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HOMÉLIE POUR LE 18E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LA MULTIPLICATION DES PAINS : DES GESTES QUI PARLENT » TEXTES : ISAÏE 55, 1-3, ROMAINS 8, 35.37-39 ET MATHIEU 14,13-21.

1 août, 2020

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HOMÉLIE POUR LE 18E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LA MULTIPLICATION DES PAINS : DES GESTES QUI PARLENT »
TEXTES : ISAÏE 55, 1-3, ROMAINS 8, 35.37-39 ET MATHIEU 14,13-21.

Les derniers dimanches nous avons entendu de la part de Jésus des histoires, des paraboles avec dans chaque cas un message pour ceux et celles qui les écoutaient et aussi pour nous qui les écoutons de nouveau.
Aujourd’hui, l’évangile de saint Mathieu change de ton. Il ne s’agit plus de paraboles, d’histoires, mais de gestes au cours d’un événement : la multiplication des pains.

I – Des gestes qui sont des signes
Ces gestes ne sont pas anodins. Ils sont des signes à interpréter et à recevoir. Ils nous livrent comme les paraboles des messages. On dit parfois que les gestes parlent plus fort que les paroles. Dans l’Ancien Testament, les prophètes en ont utilisés pour faire passer le message de Dieu. Isaïe, par exemple, qui se promène dévêtu pendant trois ans (Is 20,1-6), une façon de dire que si Israël fait avec l’Égypte, il sera dépouillé, dépossédé de tout. Le prophète Jérémie porte un attelage de bœuf, un joug (Jérémie 27,1-22), signifiant ainsi la soumission au roi Nabuchodonosor. Le prophète Osée épouse une prostituée pour faire réagir le peuple de Dieu qui lui-même se prostitue en rendant un culte à des divinités étrangères (Osée 1,1-3).
Jésus a accompli lui aussi beaucoup de gestes interpellants comme le changement de l’eau en vin aux noces de Cana, la tempête apaisée sur le Lac de Galilée etc.
Je vous propose de revoir le récit de la multiplication des pains dans cette perspective. Permettez que je souligne quatre gestes de Jésus dans ce récit de la multiplication des pains en dégageant la signification qu’on peut leur donner. Comme je viens de le dire, ce sont des signes que Jésus nous donne pour nous faire comprendre un message.
II – Les quatre gestes à retenir dans le récit de la multiplication des pains
Le premier, c’est l’invitation de Jésus aux disciples « Donnez-leur vous-mêmes à manger ».
La situation est pourtant claire : c’est le temps d’aller faire l’épicerie pourrait-on dire. Le soir tombe, les gens ont faim et les villages ne sont pas loin. Et pourtant, Jésus répond à la préoccupation de ses disciples d’une façon surprenante. Ils les invitent à se mettre à l’œuvre. Jésus qui se fait notre nourriture est une nourriture qu’on partage. « Vous-mêmes donnez-leur à manger ». En d’autres mots, n’attendez pas le marché ou l’ouverture de l’épicerie. Vous avez avec vous en moi une nourriture spirituelle à partager.
Le deuxième geste nous met devant les yeux une quantité minime de nourriture : « cinq pains et deux poissons ».
Les pains et les poissons représentent l’action de Jésus. Jésus ne vient pas dans la splendeur. Il est présent dans la vie de tous les jours comme ces aliments simples que sont les pains et les poissons. Il est une nourriture accessible à toutes et à tous dans la pauvreté des moyens, dans la petitesse, dans la faiblesse. Sa mort sur la croix l’illustrera pour toutes les générations à venir.
Le troisième geste retenu est la réponse de Jésus : « Apportez-les moi ici …et levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction ».
Cette nourriture pauvre est remise entre les mains de Jésus, l’Envoyé de Dieu. Elle est confiée à l’amour de Dieu qui se manifeste en Jésus. Une pauvreté que Jésus transforme dans la prière en s’abandonnant avec confiance à la puissance de son Père vers qui il lève les yeux en rendant grâces comme nous le faisons chaque dimanche dans l’Eucharistie. On peut voir dans ce geste un symbole du sacrement de l’Eucharistie, car ce que Jésus fait ressemble à ce que le prêtre fait à chaque messe au moment de la consécration.
Le quatrième geste retenu est le geste de la distribution de la nourriture que Jésus donne aux disciples et que ceux-ci donnent à la foule. « Il les donna…et les disciples les donnèrent à la foule… Tous mangèrent à leur faim ».
Jésus exprime ici une confiance totale en la puissance de Dieu son Père et invite les disciples à faire de même. Le résultat de cet abandon c’est un miracle étonnant qui se manifeste dans une abondance de nourriture qui répond à la faim des personnes qui sont là, mais aussi à nos faims de toutes sortes. La nourriture que Jésus donne est une nourriture de vie éternelle, qui va au-delà de nos attentes.

III – Application à la vie chrétienne
Tous ces gestes tournent autour d’un même thème, celui de la nourriture. Le récit de saint Mathieu en nous racontant l’événement de la multiplication des pains nous ouvre sur une nourriture autre que la nourriture matérielle. Celle-ci est le signe de la nourriture spirituelle que Dieu offre en abondance comme le dit la première lecture. « Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas? […] Venez à moi! Écoutez, et vous vivrez ». Cette nourriture spirituelle dépasse ce qu’on attend de la nourriture matérielle. Elle remplit le cœur. Elle ne se perd pas, Elle se partage avec les autres. Il y en a toujours de disponible.
Cette nourriture spirituelle quelle est-elle? Pour l’instant, le récit de la multiplication des pains ne le dit pas. Mais, Jésus y reviendra plus tard et il expliquera que cette nourriture c’est lui-même qui se donne à nous par amour. « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. » (Jean 6, 51)

Conclusion
Cet événement de la multiplication des pains est un signe encore pour nous aujourd’hui. Devant les faims qui nous tenaillent, faim d’amour, faim de pardon, faim de bonheur, faim de Dieu etc., cet épisode de l’évangile nous invite à croire que si, comme Jésus, nous levons les yeux vers notre Père du ciel, ces faims seront comblées au-delà de nos espérances.
C’est ce que nous faisons à chaque Eucharistie en union les uns avec les autres et avec Jésus lui-même qui continue dans la gloire du ciel à intercéder pour ses disciples.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec