Archive pour la catégorie 'bioéthique'

AVORTEMENT : CLARIFICATION DE LA CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI

5 février, 2014

http://www.evangelium-vitae.org/documents/3176/archives/respect-de-la-vie–bioethique.htm

RESPECT DE LA VIE – BIOÉTHIQUE

AVORTEMENT : CLARIFICATION DE LA CONGRÉGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI

Suite à l´article publié dans L’OR par Mgr Rino Fisichella

ROME, Vendredi 10 Juillet 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous une mise au point de la Congrégation pour la doctrine de la foi, diffusée le 10 juillet dans L’Osservatore Romano, suite à l’article publié dans le quotidien du Saint-Siège par Mgr Rino Fisichella, président de l’Académie pontificale pour la vie, après l’avortement pratiquée sur une fillette de 9 ans au Brésil.

* * * Diverses lettres sont récemment parvenues au Saint-Siège, notamment de la part de hautes personnalités de la vie politique et ecclésiale, qui nous ont informé de la confusion créée dans plusieurs pays, surtout en Amérique Latine, suite à la manipulation et à l’instrumentalisation d’un article de Mgr Rino Fisichella, président de l’Académie pontificale pour la vie, sur les tristes événements concernant la « petite fille brésilienne ». Cet article, publié dans L’Osservatore Romano le 15 mars 2009, proposait la doctrine de l’Eglise, tout en tenant compte de la situation dramatique de cette enfant qui – comme cela a été révélé par la suite – a été accompagnée avec beaucoup de délicatesse pastorale par l’ancien archevêque de Olinda et Recife, Mgr José Cardoso Sobrinho. A ce sujet, la Congrégation pour la doctrine de la foi rappelle que la doctrine de l’Eglise sur l’avortement provoqué n’a pas changé et ne peut changer. Cette doctrine est exposée aux numéros 2270-2273 du Catéchisme de l’Eglise catholique en ces termes : « La vie humaine doit être respectée et protégée de manière absolue depuis le moment de la conception. Dès le premier moment de son existence, l’être humain doit se voir reconnaître les droits de la personne, parmi lesquels le droit inviolable de tout être innocent à la vie (cf. CDF, instr. ‘Donum vitæ’ 1, 1). Avant d’être façonné dans le ventre maternel, je te connaissais. Avant ta sortie du sein, je t’ai consacré (Jr 1, 5 ; cf. Jb 10, 8-12 ; Ps 22, 10-11). Mes os n’étaient point cachés devant toi quand je fus fait dans le secret, brodé dans les profondeurs de la terre (Ps 139, 15). Depuis le premier siècle, l’Église a affirmé la malice morale de tout avortement provoqué. Cet enseignement n’a pas changé. Il demeure invariable. L’avortement direct, c’est-à-dire voulu comme une fin ou comme un moyen, est gravement contraire à la loi morale. Tu ne tueras pas l’embryon par l’avortement et tu ne feras pas périr le nouveau-né (Didaché 2, 2 ; cf. Barnabé, ep. 19, 5 ; Epître à Diognète 5, 5 ; Tertullien, apol. 9). Dieu, maître de la vie, a confié aux hommes le noble ministère de la vie, et l’homme doit s’en acquitter d’une manière digne de lui. La vie doit donc être sauvegardée avec soin extrême dès la conception : l’avortement et l’infanticide sont des crimes abominables (GS 51, § 3). La coopération formelle à un avortement constitue une faute grave. L’Église sanctionne d’une peine canonique d’excommunication ce délit contre la vie humaine. « Qui procure un avortement, si l’effet s’en suit, encourt l’excommunication latæ sententiæ » (CIC, can. 1398) « par le fait même de la commission du délit » (CIC, can. 1314) et aux conditions prévues par le Droit (cf. CIC, can. 1323-1324). L’Église n’entend pas ainsi restreindre le champ de la miséricorde. Elle manifeste la gravité du crime commis, le dommage irréparable causé à l’innocent mis à mort, à ses parents et à toute la société. Le droit inaliénable à la vie de tout individu humain innocent constitue un élément constitutif de la société civile et de sa législation : « Les droits inaliénables de la personne devront être reconnus et respectés par la société civile et l’autorité politique. Les droits de l’homme ne dépendent ni des individus, ni des parents, et ne représentent pas même une concession de la société et de l’état ; ils appartiennent à la nature humaine et sont inhérents à la personne en raison de l’acte créateur dont elle tire son origine. Parmi ces droits fondamentaux, il faut nommer le droit à la vie et à l’intégrité physique de tout être humain depuis la conception jusqu’à la mort » (CDF, instr. ‘Donum vitæ’ 3). « Dans le moment où une loi positive prive une catégorie d’êtres humains de la protection que la législation civile doit leur accorder, l’Etat en vient à nier l’égalité de tous devant la loi. Quand l’Etat ne met pas sa force au service des droits de tous les citoyens, et en particulier des plus faibles, les fondements même d’un état de droit se trouvent menacés… Comme conséquence du respect et de la protection qui doivent être assurés à l’enfant dès le moment de sa conception, la loi devra prévoir des sanctions pénales appropriées pour toute violation délibérée de ses droits » (CDF, instr. ‘Donum vitæ’ 3) Dans l’encyclique Evangelium vitae Jean-Paul II a réaffirmé cette doctrine par son autorité de Pasteur Suprême de l’Eglise : « Avec l’autorité conférée par le Christ à Pierre et à ses successeurs, en communion avec les Evêques – qui ont condamné l’avortement à différentes reprises et qui, en réponse à la consultation précédemment mentionnée, même dispersés dans le monde, ont exprimé unanimement leur accord avec cette doctrine -, je déclare que l’avortement direct, c’est-à-dire voulu comme fin ou comme moyen, constitue toujours un désordre moral grave, en tant que meurtre délibéré d’un être humain innocent. Cette doctrine est fondée sur la loi naturelle et sur la Parole de Dieu écrite; elle est transmise par la Tradition de l’Eglise et enseignée par le Magistère ordinaire et universel » (n. 62). En ce qui concerne l’avortement pratiqué dans certaines situations difficiles et complexes, l’enseignement clair et précis du pape Jean-Paul II demeure : « Il est vrai que de nombreuses fois le choix de l’avortement revêt pour la mère un caractère dramatique et douloureux, lorsque la décision de se défaire du fruit de la conception n’est pas prise pour des raisons purement égoïstes et de facilité, mais parce que l’on voudrait sauvegarder des biens importants, comme la santé ou un niveau de vie décent pour les autres membres de la famille. Parfois, on craint pour l’enfant à naître des conditions de vie qui font penser qu’il serait mieux pour lui de ne pas naître. Cependant, ces raisons et d’autres semblables, pour graves et dramatiques qu’elles soient, ne peuvent jamais justifier la suppression délibérée d’un être humain innocent » (Encyclique Evangelium vitae, n. 58). Quant à la problématique de traitements médicaux déterminés afin de préserver la santé de la mère, il faut bien faire la distinction entre deux tenants et aboutissants différents : d’une part une intervention qui provoque directement la mort du fœtus, appelée parfois de manière inappropriée avortement « thérapeutique », qui ne peut jamais être licite puisqu’il s’agit du meurtre direct d’un être humain innocent ; d’autre part, une intervention en soi non abortive qui peut avoir, comme conséquence collatérale la mort de l’enfant : « Si, par exemple, la conservation de la vie de la future mère, indépendamment de son état de grossesse, requérait d’urgence une opération chirurgicale ou une autre action thérapeutique qui aurait pour conséquence accessoire, nullement voulue ou cherchée, mais inévitable – la mort de l’embryon, un tel acte ne pourrait plus être qualifié d’attentat direct à une vie innocente. Dans ces conditions, l’opération peut être licite, comme le serait d’autres interventions médicales similaires, pourvu toutefois qu’il s’agisse d’un bien de valeur élevée, comme la vie, et qu’il ne soit pas possible de renvoyer l’opération après la naissance de l’enfant, ni de recourir à un autre remède efficace (Pie XII, Discours au « Front de la Famille » et à l’Association des Familles nombreuses, 27 novembre 1951). Quant à la responsabilité des responsables de santé, il faut rappeler les paroles de Jean-Paul II : « Leurs professions en font des gardiens et des serviteurs de la vie humaine. Dans le contexte culturel et social actuel, où la science et l’art médical risquent de faire oublier leur dimension éthique naturelle, ils peuvent être parfois fortement tentés de se transformer en agents de manipulation de la vie ou même en artisans de mort. Face à cette tentation, leur responsabilité est aujourd’hui considérablement accrue ; elle puise son inspiration la plus profonde et trouve son soutien le plus puissant justement dans la dimension éthique des professions de santé, dimension qui leur est intrinsèque et qu’on ne peut négliger, comme le reconnaissait déjà l’antique serment d’Hippocrate, toujours actuel, qui demande à tout médecin de s’engager à respecter absolument la vie humaine et son caractère sacré » (Encyclique Evangelium vitae, n. 89).Retrouvez ici de nombreux documents traitant du respect de la vie

LE « GENDER POUR TOUS » ET LES DROITS DES PARENTS

24 avril, 2013

http://www.zenit.org/fr/articles/le-gender-pour-tous-et-les-droits-des-parents

LE « GENDER POUR TOUS » ET LES DROITS DES PARENTS

ETAT DES LIEUX EN EUROPE

BRUXELLES, 5 AVRIL 2013 (ZENIT.ORG) GRÉGOR PUPPINCK

Les parents qui voudront transmettre certaines valeurs à leurs enfants vont dans les prochains mois se heurter à l’école de la République, telle que l’actuel gouvernement veut la refonder, en particulier à propos de la complémentarité homme-femme, de la sexualité humaine et de la morale.

Le projet de loi Taubira sur le mariage doit être considéré en lien avec un autre projet fondamental de l’actuel gouvernement : le projet de « refondation de l’école de la République » actuellement discuté à l’Assemblée Nationale. Ce projet de loi sur la « refondation de l’école de la République » prévoit, entre autres dispositions, d’introduire un nouvel enseignement obligatoire de morale laïque et d’éducation civique, ainsi que de lutter dès le plus jeune âge contre les stéréotypes de genre. Dans la presse et à l’Assemblée, le ministre de l’éducation nationale, Vincent Peillon, a précisé que « le but de la morale laïque est d’arracher l’élève à tous les déterminismes, familial, ethnique, social, intellectuel »[1]pour « permettre à chaque élève de s’émanciper », car « le but de l’école républicaine a toujours été de produire un individu libre »[2]. Dans la même veine, la Ministre de la Justice, Christiane Taubira a également déclaré à l’Assemblée que  « dans nos valeurs, l’Education vise à arracher les enfants aux déterminismes sociaux et religieux et d’en faire des citoyens libres »[3].
L’un de ces déterminismes serait l’identité de genre ; la déconstruction des stéréotypes de genres est conçue comme un moyen d’émancipation des enfants. Le projet de « refondation de l’école de la République » prévoit à présent que « l’éducation à l’égalité de genre » devienne une mission de l’école élémentaire, dès l’âge de 6 ans, « afin de substituer à des catégories comme le sexe (…) le concept de genre qui (…) montre que les différences entre les hommes et les femmes ne sont pas fondées sur la nature, mais sont historiquement construites et socialement reproduites »[4]. Cette volonté ressort également du récent rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales[5] qui recommande que l’école s’engage dans la « lutte contre les stéréotypes de genre » « dès le plus jeune âge », qu’elle déconstruise « l’idéologie de la complémentarité » homme-femme pour « tendre vers une société » égalitaire. A cette fin, ce rapport recommande notamment aux enseignants de remplacer les appellations « garçons » et « filles » par les termes neutres « amis » ou « enfants », de raconter des histoires dans lesquels les enfants ont deux papas ou deux mamans, etc. Il s’agit, dit le rapport, d’empêcher la « différenciation sexuée » et l’intériorisation par les enfants de leur identité sexuelle. Outre ces aspects relatifs à la théorie du genre, la morale laïque promue par le projet de « refondation de l’école de la République » est aussi source d’inquiétudes. Ce projet de loi vise à refonder la société via l’école ; il est complémentaire du projet Taubira qui « refonde » la famille via le mariage. Comme l’indique M. Peillon, « le gouvernement s’est engagé à s’appuyer sur la jeunesse pour changer les mentalités, notamment par le biais d’une éducation au respect de la diversité des orientations sexuelles » [6].
Ainsi, si la loi Taubira sur le « mariage » est adoptée, l’école publique devra non seulement « déconstruire les stéréotypes de genre » dans l’esprit des enfants, mais en outre leur enseigner qu’il est normal d’avoir deux mères (et un père inconnu), ou deux pères (et une mère porteuse). Ces « parentalités » seront enseignées comme des faits objectifs (et non comme des choix) et seront donc insusceptibles de tout jugement moral. Les parents qui voudront transmettre la morale naturelle à leurs enfants seront pris au piège : ils devront expliquer à leurs enfants qu’il ne faut pas croire tout ce qui est dit à l’école, mais qu’il faut se taire pour ne pas avoir d’ennuis. Ce sera une violation manifeste des droits naturels des parents. Les projets et déclarations de Mme Taubira et de M. Peillon témoignent d’ailleurs sans ambigüité de leur intention de ne pas respecter les droits des parents, mais d’arracher les enfants pour les libérer. Ce droit a pourtant été réaffirmé dans les grandes déclarations des droits de l’homme après la seconde Guerre Mondiale, en réaction aux totalitarismes nazi, fasciste et communiste. La Déclaration universelle des droits de l’homme reconnaît que « la famille est l’élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l’Etat » (art. 16.3) et que « les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants » (Art. 26.3). En ratifiant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, les Etats se sont engagés « à respecter la liberté des parents de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs propres convictions » (Art. 18.4). De façon plus explicite encore, la Convention européenne des droits de l’homme énonce que « L’Etat, dans l’exercice des fonctions qu’il assumera dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, respectera le droit des parents d’assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques » (Protocole additionnel 1er, Art. 2).
Actuellement, les droits de la famille sont à nouveau attaqués au nom d’un projet de société, fondé non plus sur la famille, mais sur les notions de tolérance, de non-discrimination et de pluralisme et qui envisage l’homme comme un individu purement abstrait. Le pouvoir de l’Etat qui s’en trouve de nouveau étendu, car en se donnant pour mission de réaliser un « projet de société », il se donne d’abord le pouvoir de le définir et le droit de l’imposer.
Ce à quoi les parents français vont devoir faire face, les parents espagnols l’ont déjà affronté avec succès. En revanche, en Allemagne, des parents ont préféré être condamnés à des peines de prison ferme plutôt que d’envoyer leurs enfants à des cours d’éducation sexuelle. En Russie, la situation est différente, des gouvernements régionaux, à la demande des familles, adoptent des lois visant à protéger les enfants de la propagande LGBT, mais ils font face à de fortes pressions des institutions européennes et des lobbies.

EN ESPAGNE
Le projet de M. Peillon est très similaire au cours « d’éduction à la citoyenneté » créé et imposé par l’ancien gouvernement espagnol de M. Zapatero. Il s’agissait d’enseigner une morale laïque, assez antireligieuse, avec une forte insistance sur l’égalité de genre et la sexualité infantile (voir ci une vidéo de présentation). L’objectif de cette discipline obligatoire et notée dès l’école primaire était de « construire la conscience morale » des enfants, de travailler sur leur « identité personnelle » et leur « éducation émotionnelle et affective ».
Une partie importante de la société espagnole a rejeté ce cours. Le Parti Populaire, principal parti de droite, ainsi que la Conférence épiscopale espagnole l’ont également dénoncé. Les trois évêques de Madrid ont déclaré moralement acceptable d’employer tous les moyens légitimes pour défendre la liberté de conscience, y compris l’objection de conscience[7]. Très rapidement, ce sont 55.000 familles qui se sont déclarées « objectrices de conscience » et ont refusé la participation de leurs enfants à ces cours. Les parents ont formé plus de 70 associations locales et régionales pour soutenir les objecteurs et lutter contre cet enseignement. De nombreux parents ont été poursuivis par les autorités, près de 2300 procédures judiciaires ont été initiées. Dans près de neuf cas sur dix, en 2007 et 2008, les tribunaux locaux et régionaux ont condamné le gouvernement pour atteinte aux droits des parents. Les parents ont cependant échoué devant la Cour suprême espagnole qui n’a pas reconnu leur droit fondamental de s’opposer à cet enseignement, bien qu’elle ait reconnu l’existence d’un risque d’endoctrinement. Le 19 mars 2010, 305 parents ont saisi la Cour européen des droits de l’homme[8] (avec l’aide de l’ECLJ) sur le fondement de la Convention européenne des droits de l’homme qui énonce que « L’Etat, dans l’exercice des fonctions qu’il assumera dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement, respectera le droit des parents d’assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques » (Protocole additionnel 1er, Art. 2). La Cour européenne ne s’est pas encore prononcée. Elle devra juger si le cours d’éducation à la citoyenneté poursuit ou non un « but d’endoctrinement qui pourrait être considéré comme ne respectant pas les convictions religieuses et philosophiques des parents »[9]et vérifier que « les informations ou connaissances figurant au programme scolaire [sont] diffusées de manière objective, critique et pluraliste, permettant aux élèves de développer un sens critique à l’égard du fait religieux dans une atmosphère sereine, préservée de tout prosélytisme intempestif »[10]. Il n’est pas dit que la Cour condamnera l’Espagne. Cela étant, suite à la mobilisation populaire, le nouveau gouvernement de droite de Mariano Rajoy  a annoncé dès son élection vouloir réformer ce cours, ce qu’il a commencé à faire.

EN ALLEMAGNE
Des parents ont préféré être condamnés à des peines de prison ferme plutôt que d’envoyer leurs enfants à des cours d’éducation sexuelle. Le programme de ces cours, obligatoires dans toutes les écoles primaires privées et publiques, varie selon les Länder. Dans plusieurs régions des parents ont demandé que leurs enfants âgés entre 7 et 9 ans soient dispensés de ce cours dont ils avaient pu préalablement prendre connaissance du contenu. Face au refus de l’école, certains parents ont passé outre et ont été condamnés à des peines d’amendes pour avoir gardé leurs enfants à la maison. Allant au bout de leur objection de conscience en refusant de payer ces amendes, qu’ils considéraient comme des violations de leurs droits parentaux, des parents ont finalement été condamnés à passer 43 jours en prison. C’est le cas de plusieurs familles à Salzkotten, en Rhénanie. Certains parents, ayant plusieurs enfants, ont fait plusieurs séjours en prison.
Ces parents ont saisi la Cour européenne des droits de l’homme qui a jugé que l’Allemagne pouvait obliger les parents à soumettre leurs enfants à ces cours dans le but « d’intégrer les minorités et d’éviter la formation de  »sociétés parallèles » motivées par la religion ou l’idéologie ». Concernant l’enseignement de la théorie du genre aux enfants, la Cour a estimé, d’accord avec le gouvernement allemand, que « l’éducation sexuelle devrait encourager la tolérance entre les êtres humains quelque soit leur orientation identité sexuelle »[11].
Dans d’autres affaires, la Cour européenne a validé la condamnation de parents qui avaient refusé la participation de leurs enfants à des cours obligatoires d’éthique laïque[12], mais à l’inverse, elle a jugé à propos de parents humanistes[13] que le caractère obligatoire de cours de culture religieuse viole leurs droits.

EN RUSSIE
En Russie, à la demande des associations familiales et de l’Eglise orthodoxe, un nombre croissant de régions russes, neuf à ce jour dont Saint Petersburg et Kaliningrad[14], adopte des lois visant à protéger les enfants de la « propagande homosexuelle ». Ces lois, dont la première a été adoptée en 2006 suite à des manifestations homosexuelles ayant choqué la population, visent à protéger les enfants des messages présentant les pratiques LGBT de façon agressive et favorable ou comme étant équivalente aux relations conjugales[15]. Le 25 janvier dernier, le Parlement russe, la Douma, a adopté en première lecture à une quasi-unanimité un projet de loi étendant cette interdiction à l’ensemble du territoire de la Fédération de Russie. Le Gouvernement agit au nom de sa responsabilité de « protéger les enfants des informations mettant en danger leur santé et leur croissance morale et spirituelle »[16], notamment celles susceptibles de saper les valeurs familiales. Ces lois ne sont pas un phénomène isolé : les « gay prides » sont souvent interdites, et la Russie a annoncé ne pas vouloir confier d’enfants russes à l’adoption internationale à des couples de même sexe.

DANS LES INSTITUTIONS INTERNATIONALES
Ce qui est en cause à travers le débat sur l’école, le mariage et la famille, c’est la structure et la nature de la société : le mariage, l’école et la famille sont interdépendants et définissent largement la société. Il faut reconnaître que ce débat oppose le peuple ordinaire, la rue, à une soi-disant « élite éclairée » dont le projet social –comme la théorie du gender- est peu concevable pour les non-initiés. Le débat se déroule aussi au sein des institutions internationales qui, plus que les institutions nationales, exercent consciemment la responsabilité de définir et de susciter la société de demain. La Cour européenne se définit elle-même comme « la conscience de l’Europe »[17].
La Russie est actuellement fortement critiquée par les diverses instances de l’Union européenne (Bruxelles) et du Conseil de l’Europe (Strasbourg). Le Parlement européen, Mme Ashton, qui représente la diplomatie européenne, l’Assemblée parlementaire et le Comité des ministres du Conseil de l’Europe ont tous condamné les lois russes interdisant la « propagande homosexuelle auprès des mineurs ». Les organisations LGBT mènent très activement campagne. Le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe a fait part de sa « vive préoccupation »[18] et a demandé à la Russie de s’engager à se conformer à l’avis que doit rendre la « Commission de Venise »[19]. L’objectif de ces pressions est d’éviter que le projet de loi fédérale soit adopté définitivement par la Douma en seconde lecture en mai prochain.
Les institutions européennes affirment que ces lois russes violent les droits de l’homme alors qu’elles visent la protection de la famille, de la morale, et de la santé des enfants, et ne portent pas atteinte de façon générale à la liberté d’expression, ni à la vie privée des personnes homosexuelles. Des ONG familiales russes répondent aux ONG pro-LGBT internationales[20]. Les russes ont peu de chances d’être entendus sur ce sujet qui a acquis une importance considérable dans l’ordre des priorités politiques des institutions européennes et américaines ; néanmoins, ils ont la capacité de résister à ces pressions.
La promotion de la théorie du genre n’est pas limitée à l’école. En fait, la question est beaucoup plus vaste. Les droits des parents se heurtent à la politique générale de non-discrimination selon l’orientation sexuelle dans laquelle s’inscrit la promotion de la théorie du genre. Le problème qui se pose à l’école se pose également dans le reste de la société. À cet égard, de nombreuses personnes ont déjà été sanctionnées en raison de leur refus moral de l’homosexualité. Le cas de l’Angleterre est exemplaire : depuis l’adoption en 2010 d’une loi sur l’égalité et la non-discrimination,. Ainsi, au Royaume-Uni, depuis l’adoption en 2010 d’une loi sur l’égalité et la non-discrimination, les sanctions et condamnations se multiplient[21]. Ainsi par exemple un couple s’est vu refuser l’agrément pour être famille d’accueil en raison de son jugement sur l’homosexualité,  un médecin a dû quitter ses fonctions au sein d’un service social après s’être abstenu de prendre part à la décision de confier des enfants à des couples de même sexe, les agences catholiques d’adoption ont été contraintes de cesser leurs activités en raison de leur refus de confier des enfants à l’adoption à des couples de même sexe[22], une employée de mairie affectée à l’État civil et un conseiller conjugal ont été licenciés après avoir exprimé leur incapacité, en conscience, à conseiller sexuellement un couple d’homosexuels et à célébrer leur union civile. La Cour européenne n’a pas jugé abusifs ces licenciements[23]. C’est aussi le cas en Espagne où un magistrat qui avait demandé une expertise médicale visant à déterminer s’il est dans l’intérêt de l’enfant d’être adopté par la compagne de sa mère, a été suspendu pour dix ans au motif que cette demande d’expertise aurait constitué une manœuvre dilatoire et un acte homophobe[24].
Ce ne sont que quelques exemples d’un phénomène qui risque fort de se généraliser, en particulier si l’Union européenne adopte la proposition de « directive du Conseil relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle ».
Cette tendance est forte, mais pas inéluctable comme en témoigne les exemples espagnols et russes. Autre exemple récent, un projet du Conseil de l’Europe « sur les droits et le statut juridique des enfants et les responsabilités parentales » qui entérinait le mariage, l’adoption, la PMA pour les couples de même sexe et même les mères porteuses (la GPA) a finalement été rejeté par le Comité des Ministres après un intense travail de « contre-lobbying ». L’objectif de cette recommandation était de refonder la famille sur la seule volonté (et non pas sur la biologie) et de poser le principe de l’acceptabilité et l’équivalence de tous les types d’unions et de procréation (adoption, PMA, GPA « pour tous »).
Dès lors, manifester pour demander le retrait de la loi Taubira, c’est aussi manifester pour protéger la liberté de conscience des parents et leur droit inaliénable d’éduquer leurs enfants dans le respect des valeurs morales fondamentales, notamment s’agissant de la complémentarité homme-femme, de la sexualité et du sens de la vérité. Il y a de la haine et de la violence contre la conscience morale, le mariage et la famille qui sont perçus comme des obstacles à la liberté individuelle, à l’émancipation… et l’emprise idéologique des pouvoirs publics.
Les expériences de la Russie, du Royaume-Uni, de l’Allemagne et de l’Espagne montrent aux familles françaises que rien n’est joué d’avance et que différents scenarii sont possibles. Ce qui se passera en France sera déterminant en Europe et dépendra du degré de mobilisation et de conscience politique des familles et des évêques. Mais sur le fond, la seule stratégie est de montrer en quoi consiste la véritable liberté, fondée sur la vérité. La vérité n’est pas inaccessible : c’est la vérité que tout enfant a un père et une mère et a besoin d’eux. Parce que ces enfants sont ceux des parents et non de l’Etat, les autorités publiques ont le devoir de respecter les droits des parents d’éduquer leurs enfants.
Le témoignage de la liberté et de la vérité passe par l’éducation familiale, mais aussi par la manifestation publique, et si nécessaire par l’objection de conscience.

Grégor Puppinck
Docteur en Droit
Directeur
European Centre for Law and Justice

[1] Voir LEXPRESS.fr, du 02/09/2012, Vincent Peillon pour l’enseignement de la « morale laïque ».
[2] Assemblée nationale, compte-rendu intégral de la deuxième séance du jeudi 14 mars 2013. [3] Assemblée nationale, 3 février 2013. Le compte rendu intégral de la deuxième séance du dimanche3 février 2013 rapporte une formulation légèrement différente que celle qui a été très largement rapportée dans les médias et que nous reproduisons.
[4]  Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, 28 février 2013. Présentation orale de l’amendement par son auteur Mme Julie Sommaruga, député.
http://www.dailymotion.com/video/xy2pjv_amendement-introduisant-la-theorie-du-genre-a-l-ecole-elementaire_news#.UV6b5JO-18E
[5] Inspection générale des affaires sociales, GRESY Brigitte, GEORGES Philippe, Rapport sur l’égalité entre les filles et les garçons dans les modes d’accueil de la petite enfance, Décembre 2012.
[6] Lettre de Vincent Peillon, Ministre de l’Eduction nationale, aux recteurs, datée du 4 janvier 2013.
[7] September, 1st, 2008. In: http://www.cas-aranjuez.org/Colegio/Tablon/Documentos/CartaObispos.pdf
[8] affaire Ramos Bejarano et Autres c. Espagne, n° 15976/10
[9] Johanna APPEL-IRRGANG et autres contre l’Allemagne (no 45216/07)
[10] Affaires Johanna APPEL-IRRGANG et autres contre l’Allemagne (no 45216/07), Décision.
[11] Affaires Konrad contre l’Allemagne no. 35504/03 du 11 septembre 2006, et DOJAN et autres contre l’Allemagne du 13 Septembre 2011 N° 319/08, 2455/08, 7908/10, 8152/10, 8155/10 du 13 septembre 2011.
[12] Johanna APPEL-IRRGANG et autres contre l’Allemagne (no 45216/07)
[13] Folgero et autres contre Norvège, GC, no 15472/02, 29 juin 2007
[14] Il s’agit des régions de Ryazan, Archangel, Kostroma, St Petersburg, Novosibirsk, Magadan, Samara, de al Republique de Bashkortostan, du Territoire de Krasnodar et de Kaliningrad.
[15] D’après la définition donnée par la Cour Suprême russe, dans son arrêt  du 15 Aout 2012 relatif à la loi de la Région Archange.
[16] Loi fédérale sur la protection fondamentale des droits des enfants (no. 124-FZ du 24 Juin 1998)
[17] La conscience de l’Europe, 50 ans de la Cour européenne des droits de l’homme, Conseil de l’Europe, octobre 2010.
[18] Conseil de l’Europe, Décision du Comité des Ministres lors de sa 1164e réunion (5-7 mars 2013)  relative à l’affaire ALEKSEYEV contre Russie, 4916/07.
[19] La Commission de Venise  est composée d’experts en droit constitutionnel ; elle s’est prononcée récemment sur la nouvelle Constitution hongroise.
[20] Communication to the Committee of Ministers of the Council of Europe concerning Alekseyev v. Russia (application no. 4916/07), by the Family and Demography Foundation, http://en.familypolicy.ru/read/240
[21] Voir le site internet des organisations Christian Concern et Christian Legal Centre.
[22] Voir l’article de Jean Mercier, Cour Européenne des Droits de l’homme : pas de discrimination antichrétienne, du 15 janvier 2013 paru dans La Vie.
[23] Affaires Eweida et autres contre le Royaume-Uni, n°48420/10, 59842/10, 51671/10 et 36516/10 du 15 janvier 2013.
[24] Tribunal Supremo, Recurso No. 192/2009, http://www.hispanidad.com/imagenes//escanear0002.pdf

Le pape encourage le don de sang de cordon ombilical

1 mars, 2011

du site:

http://www.zenit.org/article-27113?l=french

Discours de Benoît XVI à l’Académie pontificale pour la Vie

Le pape encourage le don de sang de cordon ombilical

ROME, Mercredi 27 février 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral du discours que le pape Benoît XVI a adressé aux membres de l’Académie pontificale pour la Vie qu’il a reçus samedi 26 février, à l’occasion de la 17ème assemblée plénière de l’Académie qui avait pour thème : « Les banques de cordon ombilical » et « Le traumatisme post-avortement ».

Messieurs les cardinaux,

Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,

Chers frères et sœurs,

Je vous accueille avec joie à l’occasion de l’Assemblée annuelle de l’Académie pontificale pour la Vie. Je salue en particulier Mgr Ignacio Carrasco de Paula, et je le remercie de ses paroles courtoises. A chacun j’adresse cordialement la bienvenue ! Dans les travaux de ces jours-ci, vous avez affronté des thèmes d’actualité importante, qui interrogent profondément la société contemporaine et la mettent au défi de trouver des réponses toujours plus adéquates pour le bien de la personne humaine. Le thème du syndrome post-abortif – c’est-à-dire le grave malaise psychique dont font souvent l’expérience les femmes qui ont eu recours à un avortement volontaire – révèle la voix irrépressible de la conscience morale, et la très grave blessure qu’elle subit à chaque fois que l’action humaine trahit la vocation innée au bien de l’être humain, dont elle témoigne. Dans cette réflexion, il serait utile de porter l’attention sur la conscience, parfois obscurcie, des pères des enfants qui souvent laissent seules les femmes enceintes. La conscience – enseigne le catéchisme de l’Eglise catholique – est ce « jugement de la raison par lequel la personne humaine reconnaît la qualité morale d’un acte concret qu’elle va poser, est en train d’exécuter ou a accompli » (n. 1778). C’est en effet la tâche de la conscience morale de discerner le bien du mal dans les différentes situations de l’existence, afin que, sur la base de ce jugement, l’être humain puisse librement s’orienter vers le bien. A ceux qui voudraient nier l’existence de la conscience morale de l’homme, en réduisant sa voix au résultat de conditionnements extérieurs ou à un phénomène purement émotif, il est important de répéter que la qualité morale de l’agir humain n’est pas une valeur extrinsèque ou optionnelle et n’est pas même une prérogative des chrétiens ou des croyants mais est commune aux êtres humains. Dans la conscience morale, Dieu parle à chacun et invite à défendre la vie humaine à chaque moment. C’est dans ce lien personnel avec le Créateur que réside la dignité profonde de la conscience morale et la raison de son inviolabilité.
Dans la conscience, l’homme tout entier – intelligence, émotivité, volonté – réalise la vocation de chacun au bien, si bien que le choix du bien ou du mal dans les situations concrètes de l’existence finit par marquer profondément la personne humaine dans chaque expression de son être. C’est en effet tout l’homme qui est blessé lorsque son agir se déroule contrairement à ce que dicte sa conscience. Cependant, même lorsque l’homme refuse la vérité et le bien que le Créateur lui propose, Dieu ne l’abandonne pas, mais justement à travers la voix de sa conscience, continue à le chercher et à lui parler, afin qu’il reconnaisse l’erreur et s’ouvre à la Miséricorde divine, capable de guérir quelque blessure que ce soit.
Les médecins en particulier, ne peuvent pas se soustraire au grave devoir de défendre contre la tromperie la conscience de nombreuses femmes qui pensent trouver dans l’avortement la solution à des difficultés familiales, économiques, sociales ou à des problèmes de santé de leur enfant. Spécialement dans cette dernière situation, la femme est souvent convaincue, parfois par les médecins eux-mêmes, que l’avortement représente non seulement un choix moralement licite, mais même un acte « thérapeutique » dû pour éviter des souffrances à l’enfant et à sa famille, et un poids « injuste » pour la société. Sur un fond culturel caractérisé par l’éclipse du sens de la vie, où s’est beaucoup atténuée la perception commune de la gravité morale de l’avortement, et d’autres formes d’attentats contre la vie humaine, il faut aux médecins une force spéciale pour continuer à affirmer que l’avortement ne résout rien, mais tue l’enfant, détruit la femme et aveugle la conscience du père de l’enfant, en ruinant, souvent, la vie de la famille.
Ce devoir ne concerne cependant pas seulement la profession médicale, et les agents de santé. Il est nécessaire que toute la société se mette à défendre le droit à la vie de qui est conçu, et du vrai bien de la femme, qui ne pourra jamais, en aucune circonstance, se réaliser dans le choix de l’avortement. Il sera pareillement nécessaire – comme indiqué par vos travaux – de ne pas faire manquer les aides nécessaires aux femmes qui, en ayant hélas déjà eu recours à l’avortement, font maintenant l’expérience de tout ce drame moral et existentiel. Nombreuses sont les initiatives, au niveau diocésain ou de la part d’organismes de bénévolat, qui offrent un soutien psychologique et spirituel, pour une récupération humaine complète. La solidarité de la communauté chrétienne ne peut pas renoncer à ce type de co-responsabilité. Je voudrais rappeler à ce propos l’invitation adressée par le vénérable Jean-Paul II aux femmes qui ont eu recours à l’avortement : « L’Eglise sait combien de conditionnements ont pu peser sur votre décision, et elle ne doute pas que, dans bien des cas, cette décision a été douloureuse, et même dramatique. Il est probable que la blessure de votre âme n’est pas encore refermée. En réalité, ce qui s’est produit a été et demeure profondément injuste. Mais ne vous laissez pas aller au découragement et ne renoncez pas à l’espérance. Sachez plutôt comprendre ce qui s’est passé et interprétez-le en vérité. Si vous ne l’avez pas encore fait, ouvrez-vous avec humilité et avec confiance au repentir: le Père de toute miséricorde vous attend pour vous offrir son pardon et sa paix dans le sacrement de la réconciliation. C’est à ce même Père et à sa miséricorde qu’avec espérance vous pouvez confier votre enfant. Avec l’aide des conseils et de la présence de personnes amies compétentes, vous pourrez faire partie des défenseurs les plus convaincants du droit de tous à la vie par votre témoignage douloureux » (Enc. Evangelium vitae, 99).
La conscience morale des chercheurs, et de toute la société civile est intimement impliquée aussi dans le second thème de vos travaux : l’utilisation des banques de cordon ombilical, dans un but clinique et de recherche. La recherche médico-scientifique est une valeur et donc un devoir non seulement pour les chercheurs mais pour toute la communauté civile. Il en découle un devoir des institutions de promouvoir des recherches valides sur le plan éthique, et la valeur de la solidarité des personnes dans la participation à des recherches visant à la promotion du bien commun. Cette valeur et la nécessité de cette solidarité sont bien mis en évidence dans le cas de l’utilisation des cellules souches provenant du cordon ombilical. Il s’agit d’applications cliniques importantes et de recherches prometteuses au plan scientifique, mais dans leur réalisation beaucoup dépend de la générosité au niveau du don du sang de cordon au moment de l’accouchement et de l’adaptation des structures pour rendre praticable la volonté du don de la part des femmes qui accouchent.
C’est pourquoi je vous encourage tous à devenir des promoteurs d’une solidarité humaine et chrétienne vraie et consciente. A ce propos, de nombreux chercheurs médicaux regardent avec perplexité, à juste titre, la floraison de banques privées pour la conservation du sang de cordon pour un usage personnel exclusif. Une telle option – comme le démontrent les travaux de votre assemblée – non seulement est dépourvue d’une réelle supériorité scientifique par rapport au don de cordon, mais elle affaiblit l’esprit de solidarité authentique qui doit constamment animer la recherche de ce bien commun auquel tendent, en dernière analyse, la science et la recherche médicale.
Chers frères et sœurs, je renouvelle l’expression de ma reconnaissance au président et à tous les membres de l’Académie pontificale pour la Vie, pour la valeur scientifique et éthique de leur engagement au service du bien de la personne humaine. Mon souhait est que vous mainteniez toujours vivant votre esprit de service authentique qui rend les esprits et les cœurs sensibles de façon à reconnaître les besoins des hommes de notre temps. A chacun de vous et à ceux qui vous sont chers, j’accorde de tout cœur la bénédiction apostolique.

Traduction : Zenit

A propos du projet de loi relatif à la bioéthique : édito du card. Ricard

7 février, 2011

du site:

http://www.zenit.org/article-26872?l=french

A propos du projet de loi relatif à la bioéthique : édito du card. Ricard

ROME, Vendredi 4 février 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous l’édito que le cardinal Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, a consacré au prochain débat au Parlement, en février 2011, sur le projet de loi relatif à la bioéthique. Dans l’Aquitaine, le journal du diocèse de Bordeaux, le cardinal évoque longuement le thème de la recherche sur les embryons humains.

* * *

Des questions largement débattues

L’élaboration de ce projet a été précédée par une large consultation à travers toute la France. Beaucoup se sont exprimés à ce sujet. Le Conseil d’Etat a rédigé une Etude. A été également publié un Rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques. Les évêques de France, sous la conduite de Mgr d’Ornellas, archevêque de Rennes, ont apporté leur contribution à ce débat (1). Ils ont rédigé une « Note sur un projet de loi relatif à la bioéthique » (2 décembre 2010).
Ce projet veut prendre en compte l’intérêt de l’enfant à naître. Il faut le souligner. C’est ce qui lui fait interdire :
- le dépistage de la trisomie 21 lors d’un diagnostic préimplantatoire
- la gestation pour autrui
- le transfert d’embryons et l’insémination post mortem
- le recours à l’Aide médicale à la procréation pour les célibataires et les couples de femmes
Trois dispositions de la loi sont heureuses :
- l’information concernant les anomalies génétiques graves

- le don croisé d’organes
- la prise en compte des cellules de sang du cordon ombilical
Par contre, les dispositions sur quatre sujets sont problématiques et méritent un vrai débat. Elles concernent :
- l’information donnée à une femme enceinte sur les examens de diagnostic prénatal
- la levée de l’anonymat pour l’aide médicale à la procréation avec tiers donneur
- l’aide médicale à la procréation et la « conservation des embryons »
- la recherche sur les embryons humains
Je n’aborderai dans cet éditorial que ce dernier point qui est traité dans les articles 23 et 24 du projet de loi (2).

Respect ou instrumentalisation de l’embryon : une contradiction interne
Ce projet de loi est traversé ici par une contradiction interne. D’un côté, il maintient l’interdiction de la recherche sur l’embryon humain et sur les cellules souches embryonnaires humaines. Cette disposition redit l’importance du respect de l’embryon humain. Elle est en cohérence avec l’ensemble de notre corpus juridique sur la protection de la vie de l’être humain, et notamment avec la règle fondamentale posée à l’article 16 du Code civil qui énonce le respect de tout être humain « dès le commencement de sa vie ». La loi a toujours vocation à protéger le plus vulnérable et qu’y a-t-il de plus vulnérable que l’enfant à naître ? (3) .   Pour le législateur, l’embryon ne saurait être considéré comme un « amas de cellules » pouvant servir de simple matériau de laboratoire. La loi interdit d’ailleurs d’en créer pour la seule recherche scientifique. Dans son Etude le Conseil d’Etat affirmait : « La recherche sur l’embryon humain soulève des oppositions éthiques car elle porte atteinte non à une chose mais…à une personne humaine potentielle, qui ne saurait donner lieu à instrumentalisation. » (p. 20).
Mais, en même temps qu’il affirme le principe du respect de l’embryon, le projet de loi établit une dérogation en faveur de la recherche scientifique. Dans certaines conditions, les embryons surnuméraires pourront être utilisés pour la recherche et pourront être ainsi détruits. La loi de 2004 avait établi une dérogation pour une durée de cinq années, en espérant qu’elle ne serait bientôt plus nécessaire. Le projet de loi actuel rend permanente cette dérogation. Mais on ne voit pas pourquoi ici l’éthique devrait s’effacer devant les progrès supputés de la recherche scientifique. Celle-ci n’autorise pas tout. Elle n’autorise pas par exemple la commercialisation du corps humain. Et cette interdiction n’admet pas de dérogation. Le projet de loi met comme condition à l’utilisation de l’embryon pour la recherche s’ « il est impossible, en l’état actuel des connaissances scientifiques, de mener une recherche similaire sans recourir à des cellules souches embryonnaires ou à des embryons ». Mais les découvertes scientifiques sur les cellules souches adultes n’ouvrent-elles pas une voie à une méthode alternative ?

Des distinctions non-pertinentes
Pour échapper à ce dilemme, certains se risquent à des distinctions. Faut-il distinguer entre deux stades de développement, celui du « préembryon » et celui de « l’embryon humain » ? Mais à quel moment faire passer la frontière entre ce qui ne serait pas humain et ce qui le deviendrait ? Nous sommes devant un développement continu de ce qui deviendra un enfant si on lui permet d’aller à son terme : « Le corps d’un être humain, dès les premiers stades de son existence, n’est jamais réductible à l’ensemble de ses cellules. Ce corps embryonnaire se développe progressivement selon un « programme » bien défini et avec une finalité propre qui se manifeste à la naissance de chaque enfant. » (Instruction Dignitatis humanae de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 8 décembre 2008) (4).
Le projet de loi fait une distinction entre les embryons congelés qui font l’objet d’un projet parental et ceux qui n’en feraient plus l’objet. Ceux-ci, après autorisation expresse des « parents », pourraient être affectés à la recherche. Certes, l’environnement parental, et donc un projet parental, est important pour l’enfant à naître et pour l’enfant qui est né mais pas au point d’être le critère de l’humanité de l’embryon. Celui-ci est déjà pleinement humain en lui-même (5). Ce n’est pas parce que les parents l’estiment désormais inutile qu’il l’est.
Tenir ensemble : recherche scientifique et questionnement éthique
Il faut espérer que les débats que l’étude de ce projet de loi va susciter ne vont pas s’égarer dans une fausse problématique : une opposition frontale entre la science et l’éthique. C’est justement la grandeur de l’homme d’articuler la nécessité de la recherche scientifique avec l’importance vitale du questionnement éthique. Nous savons bien aujourd’hui dans le domaine de l’écologie, par exemple, que tout ce qui est possible de faire n’est pas forcément souhaitable. Pourquoi en serait-il autrement pour l’écologie humaine ?
Le Rapport des Etats Généraux autour de la bioéthique affirme : « Les citoyens attendent de l’Etat qu’il soit en mesure de protéger chacun, en particulier les plus vulnérables, contre les dérives mercantiles, les expérimentations et les pratiques qui bafouent le principe d’intégrité du corps humain » (p. 20). En protégeant de façon inconditionnelle l’être vulnérable par excellence, l’embryon humain, la loi civile ne répondrait-elle pas ainsi pleinement à cette attente ? C’est ce que l’on peut souhaiter et demander.

† Jean-Pierre cardinal RICARD

Archevêque de Bordeaux
Evêque de Bazas

Angélus du dimanche 7 février (dans le discours une réflexion sur la bioéthique)

9 février, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-23450?l=french

Angélus du dimanche 7 février

Texte intégral

ROME, Dimanche 7 Février 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de la méditation prononcée ce dimanche par Benoît XVI, à l’occasion de la prière de l’Angélus. Le pape s’est exprimé depuis la fenêtre de son bureau, devant les milliers de pèlerins réunis place Saint-Pierre.

AVANT L’ANGELUS

Chers frères et sœurs,

La liturgie de ce 5e dimanche du temps ordinaire nous présente le thème de l’appel divin. Dans une vision majestueuse, Isaïe se trouve en présence du Seigneur trois fois saint et il est pris d’une grande crainte et d’un sentiment profond de sa propre indignité. Mais un séraphin purifie ses lèvres avec un charbon ardent et efface son péché, et lui, se sentant prêt à répondre à l’appel s’exclame : « Me voici, envoie-moi ! » (cf. Is 6,1-2.3-8). La même succession de sentiments est présente dans l’épisode de la pêche miraculeuse dont nous parle le passage de l’Evangile d’aujourd’hui. Envoyés par Jésus pour jeter les filets, malgré une nuit infructueuse, Simon Pierre et les autres disciples, se fiant à sa parole, obtiennent une pêche surabondante. Face à un tel prodige, Simon Pierre ne se jette pas au cou de Jésus pour exprimer la joie de cette pêche inattendue mais, comme l’évangéliste Luc le raconte, il se jette à genoux en disant : « Eloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ! ». Alors Jésus le rassure : « Sois sans crainte ; désormais ce sont des hommes que tu prendras » (cf. Lc 5,10) ; et lui, laissant tout, le suit.

Paul aussi, se souvenant d’avoir été un persécuteur de l’Eglise, se professe indigne d’être appelé apôtre, mais il reconnaît que la grâce de Dieu a accompli en lui des merveilles et, malgré ses limites, lui a confié le devoir et l’honneur de prêcher l’Evangile (cf. 1 Co 15, 8-10). Dans ces trois expériences, nous voyons comment la rencontre authentique avec Dieu conduit l’homme à reconnaître sa pauvreté et son inaptitude, ses limites et son péché. Mais malgré cette fragilité, le Seigneur, riche en miséricorde et en pardon, transforme la vie de l’homme et l’appelle à le suivre. L’humilité témoignée par Isaïe, par Pierre et par Paul invite tous ceux qui ont reçu le don de la vocation divine à ne pas se concentrer sur leurs propres limites, mais à garder le regard fixé sur le Seigneur et sur sa surprenante miséricorde, pour convertir leur cœur et continuer avec joie à « tout quitter » pour Lui. Il ne regarde pas, en effet, ce qui est important pour l’homme : « L’homme regarde à l’apparence, mais le Seigneur regarde au cœur » (1 S 16,7), et il transforme des hommes pauvres et faibles, mais qui ont foi en Lui, en apôtres intrépides qui annoncent le salut.

En cette Année sacerdotale, prions le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson et que tous ceux qui entendent l’invitation du Seigneur à le suivre, après un discernement nécessaire, sachent répondre avec générosité, non pas en comptant sur leurs propres forces mais en s’ouvrant à l’action de sa grâce. J’invite en particulier tous les prêtres à ranimer leur généreuse disponibilité à répondre chaque jour à l’appel du Seigneur avec la même humilité et la même foi qu’Isaïe, que Pierre et Paul.

Confions à la Vierge Sainte toutes les vocations, particulièrement celles à la vie religieuse et sacerdotale. Que Marie suscite en chacun le désir de prononcer son propre « oui » au Seigneur avec une joie et un dévouement total.

APRES L’ANGELUS

Après l’Angélus, le pape a lancé cet appel en italien :

Nous célébrons aujourd’hui la Journée pour la Vie. Je m’associe volontiers aux évêques italiens et à leur message sur le thème « La force de la vie, un défi dans la pauvreté ». Dans la période actuelle de difficulté économique, ces mécanismes qui, en produisant de la pauvreté et en créant de fortes inégalités sociales blessent et offensent la vie, touchant surtout les plus faibles et les personnes sans défense, deviennent encore plus dramatiques. Cette situation incite donc à encourager un développement humain intégral pour dépasser l’indigence et le besoin, et rappelle surtout que le but de l’homme n’est pas le bien-être mais Dieu lui-même et que l’existence humaine doit être défendue et favorisée à chacun de ses stades. Nul n’est en effet le patron de sa propre vie, mais nous sommes tous appelés à la protéger et à la respecter, de sa conception jusqu’à sa fin naturelle.

Tout en exprimant mon soutien à ceux qui travaillent directement au service des enfants, des malades et des personnes âgées, je salue avec affection les nombreux fidèles de Rome ici présents, guidés par le cardinal vicaire et quelques évêques auxiliaires. Le diocèse de Rome consacre une attention spéciale à la Journée pour la Vie et la prolonge avec la « Semaine de la vie et de la famille ». Je souhaite la bonne réussite de cette initiative et j’encourage l’activité des consulteurs, des associations et des mouvements, mais aussi des professeurs d’université engagés au soutien de la vie et de la famille.

Dans ce contexte, je rappelle que le 11 février prochain, mémoire de la bienheureuse Vierge Marie de Lourdes et Journée mondiale du Malade, je célèbrerai la messe dans la matinée avec les malades, dans la basilique Saint-Pierre.

Puis il a salué les pèlerins en différentes langues. Voici ce qu’il a dit en français :

Chers pèlerins francophones, dans l’Evangile d’aujourd’hui le Christ nous adresse une invitation à avancer vers le large et à jeter les filets, car la Bonne Nouvelle doit s’étendre jusqu’aux extrémités du monde. Comme disciples de Jésus, quittons le rivage de nos certitudes humaines pour jeter avec lui les filets de la Parole de Dieu. En cette Année Sacerdotale, que la force de l’Esprit guide et remplisse de bonheur et de joie ceux qui ont accepté de se laisser saisir par le Christ ! Que la Vierge Marie, Mère des prêtres, accompagne chacun d’eux sur son chemin ! Bon dimanche et bonne semaine à tous !

Traduction Zenit

 » Nascituri te salutant ! La crise de conscience bioéthique « 

26 janvier, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-23323?l=french

« Nascituri te salutant ! La crise de conscience bioéthique »

, entretien avec J.-M. Le Méné

A l’occasion de la publication du rapport de la Mission parlementaire sur la bioéthique

ROME, Lundi 25 janvier 2010 (ZENIT.org) – Dans la perspective de la révision de la loi française de bioéthique, la Librairie La Procure organise à Paris, mercredi 27 janvier 2010, à 20h00, une rencontre autour du livre de Jean-Marie Le Méné « Nascituri te salutant ! La crise de conscience bioéthique » (Editions Salvator) avec l’auteur et Jean-Frédéric Poisson, député des Yvelines.

Le rapport de la Mission parlementaire française sur la bioéthique, qui vient de paraître le 20 janvier 2010, « propose que la loi de 2010 vide de leur substance les dernières dispositions protectrices de l’embryon humain devenu objet de recherche », estime Jean-Marie Le Méné, président de la Fondation Jérôme Lejeune qui s’explique dans cet entretien accordé à Zenit.

Zenit  – Monsieur Le Méné, à la veille de la révision de la loi sur la bioéthique vous venez de publier « Nascituri te salutant ! La crise de conscience bioéthique ». Quel message tenez-vous à faire passer ? 

Jean-Marie Le Méné – Le but de ce livre est de donner des clés pour comprendre la révision de la loi de bioéthique. J’ai voulu remettre ses principaux contenus dans une perspective logique et dynamique, en révélant les évolutions en cours, qui démontrent la stérilité du conflit entre l’éthique et la science. Je suggère aussi de dépasser ce conflit par la prise de conscience que la coexistence entre science et éthique est souhaitable, possible mais également nécessaire pour assurer l’efficacité de l’une et l’autre.

Le sous-titre : La crise de conscience bioéthique, prend acte du fait que, pour la première fois, la conscience semble s’inviter au débat et nous dire : ce qui est légal n’est pas forcément moral. C’est un immense progrès !

Zenit  – Vous y expliquez l’évolution de la transgression quant à la recherche sur l’embryon depuis 1994. Peut-on craindre encore une évolution en 2010 ? Quelles en seraient les conséquences ? 

Jean-Marie Le Méné – Aujourd’hui la loi pose un principe d’interdiction pour la recherche sur les embryons assorti de dérogations. En effet depuis 2004 ces recherches ne sont autorisées que pour une durée de cinq ans si elles sont « susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs » et à condition qu’elles ne puissent « être poursuivies par une méthode alternative d’efficacité comparable ».

Or un rapport important, celui de la Mission parlementaire sur la bioéthique, vient de paraître le 20 janvier 2010. Contrairement à ce qu’ont indiqué les observateurs, ce texte marque une réelle rupture avec la législation précédente. Certes, il propose de maintenir le principe d’interdiction des recherches sur l’embryon avec dérogation, mais en supprimant la condition des méthodes alternatives d’efficacité comparable, et en remplaçant l’exigence d’un progrès thérapeutique par un simple  progrès médical. Autrement dit, ce rapport propose que la loi de 2010 vide de leur substance les dernières dispositions protectrices de l’embryon humain devenu objet de recherche.

Le principe d’interdiction deviendrait purement symbolique, et ne serait en réalité qu’une coquille vide permettant dans les faits toutes les recherches sur l’embryon.

Cette possible évolution est grave quand il est démontré  qu’il n’est pas nécessaire, et même qu’il est moins efficace, de recourir aux cellules embryonnaires pour obtenir des applications thérapeutiques. En effet les travaux sur les cellules souches adultes ou de sang de cordon ombilical ont déjà débouché sur des thérapies efficaces, ce qui n’est pas le cas des recherches sur les cellules souches embryonnaires. 

Zenit – A votre avis quelle est la cause de ce que vous appelez la transgression progressive en bioéthique ? 

Jean-Marie Le Méné – Cet attrait pour la recherche sur les cellules souches embryonnaires peut s’expliquer pour deux raisons : la survivance de positions dogmatiques classiques et l’utilitarisme économique.

Dans le sillage du slogan « il faut transgresser pour progresser » viennent se nicher des idéologies telles que le positivisme, le progressisme, et le scientisme. Il s’agit d’un matelas idéologique de base qui évacue toute référence à la conscience et à la morale.

Et puis l’on comprend surtout qu’il s’agit de donner satisfaction à des appétits financiers. La principale justification à ces transgressions consiste à rentabiliser les millions investis sur cette recherche en vendant à des laboratoires pharmaceutiques des techniques de criblages de molécules sur des cellules souches embryonnaires. En effet, il faut savoir que l’utilisation de l’embryon et des cellules embryonnaires pour la recherche est moins onéreuse que les essais sur les animaux ! Ici encore, la proposition du rapport de la Mission parlementaire est totalement incohérente dans la mesure où elle ne tient aucun compte d’une découverte scientifique majeure depuis la loi de 2004 : les cellules reprogrammées (iPS) mises au point par le Pr. Yamanaka en 2007. Ces cellules iPS peuvent remplacer avantageusement – et sans dommage éthique – les cellules souches embryonnaires s’agissant du criblage moléculaire nécessaire aux essais des laboratoires pharmaceutiques. L’embryon humain serait-il moins respectable en 2010 qu’en 2004 alors qu’il n’y a jamais eu moins de raison de déroger au respect qu’on lui doit ?

Zenit – « Nascituri te salutant ! » dénonce aussi l’eugénisme comme conséquence des diagnostics prénatal et préimplantatoire. Que peut-on prévoir des dérives eugéniques dans la loi de 2010 ? 

Jean-Marie Le Méné – Sur ce point, le rapport de la Mission parlementaire accentue l’eugénisme existant à l’encontre des personnes trisomiques. En effet, il propose d’ajouter la détection de la trisomie 21 au diagnostic préimplantatoire qui ne prévoit normalement de rechercher que les maladies héréditaires dont le couple, demandeur d’une fécondation in vitro, est atteint. Cette proposition introduit un élément d’appréciation subjective dans le recours au diagnostic préimplantatoire (car la trisomie est une maladie génétique, non héréditaire, qui ne menace pas plus ce couple qu’un autre) et préjuge du sort réservé à l’embryon dépisté trisomique : l’élimination.

Ainsi, l’embryon conçu in vitro et soumis au diagnostic préimplantatoire sera présumé mort.

Oui, il y a un eugénisme d’Etat en France, et je ne suis pas le seul à le dire. Des voix autorisées, notamment le Conseil d’Etat, le Professeur Jean-François Mattei, ancien Ministre de la santé, et le Professeur Sicard, ancien président du CCNE, dénoncent un « eugénisme de masse », « une perspective terrifiante, celle de l’éradication ».

Les conséquences du diagnostic prénatal (DPN) se passent de commentaire : 96% des fœtus détectés trisomiques à l’issue de ce diagnostic sont avortés. Qui a intérêt à nous faire croire que ce sont les parents qui sont eugénistes ? Non, il s’agit bel et bien d’un choix collectif de l’Etat qui, en finançant chaque année le DPN à hauteur de 100 millions d’euros, oriente par cette offre les choix individuels des parents qui en sont finalement les véritables victimes avec leurs enfants.

Les responsables politiques actuels n’ont-ils à proposer que le renforcement de la sélection – hier par le DPN, aujourd’hui par le DPI – pour l’élimination des êtres non conformes à la norme ?

Zenit – Quel est votre sentiment général sur cette révision de la loi de bioéthique ? Pensez vous qu’il est encore possible d’espérer une amélioration ? 

Jean-Marie Le Méné – Il y a un paradoxe sociétal révoltant. Collectivement nous affichons une compassion envers les personnes souffrant de handicap, de maladies génétiques, notamment dans des manifestations médiatiques, et simultanément nous demandons aux médecins de mettre tout en œuvre pour empêcher ces mêmes personnes de vivre ! Et cela au moment où des chercheurs explorent des pistes pour trouver un traitement pour la trisomie 21. Par exemple, les travaux d’un professeur américain de Stanford, William Mobley, et de son équipe, viennent de prouver que les capacités cognitives de souris trisomiques ont pu être nettement améliorées. Cette nouvelle, positive, démontre que cette maladie n’est pas sans solution et qu’il est utile de consacrer du temps et de l’argent à la recherche sur la trisomie 21. Un fatalisme a été rompu ! Forte de ce constat, la France de 2010 sera-t-elle capable de répondre à ce défi en développant une politique de recherche à visée thérapeutique ? 

Propos recueillis par Lucie de Raimond

Pour assister à cette rencontre, merci de vous inscrire par mail à l’adresse: laprocure@laprocure.com

ou par téléphone au ++ (33) (0)1.45.48.20.25

en précisant votre nom, prénom et le nombre de participants.