Archive pour la catégorie 'commentaire à la Sacrée Écriture pour le jour courant'

commentaire à l’évangile du jour – 12.3.07

12 mars, 2007

du site EAQ: 

Saint Ambroise (vers 340-397), évêque de Milan et docteur de l’Église
Des veuves ; PL 16, 247-276 (trad. coll. Icthus, vol. 13, p. 286 rev.)
 

La foi de la veuve de Sarepta, qui accueille celui que Dieu lui envoie

Au temps où la famine désolait la terre entière, pourquoi Elie a-t-il été envoyé chez une veuve ? Une grâce singulière s’attache à deux femmes : auprès d’une vierge, un ange ; auprès d’une veuve, un prophète. Là Gabriel, ici Elie. Ce sont les plus éminents d’entre les anges et les prophètes qui sont choisis ! Mais le veuvage ne mérite pas louange en lui-même, s’il ne s’y ajoute pas des vertus. L’histoire ne manque pas de veuves ; pourtant, une se distingue entre toutes, qui les encourage par son grand exemple… Dieu est particulièrement sensible à l’hospitalité : dans l’Evangile il promet, pour un verre d’eau fraîche, des récompenses d’éternelles (Mt 10,42), ici pour un peu de farine ou une mesure d’huile, la profusion infinie de ses richesses…

Pourquoi nous croire maîtres des fruits de la terre quand la terre est offrande perpétuelle ?… Nous détournons à notre profit le sens du commandement universel : « Tous les arbres qui ont des fruits portant semence vous serviront de nourriture ainsi qu’à toutes les bêtes, à tous les oiseaux et à tout ce qui rampe sur la terre » (Gn 1,29-30) ; en amassant, nous ne trouvons que le vide et le besoin. Comment espérerions-nous en la promesse, si nous n’observons pas la volonté de Dieu ? C’est agir sainement que d’obéir au précepte d’hospitalité et faire honneur à nos hôtes : ne sommes-nous pas nous-mêmes des hôtes ici-bas ?

Qu’elle est parfaite, cette veuve ! Accablée par une grande famine, elle continuait pourtant à vénérer Dieu. Elle ne gardait pas ses provisions pour elle seule : elle partageait avec son fils. Bel exemple de tendresse, mais plus bel exemple encore de foi ! Elle ne devait préférer personne à son fils : voilà qu’elle met le prophète de Dieu au-dessus de sa propre vie. Croyez bien qu’elle n’a pas seulement donné un peu de nourriture, mais toute sa subsistance ; elle n’a rien gardé pour elle ; comme son hospitalité l’a amenée à un don total, sa foi l’a conduite à une confiance totale.

commentaire – Troisième dimanche de Carême – 11.3.07

11 mars, 2007

Saint Cyprien (v.200-258), évêque de Carthage et martyr
Du bienfait de la patience, 3-5 ; PL 4, 624-625 (trad. Orval)

Imiter la patience de DieuQuelle grande patience que celle de Dieu !… Il fait naître le jour et se lever la lumière du soleil à la fois sur les bons et sur les méchants (Mt 5,45) ; il arrose la terre de ses pluies, et personne n’est exclu de ses bienfaits, si bien que l’eau est accordée indistinctement aux justes et aux injustes. Nous le voyons agir avec une égale patience envers les coupables et les innocents, les fidèles et les impies, ceux qui rendent grâce et les ingrats. Pour eux tous, les temps obéissent aux ordres de Dieu, les éléments se mettent à leur service, les vents soufflent, les sources jaillissent, les moissons croissent en abondance, le raisin mûrit, les arbres regorgent de fruits, les forêts verdissent et les prés se couvrent de fleurs… Bien qu’il ait le pouvoir de la vengeance, il préfère patienter longtemps et il attend et diffère avec bonté pour que, s’il était possible, la malice s’atténue avec le temps et que l’homme…se tourne enfin vers Dieu, selon ce qu’il nous dit lui-même en ces termes : « Je ne veux pas la mort de celui qui meurt, mais plutôt qu’il revienne à moi et vive » (Éz 33,11). Et encore : « Revenez à moi, revenez au Seigneur votre Dieu, car il est miséricordieux, bon, patient et très compatissant » (Jl 2,13)…

Or Jésus nous dit : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5,48). Par ces paroles il nous montre que, fils de Dieu et régénérés par une naissance céleste, nous atteignons le sommet de la perfection lorsque la patience de Dieu le Père demeure en nous et que la ressemblance divine, perdue par le péché d’Adam, se manifeste et brille dans nos actes. Quelle gloire de ressembler à Dieu, quel grand bonheur que d’avoir cette vertu digne des louanges divines !

commentaire à l’évangile du jour – 10.3.07

10 mars, 2007

Saint Macaire (?-405), moine en Égypte
Homélie 16 de la 3e collection (trad. SC 275, p.207)
Le retour du fils prodigueApprochons-nous du Seigneur, de la porte spirituelle, et frappons pour qu’il nous ouvre. Demandons à le recevoir lui-même, lui le pain de la vie (Jn 6,34). Disons-lui : « Donne-moi, Seigneur, le pain de la vie afin que je vive, car je vais à ma perte, tenaillé par la famine du péché. Donne-moi le vêtement lumineux du salut afin que je cache la honte de mon âme, car je suis nu, privé de la puissance de ton Esprit et honteux de l’indécence de mes passions » (Gn 3,10).

Et s’il te dit : « Tu avais un vêtement, qu’en as-tu fait ? » réponds-lui : « Je me suis heurté à des brigands, ils m’ont dépouillé et laissé à demi-mort, puis ils m’ont dévêtu et me l’ont pris (Lc 10,30s). Donne-moi des sandales spirituelles, car les pieds de mon esprit sont transpercés par les épines et les chardons (Gn 3,18) ; j’erre dans le désert et je ne peux plus avancer. Donne la vue à mon coeur, afin que je voie de nouveau ; ouvre les yeux de mon coeur, car mes ennemis invisibles m’ont aveuglé en me recouvrant du voile de la ténèbre, et je ne peux plus contempler ton visage céleste et tant désiré. Donne-moi l’ouïe spirituelle, car mon intelligence est sourde et je ne peux plus entendre tes entretiens si doux et agréables. Donne-moi l’huile d’allégresse (Ps 44,8) et le vin de la joie spirituelle, pour que je l’applique sur mes blessures et puisse reprendre vie. Guéris-moi et rends-moi la santé car mes ennemis, de redoutables brigands, m’ont laissé étendu à demi-mort ».

Heureuse l’âme qui supplie avec persévérance et foi, comme indigente et blessée, parce qu’elle recevra ce qu’elle demande ; elle obtiendra la guérison et le remède éternels et elle sera vengée de ses ennemis, les passions du péché.

commentaire à l’évangile du jour – 9.3.07

9 mars, 2007

Saint Grégoire de Nysse (vers 335-395), moine et évêque
3ème homélie sur le Cantique des Cantiques (trad. cf. Delhougne, p. 176 et Canevet, Cerf 1992, p. 33)

Donner du fruit en Celui qui en a donné à la plénitude du temps

« Mon bien-aimé est une grappe de raisin de Chypre, dans la vigne d’En-Gaddi » (Ct 1,14)… Cette grappe divine se couvre de fleurs avant la Passion et verse son vin dans la Passion… Sur la vigne, la grappe ne montre pas toujours la même forme, elle change avec le temps : elle fleurit, elle gonfle, elle est achevée, puis, parfaitement mûre, elle va se transformer en vin. La vigne promet donc par son fruit : il n’est pas encore mûr et à point pour donner du vin, mais il attend la plénitude des temps. Toutefois, il n’est pas absolument incapable de nous réjouir. En effet, avant le goût, il charme l’odorat, dans l’attente des biens futurs, et il séduit les sens de l’âme par les parfums de l’espérance. Car l’assurance ferme de la grâce espérée devient jouissance déjà pour ceux qui attendent avec constance. Il en est ainsi du raisin de Chypre qui promet du vin avant de le devenir : par sa fleur — sa fleur c’est l’espérance — il nous donne l’assurance de la grâce future…

Celui dont la volonté est en harmonie avec celle du Seigneur, parce qu’« il la médite jour et nuit », devient « un arbre planté près d’un ruisseau, qui donne du fruit en son temps, et jamais son feuillage ne meurt » (Ps 1,1-3). C’est pourquoi la vigne de l’Époux, qui a pris racine dans la terre fertile de Gaddi, c’est-à-dire dans le fond de l’âme, qui est arrosée et enrichie par les enseignements divins, produit cette grappe fleurissante et épanouie dans laquelle elle peut contempler son propre jardinier et son vigneron. Bienheureuse cette terre cultivée dont la fleur reproduit la beauté de l’Epoux ! Puisque celui-ci est la lumière véritable, la vraie vie et la vraie justice…et bien d’autres vertus encore, si quelqu’un, par ses oeuvres, devient pareil à l’Époux, lorsqu’il regarde la grappe de sa propre conscience, il y voit l’Epoux lui-même, car il reflète la lumière de la vérité dans une vie lumineuse et sans tache. C’est pourquoi cette vigne féconde dit : « Ma grappe fleurit et bourgeonne » (cf Ct 7,13). L’Epoux est en personne cette vraie grappe qui se montre attachée au bois, dont le sang devient une boisson de salut pour ceux qui exultent dans leur salut.

commentaire à l’évangile du jour – 8.3.07

8 mars, 2007

Saint Grégoire de Nazianze (330-390), évêque, docteur de l’Église
14ème homélie sur l’amour des pauvres, 38.40 (trad. bréviaire rev.)

« Un pauvre était couché devant sa porte »

« Heureux les miséricordieux, dit le Seigneur, ils obtiendront miséricorde. » (Mt 5,7) La miséricorde n’est pas la moindre des béatitudes : « Heureux qui comprend le pauvre et le faible », et aussi : « L’homme bon compatit et partage », ailleurs encore : « Tout le jour, le juste a pitié, il prête » (Ps 71,13;111,5;36,26). Faisons nôtre donc cette béatitude : sachons comprendre, soyons bons.

Même la nuit ne doit pas arrêter ta miséricorde ; « ne dis pas : Reviens demain matin et je te donnerai » (Pr 3,28). Qu’il n’y ait pas d’hésitation entre ta première réaction et ta générosité… « Partage ton pain avec celui qui a faim, recueille chez toi le malheureux sans abri » (Is 58,7) et fais-le de bon coeur. « Celui qui exerce la miséricorde, dit saint Paul, qu’il le fasse avec joie » (Rm 12,8). Ton mérite est doublé par ton empressement ; un don fait avec chagrin et par contrainte n’a ni grâce ni éclat. C’est avec un coeur en fête, non en se lamentant, qu’il faut faire le bien… « Alors ta lumière jaillira comme l’aurore, et tes forces reviendront rapidement » (Is 58,8). Y a-t-il quelqu’un qui ne désire pas la lumière et la guérison ?…

C’est pourquoi, serviteurs du Christ, ses frères et ses cohéritiers (Ga 4,7), tant que nous en avons l’occasion, visitons le Christ, nourrissons le Christ, habillons le Christ, recueillons le Christ, honorons le Christ (cf Mt 25,31s). Non seulement en l’invitant à table, comme quelques-uns l’ont fait, ou en le couvrant de parfums, comme Marie Madeleine, ou en participant à sa sépulture, comme Nicodème… Ni avec l’or, l’encens et la myrrhe, comme les mages… Le Seigneur de l’univers « veut la miséricorde et non le sacrifice » (Mt 9,13), notre compassion plutôt que « des milliers d’agneaux engraissés » (Mi 6,7). Présentons-lui donc notre miséricorde par les mains de ces malheureux gisant aujourd’hui sur le sol, afin que, le jour où nous partirons d’ici, ils nous « introduisent aux demeures éternelles » (Lc 16,9), dans le Christ lui-même, notre Seigneur.

commentaire à l’évangile du jour – 7.3.07

7 mars, 2007

Basile de Séleucie (?-vers 468), évêque
Sermon 24 ; PG 85, 282 s (trad. Orval)
« Ordonne que mes deux fils que voici siègent à ta droite et à ta gauche dans ton Royaume »

Veux-tu voir la foi de cette femme ? Eh bien, considère le moment de sa requête… La croix était prête, la Passion imminente, la foule des ennemis déjà en place. Le Maître parle de sa mort, les disciples s’inquiètent : avant même la Passion, ils frémissent à la simple évocation de celle-ci ; ce qu’ils entendent les frappe de stupeur, le trouble les possède. A ce moment-même, cette mère se détache du groupe des apôtres, et voilà qu’elle demande le Royaume et réclame un trône pour ses fils.

Que dis-tu, femme ? Tu entends parler de croix, et tu demandes un trône ? Il s’agit de la Passion, et tu désires le Royaume ? Laisse donc les disciples tout à leur crainte et à leur souci du danger. Mais d’où peut bien te venir de demander cette dignité ? Qu’est-ce qui, dans ce qui vient d’être dit et fait, te porte à penser au Royaume ?…

–Je vois, dit-elle, la Passion, mais je prévois aussi la Résurrection. Je vois la croix plantée, et je contemple le ciel ouvert. Je regarde les clous, mais je vois aussi le trône… J’ai entendu le Seigneur lui-même dire : « Vous siégerez vous aussi sur douze trônes » (Mt 19,28). Je vois l’avenir avec les yeux de la foi.

Cette femme va jusqu’à devancer, me semble-t-il, les paroles du larron. Lui, sur la croix, prononça cette prière : « Souviens-toi de moi dans ton Royaume » (Lc 23,42). Avant la croix, elle a pris le Royaume comme objet de sa supplication… Quel désir perdu dans la vision de l’avenir ! Ce que le temps cachait, la foi le voyait.

commentaire à l’évangile du jour – 6.3.07

6 mars, 2007

Sainte Catherine de Sienne (1347-1380), tertiaire dominicaine, docteur de l’Église, co-patronne de l’Europe
Dialogues, ch. 4 (trad. Seuil 1953, p. 37 rev)

« Qui s’abaissera sera élevé »

[Dieu a dit à sainte Catherine :] Tu demandes à me connaître et à m’aimer, moi, la Vérité suprême. Voici la voie pour qui veut arriver à me connaître parfaitement et me goûter, moi la Vérité éternelle : ne sors jamais de la connaissance de toi-même et, abaissée que tu seras dans la vallée de l’humilité, c’est en toi-même que tu me connaîtras. C’est dans cette connaissance que tu puiseras tout ce qui te manque, tout ce qui t’est nécessaire. Nulle vertu n’a de vie en elle-même si elle ne la tire de la charité ; or l’humilité est la nourrice et la gouvernante de la charité. Dans la connaissance de toi-même tu deviendras humble, puisque tu y verras que tu n’es rien par toi-même et que ton être vient de moi puisque je vous ai aimés avant que vous n’ayez existé. C’est à cause de cet amour ineffable que j’ai eu pour vous que, voulant vous re-créer de nouveau par la grâce, je vous ai lavés et re-créés dans le sang répandu par mon Fils unique avec un si grand feu d’amour.

Seul ce sang, lui seul, fait connaître la vérité à celui qui a dissipé la nuée de l’amour-propre par cette connaissance de soi-même. C’est alors que, dans cette connaissance de moi-même, l’âme s’embrase d’un amour ineffable, et c’est à cause de cet amour qu’elle éprouve une douleur continuelle. Non pas une douleur qui l’afflige ou la dessèche (loin de là, puisqu’au contraire elle la féconde) mais parce qu’ayant connu ma vérité, ses propres fautes, l’ingratitude et l’aveuglement du prochain, elle en ressent une douleur intolérable. Elle ne s’afflige que parce qu’elle m’aime, car si elle ne m’aimait pas elle ne s’affligerait pas.

commentaire à l’évangile du jour – 5.3.07

5 mars, 2007

Bienheureuse Teresa de Calcutta (1910-1997), fondatrice des Soeurs Missionnaires de la Charité
No Greater Love (trad. Il n’y a pas de plus grand amour, Lattès 1997, p. 65)

« Soyez miséricordieux comme votre Père »

Je suis habitée par le sentiment que sans cesse, partout, est revécue la Passion du Christ. Sommes-nous prêts à participer à cette Passion ? Sommes-nous prêts à partager les souffrances des autres, non seulement là où domine la pauvreté mais aussi partout sur la terre ? Il me semble que la grande misère et la souffrance sont plus difficiles à résoudre en Occident. En ramassant quelqu’un d’affamé dans la rue, en lui offrant un bol de riz ou une tranche de pain, je peux apaiser sa faim. Mais celui qui a été battu, qui ne se sent pas désiré, aimé, qui vit dans la crainte, qui se sait rejeté par la société, celui-là éprouve une forme de pauvreté bien plus profonde et douloureuse. Et il est bien plus difficile d’y trouver un remède.

Les gens ont faim de Dieu. Les gens sont avides d’amour. En avons-nous conscience ? Le savons-nous ? Le voyons-nous ? Avons-nous des yeux pour le voir ? Si souvent, notre regard se promène sans se poser. Comme si nous ne faisions que traverser ce monde. Nous devons ouvrir nos yeux, et voir.

commentaire à l’évangile de « perso.orange »

3 mars, 2007

du site:

http://perso.orange.fr/avaljb/2Textliturg/hc19.2car.htm

2ème Dimanche de carême (homélies) supplémenté

Texte des versets retenus par la liturgie : Luc 9/28-36 (hors commentaires)

situation de départ :

Ayant pris avec lui Pierre, Jean et Jacques, Jésus monta sur la montagne pour prier. Et il arriva, pendant que lui priait.

Premier mouvement : l’expérience issue de l’intimité historique :

l’aspect de son visage devint autre

et son manteau blanc fulgurant

Deuxième mouvement : l’éclairage apporté par les Ecritures

et voici : deux hommes parlaient avec lui, lesquels étaient Moïse et Elie qui, ayant été vus en gloire,

à la racine des anneaux suivants

disaient son Exode qu’il allait accomplir à Jérusalem .

( La réaction des témoins )

Troisième mouvement : évolution des réactions des apôtres

1er temps : incompréhension puis éclairage apporté par la résurrection

Or Pierre et ceux qui étaient avec lui étaient alourdis de sommeil ; étant demeurés éveillés, ils virent sa gloire et les deux hommes qui se tenaient debout avec lui.

2ème temps : lente séparation de l’Ancien Testament mais risque de stagnation judéo-chrétienne

Il arriva, pendant qu’ils prenaient congé de lui, Pierre dit à Jésus :  » Maître, il est beau que nous soyons ici ; alors faisons trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Elie . » – ne sachant ce qu’il disait

Quatrième mouvement : la foi au Fils, liée à l’écoute de sa Parole

Comme il disait ceci, arriva une nuée et elle les couvrait de son ombre. Ils craignirent pendant qu’ils entraient dans la nuée

Et une voix arriva de la nuée, disant :  » Celui-ci est mon Fils, le choisi . Ecoutez-le sans cesse »

retour :

Pendant que la voix était arrivée, Jésus fut trouvé seul .

Et eux se turent et ne rapportèrent à personne, en ces jours-là, rien de ce qu’ils se trouvaient avoir vu .

Textes et commentaires présentés au cours des années passées et concernant la Transfiguration

Année A – Le texte est celui de Matthieu. Les notes permettent une analyse de la structure globale des trois récits de Transfiguration à partir de la présentation du premier évangéliste. Quelques compléments renseignent sur le symbolisme des rapports entre Jésus et Moïse, Jésus et Elie. S’y ajoute une aperçu du livre de DanielLa piste possible était intitulée: « ne pas s’arrêter dans la montée… ne pas accélérer dans la descente… » 1er point: en perspective de mission 2ème point: les paliers de la montée 3ème point: le vertige des cimes 4ème point: priorité à la résurrection…Année B (hb19.2careme) – Chez Marc, la transfiguration sert de charnière entre la reconnaissance de Jésus comme Messie et la reconnaissance de Jésus comme Fils de Dieu. Les notes rappellent cette structure générale du deuxième évangile.

La piste possible est intitulée « lorsque le désert se fait encore plus désertique » et insiste sur les difficultés de cette évolution : les atouts acquis dans la montée et les soutiens lors de la descente.

Contexte des versets retenus par la liturgie

* La plupart des commentaires ont familiarisé leurs lecteurs avec la diversité des présentations qu’adoptent les trois premiers évangélistes. Il leur manque souvent d’attirer l’attention vers un contexte plus général, particulièrement celui du plan d’ensemble de chaque auteur. Il est vrai que ces visées globales sont sujets de nombreuses discussions et qu’une certaine timidité fait passer sous silence des conclusions de plus en plus nettes, particulièrement dans l’ordre symbolique

* Luc distingue deux parties dans l’activité adulte de Jésus. Dans la première il concentre en Galilée les principaux traits du « noyau » historique. Au long de ce développement, il insère un certain nombre d’épisodes concernant les apôtres : premiers contacts – choix des apôtres – enseignement sur la mission – premier partage de ministère. Il traduit discrètement une progression de leur intimité avec Jésus avant de résumer en un dernier ensemble l’évolution de leur foi. La Transfiguration se situe au terme de ce premier ensemble. A son habitude, Luc construit cet

épisode en anneau. Celui-ci s’ouvre, dans un cadre d’intimité priante, par la profession de foi de Pierre : « Pour vous, qui suis-je ? – Le Christ de Dieu. », profession de foi qui, chez Luc, ne sera pas altérée par les versets suivants. Les deux premières annonces de la passion se répondent ensuite et entre les deux l’évangéliste situe la Transfiguration. Mais il convient de ne pas négliger les versets qui constituent le « cadre rapproché » de la Transfiguration. Le verset 9/27 fait référence aux apôtres comme futurs témoins de la résurrection et sert de point d’appui pour insinuer une date : « environ huit jours après ces paroles » Le verset final précise un silence effectif « en ces jours-là » et est suivi de l’épisode du fils unique épileptique (9/37) qui évoque les difficultés des disciples pour accomplir les guérisons, même après leur vision.

* En raison de la « voix concernant le Fils » et de l’ambiance de prière, le rapprochement avec la « révélation » du Jourdain (3/21) est spontané. Le sommeil des apôtres fait également penser à la soirée du jeudi-saint, au jardin de Gethsémani. D’autres rapprochements sont susceptibles de nourrir la réflexion : 1. l’évangéliste présentera en « Exode » la montée à Jérusalem et en fera la deuxième partie du ministère de Jésus; cet Exode aboutira à la passion, à la résurrection et au départ de la mission universelle 2. Dans l’épisode d’Emmaüs (24/13), « les yeux des disciples sont empêchés de le reconnaître » les explications concernant Jésus « commencent par Moïse et parcourent tous les prophètes » les disciples aspirent à ce que Jésus « reste avec eux »

Piste de réflexion : les étapes d’une présentation de Jésus

= Chaque année, au deuxième dimanche de Carême, nous sommes invités à réfléchir sur l’évangile de la Transfiguration. Il faut avouer que cet aspect répétitif tempère quelque peu notre élan de réflexion, outre le fait que notre mentalité moderne a du mal à convertir en densité symbolique un style que nous assimilons facilement à un « merveilleux historique ».

Des commentaires solides ont pu nous éclairer, durant les années passées, sur la véritable portée du texte et il importe de ne pas oublier leurs conclusions. Les évangélistes, chacun à leur façon, nous présentent l’évolution de la foi des apôtres au long du ministère historique de Jésus. Ils nous aident à percevoir les deux mouvements qui se sont additionnés. Du côté des apôtres, il s’est agi d’un cheminement, vécu dans l’intimité d’un partage amical quotidien et cherchant à assimiler les interrogations suscitées par l’activité d’un témoignage Du côté de Jésus, quelques confirmations discrètes ont cherché à soutenir ce cheminement tout en respectant la liberté des intéressés En

écoutant ce texte, nous n’avons pas à être complexés. Malgré nos soucis, grâce aux temps forts que nous partageons en communauté, grâce aux instants personnels que nous réservons à notre dialogue avec Jésus, nous vivons le même cheminement Et, par ailleurs, selon le symbolisme de la route d’Emmaüs, nous percevons la même chaleur d’accompagnement de la part de Celui qui « est avec nous à tout instant » Nous pouvons cependant chercher à secouer la monotonie qui nous menace en complétant les approches diverses que nous avons déjà adoptées

= Parmi d’autres, il en est une qui semble assez accordée à notre situation de chrétiens au 21ème siècle. Elle consiste à faire correspondre deux perspectives qui reprennent le dynamisme du texte. La première nous tourne vers nos contemporains : nous ne pouvons que regretter les déformations qui affectent, à leurs yeux, le visage de Jésus et favorisent leur incroyance ; parfois nous sommes sollicités à présenter le vrai visage qui justifie notre foi ; nous nous posons alors la question du « comment »: quel plan adopter pour une bonne présentation Ce faisant, nous sommes renvoyés à nous-mêmes ; fort heureusement, notre foi n’est pas en péril, mais, après tout, il n’est jamais mauvais de communier à la perspective missionnaire qui était celle de Luc = Lorsque nous r

éfléchissons à u passage du troisième évangile, c’est là un point sympathique qu’il ne fait jamais oublier : Luc appartenait à la deuxième génération chrétienne, celle qui n’avait pas connu historiquement Jésus. Issu du monde grec, il semble bien que ce soit la plénitude d’humanité dont il lui était parlé qui ait décidé de sa foi. Mais, au moment où il écrit, il ne peut oublier qu’il est également redevable de cette richesse aux premiers témoins qui l’ont fait bénéficier de leur travail d’approfondissement et de bonne transmission. Aussi oriente-t-il sa présentation dans ces deux directions : discrètement il cherche à nous traduire le « choc » initial de sa propre foi et il nous invite à prendre en compte son expérience personnelle pour que le message continue d’être assimilé par de nouvelles civilisations.

Notre position est donc assez semblable à la sienne lorsque nous entrons en dialogue avec notre environnement. Rien ne nous empêche de nous inspirer des « étapes » qu’il met en valeur et dont nous percevons l’enchaînement pédagogique. Leur transposition est relativement facile

1ère étape : le visage de Jésus.

C’est par là que Luc nous invite à commencer. Quel visage donnons-nous à Jésus, quel visage nos contemporains lui donnent-ils ? Il faut reconnaître que nous sommes englués dans les deux extrêmes : certains se limitent au visage infantile d’un nourrisson a l’opposé, d’autres concentrent leur attention dans le visage dramatique d’un mourant torturé… Or, ce n’est pas le visage qui a décidé quelques jeunes galiléens à suivre Jésus. A quand, dans nos églises et dans nos catéchismes, des portraits qui témoignent d’un Jésus souriant, dans la force de l’âge, rayonnant d’accueil et d’amitié ? Nous n’inventons rien car les 8/10èmes des évangiles nous le traduisent Oui mais, le Moyen Age est passé par là et les malheurs qui ont marqué son histoire ont accentué une vision pessimiste de la nature humaine ! Nous n’avons pourtant rien à perdre lorsque nous nous efforçons de rendre « tout autre » le visage de Jésus en espérant qu’il influe favorablement sur une première rencontre !

2ème étape : Luc met en deuxième position l’importance du vêtement de Jésus, autrement dit de l’éclairage qui ressort de son témoignage humain…

Là-encore, il ne tombe pas à côté de nos préoccupations missionnaires. La plupart de nos contemporains savent lire et les éditions des évangiles sont peu onéreuses Et pourtant, lorsqu’on évoque les évangiles, combien en restent à quelques « pointillés » en morale ou en bons conseils Ce n’est pas tant l’ignorance que nous devons déplorer c’est le manque d’intérêt pour la dynamique de ce qui a été vécu en Jésus Faute d’en avoir entendu parler, la majorité de nos contemporains ne soupçonnent pas la densité d’humanité qui a fait de ces jours des jours exceptionnels et universels. Et même si, à leurs yeux, le manteau reste blanc, il est loin d’être fulgurant. Il y a beaucoup à rectifier dans les mentalités ambiantes pour les convaincre de cette sourceencore faut-il la débarrasser des feuilles d’automne qui l’ont recouverte et faciliter le chemin qui y mène

3ème étape : Les symboles que Luc enchaîne ne sont pas « exportables » tels quels. Il est cependant facile de transposer en percevant le rapport de Moïse à la morale et le rapport d’Elie à la religion…

Au temps de l’évangéliste, les communautés regroupaient juifs et païens Moïse était lié à la Loi Elie, chef de file des prophètes, avait été le champion de la lutte contre le paganisme Jésus avait épanoui ces deux cheminements à partir de l’action divine Il en avait révélé « la gloire », au sens que comportait ce mot en rapport avec la présence divine qui les avait suscités. Il avait purifié la Loi des prescriptions qui la surchargeait pour en valoriser le sens religieux et le sens humaniste qu’elle proposait. Il avait débarrassé la religion de rites inutiles pour permettre un dialogue spontané entre l’homme et Dieu. Aujourd’hui, les mentalités courantes, vaguement christianisantes, ont comme figé les deux domaines de la foi et de la religion ; à leur sujet, il est toujours évoqué des liens hors humanité ou des formes mystiques qui situent dans un autre monde. Combien il est difficile de faire admettre cette sclérose et d’ouvrir au renouvellement qu’apporte le « vrai visage de Jésus » selon l’évangile !

4ème étape : En pensant à cette évolution nécessaire, nous comprenons la valeur que Luc accorde au symbolisme de l’Exode…

A la suite de notre texte, il regroupe les enseignements sur l’Eglise et il compose une longue « montée vers Jérusalem » où Jésus entraîne ses disciples Il insiste très fort sur cette solidarité entre Jésus et ses amis, affectant le témoignage historique d’une valeur de résurrection Il est facile de comprendre son intention et de la prolonger au plan personnel comme au plan apostolique. Pour libérer des pesanteurs universelles, Jésus devait affronter un premier Exode, celui qui l’a mené à la résurrection en assumant la passion Mais il a passé le relais aux apôtres et aux chrétiens de tous les temps. Ceux-ci sont donc amenés à vivre comme un perpétuel Exode leur engagement en faveur de leurs contemporains

5ème étape : face aux difficultés inévitables, la tentation est grande pour les chrétiens de se constituer en Eglise, en communautés bien abritées derrière leurs traditions.

Pour Luc, même si le cadre reste chaleureux, c’est là une tentation irréfléchie « Il ne savait ce qu’il disait ». L’évangéliste invite ses lecteurs païens à scruter les « leçons de l’histoire » Heureusement pour eux, la première communauté chrétienne est « sortie » de Jérusalem et a été marquée, dès sa naissance, d’innovations en faveur d’une église élargie le judaïsme est mort de ses traditions quant aux religions païennes, leurs rites apparaissent, à longue échéance, comme des emballages vides

6ème étape : à ce stade, la position de Luc coupe court à toute tergiversation, il est nécessaire d’aller au fond de la question, car ce qui est en cause, c’est le sens de Dieu « Dieu de Jésus-Christ » et non Dieu d’un simple déisme religieux .

Dans la mouvance de quel Dieu, dans « l’ombre » de quel Dieu nous situons-nous ? Il faut choisir la « voix » à laquelle nous prêtons l’oreille. Une dernière erreur d’interprétation risque de « fausser le sens » de cette voix: elle ne fonctionne pas de « bas en haut » comme s’il s’agissait de confirmer la divinité de Jésus. Elle fonctionne « de haut en bas » : le « vrai » visage de Dieu doit être « écouté » au travers du « vrai visage » de Jésus. Celui-ci a été « le choisi » par Dieu de façon exclusive, comme « Fils », c’est-à-dire en incarnation personnelle privilégiée d’un monde qui nous échappe

Il nous appartient de le choisir à notre tour. Luc insiste en écartant toute autre « complément »: Jésus seul, mais tout Jésus… la boucle est bouclée

7ème étape : après « ces jours-là ».

Luc ne situe pas la Transfiguration au terme de l’aventure des apôtres et, par là, il nous invite à réfléchir à la suite qu’il convient de donner à un premier témoignage. Il était en effet bien placé pour percevoir les deux impressions que pouvaient partager les chrétiens de la deuxième génération.

Lorsqu’ils « redescendent » de la montagne, chez Luc, le silence des apôtres est présenté comme un fait et non comme une recommandation du Seigneur. L’auteur se garde de le condamner. En foi chrétienne, le passé a sa valeur, mais il a besoin d’être mûri, car il risque d’être incomplet. L’évangéliste coupe court à toute mauvaise interprétation en situant, immédiatement après, les difficultés que rencontrent les disciples pour guérir un enfant épileptique. Puis il y ajoute la deuxième annonce de la passion-résurrection. La route de Jérusalem se présente en route obligatoire pour épanouir une première expérience de foi. Il ne suffit pas d’être « monté » sur la montagne pour « connaître Jésus », il reste à partager son combat pour témoigner de sa vitalité de résurrection. Par ailleurs, cette montée s’est faite en communauté avec les « 72 autres » qui seront les responsables des futures communautés. Une premi

ère présentation de Jésus Transfiguré ne met donc pas un point final au dialogue avec nos contemporains. Cette découverte pacifiée et quotidienne se présente comme une base essentielle, mais il nous faut la poursuivre. Nous ne pourrons empêcher l’intrusion des « rêves faciles » en efficacité personnelle ou en efficacité « religieuse ». De même nous ne pourrons empêcher les communautés d’être parfois pesantes lorsqu’il s’agit de porter le témoignage initial à travers les siècles. Il suffit de penser à la situation de Luc pour trouver normale cette situation. Lui aussi s’adressait à des peuples confortablement installés dans leur civilisation grecque. Lui aussi leur proposait un témoignage vieux d’un demi-siècle et qui se référait à un monde ancien en voie de disparition. Lui aussi était tributaire de communautés plus ou moins bien converties. Pourtant, d’une certaine façon, il acceptait de se laisser imprégner par la transfiguration chrétienne. Il nous ouvrait la route.

commentaire de l’évangile du demain du Père Cantalamessa

3 mars, 2007

du site Zenith: 

2007-03-02

La Transfiguration, un message d’espérance pour ceux qui souffrent dans leur corps

Commentaire de l’Evangile du dimanche 4 mars, par le père Cantalamessa

ROME, Vendredi 2 mars 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile de ce dimanche proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 9, 28-36

Et voici qu’environ huit jours après avoir prononcé ces paroles, Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il alla sur la montagne pour prier. Pendant qu’il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante. Et deux hommes s’entretenaient avec lui : c’étaient Moïse et Élie, apparus dans la gloire. Ils parlaient de son départ qui allait se réaliser à Jérusalem. Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil ; mais, se réveillant, ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés. Ces derniers s’en allaient, quand Pierre dit à Jésus : « Maître, il est heureux que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Il ne savait pas ce qu’il disait.
Pierre n’avait pas fini de parler, qu’une nuée survint et les couvrit de son ombre ; ils furent saisis de frayeur lorsqu’ils y pénétrèrent. Et, de la nuée, une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi, écoutez-le. » Quand la voix eut retenti, on ne vit plus que Jésus seul.
Les disciples gardèrent le silence et, de ce qu’ils avaient vu, ils ne dirent rien à personne à ce moment-là.

© AELF

Il alla sur la montagne pour prier

L’évangile de dimanche porte sur l’épisode de la Transfiguration. Luc explique également, dans son évangile, pourquoi Jésus, ce jour-là, est allé sur la montagne : Il y est allé « pour prier ». C’est la prière qui a rendu son vêtement blanc comme la neige et son visage rayonnant comme le soleil. Selon le programme illustré la fois passée, nous voulons partir de cet épisode pour examiner la place qu’occupait la prière dans la vie de Jésus, et ce qu’elle nous dit sur l’identité profonde de sa personne.

Quelqu’un a dit : « Jésus est un homme juif qui ne se sent pas identique à Dieu. En effet, on ne prie pas Dieu si on pense qu’on est identique à Dieu ». Mais laissons de côté pour le moment le problème de ce que pensait Jésus de lui-même. Attachons-nous à cette affirmation qui ne tient pas compte d’une vérité élémentaire : Jésus est aussi homme et, comme un homme, il prie. Dieu ne peut avoir faim, ni soif, ou souffrir, mais Jésus, lui, a faim et soif ; et il souffre parce qu’il est aussi un homme.

Au contraire, nous verrons que c’est justement la prière de Jésus qui nous permet d’entrer dans le mystère profond de sa personne. Le fait que Jésus, lorsqu’il priait, s’adressait à Dieu en l’appelant Abbà, c’est-à-dire cher père, mon père, ou encore papa, est un fait historiquement attesté. Cette façon de s’adresser à Dieu, même si elle n’était pas tout à fait inconnue avant lui, est tellement caractéristique du Christ que nous devons admettre que cette relation de Jésus à Dieu, son Père céleste, est unique.

Ecoutons une des prières de Jésus, rapportée par Mathieu : « En ce temps-là, Jésus prit la parole : ‘Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Oui, Père, tu l’as voulu ainsi dans ta bonté. Tout m’a été confié par mon Père ; personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler’ » (Mt 11, 25-27). Entre le Père et le Fils il y a, comme nous le voyons, une réciprocité totale, « une étroite relation familiale ». Dans la Parabole des vignerons homicides, on perçoit tout aussi clairement le caractère unique de cette relation de Jésus à Dieu, comme celle d’un fils à son Père, un type de relation que les autres, ceux que l’on appelle « serviteurs », n’ont pas (cf. Mc 12, 1-10).

Mais une objection peut alors surgir : pourquoi Jésus, durant toute son existence, ne s’est-il jamais attribué ouvertement le titre de Fils de Dieu ? Pourquoi a-t-il toujours parlé de lui-même comme du « fils de l’homme » ? La raison est la même que celle pour laquelle Jésus n’a jamais dit qu’il était le Messie. Il était d’ailleurs réticent à ce que les autres l’appellent de cette manière, et allait même jusqu’à interdire qu’on parle ainsi de lui. Jésus agissait de cette manière car ces titres étaient compris par les gens d’une façon bien précise mais celle-ci ne correspondait pas à l’idée que Jésus avait de sa mission.

On disait de beaucoup de gens qu’ils étaient Fils de Dieu : les rois, les prophètes, les grands hommes ; et par le mot Messie on entendait l’envoyé de Dieu qui aurait combattu militairement les ennemis et aurait régné sur Israël. C’était dans cette direction-là que le démon essayait de pousser Jésus avec ses tentations dans le désert … Ses propres disciples n’avaient pas compris cela et continuaient de rêver à un destin de gloire et de pouvoir. Jésus n’entendait pas être ce Messie-là. « Je ne suis pas venu, disait-il, pour être servi, mais pour servir ». Il n’est pas venu pour ôter la vie, mais pour « donner sa vie en rançon pour la multitude ».

Le Christ devait d’abord souffrir et mourir pour que l’on comprenne de quel Messie il s’agissait. Jésus ne proclama qu’un seule fois, sans équivoque possible, qu’il était le Messie. C’était devant le Grand Prêtre, juste avant sa condamnation à mort. Ceci est très symptomatique. « Es-tu le Messie, le Fils du Dieu béni ? », lui demanda le Grand Prêtre, et Jésus lui répondit : « Je le suis ! » (Mc 14, 61 s.).

Tous ces titres et catégories que les hommes, amis ou ennemis, veulent lui donner, durant son existence sur terre, paraissent bien minces et insuffisantes. Il est un maître, « mais pas un maître comme les autres », il enseigne avec autorité et en son nom propre ; il est fils de David, mais il est aussi Seigneur de David ; il est plus qu’un prophète, plus que Jonas, plus que Salomon. Les gens se demandaient : « Qui est cet homme? » . Cette question exprime bien le sentiment qui régnait autour de lui, comme un mystère, comme quelque chose que l’on ne peut expliquer humainement.

La tentative de certains critiques de réduire Jésus à un juif ordinaire de l’époque, qui n’aurait rien dit et rien fait de particulier, est en contraste total avec les données historiques les plus sûres que nous avons sur lui. Seul le refus préjudiciel d’admettre que quelque chose de transcendant peut apparaître dans l’histoire humaine, explique une telle chose. D’ailleurs, cela n’explique pas comment un être aussi ordinaire a pu devenir (selon ce que disent ces mêmes critiques) « l’homme qui a changé le monde ».

Revenons à l’épisode de la Transfiguration pour en tirer quelques enseignements pratiques. La Transfiguration est un mystère aussi « pour nous ». Un mystère qui nous touche de près. Saint Paul, dans la deuxième lecture dit : Le Seigneur « transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux ». Le Thabor est une fenêtre ouverte sur notre avenir. Il nous garantit que l’opacité de notre corps se transformera un jour en lumière ; mais c’est aussi un projecteur pointé sur notre présent; qui met en lumière ce que notre corps est déjà, malgré sa misérable apparence : le temple de l’Esprit Saint.

Le corps n’est pas, pour la Bible, une négligeable appendice de l’être humain ; ni une partie intégrante. L’homme ne possède pas un corps, il est corps. Ce corps qui a été créé directement par Dieu, adopté par le Verbe dans l’incarnation et sanctifié par l’Esprit dans le baptême. L’homme biblique est émerveillé par ce corps humain: « Je reconnais le prodige, l’être étonnant que je suis. C’est Toi qui m’as tissé dans le sein de ma mère. Etonnantes sont tes œuvres » (Ps 139). Le corps est destiné à partager, pour l’éternité, la même gloire que l’âme. « Corps et âme seront deux mains jointes en adoration pour l’éternité, ou deux poignets emmenottées pour une captivité éternelle » (Ch. Péguy). Le christianisme prêche le salut du corps, et non la libération du corps, comme faisaient, dans l’Antiquité, les religions manichéennes et gnostiques et comme le font encore aujourd’hui certaines religions orientales.

Mais que dire à ceux qui souffrent ? À ceux qui doivent assister à la « défiguration » de leur propre corps ou de celui d’un être cher ? Ce message de la Transfiguration est peut-être pour eux le message le plus réconfortant : « Il transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » . Corps humiliés dans la maladie et dans la mort seront rachetés. Jésus, lui aussi, sera bientôt « défiguré » dans la passion, mais il ressuscitera avec son corps glorieux, ce corps avec lequel il vivra pour l’éternité et que nous retrouverons après la mort, comme le dit notre propre foi.

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