.
Transfiguration du Christ
La Transfiguration est en elle-même un moment prophétique . Elle nous montre dès maintenant la gloire du Royaume des Cieux quand ceux qui auront cru en Christ et l’auront aimé atteindront la gloire de la Très Sainte Trinité. C’est le but de l’Église.
La Transfiguration du Seigneur nous montre l’avenir suprême pour ceux qui croient en Christ: la gloire et la joie du Royaume des Cieux. C’est pourquoi l’icône Orthodoxe nous montre les saints avec un halo de lumière ou sur un fond d’or, pour nous montrer qu’ils sont déjà dans le Royaume des Cieux où ils nous attendent, priant pour nous afin que nous atteignions la gloire du Royaume des cieux.
Pourquoi les églises sont-elles construites dans un endroit élevé?
Ayant appris de cette Transfiguration sainte de notre Sauveur Jésus Christ, que la Loi et les Prophètes sont rassemblés en Lui et que les Apôtres voient en Jésus Christ l’avenir de ceux qui croient en Dieu et l’aiment, mais aussi puisque le Christ a été crucifié sur la Montagne de Golgotha, il a été décidé que les églises devraient toujours être construites dans un lieu haut placé.
Il a été transfiguré sur une montagne et Il s’est élevé aux Cieux du Mont des Oliviers. Ainsi, il faut monter vers l’Église et non pas en descendre. L’Église est un Tabor, une colline du Golgotha, aussi bien que la montagne de la rançon pour l’échange de notre vie coupable contre la vie sainte lumineuse.
La matière est transfigurée dans le Royaume de Dieu.
Pourquoi les quatre Évangiles ne nous disent jamais rien de la couleur de la peau et des cheveux de notre Sauveur Jésus-Christ. Aucun Évangile ne nous dit à quoi le visage de Jésus-Christ ressemblait, en tant qu’homme, ou quelle était la couleur de ses cheveux. Pourquoi ? Parce que le visage de l’homme vivant sur la terre change, il est provisoire, pour qu’il soit transformé au Royaume des Cieux.
Le seul passage où les Évangiles disent comment est le visage du Christ, est le moment de la Transfiguration, car il est comme nous le verrons dans l’éternité, dans la gloire, à savoir que la matière devient intérieure à l’esprit, alors que maintenant l’esprit est caché dans la matière.
La matière est transfigurée dans le Royaume de Dieu: elle est transformée, atténuée, spiritualisée, dès lors que l’esprit ou l’âme lumineuse règne sur le corps. Ainsi, la Transfiguration de Jésus Christ, notre Sauveur, nous montre Son visage Éternel qui nous appelle à Lui..

Par le Primat de l’Église Orthodoxe roumaine, le Patriarche Daniel. Homélie de la Transfiguration, 6 août 2012.© Traduit de l’anglais au français par Spiritualité Orthodoxe.

LETTRE ENCYCLIQUE DE S. S. LE PAPE– PIE XI – MISERENTISSIMUS REDEMPTOR (8 mai 1928)

6 juin, 2013

 http://avancezaularge.free.fr/pie11_miserentissimus_redemptor.htm

MISERENTISSIMUS REDEMPTOR

LETTRE ENCYCLIQUE DE S. S. LE PAPE– PIE XI –

8 mai 1928

INTRODUCTION

La promesse du Christ d’assister son Église

Notre Rédempteur très miséricordieux venait d’opérer, sur le bois de la Croix, le salut du genre humain; sur le point de remonter de ce monde vers son Père, il dit à ses Apôtres et à ses disciples pour les consoler : Voici que je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. Cette parole, outre qu’elle est très agréable à entendre, est génératrice d’espérance et de sécurité, c’est elle, Vénérables Frères, qui Nous réconforte toutes les fois que, du haut de ce Siège, comme d’un observatoire élevé, Nous parcourons du regard soit l’ensemble de la société humaine entière, accablée de maux et de misères si nombreuses, soit l’Église elle-même, livrée à des attaques et à des embûches incessantes.

C’est cette divine promesse qui, à l’origine, éleva le courage des Apôtres abattus, les enflamma d’un zèle ardent pour répandre à travers le monde entier la semence de la doctrine évangélique; c’est elle encore qui, dans la suite, a soutenu l’Église dans sa lutte victorieuse contre les portes de l’enfer. L’assistance de Notre Seigneur Jésus-Christ, il est vrai, n’a jamais fait défaut à son Église. Toutefois, son secours et son appui furent d’autant plus présents qu’elle était assaillie de dangers ou de calamités plus graves; les remèdes les mieux en rapport avec les conditions des temps et des circonstances lui étant alors fournis par cette divine Sagesse qui atteint avec force d’une extrémité à l’autre et dispose tout avec douceur.

Objet de l’Encyclique, son opportunité

Même en ces derniers temps on ne peut vraiment dire que la main du Seigneur se soit raccourcie, et plus spécialement lorsqu’une erreur s’insinua et se propagea si loin que l’on pût craindre que, les âmes détournées de l’amour de Dieu et de la familiarité avec lui, les sources mêmes de la vie chrétienne vinssent, en quelque sorte, à se dessécher. Les plaintes que le Christ très aimant fit entendre dans ses apparitions à Marguerite-Marie Alacoque, les désirs aussi et les volontés qu’il signifia à l’adresse des hommes et pour leur bien, certains peut-être les ignorent encore, d’autres les négligent. C’est pour cette raison, Vénérables Frères, que Nous voulons vous entretenir quelques instants du devoir qui nous incombe de faire amende honorable au Cœur sacré de Jésus, pour Nous servir de l’expression courante. Nous avons la conviction que vous déploierez votre zèle pour instruire chacun de vos fidèles de toute la doctrine que Nous allons vous transmettre et que vous les encouragerez à la mettre en pratique.

I. – LE CŒUR DE JÉSUS

1. – Symbole de charité et de paix

Parmi les nombreuses preuves de l’infinie bonté de notre Sauveur, il en est une qui brille d’un éclat tout particulier. Alors que la charité des fidèles allait se refroidissant, ce fut la charité même de Dieu qui se proposa pour être honorée d’un culte spécial, et les trésors de sa bonté se répandirent largement, grâce à la forme du culte rendu au Cœur sacré de Jésus, dans lequel sont cachés tous les trésors de la science et de la sagesse.

Jadis, à la sortie de l’arche de Noé, Dieu notifia par un signe son pacte d’amitié avec le genre humain, en faisant briller un arc resplendissant dans les nuées. De même, à l’époque si troublée où se répandait l’hérésie, perfide entre toutes, du jansénisme qui étouffait l’amour et la piété dus à Dieu, en le présentant moins comme un Père digne d’amour que comme un juge à craindre pour sa sévérité implacable, Jésus vint, dans sa bonté infinie, nous montrer son Cœur sacré tel un symbole de paix et de charité offert aux regards des peuples; c’était un gage assuré de victoire dans les combats. Aussi Notre prédécesseur d’heureuse mémoire, Léon XIII, considérant justement, dans sa Lettre encyclique Annum sacrum, l’admirable opportunité du culte envers le Cœur sacré de Jésus, n’hésitait pas à dire : »Quand l’Église, encore toute proche de ses origines, gémissait sous le joug des Césars, une croix apparut dans le ciel à un jeune empereur; elle était le présage et la cause d’un insigne et prochain triomphe. Aujourd’hui, un autre symbole divin d’heureux augure apparaît à nos yeux : c’est le Cœur très sacré de Jésus, surmonté de la croix et resplendissant d’un éclat incomparable au milieu des flammes. Nous devons placer en lui toutes nos espérances, c’est à lui que nous devons demander le salut des hommes, et c’est de lui qu’il faut l’attendre. »

2. – Synthèse de la religion

Et c’est à juste titre, Vénérables Frères. Car ce signe éminemment propice et la forme de dévotion qui en découle ne renferment-ils point la synthèse de la religion et la norme d’une vie d’autant plus parfaite qu’elle achemine les âmes à connaître plus profondément et plus rapidement le Christ Seigneur, à l’aimer plus ardemment et à l’imiter avec plus d’application et plus d’efficacité ? Qu’on ne s’étonne point dès lors que Nos prédécesseurs aient constamment défendu cette forme si excellente de dévotion contre les accusations de ses détracteurs, qu’ils l’aient couverte de louanges et qu’ils aient mis tout leur zèle à la propager, suivant les exigences des temps et des lieux. Sous le souffle de Dieu, la piété des fidèles envers le Cœur sacré de Jésus n’a point cessé de croître ; d’où l’éclosion de toutes parts des confréries vouées à la diffusion du culte du Sacré-Cœur; de là encore l’usage de la communion du premier vendredi du mois, conforme aux désirs du Christ-Jésus lui-même, et maintenant répandu à peu près partout.

II.- FORMES DU CULTE DU SACRÉ-CŒUR

1. – La consécration au Sacré-Cœur

Parmi toutes ces pratiques de la dévotion au Sacré-Cœur, il en est une remarquable qui mérite d’être signalée, c’est la pieuse consécration par laquelle, offrant à Dieu nos personnes et tous les biens que nous tenons de son éternelle bonté, nous les vouons au divin Cœur de Jésus. Ce devoir de piété que Notre-Seigneur voudrait voir tous les hommes lui rendre et qu’il réclame moins en raison de ses droits qu’en vertu de son immense amour pour nous, il l’enseigna lui-même à Marguerite-Marie, la très fidèle servante de son Cœur. Elle et son directeur spirituel, Claude de la Colombière, furent les premiers à le lui offrir; avec le temps, d’autres ont suivi : des hommes isolés d’abord, puis des familles, des associations, enfin même des magistrats, des villes et des nations.

          – Pratique et diffusion de cette consécration

Au siècle dernier et jusqu’au nôtre, des impies en sont venus, par leurs machinations, à faire repousser l’empire du Christ et à provoquer une guerre ouverte contre l’Église; on promulgue des lois et des décrets contraires au droit divin aussi bien qu’au droit naturel, bien plus, on clame dans des assemblées: Nous ne voulons pas qu’il règne sur nous. Mais, en revanche, par la consécration dont Nous venons de parler, une voix unanime éclate, celle des fidèles du Sacré-Cœur, s’opposant vaillamment à celle de ses ennemis, pour venger sa gloire et affirmer ses droits: Il faut que le Christ règne – Que votre règne arrive. Voilà pourquoi, fort heureusement, le genre humain tout entier – que le Christ, en qui seul tout peut être restauré, possède par droit de nature – fut, au début de ce siècle, consacré au Sacré-Cœur par Léon XIII, Notre prédécesseur de glorieuse mémoire, aux applaudissements de l’univers chrétien.

Ces débuts si heureux et si réconfortants, ainsi que Nous le disions dans Notre Lettre encyclique Quas Primas en donnant suite aux vœux persévérants et nombreux des évêques et des fidèles, Nous avons pu, avec la grâce de Dieu, les compléter et les parachever quand, à l’issue de l’Année Sainte, Nous avons institué la fête du Christ Roi de l’univers et prescrit de la célébrer solennellement dans toute la chrétienté. Ce faisant, Nous n’avons pas seulement mis en lumière l’empire souverain du Christ sur toutes choses, sur la société tant civile que domestique et sur chaque homme en particulier, mais Nous avons encore fait entrevoir les joies de ce jour, heureux entre tous, où le genre humain, de son plein gré, se soumettra à la souveraineté infiniment douce du Christ-Roi. Pour cette raison, Nous avons ordonné que dès lors chaque année, au jour fixé pour cette fête, on renouvelât cette consécration, pour en obtenir des grâces plus certaines et plus abondantes, au profit de l’union de tous les peuples par les liens de la charité chrétienne et de la paix dans le Cœur du Roi des rois et du Seigneur des seigneurs.

2. – La réparation due au Sacré-Cœur

A tous ces hommages, et principalement à cette consécration si féconde, que vient sceller en quelque sorte la fête solennelle du Christ-Roi, il faut ajouter encore autre chose. C’est le sujet, Vénérables Frères, dont il Nous plaît de vous entretenir plus longuement dans cette Lettre : à savoir l’amende honorable ou la réparation selon l’expression courante à offrir au Cœur sacré de Jésus. Si, dans la consécration, le but premier et principal pour la créature est de rendre à son Créateur amour pour amour, il s’ensuit naturellement qu’elle doit offrir à l’égard de l’amour incréé une compensation pour l’indifférence, l’oubli, les offenses, les outrages, les injures qu’il subit: c’est ce qu’on appelle couramment le devoir de la réparation.

a. – Motif de justice

Si les mêmes raisons nous obligent à ce double devoir, cependant le devoir de réparation et d’expiation s’impose en vertu d’un motif encore plus impérieux de justice et d’amour : de justice d’abord, car l’offense faite à Dieu par nos crimes doit être expiée, et l’ordre violé doit être rétabli par la pénitence; mais d’amour aussi, car nous devons « compatir au Christ souffrant et saturé d’opprobres », et lui offrir, selon notre petitesse, quelque consolation. Tous nous sommes des pécheurs ; de nombreuses fautes nous chargent; nous avons donc l’obligation d’honorer Dieu non seulement par notre culte, par une adoration qui rend à sa Majesté suprême de légitimes hommages, par des prières qui reconnaissent son souverain domaine, par des louanges et des actions de grâces pour son infinie bonté; mais à ce Dieu juste vengeur nous avons encore le devoir d’offrir satisfaction pour nos innombrables péchés, offenses et négligences. Ainsi à la consécration, par laquelle nous nous donnons à Dieu et qui nous mérite d’être voués à Dieu, avec la sainteté et la stabilité qui, suivant l’enseignement du Docteur angélique sont le propre de la consécration, il faut donc ajouter l’expiation qui répare entièrement les péchés, de peur que, dans sa sainteté, la Souveraine Justice ne nous repousse pour notre impudente indignité et, loin d’agréer notre offrande, ne la rejette.

          – Nécessité de cette réparation

En fait, ce devoir d’expiation incombe au genre humain tout entier. Comme nous l’enseigne la foi chrétienne, après la déplorable chute d’Adam, l’homme, infecté de la souillure originelle, esclave de la concupiscence et des plus lamentables dépravations, se trouva ainsi voué à la perte éternelle. De nos jours, des savants orgueilleux nient ces vérités et, s’inspirant de la vieille erreur de Pélage, vantent des vertus innées de la nature humaine qui la conduiraient, par ses seules forces, jusqu’aux cimes les plus élevées. Ces fausses théories de l’orgueil humain, l’Apôtre les réfute en nous rappelant que, par nature, nous étions enfants de colère. Dès les débuts, en réalité, la nécessité de cette expiation commune a été reconnue, puisque, cédant à un instinct naturel, les hommes se sont efforcés d’apaiser Dieu par des sacrifices même publics.

          – Sa subordination au sacrifice du Christ

Mais aucune puissance créée n’aurait jamais suffi à expier les crimes du genre humain si le Fils de Dieu n’avait assumé la nature humaine pour la relever. Le Sauveur des hommes l’a lui-même annoncé par la bouche du Psalmiste : Vous n’avez voulu ni sacrifice ni oblation, mais vous m’avez formé un corps; vous n’avez pas agréé les holocaustes pour le péché. Alors j’ai dit : Me voici, je viens. Et de fait, il s’est vraiment chargé de nos infirmités, il a porté lui-même nos douleurs; il a été broyé à cause de nos iniquités; il a porté lui-même nos péchés en son corps sur le bois, détruisant l’acte qui était écrit contre nous et nous était contraire avec ses ordonnances; et il l’a fait disparaître en le clouant à la croix… afin que, morts, au péché, nous vivions pour la justice.

          – Notre participation

La surabondante Rédemption du Christ nous a fait remise de toutes nos fautes. Cependant, par une admirable disposition de la Sagesse divine, nous devons compléter dans notre chair ce qui manque aux souffrances du Christ pour son corps qui est l’Église. En conséquence, aux louanges et aux réparations « dont le Christ s’est acquitté envers Dieu au nom des pécheurs » pouvons-nous, et même devons-nous ajouter encore nos louanges et nos expiations. Mais nous ne devons jamais l’oublier, toute la vertu d’expiation découle uniquement du sacrifice sanglant du Christ, qui se renouvelle sans interruption, d’une manière non sanglante sur nos autels, car « c’est toujours une seule et même victime, c’est le même qui s’offre maintenant par le ministère du prêtre et qui s’offrit jadis sur la croix; seule la manière d’offrir diffère. » C’est pour cette raison qu’au très auguste Sacrifice eucharistique les ministres et le reste des fidèles doivent joindre leur propre immolation, de sorte qu’ils s’offrent eux aussi comme des hosties vivantes, saintes, agréables à Dieu. Bien plus, saint Cyprien ne craint pas d’affirmer que « le sacrifice du Seigneur n’est pas célébré avec la sainteté requise si notre propre oblation et notre propre sacrifice ne correspondent pas à sa Passion ». Pour cette raison encore, l’Apôtre nous exhorte à « porter dans notre corps la mort de Jésus, » à nous ensevelir avec Jésus et à nous greffer sur lui par la ressemblance de sa mort non seulement en crucifiant notre chair avec ses vices et ses convoitises en fuyant la corruption de la concupiscence qui règne dans le monde, mais encore en manifestant la vie de Jésus dans nos corps et, unis à son éternel sacerdoce, à offrir ainsi des dons et des sacrifices pour nos péchés.

A ce sacerdoce mystérieux et à cette mission de satisfaire et de sacrifier ne participent pas seulement les ministres choisis par notre Pontife, le Christ Jésus, pour l’oblation immaculée qui se doit faire en son nom divin depuis l’Orient jusqu’à l’Occident mais encore le peuple chrétien tout entier, appelé à bon droit par le Prince des Apôtres race élue, sacerdoce royal; car soit pour eux-mêmes, soit pour le genre humain tout entier, les fidèles doivent concourir à cette oblation pour les péchés, à peu près de la même manière que le Pontife choisi parmi les hommes est établi pour les hommes en ce qui concerne les choses de Dieu.

Plus notre oblation et notre sacrifice ressembleront au sacrifice du Christ, autrement dit plus parfaite sera l’immolation de notre amour-propre et de nos convoitises, plus la crucifixion de notre chair se rapprochera de cette crucifixion mystique dont parle l’Apôtre, plus abondants seront les fruits de propitiation et d’expiation que nous recueillerons pour nous et pour les autres. Car entre les fidèles et le Christ il existe une admirable relation, semblable à celle qui relie la tête aux divers membres du corps; mais de plus, par cette mystérieuse communion des saints que professe notre foi catholique, les hommes et les peuples non seulement sont unis entre eux, mais encore avec Celui-là même qui est la tête, le Christ. C’est de lui que tout le corps, coordonné et uni par le lien des membres qui se prêtent un mutuel secours et dont chacun opère selon sa mesure d’activité, grandit et se perfectionne dans la charité. C’est la prière qu’avant de mourir le Christ Jésus, médiateur entre Dieu et les hommes, adressait lui-même à son Père : Que je sois en eux et vous en moi, afin qu’ils soient parfaitement un.

b. – Motif d’amour pour la réparation

          – L’union des fidèles dans le Christ

Par conséquent, de même que l’union avec le Christ trouve son expression et sa confirmation dans l’acte de consécration, de même l’expiation sert de prélude à cette union en effaçant les péchés, elle nous perfectionne en nous associant aux souffrances du Christ, elle la parachève enfin en offrant des victimes pour le prochain. Ce fut là bien certainement la miséricordieuse intention de Jésus quand il nous présenta son Cœur portant les insignes de la Passion et d’où s’échappaient des flammes d’amour; en nous découvrant ainsi la malice infinie du péché, d’une part, et en nous faisant admirer, d’autre part, l’infinie charité du Rédempteur, il voulait nous inspirer une haine encore plus vive du péché et plus d’ardeur à répondre à son amour.

          – La réparation mendiée par Notre-Seigneur

Du reste, l’esprit d’expiation ou de réparation a toujours tenu le premier et principal rôle dans le culte rendu au Sacré Cœur de Jésus; rien n’est plus conforme à l’origine, à la nature, à la vertu et aux pratiques qui caractérisent cette dévotion; d’ailleurs, l’histoire, les usages, la liturgie sacrée et les actes des Souverains Pontifes en portent témoignage. Dans ses apparitions à Marguerite-Marie, quand il lui dévoilait son infinie charité, le Christ laissait en même temps percevoir comme une sorte de tristesse, en se plaignant des outrages si nombreux et si graves que lui faisait subir l’ingratitude des hommes. Puissent les paroles qu’il employait alors ne jamais s’effacer de l’âme des fidèles : « Voici ce Cœur ― disait-il ― qui a tant aimé les hommes, qui les a comblés de tous les bienfaits, mais qui, en échange de son amour infini, non seulement ne reçoit pas de reconnaissance, mais ne recueille que l’oubli, la négligence et des injures, et cela parfois de la part de ceux-là même qui sont tenus de lui témoigner un amour spécial. »

Pour l’expiation de ces fautes il recommandait, entre autres, comme lui étant particulièrement agréables, les pratiques suivantes : participer, dans un esprit d’expiation, aux saints Mystères en faisant la « communion réparatrice »; y joindre des invocations et des prières expiatoires pendant une heure entière, en faisant, comme on l’appelle justement, « l’heure sainte »: exercices qui non seulement ont été approuvés par l’Église, mais qu’elle a enrichis d’abondantes indulgences.

          – Considération du Christ dans sa Passion

Mais, dira-t-on, quelle consolation peuvent apporter au Christ régnant dans la béatitude céleste ces rites expiatoires ? Nous répondrons avec Saint Augustin : « Prenez une personne qui aime : elle comprendra ce que je dis. » Nulle part d’ailleurs ces paroles ne trouvent une application plus juste.

Toute âme aimant Dieu avec ferveur, quand elle jette un regard sur le passé, peut voir et contempler dans ses méditations le Christ travaillant pour l’homme, affligé, souffrant les plus dures épreuves, pour nous autres hommes et pour notre salut, presque abattu par la tristesse, l’angoisse et les opprobres ; bien plus, « broyé sous le poids de nos crimes, il nous guérit par ses meurtrissures ». Tout cela, les âmes pieuses ont d’autant plus de raison de le méditer que ce sont les péchés et les crimes des hommes commis en n’importe quel temps qui ont causé la mort du Fils de Dieu; ces mêmes fautes, maintenant encore, causeraient la mort du Christ, entraîneraient les mêmes douleurs et les mêmes afflictions, puisque chacune d’elles, ainsi qu’on l’admet, est censée renouveler à sa manière la Passion du Seigneur : Crucifiant de nouveau pour leur part le Fils de Dieu et le livrant à l’ignominie. Que si, à cause de nos péchés futurs, mais prévus, l’âme du Christ devint triste jusqu’à la mort, elle a, sans nul doute, recueilli quelque consolation, prévue elle aussi, de nos actes de réparation, alors qu’un ange venant du ciel lui apparut, pour consoler son cœur accablé de dégoût et d’angoisse.

Ainsi donc, ce Cœur sacré incessamment blessé par les péchés d’hommes ingrats, nous pouvons maintenant et même nous devons le consoler d’une manière mystérieuse, mais réelle, d’autant que le Christ lui-même se plaint, par la bouche du Psalmiste, ainsi que la liturgie sacrée le rappelle, d’être abandonné de ses amis : Mon cœur a attendu l’opprobre et la misère; j’ai espéré celui qui s’affligerait avec moi et il n’est point venu, celui qui me consolerait et je ne l’ai point trouvé.

          – Les souffrances du Corps Mystique

Ajoutons encore que la Passion du Christ se renouvelle, et d’une certaine manière elle se poursuit et s’achève, dans son corps mystique qui est l’Église. Car, pour nous servir encore des paroles de saint Augustin : « Le Christ a souffert tout ce qu’il devait souffrir ; la mesure de ses souffrances est désormais à son comble. La dette de souffrances était donc payée dans la Tête, mais elle demeurait entière dans son corps ». Le Seigneur Jésus lui-même a bien voulu nous l’apprendre, quand il disait à Saul, respirant encore la menace et la mort contre les disciples : Je suis Jésus que tu persécutes. Il laissait ainsi nettement entendre que les persécutions déchaînées contre l’Église visaient et atteignaient le divin Chef de l’Église lui-même. C’est donc à bon droit que, souffrant toujours en son corps mystique, le Christ veut nous avoir pour compagnons de son expiation. Notre situation envers lui l’exige également, car, puisque nous sommes le corps du Christ et ses membres chacun pour notre part, tout ce que souffre la tête, les membres le doivent souffrir aussi ».

c – Nécessité actuelle de la réparation

          – L’Église persécutée

A quel point cette expiation, cette réparation sont nécessaires, surtout de nos jours, on le comprendra sans peine, comme Nous le disions au début, en considérant d’un regard le monde plongé dans le mal. De partout, en effet, montent vers Nous les gémissements des peuples dont il est vrai d’affirmer que les chefs ou les gouvernants se sont dressés et ligués contre le Seigneur et son Église. En ces pays, tous les droits, divins ou humains, se trouvent confondus. Les églises sont abattues, ruinées de fond en comble, les religieux et les vierges consacrées sont expulsés de leur demeure, livrés aux insultes et aux mauvais traitements, voués à la famine, condamnés à la prison, des multitudes d’enfants et de jeunes filles sont arrachés du sein de l’Église leur mère; on les excite à renier et à blasphémer le Christ; on les pousse aux pires dégradations de la luxure; le peuple entier des fidèles, terrorisé, éperdu sous la continuelle menace de renier sa foi ou de périr, parfois de la mort la plus atroce. Spectacle tellement affligeant qu’on y pourrait voir déjà l’aurore de ce début des douleurs que doit apporter l’homme de péché s’élevant contre tout ce qui est appelé Dieu ou honoré d’un culte.

          – Le mal parmi les chrétiens

Mais plus attristant encore, Vénérables Frères, est l’état de tant de fidèles que le baptême a lavés dans le sang de l’Agneau immaculé et comblés de grâces; à tous les rangs de la société il s’en trouve qui, aveuglés par une ignorance incroyable des choses divines, empoisonnés d’erreurs, se traînent dans le vice, loin de la maison du Père; nul rayon de lumière de la vraie foi ne les éclaire, nulle espérance de la félicité future ne les réjouit, nulle ardeur de la charité ne les anime et ne les réchauffe; ils semblent vraiment être plongés dans les ténèbres et assis à l’ombre de la mort. Bien plus : chez les fidèles grandit l’indifférence à l’égard de la discipline ecclésiastique et des institutions anciennes qui forment la base de toute vie chrétienne, régissent la famille et protègent la sainteté du mariage, l’éducation des enfants est négligée, sinon faussée, par une affection trop indulgente; l’Église est frustrée de son droit d’élever la jeunesse chrétienne; dans la vie courante, la pudeur chrétienne est lamentablement oubliée, surtout dans la mode féminine; on ne voit que poursuite effrénée des biens passagers, que prédominance sans frein des intérêts civils, que recherche immorale de la faveur populaire, rébellion contre l’autorité légitime, enfin mépris de la parole divine, aboutissant à un affaiblissement grave, sinon à la perte de la foi.

          – Le mal parmi les clercs

A ces maux vient mettre un comble soit la mollesse ou la lâcheté de ceux qui – tels les disciples endormis ou fugitifs, chancelant dans leur foi – désertent misérablement le Christ agonisant dans l’angoisse ou entouré par les satellites de Satan, soit la perfidie de ceux qui, à l’exemple du traître Judas, ont l’audace de participer au sacrifice de l’autel de manière sacrilège ou de passer à l’ennemi. On ne peut vraiment pas s’empêcher de penser que les temps prédits par Notre-Seigneur semblent être proches, où, à cause des progrès incessants de l’iniquité, la charité d’un grand nombre se refroidira.

          – L’esprit de réparation

Il n’est pas un seul fidèle qui puisse méditer ces choses sans s’enflammer d’amour pour le Christ souffrant, avec un zèle plus vif, tous voudront expier leurs fautes et celles d’autrui, réparer les torts faits à l’honneur du Christ et travailler au salut éternel de leurs âmes. Comme elle est vraie cette parole de l’Apôtre: Là où la faute abonda, la grâce surabonda, et comme, en un sens, elle peut servir à peindre notre époque! Car en dépit de la perversité croissante des hommes, il est merveilleux de voir grandir, sous l’inspiration du Saint-Esprit, le nombre des fidèles des deux sexes qui, d’un zèle plus ardent s’efforcent de réparer tant d’insultes au divin Cœur, n’hésitent pas à s’offrir eux-mêmes comme victimes au Christ.

Celui qui médite, en effet, avec amour sur tout ce que Nous venons de rappeler, s’en imprégnant, si l’on peut dire, jusqu’au plus profond de son être, ne peut faire autrement que de ressentir de l’horreur pour tout péché et de s’en abstenir comme du mal souverain, plus encore, il s’appliquera à s’abandonner tout entier à la volonté de Dieu et à réparer les outrages faits à la divine Majesté par tous les moyens en son pouvoir : prières incessantes, souffrances librement consenties, épreuves éventuelles patiemment acceptées; en un mot, par une vie entièrement consacrée à ce désir d’expiation.

– Les associations réparatrices

De là sont nées toutes ces familles religieuses d’hommes et de femmes qui, rivalisant en quelque sorte avec l’Ange du Jardin des Oliviers, s’imposent, jour et nuit, le devoir de consoler Jésus; de là encore ces confréries pieuses, approuvées par le Siège apostolique et enrichies d’indulgences, qui, elles aussi, ont assumé ce devoir d’expiation en s’imposant la pratique d’exercices religieux et de vertus en rapport avec cette tâche; de là, enfin, puisqu’on ne peut tout dire, les réparations offertes à l’honneur divin sous forme d’amendes honorables et de cérémonies solennelles, non pas seulement de la part de fidèles isolés, mais aussi, ça et là, de paroisses, de diocèses et de cités.

– La Fête du Sacré-Cœur, fête de réparation

C’est pourquoi, Vénérables Frères, de même que la pratique de la consécration, après des débuts modestes, s’est bien vite répandue au loin et a reçu finalement de Notre confirmation tout l’éclat désirable, de même Notre plus vif désir est de sanctionner officiellement de notre autorité apostolique la pratique déjà connue et propagée de l’expiation et de l’amende honorable et de la voir célébrée solennellement dans tout l’univers catholique.

Dans ce but, en la fête du Sacré Cœur de Jésus – qu’à cette occasion Nous décidons d’élever au rang de double de première classe avec octave – Nous décrétons et ordonnons que chaque année, dans toutes les églises du monde entier, on récite solennellement, d’après la formule jointe à cette lettre, la protestation ou amende honorable a Notre-Seigneur, dans laquelle toutes nos fautes sont déplorées, et hommage est rendu aux droits violés de notre Roi et de notre Seigneur très aimant.

          – Les effets qu’on peut en attendre

Sans nul doute, Vénérables Frères, l’institution de cette solennité sainte et sa généralisation dans l’Église universelle produiront des fruits nombreux et excellents non seulement pour chacun en particulier, mais pour la société tout entière, religieuse, civile ou familiale. Notre Rédempteur lui-même a promis, en effet, à Marguerite-Marie que « tous ceux qui, de la sorte, honoreraient son Cœur seraient comblés d’abondantes grâces célestes « . Les pécheurs même, en regardant celui qu’ils ont transpercés se sentiront émus par les gémissements et les pleurs de l’Église entière, déploreront à leur tour les insultes adressées au Souverain Roi et rentreront en eux-mêmes; ils craindront qu’endurcis dans leurs fautes ils ne pleurent trop tard et en vain sur lui, lorsqu’ils verront venir sur les nuées du ciel celui qu’ils ont transpercé. Quant aux justes, ils deviendront plus justes encore et plus saints; ils se voueront tout entiers et avec une ardeur renouvelée au service de leur Roi, qu’ils voient si méprisé, si attaqué, si souvent outragé, par-dessus tout, ils brûleront de zèle pour procurer le salut des âmes, en ayant toujours présente à la mémoire la plainte la divine Victime : A quoi donc sert mon sang ? et aussi la joie qu’éprouvera le Cœur sacré de Jésus pour un seul pécheur faisant pénitence !

Notre souhait le plus vif et Notre espoir le plus ferme, c’est que la justice de Dieu, qui eût, dans sa miséricorde, pardonné à Sodome pour dix justes, pardonne plus volontiers au genre humain, parce que la communauté tout entière, de tout lieu et de toute race, aura répandu ses instantes supplications et ses réparations efficaces, en union avec le Christ, son Médiateur et Chef.

CONCLUSION

MARIE RÉPARATRICE

A Nos vœux et à Nos efforts, que Marie la Vierge très bienveillante et la Mère de Dieu daigne sourire, elle qui nous donna Jésus notre Rédempteur, qui l’éleva, qui l’offrit comme victime au pied de la croix, et qui, par sa mystérieuse union avec le Christ et par une grâce particulière reçue de lui, fut aussi Réparatrice et est pieusement appelée de ce nom. Plein de confiance en son intercession auprès du Christ qui, seul Médiateur entre Dieu et les hommes, a voulu cependant s’associer sa Mère comme avocate des pécheurs et comme dispensatrice et médiatrice de ses grâces, Nous vous accordons du fond du cœur, comme gage des faveurs célestes et en témoignage de Notre bienveillance paternelle, à vous, Vénérables Frères, ainsi qu’à tous les fidèles confiés à vos soins, la Bénédiction Apostolique.

Donné à Rome, près Saint-Pierre le 8 mai 1928, la septième année de Notre Pontificat.

PIE XI, PAPE.

FÊTE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST – COMMENTAIRE DE MARIE NOELLE THABUT

31 mai, 2013

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FÊTE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST – COMMENTAIRE DE MARIE NOELLE THABUT

PREMIERE LECTURE – Genèse 14, 18-20


Comme Abraham revenait d’une expédition victorieuse
 contre quatre rois,
18 Melkisédek, roi de Salem,
 fit apporter du pain et du vin ;
 il était prêtre du Dieu très-haut.
19 Il prononça cette bénédiction :
 « Béni soit Abraham par le Dieu très-haut,
 qui a fait le ciel et la terre ;
20 et béni soit le Dieu très-haut,
 qui a livré tes ennemis entre tes mains. » 
 Et Abraham lui fit hommage du dixième de tout ce qu’il avait pris.

Melchisédech est nommé deux fois seulement dans l’Ancien Testament, ici dans le livre de la Genèse et dans le psaume 109/110 que nous lisons également ce dimanche. Deux fois, c’est peu, mais, curieusement, ce personnage devait jouer plus tard un grand rôle dans l’esprit de ceux qui attendaient le Messie et, un rôle bien plus grand encore chez les Chrétiens. La preuve, il est même cité dans une prière eucharistique ! Il nous intéresse donc au plus haut point.
 Nous savons qu’Abraham revenait d’une expédition victorieuse quand il a rencontré Melchisédech. A vrai dire, les festivités après une victoire militaire étaient certainement chose courante et la Bible nous les raconte rarement. Pourquoi celle-ci nous est-elle racontée ? Certainement parce que plus tard, peut-être même très longtemps après les événements, on a trouvé à cette histoire un intérêt particulier.
Je commence par vous rappeler l’histoire : une guerre vient d’éclater dans la région ; deux petites coalitions s’affrontent, cinq rois d’un côté, quatre de l’autre. Chacun des belligérants s’est évidemment entouré pour la bataille du meilleur de ses troupes. Le roi de Sodome fait partie des combattants. Précisons tout de suite que ni Melchisédech ni Abraham ne sont directement concernés au début.
 Mais les choses vont changer : à l’issue de la bataille, le roi de Sodome est vaincu ; or, parmi ses sujets, il y avait Lot, le neveu d’Abraham, qui est fait prisonnier. Abraham, prévenu, vole au secours de son neveu et délivre Lot et en même temps le roi de Sodome et ses sujets. Conformément aux usages de l’époque, le roi de Sodome va désormais devenir allié d’Abraham.
 C’est alors qu’intervient Melchisédech dont le nom signifie « roi de justice » : probablement pour un repas d’Alliance, mais l’auteur de notre texte ne le précise pas, car, à partir de ce moment, il change de sujet : il focalise son récit sur le personnage de Melchisédech et sa relation avec Abraham.
 Et que nous dit-il de Melchisédech ? Des choses assez inhabituelles dans la Bible :
 Premièrement, il n’a pas de généalogie ; deuxièmement, il est à la fois roi et prêtre, alors que pendant de nombreux siècles de l’histoire d’Israël, c’est une chose qui ne devait pas se produire ; troisièmement, il est roi de Salem : on pense qu’il s’agit peut-être de la ville qui sera plus tard Jérusalem quand David l’aura conquise pour en faire sa capitale ; quatrièmement, l’offrande apportée par Melchisédech se compose de pain et de vin et non pas d’animaux comme le sacrifice qu’offrira Abraham et qui nous sera raconté au chapitre 15 ; cinquièmement, Melchisédech bénit le Dieu très-Haut et bénit Abraham en son nom ; enfin, sixièmement, Abraham verse la dîme (c’est-à-dire le dixième de son butin de guerre) à Melchisédech ; cela signifie qu’il reconnaît son sacerdoce.
Toutes ces précisions ont certainement un grand intérêt pour notre auteur qui s’attache visiblement aux relations entre le pouvoir royal et le sacerdoce : par exemple, c’est la première fois que le mot « prêtre » apparaît dans la Bible ; et, clairement, Melchisédech a toutes les caractéristiques des prêtres puisqu’il offre un sacrifice, qu’il prononce une bénédiction de la part du « Dieu Très-Haut qui crée ciel et terre » et qu’Abraham lui offre la dîme, c’est-à-dire le dixième de ses biens.
 - On notera le silence absolu du texte sur les origines de Melchisédech : alors que, généralement, la Bible attache une très grande importance à la généalogie, surtout celle des prêtres, ce prêtre-là, Melchisédech, le premier de la liste, nous ne savons rien de lui… comme s’il était hors du temps…
 Voici donc un prêtre reconnu comme tel ; cela veut dire qu’il existait un sacerdoce bien avant l’institution légale du sacerdoce dans la loi juive, avant qu’on ne décide que tous les prêtres devaient être pris dans la tribu de Lévi, lequel est le fils de Jacob et donc l’arrière petit-fils d’Abraham. A certaines époques, quand on était mécontent du pouvoir des prêtres, on était peut-être bien content de leur rappeler qu’il peut y avoir des prêtres qui ne descendent pas de Lévi, c’est ce qu’on appelait « être prêtre selon l’ordre de Melchisédech » (c’est-à-dire à la manière de Melchisédech).
 Actuellement, aucun exégète ne sait dire de façon certaine ni par qui, ni quand ni dans quel but ce texte a été écrit. S’agissait-il de légitimer un sacerdoce différent, et lequel ? Ce texte pourrait dater de l’époque où la dynastie de David semblait éteinte à tout jamais et où l’on a commencé à entrevoir un Messie différent : non plus un roi descendant de David, mais un prêtre, capable d’apporter aux descendants d’Abraham la bénédiction du Dieu Très-Haut. On comprend alors ses titres : « roi de justice et roi de paix ».
 Plus tard, je vous le disais en commençant, le personnage de Melchisédech a été considéré comme un ancêtre du Messie. Nous le verrons mieux dans le psaume 109/110 que cette même fête du Corps et du Sang du Christ nous propose.
 Enfin, on ne se privera pas dans l’avenir de faire remarquer que Abraham n’était pas encore circoncis quand il a été béni par Melchisédech : puisque le rite de la circoncision ne sera donné à Abraham que plus tard, d’après le livre de la Genèse. Les Chrétiens, en particulier, en déduiront qu’il n’est pas nécessaire d’être circoncis pour être béni de Dieu. (On se souvient que c’était une question qui se posait dans les premières communautés chrétiennes composées de Juifs circoncis et de non-Juifs).
 Bien sûr, une offrande de pain et de vin, scellant un repas d’Alliance, offerte par les mains du roi de justice et de paix, vrai roi, vrai prêtre du Dieu Très-Haut… nous, Chrétiens, nous y reconnaissons le geste du Christ : et nous y découvrons la continuité du projet de Dieu. A chaque Eucharistie, nous refaisons le geste de Melchisédech accompagnant l’offrande de pain et de vin des mots « Tu es béni, Dieu de l’univers, toi qui donnes ce pain et ce vin… »
  ***
COMPLÉMENTS
 - Nous sommes au chapitre 14 du livre de la Genèse : le Dieu de Melchisédech s’appelle le Dieu Très-haut, exactement comme le Dieu d’Abraham. Mais les chapitres 12-13 et 15 qui sont des chapitres majeurs de l’histoire d’Abraham n’emploient pas le même nom de Dieu ! Ils l’appellent « le SEIGNEUR » (c’est-à-dire le Tétragramme YHVH). Le chapitre 14 est-il donc d’une autre venue que les chapitres qui l’entourent ?
 - Pour corser les choses, plus tard, on pensera que cette ville de Salem dont Melchisédech est le roi n’est autre que Jérusalem qui est justement la résidence du Dieu Très-Haut ; mais alors, cela voudrait dire que la religion pratiquée à Jérusalem avant sa conquête par David s’appelait donc déjà la religion du Dieu Très-Haut… Et le plus étonnant, c’est que, quelques versets plus bas, Abraham dira lui aussi : « Je lève la main vers le Seigneur, Dieu Très-Haut qui crée ciel et terre… »

HOMÉLIE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST – LE SAINT SACREMENT

31 mai, 2013

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HOMÉLIE DU CORPS ET DU SANG DU CHRIST – LE SAINT SACREMENT

GN 14, 18-20 ; 1 CO 11, 23-26 ; LC 9, 11B-17

Pour être bien compris, l’extrait d’un livre ou d’une lettre doit être replacé dans son contexte. C’est le cas pour les dix lignes où Paul rappelle aux Corinthiens les paroles et les gestes de ce que nous appelons l’institution de l’eucharistie.
Pourquoi ce rappel de l’événement fondateur ? parce que le comportement concret, égoïste et individualiste des chrétiens de Corinthe était en contradiction flagrante avec la célébration de l’eucharistie appelée la « fraction du pain ». Vingt ans seulement après la mort de Jésus, il y avait déjà une opposition entre la pratique sacramentelle et la pratique concrète de la vie ecclésiale. La fraction du pain est devenue un contre témoignage. « Quand vous vous réunissez en commun, leur écrit-il quelques lignes plus haut, ce n’est pas le repas du Seigneur que vous prenez ». (1)
Si Paul secoue vertement les chrétiens de Corinthe, ce n’est pas pour des questions de doctrine et de dogme. C’est parce qu’ils ont perdu de vue le sens de leur participation à l’eucharistie. Ils s’imaginent pouvoir être un avec le Christ, faire corps avec lui, sans se soucier d’être un avec leurs frères et sœurs invités au même repas. Or, la communion au Corps et au Sang du Christ n’est pas seulement d’ordre spirituel et sacramentel. Elle est aussi le signe, le désir et la volonté de réaliser cette unité avec lui, en nous et avec les autres, pour faire de la communauté le Corps du Christ.
Cette unité suppose aussi la solidarité et le partage. Non pas seulement le partage du pain eucharistique, mais aussi et tout autant le partage du pain quotidien. Un partage fraternel essentiel au sacrement, comme l’annonçait déjà la multiplication des pains.
« Quand vous mangez ce pain et buvez cette coupe, vous proclamez que le Seigneur est mort », leur rappelle Paul. Autrement dit : vous confessez que le Seigneur est allé jusqu’à la mort pour vous. Comment donc pourriez-vous être ses disciples, alors que, dans le repas très copieux qui précède le repas du Seigneur, vos excès de table et votre refus de partager avec des plus pauvres constituent un geste de mépris vis-à-vis de l’Eglise et un affront à ceux qui n’ont rien ? On ne peut pas dissocier artificiellement le spirituel des exigences concrètes de la vie quotidienne sous peine de désincarnation.
C’est ce que nous dit aussi l’évangile de la multiplication des pains, que les communautés chrétiennes primitives ont orienté dans un sens eucharistique. On y voit les apôtres, qui sont au service du spirituel, conseiller à Jésus de renvoyer ses auditeurs. Ils n’ont qu’à se débrouiller pour trouver un abri et de quoi manger. Ce n’est pas notre problème !
Jésus prend le contre-pied : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ». Bien sûr, ils cherchaient une nourriture spirituelle. C’est pourquoi ils nous ont suivis et écoutés toute la journée sans même se soucier de l’intendance. Ils nous ont fait confiance. Maintenant, c’est à nous de leur procurer de quoi manger. Ainsi, au lieu de se disperser, ils vont se retrouver convives du même repas pour partager le même pain. Un pain de communion qui signifie et invite à une vie fraternelle et solidaire.
C’est pourquoi l’eucharistie fait l’Eglise et l’Eglise se définit comme un « peuple », et plus précisément comme une « communion » qui doit refléter sur terre les relations d’égalité, de réciprocité, de charité, qui existent précisément entre le Père et le Fils dans l’Esprit Saint.
Ces vérités fondamentales et constitutives de l’eucharistie sont périodiquement minimisées, délaissées, jusqu’à être oubliées. Au profit de dévotions sans doute respectables mais secondaires et particulières. Il suffit de parcourir l’histoire de la messe pour s’en convaincre.
Vers le XIe siècle, par exemple, dans nos pays, les chrétiens ont perdu de vue la relation entre le Corps sacramentel du Christ (le pain consacré) et le Corps ecclésial du Christ, l’Assemblée, l’Eglise. La communion devient un acte purement individuel. Progressivement, ils ont même abandonné la communion. Il est vrai que la discipline pénitentielle et celle du jeûne eucharistique exigeaient de gros efforts. Alors, en compensation, on a cherché une sorte de remplacement de la communion : montrer et voir l’hostie consacrée. Le Saint Sacrement de l’Eucharistie va se réduire au saint sacrement de l’hostie exposée. A tel point que l’adoration va remplacer la participation active à l’eucharistie. Un catéchisme de 1734 va jusqu’à enseigner que la messe n’est qu’une des cinq manières d’honorer Jésus dans son Saint Sacrement. Mais elle ne vient qu’en cinquième position. Le plus important, ce sont les processions, puis les saluts, l’adoration des 40 heures, la communion, et enfin la messe. Nous n’en sommes plus là, heureusement, mais nous devons rester attentifs et prudents.
Les textes liturgiques de ce jour nous précisent à nouveau que l’eucharistie c’est faire le Corps du Christ, c’est rassembler pour unir. Et la loi de l’incarnation : on ne peut se soucier des « âmes » sans se préoccuper des corps. « Le pain eucharistique ne rassasie le cœur de l’homme qu’en lui donnant de mieux aimer ses frères et de leur procurer le pain qu’ils n’ont pas » (2).
Quant à « faire mémoire » de la mort et de la résurrection du Christ par l’eucharistie, c’est aussi affirmer et incarner notre décision d’entrer à sa suite, avec lui et grâce à lui, « dans la même voie d’obéissance et d’amour dont il nous a donné l’exemple ».
En réalité, « ne passe de l’Evangile que ce qui passe par l’humain ».

(1) 1 Co 11, 17-23
(2) « Guide de l’Assemblée chrétienne », T IV, Th. Maertens, J. Frisque, Casterman 1970, p 395.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008

HOMÉLIE DE L’ASCENSION DU SEIGNEUR, C

10 mai, 2013

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HOMÉLIE DE L’ASCENSION DU SEIGNEUR, C

Ac 1, 1-11 ; He 9, 24-28 ; 10, 19-23 ; Lc 24, 46-53

Si vous parcourez les quatre évangiles et les actes des apôtres, vous découvrirez des présentations différentes de l’Ascension. Ainsi, dans les Actes, Jésus disparaît à la fin d’un repas. Dans l’évangile de Luc, c’est en cours de route, après avoir béni les disciples. Marc évoque Jésus « enlevé au ciel ». Jean utilise un tout autre langage… Au cours de la fête de la Pâque, il fait dire à Jésus : « Je ne suis plus avec vous que pour un peu de temps, puis, je m’en irai vers celui qui m’a envoyé » (Jn 7, 33).
J’ai bien dit « présentation » et non pas « récit » ni compte rendu, ni reportage. Luc ne raconte pas ce qu’il a vu. Même avec une caméra perfectionnée, il n’aurait rien pu enregistrer. Il n’est pas témoin d’un miracle. Par contre, il exprime un mystère. Il veut nous faire partager une expérience de foi par des images et des symboles. Comme peut le faire un peintre, un poète, un mystique, ou tout simplement une personne attentive aux réalités spirituelles. C’est une façon de s’exprimer. On pourrait même parler d’un procédé littéraire. Ainsi, les orientaux utilisent admirablement bien le merveilleux pour exprimer l’ineffable. Pour nous faire comprendre, par exemple, qu’au-delà des apparences immédiates, visibles, matérielles, il y a une réalité divine au cœur même des réalités humaines. Une manière de s’exprimer, qui n’est pas habituellement la nôtre. De sorte que bien des images et des symboles, utilisés par les évangélistes, peuvent nous faire sourire, comme s’il s’agissait d’un monde irréel quelque peu enfantin. Il est vrai que nous vivons dans une tout autre culture. Habituellement, nous attachons plus d’importance à un fait qu’à une signification, qu’à un sens. D’où aussi, le danger de matérialiser les symboles . Il n’empêche que dans la vie courante, nous utilisons la symbolique. Celle des nombres, par exemple. Offrir un bouquet de roses a un sens, et le sens peut même varier selon le nombre de fleurs offertes. De même, personne ne fera appeler une ambulance si je vous dis qu’une mauvaise nouvelle vient de me couper bras et jambes.
Dans la Bible, la nuée n’est pas un gros nuage, mais le symbole de l’invisible, celui de la présence de Dieu, qu’on ne peut voir ni vraiment nommer, etc.
Les évangélistes, pétris de culture biblique, soulignent constamment l’importance du sens, même en dramatisant les faits. D’où, les interventions du tonnerre, des éclairs, des tremblements de terre, qui étaient, pour eux, autant d’expressions symboliques traditionnelles et familières. D’autant plus, qu’à l’époque, ils en ignoraient la véritable cause. Le tonnerre ne pouvait être que la voix de Dieu.
Voyez aussi, dans notre liturgie, le cierge pascal, symbole du Christ ressuscité, lumière du monde. Autrefois, l’éteignait après la proclamation de l’évangile. Signe d’un départ, d’une disparition. Or, ce n’est pas simplement d’un départ qu’il s’agit. C’est l’inauguration du temps de l’Esprit et du temps de l’Eglise. Jésus passe la main, si l’on peut dire. Il y a une transmission de pouvoir et de mission. Le Ressuscité envoie ses disciples dans le monde, pour qu’ils répandent le message de la Bonne Nouvelle, précise saint Matthieu qui, lui, ne parle pas d’ascension. Par contre, il évoque les doutes exprimés par certains des disciples, tout en faisant dire à Jésus : « Je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin des temps ». Mais avec un autre mode de présence. Ainsi, il est présent « là où deux ou trois sont réunis en son nom ». Il est présent dans le pain rompu et partagé…
Alors, pourquoi fixer le ciel, pourquoi pleurer sa mort ?, chante Michel Scouarnec. Sa tombe est vide, le ciel est vide, mais notre cœur est plein de lui. Nos mains sont vides, nos yeux sont vides, mais nos chemins mènent vers lui. Dieu vivant.
Il ne s’agit donc pas de rester là, plantés, à regarder le ciel, les bras croisés, attristés, sans rien faire, en attendant son retour. Il faut aussi regarder la terre, regarder l’humanité. Un monde à évangéliser, à transformer. C’est là que le Christ nous envoie comme témoins. Nous assurons la relève. Nous sommes les artisans d’un monde nouveau.
Dans l’évangile de Jean, Jésus déclare à Pilate : « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage ». Il n’est pas venu d’abord pour enseigner une doctrine ni proclamer des règles de bonne conduite. Non. D’abord témoigner. Et pour témoigner, il faut beaucoup d’amour, non seulement envers Dieu, mais envers nos frères et sœurs en humanité.
Avec l’Ascension, nous pouvons aussi activer le symbolisme de la montée, de l’escalade. C’est, en effet, une invitation à nous élever, à aider les autres à grandir. Monter ensemble, progresser ensemble, en aidant les plus faibles à vivre, à survivre, à marcher et à poursuivre leur route. Depuis la mort et la résurrection du Christ, ce n’est même pas seulement l’Eglise des baptisés qui est devenue le corps du Christ, c’est l’humanité tout entière. Là où il y a beaucoup de « saints cachés », disait saint Augustin. Or, nous sommes ses yeux, ses mains, sa parole. C’est une nouvelle présence du Christ. Nous sommes vraiment envoyés pour accomplir des miracles de réconciliation et de paix, de justice et de partage… N’attendons surtout pas demain pour nous mettre au travail, pour participer au projet de Jésus sur l’humanité.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008

L’ANNONCIATION DU SEIGNEUR, TEXTE DE HENRI CAFFAREL – en 2013 est célébrée le 8 Avril

8 avril, 2013

http://www.saintjosephduweb.com/L-Annonciation-du-Seigneur-texte-de-Henri-Caffarel_a201.html

L’ANNONCIATION DU SEIGNEUR, TEXTE DE HENRI CAFFAREL -  en 2013 est célébrée le 8 Avril

Nous reproduisons ce texte du fondateur des équipes Notre-Dame, magnifique texte sur l’Annoncation du Seigneur, publié dans  » Prends chez toi Marie, ton épouse », éditions du feu Nouveau, p28 à 35.

 » L’ANNONCIATION DU SEIGNEUR »
La scène qui va faire de Marie, en quelques instants, la Mère de Dieu, et la mettre ainsi au sommet de la Création et de la Rédemption, se déroule dans une simplicité absolue. Saint Luc, dans son évangile, le souligne par le contraste qu’il établit entre l’annonce à Zacharie, père de Jean-Baptiste ( 1, 5-22), et l’annonce à marie, mère de jésus ( luc, 1, 26-38). Il faut relire ces deux écrits volontairement parrallèles, pour éprouver la force de l’opposition.
Le cadre, d’abord. D’un côté, la Ville Sainte, le temple ; et dans ce temple, le sanctuaire, avec l’autl des parfums recouvert d’or, près du voile qui masque le Saint des Saints. De l’autre côté, une province reculée, à l’écart des grandes communications, à la population mélangée, que les Juifs appelaient méprisamment  » la Galilée des Gentils » ; et dans cette province, une bourgade inconnue, que l’Ancien testament ne nomme pas une seule fois, et la seule idée qu’il s’y passe quelque chose fait rire les voisins :  » De Nazareth, s’esclaffera plus tard Nathanaël, peut-il sortir quelque chose de bon ?  » ( Jn, 1, 46)
Les personnages, ensuite. D’un côté, le prêtre Zacharie qui, seul dans le Sanctuaire, accomplit un acte solennel de son sacerdoce : l’offrande de l’encens sur l’autel des parfums, tandis qu’à l’extérieur se presse une foule recueillie. De l’autre, une petite villageoise de treize ou quatorze ans, seule dans une maison quelconque, et que sa vie de prière n’empêche pas de vaquer aux soins domestiques.
L’action enfin. d’un côté, une manifestation spectaculaire, et qui va tout de suite faire du bruit. De l’autre, un colloque de quelques mots, qui restera enfoui dans un profond secret.
Et pourtant ce qui se passe à Nazareth est incommensurable avec ce qui s’est passé au Temple. Le miracle n’est pas seulement plus divin, mais absolument divin. Dieu n’agit pas seulement, Il vient. Et c’est en même temps beaucoup plus simple, comme si Dieu voulait dire que, plus ses oeuvres sont grandes, plus il tient à la modestie des choses et des êtres pour les accomplir.
 Marie est donc dans sa maison comme tous les jours. Comme tous les jours, elle range, elle nettoie, elle cuisine. Inutile d’imaginer  » Marie à son livre d’heures ». Elle s’occupe, mais son coeur est libre d’aller vers ce qu’elle aime. Et ce qu’elle aime, c’est d’abord la conversation avec Dieu ; pour la nourrrir, il lui suffit de se rappeler les grands textes de la Bible qu’elle connaît bien, les psaumes qui chantent dans sa mémoire et sur ses lèvres, les prophéties qui, de siècle en siècle, ont annoncé le Messie à venir et qui bercent Israël d’un immense espoir, que certains prennent pour un rêve. Mais elle, qui y croit passionnément, mystiquement, voudrait être pour quelque chose dans la venue du Sauveur. Comment ? Elle n’en sait rien. Les vues de Dieu sont insondables. Et il suffit d’être disponible quand il parle ;
Ce qu’elle aime, c’est donc Dieu avant tout. Mais elle aime aussi ce jeune homme beau et viril, Joseph, qui s’est déjà engagé envers elle, et envers qui elle s’est engagée. Comment ne pas penser à lui en même temps qu’à Dieu, puisque leur prochain mariage est voulu de Dieu ? A l’instant où l’Ange se manifeste, Marie a le coeur rempli de Dieu mais aussi tout donné à Joseph.
Le Messager s’approche, parle. Marie le regarde sans surprise, étant de plein pied avec les choses de Dieu ; mais comme ses paroles sont étrangement solennelles ! Chaque mot tombe sur elle, lourd de mystère :  » Réjouis-toi », c’est plus qu’un simple salut. C’est une invitation à la joie, et très particulièrement à la joie messiannique. Marie se souvient que cet impératif annonçait dans la Bible la venue de Dieu parmi son peuple :  » Pousse des cris de joie, fille de Sion ! Pousse des cris d’allegresse, Israël ! Réjouis-toi et exulte à plein coeur, fille de Jérusalem ! Le roi d’Israël, le Seigneur, est en toi » ( So 3,14-15) se pourrait-il qu’enfin… ? mais pourquoi ces paroles lui sont-elles adressées ?
 » Toi qui as la faveur de Dieu.  » L’Ange ne dit pas  » Marie » comme c’est la coutume. Il semble lui donner un autre nom que le sien, un nom prophétique, comme chaque fois que Dieu désigne un élu pour une mission. Mais alors, Marie serait-elle l’objet de la faveur divine ? Pour quelle tâche ?
 » Le Seigneur est avec toi ». Elle sait bien que le Seigneur est avec ceux qui croient en lui. Mais là, il s’agit bien, semble-t-il, d’une présence toute particulière, en rapport avec la  » joie » et la  » prédilection » qui précèdent. Marie, la toute humble, la pauvre du Seigneur, plie sous le choc. Que lui arrive-t-il ? L’Evangile, toujours avare de mots affectifs, note qu’elle fut  » bouleversée ».
L’Ange reprend alors les mêmes formules en d’autres termes : « Ne crains point ( = réjouis- toi), Marie, ( cette fois son nom est dit), tu as trouvé faveur auprès de Dieu ( = toi qui as la faveur de Dieu) » Et d’un trait, il livre la nouvelle inouïe :  » Tu vas concevoir et tu enfanteras un fils, auquel tu donneras le nom de Jésus. Il sera grand et on le tiendra pour le Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père, il règnera à jamais sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin » ( Luc, 1, 31-32)
Cette fois, plus de doute. C’est bien sur elle que déferle l’énorme vague de l’espérance messiannique, venue du fond de l’histoire humaine. Le règne du Seigneur au mileu de son peuple, la venue du Messie, fils de David, ces deux grandes promesses qui rythmaient l’Ancien Testament et qui avaient été l’âme de sa propre prière, c’est par elle, Marie, qu’ils s’accompliront.
Mais pour s’engager plus lucidement dans le plan de Dieu, pour mettre son intelligence de pair avec le consentement profond de sa volonté, elle pose une question :  » Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais pas d’homme ? « 
Il ne s’agit pas d’une objection, d’une demi-incrédulité, comme celle de Zacharie ; sinon, elle ne recevrait pas une réponse favorable de l’Ange et, plus tard, Elisabeth ne la bénirait pas pour  » avoir cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit ». Marie est tout élan vers Dieu et ne saurait rien refuser, ni rien mettre en doute. Sa question signifie :  » Si je dois être mère, comment garderai-je ma virginité ? » Car cette virginité n’est pas seulement, dans sa pensée, un état de fait provisoire, mais une volonté définitive. Entre cette virginité et la mission qui lui est proposée, elle ne voit pas la compatibilité. Et elle veut la voir, pour entrer totalement dans le dessein de Dieu.
En même temps,  » l’homme » qu’elle évoque en cet instant n’est pas simplement l’homme en général, c’est cet homme tendrement aimé, Joseph, dont son coeur de femme est rempli. L’homme  » qu’elle-ne-connaît-pas », au sens biblique et physique du mot, mais qui est pourtant celui auquel elle a noué son destin et à qui elle pense sans cesse, ne sera-t-il pour rien dans ce mystère ? A l’arrière-plan de l’interrogation de Marie, se profile son amour pour Joseph.
L’Ange ne répond qu’à la question directement posée :  » l’Esprit Saint viendra sur toi et l’ombre de la puissance du Très-Haut te couvrira ; aussi l’enfant à naître qui sera saint, sera tenu pour le Fils de Dieu ». C’est à Joseph, un peu plus tard, qu’il apportera la réponse complémentaire.
Là encore, les mots ont pour Marie une profonde résonance biblique ; l’Esprit viendra sur toi, comme sur les hommes choisis par Dieu, comme sur le Messie, l’Emmanuel annoncé, comme sur la communauté de la fin des temps. La puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre, comme la nuée qui précédait les Hébreux dans le désert, et qui enveloppait la tente de réunion où reposait l’Arche Sainte.
Marie comprend, sans aucun doute, qu’une intervention spéciale de Dieu va faire de son sein virginal une nouvelle Tente de Réunion, une nouvelle Arche d’Alliance, où naîtra le Messie, sans qu’un homme ait besoin de l’approcher. Comprend-elle aussi que le Saint qui naîtra d’elle sera le Fils de Dieu, au sens le plus absolu du terme, probablement non, car l’Ancien Testament n’a jamais dit que le Messie serait Dieu, et rien n’autorisait une hypothèse aussi audacieuse. Elle voit bien que son Fils, le Messie, sera plus proche de Dieu qu’aucun libérateur d’Israël ; mais il faudra des mois, des années, pour qu’elle découvre que sa maternité messianique est aussi une maternité divine.
Pourtant, si sa foi, comme toute foi, reste obscure, elle n’en est pas moins totale. Et elle prononce le mot que Dieu attendait d’elle, que l’univers entier attendait sans le savoir :  » Je suis la servante du Seigneur ; qu’il m’advienne selon ta volonté ». La soumission est inconditionnelle. L’avenir de son enfant reste dans l’ombre, le sien également ; mais d’avance, elle souscrit à tout. Et elle y souscrit, non passivement , mais de toute l’énergie de son être ; le  » fiat » est impératif, c’est un ordre qu’elle se donne à elle-même, par lequel elle prend en main sa vie et la jette en avant. Il y a ainsi des créatures qui restent dans l’attende et qui, une fois décidées, révèlent une force extrême.
L’Ange est parti. Marie est toujours là, dans sa maison, la même que tout à l’heure en apparence. Pourtant, c’est une autre Marie. Elle médite le message, et peu à peu, il l’envahit et la transfigure. Comme toutes les femmes d’Israël, elle aura un enfant et se retrouvera sur la grand-route de la bénédiction divine traditionnelle. Mais son enfant ne ressemblera à aucun autre ; elle même ne ressemblera à aucune autre mère. et du coup, tout s’éclaire et se coordonne. Dieu lui avait inspiré de rester vierge ; Dieu lui demande aujourd’hui d’avoir un enfant ; Dieu ne se contredit pas, mais il fallait qu’en choisissant la virginité, elle renonçât à être mère pour pouvoir le devenir aujourd’hui. Elle découvre qu’on ne possède jamais ( mais alors au centuple) que ce que l’on donne. Parce qu’elle a renoncé délibérémént aux joies pures et fortes de la maternité, elle les retrouvera et les éprouvera comme jamais aucune mère ne les as connues.
Et son enfant sera le Messie. A sa joie de mère, s’ajoute celle de donner un Sauveur au monde. L’attente séculaire d’Israël, l’attente millénaire des hommes, a enfin trouvé sa réponse. Et Marie la Servante est la dépositaire de cet espoir comblé. Pour l’instant, dans la maison de Nazareth, sa joie surpasse toute expression, et Marie s’abîme dans un silence adorant.
P. Henri Caffarel, fondateur des équipes Notre-Dame )

SOLENNITÉ DE LA PRÉSENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE – HOMÉLIE

31 janvier, 2013

http://www.la-cotellerie.com/cotellerie/homelies_toC.html#20070202

HOMÉLIE DU FRÈRE PHILIPPE-MARIE

LE 2 FÉVRIER 2007

SOLENNITÉ DE LA PRÉSENTATION DU SEIGNEUR AU TEMPLE

En communauté, nous lisons en ce moment au réfectoire un livre sur la vie du professeur Jérôme Lejeune. Ce grand généticien a su admirablement expliquer comment dès le premier instant de sa vie le petit d’homme est totalement contenu dans la première cellule. Il me semble que l’on peut en dire autant du mystère de la vie et de la mission de Jésus en cet événement de sa Présentation au Temple par Marie et Joseph tel que nous le rapporte l’évangéliste Saint Luc. La page d’Évangile que nous venons d’entendre, renferme en germe tous les mystères joyeux, lumineux, douloureux et glorieux de la vie de Jésus mais aussi de la vie de l’Église, car l’Église est le corps du Christ en continuelle formation. Saint Luc a voulu souligner que cet événement de la Présentation de Jésus au Temple était chargé d’une signification fondamentale : c’est dans une perspective de Rédemption qu’il convient de lire et d’interpréter ce passage de l’Évangile.
En effet, ce récit est construit sous la forme de ce que l’on appelle une inclusion : il commence et se termine par une même mention de la Rédemption. Marie et Joseph viennent consacrer l’enfant au Seigneur et offrir en sacrifice un couple de tourterelles. Cette consécration au Seigneur du premier-né mâle renvoie à l’événement rédempteur fondamental d’Israël, fondateur : la libération d’esclavage d’Égypte. Dieu a su faire la différence entre les premiers-nés des Égyptiens et les premiers-nés des Hébreux. Tout garçon premier-né des juifs doit désormais être mis à part, consacré au Seigneur et racheté de la mort par l’offrande sacrificielle d’un couple de tourterelles ou deux petites colombes. Ce commandement, ce précepte est le deuxième plus grand commandement que doit pratiquer tout Fils d’Israël. Le premier, c’est la prière du « Shema Israël », écoute Israël qui célèbre ml’amour du Dieu unique, du Dieu créateur, le Créateur de tout. E le deuxième précepte, qui concerne la consécration du Fils premier-né, expression de l’amour envers le Dieu rédempteur, le Dieu sauveur ; Israël, le peuple de la mémoire, doit faire mémoire de ces deux événements, la Création et la Rédemption de l’Esclavage d’Égypte. Dans les deux cas, dans ces deux préceptes, il est dit : « ce sera pour toi un signe sur ta main, un bandeau sur ton front. » Nous avons tous vu ces photos de juifs qui disent cette prière de « Shema Israël » avec précisément sur le front, sur le bras un passage de la loi attaché avec des phylactères.
En présentant Jésus au temple, Marie et Joseph font cet acte de mémoire, ils font mémoire de la Rédemption. C’était le début de l’Évangile.
Et le récit de Saint Luc s’achève par une deuxième annonce de la Rédemption à propos de la prophétesse Anne qui parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la Rédemption de Jérusalem. Comme lorsqu’on fait mémoire d’une intervention de Dieu dans l’histoire de son peuple, cette intervention s’accomplit pour ceux qui font cet acte de mémoire ; la Rédemption vécue par les Pères délivrés de l’Égypte s’accomplit, s’achève dans cette démarche que sont en train de faire Marie et Joseph. Et c’est ce que comprend le vieillard Syméon éclairé par l’Esprit Saint. Comme Myriam autrefois, après le passage de la mer Rouge à pieds secs, Syméon chante le salut qu’il voit de ses yeux. Il chante ce mystère de joie qu’est le salut en train de s’accomplir dans ce petit enfant. Il chante ce mystère de lumière destiné non seulement à Israël mais aussi aux nations païennes, à tous les hommes. Il chante ce mystère glorieux, car c’est la gloire d’Israël de porter dans son sein le Rédempteur du monde, le rédempteur de l’homme. Mais il annonce aussi que la rédemption cachée dans cet enfant sera encore un mystère de douleur et que la Vierge Marie sera associée d’une manière unique à ce mystère de douleur : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division, et toi même, ton cœur sera transpercé par une épée. »
C’est la première annonce de l’aspect douloureux de la Rédemption, dans l’Évangile. Il y en aura trois autres, faites par Jésus cette fois. Il est intéressant de remarquer comment ces annonces sont reçues en chacune de ces occasions. C’est aux apôtres que Jésus annonce à trois reprises sa Passion, sa mort et sa résurrection. À la première annonce, Pierre refuse cette perspective. À la deuxième annonce, les douze discutent entre eux pour savoir qui était le plus grand. À la troisième annonce, les fils de Zébédée viennent demander les première places dans le royaume. Marie reçoit cette annonce bien différemment ;: elle ne refuse pas, elle ne discute pas, elle ne recherche pas la première place. Marie accueille en silence. Mère Marie de la Croix notre fondatrice nous parle souvent du silence adorant de Marie. Un tel mystère de douleur échappe aux limites de notre compréhension humaine : Marie ne discute pas, elle sait que la sagesse de Dieu excédera toujours sa propre compréhension des choses. Alors, elle adore, elle entre dans un silence adorant, elle adhère, elle consent, elle se livre à ce mystère. En ce jour de révélation, elle forge son cœur pour être la femme forte aux côtés de l’homme fort, l’homme des douleurs, le jour venu. Marie s’abandonne au dessein divin. Elle sait que c’est Dieu qui conduit toutes choses. Elle se contente de faire ce qu’elle doit.
« Lorsqu’ils eurent accomplis tout ce que prescrivait la loi du Seigneur, ils retournèrent en Galilée dans leur ville de Nazareth. » Marie redescend à Nazareth ; c’est dans l’humble quotidien, dans la fidélité au devoir d’État qu’elle se préparer à sa mission de Mère du Rédempteur, de Corédemptirce. L’Église est le corps mystique du Christ. La mission rédemptrice du Christ se continue dans l’Église à travers des mystères de joie, de lumière, de gloire, mais aussi de douleur. Le mystère rédempteur de Jésus, c’est aussi notre mystère. Apprenons de Marie l’attitude juste par laquelle nous pourrons pleinement collaborer à la Rédemption, à la délivrance, Amen.

LA PRÉSENTATION DE MARIE AU TEMPLE PAR LE P. LEV GILLET (Orthodoxie)

31 janvier, 2013

http://www.orthodoxa.org/FR/orthodoxie/fetes/fete21_11.htm

LA PRÉSENTATION DE MARIE AU TEMPLE PAR LE P. LEV GILLET

(EGLISE ORTHODOXE D’ESTONIE)

Quelques jours après le commencement de l’Avent, l’Eglise célèbre la fête de la Présentation de la Sainte Vierge au Temple (21 Novembre). Il est juste que, au début du temps de préparation à Noël, notre pensée se porte vers la Mère de Dieu, dont l’humble et silencieuse attente doit être le modèle de notre propre attente pendant l’Avent. Plus nous nous rapprocherons de Marie par notre prière, notre docilité, notre pureté, plus se formera en nous Celui qui va naître.
Que Marie, toute petite enfant, ait été présentée au Temple de Jérusalem pour y vivre, désormais appartient au domaine de la légende, non à celui de l’histoire (D’après les Evangiles apocryphes [le pseudo-Jacques, le pseudo Matthieu], Marie aurait été amenée au temple par ses parents, à l’âge de trois ans, et elle y serait demeurée. La fête de la Présentation a d’abord été célébrée en Syrie [qui est justement le pays des apocryphes] vers le 6è siècle. Au 7 ou 8è siècle, des poèmes liturgiques grecs étaient composés en l’honneur de la Présentation. Néanmoins le ménologe de Constantinople, au 7è siècle ne mentionne pas encore cette fête. Elle était cependant célébrée à Constantinople au 11è siècle. Les papes d’Avignon,14è siècle, introduisirent la Présentation dans l’Occident latin. C’est en vain que le papre Pie 5, plus soucieux de vérité historique, la raya du bréviaire et du calendrier romains, au 16è siècle. Le pape Sixte 5, au même siècle, l’y remit). Mais cette légende constitue un gracieux symbole dont nous pouvons tirer les plus profonds enseignements spirituels.
Les trois lectures de l’Ancien Testament lues aux vêpres, le soir du 20 novembre (donc au début du 21 novembre, puisque la journée liturgique va du soir au soir), ont rapport au Temple. La première leçon (Exode, ch. 40) évoque les ordres donnés par Dieu à Moïse concernant la construction et l’arrangement intérieur du tabernacle. La deuxième leçon (1 Rois 7: 51-8:11) décrit la dédicace du Temple de Salomon. La troisième leçon (Ezéchiel 43:2744:4), déjà lue le 8 septembre, en la fête de la Nativité de la Vierge, nous parle de la porte du sanctuaire, fermée à tout homme et par laquelle Dieu seul entre. Ces trois textes ont symboliquement pour objet la Mère de Dieu elle-même, temple vivant et parfait.
Les évangiles lus à matines et à la liturgie sont ceux qui ont été lus lors de la fête du 8 septembre. (…) Quant à l’épître lue aujourd’hui (Hébreux 9:1-7), elle rappelle l’arrangement du sanctuaire et du « saint des saints » : ce texte lui aussi se rapporte symboliquement à Marie.
Le sens spirituel de la fête de la Présentation est développé dans les divers chants de l’office et de la liturgie. Les deux thèmes principaux que nous y trouvons sont les suivants. D’abord la sainteté de Marie. La petite enfant séparée du monde et introduite au Temple pour y demeurer évoque l’idée d’une vie séparée, consacrée, «présentée au Temple», une vie d’intimité avec Dieu : « Aujourd’hui la Toute Pure et toute sainte entre dans le Saint des Saints». Il est évident que l’Eglise fait ici une allusion spéciale à la virginité, mais toute vie humaine, dans des mesures diverses, peut être une vie «présentée au Temple», une vie sainte et pure avec Dieu. Le deuxième thème est la comparaison entre le Temple de pierre et le Temple vivant : «Le Temple très pur du Sauveur… est conduite aujourd’hui dans la maison du Seigneur, apportant avec elle la grâce de l’Esprit divin ». Marie, qui portera le Dieu-Homme dans son sein, est un temple plus sacré que le sanctuaire de Jérusalem ; il convenait que ces deux temples se rencontrassent, mais ici c’est le temple vivant qui sanctifie le temple bâti. La supériorité du temple vivant sur le temple de pierre est vraie d’une manière spéciale de Marie, parce qu’elle était l’instrument de l’Incarnation. Mais, d’une manière plus générale, cela est vrai de tout homme uni à Dieu : «Ne savez-vous que vous êtes le temple de Dieu » (1 Co 3,16) ?… « Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit (1 Co 6, 19) ?».
D’autres pensées, que les textes liturgiques n’expriment pas explicitement, nous sont cependant suggérées par cette fête. Si notre âme est un temple où Dieu veut demeurer, il convient que Marie y soit «présentée» : il faut que nous ouvrions notre âme à Marie, afin qu’elle vive dans ce temple, notre temple personnel. D’autre part, puisque l’Eglise entière, puisque toute l’assemblée des fidèles est le corps du Christ et le Temple de Dieu, considérons la fête d’aujourd’hui comme la Présentation de Marie dans ce Temple, la sainte Eglise universelle. Ce Temple qu’est l’Eglise catholique rend aujourd’hui hommage à ce Temple qu’est Marie.

« L’an de grâce du Seigneur » par Un moine de l’Eglise d’Orient Ed Cerf (p:78-80)

Etude biblique sur le baptême de Jésus

9 janvier, 2013

http://www.croixsens.net/jesus/bapteme2.php

Etude biblique sur le baptême de Jésus

  À prime abord, il peut surpendre que Jésus ait été vers Jean-Baptiste pour se faire baptiser. Jean-Baptiste lui-même en a été étonné et au départ, ne voulait pas baptiser Jésus, qu’il savait être le Messie promis par les prophètes.
1° POURQUOI JEAN-BAPTISTE NE VOULAIT-IL PAS BAPTISER JÉSUS ?
On lit cela dans l’évangile de Matthieu qui parle aussi du baptême de Jésus, mais plus en détail (Mt.3:13-15).
Mt.3:13 Alors Jésus vint de la Galilée au Jourdain vers Jean, pour être baptisé par lui. 14 Mais Jean s’y opposait, en disant: C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et tu viens à moi! 15 Jésus lui répondit: Laisse faire maintenant, car il est convenable que nous accomplissions ainsi tout ce qui est juste. Et Jean ne lui résista plus.
Jean-Baptiste baptisait les gens qui se repentaient pour qu’ils reçoivent le pardon de leurs péchés. Jean savait que Jésus n’avait jamais péché, il en avait donc conclu justement que Jésus n’avait donc pas besoin de son baptême de repentance. Jean avait réalisé que, à cause de ses propres péchés, c’était plutôt lui qui avait besoin d’être baptisé par Jésus. Il avait déjà reconnu en Jésus le Christ, l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde. Il ne s’était jamais imaginé qu’un jour il baptiserait le Messie. Aucun passage dans l’Ancien Testament ni aucun écrit rabbinique ne mentionnaient que le Messie se ferait baptiser. Jean n’avait donc pas saisi cependant toute la portée que Dieu donnait à son baptême, comme Jésus le lui fera remarquer.
2° POURQUOI JÉSUS S’EST-IL FAIT BAPTISER ? Jésus s’est fait baptiser par Jean-Baptiste, non pas parce que Jésus avait péché, comme on vient de le mentionner, mais parce que c’était la chose juste à faire, comme Jésus l’a dit à Jean-Baptiste (Mt.3:15); parce que c’est ce que Dieu voulait. Jésus faisait toujours ce que Dieu voulait.
Jean 8:29 Celui qui m’a envoyé est avec moi; il ne m’a pas laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui est agréable.
En se faisant baptiser par Jean, certains érudits comprennent que Jésus a voulu ainsi se montrer solidaire de son peuple, comme le serviteur de l’Éternel annoncé par Ésaïe. Il est devenu leur représentant. Le baptême de Jésus est l’acte formel par lequel il se vide de lui-même (Ph.2:7) en devant pauvre pour nous, 2Co.8:9.
Selon Edersheim, le baptême de Jean n’était pas tout d’abord une baptême de repentance, mais plutôt de consécration, une initiation prépratoire pour la nouvelle alliance du royaume. Quand ce baptême était appliqué à des pécheurs, il était vraiment un «baptême de repentance», mais pas quand il était appliqué à Jésus qui était sans péché. Si le baptême de Jean avait été premièrement et tout le temps un baptême de repentance, Jésus n’aurait pas pu s’y soumettre.
Bien au contraire, Jésus s’y soumet en soulignant à Jean que c’est ainsi qu’ils accompliront tout ce qui est juste aux yeux de Dieu. Jean l’a finalement compris aussi et n’a plus de résistance à le baptiser pour le consacrer comme Messie. Et ce fut toute une consécration pour Jésus – le Saint-Esprit qui descend comme une colombe et la voix de Dieu le Père qui se fait entendre du ciel. Rappelons-nous que «Messie» en hébreu signifie «Christ» en grec et que Christ en français donne «oint». L’eau du baptême de Jean sur Jésus représentait l’onction du Saint-Esprit venant sur lui, le Messie, l’Oint.
Ce baptême est une prémisse du nôtre qui illustre le moment où le Saint-Esprit descend sur nous pour faire de nous des enfants de Dieu et nous fait appeler Dieu «Abba, Père».
Romains 8:15 Et vous n’avez point reçu un esprit de servitude, pour être encore dans la crainte; mais vous avez reçu un Esprit d’adoption, par lequel nous crions: Abba! Père!
Galates 4:6 Et parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans nos coeurs l’Esprit de son Fils, lequel crie: Abba! Père!
En décidant de nous faire baptiser au nom de Jésus, nous suivons réellement les traces de Jésus. C’est un acte de consécration où nous renonçons publiquement à nous-mêmes et décidons de nous offrir au Seigneur pour le servir. Le baptême ne se fait qu’une fois, mais l’acte de consécration devra se répéter au besoin.
Ro.12:1 Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable. 2 Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait.
3° Qu’est-ce que Jésus a fait en sortant de l’eau ?
Il priait. Dans l’évangile de Luc, Lu.3:21, on lit que Jésus priait. Le texte ne dit pas le contenu de la prière de Jésus, mais laisse entrevoir que ce qui se passa ensuite était la réponse à cette prière :
Lu.3:21 Tout le peuple se faisant baptiser, Jésus fut aussi baptisé; et, pendant qu’il priait, le ciel s’ouvrit, 22 et le Saint-Esprit descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe. Et une voix fit entendre du ciel ces paroles: Tu es mon Fils bien-aimé; en toi j’ai mis toute mon affection.
Jésus savait ce qui s’en venait, il avait exhorté Jean de coopérer à faire ce qui était juste, et maintenant, en sortant de l’eau, il priait probablement le Père de faire descendre le Saint-Esprit sur Lui pour qu’il puisse commencer son ministère public, en prêchant avec autorité, en chassant les démons et en guérissant les malades par la puissance du Saint-Esprit. Jésus pouvait ainsi accomplir la prophétie d’Esaïe 61 qu’il a lu dans la Synagogue:
Lu.4:18 L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, 19 pour publier une année de grâce du Seigneur.
Mt.12:28 Mais, si c’est par l’Esprit de Dieu que je chasse les démons, le royaume de Dieu est donc venu vers vous.
Gloire à Dieu et à Jésus, c’est le même Saint-Esprit que le Père et le Fils font habiter en nous par la foi !
Romains 8:11 Et si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a ressuscité Christ d’entre les morts rendra aussi la vie à vos corps mortels par son Esprit qui habite en vous.
Jean 14:12 En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit en moi fera aussi les oeuvres que je fais, et il en fera de plus grandes, parce que je m’en vais au Père; 13 et tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. 14 Si vous demandez quelque chose en mon nom, je le ferai. 15 Si vous m’aimez, gardez mes commandements. 16 Et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu’il demeure éternellement avec vous, 17 l’Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu’il ne le voit point et ne le connaît point; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous.
4° QUELLE FORME AVAIT PRIS LE SAINT-ESPRIT QUAND IL EST DESCENDU SUR JÉSUS ?
UNE COLOMBE
Mc.1:9 En ce temps-là, Jésus vint de Nazareth en Galilée, et il fut baptisé par Jean dans le Jourdain.
10 Au moment où il sortait de l’eau, il vit les cieux s’ouvrir, et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe.
11 Et une voix fit entendre des cieux ces paroles: Tu es mon Fils bien-aimé, en toi j’ai mis toute mon affection.
5° Pourquoi une colombe, pourquoi pas une langue de feu comme à la Pentecôte ?
Les langues de feu annonçaient la prédication de l’évangile avec hardiesse dans toutes les langues. Jésus n’avait été envoyé qu’aux brebis perdus d’Israël, cf. Mt.15:24.
6° QUELLE VERTU OU QUALITÉ REPRÉSENTE LA COLOMBE ?
- La perfection, Ca.5:2, la simplicité (littéralement en grec «sans mélange»), Mt.10:16, donc la pureté, la sainteté de Dieu (Pensez au SAINT-Esprit)
Ca.5:2 C’est la voix de mon bien-aimé, qui frappe: – « Ouvre-moi, ma soeur, mon amie, ma colombe, ma parfaite! »
Mt.10:16 Voici, je vous envoie comme des brebis au milieu des loups. Soyez donc prudents comme les serpents, et simples comme les colombes.
7° Dans quelle autre histoire biblique voit-on une colombe se déplacer au-dessus des eaux ?
Dans l’histoire de Noé.
8° Cette colombe avait-elle trouvé un endroit où se poser ?
Genèse 8:8 Il lâcha aussi la colombe, pour voir si les eaux avaient diminué à la surface de la terre. 9 Mais la colombe ne trouva aucun lieu pour poser la plante de son pied, et elle revint à lui dans l’arche, car il y avait des eaux à la surface de toute la terre. Il avança la main, la prit, et la fit rentrer auprès de lui dans l’arche.
- Dans la Genèse on lit aussi que le Saint-Esprit se déplace sur les eaux mais il ne trouve pas de place où se poser.
Ge.1:1 Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre. 2 La terre était informe et vide: il y avait des ténèbres à la surface de l’abîme, et l’esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux.
Ici, au baptême de Jésus, le Saint-Esprit sous la forme d’une colombe vient au-dessus de l’eau se poser directement sur Jésus. Seul Jésus était digne d’avoir la colombe se poser sur lui parce qu’il était pur et saint, sans aucun péché. Les autres qui avaient péché recevaient de Jean-Baptiste un baptême de repentance et aucune colombe ne venait se poser sur eux. Ils allaient devoir attendre la Pentecôte pour que le Saint-Esprit descende sur ceux qui avaient été purifiés par la foi en Jésus. Dans son association avec Jésus, le croyant est maintenant digne d’avoir le Saint-Esprit venir se poser sur lui et venir habiter en lui.
9° ET LÀ ON ENTENDIT UNE VOIX VENANT DU CIEL … QUE DISAIT LA VOIX ?
Mc.1:11 Tu es mon Fils bien-aimé, en toi j’ai mis toute mon affection.
Dieu a fait entendre cette voix une nouvelle fois lors de la transfiguration
Luc 9:35 Et de la nuée sortit une voix, qui dit: Celui-ci est mon Fils élu: écoutez-le!
Cela rappelle ce que le prophète Ésaïe avait annoncé 800 ans auparavant:
Es.42:1 Voici mon serviteur, que je soutiendrai, mon élu, en qui mon âme prend plaisir. J’ai mis mon Esprit sur lui; Il annoncera la justice aux nations.
- Celui qui croit en Jésus est aussi un Fils de Dieu,
Galates 3:26 Car vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Jésus-Christ;
Donc les paroles que Dieu a adressé à Jésus s’appliquent aussi à nous ;
Dieu nous dit aussi : «Tu es mon fils bien-aimé, tu fais toute ma joie»
Maintenant, on va faire comme Jésus à son baptême et on va prier

L’ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR – PAR LA LÉGENDE DORÉE

5 janvier, 2013

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/index.htm

LA LÉGENDE DORÉE

L’ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR

L’Epiphanie du Seigneur est célèbre par quatre miracles, ce qui lui a fait donner quatre noms différents. En effet, aujourd’hui, les Mages adorent J.-C., Jean-Baptiste le Sauveur, J.-C. change l’eau en vin et il nourrit cinq mille hommes avec cinq pains. Jésus avait treize jours, lorsque, conduits par l’étoile, les Mages vinrent le trouver, d’où vient le nom de Epiphanie, epi, au-dessus, phanos, apparition, ou bien parce que l’étoile apparut d’en haut, ou bien parce que J.-C. lui-même a été montré aux Mages, comme le vrai Dieu, par une étoile vue dans les airs. Le même jour, après vingt-neuf ans révolus, alors qu’il atteignait trente ans, parce qu’il avait vingt-neuf ans et treize jours ; Jésus, dit saint Luc, avait alors environ trente ans commencés, ou bien, d’après Bède, il avait trente ans accomplis, ce qui est aussi la croyance de l’Eglise romaine; alors, dis-je, il fut baptisé dans le Jourdain, et de là vient le nom de Théophanie, de Theos, Dieu et phanos apparition, parce que en ce moment la Trinité se manifesta: le Père dans la voix qui se fit entendre, le (148) Fils dans la chair et le Saint-Esprit sous l’apparence d’une colombe. Le même jour, un an après, alors qu’il avait trente ou trente et un ans, il changea l’eau en vin: d’où vient le nom de Bethanie, de beth, maison, parce que, par un miracle opéré dans une maison, il apparut vrai Dieu. En ce même jour encore, un an après, comme il avait trente et un ou trente-deux ans et treize jours, il rassasia cinq mille hommes avec cinq pains, d’après Bède, et cette hymne qu’on chante en beaucoup, d’églises et qui commence par ces mots : Illuminans altissimum *. De là vient le nom de Phagiphanie de phagé manger, bouchée. Il y a doute si ce quatrième miracle a été opéré en ce jour, tant parce qu’on ne le trouve pas ainsi en l’original de Bède, tant parce qu’en saint Jean (VI) au lieu où il parle de ce prodige, il dit : « Or, le jour de Pâques était proche. » Cette quadruple apparition eut donc lieu aujourd’hui. La première par l’étoile sur la crèche ; la seconde par la voix du Père sur le fleuve du Jourdain ; la troisième par le changement de l’eau en vin au repas et la quatrième par la multiplication des pains dans le désert. Mais c’est principalement la première apparition que l’on célèbre aujourd’hui, ainsi nous allons en exposer l’histoire.
Lors de la naissance du Seigneur, trois mages vinrent à Jérusalem. Leur nom latin c’est Appellius, Amérius, Damascus ; en hébreu on les nomme Galgalat, Malgalat et Sarathin ; en grec, Caspar, Balthasar, Melchior. Mais qu’étaient ces, mages ? Il y a là-dessus
* Bréviaire mozarabe.
trois sentiments, selon les trois significations du mot mage. En effet, mage veut dire trompeur, magicien et sage. Quelques-uns prétendent que, en effet, ces rois ont été appelés mages, c’est-à-dire trompeurs, de ce qu’ils trompèrent Hérode en ne revenant point chez lui. Il est dit dans l’Evangile, au sujet d’Hérode « Voyant qu’il avait été trompé par les mages. » Mage veut encore dire magicien. Les magiciens de Pharaon sont appelés mages, et saint Chrysostome dit qu’ils tirent leur nom de là. D’après lui, ils seraient des magiciens qui se seraient convertis et auxquels le Seigneur a voulu révéler sa naissance, les attirer à lui, et par là donner aux pécheurs l’espoir du pardon. Mage est encore la même chose que sage. Car mage en hébreu signifie scribe, en grec philosophe, en latin sage. Ils sont donc nommés mages, c’est-à-dire savants, comme si on disait merveilleusement sages. Or, ces trois sages et rois vinrent à Jérusalem avec une grande suite. Mais on demande pourquoi les mages vinrent à Jérusalem, puisque le Seigneur n’y était point né. Remigius * en donne quatre raisons: La première, c’est que les mages ont bien su le temps de la naissance de J.-C., mais ils n’en ont pas connu le lieu or, Jérusalem étant une cité royale et possédant un souverain sacerdoce, ils soupçonnèrent qu’un enfant si distingué ne devait naître nulle part ailleurs si ce n’est dans une cité royale. La deuxième, c’était pour connaître plus tôt le lieu de la naissance, puisqu’il y avait là des docteurs dans la loi et des scribes. La troisième,
* Moine d’Auxerre en 890, Bibliothèque des Pères, Homé1. VII.
pour que les Juifs restassent inexcusables ; ils auraient pu dire en effet : « Nous avons bien connu le lieu de la naissance, mais nous en avons ignoré le temps et c’est le motif pour lequel nous ne croyons point. » Or, les Mages désignèrent aux Juifs le temps et les Juifs indiquèrent le lieu aux Mages. La quatrième, afin que l’empressement des Mages devînt la condamnation de l’indolence des Juifs : car les Mages crurent à un seul prophète et les Juifs refusèrent de croire au plus grand nombre. Les Mages cherchent un roi étranger, les Juifs ne cherchent pas celui qui est le leur propre : les uns vinrent de loin, les autres restèrent dans le voisinage. Ils ont été rois et les successeurs de Balaam ils sont venus eu voyant l’étoile, d’après la prophétie de leur père : « Une étoile se lèvera sur Jacob et un homme sortira d’Israël. » Un autre motif de leur venue est donné par saint Chrysostome dans son original sur saint Mathieu. Des auteurs s’accordent à dire que, certains investigateurs de secrets choisirent douze d’entre eux, et si l’un venait à mourir, son fils ou l’un de ses proches le remplaçait. Or, ceux-ci, tous les ans, après un mois écoulé, montaient sur la montagne de la Victoire, y restaient trois jours, se lavaient et priaient Dieu de leur montrer l’étoile prédite par Balaam. Une fois, c’était le jour de la naissance du Seigneur, pendant qu’ils étaient là, vint vers eux sur la montagne une étoile singulière : elle avait la forme d’un magnifique enfant, sur la tête duquel brillait une croix, et elle adressa ces paroles aux Mages : « Hâtez-vous d’aller dans la terre de Juda, vous chercherez un roi nouveau-né, et vous l’y trouverez. » Ils se mirent (151) aussitôt en chemin. Mais comment, en si peu de temps, comment, en treize jours, avoir pu parcourir un si long chemin, c’est-à-dire de l’Orient à Jérusalem, qui est censée occuper le centre du monde? On peut dire, avec Remigius, que cet enfant vers lequel ils allaient,, a bien pu les conduire si vite, ou bien l’on peut croire, avec saint Jérôme, qu’ils vinrent sur des dromadaires, espèce d’animaux très alertes, qui font en une journée le chemin qu’un cheval met trois jours à parcourir. Voilà pourquoi on l’appelle dromadaire, dromos course, arès courage. Arrivés à Jérusalem, ils demandèrent : « Où est celui qui est né roi des Juifs ? » Ils ne demandent pas s’il est né, ils le croyaient, mais ils demandent où il est né. Et comme si quelqu’un leur avait dit : « D’où savez-vous que ce roi est né? » Ils répondent : « Nous avons vu son étoile dans l’Orient et nous sommes venus l’adorer; » ce qui veut dire : « Nous qui restons en Orient, nous avons vu une étoile indiquant sa naissance; nous l’avons vue, dis-je, posée sur la Judée. Ou bien : nous qui demeurons dans notre pays, nous avons vu son étoile dans l’Orient, c’est-à-dire dans la partie orientale. » Par ces paroles, comme le dit Remigius, dans son original, ils confessèrent un vrai homme, un vrai roi et un vrai Dieu. Un vrai homme, quand ils dirent : « Où est celui qui est né ? » Un vrai roi en disant : « Roi des Juifs; » un vrai Dieu en ajoutant: « Vous sommes venus l’adorer. » Il a été en effet ordonné de n’adorer aucun autre que Dieu seul. Mais Hérode qui entendit cela fut troublé et Jérusalem tout entière avec lui. Le roi est troublé pour trois motifs: 1° dans la crainte que (152) les Juifs ne reçussent comme leur roi ce nouveau-né, et ne le chassassent lui-même comme étranger. Ce qui fait dire à saint Chrysostome : « De même qu’un rameau placé en haut d’un arbre est agité par un léger souffle, de même les hommes élevés au faîte des dignités sont tourmentés même par un léger bruit. » 2° Dans la crainte qu’il ne soit inculpé par, les Romains, si quelqu’un était appelé roi sans avoir été institué par Auguste. Les Romains avaient en effet ordonné que ni dieu ni roi ne fût reconnu que par leur ordre et avec leur permission. 3° Parce que, dit saint Grégoire, le roi du ciel étant né, le roi de la terre a été troublé. En effet, la grandeur terrestre est abaissée, quand la grandeur céleste est dévoilée. — Tout Jérusalem fut troublée avec lui pour trois raisons : 1° parce que les impies ne sauraient se réjouir de la venue du Juste ; 2° pour flatter Je roi troublé, en se montrant troublés eux-mêmes; 3° parce que comme le choc des vents agite l’eau, ainsi les rois se battant l’un contre l’autre, le peuple est troublé, et c’est pour cela qu’ils craignirent être enveloppés dans la lutte entre le roi de fait et le prétendant. » C’est la raison que donne saint Chrysostome.
Alors Hérode convoqua tous les prêtres et les scribes pour leur demander où naîtrait le Christ. Quand il en eut appris que c’était à Bethléem de Juda, il appela les mages en secret et s’informa auprès d’eux de l’instant auquel l’étoile leur était apparue, pour savoir ce qu’il avait à faire, si les mages ne revenaient pas ; et il leur recommanda qu’après avoir trouvé l’enfant, ils revinssent le lui dire, en simulant vouloir adorer celui (153) qu’il voulait tuer. Or, remarquez qu’aussitôt les mages entrés à Jérusalem, l’étoile cesse de les conduire, et cela pour trois raisons. La 1re pour qu’ils soient forcés de s’enquérir du lieu de la naissance de J.-C. ; afin par là d’être assurés de cette naissance, tant à cause de l’apparition de l’étoile qu’à cause de l’assertion de la prophétie : ce qui eut lieu. La 2e parce que en cherchant un secours des hommes, ils méritèrent justement de perdre celui de Dieu. La 3e  parce que les signes ont été, d’après l’apôtre, donnés aux infidèles, et la prophétie aux fidèles : c’est pour cela qu’un signe fut donné aux Mages, alors qu’ils étaient infidèles ; mais ce signe ne devait plus paraître dès lors qu’ils se trouvaient chez les juifs qui étaient fidèles. La glose entrevoit ces trois raisons. Mais lorsqu’ils furent sortis de Jérusalem, l’étoile les précédait, jusqu’à ce qu’arrivée au-dessus du lieu où était l’enfant, elle s’arrêta. De quelle nature était cette étoile ? il y a trois opinions, rapportées par Remi ;lus en son original. Quelques-uns avancent que c’était le saint Esprit, afin que, devant descendre plus tard surale Seigneur après son baptême, sous la forme d’une colombe, il apparût aussi aux Mages sous la forme d’une étoile. D’autres disent, avec saint Chrysostome, que ce fut l’ange qui apparut aux bergers, et ensuite aux Mages aux bergers eu leur qualité de juifs et raisonnables, elle apparut sous une forme raisonnable, mais aux gentils qui étaient, pour ainsi dire, irraisonnables, elle prit une forme matérielle. Les autres, et c’est le sentiment le plus vrai, assurent que ce fut une étoile nouvellement créée, et qu’après avoir accompli son (154) ministère, elle revint à son état primitif. Or, cette étoile, selon Fulgence, différait des autres en trois manières, 1° en situation, parce qu’elle n’était pas située positivement dans le firmament, mais elle se trouvait suspendue dans un milieu d’air voisin de la terre ; 2° en éclat, parce qu’elle était plus brillante que les autres; cela est évident, puisque le soleil ne pouvait pas en diminuer l’éclat ; loin de là, elle paraissait en plein midi ; 3° en mouvement, parce qu’elle allait en avant des Mages, comme ferait un voyageur ; elle n’avait donc point un mouvement circulaire, mais une espèce de mouvement animale( progressif. La glose en touche trois autres raisons à ces mots sur le 2e chapitre de saint Mathieu: « Cette étoile de la naissance du Seigneur, etc. » La 1re elle différait dans son origine, puisque les autres avaient été créées au commencement du monde, et que celle-ci venait de l’être. La 2e dans sa destination, les autres avaient été faites pour indiquer des temps et des saisons, comme il est dit dans la Genèse (I, 14) et celle-ci pour montrer le chemin aux Mages ; la 3e dans sa durée, les autres sont perpétuelles, celle-ci, après avoir accompli son ministère, revint à son état primitif.
Or, lorsqu’ils virent l’étoile, ils ressentirent une très grande joie. Observez que cette étoile aperçue par les Mages est quintuple ; c’est une étoile matérielle, une étoile spirituelle, une étoile intellectuelle, une étoile raisonnable, et une étoile supersubstantielle. La première, la matérielle, ils la- virent en Orient; la seconde, la spirituelle qui est la foi, ils la virent dans leur coeur, car si cette étoile, c’est-à-dire, la foi, n’avait (155) pas projeté ses rayons dans leur coeur, jamais ils ne fussent parvenus à voir la première. Or, ils eurent la foi en l’humanité du Sauveur, puisqu’ils dirent : « Où est celui qui est né? » Ils eurent la foi en sa dignité royale, quand ils dirent: « Roi des juifs. » Ils eurent la foi en sa divinité puisqu’ils ajoutèrent : « Nous sommes venus l’adorer. » La troisième, l’étoile intellectuelle, qui est l’ange, ils la virent dans le sommeil, quand ils furent avertis par l’ange de ne pas revenir vers Hérode. Mais d’après une glose particulière, ce ne fut pas un ange, mais le Seigneur lui-même qui leur apparut. La quatrième, la raisonnable, ce fut la Sainte Vierge, ils la virent dans l’hôtellerie. La cinquième, la supersubstantielle, ce fut J.-C., qu’ils virent dans la crèche ; c’est de ces deux dernières qu’il est dit : « En entrant dans la maison, ils trouvèrent l’enfant avec Marie, sa mère… » etc. Et chacune d’elles est appelée étoile : la 1re par le Psaume : « La lune et les étoiles que vous avez créées. » La 2e dans l’Ecclésiastique (XLIII, 10) : « La beauté du ciel, c’est-à-dire de l’homme céleste, c’est l’éclat des étoiles, c’est-à-dire des vertus. » La 3e dans Baruch (III, 31) : « Les étoiles ont répandu leur lumière chacune en sa place, et elles ont été dans la j oie. » La ie par la Liturgie : « Salut, étoile de la mer. » La 5e dans l’Apocalypse (XXII, 16) : « Je suis le rejeton et le fils de David, l’étoile brillante, et l’étoile du matin. » En voyant la première et la seconde, les Mages se sont réjouis ; en voyant la troisième, ils se sont réjouis de joie; en voyant la quatrième ils se sont réjouis d’une joie grande ; en voyant la cinquième, ils se sont réjouis d’une très grande joie. Ou (156) bien ainsi que dit la glose: « Celui-là se réjouit de joie qui se réjouit de Dieu, qui est la véritable joie, et il ajoute « grande », car rien n’est plus grand que Dieu ; et il met « très » grande, parce qu’on peut se réjouir plus ou moins de grande joie. Ou bien par l’exagération de ces expressions, l’évangéliste a voulu montrer que les hommes se réjouissent plus des choses perdues qu’ils ont retrouvées que de celles qu’ils ont toujours possédées.
Après être entrés dans la chaumière, et avoir trouvé l’enfant avec sa mère, ils fléchirent les genoux et chacun offrit ces présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Ici saint Augustin s’écrie : « O enfance extraordinaire, à laquelle les astres sont soumis. Quelle grandeur ! quelle gloire immense dans celui devant les langes duquel les anges se prosternent, les astres assistent, les rois tremblent, et les partisans de la sagesse se mettent à genoux ! O bienheureuse chaumière ! ô trône de Dieu, le second après le ciel, où ce n’est pas une lumière qui éclaire, mais une étoile! ô céleste palais dans lequel habite non pas un roi couvert de pierreries, mais un Dieu qui a pris un corps, qui a pour couche délicate une dure crèche, pour plafond doré, un toit de chaume tout noir, mais décoré par l’obéissance d’unie étoile! Je suis saisi quand je vois les lampes et que je regarde les cieux; je suis enflammé, quand je vois dans une crèche un mendiant plus éclatant encore que les astres.» Et saint Bernard : « Que faites-vous ? vous adorez un enfant à la mamelle dans une vile étable? Est-ce que c’est un Dieu? Que faites-vous? Vous lui offrez de l’or? Est-ce donc un Roi ? Où (157) donc est sa cour, où est son trône, où sont les courtisans de ce roi? Est-ce que la cour, c’est l’étable? Le trône la crèche, les courtisans de ce roi, Joseph et Marie Ils sont devenus insensés, pour devenir sensés. » Voici ce que dit encore à ce sujet saint Hilaire dans le second livre de la Trinité : « Une vierge enfante, mais celui qui est enfanté vient de Dieu. L’enfant vagit, on entend des anges le louer, les langes sont sales, Dieu est adoré. C’est pourquoi la dignité de la puissance n’est pas perdue, puisque l’humilité de la chair est adoptée. Et voici comment dans Jésus enfant on rencontre des humiliations, des infirmités, mais aussi des sublimités, et l’excellence de la divinité. » A ce propos encore saint Jérôme dit, sur l’épître aux Hébreux : « Regardez le berceau de J.-C., voyez en même temps le ciel ; vous apercevez un enfant pleurant dans une crèche, mais en même temps faites attention aux cantiques des anges. Hérode persécute, mais les Mages adorent; les Pharisiens ne le connaissent point, mais l’étoile le proclame ; il est baptisé par un serviteur, mais on entend la voix de Dieu qui tonne d’en haut: il est plongé dans l’eau, mais la colombe descend ; il y a plus encore, c’est le Saint-Esprit dans la colombe. »
Pourquoi maintenant les Mages offrent-ils des présents de cette nature! On en peut signaler une foule de raisons. 1° C’était une tradition ancienne, dit Remigius, que personne ne s’approcherait d’un dieu ou d’un roi, les mains vides. Les Perses et les Chaldéens avaient coutume d’offrir de pareils présents. Or, les Mages, ainsi qu’il est dit en (158) l’Histoire scholastique, vinrent des confins de la Perse et de la Chaldée, où coule le fleuve de Saba, d’où vient le nom de Sabée que porte leur pays. 2° La seconde est de saint Bernard: « Ils offrirent de l’or à la sainte Vierge pour soulager sa détresse, de l’encens, pour chasser la puanteur de l’étable, de la myrrhe pour fortifier les membres de l’enfant et pour expulser de hideux insectes. 3° Parce que avec l’or se paie le tribut, l’encens sert au sacrifice et la myrrhe à ensevelir les morts. Par ces trois présents, on reconnaît, dans le Christ la puissance royale, la majesté divine, et la mortalité humaine. 4° Parce que l’or signifie l’amour, l’encens la prière, la myrrhe, la mortification de la chair: Et nous devons les offrir tous trois à J.-C. 5° Parce que par ces trois présents sont signifiées trois qualités de J.-C. : une divinité très précieuse, une âme toute dévouée, et une chair intègre et incorruptible. Les offrandes étaient encore prédites par ce qui se trouvait dans l’arche d’alliance. Dans la verge qui fleurit, nous trouvons la chair de J.-C. qui est ressuscitée; au Psaume: « Ma chair a refleuri »; dans les tables où étaient gravés les commandements, l’âme dans laquelle sont cachés tous les trésors de la science et de la sagesse de Dieu; dans la manne, la divinité qui a toute saveur et toute suavité. Par l’or, donc, qui est le plus précieux des métaux, on entend la divinité très précieuse; par l’encens, l’âme très dévouée, parce que l’encens signifie dévotion et prière (Ps.) : « Que ma prière monte comme l’encens.» Par la myrrhe qui est un préservatif de corruption, la chair qui ne fut pas corrompue. Les Mages, avertis en songe de ne pas revenir chez Hérode, retournèrent (159) par un autre chemin en leur pays. Voici comment partirent les Mages : Ils vinrent sous la direction de l’étoile; ils furent instruits par des hommes, mieux encore par dés prophètes; ils retournèrent sous la conduite de l’ange, et moururent dans le Seigneur. Leurs corps reposaient à Milan dans une église de notre ordre, c’est-à-dire des frères prêcheurs, mais ils reposent maintenant à Cologne. Car ces corps,d’abord enlevés par Hélène, mère de Constantin, puis transportés à Constantinople, furent transférés ensuite par saint Eustorge, évêque de Milan; mais l’empereur Henri les transporta de Milan à Cologne sur le Rhin, où ils sont l’objet de la dévotion et des hommages du peuple.

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