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OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

7 novembre, 2016

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2008/documents/hf_ben-xvi_hom_20080628_vespri.htmlSaint Paul Outside the Walls, The apse mosaic

CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DE LA SOLENNITÉ DES SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL, À L’OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE

HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs

Samedi 28 juin 2008

Basilique de Saint Paul Hors les Murs, Rome, le ciboire

OCCASION DE L’INAUGURATION DE L'ANNÉE PAULINIENNE  HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI dans année paulinenne 800px-Ciborio_S._Paolo_fuori_le_mura

Votre Sainteté et chers délégués fraternels,
Messieurs les cardinaux,
Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et sœurs,

Nous sommes réunis auprès de la tombe de saint Paul, qui naquit il y a deux mille ans à Tarse de Cilicie, dans l’actuelle Turquie. Qui était ce Paul? Dans le temple de Jérusalem, devant la foule agitée qui voulait le tuer, il se présente lui-même avec ces mots: « Je suis juif: né à Tarse, en Cilicie, mais élevé ici dans cette ville [Jérusalem], j’ai reçu, à l’école de Gamaliel, un enseignement strictement conforme à la Loi de nos pères; je défendais la cause de Dieu avec une ardeur jalouse… » (Ac 22, 3). A la fin de son chemin, il dira de lui-même: « J’ai reçu la charge… [d'enseigner] aux nations païennes la foi et la vérité » (1 Tm 2, 7; cf. 2 Tm 1, 11). Maître des nations, apôtre et annonciateur de Jésus Christ, c’est ainsi qu’il se décrit lui-même en regardant rétrospectivement le parcours de sa vie. Mais avec cela, son regard ne va pas seulement vers le passé. « Maître des nations » – cette parole s’ouvre à l’avenir, vers tous les peuples et toutes les générations. Paul n’est pas pour nous une figure du passé, que nous rappelons avec vénération. Il est également notre maître, pour nous aussi apôtre et annonciateur de Jésus Christ.
Nous sommes donc réunis non pour réfléchir sur une histoire passée, irrévocablement révolue. Paul veut parler avec nous – aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai voulu promulguer cette « Année paulinienne » spéciale: pour écouter et pour apprendre à présent de lui, qui est notre maître, « la foi et la vérité », dans lesquelles sont enracinées les raisons de l’unité parmi les disciples du Christ. Dans cette perspective, j’ai voulu allumer, pour ce bimillénaire de la naissance de l’Apôtre, une « Flamme paulinienne » spéciale, qui restera allumée pendant toute l’année dans un brasero spécifique placé dans le quadriportique de la Basilique. Pour conférer de la solennité à cet événement, j’ai également inauguré la « Porte paulinienne », à travers laquelle je suis entré dans la Basilique accompagné par le Patriarche de Constantinople, par le cardinal archiprêtre et par les autres autorités religieuses. C’est pour moi un motif de joie profonde que l’ouverture de l’ »Année paulinienne » assume un caractère œcuménique, en raison de la présence de nombreux délégués et représentants d’autres Eglises et communautés ecclésiales, que j’accueille le cœur ouvert. Je salue tout d’abord Sa Sainteté le Patriarche Bartholomaios I et les membres de la délégation qui l’accompagne, ainsi que le groupe nombreux de laïcs qui, de différentes parties du monde, sont venus à Rome pour vivre avec Lui et avec nous tous, ces moments de prière et de réflexion. Je salue les délégués fraternels des Eglises qui ont un lien particulier avec l’Apôtre Paul – Jérusalem, Antioche, Chypre, Grèce – et qui forment le cadre géographique de la vie de l’Apôtre avant son arrivée à Rome. Je salue cordialement les frères des différentes Eglises et communautés ecclésiales d’Orient et d’Occident, en même temps que vous tous qui avez voulu prendre part à cette ouverture solennelle de l’ »Année » consacrée à l’Apôtre des Nations.
Nous sommes donc ici rassemblés pour nous interroger sur le grand Apôtre des Nations. Nous nous demandons non seulement: qui était Paul? Nous nous demandons surtout: Qui est Paul? Que me dit-il? En cette heure, au début de l’ »Année paulinienne » que nous inaugurons, je voudrais choisir dans le riche témoignage du Nouveau Testament trois textes, dans lesquels apparaît sa physionomie intérieure, la spécificité de son caractère. Dans la Lettre aux Galates, il nous a offert une profession de foi très personnelle, dans laquelle il ouvre son cœur aux lecteurs de tous les temps et révèle quelle est l’impulsion la plus profonde de sa vie. « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi » (Ga 2, 20). Tout ce que Paul accomplit part de ce centre. Sa foi est l’expérience d’être aimé par Jésus Christ de manière tout à fait personnelle; elle est la conscience du fait que le Christ a affronté la mort non pour quelque chose d’anonyme, mais par amour pour lui – de Paul – et que, en tant que Ressuscité, il l’aime toujours, c’est-à-dire que le Christ s’est donné pour lui. Sa foi est le fait d’être frappé par l’amour de Jésus Christ, un amour qui le bouleverse jusqu’au plus profond de lui-même et qui le transforme. Sa foi n’est pas une théorie, une opinion sur Dieu et sur le monde. Sa foi est l’impact de l’amour de Dieu sur son cœur. Et ainsi, cette foi est l’amour pour Jésus Christ.
Paul est présenté par de nombreuses personnes comme un homme combatif qui sait manier l’épée de la parole. De fait, sur son parcours d’apôtre les disputes n’ont pas manqué. Il n’a pas recherché une harmonie superficielle. Dans la première de ses Lettres, celle qui s’adresse aux Thessaloniciens, il dit: « Nous avons cependant trouvé l’assurance qu’il fallait pour vous annoncer, au prix de grandes luttes, l’Evangile de Dieu… Jamais, vous le savez, nous n’avons eu un mot de flatterie » (1 Th 2, 2.5). Il considérait que la vérité était trop grande pour être disposé à la sacrifier en vue d’un succès extérieur. La vérité dont il avait fait l’expérience dans la rencontre avec le Ressuscité méritait pour lui la lutte, la persécution, la souffrance. Mais ce qui le motivait au plus profond, était d’être aimé par Jésus Christ et le désir de transmettre cet amour aux autres. Paul était un homme capable d’aimer, et toute son œuvre et sa souffrance ne s’expliquent qu’à partir de ce centre. Les concepts de base de son annonce se comprennent uniquement à partir de celui-ci. Prenons seulement l’une de ses paroles-clés: la liberté. L’expérience d’être aimé jusqu’au bout par le Christ lui avait ouvert les yeux sur la vérité et sur la voie de l’existence humaine – cette expérience embrassait tout. Paul était libre comme un homme aimé par Dieu qui, en vertu de Dieu, était en mesure d’aimer avec Lui. Cet amour est à présent la « loi » de sa vie et il en est précisément ainsi de la liberté de sa vie. Il parle et agit, mû par la responsabilité de la liberté de l’amour. Liberté et responsabilité sont liées ici de manière inséparable. Se trouvant dans la responsabilité de l’amour, il est libre; étant quelqu’un qui aime, il vit totalement dans la responsabilité de cet amour et ne prend pas la liberté comme prétexte pour l’arbitraire et l’égoïsme. C’est dans le même esprit qu’Augustin a formulé la phrase devenue ensuite célèbre: Dilige et quod vis fac (Tract. in 1Jo 7, 7-8) – aime et fais ce que tu veux. Celui qui aime le Christ comme Paul l’a aimé peut vraiment faire ce qu’il veut, car son amour est uni à la volonté du Christ et donc à la volonté de Dieu; car sa volonté est ancrée à la vérité et parce que sa volonté n’est plus simplement sa volonté, arbitre du moi autonome, mais qu’elle est intégrée dans la liberté de Dieu et apprend de celle-ci le chemin à parcourir.
Dans la recherche du caractère intérieur de saint Paul je voudrais, en deuxième lieu, rappeler la parole que le Christ ressuscité lui adressa sur la route de Damas. Le Seigneur lui demande d’abord: « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? ». A la question: « Qui es-tu, Seigneur? », est donnée la réponse: « Je suis Jésus, celui que tu persécutes » (Ac 9, 4). En persécutant l’Eglise, Paul persécute Jésus lui-même: « Tu me persécutes ». Jésus s’identifie avec l’Eglise en un seul sujet. Dans cette exclamation du Ressuscité, qui transforma la vie de Saul, est au fond désormais contenue toute la doctrine sur l’Eglise comme Corps du Christ. Le Christ ne s’est pas retiré au ciel, en laissant sur la terre une foule de fidèles qui soutiennent « sa cause ». L’Eglise n’est pas une association qui veut promouvoir une certaine cause. Dans celle-ci, il ne s’agit pas d’une cause. Dans celle-ci il s’agit de la personne de Jésus Christ, qui également en tant que Ressuscité est resté « chair ». Il a la « chair et les os » (Lc 24, 39), c’est ce qu’affirme le Ressuscité dans Luc, devant les disciples qui l’avaient pris pour un fantôme. Il a un corps. Il est personnellement présent dans son Eglise, « Tête et Corps » forment un unique sujet dira saint Augustin. « Ne le savez-vous pas? Vos corps sont les membres du Christ », écrit Paul aux Corinthiens (1 Co 6, 15). Et il ajoute: de même que, selon le Livre de la Genèse, l’homme et la femme deviennent une seule chair, ainsi le Christ devient un seul esprit avec les siens, c’est-à-dire un unique sujet dans le monde nouveau de la résurrection (cf. 1 Co 6, 16sq). Dans tout cela transparaît le mystère eucharistique, dans lequel l’Eglise donne sans cesse son Corps et fait de nous son Corps: « Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1 Co 10, 16sq). En ce moment, ce n’est pas seulement Paul, mais le Seigneur lui-même qui s’adresse à nous: Comment avez-vous pu laisser déchirer mon Corps? Devant le visage du Christ, cette parole devient dans le même temps une question urgente: Réunis-nous tous hors de toute division. Fais qu’aujourd’hui cela devienne à nouveau la réalité: Il y a un unique pain, et donc, bien qu’étant nombreux, nous sommes un unique corps. Pour Paul, la parole sur l’Eglise comme Corps du Christ n’est pas une comparaison quelconque. Elle va bien au-delà d’une comparaison: « Pourquoi me persécutes-tu? » Le Christ nous attire sans cesse dans son Corps à partir du centre eucharistique, qui pour Paul est le centre de l’existence chrétienne, en vertu duquel tous, ainsi que chaque individu, peuvent faire de manière personnelle l’expérience suivante: Il m’a aimé et s’est donné lui-même pour moi.
Je voudrais conclure par l’une des dernières paroles de saint Paul, une exhortation à Timothée de la prison, face à la mort: « Prends ta part de souffrance pour l’annonce de l’Evangile », dit l’apôtre à son disciple (2 Tm 1, 8). Cette parole, qui se trouve à la fin des chemins parcourus par l’apôtre, comme un testament renvoie en arrière, au début de sa mission. Alors qu’après sa rencontre avec le Ressuscité, Paul, aveugle, se trouvait dans sa maison de Damas, Ananie reçut le mandat d’aller chez le persécuteur craint et de lui imposer les mains, pour qu’il retrouve la vue. A Ananie, qui objectait que ce Saul était un dangereux persécuteur des chrétiens, il fut répondu: Cet homme doit faire parvenir mon nom auprès des peuples et des rois. « Et moi, je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom » (Ac 9, 15sq). La charge de l’annonce et l’appel à la souffrance pour le Christ vont de pair inséparablement. L’appel à devenir le maître des nations est dans le même temps et intrinsèquement un appel à la souffrance dans la communion avec le Christ, qui nous a rachetés à travers sa Passion. Dans un monde où le mensonge est puissant, la vérité se paye par la souffrance. Celui qui veut éviter la souffrance, la garder loin de lui, garde loin de lui la vie elle-même et sa grandeur; il ne peut pas être un serviteur de la vérité et donc un serviteur de la foi. Il n’y a pas d’amour sans souffrance – sans la souffrance du renoncement à soi-même, de la transformation et de la purification du moi pour la véritable liberté. Là où il n’y a rien qui vaille la peine de souffrir, la vie elle-même perd sa valeur. L’Eucharistie – le centre de notre être chrétiens – se fonde sur le sacrifice de Jésus pour nous, elle est née de la souffrance de l’amour, qui a atteint son sommet dans la Croix. Nous vivons de cet amour qui se donne. Il nous donne le courage et la force de souffrir avec le Christ et pour Lui dans ce monde, en sachant que précisément ainsi notre vie devient grande, mûre et véritable. A la lumière de toutes les lettres de saint Paul, nous voyons que sur son chemin de maître des nations s’est accomplie la prophétie faite à Ananie à l’heure de l’appel: « Et moi je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom ». Sa souffrance le rend crédible comme maître de vérité, qui ne cherche pas son propre profit, sa propre gloire, la satisfaction personnelle, mais qui s’engage pour Celui qui nous a aimés et qui s’est donné lui-même pour nous tous.
En cette heure, nous rendons grâce au Seigneur, car il a appelé Paul, le rendant lumière des nations et notre maître à tous, et nous le prions: Donne-nous aujourd’hui aussi des témoins de la résurrection, touchés par ton amour et capables d’apporter la lumière de l’Evangile dans notre temps. Saint Paul, prie pour nous! Amen.

ANNÉE PAULIENNE : HOMÉLIE SUR LE DISCOURS DE SAINT PAUL À ATHÈNES EN ACTES 17, 16-34 – MERCREDI DE LA 6E SEMAINE DE PÂQUES.

4 février, 2016

http://www.carrefourkairos.net/archives_site_sme_141030/site_internet_sme_wmaker/www.seminairedequebec.org/Annee-paulienne-Homelie-sur-le-discours-de-saint-Paul-a-Athenes-en-Actes-17-16-34-Mercredi-de-la-6e-semaine-de-Paques_a278.html

ANNÉE PAULIENNE : HOMÉLIE SUR LE DISCOURS DE SAINT PAUL À ATHÈNES EN ACTES 17, 16-34 – MERCREDI DE LA 6E SEMAINE DE PÂQUES.

« Ce que vous vénérez, sans le connaître, voilà ce que, moi, je viens vous annoncer. » Homélie prononcée lors de la fête du Supérieur général par Mgr Hermann Giguère P.H. à la chapelle du Pavillon Jean-Olivier-Briand, Séminaire de Québec, le 20 mai 2009. Textes de l’Écriture: Actes17, 15.22-18,1(discours de saint Paul à Athènes au complet : Actes 17, 16-34) et Jn 16, 12-15. Mercredi de la 6e semaine de Pâques. 

Les lectures d’aujourd’hui demanderaient des commentaires assez développés, mais n’ayez crainte, je ne serai pas très long. Il reste qu’en cette année paulienne, le discours de saint Paul devant les Athéniens résonne à nos oreilles de façon interpellante. Le contenu de cette annonce de l’Évangile tranche avec celle de Pierre après la Pentecôte ou encore avec le discours de Paul à Antioche (Actes 13, 16-43) que nous avons lu au cours des dernières semaines. Il s’agit toujours du même Évangile bien sûr que Paul annonce, mais nous pouvons constater ici que Paul se préoccupe non seulement du contenu, mais aussi de la façon de transmettre ce contenu. Voilà pourquoi, ce discours de Paul aux Athéniens est des plus actuels pour nous. 

I- Contexte : le deuxième voyage missionnaire  De l’an 49 à l’an 52, selon les spécialistes de saint Paul, celui-ci est engagé dans son deuxième voyage missionnaire qu’il commence à Antioche dans les difficultés avec Barnabé qu’il laisse pour traverser la Turquie actuelle avec Silas (Actes 15, 36-40). Plus de mille kilomètres. Il retrouve les communautés déjà fondées notamment celle des Galates et rencontre Timothée qui l’accompagnera pour le reste du voyage. Le groupe s’embarque pour la Macédoine, poursuit sa route, évangélisant Thessalonique et Bérée et Paul se retrouve à Athènes, la capitale culturelle de la Grèce. Il y est seul attendant que Timothée et Silas viennent le rejoindre.  Transportons-nous dans cette capitale il y a presque 2000 ans en même temps que Paul. La ville est une des plus belles villes de l’époque, pleine d’animation, de culture comme le sont aujourd’hui Paris ou New-York. Parcourons la ville avec Paul. Admirons-y les magnifiques bâtiments, les riches maisons sculptées en pierre blanche, les théâtres et les fontaines. Avec Paul, au fil de notre promenade, nous découvrons aussi les nombreux temples où l’on adorait une multitude de divinités. Petits temples bien souvent avec colonnades et frontons sculptés et décorés. Chaque temple a son dieu ou sa déesse. 

II- Un discours exemplaire  Lorsqu’il commence à s’adresser aux gens réunis autour de lui à l’Aréopage, Paul se sert de cette visite pour en faire un point d’accrochage : « En effet, en parcourant la ville, et en observant vos monuments sacrés, j’y ai trouvé, en particulier, un autel portant cette inscription : ‘ Au dieu inconnu’ ».  Voilà le départ. Et le discours continue avec un souci remarquable de rejoindre les auditeurs. Cependant, remarquez-le, il y a plus qu’une technique de communication ici.  Autant, jusqu’ici on voyait Paul se faisant « juif avec les juifs », autant on le voit maintenant se faire « grec avec les grecs », autant on l’entendait citer plein de passages de l’Ancien Testament et se référer à l’histoire d’Israël, autant maintenant à Athènes on sent l’adaptation au milieu païen, mais le discours s’achève avec la proclamation de la résurrection de façon non équivoque. « [Dieu] a fixé le jour où il va juger l’univers avec justice, par un homme qu’il a désigné; il en a donné la garantie à tous en ressuscitant cet homme d’entre les morts. »  L’ensemble de l’argumentation va dans le sens d’un effort pour rejoindre ceux à qui Paul s’adresse pour la proclamation de l’Évangile. Ce discours est vraiment remarquable du point de vue de la communication, mais il n’est pas seulement un effort de communicateur, il est aussi la parole d’un évangélisateur. 

III- Application  On parle volontiers dans le Québec d’aujourd’hui de « nouvelle évangélisation ». La Montée des Jeunes qui a eu lieu en fin de semaine dernière avait comme thème : « Missionnaire, ose le style saint Paul. » On trouve dans le discours à Athènes, un bel exemple du « style saint Paul», d’une véritable méthode d’évangélisation.  Paul se trouve à Athènes dans une situation inédite : – il est seul, sans aide ni équipe. Qu’est-ce que Paul fait dans un tel contexte? Premièrement, Paul commence par faire le tour de la ville pour prendre connaissance du milieu dans lequel il se trouve. Deuxièmement, il cherche des ponts par lesquels il peut, avec l’Évangile, rejoindre les Athéniens dans ce qu’ils croient. C’est pourquoi, Paul ne part pas, contrairement à l’accoutumée, des affirmations bibliques pour s’adresser aux Grecs. Il part des éléments connus de leur culture par lesquels il y a une porte d’entrée pour l’Évangile. Et, troisièmement, Paul proclame le kérigme : « Il est ressuscité, oui, cet homme est vraiment ressuscité » comme le chante notre liturgie pascale. L’approche est différente de celle qu’il avait avec les juifs, mais son message ne change pas. Il demeure le même qu’à Antioche : Dieu a ressuscité Jésus pour en faire le Premier-Né d’une multitude de frères et sœurs, même si Paul sent que celui-ci est difficile à entendre pour les Grecs. En effet, on se moque de lui, mais ce n’est pas l’échec total, étant donné que naît à Athènes une petite communauté chrétienne : Denys, Damaris et quelques autres (Actes 17, 32- 34).  Le pape Paul VI écrivait dans l’ Exhortation apostolique « Evangelii nuntiandi » : « Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de Dieu ne sont pas annoncés.» Et Jean-Paul II, faisant écho à ces paroles, écrit dans Novo millennio ineunte : « Nous ne sommes certes pas séduits par la perspective naïve qu’il pourrait exister pour nous, face aux grands défis de notre temps, une formule magique. Non, ce n’est pas une formule qui nous sauvera, mais une Personne, et la certitude qu’elle nous inspire : Je suis avec vous ! » Conclusion  Cette méditation, plus longue que ce que je m’imaginais, nous garde, avec saint Paul, dans le sillage du texte de l’évangile de Jean qui nous invite à rester toujours attentifs à l’Esprit si nous voulons connaître et suivre Jésus. « Il reprend ce qui vient de moi, dit Jésus, pour vous le faire connaître. » (Jn 16,15) Prions, chers amis, pour que nous sachions bien discerner les voies de l’Esprit pour notre Église d’aujourd’hui, pour notre communauté et pour notre cheminement de vie personnel,  Que cette Eucharistie nous donne d’être, de plus en plus, unis au Seigneur ressuscité comme des membres vivants et rayonnants de la beauté, de la bonté et de l’amour de Celui en qui « il nous est donné de vivre, de nous mouvoir, d’exister » (Actes 17, 28).  Amen! 

Mgr Hermann Giguère, P.H.  Supérieur général du Séminaire de Québec  20 mai 2009 

CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DE LA SOLENNITÉ DE SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL, À L’OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI (2008)

28 juin, 2013

 http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/homilies/2008/documents/hf_ben-xvi_hom_20080628_vespri_fr.html

CÉLÉBRATION DES PREMIÈRES VÊPRES DE LA SOLENNITÉ DE SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL, À L’OCCASION DE L’INAUGURATION DE L’ANNÉE PAULINIENNE

HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs
Samedi 28 juin 2008

 Votre Sainteté et chers délégués fraternels,
Messieurs les cardinaux,
Vénérés frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et sœurs,

Nous sommes réunis auprès de la tombe de saint Paul, qui naquit il y a deux mille ans à Tarse de Cilicie, dans l’actuelle Turquie. Qui était ce Paul? Dans le temple de Jérusalem, devant la foule agitée qui voulait le tuer, il se présente lui-même avec ces mots:  « Je suis juif:  né à Tarse, en Cilicie, mais élevé ici dans cette ville [Jérusalem], j’ai reçu, à l’école de Gamaliel, un enseignement strictement conforme à la Loi de nos pères; je défendais la cause de Dieu avec une ardeur jalouse… » (Ac 22, 3). A la fin de son chemin, il dira de lui-même:  « J’ai reçu la charge… [d'enseigner] aux nations païennes la foi et la vérité » (1 Tm 2, 7; cf. 2 Tm 1, 11). Maître des nations, apôtre et annonciateur de Jésus Christ, c’est ainsi qu’il se décrit lui-même en regardant rétrospectivement le parcours de sa vie. Mais avec cela, son regard ne va pas seulement vers le passé. « Maître des nations » – cette parole s’ouvre à l’avenir, vers tous les peuples et toutes les générations. Paul n’est pas pour nous une figure du passé, que nous rappelons avec vénération. Il est également notre maître, pour nous aussi apôtre et annonciateur de Jésus Christ.
Nous sommes donc réunis non pour réfléchir sur une histoire passée, irrévocablement révolue. Paul veut parler avec nous – aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai voulu promulguer cette « Année paulinienne » spéciale:  pour écouter et pour apprendre à présent de lui, qui est notre maître, « la foi et la vérité », dans lesquelles sont enracinées les raisons de l’unité parmi les disciples du Christ. Dans cette perspective, j’ai voulu allumer, pour ce bimillénaire de la naissance de l’Apôtre, une « Flamme paulinienne » spéciale, qui restera allumée pendant toute l’année dans un brasero spécifique placé dans le quadriportique de la Basilique. Pour conférer de la solennité à cet événement, j’ai également inauguré la « Porte paulinienne », à travers laquelle je suis entré dans la Basilique accompagné par le Patriarche de Constantinople, par le cardinal archiprêtre et par les autres autorités religieuses. C’est pour moi un motif de joie profonde que l’ouverture de l’ »Année paulinienne » assume un caractère œcuménique, en raison de la présence de nombreux délégués et représentants d’autres Eglises et communautés ecclésiales, que j’accueille le cœur ouvert. Je salue tout d’abord Sa Sainteté le Patriarche Bartholomaios I et les membres de la délégation qui l’accompagne, ainsi que le groupe nombreux de laïcs qui, de différentes parties du monde, sont venus à Rome pour vivre avec Lui et avec nous tous, ces moments de prière et de réflexion. Je salue les délégués fraternels des Eglises qui ont un lien particulier avec l’Apôtre Paul – Jérusalem, Antioche, Chypre, Grèce – et qui forment le cadre géographique de la vie de l’Apôtre avant son arrivée à Rome. Je salue cordialement les frères des différentes Eglises et communautés ecclésiales d’Orient et d’Occident, en même temps que vous tous qui avez voulu prendre part à cette ouverture solennelle de l’ »Année » consacrée à l’Apôtre des Nations.
Nous sommes donc ici rassemblés pour nous interroger sur le grand Apôtre des Nations. Nous nous demandons non seulement:  qui était Paul? Nous nous demandons surtout:  Qui est Paul? Que me dit-il? En cette heure, au début de l’ »Année paulinienne » que nous inaugurons, je voudrais choisir dans le riche témoignage du Nouveau Testament trois textes, dans lesquels apparaît sa physionomie intérieure, la spécificité de son caractère. Dans la Lettre aux Galates, il nous a offert une profession de foi très personnelle, dans laquelle il ouvre son cœur aux lecteurs de tous les temps et révèle quelle est l’impulsion la plus profonde de sa vie. « Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi » (Ga 2, 20). Tout ce que Paul accomplit part de ce centre. Sa foi est l’expérience d’être aimé par Jésus Christ de manière tout à fait personnelle; elle est la conscience du fait que le Christ a affronté la mort non pour quelque chose d’anonyme, mais par amour pour lui – de Paul – et que, en tant que Ressuscité, il l’aime toujours, c’est-à-dire que le Christ s’est donné pour lui. Sa foi est le fait d’être frappé par l’amour de Jésus Christ, un amour qui le bouleverse jusqu’au plus profond de lui-même et qui le transforme. Sa foi n’est pas une théorie, une opinion sur Dieu et sur le monde. Sa foi est l’impact de l’amour de Dieu sur son cœur. Et ainsi, cette foi est l’amour pour Jésus Christ.
Paul est présenté par de nombreuses personnes comme un homme combatif qui sait manier l’épée de la parole. De fait, sur son parcours d’apôtre les disputes n’ont pas manqué. Il n’a pas recherché une harmonie superficielle. Dans la première de ses Lettres, celle qui s’adresse aux Thessaloniciens, il dit:  « Nous avons cependant trouvé l’assurance qu’il fallait pour vous annoncer, au prix de grandes luttes, l’Evangile de Dieu… Jamais, vous le savez, nous n’avons eu un mot de flatterie » (1 Th 2, 2.5). Il considérait que la vérité était trop grande pour être disposé à la sacrifier en vue d’un succès extérieur. La vérité dont il avait fait l’expérience dans la rencontre avec le Ressuscité méritait pour lui la lutte, la persécution, la souffrance. Mais ce qui le motivait au plus profond, était d’être aimé par Jésus Christ et le désir de transmettre cet amour aux autres. Paul était un homme capable d’aimer, et toute son œuvre et sa souffrance ne s’expliquent qu’à partir de ce centre. Les concepts de base de son annonce se comprennent uniquement à partir de celui-ci. Prenons seulement l’une de ses paroles-clés:  la liberté. L’expérience d’être aimé jusqu’au bout par le Christ lui avait ouvert les yeux sur la vérité et sur la voie de l’existence humaine – cette expérience embrassait tout. Paul était libre comme un homme aimé par Dieu qui, en vertu de Dieu, était en mesure d’aimer avec Lui. Cet amour est à présent la « loi » de sa vie et il en est précisément ainsi de la liberté de sa vie. Il parle et agit, mû par la responsabilité de la liberté de l’amour. Liberté et responsabilité sont liées ici de manière inséparable.  Se  trouvant dans la responsabilité de l’amour, il est libre; étant quelqu’un qui aime, il vit totalement dans la responsabilité de cet amour et ne prend pas la liberté comme prétexte pour l’arbitraire et l’égoïsme. C’est dans le même esprit qu’Augustin a formulé la phrase devenue ensuite célèbre:  Dilige et quod vis fac (Tract. in 1Jo 7, 7-8) – aime et fais ce que tu veux. Celui qui aime le Christ comme Paul l’a aimé peut vraiment faire ce qu’il veut, car son amour est uni à la volonté du Christ et donc à la volonté de Dieu; car sa volonté est ancrée à la vérité et parce que sa volonté n’est plus simplement sa volonté, arbitre du moi autonome, mais qu’elle est intégrée dans la liberté de Dieu et apprend de celle-ci le chemin à parcourir.
Dans  la  recherche  du  caractère intérieur de saint Paul je voudrais, en deuxième lieu, rappeler la parole que le Christ ressuscité lui adressa sur la route de Damas. Le Seigneur lui demande d’abord:  « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? ». A la question:  « Qui es-tu, Seigneur? », est donnée la réponse:  « Je suis Jésus, celui que tu persécutes » (Ac 9, 4). En persécutant l’Eglise, Paul persécute Jésus lui-même:  « Tu me persécutes ». Jésus s’identifie avec l’Eglise en un seul sujet. Dans cette exclamation du Ressuscité, qui transforma la vie de Saul, est au fond désormais contenue toute la doctrine sur l’Eglise comme Corps du Christ. Le Christ ne s’est pas retiré au ciel, en laissant sur la terre une foule de fidèles qui soutiennent « sa cause ». L’Eglise n’est pas une association qui veut promouvoir une certaine cause. Dans celle-ci, il ne s’agit pas d’une cause. Dans celle-ci il s’agit de la personne de Jésus Christ, qui également en tant que Ressuscité est resté « chair ». Il a la « chair et les os » (Lc 24, 39), c’est ce qu’affirme le Ressuscité dans Luc, devant les disciples qui l’avaient pris pour un fantôme. Il a un corps. Il est personnellement présent dans son Eglise, « Tête et Corps » forment un unique sujet dira saint Augustin. « Ne le savez-vous pas? Vos corps sont les membres du Christ », écrit Paul aux Corinthiens (1 Co 6, 15). Et il ajoute:  de même que, selon le Livre de la Genèse, l’homme et la femme deviennent une seule chair, ainsi le Christ devient un seul esprit avec les siens, c’est-à-dire un unique sujet dans le monde nouveau de la résurrection (cf. 1 Co 6, 16sq). Dans tout cela transparaît le mystère eucharistique, dans lequel l’Eglise donne sans cesse son Corps et fait de nous son Corps:  « Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain » (1 Co 10, 16sq). En ce moment, ce n’est pas seulement Paul, mais le Seigneur lui-même qui s’adresse à nous:  Comment avez-vous pu laisser déchirer mon Corps? Devant le visage du Christ, cette parole devient dans le même temps une question urgente:  Réunis-nous tous hors de toute division. Fais qu’aujourd’hui cela devienne à nouveau la réalité:  Il y a un unique pain, et donc, bien qu’étant nombreux, nous sommes un unique corps. Pour Paul, la parole sur l’Eglise comme Corps du Christ n’est pas une comparaison quelconque. Elle va bien au-delà d’une comparaison:  « Pourquoi me persécutes-tu? » Le Christ nous attire sans cesse dans son Corps à partir du centre eucharistique, qui pour Paul est le centre de l’existence chrétienne, en vertu duquel tous, ainsi que chaque individu, peuvent faire de manière personnelle l’expérience suivante:  Il m’a aimé et s’est donné lui-même pour moi.
Je voudrais conclure par l’une des dernières  paroles  de  saint  Paul, une exhortation à Timothée de la prison, face à la mort:  « Prends ta part de souffrance pour l’annonce de l’Evangile », dit l’apôtre à son disciple (2 Tm 1, 8). Cette parole, qui se trouve à la fin des chemins parcourus par l’apôtre, comme un testament renvoie en arrière, au début de sa mission. Alors qu’après sa rencontre avec le Ressuscité, Paul, aveugle, se trouvait dans sa maison de Damas, Ananie reçut le mandat d’aller chez le persécuteur craint et de lui imposer les mains, pour qu’il retrouve la vue. A Ananie, qui objectait que ce Saul était un dangereux persécuteur des chrétiens, il fut répondu:  Cet homme doit faire parvenir mon nom auprès des peuples et des rois. « Et moi, je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom » (Ac 9, 15sq). La charge de l’annonce et l’appel à la souffrance pour le Christ vont de pair inséparablement. L’appel à devenir le maître des nations est dans le même temps et intrinsèquement un appel à la souffrance dans la communion avec le Christ, qui nous a rachetés à travers sa Passion. Dans un monde où le mensonge est puissant, la vérité se paye par la souffrance. Celui qui veut éviter la souffrance, la garder loin de lui, garde loin de lui la vie elle-même et sa grandeur; il ne peut pas être un serviteur de la vérité et donc un serviteur de la foi. Il n’y a pas d’amour sans souffrance – sans la souffrance du renoncement à soi-même, de la transformation et de la purification du moi pour la véritable liberté. Là où il n’y a rien qui vaille la peine de souffrir, la vie elle-même perd sa valeur. L’Eucharistie – le centre de notre être chrétiens – se fonde sur le sacrifice de Jésus pour nous, elle est née de la souffrance de l’amour, qui a atteint son sommet dans la Croix. Nous vivons de cet amour qui se donne. Il nous donne le courage et la force de souffrir avec le Christ et pour Lui dans ce monde, en sachant que précisément ainsi notre vie devient grande, mûre et véritable. A la lumière de toutes les lettres de saint Paul, nous voyons que sur son chemin de maître des nations s’est accomplie la prophétie faite à Ananie à l’heure de l’appel:  « Et moi je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom ». Sa souffrance le rend crédible comme maître de vérité, qui ne cherche pas son propre profit, sa propre gloire, la satisfaction personnelle, mais qui s’engage pour Celui qui nous  a  aimés et qui s’est donné lui-même pour nous tous.
En cette heure, nous rendons grâce au Seigneur, car il a appelé Paul, le rendant lumière des nations et notre maître à tous, et nous le prions:  Donne-nous aujourd’hui aussi des témoins de la résurrection, touchés par ton amour et capables d’apporter la lumière de l’Evangile dans notre temps. Saint Paul, prie pour nous! Amen.

L’Année Saint-Paul, une année de grâce et d’évangélisation

18 février, 2011

du site:

http://www.zenit.org/article-27028?l=french

L’Année Saint-Paul, une année de grâce et d’évangélisation

Bilan des célébrations du deuxième millénaire de la naissance de Paul

ROME, Vendredi 18 février 2011 (ZENIT.org) – « Une année de grâce qui a dépassé nos attentes », a souligné jeudi, lors d’une conférence de presse à la salle de presse du Saint-Siège, le cardinal Andrea Cordero Lanza di Montezemolo, archiprêtre émérite de la Basilique Saint-Paul-Hors-les-Murs en dressant un bilan de l’Année Saint-Paul, célébrée du 28 juin 2008 au 29 juin 2009, à l’occasion des 2.000 ans de la naissance de l’apôtre des gentils.
Le cardinal Montezemolo a qualifié d’« historique » cet événement, expliquant que c’est la première fois dans l’histoire de l’Eglise, que « toute une année a été consacrée à saint Paul », donnant lieu non seulement à de nombreux pèlerinages à la basilique romaine, où est conservée la tombe de l’apôtre, et aux divers lieux marqués par son passage dans toute la Méditerranée, mais à autant de conférences et concerts, ainsi qu’à une abondante publication de livres, œuvres musicales, films, programmes Internet, impliquant des millions de personnes.
« Contre le risque d’oublier », le journaliste responsable de la communication de cette grande année dédiée à saint Paul, Graziano Motta, a écrit « l’Année Saint-Paul », un livre de plus de 500 pages, publié par Librairie éditrice du Vatican et présenté au cours de la conférence de presse. Ce dernier rapporte les événements les plus significatifs qui se sont déroulés à Saint-Paul-Hors-les-Murs et dans les églises locales de tous les continents.
Une partie de l’ouvrage traite en particulier de la signification œcuménique de cette Année Saint-Paul célébrée en même temps par les catholiques, les orthodoxes et les protestants.
« Ce fut l’occasion, a rappelé le cardinal Montezemolo, non pas d’un nouveau climat d’entente mais d’une entente plus forte entre les diverses confessions ».
Une année que Mgr Rino Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, a qualifié de « stratégique », expliquant qu’elle « avait permis de ramener au jour non seulement les riches et multiples formes de pensée de l’apôtre des gentils, ainsi qu’une production théologique et bibliographique probablement jamais atteinte par le passé », mais surtout de « mettre en évidence toute son actualité pour la vie de l’Église dans sa mission évangélisatrice ».
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le pape Benoît XVI a choisi d’annoncer en la basilique Saint-Paul, le 28 juin 2010, à l’occasion des premières vêpres de la solennité des saints Pierre et Paul, son intention d’instituer un Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, dont la naissance sera officialisée au mois d’octobre suivant.
« Nous sommes convaincus, a dit Mgr Fisichella, que cette basilique devra être encore plus, à l’avenir, le signe évident de la volonté de l’Église d’entreprendre un chemin de nouvelle évangélisation » et il n’est pas exclu que le nouveau dicastère organise des initiatives en ce sens pour le mois d’octobre prochain.
En réponse à des questions de journalistes sur les activités du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, Mgr Fisichella a fait savoir que « les rencontres avec les conférences épiscopales de divers pays européens et non européens, se poursuivent, tandis que sont déjà prévues, pour mars prochain, une ou deux journées d’étude sur la nouvelle évangélisation avec des spécialistes, et en mai une rencontre pour la définition d’une nouvelle forme d’évangélisation ».
Naturellement, a-t-il précisé, toute l’activité du dicastère est « dans l’attente de tout ce qui sera proposé durant le synode sur la nouvelle évangélisation prévu pour 2012 et par l’Exhortation post-synodale qui suivra ».
Afin que tout ce que l’Année Saint-Paul a permis de découvrir concernant la pensée de l’apôtre des gentils, ne se perde pas, et pour que la vitalité de la basilique fondée en son honneur demeure, le cardinal Francesco Monterisi, archiprêtre de la basilique, a annoncé la publication d’un livre sur la basilique qui sera présenté à la presse le 10 mars prochain.
Le père Edmund Power, abbé du monastère bénédictin attaché à la basilique, a annoncé la volonté de créer un centre de spiritualité et un centre œcuménique d’études pauliniens sur le territoire même de la basilique

par Sandro Magister : Année Paulinienne: Le rêve œcuménique de Benoît XVI

2 juillet, 2008

du site:

http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/205564?fr=y

Année Paulinienne: Le rêve œcuménique de Benoît XVI

Avec le patriarche de Constantinople, le successeur de Pierre a lancé une année jubilaire spéciale consacrée à l’autre grand apôtre, Paul. Son objectif declaré: « créer l’unité de la ‘catholica’, l’Eglise formée de juifs et de païens, l’Eglise de tous les peuples »

par Sandro Magister

ROMA, le 2 juillet 2008 Sur la photo, Benoît XVI et Bartholomée Ier, le patriarche de Constantinople, prient devant la tombe de lapôtre Paul, sous le maître-autel de la basilique romaine de Saint-Paul-hors-les-Murs. Cest la veille de la solennité de saint Pierre et saint Paul. Benoît XVI et Bartholomée Ier ont également inauguré ensemble une année jubilaire spécialement consacrée à lapôtre Paul.

LAnnée Paulinienne a débuté le 28 juin et elle sachèvera le 29 juin 2009. Elle a lieu à loccasion du bimillénaire de la naissance de lapôtre, que les historiens situent entre 7 et 10 après J.-C.

Benoît XVI a annoncé cette année jubilaire spéciale pour la première fois il y a un an, le 28 juin 2007. Voici comment il a expliqué l’évènement aux fidèles réunis place Saint-Pierre, avant lAngélus de la fête de saint Pierre et saint Paul de cette année:

« Ce jubilé spécial aura Rome pour centre de gravité, en particulier la basilique de Saint-Paul-hors-les-Murs et le quartier des Trois Fontaines, lieu du martyre. Mais il impliquera lEglise toute entière, à partir de Tarse, la ville où Paul est né, et les autres lieux pauliniens qui constituent des buts de pèlerinage, en Turquie mais aussi en Terre Sainte et à l’île de Malte où lApôtre a débarqué suite à un naufrage et où il a semé la graine féconde de lEvangile.

« En réalité, loptique de lAnnée Paulinienne ne peut être quuniverselle, car saint Paul a été par excellence lapôtre de ceux qui étaient le plus ‘éloignés par rapport aux juifs et qui grâce au sang du Christ sont devenus les proches (cf. Eph 2,13). Cest pourquoi aujourdhui encore, dans un monde devenu plus petit, mais où beaucoup de gens nont pas encore rencontré le Seigneur Jésus, le jubilé de saint Paul invite tous les chrétiens à être des missionnaires de lEvangile.

« A cette dimension missionnaire, il faut toujours associer celle de lunité, représentée par saint Pierre, le rocher sur lequel Jésus-Christ a bâti son Eglise. Comme le souligne la liturgie, les charismes des deux grands apôtres sont complémentaires pour la constitution de lunique Peuple de Dieu, et les chrétiens ne peuvent pas réellement témoigner du Christ sils ne sont pas unis ».

* * *

Universel et œcuménique. Pour une Eglise qui est « catholica » et « una ». Voilà la double optique que l’évêque de Rome et le patriarche de Constantinople ont voulu donner à lAnnée Paulinienne, lancée conjointement par lEglise de Rome et lEglise dOrient. Au cours de la messe célébrée le jour de saint Pierre et saint Paul, les deux successeurs des apôtres sont entrés ensemble dans la basilique Saint-Pierre. Ensemble, ils sont montés à lautel, précédés par un diacre latin et un diacre orthodoxe qui portaient lEvangile. Ensemble, ils ont écouté lEvangile chanté en latin et en grec. Ensemble, ils ont prononcé lhomélie – le patriarche le premier, puis le pape. Ensemble ils ont récité le Credo, le Symbole de Nicée-Constantinople dans la version dorigine en grec, comme le veut la liturgie des Eglises byzantines. Ils se sont donné le baiser de paix et à la fin ils ont béni ensemble les fidèles. Après près de mille ans de schisme entre Orient et Occident, une liturgie placée aussi visiblement sous le signe de lunité a été célébrée par l’évêque de Rome et le patriarche de Constantinople.

Pour le moment, les rapports avec les communautés protestantes restent davantage dans lombre. Mais lAnnée Paulinienne peut être aussi riche de sens dans le dialogue avec les protestants. Les grands penseurs de la Réforme de Luther et Calvin à Karl Barth, Rudolph Bultmann et Paul Tillich ont élaboré leur pensée principalement à partir de la Lettre de saint Paul aux Romains.

La contribution que lAnnée Paulinienne pourra apporter au dialogue avec les juifs nest pas moins significative. Paul était juif, c’était un rabbin de stricte observance. Puis il est tombé, ébloui par le Christ, sur la route de Damas. Pour lui, sa conversion au Ressuscité na jamais constitué une rupture avec sa foi dorigine et la promesse de Dieu à Abraham ainsi que lAlliance du Sinaï nont toujours fait quun avec lalliance « nouvelle et éternelle » scellée par le sang de Jésus. Dans son livre « Jésus de Nazareth », Joseph Ratzinger a écrit des pages remarquables sur cette unité entre lAncien et le Nouveau Testament.

On trouvera ci-dessous lhomélie prononcée par Benoît XVI le 28 juin 2008 à la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, la veille de la fête de saint Pierre et saint Paul, pendant les vêpres. Le pape y répond aux questions suivantes: qui était Paul? Que me dit-il aujourdhui?

Plus bas, on trouvera les liens vers la double homélie du pape et du patriarche de Constantinople, prononcée lors de la messe de la fête de saint Pierre et saint Paul, vers dautres textes de Benoît XVI sur lapôtre Paul et vers dautres informations relatives à lAnnée Paulinienne.

« Qui était Paul? Et que me dit-il aujourdhui? »

par Benoît XVI

Chers frères et sœurs, nous voici réunis près de la tombe de saint Paul, né il y a deux mille ans à Tarse, en Cilicie, dans ce qui est aujourdhui la Turquie.

Qui était ce Paul? Au temple de Jérusalem, face à la foule agitée qui veut le tuer, il se présente en ces mots: « Je suis Juif. Né à Tarse en Cilicie, jai cependant été élevé ici dans cette ville [de Jérusalem] » et cest aux pieds de Gamaliel que jai été formé à lexacte observance de la loi de nos pères et j’étais rempli du zèle de Dieu… » (Ac 22,3).

A la fin de son cheminement, il dira de lui-même: « Jai été établi… docteur des païens, dans la foi et la vérité » (1 Tm 2,7; cf. 2 Tm 1,11). Docteur des païens, apôtre et héraut de Jésus-Christ, cest ainsi quil se définit en revoyant le cours de sa vie passée.

Pour autant, son regard ne se tourne pas que vers le passé. Docteur des païens: cette expression souvre vers lavenir, vers tous les peuples et toutes les générations. Pour nous, Paul nest pas une figure du passé, que nous célébrons avec vénération. Cest aussi notre maître, lapôtre et le héraut de Jésus-Christ.

Nous ne sommes donc pas réunis pour méditer une histoire passée, définitivement dépassée. Cest aujourdhui que Paul veut nous parler. Voilà pourquoi jai voulu lancer cette Année Paulinienne. Pour que nous l’écoutions et quil nous enseigne, aujourdhui, en tant que maître, la « foi et la vérité« , où senracinent les raisons de lunité des disciples du Christ.

Dans cette perspective, à loccasion des deux mille ans de la naissance de lApôtre, jai voulu allumer une Flamme Paulinienne spéciale, qui restera allumée pendant une année entière dans un brasier spécial placé sous le portique à quatre arcades de la basilique [de Saint-Paul-hors-les-Murs].

Pour donner de la solennité à cet anniversaire, jai également inauguré la Porte Paulinienne par laquelle je suis entré dans la basilique, accompagné par le patriarche de Constantinople [...] et par dautres autorités religieuses. Je me réjouis profondément du caractère particulièrement œcuménique du lancement de lAnnée Paulienne, dû à la présence de nombreux délégués et représentants dautres Eglises et communautés ecclésiales, que jaccueille à cœur ouvert. [...]

* * *

Nous sommes donc réunis ici pour méditer sur le grand Apôtre des peuples. Pour savoir qui il était, mais surtout qui il est et ce quil nous dit.

Aujourdhui, alors que nous inaugurons lAnnée Paulinienne, je voudrais choisir dans le riche témoignage du Nouveau Testament trois textes, qui révèlent sa physionomie intérieure et la spécificité de son caractère.

Dans la Lettre aux Galates, il nous a livré une profession de foi très personnelle, où il ouvre son cœur aux lecteurs de tous les temps et révèle le moteur le plus intime de sa vie. « Je vis dans la foi au Fils de Dieu, qui ma aimé et sest livré pour moi » (Gal 2,20).

Toute laction de Paul part de là. Sa foi est lexpérience d’être aimé de Jésus-Christ de manière tout à fait personnelle. Cest la conscience du fait que le Christ a affronté la mort non pas pour quelque chose danonyme mais par amour pour lui, Paul, et que, en tant que Ressuscité, Il laime toujours et sest donc donné pour lui. La foi de Paul, cest d’être frappé par lamour de Jésus-Christ, un amour qui le bouleverse jusquau fond de lui-même et le transforme. Sa foi nest pas une théorie, une opinion sur Dieu et sur le monde. Cest limpact de lamour de Dieu sur son cœur. Ainsi, cette même foi est lamour pour Jésus-Christ.

Paul est souvent présenté comme un homme combatif qui manie les mots comme des épées. De fait, il a bataillé ferme pendant sa vie dapôtre. Il na pas cherché une harmonie superficielle. Dans sa première lettre, adressée aux Thessaloniciens, il dit lui-même: « Nous avons prêché en toute confiance devant vous lEvangile de Dieu, au milieu dune lutte pénible… Jamais non plus, vous le savez, nous navons eu un mot de flatterie » (1 Th 2, 2.5).

Il avait une trop haute opinion de la vérité pour accepter de la sacrifier en vue dune victoire superficielle. Paul estimait que la vérité quil avait connue en rencontrant le Ressuscité valait bien le combat, la persécution et la souffrance. Ce qui le motivait le plus profondément, néanmoins, c’était lamour de Jésus-Christ et le désir de transmettre cet amour à dautres personnes. Paul a été marqué par un grand amour, qui explique à lui seul toute son action et sa souffrance. Les concepts fondateurs de son annonce ne peuvent être compris que dans cette optique.

Concentrons-nous sur un de ses mots-clés: la liberté. Ayant éprouvé que le Christ laimait totalement, il avait ouvert les yeux sur la vérité et sur le chemin de lexistence humaine; cette expérience englobait tout. Paul était libre en tant quhomme aimé de Dieu, capable, en vertu de Dieu, daimer avec Lui. Cet amour est désormais la « loi » de sa vie et, justement pour cette raison, cest la liberté de sa vie. Cest la responsabilité de lamour qui le fait parler et agir. Liberté et responsabilité sont ici indissociables. Paul est libre précisément parce quil est dans la responsabilité de lamour; il vit totalement dans la responsabilité de cet amour et ne prend pas la liberté comme prétexte à labus et à l’égoïsme précisément parce quil aime. Cest dans le même esprit quAugustin a formulé la phrase devenue célèbre par la suite: « Dilige et quod vis fac » (Tract. in 1 Jo 7 ,7-8), aime et fais ce que tu veux. Celui qui aime le Christ comme Paul la aimé peut vraiment faire ce quil veut, car son amour est uni à la volonté du Christ et donc à la volonté de Dieu; parce que sa volonté est enracinée dans la vérité et parce que sa volonté nest plus simplement sa volonté propre, arbitre du je autonome, mais quelle est intégrée à la liberté de Dieu, qui lui montre le chemin à suivre.

* * *

Dans cette recherche de la physionomie intérieure de saint Paul, je voudrais rappeler maintenant ce que le Christ ressuscité lui a dit sur la route de Damas. Le Seigneur lui demande dabord: « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? » Paul demandant: « Qui es-tu, ô Seigneur? », le Christ répond « Je suis Jésus que tu persécutes » (Ac 9, 4s). En persécutant lEglise, Paul persécute Jésus lui-même. « Tu me persécutes ». Jésus sidentifie à lEglise comme un sujet unique.

Dans cette exclamation du Ressuscité, qui a transformé la vie de Saul, se concentre finalement toute la doctrine sur lEglise comme Corps du Christ. Le Christ ne sest pas retiré dans le ciel, en laissant sur terre une foule de disciples qui font progresser « sa cause ». LEglise nest pas une association qui cherche à promouvoir une certaine cause. Ce nest pas dune cause quil sagit, mais de la personne de Jésus-Christ qui même ressuscité est resté « chair ».. Il est fait « de chair et dos » (Lc 24, 39), comme le Ressuscité laffirme aux disciples qui lavaient pris pour un fantôme. Il a un corps. Il est présent en personne dans son Eglise, « Chef et Corps » forment un unique sujet, dira Augustin. « Ne savez-vous pas que vos corps sont des membres du Christ? », écrit Paul aux Corinthiens (1 Cor 6,15). Et dajouter: comme, selon le livre de la Genèse, lhomme et la femme deviennent une seule chair, de même le Christ devient un seul esprit avec les siens, cest-à-dire un unique sujet dans le monde nouveau de la résurrection (cf. 1 Cor 6,16 ss).

Dans tout cela transparaît le mystère eucharistique, où le Christ donne continuellement son Corps et fait de nous son Corps: « Le pain que nous rompons nest-il pas communion au corps du Christ? Puisquil ny a quun pain, à nous tous, nous ne formons quun corps, bien que nous soyons nombreux, car tous nous avons part à ce pain unique » (1 Cor 10,16s). Nous recevons ces mots aujourdhui, non seulement de Paul mais du Seigneur lui-même: Comment avez-vous pu lacérer mon Corps? Devant le visage du Seigneur, ces mots deviennent en même temps une demande urgente: Fais-nous sortir de toutes ces divisions. Fais quaujourdhui devienne à nouveau réalité. Il ny a quun seul pain, nous ne formons donc quun seul corps, même si nous sommes nombreux. Pour Paul, le passage sur lEglise comme Corps du Christ nest pas une comparaison quelconque. Cela va bien au-delà. « Pourquoi me persécutes-tu? » Le Christ nous attire continuellement dans son Corps, il construit son Corps à partir du centre eucharistique, qui est pour Paul le centre de lexistence chrétienne, en vertu duquel tous, comme aussi chacun de nous, peuvent lexpérimenter de manière tout à fait personnelle: Il ma aimé et il sest donné pour moi.

* * *

Je voudrais conclure par lune des dernières phrases de saint Paul. Il est en prison, il va mourir et il exhorte Timothée. « Souffre avec moi pour lEvangile », dit lapôtre à son disciple (2 Tm 1,8).

Cette phrase, qui est comme un testament à la fin du parcours de lapôtre, nous renvoie au début de sa mission. Alors que, après sa rencontre avec le Ressuscité, Paul se trouvait, aveugle, chez lui à Damas, Ananie fut chargé daller trouver le persécuteur redouté et de lui imposer les mains pour lui rendre la vue. Ayant objecté que ce Saul était un dangereux persécuteur des chrétiens, Ananie reçut cette réponse: Cet homme doit porter mon nom devant les peuples et les rois; « moi-même je lui montrerai tout ce quil lui faudra souffrir pour mon nom » (Ac 9,15 s). La charge dannoncer le Christ et lappel à souffrir pour lui sont indissociablement liés. Lappel à instruire les peuples est à la fois et intrinsèquement un appel à souffrir en communion avec le Christ qui nous a rachetés par sa Passion.

Dans un monde où le mensonge est puissant, la vérité se paie par la souffrance. Celui qui veut éviter la souffrance, l’éloigner de soi, éloigne la vie elle-même et sa grandeur; il ne peut pas être un serviteur de la vérité et donc un serviteur de la foi. Il ny a pas damour sans souffrance, sans la souffrance de renoncer à soi-même, de transformer et purifier le moi pour obtenir la vraie liberté. Là où il ny a rien qui mérite que lon souffre, la vie elle-même perd sa valeur. LEucharistie centre de notre christianisme est fondée sur le sacrifice de Jésus pour nous, elle est née de la souffrance de lamour, qui a trouvé son sommet dans la Croix. Nous vivons de cet amour qui se donne. Il nous donne le courage et la force de souffrir avec le Christ et pour Lui dans ce monde, en sachant que cest bien ainsi que notre vie devient grande, mûre et vraie.

A la lumière de toutes les lettres de saint Paul, nous voyons comment sest accomplie, au cours de son cheminement de docteur des païens, la prophétie faite à Ananie au moment de lappel: « Je lui montrerai tout ce quil lui faudra souffrir pour mon nom ». Sa souffrance le rend crédible en tant que maître de vérité, qui ne cherche pas son intérêt, sa gloire, sa satisfaction personnelle, mais sengage pour Celui qui nous a aimés et sest donné pour nous tous.

Maintenant remercions le Seigneur qui a appelé Paul et en a fait une lumière pour les païens, un maître pour nous tous, et prions-le: Aujourdhui aussi, donne-nous des témoins de ta résurrection, touchés par ton amour et capables de porter à notre temps la lumière de lEvangile. Saint Paul, priez pour nous! Amen.

ANGELUS DU DIMANCHE 29 JUIN (pour l’année paulinienne)

1 juillet, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18335?l=french

ANGELUS DU DIMANCHE 29 JUIN

Texte intégral

Rome, Lundi 30 juin 2008 (ZENIT.org). – Nous publions ci-dessous le texte de la méditation que le pape Benoît XVI a prononcée avant la prière de l’Angélus du dimanche 29 juin, solennité des saints Pierre et Paul, en présence de milliers de pèlerins rassemblés place Saint-Pierre.

AVANT L’ANGELUS

Chers frères et sœurs,
Cette ann
ée, la fête des saints Apôtres Pierre et Paul est célébrée un dimanche, si bien que toute l’Eglise, et non seulement l’Eglise de Rome, la célèbre de manière solennelle. Cette coïncidence permet également de donner davantage de relief à un événement extraordinaire: l’Année paulinienne, que j’ai inaugurée officiellement hier soir, auprès de la tombe de l’Apôtre des Nations, et qui durera jusqu’au 29 juin 2009. Les historiens datent en effet la naissance de Saul, devenu par la suite Paul, entre l’an 7 et 10 après Jésus Christ. C’est pourquoi, après qu’environ deux mille ans se sont écoulés, j’ai souhaité ce jubilé spécial qui aura naturellement Rome comme barycentre, notamment la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs et le lieu du martyre, aux Trois Fontaines. Mais il impliquera l’Eglise tout entière, à partir de Tarse, la ville natale de Paul, et des autres lieux pauliniens destinations de pèlerinages dans la Turquie actuelle, comme en Terre Sainte, et dans l’Ile de Malte, où l’Apôtre débarqua après un naufrage et jeta la semence féconde de l’Evangile. En réalité, l’horizon de l’Année paulinienne ne peut qu’être universel, car saint Paul a été par excellence l’apôtre de ceux qui, par rapport aux juifs, «étaient loin» et qui «grâce au sang du Christ» sont «devenus proches» (cf. Ep 2, 13). C’est pourquoi encore aujourd’hui, dans un monde devenu plus «petit», mais où très nombreux sont encore ceux qui n’ont pas rencontré le Seigneur Jésus, le Jubilé de saint Paul invite tous les chrétiens à ê
tre des missionnaires de l’Evangile.
Cette dimension missionnaire a besoin de s’accompagner toujours de celle de l’unit
é, représentée par saint Pierre, le «roc» sur lequel Jésus Christ a édifié son Eglise. Comme le souligne la liturgie, les charismes des deux grands apôtres sont complémentaires pour l’édification de l’unique peuple de Dieu et les chrétiens ne peuvent pas rendre un témoignage valable au Christ s’ils ne sont pas unis entre eux. Le thème de l’unité est aujourd’hui souligné par le rite traditionnel du pallium, qu’au cours de la Messe j’ai remis aux Archevêques métropolitains nommés au cours de l’année écoulée. Ils sont au nombre de 41, et deux autres le recevront dans leur sièges. A eux aussi j’adresse mon salut cordial. En outre, c’est avec une joie particulière qu’en la solennité de ce jour, l’Evêque de Rome accueille le Patriarche œcuménique de Constantinople, en la bien-aimée personne de Sa Sainteté Bartholomaios Ier, auquel je renouvelle mes salutations fraternelles en les étendant à toute la délé
gation de l’Eglise orthodoxe qu’il conduit.
Ann
ée paulinienne, évangélisation, communion dans l’Eglise et pleine unité de tous les chrétiens: prions à présent pour ces grandes intentions en les confiant à l’intercession céleste de la Très Sainte Vierge Marie, Mère de l’Eglise et Reine des Apôtres.

APRES L’ANGELUS

Le Pape Benoît XVI a ensuite salué les pèlerins présents sur la Place Saint-Pierre. Voici ce qu’il a dit en français :

Chers pèlerins francophones, en cette fête des saints Apôtres Pierre et Paul, vous avez voulu entourer le Pape et les Archevêques qui ont reçu le pallium. C’est une occasion pour affermir la communion dans l’Eglise et pour fortifier votre engagement chrétien. Que le Seigneur soutienne votre foi pour que, à l’exemple des saints que nous célébrons aujourd’hui, vous deveniez de vrais apôtres de la Parole de Dieu. Au début de l’année jubilaire consacrée à saint Paul, que l’enseignement de l’Apôtre des Nations vous indique le chemin à suivre. Avec ma Bénédiction apostolique.

Après avoir salué les pèlerins en différentes langues, le Saint-Père a conclu en italien:

J’adresse un salut spécial à la ville de Rome et à tous ceux qui y habitent: que les saints Patrons Pierre et Paul obtiennent à toute la communauté de la ville et à la communauté diocésaine de protéger et de mettre en valeur la richesse de ses trésors de foi, d’histoire et d’art. Bonne fête à tous!

VEPRES LORS DE L’INAUGURATION DE L’ANNEE PAULINIENNE

1 juillet, 2008

du site: 

http://www.zenit.org/article-18336?l=french

VEPRES LORS DE L’INAUGURATION DE L’ANNEE PAULINIENNE

ROME, Lundi 30 juin 2008 (ZENIT.org).- Nous publions ci-dessous le texte de l’homélie prononcée par le Pape Benoît XVI, lors des vèpres d’inauguration de l’Année Saint-Paul, samedi 28 juin, en la Basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, à Rome.

Votre Sainteté et chers délégués fraternels,
Messieurs les cardinaux,
V
énérés frères dans l’é
piscopat et dans le sacerdoce,
Chers fr
ères et sœ
urs, Nous sommes r

éunis auprès de la tombe de saint Paul, qui naquit il y a deux mille ans à Tarse de Cilicie, dans l’actuelle Turquie. Qui était ce Paul? Dans le temple de Jérusalem, devant la foule agitée qui voulait le tuer, il se présente lui-même avec ces mots: «Je suis juif: né à Tarse, en Cilicie, mais élevé ici dans cette ville [Jérusalem], j’ai reçu, à l’école de Gamaliel, un enseignement strictement conforme à la Loi de nos pères; je défendais la cause de Dieu avec une ardeur jalouse…» (Ac 22, 3). A la fin de son chemin, il dira de lui-même: «J’ai reçu la charge… [d'enseigner] aux nations païennes la foi et la vérité» (1 Tm 2, 7; cf. 2 Tm 1, 11). Maître des nations, apôtre et annonciateur de Jésus Christ, c’est ainsi qu’il se décrit lui-même en regardant rétrospectivement le parcours de sa vie. Mais avec cela, son regard ne va pas seulement vers le passé. «Maître des nations» – cette parole s’ouvre à l’avenir, vers tous les peuples et toutes les générations. Paul n’est pas pour nous une figure du passé, que nous rappelons avec vénération. Il est également notre maître, pour nous aussi apôtre et annonciateur de Jésus Christ.

Nous sommes donc réunis non pour réfléchir sur une histoire passée, irrévocablement révolue. Paul veut parler avec nous – aujourd’hui. C’est pourquoi j’ai voulu promulguer cette «Année paulinienne» spéciale: pour écouter et pour apprendre à présent de lui, qui est notre maître, «la foi et la vérité», dans lesquelles sont enracinées les raisons de l’unité parmi les disciples du Christ. Dans cette perspective, j’ai voulu allumer, pour ce bimillénaire de la naissance de l’Apôtre, une «Flamme paulinienne» spéciale, qui restera allumée pendant toute l’année dans un brasero spécial placé dans le quadriportique de la Basilique. Pour conférer de la solennité à cet événement, j’ai également inauguré la «Porte paulinienne», à travers laquelle je suis entré dans la Basilique accompagné par le Patriarche de Constantinople, par le cardinal archiprêtre et par les autres autorités religieuses. C’est pour moi un motif de joie profonde que l’ouverture de l’«Année paulinienne» assume un caractère œcuménique, en raison de la présence de nombreux délégués et représentants d’autres Eglises et communautés ecclésiales, que j’accueille le cœur ouvert. Je salue tout d’abord Sa Sainteté le Patriarche Bartholomaios Ier et les membres de la délégation qui l’accompagne, ainsi que le groupe nombreux de laïcs qui, de différentes parties du monde, sont venus à Rome pour vivre avec Lui et avec nous tous, ces moments de prière et de réflexion. Je salue les délégués fraternels des Eglises qui ont un lien particulier avec l’Apôtre Paul – Jérusalem, Antioche, Chypre, Grèce – et qui forment le cadre géographique de la vie de l’Apôtre avant son arrivée à Rome. Je salue cordialement les frères des différentes Eglises et communautés ecclésiales d’Orient et d’Occident, en même temps que vous tous qui avez voulu prendre part à cette ouverture solennelle de l’«Année» consacrée à l’Apôtre des Nations. Nous sommes donc ici rassembl

és pour nous interroger sur le grand Apôtre des nations. Nous nous demandons non seulement: qui était Paul? Nous nous demandons surtout: Qui est Paul? Que me dit-il? En cette heure, au début de l’«Année paulinienne» que nous inaugurons, je voudrais choisir dans le riche témoignage du Nouveau Testament trois textes, dans lesquels apparaît sa physionomie intérieure, la spécificité de son caractère. Dans la Lettre aux Galates, il nous a offert une profession de foi très personnelle, dans laquelle il ouvre son cœur aux lecteurs de tous les temps et révèle quelle est l’impulsion la plus profonde de sa vie. «Je vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré pour moi» (Ga 2, 20). Tout ce que Paul accomplit part de ce centre. Sa foi est l’expérience d’être aimé par Jésus Christ de manière tout à fait personnelle; elle est la conscience du fait que le Christ a affronté la mort non pour quelque chose d’anonyme, mais par amour pour lui – de Paul – et que, en tant que Ressuscité, il l’aime toujours, c’est-à-dire que le Christ s’est donné pour lui. Sa foi est le fait d’être frappé par l’amour de Jésus Christ, un amour qui le bouleverse jusqu’au plus profond de lui-même et qui le transforme. Sa foi n’est pas une théorie, une opinion sur Dieu et sur le monde. Sa foi est l’impact de l’amour de Dieu sur son cœur. Et ainsi, cette foi est l’amour pour Jésus Christ.

Paul est présenté par de nombreuses personnes comme un homme combatif qui sait manier l’épée de la parole. De fait, sur son parcours d’apôtre les disputes n’ont pas manqué. Il n’a pas recherché une harmonie superficielle. Dans la première de ses Lettres, celle qui s’adresse aux Thessaloniciens, il dit: «Nous avons cependant trouvé l’assurance qu’il fallait pour vous annoncer, au prix de grandes luttes, l’Evangile de Dieu… Jamais, vous le savez, nous n’avons eu un mot de flatterie» (1 Th 2, 2.5). Il considérait que la vérité était trop grande pour être disposé à la sacrifier en vue d’un succès extérieur. La vérité dont il avait fait l’expérience dans la rencontre avec le Ressuscité méritait pour lui la lutte, la persécution, la souffrance. Mais ce qui le motivait au plus profond, était d’être aimé par Jésus Christ et le désir de transmettre cet amour aux autres. Paul était un homme capable d’aimer, et toute son œuvre et sa souffrance ne s’expliquent qu’à partir de ce centre. Les concepts de base de son annonce se comprennent uniquement à partir de celui-ci. Prenons seulement l’une de ses paroles-clés: la liberté. L’expérience d’être aimé jusqu’au bout par le Christ lui avait ouvert les yeux sur la vérité et sur la voie de l’existence humaine – cette expérience embrassait tout. Paul était libre comme un homme aimé par Dieu qui, en vertu de Dieu, était en mesure d’aimer avec Lui. Cet amour est à présent la «loi» de sa vie et il en ait précisément ainsi de la liberté de sa vie. Il parle et agit, mû par la responsabilité de la liberté de l’amour. Liberté et responsabilité sont liées ici de manière inséparable. Se trouvant dans la responsabilité de l’amour, il est libre; étant quelqu’un qui aime, il vit totalement dans la responsabilité de cet amour et ne prend pas la liberté comme prétexte pour l’arbitraire et l’égoïsme. C’est dans le même esprit qu’Augustin a formulé la phrase devenue ensuite célèbre: Dilige et quod vis fac (Tract. in 1Jo 7, 7-8) – aime et fais ce que tu veux. Celui qui aime le Christ comme Paul l’a aimé peut vraiment faire ce qu’il veut, car son amour est uni à la volonté du Christ et donc à la volonté de Dieu; car sa volonté est ancrée à la vérité et parce que sa volonté n’est plus simplement sa volonté, arbitre du moi autonome, mais qu’elle est intégrée dans la liberté de Dieu et apprend de celle-ci le chemin à parcourir. Dans la recherche du caract

ère intérieur de saint Paul je voudrais, en deuxième lieu, rappeler la parole que le Christ ressuscité lui adressa sur la route de Damas. Le Seigneur lui demande d’abord: «Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu?». A la question: «Qui es-tu, Seigneur?», est donnée la réponse: «Je suis Jésus, celui que tu persécutes (Ac 9, 4). En persécutant l’Eglise, Paul persécute Jésus lui-même: «Tu me persécutes». Jésus s’identifie avec l’Eglise en un seul sujet. Dans cette exclamation du Ressuscité, qui transforma la vie de Saul, est au fond désormais contenue toute la doctrine sur l’Eglise comme Corps du Christ. Le Christ ne s’est pas retiré au ciel, en laissant sur la terre une foule de fidèles qui soutiennent «sa cause». L’Eglise n’est pas une association qui veut promouvoir une certaine cause. Dans celle-ci, il ne s’agit pas d’une cause. Dans celle-ci il s’agit de la personne de Jésus Christ, qui également en tant que Ressuscité est resté «chair». Il a la «chair et les os» (Lc 24, 39), c’est ce qu’affirme le Ressuscité dans Luc, devant les disciples qui l’avaient pris pour un fantôme. Il a un corps. Il est personnellement présent dans son Eglise, «Tête et Corps» forment un unique sujet dira saint Augustin. «Ne le savez-vous pas? Vos corps sont les membres du Christ», écrit Paul aux Corinthiens (1 Co 6, 15). Et il ajoute: de même que, selon le Livre de la Genèse, l’homme et la femme deviennent une seule chair, ainsi le Christ devient un seul esprit avec les siens, c’est-à-dire un unique sujet dans le monde nouveau de la résurrection (cf. 1 Co 6, 16sq). Dans tout cela transparaît le mystère eucharistique, dans lequel l’Eglise donne sans cesse son Corps et fait de nous son Corps: «Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain» (1 Co 10, 16sq). En ce moment, ce n’est pas seulement Paul, mais le Seigneur lui-même qui s’adresse à nous: Comment avez-vous pu laisser déchirer mon Corps? Devant le visage du Christ, cette parole devient dans le même temps une question urgente: Réunis-nous tous hors de toute division. Fais qu’aujourd’hui cela devienne à nouveau la réalité : Il y a un unique pain, et donc, bien qu’étant nombreux, nous sommes un unique corps. Pour Paul, la parole sur l’Eglise comme Corps du Christ n’est pas une comparaison quelconque. Elle va bien au-delà d’une comparaison: «Pourquoi me persécutes-tu?» Le Christ nous attire sans cesse dans son Corps à partir du centre eucharistique, qui pour Paul est le centre de l’existence chrétienne, en vertu duquel tous, ainsi que chaque individu, peuvent faire de manière personnelle l’expérience suivante: Il m’a aimé et s’est donné lui-même pour moi.

Je voudrais conclure par l’une des dernières paroles de saint Paul, une exhortation à Timothée de la prison, face à la mort: «Prends ta part de souffrance pour l’annonce de l’Evangile», dit l’apôtre à son disciple (2 Tm 1, 8). Cette parole, qui se trouve à la fin des chemins parcourus par l’apôtre, comme un testament renvoie en arrière, au début de sa mission. Alors qu’après sa rencontre avec le Ressuscité, Paul, aveugle, se trouvait dans sa maison de Damas, Ananie reçut le mandat d’aller chez le persécuteur craint et de lui imposer les mains, pour qu’il retrouve la vue. A Ananie, qui objectait que ce Saul était un dangereux persécuteur des chrétiens, il fut répondu: Cet homme doit faire parvenir mon nom auprès des peuples et des rois. «Et moi, je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom» (Ac 9, 15sq). La charge de l’annonce et l’appel à la souffrance pour le Christ vont de pair inséparablement. L’appel à devenir le maître des nations est dans le même temps et intrinsèquement un appel à la souffrance dans la communion avec le Christ, qui nous a rachetés à travers sa Passion. Dans un monde où le mensonge est puissant, la vérité se paye par la souffrance. Celui qui veut éviter la souffrance, la garder loin de lui, garde loin de lui la vie elle-même et sa grandeur; il ne peut pas être un serviteur de la vérité et donc un serviteur de la foi. Il n’y a pas d’amour sans souffrance – sans la souffrance du renoncement à soi-même, de la transformation et de la purification du moi pour la véritable liberté. Là où il n’y a rien qui vaille la peine de souffrir, la vie elle-même perd sa valeur. L’Eucharistie – le centre de notre être chrétiens – se fonde sur le sacrifice de Jésus pour nous, elle est née de la souffrance de l’amour, qui a atteint son sommet dans la Croix. Nous vivons de cet amour qui se donne. Il nous donne le courage et la force de souffrir avec le Christ et pour Lui dans ce monde, en sachant que précisément ainsi notre vie devient grande, mûre et véritable. A la lumière de toutes les lettres de saint Paul, nous voyons que sur son chemin de maître des nations s’est accomplie la prophétie faite à Ananie à l’heure de l’appel: «Et moi je lui ferai découvrir tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon Nom». Sa souffrance le rend crédible comme maître de vérité, qui ne cherche pas son propre profit, sa propre gloire, la satisfaction personnelle, mais qui s’engage pour Celui qui nous a aimés et qui s’est donné lui-même pour nous tous.

En cette heure, nous rendons grâce au Seigneur, car il a appelé Paul, le rendant lumière des nations et notre maître à tous, et nous le prions: «Donne-nous aujourd’hui aussi des témoins de la résurrection, touchés par ton amour et capables d’apporter la lumière de l’Evangile dans notre temps. Saint Paul, prie pour nous! Amen.

29 JUIN – SAINT PIERRE E PAUL APÔTRE, SOLENNITÉ – OFFICE DES LECTURES

29 juin, 2008

29 JUIN  – SAINT PIERRE E PAUL APÔTRE, SOLENNITÉ

Office des Lectures du dimanche 29 juin 2008

Lettre de saint Paul Apôtre aux Galates (Ga 1, 15-24; 2, 1-10)

Mais, lorsque celui qui m’a mis

à part depuis le sein de ma mère et m’a appelé par sa grâce a jugé bon de révéler en moi son Fils afin que je l’annonce parmi les païens, aussitôt, loin de recourir à aucun conseil humain ou de monter à Jérusalem auprès de ceux qui étaient apôtres avant moi, je suis parti pour l’Arabie, puis je suis revenu à Damas. Ensuite, trois ans après, je suis monté à Jérusalem pour faire la connaissance de Céphas et je suis resté quinze jours auprès de lui, sans voir cependant aucun autre apôtre, mais seulement Jacques, le frère du Seigneur. Ce que je vous écris, je le dis devant Dieu, ce n’est pas un mensonge. Ensuite, je me suis rendu dans les régions de Syrie et de Cilicie. Mais mon visage était inconnu aux Églises du Christ en Judée; simplement, elles avaient entendu dire: « celui qui nous persécutait naguère annonce maintenant la foi qu’il détruisait alors », et elles glorifiaient Dieu à mon sujet. Ensuite, au bout de quatorze ans, je suis monté de nouveau à Jérusalem avec Barnabas; j’emmenai aussi Tite avec moi. Or, j’y montai à la suite d’une révélation et je leur exposai l’Évangile que je prêche parmi les païens; je l’exposai aussi dans un entretien particulier aux personnes les plus considérées, de peur de courir ou d’avoir couru en vain. Mais on ne contraignit même pas Tite, mon compagnon, un Grec, à la circoncision; ç‘aurait été à cause des faux frères, intrus qui, s’étant insinués, épiaient notre liberté, celle qui nous vient de Jésus Christ, afin de nous réduire en servitude. A ces gens-là nous ne nous sommes pas soumis, même pour une concession momentanée, afin que la vérité de l’Évangile fût maintenue pour vous. Mais, en ce qui concerne les personnalités – ce qu’ils étaient alors, peu m’importe: Dieu ne regarde pas à la situation des hommes – ces personnages ne m’ont rien imposé de plus. Au contraire, ils virent que l’évangélisation des incirconcis m’avait été confiée, comme à Pierre celle des circoncis, – car celui qui avait agi en Pierre pour l’apostolat des circoncis avait aussi agi en moi en faveur des païens – et, reconnaissant la grâce qui m’a été donnée, Jacques, Céphas et Jean, considérés comme des colonnes, nous donnèrent la main, à moi et à Barnabas, en signe de communion, afin que nous allions, nous vers les païens, eux vers les circoncis. Simplement, nous aurions à nous souvenir des pauvres, ce que j’ai eu bien soin de faire.

HOMÉLIE DE S. AUGUSTIN POUR LA FÊTE DES APÔTRES PIERRE ET PAUL


Le martyre des saints Apôtres Pierre et Paul a fait pour nous de ce jour un jour sacré. Nous ne parlons pas de quelques martyrs obscurs: Ce qu’ils proclament a retenti par toute la terre, et leur parole, jusqu’au bout du monde. Ces martyrs ont vu ce qu’ils ont prêché, après avoir vécu selon la justice, en proclamant la vérité, en mourant pour la vérité. C’est le bienheureux Pierre, le premier des Apôtres, celui qui aimait fougueusement le Christ, qui a eu le bonheur de s’entendre dire: Et moi, je te le déclare: Tu es Pierre. Car lui-même venait de dire: Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant. Et le Christ lui dit alors: Et moi, je te le déclare: Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église. Sur cette pierre je bâtirai la foi que tu viens de confesser. Sur cette parole que tu viens de dire: Tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant, je bâtirai mon Église. Car tu es Pierre. Le nom de Pierre vient de la pierre, et non l’inverse. Le nom de Pierre vient de la pierre, comme «chrétien» vient de Christ. Ainsi que vous le savez, le Seigneur Jésus, avant sa passion, choisit ses disciples, et leur donna le nom d’Apôtres. Parmi eux, c est Pierre qui, presque en toute circonstance, mérita de personnifier toute l’Église à lui seul. C’est parce qu’il personnifiait l’Église à lui seul qu’il a eu le bonheur de s’entendre dire : Je te donnerai les clefs du Royaume des cieux. En effet, ce n’est pas un homme seul, mais l’Église dans son unité, qui a reçu ces clefs. Ceci met en relief la prééminence de Pierre, car il a représenté l’universalité et l’unité de l’Église lorsqu’il lui fut dit: Je te confie, alors que c’était confié à tous. En effet, pour que vous sachiez que c’est l’Église qui a reçu les clefs du Royaume des cieux, écoutez ce que le Seigneur dit à tous ses Apôtres dans un autre endroit: Recevez l’Esprit Saint. Et aussitôt: Tout homme à qui vous remettrez ses péchés, ils lui seront remis; tout homme à qui vous maintiendrez ses péchés, ils lui seront maintenus. Et c’est encore à juste titre que le Seigneur, après sa résurrection, confia à Pierre en personne la charge de faire paître ses brebis. Car il n’est pas le seul parmi les disciples qui méritait de faire paître les brebis du Seigneur; mais Si le Christ parle à un seul, c’est pour mettre en valeur l’unité. Et il s’adresse en premier à Pierre parce que Pierre est le premier parmi les Apôtres. ~ Ne sois pas triste, Apôtre, d’être interrogé trois fois: réponds une fois, réponds deux fois, réponds trois fois. Que ta confession soit victorieuse trois fois par l’amour, parce que ta présomption a été trois fois vaincue par la crainte. Il faut délier trois fois ce que tu avais lié trois fois. Délie par l’amour ce que tu avais lié par la crainte. Et cependant le Seigneur, une fois, deux fois, et trois fois, a confié ses brebis à Pierre. En un même jour, on célèbre la passion de deux Apôtres! Mais ces deux ne faisaient qu’un: bien qu’ils aient souffert à des jours différents, ils ne faisaient qu’un. Pierre a précédé, Paul a suivi. Nous célébrons le jour de fête de ces Apôtres, consacré pour nous par leur sang. Aimons leur foi, leur vie, leurs labeurs, leurs souffrances, ce qu’ils confessaient, ce qu’ils prêchaient.

LA CONVERSION DE SAINT PAUL, APÔTRE

26 juin, 2008

du site: 

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome01/031.htm

LA CONVERSION DE SAINT PAUL, APÔTRE

La conversion de saint Paul eut lieu lannée même que J.-C fut crucifié et que saint Etienne fut lapidé, non pas dans lannée, selon la manière ordinaire de compter, mais dans lintervalle d’une année; car J.-C. fut crucifié le 8 avant les calendes d’avril (25 mars), saint Étienne fut lapidé le 3 août de la même année et saint Paul fut converti le 8 avant les calendes de février (25 janvier). Maintenant pourquoi célèbre-t-on sa conversion plutôt que celle des autres saints : on en assigne ordinairement trois raisons. La première pour lexemple ; afin que personne, quelque grand pécheur qu’il soit, ne désespère de son pardon, quand il verra (226) celui qui a été si coupable dans sa faute, devenir dans la suite si grand parla grâce. La seconde pour la joie; car autant l’Église à ressenti de tristesse à cause de sa persécution, autant elle reçoit d’allégresse à cause de sa conversion. La troisième pour le miracle que le Seigneur manifesta en lui; quand du plus barbare persécuteur il fit le plus fidèle prédicateur. En effet, sa conversion fut miraculeuse du côté de celui qui la faite, du côté de ce qui ly a disposé, et du côté de celui qui en est le sujet. Celui qui fit cette conversion, c’est J.-C. ; en cela il montra: 1° son admirable puissance, quand il lui dit: « Il vous est dur de regimber contre laiguillon; » et quand il le changea si subitement, ce qui lui fit alors répondre: «Seigneur, que voulez-vous que je fasse? » Sur ces paroles saint Augustin s’écrie : «L’agneau tué par les loups a changé le loup en agneau, déjà il se prépare à obéir, celui qui auparavant était rempli de la fureur de persécuter; » 2° il manifesta en cela son admirable sagesse ; car il abattit lenflure de son orgueil, en lui inspirant les bassesses de lhumilité, mais non les splendeurs de la majesté. « C’est moi, dit-il qui suis ce Jésus de Nazareth que tu persécutés. » La glose ajoute : « Il ne dit pas qu’il est Dieu, ou même le Fils de Dieu, mais : accepte les bassesses de mon humilité et dépouille-toi des écailles dont te couvre ton orgueil. » 3° Il lui témoigne une clémence extraordinaire; ce qui est évident puisque, au moment où Paul était dans lacte et dans la volonté de persécuter, Dieu opère sa conversion. En effet, quoique avec une affection désordonnée; puisqu’il ne respirait que menaces et carnage, quoique se livrant à des essais criminels, puisqu’il vint (227) trouver le grand’ prêtre, comme s’il s’immisçait de

lui-même en cela, quoique dans le fait même d’un acte coupable, puisqu’il allait chercher les prisonniers pour les amener à Jérusalem, et qu’ainsi le but de sa démarche fut détestable, cependant ce pécheur-là même est converti par la divine miséricorde. Secondement, cette conversion fut miraculeuse du côté de ce qui ly disposa, savoir, la lumière. En effet, cette lumière fut subite, immense, et venant du ciel : « Et il fut tout d’un coup environné d’une lumière qui venait du ciel, » dit lEcriture (Actes, IX). Car Paul avait en lui trois vices : le premier, c’était laudace; ces paroles des Actes en font foi : « Il vint trouver le grand prêtre » et la glose porte: « Personne ne ly avait engagé, c’est de lui-même, c’est son zèle qui le pousse. » Le second, c’est lorgueil ; et on en a la preuve par ces paroles: « Il ne respirait que menaces et carnage. » Le troisième, c’était lintelligence charnelle qu’il avait de la loi. Ce qui fait dire à la glose sur ces paroles : « Je suis Jésus. Je suis le Dieu du ciel ; c’est ce Dieu qui te parle, ce Dieu que tu crois, comme les juifs, avoir éprouvé la mort. » Donc cette lumière divine fut subite, pour frapper d’épouvante cet audacieux; elle fut immense, pour abîmer ce hautain, ce superbe, dans les profondeurs de lhumilité : elle vint du ciel pour rendre céleste cette intelligence charnelle. Ou bien encore, trois moyens disposèrent ce prodige : 1° la voix qui appelle; 2° la lumière qui brille et 3° la force toute puissante. Troisièmement, cette conversion fut miraculeuse du côté de celui qui en est le sujet, c’est-à-dire, du côté de Paul lui-même qui fut converti. Dans sa (228) personne, il y eut trois miracles: opérés extérieurement son renversement, et son aveuglement, et son jeûne de: trois jours, car il est renversé, pour être relevé de cet état d’infirmité où il gisait. Saint Augustin dit : « Paul fut renversé pour être aveugle; il fut aveuglé pour être changé ;,il fut changé pour être envoyé ; il fut envoyé pour que la vérité se fît jour.» Le même père dit encore : « Le cruel fut écrasé et devint croyant ; le loup fut abattu et il se releva agneau le persécuteur fut renversé et il devint prédicateur; le fils de perdition fut brisé et il est changé en un vase d’élection. Il est aveuglé pour être éclairé, dans son intelligence pleine de ténèbres. » Aussi est-il dit que, pendant ces trois jours, il resta aveugle, parce qu’il fut instruit de lEvangile. En effet il n’a pas reçu lEvangile de la bouche d’un homme, ni par le moyen de lhomme; il lassure lui-même; mais il la reçu de J.-C. même qui le lui révéla. Augustin dit ailleurs : « Paul, je te proclame le véritable athlète de J.-C. qui la instruit, qui l’a oint de sa substance avec lequel il a été crucifié; et qui se glorifie en lui. II eut sa chair meurtrie, pour que cette même chair fût disposée à embrasser les généreux desseins: En effet, dans la suite, son corps fut parfaitement apte à toutes sortes de bonnes oeuvres; car il savait vivre et dans la pénurie et dans, labondance; il avait éprouvé de tout, et il supportait volontiers toutes les adversités. Saint Chrysostome dit: « Il regardait comme des moucherons les tyrans et les peuples qui ne respiraient. que la fureur; la mort, les tourments, et des milliers de supplices, il les prenait pour jeux d’enfants. Il les accueillait de son plein gré, (230) et il retirait plus de gloire des chaînes dont il était lié, que s’il eût été couronné de précieux diadèmes. Il recevait les blessures avec plus de bonne grâce que les autres ne reçoivent les présents. » Ou bien encore ces trois états peuvent être opposés aux trois autres états de notre premier père. Celui-ci se leva contre Dieu; saint Paul au contraire fut renversé par terre. Les yeux d’Adam furent ouverts; saint Paul au contraire devint aveugle. Adam mangea du fruit défendu, saint Paul s’abstint de manger une nourriture légale.