Archive pour la catégorie 'Ancien Testament'

Abraham et ses trois visiteurs. (Itineraires augustiniens)

22 octobre, 2010

du site: 

http://www.assomption.org/Ressources/ItinerairesAugustiniens/IA34/Ramon.htm

ITINERAIRES AUGUSTIENS

Hospitalité dans l’Ecriture

Abraham et ses trois visiteurs.  

La figure d’Abraham est devenue le paradigme de l’hospitalité biblique. Genèse 18 raconte, en effet, comment Abraham donna l’hospitalité à trois étrangers. L’épisode se déroule en deux scènes, d’abord une scène d’accueil sous un arbre (vv. 1-8), puis une conversation près de la tente (vv. 9-15).  

L’accueil des trois hommes

La première scène est centrée sur l’hospitalité d’Abraham. Elle se déroule à Mambré, au plus chaud du jour, alors qu’Abraham est assis à l’entrée de la tente. Dès le premier verset, le narrateur communique une information au lecteur, qui le place en situation privilégiée par rapport à Abraham : c’est le Seigneur qui apparaît à Abraham. Celui-ci ne le sait pas.  Le lecteur découvre Abraham au moment de l’apparition divine, et même il le surprend avant que celui-ci n’ait aperçu Dieu. Au moment où Abraham lève les yeux, il voit trois hommes qui se tiennent debout près de lui (v. 2). Le narrateur montre alors au lecteur ce que voit Abraham : trois hommes devant lui. Le lecteur voit ici les hommes avec les yeux d’Abraham.

Le Seigneur apparaît (v. 1) ; Abraham voit trois hommes (v. 2). Saisissante opposition des deux perspectives, d’autant que c’est le même verbe hébreu qui est utilisé dans les deux cas. Qui a l’initiative de la rencontre alors ? Abraham, qui apercevant les hommes, les invite ? Le Seigneur qui se laisse apercevoir par lui, incognito ?

Le récit contient d’autres contrastes : Abraham voit trois hommes… près de lui ; et pourtant ajoute le texte, “ dès qu’il les vit, il courut de l’entrée de la tente à leur rencontre ” (v. 2). Les hommes sont proches… sans l’être… ; et le seul désir d’Abraham est de se rapprocher d’eux au maximum. Abraham est loin d’eux sur le plan de la connaissance (il ne reconnaît pas Dieu), mais il sait se faire proche d’eux, par son désir de se rendre hospitalier. Lui qui est un vieillard, à l’heure la plus chaude du jour, il court de la tente à l’arbre, à leur rencontre, et il se prosterne à terre. La précipitation d’Abraham à servir ses hôtes ne s’arrêtera pas à ce premier geste d’accueil : après avoir couru à la rencontre de ses hôtes, il cherchera à communiquer sa hâte à Sara : “ Prends vite… ” (v. 6), puis au serviteur qui se dépêche de préparer le veau (v. 7). Bref, il semblerait qu’il n’ait de cesse de se hâter jusqu’à qu’il se tienne debout sous l’arbre, pendant que ses hôtes mangent (v. 8). La scène se termine par ce repas. Après une série de mouvements rapides (vv. 2-7), le récit fait une pause. Il est vrai que la requête d’Abraham : “ Monseigneur… veuille ne pas passer près de ton serviteur sans t’arrêter… ” (v. 3) est partiellement résolue. Dans cette scène, tous les personnages se retrouvent dans des positions qui sont à l’opposé de celles de départ : Abraham est d’abord assis à l’entrée de la tente et il voit des hommes debout près de lui ; puis Abraham se retrouve debout sous l’arbre, près des hommes qui mangent, assis. Tel est le signe de la transformation opérée dans ce récit. Qu’est-ce qui l’a provoquée ? La parole d’invitation du patriarche en tant qu’elle est acceptée par ses hôtes : qu’il fasse comme il a dit (v. 5). L’activité d’Abraham, son désir d’hospitalité sont ainsi mis en relief.

Le lecteur sait que c’est le Seigneur qui apparaît à Abraham. Celui-ci va-t-il le reconnaître ? Le récit ne contient à aucun moment de reconnaissance explicite. Le récit est, par ailleurs, extrêmement ambigu : il alterne du singulier au pluriel, et c’est le fait du narrateur autant que d’Abraham. Au verset 6, lorsqu’Abraham demande à Sara de préparer des galettes, il utilise deux termes, “ farine, fleur de farine ” ; le premier désigne de la farine ordinaire, ce qui laisse penser qu’Abraham n’a pas reconnu ses visiteurs ; mais le deuxième laisse penser la contraire, car il désigne la farine destinée au culte (cf. les textes de la tradition sacerdotale parlant des offrandes végétales). Si Abraham utilise les deux mots, est-ce parce qu’il a un doute ? Il est impossible de trancher…

 

La conversation près de la tente

La seconde scène est elle-même pleine d’ambiguïté. D’abord les visiteurs demandent où est la femme d’Abraham, mais fait surprenant : ils connaissent son nom ! (v. 9) Comment ? La réponse n’est pas donnée. Puis ils annoncent la naissance d’un fils, ce que Sara entend puisqu’elle écoute à l’entrée de la tente, qui se trouve derrière eux (v. 10). Le narrateur prend soin de faire connaître au lecteur la situation du couple désormais âgé et dans l’incapacité, par conséquent, d’avoir des enfants. On comprend alors pourquoi Sara rit intérieurement en entendant la promesse des visiteurs (vv. 11-12). Il y a alors encore ce fait curieux : un des visiteurs devine les pensées de Sara qui rit en elle-même, dans la tente qui se trouve derrière lui (v. 13) ! S’agit-il donc d’un personnage dont l’omniscience est d’origine surnaturelle ? Et pourtant le récit parle aussi de trois hommes et il serait possible d’imaginer, qu’après avoir goûté l’hospitalité d’Abraham, un des visiteurs exprime sa gratitude, le souhait que Sara ait un fils. Théophanie alors ou visite de trois hommes qui ont annoncé une naissance après avoir été reçus ? Toujours est-il que le visiteur révèle qu’il n’ignore rien des pensées secrètes de Sara. Il affirme également qu’il n’est pas impossible pour le Seigneur de promettre et de donner un enfant à un couple stérile (vv. 13-14). Sara peut bien nier, le visiteur est formel : la femme a vraiment ri (v. 15).

Ce rire de l’incrédulité dit quelque chose du mystérieux retournement des perspectives dans l’hospitalité : celui qui est le plus comblé n’est sans doute pas le visiteur, mais celui qui le reçoit. Et quand c’est Dieu qui visite l’homme, le don va bien au-delà de ce que l’on pourrait imaginer… La conclusion abrupte du récit, cependant, si elle montre que le visiteur a une connaissance parfaite des événements et des personnes, ne fournit pas la réponse à la question de savoir si Abraham et Sara reconnaissent le Seigneur. Partout l’ambivalence demeure… Le récit est une parabole ouverte que le lecteur ne peut conclure d’une manière définitive. Et si cela n’avait aucune importance ? Ou plutôt, si cela nous rappelait qu’accueillir son frère, c’est accueillir le Seigneur ?

Mystère de l’hospitalité

L’accent est mis sur la présence cachée de Dieu auprès d’Abraham, et l’attitude bienveillante de celui-ci à l’égard de ses hôtes, l’empressement à les recevoir. Abraham accueille les trois hommes et se laisse surprendre par une promesse. Abraham prend soin du corps de ses hôtes et dans le corps de Sara s’annonce l’enfant inespéré… Abraham accueille l’autre, l’étranger et Sara va pouvoir accueillir l’autre, l’enfant. La venue du Christ parmi nous ne s’inscrit-elle pas dans la suite de cette histoire d’hospitalité ? Dieu lui-même frappe à la porte pour qu’on lui donne un lieu, et, une fois dans la place, pour donner à chacun son lieu avec lui. L’image biblique est bien celle de l’hospitalité : “ Voici, je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui pour souper, moi près de lui et lui près de moi ” (Ap 3, 20).

La lettre aux Hébreux ne manquera de faire de l’hospitalité la condition possible d’une expérience spirituelle : “ N’oubliez pas l’hospitalité, car c’est grâce à elle que quelques-uns, à leur insu, hébergèrent des anges ” (He 13, 2). L’hospitalité est une manière de persévérer dans la dilection, mais aussi une attitude qui est de l’ordre du décentrement de soi, de l’inconditionnel et de la gratuité. Il en va de l’hospitalité comme de la foi de Job : elle demande à être accomplie “ pour rien ” (cf. Jb 1, 9). A celui qui saura se rendre hospitalier, sans rien attendre en retour, s’adresse la béatitude de Jésus : “ Heureux seras-tu alors de ce qu’ils n’ont pas de quoi te le rendre ! Car cela te sera rendu lors de la résurrection des justes ” (Lc 13, 14). Qui nous rendra capables d’une si radicale gratuité ? La liturgie nous en donne un indice qui nous parle de l’Esprit comme du “ doux hôte de l’âme ”. Nous pouvons ainsi faire de Dieu notre hôte intérieur et l’accueillir en accueillant nos frères jusqu’à ce que nous soyons à notre tour accueillis d’une manière définitive, devenant les hôtes de Dieu dans sa maison ; c’est Lui alors qui servira à table (Lc 12, 37). Mystère de l’hospitalité de Dieu, vécu dès maintenant dans l’Eucharistie.  

Sophie Ramond
Religieuse de l’ Assomption
(Paris)

Le Lévitique

21 octobre, 2010

 du site:

http://www.ebior.org/Afale/Dossiers_bibliques/levitique.htm

Le Lévitique

Ancien Testamént

Le Lévitique est le 3ème livre de la Torah ou Pentateuque. Son nom hébreu « Vayikra » signifie « Il appela  » ce qui correspond au début du premier verset « Il appela Moise, le Seigneur…….

Le Lévitique est le livre de la sainteté, de la sainteté de Dieu, mais aussi de la sainteté de l’homme, à laquelle l’homme est appelé par Dieu : « Vous serez saints, parce que Moi l’Eternel, Je suis saint », Lv § 19. Pour percevoir l’importance et la portée du Lévitique, il faut avoir constamment à l’esprit que le peuple de Dieu est un peuple tout entier consacré , « un peuple de prêtres, une nation sainte », Ex 19, 6.
Le Lévitique est un livre d’une sainteté éminente, sainteté qui doit permettre à Israël de devenir effectivement peuple de prêtres, nation sainte. La racine de Lévitique est Lévi. Car c’est, parmi Son peuple, aux lévites que Dieu s’adresse dès les premiers chapitres de ce livre. C’est pourquoi le Lévitique est souvent aussi appelé « Torah des prêtres ».
Au premier abord, le Lévitique peut nous paraître étrange, à nous occidentaux laïcisés, déroutant, difficile et même hermétique, parce que très loin de notre mentalité moderne. Mais si l’on prend le temps de l’approfondir, il se dévoile et nous fait découvrir les merveilleuses richesses que Dieu nous révèle à travers lui.
Le Lévitique recèle un mystère, le mystère de la sainteté de Dieu, donc une spiritualité, une puissance de révélation insondables, et nous donne le sens du culte à rendre à Dieu, de l’amour à Lui porter avec un grand souci de perfection. Il vise à donner aux hébreux, aux juifs, puis aux chrétiens le sentiment qu’ils ne sont pas maîtres de leur vie, qu’ils ne peuvent pas en faire n’importe quoi, mais qu’ils appartiennent à Dieu, qu’ils sont son peuple.
La fidélité des hébreux à la Loi de Dieu que nous révèle le Lévitique a donné une dimension extraordinaire à leur existence et à leur histoire. La vie ne doit pas être conditionnée par un environnement essentiellement éphémère, elle doit être orientée vers l’essentiel : la sainteté.Le Lévitique se situe entre l’Exode, le livre de la sortie d’Egypte et de l’Alliance au Sinaï, et les Nombres, qui relatent les étapes de la pérégrination du peuple hébreu au désert.
D’entrée, il enchaîne sur le § 40 de l’Exode qui relate l’érection et la consécration du Sanctuaire : la Tente du Rendez-vous au désert (13ème siècle av. J.C.) plus tard le Temple de Jérusalem,
Aussi les 4 chapitres du Lévitique  manifestent-ils une grande unité.eux qui précisent :
1) Le rituel des sacrifices § 1-7
2) L’investiture des prêtres § 8-11
3) Les règles relatives au pur et à l’impur § 11-16
4) La loi de sainteté § 17-26 plus un appendice « Tarifs et évaluations »
§@-7),
Que ce soit le code sacrificiel ou la loi de sainteté, l’un et l’autre tendent à rendre à Dieu le culte véritable qui lui est dû, tant par les sacrifices célébrés au seul Temple de Jérusalem, que par la pratique d’une vie « sainte ».

Un livre très ancien

Le Lévitique est un livre très ancien. Le rituel des sacrifices est rattaché au séjour du peuple au désert du Sinaï, et placé sous l’autorité de Moïse (1250 av. J.C). En fait, il ne recevra sa rédaction définitive (la liturgie évoluant toujours, si peu que ce soit, au cours des siècles) qu’après le retour de l’Exil, à partir du 5e/4e siècle av. J.C.
Dans sa forme actuelle, il représente le code sacrificiel du second Temple, rituel que Jésus a connu au cours des cérémonies célébrées dans le Temple (qui sera incendié, vous le savez, lors de la prise de Jérusalem par Titus, en août 70).

Le rituel des Sacrifices, § 1 à 7

Les sacrifices d’animaux étaient célébrés journellement au Temple sur l’autel des Sacrifices, situé lui-même devant le Saint des Saints.
Face à la sainteté de Dieu, l’homme se reconnaît pécheur. Pour pouvoir se réconcilier avec lui, il doit offrir des sacrifices, sacrifices d’holocauste., d’expiation et de communion, afin de se purifier.
Le Lévitique permet de distinguer plusieurs « types » de sacrifices
- les sacrifices d’holocauste ou d’expiation
- les sacrifices de communion,
- les sacrifices de louanges, auxquels s’ajoutent les oblations (les offrandes de pains rituels),
- les sacrifices de réparation qui visent surtout à effacer les fautes par lesquelles on a offensé Dieu, les prêtres ou le prochain.
Un rituel immuable
Tous ces sacrifices observent un rituel immuable
 l’offrande d’un bétail « sans défaut », v. 3 : ce qui est offert à Dieu doit être parfait
  l’imposition des mains par l’offrant : « Il posera sa main sur la tête de la victime  » v. 4, et le prêtre : attestation solennelle que l’offrande est présentée à Dieu.
le sacrifice lui-même au cours duquel le bétail est immolé « devant le Seigneur » par le Grand prêtre et les prêtres (cohen) « qui offriront le sang », au cours d’un rituel d’une grande rigueur dont le sens spirituel est immense.
Dieu confie l’immolation aux prêtres dont le rôle commence lorsque le sang, de la victime est mis en contact avec l’autel. C’est une loi générale pour tous les sacrifices. Seul le prêtre monte à l’autel, lieu de rencontre de la terre et du ciel.  Le sang était alors considéré comme siège du principe vital, d’où sa valeur expiatoire et son rôle de premier plan dans la célébration des sacrifices. Aussi les rites de sang jouent-ils un rôle primordial, « c’est le sang qui expie pour une vie », § 16 et est signe du retour dans l’Alliance.
  le repas sacré au cours duquel une partie de la victime est partagée et mangée (comme nous le verrons plus loin).
Dans ce rituel minutieux dépeint par le Lévitique, la tradition chrétienne a aimé voir un ensemble de préparations et de préfigurations du Sacrifice Eucharistique de la Messe dont on peut reconnaître là les différentes étapes.

Les divers sacrifices

Le sacrifice d’ holocauste ou d’expiation est un sacrifice dans lequel la victime est entièrement consumée par le feu de l’autel, la fumée de l’holocauste ou de l’encens montant vers Dieu « en parfum d’apaisement pour le Seigneur ».
Par le sacrifice d’expiation, l’homme qui a offensé Dieu gravement en transgressant l’Alliance peut rentrer en grâce. L’animal offert en sacrifice – en ses lieu et place – est interprété comme la rançon due à Dieu. L’expiation se rattache aux fondements mêmes de la Loi israélite.
* Le sacrifice de communion. Dans le sacrifice « de communion », la victime est partagée entre Dieu et l’offrant. Il comporte l’antique rituel du sang, déjà présent dans le sacrifice d’Abraham, Gn 15, et du Sinaï, Ex 24 .
C’est un banquet sacré, les parties les plus vitales de la victime sont offertes à Dieu, une part de choix est attribuée aux prêtres pour être mangée – « c’est une chose très sainte », v. 22 – et le reste est consommé, en signe de « communion » par les fidèles, ce qui exprime par excellence, la communauté de vie, la relation d’alliance et d’amitié entre les fidèles et le Seigneur.
Ce sacrifice de communion constituait le rite central des fêtes,, exprimant la communauté de vie, la relation d’alliance entre les fidèles et le Seigneur.
  Le sacrifice de réparation pour effacer le péché commis par le Grand prêtre,, l’Assemblée d’Israël, un chef, un homme du peuple, qui a transgressé l’Alliance, vise à obtenir du Seigneur le pardon pour la faute commise « volontairement ou par inadvertance ».

enfin les sacrifices de louange

Le sacrifice de communion peut être conjointement un sacrifice de louange. On y ajoute alors une offrande de gâteaux sans levain ou de pain fermenté.
Dans le Lévitique, nous découvrons que l’Israélite a conscience d’être pécheur, de devoir se convertir et qu’il doit offrir des sacrifices pour être pardonné de ses fautes, afin que sa prière soit entendue.
Aussi sommes-nous interpellés par ces paroles du Psaume 50, de David, lui qui offrit tant de sacrifices au Seigneur, et qui déclare :
« Si j’ose un sacrifice, tu n’en veux pas, tu n’acceptes pas d’holocauste. Le sacrifice qui plaît à Dieu, c’est un esprit brisé – tu ne repousses pas, ô mon Dieu, un cœur brisé et broyé »
Ne disons donc pas trop vite que les sacrifices de l’Ancien Testament étaient célébrés de façon formelle. Bien des Israélites profondément religieux les pratiquaient « en esprit et en vérité ». Chez eux le respect de la lettre ne gommait pas, n’occultait pas l’esprit de la Loi divine.
 L’Investiture des prêtres, § 8 à 15.
Le chapitre décrit
 - les rites de consécration des prêtres,
- leur entrée en fonction,
- les réglementations spéciales,
- les règles de deuil et les offrandes les concernant,
- celles relatives au sacrifice de réparation pour effacer les péchés.
Les v. 7 à 12 détaillent ainsi la consécration des prêtres :
« Moïse mit la tunique à Aaron il lui passa la ceinture, le revêtit du manteau et plaça sur lui l’éphod. Puis lui imposa le pectoral. Sur la tête, il lui mit le turban et sur le devant du turban la fleur d’or ; c’est le signe de la sainte consécration. Moïse prit l’huile d’onction, il oignit les prêtres pour les consacrer… »
Il est facile de voir dans ce texte la préfiguration de la consécration des prêtres et des évêques.
Transposons en quelques mots :
« L’évêque consécrateur prit la fiole d’Huile Sainte et en oignit l’Abbé X… pour le consacrer. Puis il lui remit l’aube de consécration, la ceinture, l’étole et la chasuble. Lorsqu’il s’agit de la consécration d’un évêque, on ajoute « il lui mit sur la tête la mitre (qui succède » au turban du Grand-Prêtre) qui est le signe de sa dignité… »
Que devons-nous admirer le plus de la beauté des dons que Dieu nous fait à travers le Lévitique, ou de la fidélité de l’Eglise à travers les siècles ?
Règles relatives au pur et à l’impur
Les Israélites avaient mission de célébrer dignement le culte de Dieu. Pour se présenter au Temple, ils devaient être purs.
La raison d’être de certains de ces rites nous échappe parfois, alors qu’ils étaient fort clairs à l’époque où ils ont été prescrits pour les contemporains. Ils avaient pour fonction de faire du peuple de Dieu un peuple « différent », autre, de ceux qui l’entouraient, le faire grandir en dignité et en humanité, lui permettre de survivre en traversant les siècles, de servir Dieu « en esprit et en vérité ».
Ces rites font partie des 613 commandements que s’efforcent d’appliquer encore les juifs.
Jésus rappellera à maintes reprises que la pureté légale est importante, mais ne remplace pas la pureté du cœur.
La « loi de pureté », § 11- 16, que nous abordons ici, à laquelle est jointe la « Loi de sainteté », §17-26, que nous étudierons au § suivant, sont comme les deux aspects négatif et positif d’une même exigence divine. Les règles données reposent sur de très anciens interdits religieux : est pur ce qui peut approcher Dieu, est impur tout ce qui rend inapte à son culte ou en est exclu.
Les animaux purs sont ceux qui peuvent être offerts à Dieu. les animaux impurs sont ceux que les païens considèrent comme sacrés, ou qui paraissent nuisibles à l’homme. Ils déplaisent donc à Dieu.
La loi de pureté, que beaucoup de juifs pieux observent encore aujourd’hui, a joué un sens « pédagogique » considérable dans l’Histoire d’Israël. Elle a contribué à l’empêcher de se mêler aux peuples païens qui l’environnaient de toutes parts, peuples dont les rites « magiques  » le fascinaient et le tentaient. Elle a contribué grandement à faire de lui un peuple à part, séparé, saint, puisque porteur des coutumes saintes données par Dieu.

Donnons quelques exemples

La jeune accouchée – et comment ne pas penser ici à la Vierge Marie ? – est l’objet de règles strictes, § 12. Mais sous la crainte de contracter « une impureté légale » se cache aussi la peur de la terrible fièvre puerpérale qui emportait tant de jeunes femmes, il n’y a pas si longtemps encore.
Les maladies infectieuses épouvantaient à ces époques : la lèpre, les ulcères, les exanthèmes, les maladies sexuelles, tout ce qui pouvait « s’attraper », va donc être l’objet de prescriptions rigoureuses afin d’empêcher tout risque de contagion, § 13 et 16. N’oublions pas que les prophylaxies actuelles et les antibiotiques n’existaient pas. Seule une hygiène rigoureuse pouvait préserver ces peuples, l’hygiène du corps conduisant à l’hygiène de l’âme.
Le chapitre s’achève par le rituel du Grand jour des Expiations, le Yom Kippour § 16.
- La Loi de sainteté, § 15 à 26
L’idée première de la Loi de sainteté est celle d’une séparation, d’une inaccessibilité, d’une transcendance qui inspire une crainte religieuse ( Ex 33, 20 ) Il existe en effet un abîme entre la sainteté de Dieu et l’homme. L’homme ne peut voir Dieu et vivre.
-Mais la sainteté de Dieu se communique à tout ce qui l’approche ou lui est consacré : les lieux, tel l’Horeb, les temps, tel le shabbat, l’arche d’Alliance, les personnes, spécialement les prêtres, les objets consacrés au culte… A cause de ses rapports avec le culte, la notion de sainteté s’allie à celle de pureté  rituelle. « La loi de sainteté » est « une loi de pureté ».
« Soyez saints comme le Seigneur est saint » (19, 2), résume parfaitement la Loi de sainteté.
Les 10 Paroles et la Loi de sainteté
Les 10 Paroles et les commandements sont à jamais le fondement de la Sainte Loi divine. Elles sont la voie sûre qui conduit à la sainteté,
Mais afin que nul n’ en ignore, dans ce chapitre sur la Loi de sainteté, particulièrement aux § 18 à 20, sont cités les grands manquements aux 10 Paroles, particulièrement les grands interdits sexuels (qui sont en vérité des dons de Dieu), l’adultère, l’inceste, l’homosexualité, la bestialité, mais aussi l’idolâtrie, la magie, le commerce avec les spectres (les morts), et les sacrifices humains. Ils sont qualifiés « d’abominations », assimilés aux pires idolâtries, au refus caractérisé de Dieu et de sa Sainte Loi.
C’est là la peinture de la société idolâtre de l’époque. Ces « interdits » étaient alors pratiqués couramment dans toutes les nations. D’où la répulsion qu’éprouvaient pour eux les israélites Notre société qui n’est plus tournée vers Dieu, les « sacralisent » aujourd’hui à nouveau parce qu’en s’éloignant de Dieu, elle retourne peu à peu au paganisme. Regardez autour de vous.
Tous les cas de « figure » sont précisés. Dieu, dans son plan d’amour, veut ainsi protéger, et garder de tout mal, la famille, le couple et les enfants. Car de la stabilité, de la fidélité et de la piété de la famille et du couple humain, de la protection des enfants, dépendent sans conteste, la transmission dela Révélation « de Générations en générations » et leur bonheur véritable.

De quel amour, j’aime ta Loi, ô mon Dieu

Ainsi avec le Lévitique apparaît une notion nouvelle : l’obéissance aux 10 Paroles, à la Charte de l’Alliance, stricto sensu, doit être intériorisée. La Loi est un moyen, non un but.
C’est en esprit » qu’elle doit être vécue, et dans l’amour : « De quel amour, j’aime ta Loi, ô mon Dieu ! ». Car c’est à devenir saints, comme le Seigneur est saint, que les hommes sont appelés ( Lv 19, 2). « Aimer Dieu et sa Sainte Loi est taire seule et même chose » affirme Jésus en Mt 19 .
Avec les préceptes des § 19, 17, 18, 33 et 34, le sens du prochain va conduire au v. 18 :1 « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » que Jésus rappellera maintes fois dans l’Evangile (cf. Mt, 19,19 ).

Le Jubilé

Enfin le Lévitique au § 25 révèle un nouveau don de Dieu: les années sabbatiques et le jubilé.
Tous les 50 ans, est célébré le Jubilé, année de grâce pour le Seigneur : les esclaves recouvrent la liberté, les terres aliénées sont rendues à leur légitime propriétaire, chacun retrouvant son patrimoine,
C’est une année sainte donnée par le Seigneur. Cette mesure avait pour objectif d’assurer la stabilité d’une société fondée sur la famille et le bien familial. C’est Dieu lui-même qui remet les dettes, c’est-à-dire. les péchés. Il nous les « rachète », nous rachète. Il est notre racheteur = notre rédempteur.
Sur un plan spirituel, l’année sainte ou jubilaire décrétée par l’Église donne de même, périodiquement, aux chrétiens l’occasion d’une remise de leur dette envers Dieu. Le prochain Jubilé se célébrera en l’an 2000.

Conclusion

Les lois que nous fait connaître le Lévitique sont Paroles de Dieu adressées à tout un peuple qui va se construire à partir d’elles. Si quelques-unes ne concernent plus les chrétiens, beaucoup d’autres les concernent encore aujourd’hui comme celles que nous venons de citer.
Soyons-y donc fidèles. Agir, selon la volonté de Dieu, par amour pour Lui et sa Sainte Loi, c’est marcher hardiment dans la voie de la sainteté. Ce n’est pas difficile. Ce qui l’est, par contre, c’est de persévérer, jour après jour… Mais n’ayons pas peur. « Je suis le Seigneur », rappelle Dieu à la fin de ces chapitres. Sa fidélité ne saurait nous manquer.
Tel est le message que nous révèle le saint livre du Lévitique.


Auteur : Isabelle AMI

Afale Magazine,  1997

Le don de Sagesse : « O immensité profonde des richesses de Dieu ! » (Rm XI, 33)

20 octobre, 2010

du site:

http://www.foi-et-contemplation.net/themes/Esprit-Saint/Saint-Esprit-Vie-Chretienne-don-sagesse.php

Le Saint-Esprit dans la Vie Chrétienne

Chapitre XIII
Le don de Sagesse

« O immensité profonde des richesses de Dieu ! »
(Rom., XI, 33.)

I. – Point de départ

Avant de pénétrer, dans la suprême région accessible sur terre à notre intelligence guidée, poussée par le Saint-Esprit avant de parler du don de Sagesse qui fait entrer définitivement dans les profondeurs de Dieu, remettons-nous dans l’état d’esprit où nous établit l’inspiration des dons de science et d’Intelligence. C’est la foi, « fides », mais non plus la simple vertu de foi, c’est la foi perfectionnée par un fruit spécial du don d’Intelligence que nous appelons aussi du nom de foi. L’exercice habituel de ce don de lumière amène la vertu de foi à sa perfection dernière et heureuse. Cette perfection est un fruit savoureux qui donne à l’âme de jouir de la divine certitude. Ce fruit est donc foi par excellence, foi ferme, bien éclairée, qui n’a plus ce mouvement de va-et-vient du début, mais qui se porte vers son objet avec un consentement rempli de lumière. L’obscurité de la foi, sous l’action de Dieu, est traversée par des éclairs et, à ce degré, la nuit est une véritable illumination, tant il y règne de délices (Ps. 138, 11.). Car, par cette foi, l’âme a senti, fixé Dieu à travers les créatures et la révélation où Il rayonne. Cette foi est une mer de délices pour la charité. Guidée par une foi qui ne cherche plus, mais dont la nuit est remplie des illuminations des dons de Science et d’Intelligence, la charité se sent à son aise. Les saints chez qui ces dons se développent sont dans l’oraison de recueillement et de quiétude. L’âme n’est plus tourmentée par les créatures; elle voit, par cette science, sa petitesse et son péché, et elle s’en détourne. A travers elle-même, elle voit Dieu et remonte jusqu’à Lui. De ce premier chef, la foi est devenue joyeuse, lucide; elle est libérée du fardeau des créatures. Par le don d’Intelligence, elle s’élance dans le monde des révélations divines, débarrassée des nuages de l’imagination gênante pour fixer Dieu qui est esprit, délivrée des erreurs de l’amour-propre; elle pénètre le sens des mystères de la religion, à fond, par un sentiment du cœur qui est une lumière, un goût divin dans lequel passe la lumière du Saint-Esprit : état heureux pour la foi qui expérimente ces choses.
Cette illumination de la nuit de la foi ne va pas, nous l’avons dit, sans des arrachements pénibles. Il faut renoncer à des habitudes chères; à la lumière de nos yeux. C’est la nuit des sens, condamnés à rester silencieux, eux si vivants ! La nuit de l’esprit, condamné à ne plus raisonner, lui si raisonneur ! Malgré ces arrachements, la lumière du Saint-Esprit se fait. Ainsi, le vent enlève les nuages et le soleil apparaît. C’est au milieu des peines de l’âme que se produit l’entrée de la divine lumière. L’âme est bienheureuse de se sentir en contact avec son vrai Dieu; heureuse dans sa charité qui, appuyée sur la grâce du Christ et illuminée par les dons de Science et d’Intelligence, est inclinée à croire fermement et dans une parfaite certitude.

II. – Nécessité du don de Sagesse

Est-ce le dernier terme de notre vie contemplative, de notre vie d’amour sur terre ? Non. Malgré ces lumières, la charité éprouve encore un besoin. Saint Paul nous en donne la raison : « La charité ne meurt pas (I Cor., XIII, 8.). » La foi et l’espérance s’évanouiront à notre entrée au ciel. Pas plus que notre âme qui est immortelle, la charité, qui a son siège en elle, ne disparaîtra. Il faut que la foi disparaisse par la vision, l’espérance par la possession; la charité est aussi réelle dans l’absence de l’objet aimé que dans la possession.
C’est la même âme avec le même amour qui aime Dieu sur la terre et qui l’aimera au ciel. Une seule chose est changée: ici-bas la charité est guidée par la lumière de la foi; dans le ciel, elle est guidée par la claire vision. Différence considérable au point de vue de la connaissance de Dieu, mais c’est la même charité : dans le ciel, charité exaltée, consommée; ici-bas, charité en mouvement, à cause de la foi qui la guide vers son terme lointain.
Pourquoi donc le cœur chrétien souffre-t-il sur terre ? La raison de cette souffrance dont nous parlions est claire. Dès maintenant, la charité est faite pour le ciel, à la mesure du ciel, à la mesure d’un Dieu vu face à face, dans toute sa beauté ravissante. Elle a des virtualités infinies qu’elle ne peut déployer ici-bas, même avec le secours des dons de Science et d’intelligence. Les idées avec lesquelles nous regardons Dieu sont du créé, du limité, du fini. Or la charité de la terre voudrait viser Dieu infini en tant qu’il est infini, et elle le connaît d’une manière si imparfaite ! « Ô grandeur, ô profondeur des richesses de Dieu ! »
Notre charité veut donc qu’on lui montre Dieu face à face. La foi, fruit du don d’Intelligence, si ferme qu’elle soit, ne peut le lui montrer ainsi. Il y a de ce fait dans la charité une amplitude d’amour qui n’est pas satisfaite.
C’est d’ailleurs pour cela que, sur terre, la charité est un amour de Dieu par-dessus tout. Examinant toutes les créatures que nous aimons, nous trouvons que Dieu les dépasse, que rien ne lui est comparable. C’est là cependant quelque chose de purement négatif, ce n’est pas l’amour d’un infini visible, perçu dans les profondeurs de ses attraits. Par suite, la charité demeure inassouvie, tant qu’elle ne fait que suivre la foi, même illuminée par les dons qui la renforcent, enlevant les obstacles et mettant son objet en pleine valeur.
Que fera donc la charité emprisonnée par la foi ? Celui qui aime Dieu, tourmenté par cette disproportion entre la lumière finie qui le guide et l’instinct infini de son amour, reviendra vers son propre cœur pour y trouver un mouvement d’amour qui échappe à cette étreinte, à cette camisole de force de la foi. S’il était possible sur terre de trouver une lumière qui nous fît sentir le Divin, non plus d’une façon négative mais positivement !
Dans sa charité même, dans sa vertu de charité, l’âme ne pourra pas trouver cette lumière; la charité est amour, elle n’est pas lumière, elle est faite pour suivre la foi. Mais au-delà de là charité, il y a son Créateur. « L’amour de Dieu a été diffusé dans notre cœur par le Saint-Esprit, lequel nous est donné avec elle (Rom., V, 5.). » Le Saint-Esprit demeure dans le fond des âmes saintes, et le terrain de son influence, c’est cette charité qui est quelque chose de Lui-même, qui Le représente au cœur de l’homme. Il veille sur elle, Il l’entoure de soins, Il la meut sans cesse, Il va trouver le moyen de fournir à cette charité de la terre une lumière qui, en un sens, dépassera celle de la foi.
Le Saint-Esprit voit Dieu face à face, profondément, Dieu n’a pas pour lui cette inaccessible hauteur, profondeur, grandeur dont s’extasiait saint Paul. Il est à hauteur. Il est Dieu. Il va, dans l’âme qu’Il habite, faire passer, dans une impulsion, une inspiration, quelque chose de cette vision face à face, qui fait son bonheur; et nous avons un don pour recevoir cette impulsion: le don de Sagesse.

III. – Objet et activité de la Sagesse

L’inspiration de la Sagesse n’est pas autre chose qu’une motion du Saint-Esprit, par laquelle Il nous communique, par la voie du cœur, comme une expérience de la vision céleste.
Nous restons dans la sphère de la foi; c’est la foi qui détermine l’objet de notre amour. Mais le Saint-Esprit infuse d’une manière cordiale, expérimentale, une connaissance de cet objet de foi, laquelle nous fait pénétrer, sentir, non pas avec les yeux du corps, ni avec ceux de l’intelligence, mais avec les « yeux illuminés du cœur », l’infini de Dieu, ce « par-dessus tout » qui est la loi même de la charité. C’est une expérience obscure de l’immensité de la Divinité. L’âme qui est sous l’impression de cette inspiration s’abîme, s’enfonce dans un sentiment intense du tout de Dieu. Elle expérimente Dieu en quelque manière. Elle est bien au-dessus de ce que la foi, même aidée du don d’Intelligence, lui révèle en termes précis. Dans ce sentiment, elle se prosterne dans une attitude d’adoration devant l’excès divin. Tout en croyant, elle renonce à se servir des expressions de la foi, à s’arrêter dans ses concepts, elle se perd dans un sentiment intense de la transcendance divine.

Nous ne voyons pas, mais ce sentiment du cœur, cette expérience, équivaut à la vision, parce que c’est une participation de la vision du Saint-Esprit, lequel témoigne, au fond de notre âme, que ce que nous sentons est la vérité.
Lorsque, dans l’oraison, nous avons fixé dans l’objet de notre foi une vérité suprême, par exemple : « Je suis celui qui suis », ou bien : « Dieu est Charité », et que le don d’Intelligence nous en ouvre le sens profond, nous pénétrons toujours davantage, répétant: Dieu est; moi, rien, un pur néant. Lui, Il est. Il est éternellement, éperdument. Il est Celui qui est… Tout à coup, dépassant cette pensée, nous éprouvons le besoin de nous abîmer dans un sentiment d’adoration devant Celui dont l’altitude nous est ainsi révélée. La pensée de l’Ecriture disparaît du premier plan de la connaissance, où elle est comme à portée de la foi explicite; les concepts qui l’expriment disparaissent aussi, et l’intelligence, comme d’un tremplin, s’élance et s’abîme devant l’Etre de Dieu; il n’y a plus qu’une adoration, un amen, un mouvement de l’âme qui se perd en Dieu. Elle renonce momentanément à toute conception définie, même à celles qui l’ont conduite à cet état. Voilà donc l’acte du don de Sagesse : l’Esprit divin nous fait faire un acte d’intelligence envers Dieu, qui est digne de l’Être de Dieu, de sa transcendance. Ce n’est pas un acte de l’intelligence qui pense positivement, mais de l’intelligence qui renonce à penser, à concevoir. Au ciel, nous penserons, nous verrons dans la lumière de gloire; ici-bas, nous sommes dans l’étreinte de la foi; nous y échappons en nous abîmant dans l’adoration. C’est la seule attitude de l’esprit adéquate à l’altitude divine. Nous ne disons rien, nous ne pensons rien, mais notre attitude intellectuelle proclame : « Ô profondeur des richesses divines ! »
Voilà jusqu’où peut nous conduire l’Esprit de Sagesse. Cela dure un instant. C’est un ravissement fugitif, un vol de l’esprit, comme un bond rapide. Nous retombons bien vite sur le terrain de la foi. Puis nous recommençons. Comme dit Saint François de Sales, nous prenons terre sur le sol de la foi, nous nous ranimons par une bonne pensée, nous prenons des forces pour remonter de nouveau.
C’est un acte qui ne peut pas durer parce qu’il tient de l’état des élus; il nous met dans l’attitude propre de ceux qui voient, et sur terre on ne peut pas longtemps souffrir des états pareils, ce sont des états angéliques. Cependant, grâce à Dieu, ils existent. Nous avons éprouvé qu’il faut dépasser toute créature, toute expression créée de Dieu, nous avons senti cette espèce de « sortie de tout ». Ce n’est pas l’extase, état extraordinaire, mais une sortie totale des créatures. On ne voit rien, l’heure du face-à-face n’a pas sonné. On saisit cependant que Dieu dépasse absolument toute créature, on se sent tout petit en face de Lui, on est pénétré par la grandeur de ses attributs, on a le sentiment intense de son Infini, et on s’abîme dans l’adoration.
C’est l’acte le plus sublime, le plus apparenté à la vision des élus. Il s’obtient en renonçant aux ressources propres de l’intelligence humaine, aux perfectionnements dont elle est enrichie, par un dépouillement total, pour devenir un être qui s’abîme dans l’adoration devant l’Être divin.
Mais de quelle douleur nous devons acheter pareille lumière du Saint-Esprit ! Il faut en effet que notre esprit se disloque intérieurement, qu’il se dilate au point de se distendre, pour avoir un contact avec l’Infini tel qu’Il est. Il y a là un moment terrible, c’est ce que les mystiques appellent la grande ténèbre.
Tout ce qui a fait la lumière de nos yeux n’est plus avec nous. Il faut renoncer aux procédés naturels de notre esprit, à l’évidence; il faut comme anéantir l’acte de l’esprit qui se complaît dans ce qu’il voit. C’est douloureux, mais cette douleur engendre une grande joie. Cette docilité totale, allant jusqu’au bout du renoncement et des forces de l’esprit, rend à Dieu le seul hommage égal à sa majesté.

IV. – Bienheureux effets du don de Sagesse

Quand l’esprit s’abîme ainsi, la charité se réjouit. Ce mouvement est comme infini : on ne sait pas jusqu’où peut s’abîmer l’âme en cette adoration : l’abîme est sans fond. Et la charité s’élève ainsi à des degrés toujours plus hauts, sans mesure: elle est à son aise, elle a trouvé la lumière adéquate à la hauteur de son instinct intime. L’esprit s’est dilaté aux dimensions de l’infini de Dieu qu’il touche, dont il témoigne, puisqu’il s’abîme; l’amour a trouvé en lui une mesure à sa hauteur : c’est l’amour à son plus haut degré sur terre, quoiqu’il ne soit pas consommé. Nous sommes alors adorateurs « en esprit et en vérité ».
La charité, dis-je, a trouvé sur Dieu un « renseignement » à la hauteur de son instinct. L’esprit du croyant, animé par la Sagesse, parle à son propre cœur du Bien-Aimé selon ce qu’Il est. La charité est heureuse ! Ce qu’elle demandait en vain à la foi explicite, elle l’a trouvé lorsque la Sagesse s’est communiquée à l’intelligence. Elle peut vivre ces minutes de jouissance que la charité des saints éprouve quand l’intelligence ravie en Dieu s’abîme devant la majesté infinie. Ce sont les plus délicieuses qu’il soit donné à l’amour d’éprouver sur terre.
Lorsque cette oraison se fait à propos de Notre-Seigneur ou de l’Eucharistie, ou de tout objet de ce genre, elle ne saurait s’abstraire du créé. Notre-Seigneur est homme; cependant, comme Il est Dieu, tout en tenant compte de la nature finie à laquelle la divinité est unie, la Sagesse nous porte à voir en lui une sublimité inouïe par une pénétration de connaissance expérimentale que nous n’avions pas auparavant. Ainsi, par les paroles du Gloria : Tu solus sanctus, Tu solus Dominus, Tu solus altissimus, un mouvement me porte vers ce qui rend le Christ si saint et tellement le Seigneur et le Très-Haut, et il m’est possible, en suivant ce mouvement, de le dépasser pour ainsi dire et de rester devant le Sauveur dans l’attitude où j’adore sa grandeur.
C’est un genre d’oraison où la Sagesse nous instruit ineffablement de la divinité de Jésus, non pas de son humanité, qui, prise à part, n’est pas l’objet direct de la Sagesse. Nul n’a pour Notre-Seigneur un amour à la hauteur de sa bonté s’il ne s’abîme devant sa divinité et ne l’adore : « Adoro Te, latens Deitas: Divinité cachée, je t’adore. »
Mais il est un terrain d’élection, un objet prédestiné de la Sagesse, c’est la Trinité. La Trinité est partout. Cependant elle est dans l’âme sainte d’une façon toute particulière. Elle y est comme plus attentive à son œuvre d’amour, plus riche de dons, donnant et la nature et la grâce. De plus, l’âme la reçoit en soi comme une amie qui a dans ce cœur son « chez soi », sa « demeure ». Tel est l’objet préféré des méditations des saints. La divine Trinité est au fond de leur âme; elle y demeure comme chez elle, reçue dans l’âme capable de la saisir et de la posséder.

V. – L’oraison d’union

Les saints considèrent Dieu ainsi, substantiellement présent en eux. Rentrons ainsi, par une pensée de foi, en nous-mêmes, éclairés par la foi et la charité surnaturelle, La Science écarte les obstacles; l’Intelligence, par une parole, nous révèle dans l’intérieur ce qu’Il est; mais c’est surtout par l’inspiration de la Sagesse que nous rejoignons Dieu, que nous arrivons, pour ainsi parler, jusqu’à le toucher. La foi ne peut pas le faire; fatalement elle est environnée par les idées dont elle use; elle se manifeste à nous par des paroles, des idées humaines, une représentation; si l’être des choses était intelligiblement au dedans de l’entendement, nous n’aurions pas besoin d’idées. Lorsque nous allons à Dieu avec la foi, nous supposons qu’il est distant. Mais qu’il se produise, par le don de Sagesse, un mouvement d’âme sans idée précise, l’obstacle est enlevé : nous nous abîmons alors devant le Dieu résidant au fond de l’âme. Quand l’âme s’abîme ainsi, entre elle et le Dieu qui est en elle comme dans un temple, il se produit un contact; il n’y a plus d’idée, de représentation qui sépare, il n’y a plus, dans l’indivisibilité de l’âme, qu’une âme en adoration et le Dieu infini, substantiellement présent, objet d’expérience immédiate et de contact. C’est le dernier mot de l’union et de l’oraison d’union. Sainte Thérèse sortait de cette oraison avec la certitude qu’elle était allée en Dieu, présent en elle. Il n’y a que la Sagesse qui puisse appliquer ainsi notre esprit à la substance de Dieu dans le fond de notre âme, mais elle nous conduit jusque-là.
Volontiers, nous croirions que ces choses sont faites pour quelques âmes plus élevées, une sainte Catherine, une sainte Thérèse. Mais, avec l’état de grâce, nous avons tous les dons, y compris la Sagesse, et la capacité d’éprouver ces choses. Elles sont faites pour nous; elles sont dans la puissance de la grâce ordinaire, et destinées à développer les virtualités de cette grâce.
Les états d’oraison ne sont pas une voie extraordinaire, mais l’extase, le ravissement, le rapt, ainsi que les grâces « gratis datae » (par exemple le don des miracles, le don de prophétie etc.). Nous-mêmes qui cherchons la perfection de l’amour de Dieu, n’aurions-nous pas été, sans le savoir, dans cet état d’oraison, d’union ? A certains moments, n’avons-nous pas éprouvé cette sorte d’anéantissement devant Dieu, présent au fond de nous-même, peut-être à l’occasion d’une communion…? Alors la proximité de Notre-Seigneur est très grande. Cette proximité a mis notre âme en mouvement; nous avons été plus avant vers la divinité présente au fond de nous-même. Dieu était là, et, ne cherchant plus à comprendre, nous nous sommes abîmés dans un sentiment intime de sa présence immédiate, et nous avons, par l’attitude de notre esprit et la puissance de notre charité, pris contact avec ce Dieu.
Ces choses arrivent, mais nous en percevons difficilement la valeur, la dignité et l’existence normale dans notre vie; nous n’y attachons pas d’importance. Nous disons bien : C’est une grâce, un événement de ma vie spirituelle. Mais pourquoi ne pas souhaiter renouveler cette expérience ? Nous ajoutons : Il faut que Dieu nous mette en cet état. Il le fera, mais il faut que nous nous disposions à si grande faveur.
Si notre vie se passe dans la pratique des vertus morales infuses, avec les dons qui les aident, elle se trouve ainsi pacifiée. Si nous sommes en présence des créatures comme n’en voulant pas, ne considérant que ce qu’elles nous disent sur Dieu, si nous sommes entrés par l’Intelligence dans la connaissance des chose divines, nous sommes à la porte de l’oraison d’union, nous n’avons plus qu’à la franchir et, puisque nous avons dans le don de Sagesse la capacité d’être impressionnés par cette merveilleuse inspiration, il n’est pas trop téméraire d’espérer qu’elle soufflera quelquefois. L’erreur serait d’y chercher une gourmandise spirituelle, de « s’attacher aux jeux de physionomie de Dieu », comme dit saint Augustin, plus qu’à Dieu Lui-même, d’en faire une délectation. Ce serait encore de prétendre à ces choses élevées alors que nous ne pratiquons pas les commandements ordinaires de Dieu et ses conseils de perfection.
Mais si le Saint-Esprit nous a Lui-même purifiés, élevés, fait monter vers ces sommets, pourquoi ne rendrions-nous pas à Dieu ce suprême hommage de nous abîmer devant son Être avec notre esprit et notre cœur, si le Saint-Esprit nous en donne le pouvoir ? Ne craignons pas d’aller au-devant de ces faveurs; ce n’est ni imagination ni ambition : la miséricorde de Dieu nous en a donné les moyens; elles font partie d’une vie chrétienne parfaite normale.

L’Eternel ma délivrance, psaume 88

5 octobre, 2010

du site:

http://batschalom.canalblog.com/archives/2010/09/26/19170141.html

dimanche 26 septembre 2010

L’Eternel ma délivrance, psaume 88

PSAUME 88

[David se représente comme étant réduit aux dernières extrémités.]

1 Maskil d’Héman Ezrahite, [qui est] un Cantique de Psaume, [donné] au maître chantre d’entre les enfants de Coré, [pour le chanter] sur Mahalath-lehannoth.
2 Eternel ! Dieu de ma délivrance, je crie jour et nuit devant toi.
3 Que ma prière vienne en ta présence ; ouvre ton oreille à mon cri.
4 Car mon âme a tout son saoul de maux, et ma vie est venue jusqu’au sépulcre.
5 On m’a mis au rang de ceux qui descendent en la fosse ; je suis devenu comme un homme qui n’a plus de vigueur ;
6 Placé parmi les morts, comme les blessés à mort couchés au sépulcre, desquels il ne te souvient plus, et qui sont retranchés par ta main.
7 Tu m’as mis en une fosse des plus basses, dans des lieux ténébreux, dans des lieux profonds.
8 Ta fureur s’est jetée sur moi, et tu m’as accablé de tous tes flots ; Sélah.
9 Tu as éloigné de moi ceux de qui j’étais connu, tu m’as mis en une extrême abomination devant eux ; je suis enfermé tellement, que je ne puis sortir.
10 Mon oeil languit d’affliction ; Eternel ! je crie à toi tout le jour, j’étends mes mains vers toi.
11 Feras-tu un miracle envers les morts ? ou les trépassés se relèveront-ils pour te célébrer ? Sélah.
12 Racontera-t-on ta miséricorde dans le sépulcre ? [et] ta fidélité dans le tombeau ?
13 Connaîtra-t-on tes merveilles dans les ténèbres ; et ta justice au pays d’oubli ?
14 Mais moi, ô Eternel ! je crie à toi, ma prière te prévient dès le matin.
15 Eternel ! pourquoi rejettes-tu mon âme, pourquoi caches-tu ta face de moi ?
16 Je suis affligé et comme rendant l’esprit dès ma jeunesse ; j’ai été exposé à tes terreurs, et je ne sais où j’en suis.
17 Les ardeurs de ta [colère] sont passées sur moi, et tes frayeurs m’ont retranché.
18 Ils m’ont tout le jour environné comme des eaux, ils m’ont entouré tous ensemble.
19 Tu as éloigné de moi mon ami, même mon intime ami, et ceux de qui je suis connu me sont des ténèbres.

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Je désirais trouver un sujet pour vous parler de la relation intime avec D.ieu et le Seigneur m’a conduit vers ce passage. C’est David qui parle, David qui a connu des moments de détresses très grandes, aujourd’hui on parlerait de dépressions, de stress intenses, il n’est pas le seul, pour ni citer que Job, Elie, Jérémy, Jean Baptiste etc.. a avoir traversé des périodes cauchemardesques, mettant son équilibre mental en péril, tout son être entier, dans la souffrance la plus intense et en même temps tendant la main vers D.ieu d’où il attend le secours, la délivrance. Je crois que le Seigneur qui a vécu lui même cette souffrance dans le jardin de Géthsémané nous donne des exemples pour nos vies. Que la souffrance vienne d’un fait  dont on est responsable ou non, ne change en rien la situation actuelle de David qui ne désire qu’une chose : ne plus souffir.Il implique le Seigneur jusqu’au bout.
Dans les premiers versets, il demande à D.ieu de l’écouter et lui dit son mal. Il n’analyse pas les causes, simplement, il crie nuit et jour, et attend que D.ieu l’écoute. Il voudrait faire sortir toute sa souffrance de son âme, cette souffrance qui l’étouffe jusqu’à faire jaillr un cri en continu.
Puis il dit ‘on’ m’a fait du tort, il se sent offensé par des blessures intérieures que des hommes lui ont causées, ils l’ont mis  plus bas qu’un être humain puisse être, presque jusqu’à la mort, il n’arrive pas à se relever, puis dans sa douleur, il accuse D., c’est toi qui m’a fait descendre ou en tout cas tu as laissé faire, puis il change de tactique, il essaie de chatouiller l’amour propre de D. en lui disant que si il le laissait dans cet état, il ne pourrait plus l’adorer, il pense aux moments intimes partagés avec le Seigneur, et espère y revenir. Il n’est plus capable de penser normalement. Dans son délire il accuse tantôt D. tantôt les hommes, en tout cas il le rend responsables de ses angoissses, de son état, de sa solitude.
Je crois que David avait une relation très intime, très profonde avec D. pour oser lui parler  comme cela, parce que dans son coeur, il ne doutait pas un instant qu’il viendrait à son secours, D. disait que David était un homme selon son coeur. D. ne donne pas des souffrances, ça c’est sûr, mais il permet quelque fois qu’elles durent, alors que d’un mot, il pourrait tout stopper. Moi j’ai connu une souffrance semblable, sans D. dabord, puis avec lui. Pourquoi il a permis? Ca je ne peux pas répondre, peut être parce qu’il m’aime assez pour qu’un jour j’ai pu répondre à son appel et lui demander de m’aider comme David. Parce qu’avant de le connaitre, je pensais vraiment de jamais sortir de la fosse, j’avais organisé ma vie, afin de survivre, essayant au mieux, de ne pas faire surgir mes angoisses, et me tenir tranquille le plus possible, limitant mes sorties, juste le boulot, la maison, les enfants, le minimumn dans la souffrance, le mal être, le stress, tout le temps, mes pensées qui tournaient en boucle, toujours les mêmes, le cauchemar pendant 30 ans. Jétais tellement emmurée dans ma solitude qu’un jour le Seigneur en rêve m’a montré comment je vivais : j’étais dans une cave, avec des bottes aux pieds (ca je sais pas pourquoi) assise sur une chaise et je bougeais pas, j’ai dit au Seigneur que le pari que je lui proposait c’était de m’en sortir.
Après ma conversion la souffrance est restée longtemps, je ne comprenais pas pourquoi, mais je n’arrivais plus à réagir alors les seuls moments où j’étais bien c’était dans la louange et l’adoration. Et comme David souvent je disait au Seigneur qu’il n’avait qu’une parole à  prononcer pour que ma souffrance s’arrête, mais il ne le faisait pas, je n’avais pas intégré ma conversion, bien sûr il m’a donné beaucoup de signes, mais juste pour que je continue à croire en lui, parce qu’il voulait m’amener à autre chose, il voulait petit à petit changer mes pensées, me rendre responsable de ma vie, ôter la culpabilité qui était en moi, me redonner la force de me battre, parce que quand on est dans la fosse comme ça, on est enténébrés, incapables de s’en sortir tout seul, et ça été mon nouveau combat, laisser le Seigneur agir, se battre pour moi, et ne plus gaspiller les pauvres forces que j’avais pour un combat perdu d’avancen je ne cherche plus à connaitre les causes, ni à rechercher un responsable, ça ne sert à rien, mais je sais maintenant que le Seigneur ne me lâchera jamais et que je n’aurais plus à vivre le texte de ce psaume, parce que maintenant, je peux prévenir un état de stress, de fatigue, je ne me laisse plus dominer par des pensées qui me diraient que c’est comme ca, que je ne peux rien faire, je dis non, je prie, je ne doute plus, le Seigneur m’a relevé plusieurs fois depuis ma conversion, car le diable est rusé, et il essaye tant et tant que si on est pas assez armé, il réussit, parce que c’est long, parce que le Seigneur use de beaucoup de patience pour remettre un être humain debout, parce que reconstruire un homme, une femme, c’est un travail d’amour, parce que notre être est fait de beaucoup de choses, d’émotions, de réflexions, d’actions, et que c’est une alchimie qui doit être dosée parfaitement, et que seul D. connait le secret caractéristique à chacun d’entre nous.
J’ai écrit ce texte, vraiment sans penser que je parlerais de choses aussi intimes, j’essaie toujorus de donner un encouragement, et en fait, ce psaume n’a pas de fin heureuse comme en général, ils en ont, mais il a une fin heureuse, parce qu’il traduit l’assurance de David à savoir que le Seigneur a tout entre ses mains, qu’il n’attend que sa réponse, à aucun moment il ne doute de sa libération, il doit passer par une épreuve terrible c’est vrai, mais à il sait que D. va répondre et c’est cela que j’aimerais retenir, D. répond toujours, il permet des circonstances qu’on juge quelque fois insupportables mais il donne la force, et surtout il désire que nous réfléchissions, que nous en tirions des conséquences heureurses sur notre vie, nous savons que si nous nous retrouvons dans la fosse, plusieurs fois, il sera toujours là pour nous en sortir, mais son but va au delà de celà, il désire nous imprimer son essence divine afin de définir avec nous les objectifs que nous avons pour notre vie, afin de nous révéler notre véritable personnalité, de jouir de sa présence, parce que quand il a chassé les ténèbres et qu’il met en lumière, quand tout devient transparent devant lui, alors il redonne d’espoir d’une vie nouvelle et pleine.

Corinne

Introduction à Job

27 septembre, 2010

la première lecture de cette semaine est tirée par le livre de Giobbe…je ne connais pas l’ auteur de ce commentaire, mais cette introduction semble bon, du site:

http://www.lueur.org/bible/commentaire/annotee-neuchatel/introduction/job.html

Commentaires Bibliques

La Bible Annotée Neuchâtel

Introduction à Job

I – Contenu du livre
Le livre de Job se divise en trois parties de fort inégales longueurs. La première, le prologue (chapitres 1 et 2), expose la situation et met le lecteur à même de comprendre les discours qui vont suivre : Job, que Dieu lui-même déclare parfaitement juste, est accusé par Satan de ne l’être que par intérêt ; Dieu autorise Satan à mettre son serviteur à l’épreuve. Une première série de maux n’ayant pu ébranler la piété de Job, Satan est autorisé à le frapper dans sa santé. Mais Job demeure fidèle à son Dieu.
Trois amis, qui viennent le consoler, sont tellement saisis par le spectacle qui s’offre à leurs yeux, qu’ils gardent pour eux leurs pensées ; la droiture de Job leur est suspecte, mais ils ne veulent pas le dire pour ne pas ajouter l’affliction à l’affligé. Au bout de sept jours, Job éclate en lamentations (chapitre 3), ce qui oblige les amis à parler. Ainsi s’engage un entretien qui remplit les vingt-trois chapitres suivants (4 à 21). Trois fois les amis prennent la parole, accusant Job toujours plus expressément d’avoir commis des péchés exceptionnels comme les maux dont il est frappé. Job répond à chacun d’eux et n’arrive pas à se sentir coupable. Au troisième tour, le dernier des amis renonce à prendre la parole ; Job répond à Bildad (chapitre 26), puis, ses interlocuteurs restant muets, il constate sa victoire et termine en traçant le tableau de sa piété et de son ancienne grandeur (chapitres 27 à 31). Alors surgit un nouveau personnage, le jeune Elihu, qui ne s’est pas permis de prendre la parole jusqu’à ce que les personnage, plus âgés eussent achevé de parler (23.4-16), et qui soutient une thèse qui n’avait pas encore été mise en avant : les justes eux-mêmes sont appelés à souffrir pour être préservés de l’orgueil (chapitres 32 à 37). Puis Dieu prend la parole. Sans daigner se justifier, il expose la supériorité de sa puissance et de sa sagesse. Dès l’abord, Job se déclare vaincu (39.36-38) ; enfin, après un dernier discours de l’Eternel, il s’humilie complètement (42.1-6). Jusqu’ici s’étend la seconde partie du livre, tout entière en vers et ne renfermant que des discours.
Avec 42.7, commence la troisième partie, l’épilogue, qui est en prose, comme le prologue. Dieu condamne les trois amis et rend à Job famille et prospérité.

II – Caractère du livre
Le livre de Job est admirable à tous les points de vue. Le poème est composé avec un art infini. Nous disons le poème. Il est vrai que le génie sémitique ne connaît pas la fiction pure ; la tradition avait conservé le souvenir d’un homme du nom de Job, célèbre par sa piété et ses malheurs (Ezéchiel 14.14,20). Mais c’est là tout ce que nous savons de ce personnage. Tout le surplus dans notre livre est la mise en oeuvre poétique de ce fond traditionnel.
Les scribes qui ont formé le Canon de l’Ancien Testament ont bien senti la chose, puisqu’ils n’ont placé notre livre ni dans la Loi, ni dans les Prophètes (ces derniers comprenant aussi les livres historiques), mais dans les Ecrits (Ketoubim), c’est-à-dire les livres qu’on ne pouvait ranger dans les catégories précédentes.
Le caractère poétique de ce livre ne ressort pas seulement du style et de la symétrie des discours ; il se montre aussi dans le prologue et l’épilogue ; la scène qui se passe dans le ciel, évidemment fictive dans sa forme, quoiqu’elle n’en corresponde pas moins à une réalité super-sensible, la régularité avec laquelle les catastrophes fondent sur Job, la correspondance entre les nombres du dernier chapitre et ceux du premier, en sont des indices suffisants. L’art se voit aussi dans la manière dont le seul vrai motif des maux dont Job est frappé coup sur coup, reste caché, tant à lui-même qu’à ses amis. Les descriptions sont des chefs-d’oeuvre, ainsi celles des mines (chapitre 28), de l’âne sauvage, du cheval (chapitre 29), de l’hippopotame, du crocodile (chapitres 40 et 41).
Quel est l’enseignement qui ressort du livre de Job ? Car c’est un poème didactique, c’est-à-dire renfermant une instruction. Ce n’est pas de la souffrance en général qu’il s’agit, mais de la souffrance, en apparence imméritée, du juste. Job est déclaré juste dès le commencement ; Dieu l’appelle son serviteur et le signale à l’attention de Satan comme faisant honneur à son Dieu. Les accusations des amis tombent à faux ; ils représentent la théorie, admise couramment et encore trop répandue aujourd’hui, d’après laquelle toute souffrance quelconque est une punition et prouve chez le malheureux l’existence d’un péché particulier (Jean 9.2). Certes il y a des maux qui sont des châtiments ; la Bible en fournit assez d’exemples. Mais cela n’explique pas tous les cas. Il est des afflictions qui atteignent le juste sans qu’on puisse trouver dans sa conduite des fautes qui en soient la cause directe. Ce sont ces cas-là que notre livre veut expliquer.
Aussi Dieu blâme-t-il les amis, et à la fin du livre Job est-il invité à intercéder pour eux (42.7-9). Et si Dieu adresse des reproches à Job, ils ne portent pas sur les affirmations réitérées de son innocence, mais bien sur les jugements inconsidérés que, exaspéré par les accusations téméraires de ses amis, il s’est permis à l’endroit du gouvernement divin du monde.
Ce qui montre que le poète approuve le témoignage que Job se rend à lui-même, c’est la manière dont il présente la fin de l’entretien : dans la troisième passe d’armes le second ami, Bildad, ne prononce qu’un très petit discours assez insignifiant, (25.2-6) ; et le troisième se tait, apparemment parce qu’il n’a plus rien à dire (23.3).
On s’est étonné parfois de ce que le livre se termine par une récompense purement terrestre : pour toute réparation Job recouvre la santé, obtient des richesses au double et devient de nouveau père d’une nombreuse et belle famille. L’auteur savait aussi bien que nous que la naissance d’un enfant ne fait pas oublier ceux qui ont été repris. Mais, vivant sous l’ancienne alliance, il a voulu dire simplement que Dieu dans cette lutte a donné raison à son serviteur, et que, malgré ses intempérances de langage, l’épreuve est terminée à l’honneur de Dieu et de Job lui-même. Nous savons, nous chrétiens, que la vie future sera la compensation des maux de cette terre ; mais nous le savons par Jésus-Christ qui a mis en évidence la vie et l’immortalité en détruisant la mort (2 Timothée 1.10), et qui est devenu par sa résurrection les prémices de ceux qui sont morts (1 Corinthiens 15.20). Job ne pouvait compter sur cette vie bienheureuse qui ne lui avait pas encore été révélée (Job 14.12 ; 16.22 ; 17.13-16). Le célèbre passage 19.25-27 montre le plus haut point jusqu’auquel peut s’élever la foi, même sans la révélation de la vie future, par la simple connaissance que l’homme naturel peut avoir du caractère de Dieu (Romains 1.19-20). Ainsi l’épilogue ne donne pas la solution absolument définitive, qui dépassait la mesure de lumière accordée à l’époque de Job. Il fait seulement constater qu’il y a une solution provisoire. Comparez Psaumes 116.2-6.

III – L’époque et l’auteur
Nous ne savons rien de l’auteur du livre de Job, ni du temps dans lequel cet ouvrage a été composé ; nous en sommes réduits sur ces deux points à des suppositions. On a remarqué depuis longtemps que l’écrivain évite toute allusion à l’histoire d’Israël et à la législation mosaïque ; le nom même de Jéhova, l’Eternel, le Dieu d’Israël, n’est pas mis dans la bouche de Job et de ses amis, sauf une fois, comme par inadvertance (12.9). Pour désigner Dieu, ils se servent presque toujours du nom d’Eloah, qui se trouve rarement dans les autres livres de la Bible. Ce sont là des traits fort extraordinaires chez un écrivain juif ; ils dénotent une intention. L’auteur a voulu évidemment dégager le sujet qu’il allait traiter de tout caractère national et lui donner une portée universelle, humanitaire.
On a pensé à l’époque de Moïse. « Une foule de traits, dit Renan, qui au reste ne partage pas cette manière de voir, dénotent une connaissance parfaite de l’Egypte, où l’auteur semble avoir voyagé. La description du crocodile et de l’hippopotame est d’une telle vivacité, qu’on est porté à y voir un reflet direct de l’épouvante que l’auteur éprouva devant ces monstres. Il est question ailleurs des pyramides, du papyrus, des barques de jonc, etc. »1
Mais comment, admettre chez un fidèle cette ignorance évidemment intentionnelle des institutions théocratiques, à l’époque même de leur promulgation ? Puis la connaissance approfondie que l’auteur possède de tous les domaines de la vie civile, politique, industrielle, conduit-elle à songer à un temps où les Israélites étaient des nomades ? Ce n’est ni en Egypte, ni dans le désert, ni pendant la conquête de Canaan, ni sous les Juges, qu’on se représente en Israël un homme capable de composer une oeuvre littéraire aussi profonde et aussi parfaite. Indiquons aussi, avec M. F. Godet, comme militant contre l’époque de Moïse, « l’absence des archaïsmes qui distinguent les livres du Pentateuque et qui en font un corps à part dans l’ensemble de la littérature hébraïque, et le développement très considérable de la réflexion philosophique que suppose un pareil écrit. Le livre de Job n’est rien moins qu’un traité de théodicée (justification du gouvernement divin). L’être incriminé, en réalité, ce n’est pas Job c’est Dieu. Ce qui est en cause, ce n’est pas seulement la vertu de Job c’est en même temps, et encore plus, la justice divine. Il s’agit dans ce livre de rechercher comment cette perfection peut se concilier avec le sort de l’affligé innocent. Or, de pareilles questions n’ont pas pu se traiter à toute heure. » 2
On s’est jeté dans un autre extrême : on a pensé à l’époque de l’exil. Ce seraient la captivité de Babylone et les souffrances du peuple élu qui auraient inspiré le poète. Tandis que l’auteur d’Esaïe chapitres 40 à 6 relevait les courages abattus par les magnifiques promesses messianiques que nous connaissons, un poète, inspiré lui aussi, creusait dans la solitude le problème de la souffrance. Sans doute, l’exil était une punition méritée ; ce châtiment était annoncé d’avance par les prophètes ; il était inévitable. Mais un noyau pieux, innocent, pur, subissait cette honte avec la majorité coupable. Et que de dénis de justice, d’extorsions, de haines ! Le pays était possédé par des étrangers (15.19) ; l’impie et le violent triomphaient. En méditant sur cette situation, le poète voyait son horizon s’élargir : ce n’était plus la souffrance d’un peuple particulier qui le faisait songer ; il étudiait désormais le problème de la souffrance du juste en général. Ne trouve-t-on pas, dans plusieurs passages des discours, des traces de cette préoccupation ? Les interlocuteurs, Job en particulier, semblent par moments oublier leur individualité ; ainsi 9.25, où Job dit n’avoir pas vu le bonheur, tandis que nous savons qu’il a joui de la plus grande prospérité. A plusieurs reprises des pluriels inattendus donnent à penser que Job d’un côté, les amis de l’autre, ne sont que les représentants de certaines catégories de personnes (18.2-3 ; 19.11). « Job, dit Châteaubriand dans le Génie du Christianisme, est la figure de l’humanité souffrante, et l’écrivain inspiré a trouvé des soupirs pour exprimer tous les maux partagés entre la race humaine. » Ce caractère universel ferait de Job un type, imparfait sans doute, et cependant réel, de Jésus-Christ. Le Sauveur, bien plus juste encore que le héros de notre livre, souffre comme représentant de l’humanité. Comme Job, il subit les accusations de ses contemporains aveuglés par les préjugés (Esaïe 53.3-4) ; comme lui, il intercède pour ceux qui l’ont abreuvé d’injures.
Nous avons tenu à donner libre parole à l’opinion qui, aujourd’hui, paraît la plus répandue parmi les théologiens. Mais, pour plusieurs raisons, il nous est impossible de nous y ranger.
1°) Nous accordons volontiers que, si le livre de Job avait été bien compris des contemporains du Messie, ils se seraient plus facilement réconciliés avec l’idée d’un roi souffrant et battu de Dieu. Mais les souffrances de Job diffèrent absolument de celles du Messie, elles n’ont rien d’expiatoire. Il suffit de lire le chapitre 53 d’Esaïe pour sentir la différence entre ces deux espèces de souffrances.
2°) Au temps de la captivité, le noyau fidèle du peuple était bien loin de lever orgueilleusement la tête en affirmant son innocence ; qu’on lise les confessions de péché d’Esdras et de Néhémie, et celle de Daniel (chapitre 9). Rien ne ressemble moins au langage hautain de Job.
3°) Et qui, dans l’opinion qui nous occupe, devraient représenter les amis de Job ? On ne pourrait y voir que les représentants des peuples païens, qui accablaient, les Juifs captifs de leurs mépris. Mais comment accepter cette explication plus que forcée ? Car le monothéisme des amis de Job et leur idée élevée de la justice parfaite de Dieu est précisément l’opposé du paganisme, c’est cette idée même qui les fait tomber dans la faute dont ils se rendent coupables envers Job.
4°) Au temps de l’exil, les liaisons intellectuelles d’Israël n’étaient plus avec les Fils de l’Orient et les Thémanites, mais bien avec la Perse, puis avec la Grèce. « On chercherait vainement, dit Renan, dans le judaïsme sévère de cette époque une place pour une oeuvre aussi franche d’allure, remplie d’un parfum aussi fort de la vie nomade, et supposant une aussi grande largeur d’esprit. Les hardies apostrophes et les protestations énergiques de Job auraient passé, aux yeux des contemporains d’Esdras et de Néhémie, pour des blasphèmes…La langue enfin du livre de Job a une fermeté, une beauté qu’on chercherait vainement dans les écrits d’un âge où la langue hébraïque n’était plus parlée, au moins dans sa pureté, et était devenue le partage des scribes et des lettrés. »3 Puis Renan passe à développer la pensée qu’à ses yeux Jérémie 20.14 et suivants, cite Job 3.3 et suivants, et 10.18. Pour ce qui est des passages cités plus haut (15.19 ; 9.25), nous renvoyons, pour la fixation de leur sens et de leur portée, à nos notes.
N’y a-t-il donc pas, entre Moïse et les temps de l’exil, une époque où se peut comprendre la composition d’un écrit tel que celui qui nous occupe ?
« Sous l’influence du génie de Salomon s’était formée à sa cour une école de sagesse ou de philosophie morale. Tandis que les institutions lévitiques fonctionnaient régulièrement et que les ordonnances mosaïques imprimaient de plus en plus leur sceau à la vie populaire, les esprits d’élite, à la tête desquels se trouvait le monarque lui-même, sentaient le besoin de pénétrer plus avant dans la. connaissance des choses divines et humaines…Dans ce cercle on humanisait le judaïsme. N’est-ce point de là qu’est sorti ce monumental livre de Job, dans lequel la pensée sémitique paraît avoir pris en tous sens ses plus vastes proportions ?…L’ignorance même où nous sommes du nom de l’auteur ne se conçoit qu’à une époque où un tel génie se perdait au milieu d’une pléïade de sages, ses pairs, non moins distingués que lui, et était éclipsé par l’éclat du monarque qui surpassait tout ce qui l’entourait ? »4
On objecte que l’époque paisible et heureuse de Salomon n’était pas favorable à l’étude du problème de la souffrance et ne devait pas y conduire naturellement. Mais qui peut dire l’influence de la loi des contrastes ? Bien de plus sentimental que la littérature française de la fin du XVIIIme siècle. L’idylle a souvent fleuri dans les époques les plus tourmentées. Qu’est-ce qui empêche que, parmi les sages qui vivaient à la cour de Salomon et dont les entretiens faisaient le délassement intellectuel du monarque, les Héman, les Ethan, les Calcol, les Darda, l’énigme de la souffrance des justes n’ait été un jour soulevée ? Ce n’est pas seulement après l’exil qu’il a commencé à y avoir ici-bas des innocents souffrants, dont le sort pouvait provoquer les spéculations des penseurs.

IV – Intégrité du livre
Il nous reste à dire un mot de l’intégrité de notre livre. Plusieurs estiment que les discours d’Elihu (chapitres 32 à 37) troublent l’harmonie de ce magnifique poème, si artistement construit ; ce nouvel interlocuteur est inconnu ; il n’a pas figuré parmi les « amis » ; personne dans la suite ne tient compte de ce qu’il a dit. Job ne lui répond pas ; Dieu ne le mentionne ni en bien, ni en mal, quand il fait la part de chacun des acteurs de ce drame ; enfin, chose plus grave, que dit-il, après tout ? Les idées qu’il énonce ne sont pas neuves : Eliphaz déjà, dans son premier discours, a parlé dans le même sens (5.17). Les discours d’Elihu sont donc, dit-on, un essai de solution donné par un lecteur bénévole que l’absence d’explication, dans les discours de Dieu et dans l’épilogue, ne satisfaisait pas.
Nous estimons au contraire qu’Elihu énonce une pensée nouvelle et bien distincte de celles qu’avaient présentées les trois amis ; il n’approuve point ces derniers, mais il justifie Dieu autant qu’un homme pieux pouvait le faire sans connaître la scène céleste du prologue. Dans 5.17, Eliphaz proclame heureux celui que Dieu châtie, et il conseille à Job de ne pas mépriser la correction du Puissant. Le point de vue d’Elihu est tout autre.
Nous l’avons indiqué déjà dans le bref exposé que nous avons donné du contenu de notre livre : à côté de la souffrance-châtiment (les trois amis) et de la souffrance par solidarité (Eliphaz, dans 4.12-16, il y a la souffrance dispensée par amour, comme l’écharde envoyée à saint Paul pour le maintenir dans l’humilité malgré l’excellence de ses révéla tions (Elihu, 33.14-29). Il est vrai qu’il y a une quatrième espèce de souffrance encore, celle qui fournit à la créature l’occasion de donner raison à Dieu contre l’adversaire par la fidélité qu’elle déploie dans des maux mêmes qu’elle ne comprend pas. Mais c’était là le secret de Dieu et de l’auteur.5 Que Dieu approuve Elihu, c’est ce qui résulte du fait que Job n’est point appelé à intercéder en sa faveur. Mais qu’il y ait une vérité supérieure encore à celle qu’Elihu a proclamée, c’est ce que montre l’épilogue. Dieu ne fait pas connaître cette vérité-là par des paroles, comme s’il avait à se justifier ; il parle par des faits. Pour nous donc, les six chapitres qui reproduisent les discours d’Elihu sont une partie intégrante et essentielle du poème. D’ailleurs la jalousie extrême avec laquelle les Juifs gardaient les produits de leur littérature sacrée ne nous permet guère de nous représenter une pareille intercalation réussissant à jouir de la confiance de tous et s’introduisant sans protestation dans un poème excellent, qu’elle ne fait, dit-on, que de gâter.

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1Le livre de Job, 3e édition, page XXVI.
2Etudes bibliques, Ancien Testament, pages 2,15-216.
3Le livre de Job, page XXXI.
4F. Godet, Etudes bibliques, Ancien Testament, page 217 et suivantes. Voir un peu plus loin, page 219, une hypothèse relative à la détermination de l’auteur de notre livre.
« Quand donc, demanderons-nous, un pont si large a-t-il été jeté sur l’abîme qui séparait Israël des autres peuples, qu’à l’époque du glorieux règne du roi le moins hébreu de tous les rois juifs, alors que les vaisseaux de Salomon cinglaient de la mer Rouge aux rivages de Tharsis, et que ses marchands conduisaient leurs caravanes jusque, dans l’intérieur de l’Orient ? Quand le regard de l’Israélite s’est-il porté aussi loin jusqu’au moment de la captivité ? Quand a-t-il embrassé, avec autant d’espace, autant de connaissances dans tous les domaines de l’art et de la nature ? L’antique bénédiction, qui d’Abraham devait s’étendre sur toutes les nations, n’a jamais semblé plus près qu’alors de toucher à sa réalisation. » (J. Sandoz, Revue chrétienne, 1859, page 99.)
5« La souffrance est la suprême éducatrice de l’homme moral. Dieu fait plus que la permettre ; il la veut, il la dispense et la mesure suivant les besoins de ceux qu’il afflige. Il permet que le malheur atteigne l’homme pieux, même dans ses meilleurs moments, au milieu de ses plus sincères efforts vers la sainteté…Mais le but de Dieu n’est pas la souffrance pour elle-même. C’est la foi du juste qu’il faut éprouver…» (J. Sandoz, article cité, page 107.)

( PSAUME 130, 1-3) : Pape Benoît (audience 10 aoùt 2005)

9 septembre, 2010

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/audiences/2005/documents/hf_ben-xvi_aud_20050810_fr.html

( PSAUME 130, 1-3)

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 10 août 2005

Avoir confiance en Dieu comme l’enfant en sa mère
Lecture:  Ps 130, 1-3

1. Nous n’avons écouté que quelques paroles, une trentaine, de l’original en hébreu du Psaume 130. Et pourtant, il s’agit de paroles intenses qui développent un thème cher à toute la littérature religieuse:  l’enfance spirituelle. Cela nous fait spontanément penser à sainte Thérèse de Lisieux, à sa « petite voie », à son désir de « demeurer petite » pour « être entre les bras de Jésus » (cf. Manuscrit « C », 2r°-3v°:  Oeuvres complètes, Cité du Vatican 1997, pp. 235-236).

Au centre du Psaume, en effet, se découpe l’image d’une mère avec son enfant, signe de l’amour tendre et maternel de Dieu, comme l’avait déjà exprimé le prophète Osée:  « Quand Israël était jeune, je l’aimai [...] Je les menais avec des attaches humaines, avec des liens d’amour; j’étais pour eux comme ceux qui soulèvent un nourrisson tout contre leur joue; je m’inclinais vers lui et le faisais manger » (Os 11, 1.4).

2. Le Psaume s’ouvre par la description d’un comportement contraire à celui de l’enfance, qui est consciente de sa fragilité, mais qui est confiante en l’aide d’autrui. Le Psaume met en scène au contraire le coeur fier, l’orgueil du regard, la « grandeur et les prodiges » (cf. Ps 130, 1). C’est la représentation de la personne orgueilleuse, qui est décrite à travers des termes hébreux qui indiquent l’ »arrogance » et l’ »exaltation », l’attitude arrogante de celui qui regarde les autres avec un sentiment de supériorité, les considérant inférieurs à lui.

La grande tentation de l’orgueilleux, qui veut être comme Dieu, arbitre du bien et du mal (cf. Gn 3, 5), est fortement repoussée par l’orant, qui opte pour la confiance humble et spontanée dans l’unique Seigneur.

3. On passe ainsi à l’image inoubliable de l’enfant et de la mère. Le texte original hébreu ne parle pas d’un nouveau-né, mais d’un « petit enfant » (Ps 130, 2). Or, on sait que dans l’antiquité, au Proche-Orient, le sevrage se situait officiellement aux alentours des trois ans, et était célébré par une fête (cf. Gn 21, 8; 1 S 1, 20-23; 2 M 7, 27).

L’enfant, auquel le Psalmiste fait référence, est lié à la Mère par un rapport désormais plus personnel et intime et non pas par le simple contact physique et la nécessité de se nourrir. Il s’agit d’un lien plus conscient, même s’il est toujours immédiat et spontané. Telle est la parabole idéale de la véritable « enfance » de l’esprit, qui s’abandonne à Dieu non pas de façon aveugle et automatique, mais sereine et responsable.

4. La profession de foi de l’orant s’étend alors à toute la communauté; « Mets ton espoir, Israël, en Yahvé, dès maintenant et à jamais! » (Ps 130, 3). L’espérance naît à présent dans tout le peuple, qui reçoit de Dieu sécurité, vie et paix, et se prolonge du présent vers l’avenir, « dès maintenant et à jamais! ».

Il est facile de continuer la prière en reprenant d’autres voix présentes dans le Psautier, inspirées par la même confiance en Dieu:  « Sur toi je fus jeté au sortir des entrailles dès le ventre de ma mère, mon Dieu c’est toi » (Ps 21, 11). « Si mon père et ma mère m’abandonnent, Yahvé m’accueillera » (Ps 26, 10). « Car c’est toi mon espoir, Seigneur, Yahvé, ma foi dès ma jeunesse. Sur toi j’ai mon appui dès le sein, toi ma part dès les entrailles de ma mère » (Ps 70, 5-6).

5. A l’humble confiance s’oppose, comme on l’a vu, l’orgueil. Un écrivain chrétien du IV-V siècle, Jean Cassien, met en garde les fidèles contre la gravité de ce péché, qui « détruit toutes les vertus et ne menace pas seulement les médiocres et les faibles, mais surtout ceux qui sont arrivés au sommet en utilisant leurs forces ». Il poursuit:  « Voilà la raison pour laquelle le bienheureux  David  préserve avec tant de circonspection son coeur jusqu’à oser proclamer devant Celui auquel n’échappait certainement pas les secrets de sa conscience:  « Seigneur, que mon coeur ne s’enorgueillisse pas et que mon regard ne s’élève pas avec supériorité; je ne recherche pas de grandes choses, au-delà de mes forces »… Toutefois, bien conscient de la difficulté, même pour les hommes parfaits, de préserver leur coeur, il ne prétend pas s’appuyer sur ses seules capacités, mais supplie par des prières le Seigneur, de l’aider à échapper aux dards de l’ennemi et à ne pas être blessé:  « Que le pied des superbes ne m’atteigne » (Ps 35, 12) » (Le istituzioni cenobitiche [Des instituts des cénobites], XII, 6, Abbaye de Praglia, Bresseo di Teolo, Padova 1989, p. 289).

De même, un ancien anonyme des Pères du désert nous a transmis cette déclaration, qui fait écho au Psaume 130:  « Je n’ai jamais dépassé mon rang pour marcher plus haut, et je ne me suis jamais troublé lorsque j’ai été humilié, car ma pensée tout entière était occupée par cela:  prier le Seigneur de me dévêtir de l’homme ancien » (I Padri del deserto. Detti, Roma 1980, p. 287).

Commentaire de Gn 18

2 août, 2010

du site:

http://www.bible-service.net/site/506.html

(1er lecture du dimanche 25 juillet) le texte biblique sur:

http://www.bible-service.net/site/505.html

Commentaire de Gn 18

Les Églises d’Orient ont donné à Gn 18 le titre de  »Philoxénie d’Abraham », autrement dit l’amour de l’étranger. C’est bien d’amour qu’il s’agit lorsqu’Abraham prend soin du corps de ses hôtes – Dieu sans qu’il le sache – et lorsque, presque au même moment, dans le corps de Sara s’annonce l’enfant inespéré…

Le récit de Gn 18, 1-15, disent les historiens, fut composé en plusieurs étapes. Dans une version ancienne, l’intrigue a du porter sur l’hospitalité du patriarche. Mais le texte actuel, mis en forme au 6e ou 5e av. J.-C., pendant ou après l’exil, est devenue une scène d’Annonciation.

Quand Dieu prend corps
 » Je vais faire de toi une grande nation  » (Gn 12, 2), la promesse du Seigneur à Abram devait se jouer d’un obstacle, une douleur : la stérilité de Saraï. Longuement, le récit a exploré diverses pistes : l’héritier sera-t-il Lot, Ismaël ou le fidèle intendant ? Il a navigué au milieu des dangers : Saraï chez Pharaon, Lot préférant la richesse de Sodome, Agar servante-maîtresse… Puis le Seigneur a scellé son alliance avec Abram : nouveaux noms (Abraham, Sara), nouveau rite (la circoncision). Alors seulement, quand ne reste plus que la longue attente, Dieu prend corps et apparaît.

Le corps donné à Dieu par les peintres d’icônes est celui… des anges ! Andreï Roublev, au début du 15e siècle, en a figuré trois, aux couleurs transparentes, évocation douce et lumineuse de la Trinité. Cette splendeur ne doit pas masquer la lettre du récit biblique où c’est incognito, comme de simples  »hommes », que se présente le Seigneur. Seul le lecteur, dès le début, est informé de leur identité. L’un des ressorts de l’intrigue est donc la question : Abraham va-t-il reconnaître ses visiteurs et comment ? Or Dieu se contente d’acquiescer au vieillard qui se démène (d’après Gn 17, 24, il a 99 ans !). Il le laisse préparer un repas et – cas unique dans la Bible – il mange ce qui lui est offert avec tant d’humanité.

Le jour et la nuit
Lorsqu’enfin le Seigneur parle, c’est pour s’inquiéter de Sara. À moins que la question soit de pure forme, le lecteur s’étonne, habitué à considérer Dieu comme omniscient : d’ailleurs celui-ci n’ignore pas le nom et la stérilité de Sara ! Le ressort de l’intrigue se déplace : Abraham n’a pas reconnu Dieu, mais Sara, comment va-t-elle réagir devant ces gens qui la connaissent si bien et qui promettent l’inouï ? Peu à peu, un dialogue s’instaure, aux modalités complexes : rire intérieur de la femme, mais perçu à l’extérieur (!), question par Abraham interposé ( »Pourquoi ce rire de Sara ?… »), promesse réaffirmée, dialogue resserré du Seigneur et de Sara qui émerge enfin, tremblante, au statut de partenaire, dans une relation  »je-tu » :  »Si, tu as ri ». Elle est dans la tente, mais c’est comme si Dieu la tirait hors de l’ombre de son mari, en plein soleil. Elle existe. Elle va donner le jour.

Sans se faire reconnaître, le Seigneur a permis à Abraham de montrer beaucoup d’amour et Sara, qui se dit  »usée », est rendue capable d’en déployer davantage. Le corps d’Isaac s’annonce, fruit de la promesse divine, fruit aussi d’un amour humain au-delà de l’acte d’amour.

L’histoire est belle. Trop ? Elle se détache sur fond d’effondrements :  »un hurlement est monté de Sodome et de Gomorrhe » (Gn 18, 20) La  »philoxénie » d’Abraham contre la  »xénophobie » des villes où Lot a choisi de prospérer. Ici, sous l’arbre, en plein jour, on lave les pieds des voyageurs et on leur prépare un repas (18, 1-8). Là, dans la ville, la nuit, on cherche à les violer en fracassant les portes (19, 1-10) : la violence se retourne alors sur les violents,  »pluie de soufre et de feu » et disparition de tout  »jusqu’à la flore » ( 19, 24-25).

Salve d’avenir
Dans la Bible, récits de vocation et récits d’annonciation sont des formes littéraires apparentées : dans une situation grave, le Seigneur – ou son messager – apparaît à son élu(e) et l’interpelle : celui-ci (celle-ci) prend peur ou résiste, puis, devant l’insistance divine, accepte la mission. La  »vocation » d’Abram, en Gn 12, 1-5, ne correspond qu’imparfaitement à ce schéma tant est concise la narration. Avec l’accueil, par Abraham, de l’autre-étranger et, par Sara, de l’autre-enfant (dépositaire de la mission de bénédiction universelle), elle se déploie. Et Isaïe, pendant l’exil, va souligner que c’est bien d’un homme et d’une femme, ensemble, que le peuple de Dieu est issu :  »regardez le rocher où je vous ai sculptés et le creux dans le puits dont je vous ai extraits, regardez Abraham votre père, Sara qui accoucha de vous… » (Is 51, 1-2).  »Devant l’effondrement des preuves, le poète répond par une salve d’avenir » disait René Char. L’histoire d’Abraham et de Sara est une salve d’avenir.

© Gérard BILLON. Article paru dans Le Monde la Bible n° 140  »Abraham, patriarche de trois religions » (Bayard-Presse, janv.-fév. 2002), p. 72

N.B. : sur ce récit célèbre, on méditera l’icône de Roublev. On relira aussi les 3 pages que Paul Beauchamp a consacrées à “ Abraham : la vie, la mort ” dans son ouvrage Cinquante Portraits Bibliques, Le Seuil 2000, p. 25-27

Pape Benoît: « Cantemus Domino : gloriose enim magnificatus est ».

23 juillet, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-24007?l=french

Message du Pâques de Benoît XVI

Texte intégral

ROME, Dimanche 4 avril 2010 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral du message de Pâques que Benoît XVI a transmis au monde, ce dimanche, à midi, depuis la loggia centrale de la Basilique Saint-Pierre, avant de donner à tous sa bénédiction urbi et orbi.

« Cantemus Domino : gloriose enim magnificatus est ».

« Chantons le Seigneur : il est vraiment ressuscité! » (Liturgie des Heures, Pâques, Office des Lectures, Ant. 1).

Chers frères et sœurs,

Je vous porte l’annonce de la Pâque avec ces paroles de la Liturgie, qui font écho à l’hymne très ancien de louange des hébreux après le passage de la Mer rouge. Le livre de l’Exode (cf. 15, 19-21) raconte que quand ils eurent traversé la mer à pied sec et qu’ils virent les égyptiens engloutis par les eaux, Myriam – la sœur de Moïse et d’Aaron – et les autres femmes entonnèrent en dansant ce chant d’exultation : « Chantons le Seigneur, / car il a fait éclater sa gloire, / il a jeté à l’eau cheval et cavalier. ». Partout dans le monde, les chrétiens répètent ce cantique au cours de la Vigile pascale, et une prière dite pour la circonstance en explique la signification, une prière que maintenant, dans la pleine lumière de la résurrection, nous faisons nôtre avec joie : « Maintenant encore, Seigneur, nous voyons resplendir tes merveilles d’autrefois : Alors que jadis tu manifestais ta puissance en délivrant un seul peuple de la poursuite des Égyptiens, tu assures désormais le salut de toutes les nations en les faisant renaître à travers les eaux du baptême ; fais que les hommes du monde entier deviennent des fils d’Abraham et accèdent à la dignité de peuple élu ».

L’Évangile nous a révélé l’accomplissement des anciennes prophéties : par sa mort et sa résurrection, Jésus Christ a libéré l’homme de l’esclavage radical, celui du péché, et lui a ouvert la route vers la Terre promise, le Royaume de Dieu, règne universel de justice, d’amour et de paix. Cet « exode » se réalise avant tout à l’intérieur de l’homme lui-même, et il consiste en une nouvelle naissance dans l’Esprit Saint, conséquence du Baptême que le Christ nous a précisément donné dans le mystère pascal. L’homme ancien laisse la place à l’homme nouveau ; en laissant derrière soi la vie d’avant, il est possible d’avancer dans une vie nouvelle (cf. Rm 6, 4). Mais l’ ‘exode’ spirituel est le principe d’une libération intégrale, susceptible de rénover l’homme dans toutes ses dimensions, personnelle et sociale.

Oui, frères, Pâques est le vrai salut de l’humanité ! Si le Christ – l’Agneau de Dieu – n’avait pas versé son Sang pour nous, nous n’aurions aucune espérance ; notre destin et celui du monde entier serait inévitablement la mort. Mais la Pâque a renversé la perspective : la Résurrection du Christ est une nouvelle création, à la manière d’une greffe qui peut régénérer l’ensemble de la planète. C’est un événement qui a modifié l’orientation profonde de l’histoire, la faisant basculer une fois pour toutes du côté du bien, de la vie, du pardon. Nous sommes libres, nous sommes sauvés ! Voilà pourquoi du plus profond de nous-mêmes nous exultons : « Chantons le Seigneur : il est vraiment ressuscité! ».

Le peuple chrétien, sorti des eaux du Baptême, est envoyé partout dans le monde pour témoigner de ce salut, pour porter à tous le fruit de la Pâque, qui consiste en une vie nouvelle, libérée du péché et rendue à sa beauté originelle, à sa bonté et à sa vérité. Continuellement, pendant deux mille ans, les chrétiens – spécialement les saints – ont fécondé l’histoire par l’expérience vivante de la Pâque. L’Église est le peuple de l’exode, parce qu’elle vit constamment le mystère pascal et répand sa puissance de renouvellement à tout moment et en tout lieu. Aujourd’hui encore, l’humanité a besoin d’un ‘exode’, non pas seulement d’ajustements superficiels, mais d’une conversion spirituelle et morale. Elle a besoin du salut de l’Évangile, pour sortir d’une crise qui est profonde et qui, comme telle, réclame des changements profonds, à commencer par celui de la conscience.

Au Seigneur Jésus, je demande qu’au Moyen Orient, et en particulier sur la Terre sanctifiée par sa mort et sa résurrection, les Peuples accomplissent un ‘exode’ vrai et définitif qui les fasse passer de la guerre et de la violence à la paix et à la concorde. Aux communautés chrétiennes qui, spécialement en Iraq, connaissent épreuves et souffrances, que le Ressuscité redise la parole pleine de consolation et d’encouragement qu’il adressa aux Apôtres dans le Cénacle : « La paix soit avec vous ! » ( Jn 20, 21).

Pour les pays latino-américains et des Caraïbes qui font l’expérience d’une dangereuse recrudescence des crimes liés au trafic de la drogue, que la Pâque du Christ marque la victoire de la convivialité pacifique et du respect pour le bien commun. Que la population bien-aimée d’Haïti, dévastée par l’effroyable tragédie du tremblement de terre, accomplisse son ‘exode’ du deuil et de la désespérance vers une nouvelle espérance, soutenue par la communauté internationale. Que les très chers citoyens du Chili, accablés par une autre grave catastrophe, mais soutenus par la foi, s’attachent avec ténacité à l’œuvre de reconstruction.

Dans la force de Jésus ressuscité, qu’il soit mis fin en Afrique aux conflits qui continuent à provoquer destructions et souffrances et que l’on parvienne à cette paix et à cette réconciliation qui sont des garanties de développement. Je confie en particulier au Seigneur l’avenir de la République démocratique du Congo, de la Guinée et du Nigéria.

Que le Ressuscité soutienne les chrétiens qui, à cause de leur foi, souffrent la persécution et même la mort, comme au Pakistan. Aux pays affectés par le terrorisme et par les discriminations sociales ou religieuses, qu’Il accorde la force d’ouvrir des chemins de dialogue et de coexistence sereine. Aux responsables de toutes les Nations, que la Pâque du Christ porte lumière et force, pour que l’activité économique et financière soit finalement fondée sur des critères de vérité, de justice et d’entraide fraternelle. Que la puissance salvifique de la résurrection du Christ remplisse l’humanité entière, afin que celle-ci dépasse les multiples et tragiques expressions d’une ‘culture de mort’ qui tend à se répandre, pour édifier un avenir d’amour et de vérité, dans lequel chaque vie humaine soit respectée et accueillie.

Chers frères et sœurs ! La Pâque n’agit pas de façon magique. Tout comme au-delà de la Mer rouge les hébreux trouvèrent le désert, l’Église, après la Résurrection, rencontre toujours l’histoire avec ses joies et ses espérances, ses douleurs et ses angoisses. Et cependant, cette histoire est transformée, elle est marquée par une alliance nouvelle et éternelle, elle est réellement ouverte à un avenir. C’est pourquoi, sauvés en espérance, nous poursuivons notre pèlerinage en portant dans le cœur le cantique ancien et toujours nouveau : « Chantons le Seigneur : il est vraiment ressuscité! ».

Traduction distribuée par le Bureau de presse du Saint-Siège

Ps 85: Prière à Dieu dans la souffrance

22 juillet, 2010

du site:

http://www.zenit.org/article-3949?l=french

Ps 85: Prière à Dieu dans la souffrance

Audience du 23 octobre 2002

CITE DU VATICAN, Mercredi 30 octobre 2002 (ZENIT.org) « Prière à Dieu dans la souffrance »: L’Osservatore Romano en français du 29 octobre publie sous ce titre la traduction de l’italien de la catéchèse de Jean-Paul II sur le Psaume 85, lors de l’audience générale du 23 octobre.

- Allocution de Jean-Paul II -

1. Le Psaume 85, qui vient d’être proclamé et qui sera l’objet de notre réflexion, nous offre une définition suggestive de l’orant. Il se présente à Dieu avec ces paroles: je suis « ton serviteur » et le « fils de ta servante » (v. 16). L’expression peut, bien sûr, appartenir au langage du cérémonial de cour, mais elle était également utilisée pour désigner le serviteur adopté comme fils par le chef d’une famille ou d’une tribu. Sous cette lumière, le Psalmiste qui se définit également « ami » du Seigneur (cf. v. 2), sent qu’il est lié à Dieu par un lien non seulement d’obéissance, mais également de familiarité et de communion. C’est pourquoi sa supplique est entièrement imprégnée d’abandon confiant et d’espérance.

Suivons à présent cette prière que la Liturgie des Louanges nous propose au début d’une journée qui, on peut le présumer, comportera non seulement des engagement et des efforts, mais également des incompréhensions et des difficultés.

2. Le Psaume commence par un intense appel, que l’orant adresse au Seigneur, confiant dans son amour (cf. vv. 1-7). A la fin, il exprime à nouveau la certitude que le Seigneur est un « Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, plein d’amour et de vérité » (v. 15; cf. Ex 34, 6).

Ces affirmations de confiance réitérées et convaincues révèlent une foi intacte et pure, qui s’abandonne au « Seigneur [qui est] bonté, plein d’amour pour tous ceux qui t’appellent » (Ps 85, 5).
Au centre du Psaume s’élève un hymne, qui mêle des sentiments d’action de grâce et une profession de foi dans les œuvres de salut que Dieu accomplit devant les peuples (cf. vv. 8-13).

3. Contre toute tentation d’idolâtrie, l’orant proclame l’unicité absolue de Dieu (cf. v. 8). Puis est exprimée l’espérance audacieuse qu’un jour « tous les païens » adoreront le Dieu d’Israël (v. 9). Cette perspective merveilleuse trouve son accomplissement dans l’Eglise du Christ, car il a invité ses apôtres à faire des disciples de « toutes les nations » (Mt 28, 19). Personne ne peut offrir une pleine libération, si ce n’est le Seigneur dont tous dépendent comme créature et à qui on doit s’adresser dans une attitude d’adoration (cf. Ps 85, 9). En effet, Il manifeste dans l’univers et dans l’histoire ses œuvres admirables, qui témoignent de sa seigneurie absolue (cf. v. 10).

A ce point, le Psalmiste se réserve une place afin de se présenter à Dieu avec une requête intense et pure: « Enseigne-moi, Yahvé, tes voies, afin que je marche en ta vérité, rassemble mon cœur pour craindre ton nom » (v. 11). Cette prière de pouvoir connaître la volonté de Dieu est très belle, ainsi que cette invocation pour obtenir le don d’ »un cœur simple », semblable à celui d’un enfant qui, sans fausseté ni calculs, se confie pleinement au Père pour marcher sur la route de la vie.

4. C’est alors que naît sur les lèvres du fidèle la louange à Dieu miséricordieux, qui ne le laisse pas sombrer dans le désespoir et dans la mort, dans le mal et dans le péché (cf. vv. 12-13; Ps 15, 10-11).
Le Psaume 85 est un texte cher au judaïsme, qui l’a inséré dans la liturgie de l’une de ses fêtes les plus importantes, le Yôm Kippur ou jour de l’expiation. Le Livre de l’Apocalypse, à son tour, en a tiré un verset (cf. v. 9), le plaçant au sein de la glorieuse liturgie céleste à l’intérieur du « Cantique de Moïse et de l’Agneau »: « Tous les païens viendront t’adorer », et l’Apocalypse ajoute: « parce que tu as fait éclater tes vengeances » (Ap 15, 4).

Saint Augustin a consacré à notre Psaume un long commentaire passionné dans ses Commentaires sur les Psaumes, en le transformant en un chant du Christ et du chrétien. La traduction latine, dans le v. 2, conforme à la version grecque des Septante, utilise la version « saint », au lieu de « fidèle »: « Garde-moi, car je suis saint ». En réalité, seul le Christ est saint. Toutefois, selon le raisonnement de saint Augustin, le chrétien peut lui aussi appliquer ces paroles à sa propre personne: « Je suis saint, parce que tu m’as sanctifié; parce que j’ai reçu la sainteté, non parce que je l’avais: parce que tu me l’as donnée, non parce que je l’ai méritée ». Et donc « que tout chrétien, ou plutôt que tout le Corps du Christ, en butte à la tribulation, éprouvé par les secousses et les scandales sans nombre, crie au Seigneur: « Garde mon âme, parce que je suis saint! Sauve, ô mon Dieu, ton serviteur qui espère en toi ». C’est là un saint sans orgueil, puisqu’il espère en Dieu » (vol. II, Rome 1970, p. 1251).

5. Le saint chrétien s’ouvre à l’universalité de l’Eglise et prie avec le Psalmiste: « Tous les païens viendront t’adorer, Seigneur, et rendre gloire à ton nom » (Ps 85, 9). Augustin commente: « Toutes les nations ne sont en lui seul qu’une seule nation, c’est là l’unité. De même qu’on dit l’Eglise, on dit les Eglises, et que les Eglises ne forment qu’une Eglise, ainsi cette grande nation sera toutes les nations. Tout à l’heure, c’étaient des nations, des nations nombreuses, comment n’y a-t-il plus qu’une nation? Parce qu’il n’y a qu’une seule foi, qu’une seule espérance, qu’une seule charité, qu’un seul avenir. Et enfin pourquoi n’y aurait-il pas une seule nation, quand il n’y a qu’une seule patrie? Cette patrie, c’est le ciel; cette patrie, c’est Jérusalem. [...] Et cette nation s’étend de l’Orient à l’Occident, du Nord et de l’Océan dans toutes les quatre parties de l’univers entier » (ibid., p. 1269).

Sous cette lumière universelle, notre prière liturgique se transforme en un souffle de louange et en un chant de gloire au Seigneur, au nom de toutes les créatures.

L’Osservatore Romano

Jean Paul II: Psaume 84 : Notre salut est proche (2002)

12 juin, 2010

du site:

http://www.vatican.va/holy_father/john_paul_ii/audiences/2002/documents/hf_jp-ii_aud_20020925_fr.html

AUDIENCE GÉNÉRALE DE JEAN-PAUL II

Mercredi 25 septembre 2002 

Psaume 84 : Notre salut est proche

1. Le Psaume 84 que nous venons de proclamer est un chant joyeux et rempli d’espérance dans l’avenir du salut. Il reflète le moment exaltant du retour d’Israël sur la terre des pères après l’exil babylonien. La vie nationale recommence dans ce foyer bien-aimé, qui avait été éteint et détruit lors de la conquête de Jérusalem par les armées du roi Nabuchodonosor en 586 av. J.-C.

En effet, dans l’original hébreu du Psaume, on entend résonner de façon répétée le verbe shûb, qui indique le retour des déportés, mais qui signifie également un « retour » spirituel, c’est-à-dire la « conversion ». La renaissance ne concerne donc pas seulement la nation, mais également la communauté des fidèles, qui avaient ressenti l’exil comme une punition pour les péchés commis et voyaient à présent le retour dans leur patrie et la nouvelle liberté comme une bénédiction divine, due à la conversion qui avait eu lieu.

2. Le Psaume peut être suivi dans son déroulement selon deux étapes fondamentales. La première est rythmée par le thème du « retour », qui comprend toutes les interprétations que nous avons mentionnées.

On célèbre tout d’abord le retour physique d’Israël: « Yahvé…, tu fais revenir les captifs de Jacob » (v. 2); « Fais-nous revenir, Dieu de notre salut… Ne reviendras-tu pas nous vivifier? » (vv. 5-7). Il s’agit d’un don précieux de Dieu, qui se soucie de libérer ses fils de l’oppression et qui s’engage pour leur prospérité. « Tu aimes en effet tout ce qui existe… Mais tu épargnes tout, parce que tout est à toi, Maître, ami de la vie » (cf. Sg 11, 24-26).

Mais, à côté de ce « retour », qui réunit de façon concrète ceux qui sont dispersés, il y a un autre « retour » plus intérieur et spirituel. Le Psalmiste lui laisse une grande place, en lui attribuant une importance particulière, qui vaut non seulement pour l’antique Israël, mais pour les fidèles de tous les temps.

3. Le Seigneur agit de façon active dans ce « retour », révélant son amour en pardonnant l’iniquité de son peuple, en effaçant tous ses péchés, en retirant son emportement, en mettant fin à sa colère (cf. Ps 84, 3-4).

C’est précisément la libération du mal, le pardon des fautes, la purification des péchés qui créent le nouveau Peuple de Dieu. Cela est exprimé à travers une invocation, qui est également entrée dans la liturgie chrétienne: « Fais-nous voir, Yahvé, ton amour, que nous soit donné ton salut » (v. 8).

Mais à ce « retour » de Dieu qui pardonne doit correspondre le « retour », c’est-à-dire la conversion, de l’homme qui se repent. En effet, le Psaume déclare que la paix et le salut sont offerts à « qui revient à lui de tout son coeur » (v. 9). Celui qui se place de façon décidée sur la voie de la sainteté reçoit les dons de la joie, de la liberté et de la paix.

On sait que, souvent, les termes bibliques concernant le péché évoquent le fait de se tromper de route, de manquer l’objectif, de dévier du droit chemin. La conversion est précisément un « retour » sur la voie linéaire qui conduit à la maison du Père, qui nous attend pour nous embrasser, nous pardonner et nous rendre heureux (cf. Lc 15, 11-32).

4. Nous arrivons ainsi à la deuxième partie du Psaume (cf. Ps 84, 10-14), si chère à la tradition chrétienne. On y décrit un monde nouveau, dans lequel l’amour de Dieu et sa fidélité, comme s’il s’agissait de personnes, s’embrassent; de même, la justice et la paix s’embrassent elles aussi lorsqu’elles se rencontrent. La vérité germe comme lors d’un nouveau printemps et la justice, qui pour la Bible est également salut et sainteté, se présente dans le ciel pour entamer son chemin au milieu de l’humanité.

Toutes les vertus, auparavant chassées de la terre en raison du péché, rentrent à présent dans l’histoire et, en s’entrecroisant, dessinent la carte d’un monde de paix. Miséricorde, vérité, justice et paix deviennent comme les quatre points cardinaux de cette géographie de l’esprit. Isaïe chante lui aussi: « Cieux, épanchez-vous là-haut, et que les nuages déversent la justice, que la terre s’ouvre et produise le salut, qu’elle fasse germer en même temps la justice. C’est moi, Yahvé, qui ait créé cela » (Is 45, 8).

5. Les paroles du Psalmiste, déjà au II siècle avec saint Irénée de Lyon, ont été lues comme une annonce de l’ »engendrement du Christ par la Vierge » (Adversus haereses, III, 5, 1). La venue du Christ est, en effet, la source de la miséricorde, l’éclosion de la vérité, la floraison de la justice, la splendeur de la paix.

C’est pourquoi le Psaume, en particulier dans sa partie finale, est relu en liaison avec la nativité par la tradition chrétienne. Voilà comment l’interprète saint Augustin, dans l’un de ses discours pour Noël. Laissons-le conclure notre réflexion. «  »La vérité a germé de la terre »: le Christ, qui a dit: « Je suis la vérité » (Jn 14, 6) est né d’une Vierge. « Et des cieux se penche la justice »: celui qui croit en celui qui est né ne se justifie pas lui-même, mais est justifié par Dieu. « La vérité a germé de la terre »: car « le Verbe s’est fait chair » (Jn 1, 14). « Et des cieux se penche la justice »: car « tout don excellent, toute donation parfaite, vient d’en-haut » (Jc 1, 17). « La vérité a germé de la terre », c’est-à-dire qu’elle a pris corps de Marie. « Et des cieux se penche la justice »: car « Un homme ne peut rien recevoir, si cela ne lui a été donné du ciel » (Jn 3, 27) » (Discours, IV/1, Rome 1984, p. 11).

***

J’accueille cordialement les pèlerins francophones, en particulier les membres de la section aquitaine de l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale, l’Association «Science-Philosophie-Théologie» de Paris, ainsi que le groupe Saint-Vincent-de-Paul, de Canteleu. Que le Christ Sauveur féconde les efforts de tous les artisans de paix et qu’il les aide à rechercher sans se lasser le Royaume de Dieu et sa justice.
 

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