Archive pour la catégorie 'FRANCE'

FRANCE : CULTIVER L’ART DE CÉLÉBRER, MESSAGE DE BENOÎT XVI

20 novembre, 2012

http://www.zenit.org/article-32576?l=french

FRANCE : CULTIVER L’ART DE CÉLÉBRER, MESSAGE DE BENOÎT XVI

Deuxième groupe d’évêques français en visite ad limina

ROME, vendredi 16 novembre 2012 (Zenit.org) – « Sachant le soin dont vous cherchez à entourer vos célébrations liturgiques, je vous encourage à cultiver l’art de célébrer, à aider vos prêtres dans ce sens, et à œuvrer sans cesse à la formation liturgique des séminaristes et des fidèles », déclare notamment Benoît XVI dans ce deuxième discours aux évêques de France en visite ad limina (cf. Zenit du 21 septembre 2012, pour le 1er discours).
Le pape a en effet reçu en audience les évêques français des provinces du Nord et de l’Est e visite ad limina.
Discours de Benoît XVI :
Monsieur le Cardinal, chers frères dans l’épiscopat,
Je vous remercie, Éminence, pour vos paroles et je conserve un souvenir très vivant de mon séjour à Paris en 2008, qui a permis d’intenses moments de foi et une rencontre avec le monde de la culture. Dans le message que je vous ai adressé à l’occasion du rassemblement à Lourdes que vous avez organisé en mars dernier, j’ai rappelé que « le Concile Vatican II a été et demeure un authentique signe de Dieu pour notre temps ». C’est particulièrement vrai dans le domaine du dialogue entre l’Église et le monde, ce monde « avec lequel elle vit et agit » (cf. Gaudium et spes, n. 40, §1), et sur lequel elle veut répandre la lumière qui irradie de la vie divine (idem, § 2). Vous le savez, plus l’Église est consciente de son être et de sa mission, plus elle est capable d’aimer ce monde, de porter sur lui un regard confiant, inspiré de celui de Jésus, sans céder à la tentation du découragement ou du repli. Et « l’Église, en remplissant sa propre mission, concourt déjà par là-même à l’œuvre civilisatrice et elle y pousse » (ibidem, n. 58, 4).
Votre nation est riche d’une longue histoire chrétienne qui ne peut être ignorée ou diminuée, et qui témoigne avec éloquence de cette vérité, qui configure encore aujourd’hui sa vocation singulière. Non seulement les fidèles de vos diocèses, mais ceux du monde entier, attendent beaucoup, n’en doutez pas, de l’Église qui est en France. Comme pasteurs, nous sommes, bien sûr, conscients de nos limites ; mais, confiants dans la force du Christ, nous savons aussi qu’il nous revient d’être « les hérauts de la foi » (Lumen gentium, n. 50), qui doivent, avec les prêtres et les fidèles, témoigner du message du Christ « de telle façon que toutes les activités terrestres des fidèles puissent être baignées de la lumière du Christ » (Gaudium et spes, n. 43, § 5).
L’Année de la foi nous permet de grandir en confiance dans la force et la richesse intrinsèques du message évangélique. À combien de reprises n’avons-nous pas constaté que ce sont les mots de la foi, ces mots simples et directs qui sont chargés de la sève de la Parole divine, qui touchent le mieux les cœurs et les esprits et apportent les lumières les plus décisives ? N’ayons donc pas peur de parler avec une vigueur toute apostolique du mystère de Dieu et du mystère de l’homme, et de déployer inlassablement les richesses de la doctrine chrétienne. Il y a en elle des mots et des réalités, des convictions fondamentales et des modes de raisonnement qui peuvent seuls porter l’espérance dont le monde a soif.
Dans les débats importants de société, la voix de l’Église doit se faire entendre sans relâche et avec détermination. Elle le fait dans le respect de la tradition française en matière de distinction entre les sphères des compétences de l’Église et de celles de l’État. Dans ce contexte, précisément, l’harmonie qui existe entre la foi et la raison vous donne une assurance particulière : le message du Christ et de son Église n’est pas seulement porteur d’une identité religieuse qui demanderait à être respectée comme telle ; il porte une sagesse qui permet d’envisager avec rectitude les réponses concrètes aux questions pressantes, et parfois angoissantes, des temps présents. En continuant d’exercer, comme vous le faites, la dimension prophétique de votre ministère épiscopal, vous apportez dans ces débats une parole indispensable de vérité, qui libère et ouvre les cœurs à l’espérance. Cette parole, j’en suis convaincu, est attendue. Elle trouve toujours un accueil favorable lorsqu’elle est présentée avec charité, non comme le fruit de nos propres réflexions, mais d’abord comme la parole que Dieu veut adresser à tout homme.
À cet égard, je me souviens de la rencontre qui eut lieu au Collège des Bernardins. La France peut s’honorer de compter parmi ses fils et ses filles nombre d’intellectuels de haut niveau dont certains regardent l’Église avec bienveillance et respect. Croyants ou non, ils sont conscients des immenses défis de notre époque, où le message chrétien est un point de repère irremplaçable. Il se peut que d’autres traditions intellectuelles ou philosophiques s’épuisent : mais l’Église trouve dans sa mission divine l’assurance et le courage de prêcher, à temps et à contretemps, l’appel universel au Salut, la grandeur du dessein divin sur l’humanité, la responsabilité de l’homme, sa dignité et sa liberté, – et malgré la blessure du péché – sa capacité à discerner en conscience ce qui est vrai et ce qui est bon, et sa disponibilité à la grâce divine. Aux Bernardins, j’avais voulu rappeler que la vie monastique, toute orientée vers la recherche de Dieu, le quaerere Deum, rejaillissait en source de renouveau et de progrès pour la culture. Les communautés religieuses, et notamment monastiques, de votre pays que je connais bien, peuvent compter sur votre estime et vos soins attentifs, dans le respect du charisme propre à chacune. La vie religieuse, au service exclusif de l’œuvre de Dieu, à laquelle rien ne peut être préféré (cf. Règle de saint Benoît), est un trésor dans vos diocèses. Elle apporte un témoignage radical sur la manière dont l’existence chrétienne, précisément lorsqu’elle se met entièrement à la suite du Christ, réalise pleinement la vocation humaine à la vie bienheureuse. La société tout entière, et non seulement l’Église, est grandement enrichie par ce témoignage. Offert dans l’humilité, la douceur et le silence, il apporte pour ainsi dire la preuve qu’il y a davantage dans l’homme que l’homme lui-même.
Comme le rappelle le Concile, l’action liturgique de l’Église fait aussi partie de sa contribution à l’œuvre civilisatrice (cf. Gaudium et spes n. 58, 4). La liturgie est en effet la célébration de l’événement central de l’histoire humaine, le sacrifice rédempteur du Christ. Par là, elle témoigne de l’amour dont Dieu aime l’humanité, elle témoigne que la vie de l’homme a un sens et qu’il est par vocation appelé à partager la vie glorieuse de la Trinité. L’humanité a besoin de ce témoignage. Elle a besoin de percevoir, à travers les célébrations liturgiques, la conscience que l’Église a de la seigneurie de Dieu et de la dignité de l’homme. Elle a le droit de pouvoir discerner, par-delà les limites qui marqueront toujours ses rites et ses cérémonies, que le Christ « est présent dans le sacrifice de la Messe, et dans la personne du ministre » (cf. Sacrosanctum Concilium, n. 7). Sachant le soin dont vous cherchez à entourer vos célébrations liturgiques, je vous encourage à cultiver l’art de célébrer, à aider vos prêtres dans ce sens, et à œuvrer sans cesse à la formation liturgique des séminaristes et des fidèles. Le respect des normes établies exprime l’amour et la fidélité à la foi de l’Église, au trésor de grâce qu’elle garde et transmet ; la beauté des célébrations, bien plus que les innovations et les accommodements subjectifs, fait œuvre durable et efficace d’évangélisation.
Grande est aujourd’hui votre préoccupation pour la transmission de la foi aux jeunes générations. De nombreuses familles dans votre pays continuent à l’assurer. Je bénis et j’encourage de tout cœur les initiatives que vous prenez pour soutenir ces familles, pour les entourer de votre sollicitude, pour favoriser leur prise de responsabilité dans le domaine éducatif. La responsabilité des parents dans ce domaine est un bien précieux, que l’Église défend et promeut autant comme une dimension inaliénable et capitale du bien commun de toute la société, que comme une exigence de la dignité de la personne et de la famille. Vous savez aussi que les défis ne manquent pas dans ce domaine : qu’il s’agisse de la difficulté liée au passage de la foi reçue – familiale, sociale –, de celle de la foi assumée personnellement au seuil de l’âge adulte, ou encore, de la difficulté d’une véritable rupture dans la transmission, lorsque se succèdent plusieurs générations désormais éloignées de la foi vivante. Il y a également l’énorme défi à vivre dans une société qui ne partage pas toujours les enseignements du Christ, et qui parfois cherche à ridiculiser ou à marginaliser l’Église en désirant la confiner dans l’unique sphère privée. Pour relever ces immenses défis, l’Église a besoin de témoins crédibles. Le témoignage chrétien enraciné dans le Christ et vécue dans la cohérence de vie et l’authenticité, est multiforme, sans schéma préconçu. Il naît et se renouvelle sans cesse sous l’action de l’Esprit Saint. En soutien à ce témoignage, le Catéchisme de l’Église catholique est un instrument très utile, car il manifeste la force et la beauté de la foi. Je vous encourage à le faire connaître largement, particulièrement en cette année où nous célébrons le 20° anniversaire de sa publication.
À la place qui est la vôtre, vous rendez aussi témoignage par votre dévouement, votre simplicité de vie, votre sollicitude pastorale, et par-dessus tout par votre union entre vous et avec le Successeur de l’Apôtre Pierre. Conscients de la force de l’exemple, vous saurez aussi trouver les mots et les gestes pour encourager les fidèles à incarner cette « unité de vie ». Ils doivent sentir que leur foi les engage, qu’elle est pour eux libération et non fardeau, que la cohérence est source de joie et de fécondité (cf. Exhort. apost. Christifideles laici, n. 17). Cela vaut aussi bien pour leur attachement et leur fidélité à l’enseignement moral de l’Église que, par exemple, pour le courage à afficher leurs convictions chrétiennes, sans arrogance mais avec respect, dans les divers milieux où ils évoluent. Ceux d’entre eux qui sont engagés dans la vie publique ont dans ce domaine une responsabilité particulière. Avec les Évêques, ils auront à cœur d’être attentifs aux projets de lois civiles pouvant porter atteinte à la protection du mariage entre l’homme et la femme, à la sauvegarde de la vie de la conception jusqu’à la mort, et à la juste orientation de la bioéthique en fidélité aux documents du Magistère. Il est plus que jamais nécessaire que de nombreux chrétiens prennent le chemin de service du bien commun en approfondissant notamment la Doctrine sociale de l’Église.
Vous pouvez compter sur ma prière pour que vos efforts dans ce domaine portent des fruits abondants. Pour finir, j’invoque la bénédiction du Seigneur sur vous, sur vos prêtres et vos diacres, sur les religieux et religieuses, sur les autres personnes consacrées œuvrant dans vos diocèses, et sur vos fidèles. Que Dieu vous accompagne toujours !


 [Texte original: Français]

Louis XIII consacre la France à Notre Dame de l’Assomption

6 août, 2012

http://www.mariedenazareth.com/2483.0.html?&L=0

Louis XIII consacre la France à Notre Dame de l’Assomption

Le roi de France, Louis XIII, pour proclamer sa reconnaissance ainsi que celle de tout son royaume à Marie après la naissance d’un héritier – le futur Louis XIV – et pour lui prouver sa confiance absolue, formule un vœu de consécration de lui-même, de sa famille et de la France, à Notre Dame de l’Assomption.
Ce vœu a été publié sous la forme de l’édit du 10 février 1638 et prononcé le 15 août 1638.

Voici le texte intégral :
« Dieu qui élève les rois au trône de leur grandeur, non content de nous avoir donné l’esprit qu’il départ à tous les princes de la terre pour la conduite de leurs peuples, a voulu prendre un soin si spécial et de notre personne et de notre Etat, que nous ne pouvons considérer le bonheur du cours de notre règne, sans y voir autant d’effets merveilleux de sa bonté, que d’accidents qui nous pouvaient perdre.
Lorsque nous sommes entrés au gouvernement de cette couronne, la faiblesse de notre âge donna sujet à quelques mauvais esprits d’en troubler la tranquillité; mais cette main divine soutint avec tant de force la justice de notre cause, que l’on vit en même temps la naissance et la fin de ces pernicieux desseins. En divers autres temps, l’artifice des hommes et la malice du diable ayant suscité et fomenté des divisions non moins dangereuses pour notre couronne que préjudiciables au repos de notre maison, il lui a plu en détourner le mal avec autant de douceur que de justice. La rebellion de l’hérésie ayant aussi formé un parti dans l’Etat, qui n’avait d’autre but que de partager notre autorité, il s’est servi de nous pour en abattre l’orgueil, et a permis que nous ayons relevé ses saints autels en tous les lieux où la violence de cet injuste parti en avait ôté les marques.
Quand nous avons entrepris la protection de nos alliés, il a donné des succès si heureux à nos armes, qu’à la vue de toute l’Europe, contre l’espérance de tout le monde, nous les avons rétablis en la possession de leurs Etats dont ils avaient été dépouillés. Si les plus grandes forces des ennemis de cette couronne, se sont ralliées pour conspirer sa ruine, il a confondu leurs ambitieux desseins pour faire voir à toutes les nations que, comme sa providence a fondé cet Etat, sa bonté le conserve et sa puissance le défend.
Prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et nos sujets
Tant de grâces si évidentes font que pour n’en différer pas la reconnaissance, sans attendre la paix, qui nous viendra de la même main dont nous les avons reçues, et que nous désirons avec ardeur pour en faire sentir les fruits aux peuples qui nous sont commis, nous avons cru être obligés, nous proternant aux pieds de sa majesté divine que nous adorons en trois personnes, à ceux de la Sainte Vierge et de la sacrée croix, où nous vénérons l’accomplissement des mystères de notre rédemption par la vie et la mort du Fils de Dieu en notre chair, de nous consacrer à la grandeur de Dieu par son Fils rabaissé jusqu’à nous et à ce Fils par sa Mère élevée jusqu’à lui ; en la protection de laquelle nous mettons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et tous nos sujets pour obtenir par ce moyen celle de la Sainte Trinité, par son intercession et de toute la cour céleste par son autorité et exemple, nos mains n’étant pas assez pures pour présenter nos offrandes à la pureté même, nous croyons que celles qui ont été dignes de le porter, les rendront hosties agréables et c’est chose bien raisonnable qu’ayant été médiatrice de ces bienfaits, elle le soit de nos actions de grâces.
A ces causes, nous avons déclaré et déclarons que prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre Etat, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite et défendre avec tant de soin ce royaume contre l’effort de tous ses ennemis, que, soit qu’il souffre le fléau de la guerre, ou jouisse de la douceur de la paix que nous demandons à Dieu de tout notre cœur, il ne sorte point des voies de la grâce qui conduisent à celles de la gloire. Et afin que la postérité ne puisse manquer à suivre nos volontés en ce sujet, pour monument et marque immortelle de la consécration présente que nous faisons, nous ferons construire de nouveau le grand autel de l’Eglise cathédrale de Paris avec une image de la Vierge qui tienne en ses bras celle de son précieux Fils descendu de la Croix et où nous serons représentés aux pieds du Fils et de la Mère comme leur offrant notre couronne et notre sceptre.
Exhortons pareillement tous les archevêques et évesques de notre royaume et néanmoins leur enjoignons de faire célébrer la même solennité en leurs églises épiscopales et autres églises de leur diocèse
Nous admonestons le sieur archevêque de Paris et néanmoins lui enjoignons que tous les ans le jour et fête de l’Assomption, il fasse faire commémoration de notre présente déclaration à la grand’messe qui se dira en son Eglise cathédrale et qu’après les vêpres du dit jour, il soit fait une procession en la dite Eglise à laquelle assisteront toutes les compagnies souveraines et le corps de ville, avec pareille cérémonie que celle qui s’observe aux processions générales les plus solennelles; ce que nous voulons aussi être fait en toutes les églises tant paroissiales que celles des monastères de la dite ville et faubourgs et en toutes les villes, bourgs et villages du dit diocèse de Paris.
Exhortons pareillement tous les archevêques et évesques de notre royaume et néanmoins leur enjoignons de faire célébrer la même solennité en leurs églises épiscopales et autres églises de leur diocèse; entendant qu’à la dite cérémonie les Cours de Parlement et autres compagnies souveraines et les principaux officiers de ville y soient présents ; et d’autant qu’il y a plusieurs épiscopales qui ne sont pas dédiées à la Vierge, nous exhortons les dits archevesques et évesques en ce cas de lui dédier la principale chapelle des dites Eglises pour y être faite la dite cérémonie et d’y élever un autel avec un ornement convenable à une action si célèbre et d’admonester tous nos Peuples d’avoir une dévotion particulière a la Vierge, d’implorer en ce jour sa protection afin que sous une si puissante patronne notre royaume soit à couvert de toutes les entreprises de ses ennemis, qu’il jouisse largement d’une bonne paix ; que Dieu y soit servi et révéré si saintement à la dernière fin pour laquelle nous avons été créés ; car tel est notre plaisir.

BRASILIA 2012 : INTERVENTION DU P. RADCLIFFE, 24 JUILLET

25 juillet, 2012

http://www.zenit.org/article-31527?l=french

BRASILIA 2012 : INTERVENTION DU P. RADCLIFFE, 24 JUILLET

La vraie compassion : se laisser aussi regarder par l’autre

ROME, mercredi 25 juillet 2012 (ZENIT.org) – La vraie compassion, ce n’est pas seulement regarder l’autre, c’est aussi se laisser regarder par l’autre, en vérité.
C’est ce qu’a déclaré le P. Timothy Radcliffe, o.p., intervenant principal du rassemblement international des Equipes Notre Dame, organisé du 21 au 26 juillet 2012, au Brésil, à Brasilia (cf. Zenit du 7 mai 2012).
Le père dominicain s’exprimait ce 24 juillet 2012 sur le thème : « Il fut pris de compassion (Luc 10,33) », tiré de la parabole du bon Samaritain.


Intervention du P. Timothy Radcliffe, o.p. :
Le Samaritain vit l’homme étendu au bord de la route et fut pris de compassion. Cela signifie littéralement qu’il fut « pris aux tripes ». Il a été touché au cœur de son être. Le mot ‘compassion’ signifie « sentir avec quelqu’un ». Il est bon de sentir pour (à la place de) quelqu’un. Cela fait partie de la compassion, mais on pourrait le percevoir comme condescendant ou paternaliste. Je dois aussi sentir avec eux, prêtant attention à ce que EUX sentent et comment eux voient les choses.
Donc ce sont les deux faces de la compassion : je dois voir la personne comme un être humain semblable, comme mon frère ou ma sœur. Je dois aussi apprendre à les voir comme différents de moi, comme le fruit de leur expérience unique, que je ne peux pas connaître totalement. Il y a deux jours, quand j’ai parlé de l’amour, j’ai dit que cela impliquait une intention de proximité avec l’autre dans l’intimité, mais aussi de leur laisser de l’espace pour être eux-mêmes. Le Samaritain est proche mais il laisse l’homme blessé à l’auberge pour continuer sa propre vie.
Le Brésil était le pays du grand Helder Camara, le Saint Archevêque de Récife. Il est un merveilleux exemple de compassion dans ce premier sens. Il était souvent accusé d’être un communiste à cause de sa préoccupation pour les pauvres qui vivaient dans les favelas sur les collines autour de la ville. Il a dit : ‘ si je ne monte pas dans les collines dans leur favelas pour les saluer comme mes frères et soeurs, alors ils descendront des collines dans les villes avec des drapeaux et des armes ». Parfois, quand Helder Camara avait entendu dire qu’un pauvre homme avait été emmené par la police, il donnait un coup de téléphone à la police et disait, ‘ j’ai appris que vous avez arrêté mon frère ‘. Et la police était très embarrassée : ‘ Votre Excellence, quelle erreur épouvantable! Nous ne savions pas qu’e c’était votre frère. Il sera libéré immédiatement! ‘ Et quand l’Archevêque allait au commissariat de police pour chercher l’homme, la police disait ‘ Mais votre Excellence, il n’a pas le même nom de famille que vous. ‘ Et Helder Camara répondrait que chaque personne pauvre était son frère ou sa soeur.
Aimer un autre est le voir comme vous-même, un être humain semblable à vous. Saint Augustin disait que l’ami est ‘ un autre moi ‘. Il écrivait : ‘ je suis d’accord avec le poète qui appelait son ami « la moitié de sa propre âme. » Car je sentais que mon âme et celle de mon ami étaient une âme dans deux corps’. Quand nous allons vers des personnes qui vivent des relations cassées, ou qui cohabitent, ou des divorcés-remariés, nous nous voyons nous-mêmes dans leur situation. Nous nous identifions à eux et savons que nous pourrions facilement être dans leur situation.
L’autre aspect de la vraie compassion est l’acceptation que l’autre personne n’est pas comme moi. L’autre personne est unique et je ne peux pas connaître exactement sa souffrance. Il est très irritant si vous êtes dans la douleur et quelqu’un vous dise: ‘ je sais exactement ce que vous ressentez. ‘ Peut-être vous avez perdu quelqu’un que vous aimez, ou vous supportez la douleur physique et vous avez envie de dire : ‘ non, vous ne le pouvez pas! Vous n’êtes pas moi! ‘ Ma souffrance n’est pas exactement la même que celle d’un d’autre. Vous n’avez jamais perdu ma femme ou mon mari! Vous ne savez pas à ce que c’est pour moi d’être face à la mort.
La vraie compassion respecte aussi l’altérité et le mystère de l’autre. Comment pouvons-nous grandir avec cette révérence pour l’autre personne ? Hier, je parlais de la façon de regarder l’autre ; nous prions afin de pouvoir regarder avec les yeux de Jésus, mais Jésus aussi se laisse voir lui-même. Sur la croix, il est nu face à nos yeux. Ses yeux percent toutes nos dissimulations mais il a le courage de se laisser voir également même comme mort sur la croix, quand il ne peut plus regarder en arrière. Il se confie à notre regard.
La véritable compassion veut dire que nous regardions les autres avec amour, mais nous nous laissons voir nous-mêmes aussi. Si nous regardons uniquement, nous revendiquons une certaine supériorité. Dans l’Eglise primitive, lors du baptême, on nous enlevait nos vêtements. Nous descendions dans les fonds baptismaux nus et sans honte. Nous ne devions pas nous cacher devant le regard de Dieu comme Adam et Eve après la chute. Maintenant nous pouvons être devant Dieu comme nous sommes. Grégoire de Nicée écrivait : « rejetant les feuilles fanées qui voilent nos vies, nous pouvons nous présenter devant les yeux de notre créateur. »
Dans un couple, ou même dans une vie religieuse nous apprenons la réciprocité de la compassion. Nous nous laissons toucher par ce que l’autre personne vit. Nous la regardons avec les yeux ouverts. Mais nous devons aussi oser nous laisser regarder par notre époux. Nous ne devons pas cacher nos faiblesses, nos doutes, nos insécurités. Nous devons même être littéralement nu avec l’autre. Et cela demande une grande confiance, spécialement quand nous vieillissons et devenons « mous ».
Nous pouvons avoir confiance qu’il nous regardera avec pitié et compréhension. Avons-nous peur que notre époux nous voie comme nous sommes réellement, et qu’il ne puisse plus nous aimer ? Vous sentez-vous portés à ériger une façade qui vous ferait gagner l’admiration, plutôt que de faire confiance en son amour plein de compassion pour nous ? Dieu nous voit tel que nous sommes, il nous aime plus que quiconque.
Un jour je visitais un énorme dépotoir d’ordures dans la périphérie de Kingston en Jamaïque, là où vivent les plus miséreux. J’ai découvert une sorte de cabane primitive, presque comme une grande boîte en carton. Quand je m’approchais, une mère et son jeune fils en sortaient. Ils m’ont invités à l’intérieur et m’ont offert un coca-cola qu’ils avaient, je suppose, trouvé dans les ordures, et le fils m’a demandé d’échanger nos T-shirts. J’étais très touché et j’ai gardé le T-shirt pendant des années. Il semble plutôt avoir rétréci. Ce n’était simplement pas moi qui les voyais, mais c’est eux qui me voyaient, j’existais à leurs yeux, j’étais invité dans leur maison. Nous nous sommes regardés. Sans cette réciprocité, même la compassion peut devenir paternaliste et même dominatrice.

BÉATIFICATION DU P. LATASTE À BESANÇON LE 3 JUIN

11 avril, 2012

http://www.zenit.org/article-30570?l=french

BÉATIFICATION DU P. LATASTE À BESANÇON LE 3 JUIN

Un ami de saint Joseph

Anita Bourdin

ROME, vendredi 6 avril 2012 (ZENIT.org) – La béatification du P. Jean-Joseph Lataste, prêtre dominicain français (1832 – 1869), apôtre des prisons, fondateur des Dominicaines de Béthanie, et ami de saint Joseph, son saint patron, aura lieu le3 juin 2012, en France, à Besançon, diocèse de la fondation. La célébration sera présidée par le cardinal Angelo Amato, sdb.
Les rendez-vous de Besançon
Lui qui est mort pendant le mois de saint Joseph avait offert sa vie pour que saint Joseph soit déclaré le saint patron de l’Église universelle : ce que le pape Pie IX a fait, l’année suivant sa mort, le 8 décembre 1870.
Le 27 juin dernier, le Pape Benoît XVI avait signé le décret reconnaissant un miracle survenu en Belgique, dans le diocèse de Namur, comme dû à l’intercession du P. Lataste, ouvrant ainsi la voie à sa béatification. Un autre signe sera nécessaire pour son éventuelle canonisation.
Le site en ligne pour la béatification indique les principaux rendez-vous, notamment celui de la marche des jeunes.
Samedi 2 juin 2012, à 20 h 30, une veillée de prière aura lieu à Besançon, en la cathédrale Saint-Jean.
Dimanche 3 juin 2012, à partir de 9 h 30 la marche des jeunes, prévoit plusieurs haltes spirituelles du couvent des sœurs dominicaines de Béthanie, à Montferrand le château, jusqu’au parc des expositions Micropolis de Besançon
La messe de béatification aura lieu à 15 h à ce même Parc des expositions Micropolis de Besançon.?Elle sera présidée par le cardinal Angelo Amato, préfet de la Congrégation pour la cause des saints et envoyé spéciale de Benoît XVI.
Il sera assisté de Mgr André Lacrampe, archevêque de Besançon et de Mgr Luigi Ventura, nonce apostolique et de nombreux évêques.
L’homélie sera confié au Maître de l’Ordre des Prêcheurs, le fr. Bruno Cadoré, o.p..?
Des frères dominicains et des sœurs de Béthanie viendront de toute la France et d’autres pays.
L’apôtre des prisons
Les dominicaines résument ainsi la vie de leur fondateur: le Père Lataste est né à Cadillac sur Garonne (Gironde), le 5 septembre 1832. Très jeune, il se sent appelé au sacerdoce. Après beaucoup d’hésitations, et un combat profond, il entre en 1857 dans l’ordre dominicain.
En 1864, il est envoyé prêcher une retraite aux détenues de la prison de Cadillac : il découvre en elles les merveilleux effets de la grâce, et même, chez certaines, un réel appel à se donner à Dieu dans une vie consacrée.
C’est dans cette prison, devant l’Eucharistie, qu’il reçoit l’inspiration de fonder une nouvelle famille religieuse, où toutes les sœurs, quel que soit leur passé, seraient unies dans un même amour et une même consécration, témoignant par là que pour se donner à nous, « Dieu ne regarde pas ce que nous avons été, mais ce que nous sommes », selon ses propres termes.
Deux ans plus tard il ouvre la première communauté des Dominicaines de Béthanie, sous le patronage de Sainte Marie-Madeleine.
« Quel que soit votre passé ne vous considérez plus comme des prisonnières, mais comme des âmes vouées à Dieu, vous aussi, à la suite des âmes religieuse », exhorte P. Lataste.
Mais deux ans seulement après cette fondation, le P. Lataste tombe malade et il meurt le 10 mars 1869.
Sur sa tombe, il est gravé : « Parvenu à la perfection en peu de temps, il a connu la plénitude des longues vies ».
Une guérison extraordinaire
Le secteur pastoral Targon-Langoiran-Cadillac du diocèse Bordeaux-Bazas indique quel miracle a obtenu l’intercession du P. Lataste. Florent Mahaux, un homme de 74 ans vivant à la campagne, en Belgique, dans la province de Namur, était dans la phase terminale d’un cancer digestif en janvier 1943. Le contexte de la guerre et le type de cancer ne laissaient aucun espoir de guérison.
Une fille du malade était alors à Béthanie, dans la catégorie des Petites Sœurs, étape intermédiaire pour les femmes ayant eu une vie mouvementée, avant d’entrer, si elles en avaient les capacités, au noviciat des religieuses. Or, au moment où on annonçait à cette sœur que son père n’avait plus que quelques jours à vivre, celle-ci devait recevoir l’habit et commencer son noviciat.
Les sœurs de Montferrand-le-Château ont commencé une neuvaine demandant la guérison du malade par l’intercession du P. Lataste. Dans les jours qui ont suivi, le malade a repris ses activités et a vu disparaître les douleurs qui l’empêchaient de dormir et de s’asseoir normalement.
Il est décédé paisiblement en 1949 des suites d’un accident vasculaire cérébral. Sa fille a vécu toute sa vie à Béthanie, dans la discrétion, au point que les sœurs qui vivaient avec elles ne savaient pas de quelle grâce elle avait bénéficié dans sa jeunesse.
Share on twitter Share on facebook Share on myspace Share on stumbleupon Share on digg Share on google Share on delicious Share on amenmee Share on favorites Share on print | More Sharing ServicesMore

FRANCE : QUELQUE 3000 BAPTÊMES D’ADULTES À PÂQUES

21 mars, 2012

http://www.zenit.org/article-30415?l=french

FRANCE : QUELQUE 3000 BAPTÊMES D’ADULTES À PÂQUES

Les deux tiers ont entre 18 et 35 ans

ROME, mardi 20 mars 2012 (ZENIT.org) – En France, près de 3 000 adultes (2 958) recevront le baptême, ainsi que les deux autres « sacrements de l’initiation » chrétienne, l’Eucharistie et la Confirmation, au cours des fêtes pascales des 7 et 8 avril prochains, annonce la conférence des évêques de France qui analyse, dans ce communiqué, ce qui pousse les adultes aujourd’hui à demander le baptême..
Qui sont ces femmes et ces hommes qui frappent aujourd’hui à la porte de l’Eglise ?
Majoritairement des jeunes âgés de 18 à 35 ans (les deux-tiers), ayant côtoyé le christianisme dans leur enfance et adolescence (moins de la moitié), exerçant des professions d’employés de service, de techniciens ou d’ouvrier. Par rapport à l’an dernier, il faut noter une progression importante de la tranche d’âge des 18-20 ans (+35%) et, sur le plan professionnel, des cadres et travailleurs indépendants (+27%).
Les fêtes pascales permettront à ces adultes, ainsi qu’à d’autres baptisés dans leur enfance, de participer également à l’Eucharistie et de recevoir le sacrement de Confirmation.
Actuellement 10 728 personnes vivent une démarche catéchuménale sur plusieurs années : 6 229 catéchumènes et pré-catéchumènes et 4 499 baptisés demandent l’eucharistie et la confirmation.
Des catéchumènes accompagnés par les communautés chrétiennes.
Ces femmes et ces hommes, jeunes pour la plupart d’entre eux, sollicitent les communautés chrétiennes locales. Celles-ci, renouvelées par leur présence, ont conscience de leur nécessaire engagement. Accueillir, certes ! mais aussi permettre aux catéchumènes de trouver leur place au sein des paroisses. Une enquête en cours faite auprès des baptisés de l’an dernier révèle que les communautés sont conscientes de cet enjeu et diversifie les propositions pour une réelle incorporation.
Devenir chrétien n’est pas une bizarrerie pour notre époque.
Des femmes et des hommes font ce choix et disent qu’il est bon d’être initié à vivre en frères, par une communauté chrétienne. L’Eglise est heureuse de les accueillir

« JE VEUX MOURIR VIVANT », PAR L’ABBÉ LELIÈVRE : VISAGES DE MALADES DU SIDA

29 mars, 2011

 du site:

http://www.zenit.org/article-27427?l=french

« JE VEUX MOURIR VIVANT », PAR L’ABBÉ LELIÈVRE : VISAGES DE MALADES DU SIDA

Un livre présenté aujourd’hui à Paris

ROME, Lundi 28 mars 2011 (ZENIT.org) – L’abbé Hubert Lelièvre publie « Je veux mourir vivant », aux éditions de l’Emmanuel. Le livre a été présenté à la presse à Paris ce lundi. Nous avons rencontré l’auteur dont l’expérience pastorale, comme prêtre dans la guerre de Bosnie, ou auprès des malades du SIDA à Rome fait avancer « en eau profonde ».
Zenit – Monsieur l’abbé Lelièvre, vous avez rencontré à Rome ces malades du SIDA dont vous faites découvrir les visages. Pourquoi ce titre ?
Abbé Lelièvre – Ce titre ne vient pas de moi. Il vient des nombreuses personnes malades du SIDA qui à un moment de leur cheminement au cours de la maladie se sont retrouvées petit à petit devant la vérité de ce qu’elles vivaient. De ce qu’elles étaient. De ce qu’elles avaient vécu. Et puis, lorsque la mort est inéluctable, les masques tombent. On ne peut plus jouer à cache cache. Le malade en fin de vie est particulièrement confronté à un choix de vie. Beaucoup m’ont dit : « Je veux mourir vivant ». On comprend bien ce que cela veut dire. Tant ont vécu dans la culture de mort, dans le mensonge. Maintenant, sachant qu’ils allaient partir au Ciel, ils ont appris et choisi de vivre. Avec Dieu. En Lui. Le creuset de la souffrance ouvre à un choix de Vie.
Zenit – Vous définissez vous-même votre livre comme « le témoignage d’un prêtre qui a vécu, près de personnes atteintes du SIDA, les plus belles et plus riches heures de sa vie de prêtre jusqu’à ce jour », on peut s’étonner, parce que c’est une confrontation douloureuse avec la souffrance, psychique et physique, avec l’angoisse, avec qui veut mourir et qui ne veut pas mourir, ou face à mes « murs »…
Abbé Lelièvre – Vous savez, le Seigneur a donné à mon cœur de prêtre d’abord de vivre un chemin intérieur. On ne s’approche pas de personnes malades, dont souvent il ne reste que quelques jours, semaines ou mois à vivre, sans en être profondément bouleversé. J’ai vécu ces années d’abord comme un cadeau particulier de Dieu pour moi. J’étais conscient qu’il transformait mon âme. Du dedans. Un peu comme quand le Seigneur appelle à vivre un temps de désert pour parler au plus intime de l’âme. J’ai vécu ce temps comme un « noviciat d’amour ». En même temps, j’étais confronté à la mort d’enfants, de jeunes, de jeunes adultes. Avec toutes les questions que cela pose dans le cadre du rétrovirus du SIDA. Pourquoi humainement tant de vies gâchées, fauchées dans leur printemps ? Dans ce désert de l’amour de notre société, où l’amour est blessé, meurtri, détruit, tant de familles divisées, comment faire fleurir l’Amour ?
Lorsque tous les masques tombent, nous nous trouvons en face de ce qu’est en toute vérité la personne humaine. Le visage de la personne malade devient alors une icône de la Présence de Jésus en elle. Jésus qui souffre et espère. Jésus qui guérit l’âme. Jésus qui sauve l’âme. Jésus qui apaise. Jésus présent dans ce temps de souffrances, indicibles bien souvent.
La souffrance d’une personne malade nous renvoie à nos propres blessures, souffrances intérieures. A nos propres lâchetés face à l’Amour, à la vie de la Grâce en nous. Cela nous apprend à devenir pauvres, à aimer. Alors, approcher une personne malade, c’est d’abord accepter que Jésus me rejoigne et vienne me guérir. Vienne mettre l’Huile de sa Miséricorde sur mes blessures.
Oui, dans ce désert de l’amour blessé, j’ai vu fleurir le Printemps ! J’ai vu rayonner la Gloire du Matin de Pâques sur tant de visages ! Quel bonheur d’être prêtre !
Zenit – Plusieurs fois des malades vous renvoie dans vos buts – d’ailleurs vous posez vous-même la question – : Qu’est-ce qu’un malade attend du prêtre ? De Dieu ?
Abbé Lelièvre – Je me suis retrouvé plusieurs fois dans des situations où je me trouvais « mal à l’aise » parce que je ne contrôlais pas la situation, à cause de mon manque d’amour, d’écoute, de mon égoïsme. Et plusieurs fois le Seigneur m’a remis en place. Il m’en souvient de cette enfant, Marzia, âgée de 9 ans. J’allais la voir chaque jour. Et puis une fois, je ne suis pas venu la visiter. Le lendemain, en entrant dans la chambre, comme si tout était normal, après avoir frappé à la porte, elle me dit, sans me laisser le temps de respirer : « Jésus n’est pas content de toi ! ». Alors, à ce moment là, il ne vous reste qu’à demander pardon. Un sourire sur son visage a été sa réponse ; Marzia est entrée dans la Vie un mois plus tard, dans la nuit de la Saint Joseph. Nous étions tous autour d’elle. Au moment même de sa mort, une Lumière brillait sur son visage. En pleine nuit. La Lumière du Ciel !
Le malade attend que le prêtre soit prêtre. Tout prêtre. Seulement prêtre. C’est-à-dire, serviteur et témoin de sa Présence. Comme Jésus le vit dans l’Evangile.
Zenit – Comment ouvre-t-on une porte ?
Abbé Lelièvre – Je n’ai pas encore lu de « traité » sur l’ouverture d’une porte ! Au contact de personnes malades, surtout lorsque celles-ci sont les plus dépendantes, les plus vulnérables, j’ai observé que la manière avec laquelle on ouvrait la porte de sa chambre, comptait beaucoup. Influait beaucoup pour son apaisement ou au contraire, la personne malade se tendait, se crispait. Même dans le cas de personnes dans le coma. C’est vrai pour le personnel médical, comme pour les membres de la familles du malade, ou les amis. La poignée de porte est une école d’humilité !
Zenit – Vous rapportez votre conversation avec un jeune dont la « descente » a commencé par le cannabis. Il existe des « drogues douces » ?
Abbé Lelièvre – La drogue n’est jamais douce. La drogue détruit la personne dans son âme, son corps, son esprit. Dans sa sensibilité, son psychisme, sa volonté, son intelligence. Ceci plus ou moins vite en fonction de la drogue prise, de sa quantité et de la durée. Mais dire qu’il existe des « drogues douces », c’est tout simplement un mensonge. C’est criminel. La drogue tue, plus ou moins vite. Mais elle tue. Les vendeurs de drogue devront un jour répondre devant Dieu de ce marché de la mort. Je trouve qu’il est particulièrement lâche de se faire de l’argent facile auprès d’adolescents, de jeunes qui se posent des questions sur le sens de leur vie, qui construisent leur vie et qui n’ont souvent comme réponse que cette fuite, qui conduit vers la mort. Quand on sait que le marché mondial de la drogue est supérieur au marché mondial du pétrole ! Endormir, anesthésier ainsi un adolescent, un jeune au lieu de le rejoindre et de lui donner ce dont il a besoin pour devenir lui-même, elle-même, cela m’est insupportable. Ne pas vouloir voir, ou faire semblant de ne pas voir qu’un enfant prend de la drogue, cela s’appelle « le clan des aveugles volontaires ». Mais un jour, des pleurs viendront ! Je me permets de vous renvoyer à cet ouvrage : « Le cannabis démasqué », du Père Ambroise Pic, aux Editions du Jubilé.
Certains diront que j’exagère. Alors, allez écouter le témoignage de jeunes qui suivent un chemin de guérison, dans la Comunità del Cenacolo ou dans la Maison des Frères de Saint-Jean à Pellevoisin, tout contre le sanctuaire marial de Marie, Mère de toute Miséricorde.
Zenit – Et ce jeune qui pense qu’il est condamné parce que « Dieu condamne les homosexuels » : ce sont des paroles qui, dit-il l’ont « enfoncé » davantage… Vous répondez « tu es une personne » : cela change tout ?
Abbé Lelièvre – Avant d’être aumônier d’hôpital, j’utilisais moi-même le terme « d’homosexuel ». Puis, très vite, grâce à leur contact, en les écoutant, j’ai purifié mon langage, qui en fait, était blessant. Nous devrions être particulièrement attentif à notre langage qui peut enfoncer ou permettre à une personne d’y voir plus clair, de prendre une route différente de celle sur laquelle elle se trouve aujourd’hui.
Chacun de nous est une personne créée à l’image et ressemblance de Dieu. J’existe pour être aimé et pour aimer. J’existe pour un jour, entrer dans la Gloire même de Dieu. Chacun de nous est profondément aimé par Dieu. De manière unique. Homme et femme il les créa. Je n’ai jamais lu dans la Bible « homosexuel il les créa ».
Dieu ne condamne pas les personnes. Quoiqu’ils fassent ou vivent. Il porte un regard de jugement sur nos actes. Dieu ne pourra jamais dire que l’homosexualité est un bien. Tout simplement parce que ce serait contraire et opposé à son regard d’amour, son dessein d’amour sur la création de l’homme et de la femme. A son regard sur la vocation personnelle de chaque homme, de chaque femme, dans toute sa personne. Par des actes, aller contre le code génétique de la Création, aller contre la grammaire commune de la Création, de ce qui est inscrit dans la nature, ne peut conduire l’humanité qu’à des impasses. L’Histoire des hommes nous enseigne que des civilisations entières se sont détruites par elles-mêmes.
Zenit – Avant l’hôpital Pallanzani, il y a eu la Bosnie… Quelle a été votre expérience de prêtre dans la guerre ?
Abbé Lelièvre – J’étais tout jeune prêtre, vicaire d’une paroisse dans la banlieue de Rome, paroisse très touchée par la drogue. Et puis, un jour, avec mon frère aîné qui était mon curé, nous regardions le journal télévisé. C’était au début de la guerre en Bosnie. Les images nous étaient insupportables et ont été en fait comme un appel à être présents auprès de ceux qui étaient dans l’épreuve. Alors, très vite, nous avons mobilisé la paroisse et bien au-delà puisque la télévision italienne, la RAI, nous demandait de témoigner. Nous sommes ainsi allés cinq fois pendant la guerre, sur le front, dans les hôpitaux, dans les camps, dans les villages. Au contact des évêques, des prêtres, de leurs paroissiens. Au contact de personnes dans les hôpitaux, perforées par les balles. Tout simplement pour dire : « Vous n’êtes pas abandonnés ». J’y ai vécu les plus beaux Noël de ma vie.
Zenit – Vous parlez d’une société qui « cache la mort ». Souvent, face à l’agonie ou à la mort, on ne « sait pas comment faire » : que proposer aux familles ?
Abbé Lelièvre – On cache la mort parce qu’on l’écarte de la vie. On cache la mort parce qu’on ne donne plus de sens à la vie et à cet instant si précieux et décisif qu’est la mort : la rencontre personnelle avec Dieu dans un face à Face.
C’est aussi une victoire du démon. Nous avons tellement besoin de la présence du prêtre auprès de nous lorsque le moment viendra. Pour obtenir le passeport pour l’Éternité. Le démon se réjouit de voir une âme quitter ce monde pas prête pour Dieu. Au moment de la mort, il y a un ultime combat. Il est inutile de se le cacher. La présence du prêtre, en plus de membres de la famille, est la Présence même de Jésus dans ce combat pour la Vie.
La mort est une réalité, non voulue par Dieu. Elle est ultime conséquence du péché originel. Accepter ce moment, sans le fuir, aide celui/celle qui quitte cette terre à vivre cet instant précieux, plus apaisé/e pour ce choix de vie à faire.
Dans le je vous salue Marie, nous demandons à la Vierge Marie de prier pour nous « maintenant et à l’heure de notre mort ». Si nous la prions chaque jour à travers le chapelet, nul doute que Marie notre Mère sera présente à l’heure de notre mort. Trouvons, retrouvons la prière du chapelet. Elle nous inspirera des paroles, des gestes d’affection, d’amitié autour d’une personne qui s’en va au Ciel.
Zenit – La béatification de Jean-Paul II approche : on a dit que le secret de le fécondité de son ministère à Cracovie puis à Rome, c’est la façon dont il s’est tout de suite appuyé sur la prière des malades et sur sa propre participation à la souffrance du monde. Diriez-vous cela ?
Abbé Lelièvre – Le secret de la sainteté de Jean Paul II est sa vie de prière. Il priait sept heures par jour. Il s’abîmait littéralement dans la prière. Là est le secret de sa fécondité. Ceux qui ont pu approcher Jean-Paul II, spécialement lorsqu’il célébrait sa Messe, ont été saisis par la souffrance du monde qu’il portait et qui allait jusqu’à changer les traits physiques de son visage. Sa propre expérience de la souffrance, son chemin de croix commencé avec l’attentat, il y aura trente ans le 13 mai prochain, cela l’a rapproché des personnes malades sur lesquelles il s’est toujours appuyé dans son ministère de prêtre, d’évêque, puis de pape. Il y avait comme une particulière intimité, une communion profonde avec chacun d’eux, à l’image de Jésus dans l’Évangile qui aime, s’approche de chaque malade, un à un. Nous nous souvenons tous de ses regards bouleversants de compassion, posés sur les personnes malades, lors de sa dernière venue à Lourdes en 2004, quelques mois avant de quitter cette terre. Comme un testament.
La méditation de Jean-Paul II sur le sens chrétien de la souffrance, « Salvici Doloris », du 11 février 1984, est un cœur à cœur avec son cœur de prêtre et le cœur de chaque personne malade, de chaque personne qui souffre dans son cœur et dans son corps. Pour lui dire combien Jésus ne l’abandonne pas, combien Jésus est proche de sa souffrance.
Les heures si précieuses de l’agonie de Jean-Paul II, sont un enseignement pour chacun. Les derniers jours de sa vie terrestre nous laissent de belles et fortes pages, d’émouvantes pages de « l’Évangile de la souffrance ». Une réponse concrète face à notre société qui, en face de la personne qui souffre, supprime la personne elle-même.
Zenit – Vous offrez la « Médaille miraculeuse » aux malades. La Vierge Marie leur manifeste sa présence ?
Abbé Lelièvre – Je ne fais que vivre ce que la Sainte Vierge a demandé lors de sa venue sur la terre parisienne, dans la chapelle de la Médaille miraculeuse, rue du Bac, en 1830. La Sainte Vierge a demandé de porter cette médaille, la plus répandue dans le monde. Qu’elle protégerait ceux qui la porteraient. Que ces personnes obtiendraient des grâces.
Oui, Marie est présente au pied de la Croix le Vendredi Saint. Elle est présente auprès de chaque personne qui souffre dans son corps, dans son âme. Elle rend même visite à de nombreuses personnes malades dans nos hôpitaux, nos maisons, nos maisons de retraite. Il m’est arrivé de sentir souvent sa Présence. Ce qui n’est pas surprenant. Elle est notre Mère. Elle nous a été donnée au pied de la Croix. Elle exerce sa Maternité.
Elle est présente, pour faire sortir notre monde d’aujourd’hui, qui semble se trouver dans un interminable « samedi saint » de ces innombrables impasses dans lesquelles nous nous trouvons. Pour nous ouvrir à la Lumière et à la Joie de la Résurrection.
Propos recueillis par Anita S. Bourdin

Un Français prêchera les Exercices spirituels de Carême

5 février, 2011

du site:

http://www.zenit.org/article-26867?l=french

Un Français prêchera les Exercices spirituels de Carême

Il s’agit du Carme François-Marie Léthel                                                                          

ROME, Vendredi 4 février 2011 (ZENIT.org) – Le Carme déchaux François-Marie Léthel a été choisi pour prêcher les exercices spirituels de Carême qui se dérouleront cette année, en présence de Benoît XVI, du 13 au 19 mars au Vatican, a annoncé ce vendredi la Préfecture de la Maison pontificale.                       
Le père Léthel, professeur de théologie au Teresianum à Rome et membre de l’Académie pontificale de théologie, interviendra sur le thème « La lumière du Christ dans le cœur de l’Eglise – Jean-Paul II et la théologie des saints ».
Le père Léthel est l’auteur de nombreuses publications, dont un ouvrage sur la théologie des saints : Connaître l’Amour du Christ qui surpasse toute connaissance. La théologie des saints (Venasque, 1989, Ed. du Carmel).
Chaque année, pendant la première semaine de Carême, le pape participe aux Exercices spirituels dans la chapelle Redemptoris Mater au Vatican. Durant cette semaine, toutes les audiences pontificales, y compris l’audience générale, sont suspendues.
Chaque journée est rythmée par les laudes, la tierce et les vêpres, suivies de trois méditations du prédicateur, et se conclut par l’adoration et la bénédiction eucharistique.
L’an dernier, c’est un prêtre salésien, don Enrico dal Covolo, qui avait proposé des méditations sur le thème « ‘Leçons’ de Dieu et de l’Eglise sur la vocation sacerdotale ».

Marine Soreau

Des évêques français invitent à « restaurer la confiance »

24 juin, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-24813?l=french

Des évêques français invitent à « restaurer la confiance »

Les évêques du Conseil Famille et société

ROME, Mardi 22 juin 2010 (ZENIT.org) – A quelques jours de la rencontre du G20 à Toronto, les évêques français du Conseil Famille et société font le point de la situation, après la crise de 2008. Ils sont convaincus que tout n’a pas été mis en oeuvre pour éviter une nouvelle crise mais qu’il « est possible d’agir ».

* * *

Les 26 et 27 juin prochains, les dirigeants des pays du G 20 se retrouveront à Toronto pour coordonner leurs efforts en vue d’une économie mondiale plus saine et plus viable. Cela est urgent car un dangereux climat de défiance se répand : des marchés financiers vis-à-vis des autorités politiques et réciproquement, des institutions financières entre elles, des citoyens à l’égard des pouvoirs publics et des marchés, des salariés à l’égard de leurs entreprises.

Au cœur de la crise : faire crédit, faire confiance … telle était notre invitation au moment où la crise s’imposait à tous (8 octobre 2008). C’est en pasteurs que nous intervenons, non pas en spécialistes de l’économie mais en témoins : nous dialoguons à la fois avec des personnes en précarité et aussi avec des personnes qui développent des initiatives solidaires. Et nous lançons cet appel :

Seule une économie ordonnée au bien de tous peut restaurer la confiance.

Que voyons-nous ?

- Du point de vue de l’économie, si la dette des états est préoccupante et ne peut être reportée sur les générations à venir, les premières victimes des plans de rigueur budgétaire sont toujours les personnes et les familles en situation précaire. En France, la crise du logement social, le sort des chômeurs en fin de droit, les difficultés d’accès à l’emploi des jeunes et des seniors, la souffrance au travail sont des symptômes à prendre au sérieux. Ces situations sont porteuses d’injustice et de violence.

- Du point de vue de la finance, on peut légitimement se demander si ont été mises en place avec l’autorité suffisante toutes les régulations nécessaires pour que ne se répètent pas les erreurs qui ont conduit au désastre de 2008. La situation des marchés financiers et du système bancaire demeure confuse. De nouvelles bulles spéculatives apparaissent dans des pays émergents. Demeure donc un réel risque si rien n’est fait pour orienter convenablement les liquidités monétaires et mettre en place un gouvernement de la finance.

Il est possible d’agir.

Il faut le plus possible encourager la reprise des activités, et se diriger vers une réforme européenne de la fiscalité afin qu’elle pèse moins sur les revenus du travail et davantage sur d’autres.

La marginalisation ou la précarisation des plus faibles n’est pas une solution acceptable. Une mauvaise répartition des efforts face à la crise met en danger la cohésion de notre société.

Des réformes et des régulations sont nécessaires afin que l’économie et la finance soient au service de tous.

Les évêques du Conseil Famille et Société :

Jean-Charles Descubes, archevêque de Rouen
Yves Boivineau, évêque d’Annecy
Michel Dubost, évêque d’Evry
Michel Guyard, évêque du Havre
François Jacolin, évêque de Mende
Michel Pansard, évêque de Chartres

Messe à Saint-Pierre pour la fête de S. Pétronille, première patronne de France

8 juin, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-24685?l=french

Messe à Saint-Pierre pour la fête de S. Pétronille, première patronne de France

Homélie de Mgr Jean Laffitte

ROME, Lundi 7 juin 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie que Mgr Jean Laffitte, secrétaire du Conseil pontifical pour la famille, a prononcé, au cours de la messe qu’il a présidée, dans la chapelle Sainte-Pétronille de la Basilique Saint-Pierre, le 1er juin, jour de la fête de la sainte, première patronne de France, en présence notamment de l’ambassadeur de France près le Saint-Siège, M. Stanislas de Laboulaye.
 
Fête de la Sainte Pétronille

Messe à la Basilique Papale de Saint Pierre à Rome

Homélie de S.E. Msgr. Jean LAFFITTE

Secrétaire du Conseil Pontifical pour la Famille

1er juin 2010

Monsieur l’Ambassadeur,

Excellence,

Chers amis,

Si la tradition de célébrer une messe pour la France à l’autel de Sainte Pétronille a été reprise il y a quelques années seulement, c’est en des temps beaucoup plus anciens que la sainte que nous célébrons aujourd’hui est devenue la figure protectrice symbolisant l’attachement de la France chrétienne au successeur de Pierre. L’occasion nous est ainsi offerte de présenter au Seigneur dans le Saint Sacrifice de la messe nos supplications en faveur de notre pays. Il appartient à tout chrétien de prier pour ceux qui portent sur leurs épaules le joug de la destinée des peuples, et en assument la charge et la responsabilité. D’eux dépendent, au moins en partie, la paix civile, la prospérité des populations et l’ordre naturel de la justice. Au service du bien commun, les baptisés participent par leurs actions mais aussi par leur prière, sachant que la droite de Dieu a aussi pouvoir de guider et juger les nations.

Les textes qui accompagnent la liturgie de ce jour ne passent pas pour les plus aisés à comprendre, ils incitent plutôt à la gravité. Alors que l’Evangile de Matthieu annonce dans la bouche de Jésus tribulations, combats et séparations entre les membres d’une même famille, le deuxième livre des Maccabées, entendu dans la première lecture, évoque le sacrifice héroïque d’une mère de sept enfants qui voit sans faiblir chacun d’entre eux mis à mort en témoignant de la foi de ses pères. En forçant le trait, on dirait que le seul passage un peu moins sombre se situe dans le dernier verset de la deuxième lecture, tiré de la première lettre de Pierre, et qui énonce avec sagesse qu’il vaut mieux souffrir pour le bien, si telle est la volonté de Dieu, plutôt qu’en faisant le mal.

En réalité, ces textes ne visent pas du tout à rendre le chrétien pessimiste ou fataliste. L’Evangile évoque le glaive apporté par Jésus, et qui semble s’opposer à une certaine paix, à la paix telle que les hommes se l’imaginent, une paix qu’ils identifient volontiers avec une tranquillité plus au moins prospère. Les paroles de Jésus que nous avons entendues sont un emprunt que Jésus fait au prophète Michée dénonçant l’injustice universelle après que Dieu eut fait le procès de son peuple. Le prophète déplore que les fidèles aient disparu du pays et s’exclame au bord du désespoir pas un juste parmi les gens! Et il explique: car le fils insulte le père, la fille se dresse contre sa mère, la belle-fille contre sa belle-mère, chacun a pour ennemis les gens de sa maison. Toutefois, c’est sur une note d’espérance que se terminent les lamentations du prophète: mais moi, je regarde vers Adonaï, j’espère dans le Dieu qui me sauvera; mon Dieu m’entendra. En reprenant ces versets de Michée, Jésus exprime qu’il n’est pas venu rétablir la paix au sens où l’entendaient les fils d’Israël. Le glaive dont Jésus parle a pour fonction de trancher, de dénouer, et de séparer. Il est un instrument divin de la justice, non pas dans le sens où l’entendent les hommes, qui voient dans le glaive une arme qui tue, mais comme l’instrument qui permet de séparer en tout homme ce qui est de Dieu de ce qui fait obstacle à Lui. C’est la raison pour laquelle c’est à un glaive qu’est comparée la parole de Dieu qui a le pouvoir de s’introduire au plus profond de l’intériorité de l’homme, en ce lieu où se rejoignent son esprit et son cœur, selon l’image de la lettre aux hébreux: Vivante en effet est la parole de Dieu, efficace et plus incisive qu’aucun glaive à deux tranchants, elle pénètre jusqu’au point de division de l’âme et de l’esprit, des articulations et des moelles, elle peut juger les sentiments et les pensées du cœur. Le don de la Parole de Dieu est ainsi d’abord une expression de la miséricorde divine, car elle permet que soit tracée en tout homme cette ligne de démarcation qui va l’aider à discerner et d’accomplir ce qui est susceptible de plaire à son Maître.

Les sept frères et leur mère du Livre des Macchabées montrent leur attachement aux lois divines qui finissent ultimement par prévaloir sur l’amour de leur propre vie. Leur attitude est loin d’être une provocation gratuite contre l’ordre établi; le motif de leur témoignage est le refus d’agir contre Dieu en consommant de façon sacrilège les viandes consacrées aux idoles; s’ils l’avaient accompli, leur geste aurait valu reniement de leur foi et trahison de leur peuple. La circonstance publique y aurait ajouté la dimension de scandale et elle aurait sans aucun doute induit une abjuration de toute la nation. Les paroles de leur mère qui, nous dit le texte, mettait sa confiance dans le Seigneur, expriment le choix absolu de ce qu’au Moyen-Age on appellera l’honneur de Dieu: le Créateur du monde…aura pitié de vous et vous rendra le souffle de la vie, puisque vous acceptez maintenant d’en être privés pour rester fidèles à ses lois. Dans les versets suivants, on voit le plus jeune des sept frères ajouter au témoignage du martyre pour Dieu l’intercession pour son peuple: Pour moi je livre comme mes frères mon corps et ma vie pour les lois de mes pères, suppliant Dieu d’être bientôt favorable à notre nation. On ne souligne pas assez combien le sacrifice des sept frères avait aussi le sens d’un service aimant au bien commun. De la mère, le rédacteur dit qu’elle mérite bien qu’on se souvienne d’elle. Du benjamin, il relate sobrement: Ainsi trépassa le jeune homme, sans s’être souillé, et avec une parfaite confiance dans le Seigneur.

Revenons aux paroles de Jésus qui poursuit ainsi son Discours apostolique : celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. Le verbe aimer que Jésus utilise philein exprime l’amour naturel par lequel sont illustrés les liens du sang qui, par définition, sont les plus naturels; aussi, on pourrait de prime abord être surpris que Jésus exige pour soi un amour normalement dû à nos plus proches; c’est évidemment par ce paradoxe fort que s’exprime ici la pédagogie du Maître. Jésus ne relativise pas les liens sacrés du sang, mais il les utilise pour évoquer un amour d’une autre nature, qui n’est plus seulement un amour naturel, une philia, mais un amour envers Dieu : en le revendiquant pour soi, il enseigne aux siens que se mettre à sa suite, c’est suivre Dieu; devenir son disciple n’est pas s’inscrire dans la logique d’un amour humain mais se charger de sa croix pour marche à sa suite. L’apparente rigueur des termes est là pour introduire ses amis au véritable passage à un autre amour, une autre vie, un passage par la Croix. Un tel amour ne s’adresse pas seulement à Dieu mais il transfigure toutes les autres affections. Tout disciple véritable est appelé à une telle transformation de ses capacités d’aimer. Seul le Don de l’Esprit de Dieu lui permet d’accéder à cet agapé divin.

De sainte Pétronille nous savons presque tout de l’histoire du culte qui lui est rendu, mais presque rien de la façon dont s’est épanouie sa propre sainteté ; toute une tradition souligne son lien spirituel à saint Pierre dont elle fut la fille très douce, filia dulcissima à en croire l’inscription de son sarcophage dans la Catacombe de Domitille. A défaut de pouvoir le faire chez Pétronille, c’est donc chez Pierre que nous pouvons admirer cette transformation de l’amour. Lorsqu’il a renié Jésus, Pierre a manifesté une peur compréhensible que ne soit mise en danger sa vie après l’arrestation de Jésus. Il avait ainsi pour sa propre existence un attachement bien naturel, commun à tous les hommes, mais qui l’a, à ce moment précis, rendu incapable d’assumer son amitié et son lien avec Jésus et d’en donner, au moins par ses paroles, le simple témoignage. La parole de Jésus entendue quelques heures auparavant va maintenant agir en lui comme un glaive: aujourd’hui, quand le coq chantera, tu m’auras renié trois fois. Il faudra le don de l’Esprit de Dieu promis par Jésus aux siens pour que Pierre devienne enfin capable de cet amour de Dieu qui se déploiera jusqu’à l’offrande de sa propre vie, à la suite du Maître divin.

Il nous est d’un grand réconfort de voir en celui qui a présidé aux destinées du Collège apostolique cette transfiguration de l’amour à laquelle tous les baptisés sont appelés pour ne pas rendre vain le Don qui leur a été fait dans le baptême et qui les conduit, au moment qu’ils ne peuvent prévoir, au choix de Dieu. Tant que la persécution des croyants en Israël ne s’exerçait pas, le choix de ne pas sacrifier aux idoles ne se posait pas aux sept frères de Judas Macchabée. Tant que Pierre accompagnait Jésus sur les routes de la Judée et de la Galilée, la question de se reconnaître son disciple ne se posait pas en termes dramatiques comme en cette soirée du reniement. Personne ne sait à quel moment il sera lui aussi dans sa vie personnelle, familiale, professionnelle, sociale, confronté à cette action en lui de l’Esprit Saint qui soumettra tous ses attachements naturels les plus légitimes à la lumière de l’amour divin. Nombreuses ont été les figures qui dans notre pays ont illustré ce choix coûteux et radical de la justice, de la fidélité aux exigences les plus profondes de sa conscience et ultimement au choix aimant de Dieu. Elles sont demeurées dans la mémoire des hommes. Nous en évoquerons un seul exemple: la figure humble et récemment honorée des bienheureux parents de sainte Thérèse de Lisieux, Louis et Zélie Martin, eux qui avaient fait le vœu de n’élever leurs neuf enfants qu’en vue du Royaume éternel, laissant leur amour de parents être littéralement transformé par le feu de l’amour divin. Nous leur demanderons de se joindre aujourd’hui à l’intercession de sainte Pétronille : que Dieu fasse de nous les témoins que Son amour désire; qu’il protège et bénisse notre pays bien-aimé. Amen

France : Le défi des migrations

20 février, 2010

du site::

http://www.zenit.org/article-23553?l=french

France : Le défi des migrations

Message des Eglises chrétiennes

ROME, Jeudi 18 février 2010 (ZENIT.org) – S’informer, se montrer solidaires et fraternels, s’exprimer, et changer notre regard : c’est l’invitation du Conseil des Eglises chrétiennes en France dans un message aux communautés chrétiennes intitulé « Le défi des migrations ».

Un message publié à l’occasion du premier dimanche de carême, et de l’« Année européenne des Églises pour les migrations ».

Un colloque sur le thème « Les Églises et le défi des migrations » est aussi organisé à Paris le 11 mars prochain, de façon à favoriser l’information

LE DEFI DES MIGRATIONS

L’Europe est une destination privilégiée et la France l’un des principaux pays « choisis » par les migrants. Les chrétiens ne se désintéressent pas de la question des migrations et 2010 a été déclarée « Année européenne des Églises pour les migrations ». Comme responsables d’Églises chrétiennes en France, nous voudrions encourager les fidèles de nos communautés à persévérer dans leur solidarité envers les migrants.

S’informer. La question des migrations fait souvent l’objet d’idées fausses ou de représentations inexactes. Parmi les chrétiens, comme parmi nos concitoyens, peuvent circuler des réponses simplistes à ce problème complexe.

Vous pouvez prendre contact avec les associations et les mouvements chrétiens qui œuvrent au quotidien auprès des demandeurs d’asile et des migrants (1) pour leur demander des brochures d’information qui aident à dépasser les idées préconçues, organiser avec elles une conférence dans votre paroisse.

Le jeudi 11 mars 2010 aura lieu à Paris, sous notre égide, un colloque intitulé « Les Églises et le défi des migrations ». Il permettra d’entendre des analyses et des propositions pour une politique respectueuse des droits humains.

Aujourd’hui, face aux situations dramatiques que connaissent les migrants, les préjugés n’ont pas leur place. Un changement de regard est nécessaire.

Se montrer solidaires et fraternels. Les associations qui soutiennent les migrants les aident à préserver leur dignité et à faire valoir leurs droits. Dans un contexte de plus en plus restrictif en matière de politiques migratoires, il est nécessaire d’assurer leur indépendance et leur liberté de parole. Soutenir ces associations, c’est leur permettre d’être présents efficacement sur le terrain auprès de ceux qui se trouvent en détresse.

Les associations ont aussi besoin de bénévoles pour accueillir et accompagner des migrants, en les aidant par exemple à régulariser leur situation administrative. Nous vous encourageons à vous rendre disponibles, de manière ponctuelle ou régulière.

Aujourd’hui, un partage solidaire avec tous les déracinés qui ont besoin de notre hospitalité est indispensable et urgent.

S’exprimer. Chaque fois que cela est nécessaire, nous vous engageons à aborder la question des migrations avec les autorités locales ; elles ont besoin d’être encouragées dans leurs choix politiques pour que notre pays reste une terre d’accueil.

Il est possible d’interpeller vos élus (maire, parlementaire, conseiller régional) en insistant par exemple pour que les lieux d’aide humanitaire (centres d’accueil et de distribution de soins, d’accès aux droits) demeurent des « sanctuaires » où les migrants peuvent se rendre sans crainte d’être arrêtés.

Aujourd’hui, dans une société de défiance, nous réaffirmons que le migrant est une personne humaine avec des droits fondamentaux inaliénables.

Changer notre regard ; vivre un partage concret avec ceux qui souffrent ; ne pas se taire devant les injustices… voilà le chemin qui peut être le nôtre pendant ce carême. Que notre marche vers Pâques – célébrée cette année à une date commune par toutes les Églises – soit l’occasion d’une mobilisation renouvelée envers ceux à qui le Christ s’est identifié. « Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40).

Pasteur Claude Baty – Mgr Emmanuel – Cardinal André Vingt-Trois

(co-présidents)

1) ACER – Mouvement de jeunesse orthodoxe ; Action des chrétiens pour l’abolition de la torture ; Cimade – Service œcuménique d’entraide ; Comité catholique contre la faim et pour le développement – Terre Solidaire ; Commission justice et paix – Conférence des évêques de France ; Défap – Service protestant de Mission ; Fédération de l’Entraide protestante ; Fraternité orthodoxe en Europe occidentale ; Pastorale des Migrants – Conférence des évêques de France ; Programme Mosaïc – Fédération protestante de France ; Réseau chrétien Immigrés; Secours catholique – Caritas France.

12345...7