Archive pour juillet, 2020

HOMÉLIE POUR LE 17E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LE TRÉSOR ET LA PERLE »

24 juillet, 2020

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La perle précieuse

HOMÉLIE POUR LE 17E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LE TRÉSOR ET LA PERLE »
TEXTES : ROIS 3, 5.7-12, ROMAINS 8, 28-30 ET MATTHIEU 13,44-52.

En quelques lignes nous avons aujourd’hui un enseignement merveilleux concernant la rencontre avec Dieu dans notre vie, car le Royaume des cieux dont il est question c’est en réalité Dieu lui-même. Cette rencontre de Dieu est comparée ici à un trésor caché dans un champ et aussi à une perle de grande valeur que trouve un négociant de perles.

I – La parabole du trésor
Dans la première parabole, celle du trésor caché, on peut comprendre que Dieu se laisse découvrir souvent comme par hasard dans notre vie. Cela peut survenir au moment où on s’y attend le moins de façon imprévue même, à l’occasion d’un décès, d’une séparation, d’un coup de téléphone, d’une rencontre, que sais-je? Et alors, il se fait comme une lumière éclatante, surprenante même pour la personne intéressée. On parle alors d’une conversion qui surprend les proches et qui change la vie de la personne.
C’est ce qui est arrivé à un grand journaliste français, ami du pape Jean Paul II, André Frossard, qui raconte sa conversion dans une petit livre qui a eu un grand succès et dont le titre est « Dieu existe, je l’ai rencontré ». André Frossard raconte que c’est dans la vingtaine qu’il a découvert son trésor. Rien ne le préparait, semble-t-il, à cette découverte. Son père était secrétaire du parti communiste français. À la maison il n’était pas question de religion. Puis un jour qu’il attendait un de ses amis catholique, il est entré dans une église où il y avait l’adoration du Très Saint Sacrement. Et là s’est produit la rencontre avec Dieu qui est venu vers lui. Dieu s’est révélé à lui d’une manière si forte qu’en sortant de l’église, il dit à son ami, je suis catholique moi aussi maintenant. Je crois en Dieu. Dieu existe. Tout est là. André Frossard a découvert alors un trésor. Il ne s’en préoccupait pas, mais c’est Dieu lui-même qui est venu au- devant de lui, qui s’est révélé à lui.
Mais revenons à la parabole. Une fois le trésor découvert, qu’est-ce que fait celui qui l’a trouvé : il vend tout et achète le champ où il l’a trouvé. C’est sur cela que Jésus insiste. Dieu est un trésor qui fait pâlir tout le reste à côté de lui. La rencontre de Dieu demande qu’on engage tout ce qu’on a et même tout ce qu’on est. Ailleurs dans l’évangile, Jésus dit « Vous ne pouvez servir deux maîtres ». Hélas!, comme le remarque le cardinal Vingt-Trois, ancien archevêque de Paris, il arrive qu’on ne le fait pas toujours, on négocie, on y va à moitié…Et pourtant, le message de Jésus est clair : il faut se détacher de tout pour acquérir ce bien précieux comme le fait celui qui a trouvé le trésor, qui vend tout et achète le champ où il l’a trouvé.

II – La parabole de la perle
Dans la seconde parabole, il est encore question de la rencontre de Dieu dans notre vie, mais là on peut songer plutôt à quelqu’un qui est à la recherche de Dieu, comme le négociant qui cherche toujours de plus belles perles.
Ici l’insistance de Jésus est mise sur la nécessité de chercher Dieu. Dieu se révèle parfois sans qu’on le cherche comme pour André Frossard, mais souvent aussi il se révèle au terme d’une longue recherche « Cherchez, cherchez sans vous lasser et vous trouverez » dit Jésus ailleurs dans l’Évangile. Lorsque nous cherchons, nous nous posons des questions. C’est très bon de le faire. Et il ne faut pas abandonner avant d’avoir vraiment trouvé la perle précieuse.
Je pense ici à un missionnaire qui sera prochainement canonisé – le décret a été signé le 26 mai 2020 par le pape François – le bienheureux Charles de Foucauld béatifié par le pape Benoît XVI le 13 novembre 2005. Vous en avez peut-être entendu parler. Il est à l’origine de plusieurs communauté religieuses comme au Québec dans Charlevoix les Petits Frères de la Croix fondés en 1980. Charles de Foucauld est mort assassiné en 1917 alors qu’il vivait comme ermite dans le désert du Sahara en Algérie. Orphelin de père et de mère, rendu adulte, il avait tout laissé de la religion de son enfance. Il devint militaire et explorateur en Afrique. Il va explorer le Maroc et il est toujours en recherche d’un bonheur qui lui échappe malgré ses succès. Il fait, raconte-t-il plus tard, souvent cette prière : « Mon Dieu, si vous existez, faites que je vous connaisse ». Après plusieurs années, grâce à une de ses cousines, il fait la rencontre de Dieu à l’âge 28 ans. Il trouve la perle précieuse et il écrit : « Aussitôt que je crus qu’il y avait un Dieu, je compris que je ne pouvais faire autrement que de ne vivre que pour Lui.».
Comme le marchand, le bienheureux Charles de Foucauld, a compris au cours de sa recherche qu’il faut tout donner pour garder cette perle précieuse.

III – Application
Est-ce qu’il arrive encore aujourd’hui ce qui est arrivé à André Frossard ou à Charles de Foucauld? La réponse est oui.
Dieu se manifeste dans nos vies simplement, mais réellement. Quand tu aides ta mère malade, quand tu écoutes ta fille qui pense au divorce, quand tu ne dors pas à cause de ton garçon parti au loin… tu rencontres Dieu? Dieu est là dans la vie de tous les jours.
Il nous revient d’avoir l’œil ouvert pour le voir comme le marchand qui recherche des perles.
Il nous revient d’avoir une oreille attentive pour l’entendre qui nous appelle à l’improviste parfois, qui nous offre le trésor de sa présence et de son amour pour nous.
Jésus à travers les paraboles du trésor et de la perle, nous invite à choisir Dieu. Et la première lecture nous montre que ce choix qu’a fait Salomon apporte sagesse et paix. Bien des choses peuvent nous distraire, mais au fond de notre cœur, il y a ce désir de Dieu, de bonheur, qui ne trouve son épanouissement que si on consent à mettre Dieu à la première place dans notre vie. Dans cette eucharistie, demandons au Seigneur de nous rendre attentifs à le reconnaître lorsqu’il se révèle à nous et demandons aussi la grâce de rester toujours « des chercheurs, des chercheuses de Dieu » dans notre vie.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

 

HOMÉLIE POUR LE 16E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LAISSEZ-LES POUSSER ENSEMBLE JUSQU’À LA MOISSON » TEXTES : SAGESSE 12, 13. 16-19, ROMAINS 8, 26-27 ET MATTHIEU 13,24-43 LECTURE BRÈVE 13, 24-30.

18 juillet, 2020

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HOMÉLIE POUR LE 16E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LAISSEZ-LES POUSSER ENSEMBLE JUSQU’À LA MOISSON »
TEXTES : SAGESSE 12, 13. 16-19, ROMAINS 8, 26-27 ET MATTHIEU 13,24-43 LECTURE BRÈVE 13, 24-30.

Je ne suis pas sûr que vous seriez d’accord pour laisser pousser les mauvaises herbes dans votre jardin ou encore sur votre gazon. Je soupçonne que vous faites tout pour les combattre, traitement le printemps etc.
Il s’agit bien de mauvaises herbes dans l’image de l’ivraie dont parle le texte de l’évangile qui vient d’être lu. L’ivraie représente ce qui nuit, ce qui est nocif, le mal, en somme, dans le monde ou encore en chacun de soi. Le bon grain c’est ce qui est bon, c’est le bien.
Et l’attitude du propriétaire qui représente Dieu n’a pas beaucoup de bon sens, entre nous. Ce qui est normal, c’est de s’occuper d’enlever les mauvaises herbes comme je le disais. Et pourtant le propriétaire dit dans le texte de l’évangile : « Laissez-les pousser ensemble jusqu’à la moisson ». Pourquoi une telle attitude de la part du propriétaire qui représente Dieu ?

I – L’attitude du propriétaire, de Dieu
Comment qualifier l’attitude du propriétaire, de Dieu ? En un mot, je dirais que « Dieu est humain » et qu’il veut que nous le soyons. Dieu a bon cœur, il est compréhensif, il n’écrase pas.
Voyez-vous, les mauvaises herbes et le bon grain ici sont une image qui nous représente. On n’a du mauvais, mais aussi de bons côtés. On n’est pas des choses, des objets qu’on manipule. On est des personnes avec des sentiments, de la bonne volonté, des faiblesses aussi. On n’agit pas avec les personnes sans les respecter, sans prendre le temps de leur donner une chance. C’est pourquoi, Dieu qui agit « humainement » pourrait-on dire avec nous veut donner une chance à chacun, donner tout le temps qu’il faut. Il est patient. « La patience, a dit un poète, est la profondeur de l’amour ». Comme c’est vrai avec Dieu. C’est encourageant.

II – Comment Dieu exerce-t-il sa patience ?
Comment Dieu fait-il ? Son secret c’est de regarder non seulement le mal, le mauvais, mais aussi le bon qu’il y a dans les personnes, dans le monde, en nous aussi. C’est comme cela que Dieu agit, et comme cela qu’il veut que nous agissions nous aussi ?
Avez-vous remarqué que cette façon de faire attire plus qu’une attitude négative ? C’est saint François de Sales qui disait « on attrape plus de mouches avec une cuillerée de miel qu’avec une tasse de vinaigre ». Faire sortir le bon chez son mari, chez son épouse, ses enfants etc. Voir le positif d’abord et pas toujours le négatif.
Pourquoi Dieu agir ainsi ?
C’est la pointe de cette parabole, le message essentiel qui est le suivant : on est toujours en croissance spirituelle. Le Royaume de Dieu se développe au fil des ans. « La Parole de Dieu porte du fruit dans la patience » écrivait à des missionnaires saint François de Laval (1623-1708), premier évêque de Québec et fondateur du Séminaire de Québec. Il faut compter avec le temps quand on grandit, quand on se développe. Regarder vos enfants. Quelle patience ils vous ont demandé parfois.

II – Application concrète
Ici il y a deux dangers dont il faut prendre conscience, deux écueils à éviter.
Le premier est celui de vouloir aller trop vite. Dieu nous dit ici de prendre le temps qu’il faut. Il y a un dicton qui le résume bien : « Tirer sur une fleur ne la fait pas pousser plus vite ». Dieu fait confiance aux capacités de grandir en dedans de nous. Il fait confiance à l’Esprit dont parle saint Paul dans la deuxième lecture, l’Esprit qui agit en nous. Dieu fait preuve de réalisme, fait preuve de tolérance. Ainsi nous aussi.
Le second danger est à l’opposé, c’est celui de se renfermer. « Tout est pourri. Y a rien à faire. Moi je m’en fous. C’est mon destin. Y pas de moyen de changer ». On se renferme dans un cocon. Alors que Dieu ici nous dit : « Tout n’est pas parfait dans le monde, il a bien des ambigüités, dans l’Église aussi, dans notre vie, mais ne soyez pas défaitiste ou fataliste. À travers l’ivraie, le bon grain va pousser quand même avec le temps. Faites votre possible et laisser, abandonner le reste entre mes mains. Encore ici une belle phrase de saint François de Laval l’exprime bien « Nous n’avons qu’à lui être fidèles et le laisser faire ».

Conclusion
Cet enseignement est très encourageant aujourd’hui. Ce n’est pas la facilité qui est prêchée. Il faut se retrousser les manches, faire sortir le bon mais en même temps, il faut accepter que çà prends du temps parfois et aussi que tout n’est pas parfait.

Faisons ensemble cette prière inspirée de l’abbé Jules Beaulac :
Esprit Saint,
Toi qui es l’agent de croissance par excellence,
Viens en nous.
Enseigne-nous à ne pas voir seulement le mal qu’il y a dans le monde, mais à découvrir le bien qui y pousse bellement.
Préserve-nous du découragement qui nous démobiliserait et nous déprimerait.
Garde-nous dans la confiance et l’espérance, convaincus que le bien pousse même au milieu du mal et sûrs que Tu nous soutiens et nous éclaires sur tous nos chemins!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

HOMÉLIE POUR LE 15E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « CELUI QUI A DES OREILLES, QU’IL ENTENDE ! » Chapelle du Lac Poulin le 12 juillet 2020 . Textes : Isaïe 55, 10-14, Romains 8, 18-23 et Mathieu 13, 1-23.

10 juillet, 2020

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(Au même lien le texte des lectures)

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Van Gogh, le semeur est sorti pour semer

HOMÉLIE POUR LE 15E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « CELUI QUI A DES OREILLES, QU’IL ENTENDE ! »
Chapelle du Lac Poulin le 12 juillet 2020 . Textes : Isaïe 55, 10-14, Romains 8, 18-23 et Mathieu 13, 1-23.

Nous commençons aujourd’hui une série de textes de l’Évangile de saint Mathieu qui sont des paraboles, des comparaisons que Jésus utilise pour faire comprendre ce qu’il veut dire quand il parle du « Royaume » de son Père. En effet, ce n’est pas nécessairement avec des démonstrations, des thèses qu’on fait comprendre. Ce qui est important c’est d’écouter ces histoires que sont les paraboles avec son cœur. « Celui qui a des oreilles, qu’il entende » dit Jésus à la fin de l’évangile lu.
La plupart des paraboles partent de la vie de tous les jours avec des images simples à la portée de tous, elles sont souvent de petites histoires faciles à comprendre. Celle d’aujourd’hui est la parabole du semeur qui sortit pour semer.

I – La parabole du semeur
Cette parabole que nous rapporte aujourd’hui l’évangile de saint Mathieu, est bien connue. Nous l’avons entendue dans sa version brève. Vous pouvez la lire en entier dans la lecture longue. Quel est le message qui se dégage de l’ensemble de cette parabole ?
C’est la question que j’ai posée autour de moi à mes confrères du Séminaire : « Que vous dit cette parole ? » ai-je demandé. Et voici en résumé ce qui est ressorti de mes échanges avec deux confrères africains et deux confrères québécois.
D’abord, d’entrée de jeu, tous se disaient – moi aussi- que cette parabole veut nous enseigner la patience dans l’attente que la semence lève. Attendre patiemment que le soleil, la pluie, le temps fassent leur œuvre. Unanimité sur cette leçon générale de la parabole.
Mais là où les divergences sont apparues c’est sur la façon de vivre l’attente. C’est bien beau d’attendre, mais pendant l’attente ne peut-on pas faire quelque chose : mette de l’engrais, retourner la terre, apporter de l’eau etc… et là s’est levée une forte discussion entre les deux prêtes africains et les deux prêtres québécois. Je vous la raconte brièvement et je vous laisse juger.

II – Un riche discussion
Les prêtres africains ont répété plusieurs fois : on ne peut rien faire, la puissance est dans la semence, on attend que cette puissance éclate par elle-même, on ne peut s’y substituer. Quoi faire alors dans le d’attente ? Eh bien ! on sème du mil dans un autre champ, de la pistache ailleurs en attendant que la première semence lève. Les québécois étaient un peu décontenancés, perplexes.
Ils disaient « Oui, oui c’est bien beau d’attendre, mais on pourrait mettre de l’engrais, amener de l’eau, arroser etc. » Les africains répondaient : « Chez nous,, il n’y a pas d’eau en réserve, il faut attendre la pluie. » Les québécois disaient : « Oui, mais ne pourriez-vous pas irriguer etc. » Les africains répondaient « Vous ne comprenez pas. Toutes ces choses que vous proposez peuvent aider bien sûr à la croissance de la semence, mais ce qui est nécessaire c’est de laisser le temps à la semence elle-même germer ».

III – Application
Eh bien ! Qu’en pensez-vous? Je dois dire que je pense que ce sont mes amis africains qui ont bien compris le message de la parabole du semeur.
Moi et mes amis québécois nous nous concentrions sur la terre, nous nous voyions comme de bons jardiniers alors que ce que la parabole du semeur nous souligne c’est la puissance de la semence. On le sait « parfois un seul mot peut sauver ou détruire une vie ».
Et une application concrète de cette heureuse patience de Dieu que Jésus nous révèle ce matin c’est de comprendre que notre Dieu est un Dieu qui dit : « Donnez une chance aux gens. Aidez-les à cheminer. Ne jugez pas trop vite ». Dieu donne toujours le temps de changer, de retrouver ce qu’il y a de bon dans les gens.
Retenons ceci : nous sommes toutes et tous bénéficiaires de cette bienveillance et de cette patience de Dieu qui sème à tout vent. À mon tour d’être patient avec le monde qui m’entoure, de toujours donner la chance au coureur.

Conclusion
Comme personnes baptisées habituons-nous à écouter le message de Jésus, en particulier celui des paraboles, non seulement avec nos oreilles de chair,, mais avec notre cœur. Les paroles de Jésus demandent à être mises en lieu avec notre vie concrète, elles ne sont pas seulement des vérités, mais elles sont avant tout vie : « Mes paroles son esprit et vie » dit Jésus lui –même ( Jean 6, 58).
Que cet Eucharistie nos aide à reconnaître les paroles que Jésus dit lui-même à notre cœur à l’intérieur de nous-mêmes et prenons le temps de les écouter dans la foi et l’ouverture.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

 

HOMELIE DU PAPE FRANÇOIS  » LA RELATION AVEC DIEU EST GRATUITE, ELLE EST UNE RELATION D’AMITIÉ « 

9 juillet, 2020

http://www.vatican.va/content/francesco/fr/cotidie/2020/documents/papa-francesco-cotidie_20200515_laredenzione-undono-gratuito.html

battistero-museo-del-bardo-tunisi

Tunis, baptistère, musée du Bardo

CELEBRATION MATINALE RETRANSMISE EN DIRECT
DEPUIS LA CHAPELLE DE LA MAISON SAINTE-MARTHE

HOMELIE DU PAPE FRANÇOIS

 » LA RELATION AVEC DIEU EST GRATUITE, ELLE EST UNE RELATION D’AMITIÉ  »

Vendredi 15 mai 2020

Introduction

C’est aujourd’hui la journée mondiale de la famille. Prions pour les familles, pour que grandisse dans les familles l’Esprit du Seigneur, l’esprit d’amour, de respect, de liberté.

Homélie
Dans le livre des Actes des apôtres, nous voyons que dans l’Eglise, au début, régnaient des temps de paix, on le dit très souvent: l’Eglise grandissait, dans la paix, et l’Esprit du Seigneur se diffusait (cf. Ac 9, 31); des temps de paix. Il y avait aussi des temps de persécution, à commencer par la persécution d’Etienne (cf. chap. 6-7), ensuite Paul le persécuteur, converti, puis lui aussi persécuté… Des temps de paix, des temps de persécution, et il y avait aussi des temps de trouble. Et c’est le thème de la première lecture d’aujourd’hui: un temps de trouble (cf. Ac 15, 22-31). «Nous avons appris que, sans mandat de notre part, – écrivent les apôtres aux chrétiens qui sont venus du paganisme – certaines gens venues de chez nous ont, par leurs propos, jeté le trouble parmi vous – jeté le trouble» (v. 24).
Que s’était-il passé? Ces chrétiens qui provenaient des païens avaient cru en Jésus Christ et reçu le baptême, et ils étaient heureux: ils avaient reçu l’Esprit Saint. Du paganisme au christianisme, sans aucune étape intermédiaire. En revanche, ceux qu’on appelait “les judaïsants”, soutenaient qu’on ne pouvait pas faire cela. Si quelqu’un était païen, il devait d’abord devenir juif, un bon juif, et ensuite devenir chrétien, pour être dans la ligne de l’élection du peuple de Dieu. Et ces chrétiens ne le comprenaient pas: “Mais comment, nous sommes des chrétiens de deuxième classe? On ne peut pas passer directement du paganisme au christianisme? La résurrection du Christ n’a-t-elle pas défait l’ancienne Loi, en la conduisant a une plénitude encore plus grande?”. Ils étaient troublés et il y avait beaucoup de discussions entre eux. Et ceux qui voulaient tout cela étaient des personnes avec des arguments pastoraux, des arguments théologiques, certains également moraux, ils soutenaient que non, on devait procéder ainsi! Et cela mettait en discussion la liberté de l’Esprit Saint, également la gratuité de la résurrection du Christ et de la grâce. Ils étaient méthodiques. Et également rigides.
A propos de ceux-ci, de leurs maîtres, des docteurs de la Loi, Jésus avait dit: “Malheur à vous, qui parcourez mers et continents pour gagner un prosélyte, et quand vous l’avez gagné vous le rendez digne de la géhenne deux fois plus que vous”. C’est plus ou moins ce que dit Jésus dans le chapitre 23 de Matthieu (cf. v. 15). Ces gens, qui étaient “idéologiques”, plus que “dogmatiques”, “idéologiques”, avaient réduit la Loi, le dogme à une idéologie: “Il faut faire cela, et cela, et cela…”. Une religion de prescriptions, et en agissant ainsi, ils enlevaient la liberté de l’Esprit. Et les gens qui les suivaient étaient des gens rigides, des gens qui ne se sentaient pas à leur aise, qui ne connaissaient pas la joie de l’Evangile. La perfection de la route pour suivre Jésus était la rigidité: “Il faut faire cela, cela, cela, cela…”. Ces gens, ces docteurs “manipulaient” les consciences des fidèles et les faisaient devenir rigides, ou bien ces derniers s’en allaient.
C’est pourquoi, je le répète très souvent et je dis que la rigidité n’appartient pas au bon Esprit, parce qu’elle remet en question la gratuité de la rédemption, la gratuité de la résurrection du Christ. C’est quelque chose d’ancien: au cours de l’histoire de l’Eglise, cela s’est répété. Pensons aux pélagiens, à ces… ces personnes rigides célèbres. Et de nos jours aussi, nous avons vu certaines organisations apostoliques qui semblaient vraiment bien organisées, qui travaillaient bien…, mais tous rigides, tous pareils les uns aux autres, et ensuite nous avons appris la corruption qu’il y avait à l’intérieur, également chez les fondateurs.
Là où il y a de la rigidité, il n’y a pas l’Esprit de Dieu, parce que l’Esprit de Dieu est liberté. Et ces gens voulaient avancer en enlevant la liberté de l’Esprit de Dieu et la gratuité de la rédemption: “Pour être justifié, tu dois faire cela, cela, cela cela…”. La justification est gratuite. La mort et la résurrection du Christ sont gratuites. On ne paye pas, on n’achète pas: c’est un don! Et ces derniers ne voulaient pas comprendre cela.
La route est belle [la manière de procéder]: les apôtres se réunissent lors d’un concile et, à la fin, ils écrivent une lettre qui dit ceci: «L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas vous imposer d’autres charges…» (Ac 15, 28), et ils donnent ces obligations plus morales, de bon sens: ne pas confondre le christianisme avec le paganisme, s’abstenir d’offrir des viandes aux idoles, etc. A la fin, ces chrétiens qui étaient troublés ont reçu la lettre alors qu’ils étaient réunis en assemblée et «quand lecture fut faite, ils se réjouirent de l’encouragement qu’elle apportait» (v. 31). Du trouble à la joie. L’esprit de la rigidité te conduit toujours au trouble: “Mais est-ce que j’ai bien fait cela? Est-ce que je ne l’ai pas bien fait?”. Le scrupule. L’esprit de la liberté évangélique te conduit à la joie, car c’est précisément ce qu’a fait Jésus avec sa résurrection: il a apporté la joie! La relation avec Dieu, la relation avec Jésus n’est pas une relation de ce genre, où “l’on fait des choses”: “Je fais cela et tu me donne ceci”. Une relation de ce genre, je dirais – que le Seigneur me pardonne – commerciale, non! Elle est gratuite, comme est gratuite la relation de Jésus avec les disciples. «Vous êtes mes amis» (Jn 15, 14). “Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle amis” (cf. v. 15). «Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, mais c’est moi qui vous ai choisis» (v. 16). C’est la gratuité.
Demandons au Seigneur qu’il nous aide à discerner les fruits de la gratuité évangélique de la rigidité non-évangélique, et qu’il nous libère de tout trouble de ceux qui placent la foi, la vie de la foi sous les prescriptions casuistiques, les prescriptions qui n’ont pas de sens. Je me réfère à ces prescriptions qui n’ont pas de sens, pas aux commandements. Qu’il nous libère de cet esprit de rigidité qui enlève la liberté.

HOMÉLIE POUR LE 14E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LES SECRETS DE DIEU » TEXTES : ZACHARIE 9, 9-10, ROMAINS 8, 9.11-13 ET MATHIEU 11, 25-30.

3 juillet, 2020

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« car je suis doux et humble de cœur »

HOMÉLIE POUR LE 14E DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE ANNÉE A « LES SECRETS DE DIEU »
TEXTES : ZACHARIE 9, 9-10, ROMAINS 8, 9.11-13 ET MATHIEU 11, 25-30.

Si c’était nécessaire, je donnerais comme titre à cette homélie : « les secrets de Dieu ». Il représenterait bien, je pense, le message de l’évangile d’aujourd’hui qui nous parle de Dieu et de notre relation à lui.

I – Un secret
Un secret ? Qu’est-ce que c’est ? Ça peut être deux choses.
D’abord, cela peut être quelque chose qu’on veut cacher, qu’on ne veut pas que les autres sachent : le montant de son salaire, par exemple pour prendre un exemple anodin. Cela peut aussi être plus sérieux parfois.
Un secret, aussi ça peut être quelque chose de très intime, personnel, qu’on ne dit pas à tout le monde. On le partage seulement avec ses amis, sa famille, ceux et celles qu’on aime. Et aussi quand on le partage, on s’attend que l’autre personne soit responsable, qu’elle ne rit pas de nous, qu’elle nous respecte.
Cela m’est arrivé souvent comme conseilleur spirituel, de partager ainsi des secrets. Parfois après plusieurs rencontres avec un séminariste, dans la confiance, il me révélait ce qui le faisait souffrir, le manque d’amour de son père, ses difficultés pour étudier, son manque d’argent …que sais-je… des choses encore plus intimes parfois.

II – Le lien avec l’évangile
Hé bien! C’est ce genre de secret, cette intimité, que Dieu veut partager avec nous. Il ne veut rien nous cacher, mais il attend pour se révéler, nous révéler son amour, que se crée avec lui une confiance, une intimité, un partage. C’est ce que dit le texte de l’évangile lorsqu’on y lit : « Personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler. » Et la suite : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos ».
Bien sûr pour pouvoir entrer dans les secrets de Dieu, il faut le vouloir, il faut chercher…et pas seulement avec sa tête (les savants dont parle Jésus), avec son argent et ses influences (les puissants et les sages), mais d’abord et avant tout avec son cœur. C’est pourquoi, ce passage extraordinaire de l’évangile de saint Mathieu est au cœur de l’enseignement et de la prédication de Jésus. Dieu se révèle aux tout-petits. Et qui que nous soyons, devant Dieu nous sommes toujours des tout-petits, nous avons besoin de lui.
Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus dont la popularité dans le peuple de Dieu ne se dément pas l’avait bien compris. Pour Thérèse, nous n’avons pas à devenir petits, nous le sommes. Et c’est là que l’amour de Dieu nous rejoint et nous rencontre. Thérèse sait qu’elle est petite. Et elle prend conscience que Dieu aime ceux qui sont assez petits pour reconnaître qu’ils manquent de quelque chose

III- Application
La problématique aujourd’hui dans notre société riche exalte la performance et la réussite personnelle. Cette orientation – qui n’est pas mauvaise en soi – peut entraîner hélas! un manque d’ouverture à Dieu, aux choses spirituelles. On a presque tout : le confort, des biens en grand nombre, des connaissances. On risque de s’y enfermer et ainsi de ne plus désirer autre chose. On n’a plus besoin de Dieu. On ne reconnaît pas sa petitesse, sa pauvreté car, comme le souligne souvent le pape François, les petits et les pauvres s’en remettent plus facilement à Dieu.
C’est ce qu’un confrère missionnaire de retour du Paraguay en Amérique du Sud me confiait en me disant comment il trouvait cela dur depuis son retour au Québec. Je lui demandais pourquoi et il me répondait que là-bas les gens sont pauvres et démunis, mais ils se tournent facilement vers Dieu. Ils ne sont pas plus saints que nous autres, mais ils aiment partager, prier, manifester leur foi. La foi en Dieu fait partie intégrante de leur vie.
Ses réflexions me faisaient penser à l’évangile d’aujourd’hui et je me disais, oui, ici au Québec, peut-être qu’on se pense trop savants, trop fins, trop performants, trop bons. C’est pourquoi on ne sent plus le besoin de s’ouvrir à Dieu, d’aller vers des valeurs non uniquement matérielles, mais spirituelles comme l’amour, le pardon, la bonté, le partage, la foi en Dieu.
En tout cas, l’évangile d’aujourd’hui nous invite à faire confiance à l’amour de Dieu pour nous dans notre vie. Dieu s’attend qu’on lui partage nos secrets car il nous respecte dans ce que nous sommes. « Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour votre âme. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger. »

Conclusion
Oui, notre relation à Dieu est comme celle qu’on a avec quelqu’un dont on partage les secrets. On se confie à lui, on vit une intimité avec lui et on lui fait confiance en tout.
Que cette messe soit l’occasion d’ouvrir à Dieu notre cœur et nous pouvons être sûrs qu’en retour Dieu nous apportera la paix, la joie, le repos. C’est ce que je vous souhaite à toutes et à tous
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 17 juin 2020 – la prière de Moïse

1 juillet, 2020

http://www.vatican.va/content/francesco/it/audiences/2020.index.html#audiences

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PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 17 juin 2020 – la prière de Moïse 

Bibliothèque du palais apostolique 

Chers frères et sœurs, bonjour!

Dans notre itinéraire sur le thème de la prière, nous nous rendons compte que Dieu n’a jamais aimé avoir affaire à des orants “faciles”. Et Moïse lui aussi ne sera pas un interlocuteur “mou”, dès le premier jour de sa vocation.

Quand Dieu l’appelle, Moïse est humainement “un raté”. Le livre de l’Exode nous le représente dans la terre de Madian comme un fugitif. Dans sa jeunesse, il avait éprouvé de la pitié pour son peuple et s’était également rangé en défense des opprimés. Mais il découvre très vite que, malgré ses bonnes intentions, de ses mains ne naît pas la justice, mais plutôt la violence. Voilà que ses rêves de gloire se brisent: Moïse n’est plus un fonctionnaire prometteur, destiné à une carrière rapide, mais quelqu’un qui a joué ses chances, et à présent il fait paître un troupeau qui n’est même pas le sien. Et c’est précisément dans le silence du désert de Madian que Dieu convoque Moïse à la révélation du buisson ardent: «“C’est moi le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob”. Moïse alors se voila la face, dans la crainte que son regard ne se fixât sur Dieu» (Ex 3, 6).

A Dieu qui lui parle, qui l’invite à prendre à nouveau soin du peuple d’Israël, Moïse oppose ses peurs, ses objections: il n’est pas digne de cette mission, il ne connaît pas le nom de Dieu, il ne sera pas cru par les israélites, il a une langue qui balbutie… Et tant d’autres objections. La parole qui fleurit le plus souvent sur les lèvres de Moïse, dans chaque prière qu’il adresse à Dieu, est la question: “pourquoi?”. Pourquoi m’as-tu envoyé? Pourquoi veux-tu libérer ce peuple? Dans le Pentateuque, il y a même un passage dramatique, où Dieu reproche à Moïse son manque de confiance, un manque qui l’empêchera d’entrer dans la terre promise (cf. Nb 20,12).

Avec ces craintes, avec ce cœur qui vacille souvent, comment Moïse peut-il prier? Moïse apparaît même un homme comme nous. Et cela nous arrive à nous aussi: quand nous avons des doutes, comment pouvons-nous prier? Nous ne réussissons pas à prier. Et c’est en raison de cette faiblesse, outre que par sa force, que nous sommes frappés par lui. Chargé par Dieu de transmettre la Loi à son peuple, fondateur du culte divin, médiateur des mystères les plus élevés, ce n’est pas pour autant qu’il cessera d’entretenir des liens étroits de solidarité avec son peuple, en particulier à l’heure de la tentation et du péché. Toujours attaché à son peuple. Moïse n’a jamais perdu la mémoire de son peuple. Et c’est l’une des grandeurs des pasteurs: ne pas oublier le peuple, ne pas oublier les racines. C’est ce que dit Paul à son bien-aimé jeune évêque Timothée: «Rappelle-toi de ta mère et de ta grand-mère, de tes racines, de ton peuple». Moïse est tellement ami avec Dieu qu’il peut parler avec lui face à face (cf. Ex 33,11); et il restera tellement ami des hommes qu’il éprouvera de la miséricorde pour leurs péchés, pour leurs tentations, pour la nostalgie soudaine que les exilés éprouvent pour le passé, en repensant à lorsqu’ils étaient en Egypte.

Moïse ne renie pas Dieu, mais il ne renie pas non plus son peuple. Il est cohérent avec son sang, il est cohérent avec la voix de Dieu. Moïse n’est donc pas un condottiere autoritaire et despotique; au contraire, le livre des Nombres le définit comme le «plus humble et doux que la terre ait porté» (cf. 12, 3). Malgré sa condition privilégiée, Moïse ne cesse pas d’appartenir à cette multitude de pauvres en esprit qui vivent en faisant de la confiance en Dieu le viatique de leur chemin. C’est un homme du peuple.

Ainsi, la manière la plus caractéristique de prier de Moïse sera l’intercession  (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2574). Sa foi en Dieu ne fait qu’un avec le sentiment de paternité qu’il nourrit pour son peuple. L’Ecriture le représente habituellement avec les mains tendues vers le haut, vers Dieu, presque comme pour faire un pont de sa personne entre le ciel et la terre. Même dans les moments les plus difficiles, même le jour où le peuple répudie Dieu et lui-même comme guide pour fabriquer un veau d’or, Moïse n’a pas le courage de se détourner de son peuple. C’est mon peuple. C’est ton peuple. Il ne renie pas Dieu, ni le peuple. Et il dit à Dieu: «Ce peuple a commis un grand péché: ils se sont fabriqué un dieu d’or. Pourtant, s’il te plaisait de pardonner leur péché… Sinon, efface-moi, de grâce,  du livre que tu as écrit!» (Ex 32, 31-32). Moïse ne marchande pas son peuple. Il est le pont, il est l’intercesseur. Tous les deux, le peuple et Dieu, et lui est au milieu. Il ne vend pas son peuple pour faire carrière. Ce n’est pas un arriviste, c’est un intercesseur: pour ses gens, pour sa chair, pour son histoire, pour son peuple et pour Dieu qui l’a appelé. Il est le pont. Quel bel exemple pour tous les pasteurs qui doivent être un «pont». C’est pourquoi on les appelle pontifex, ponts. Les pasteurs sont des ponts entre le peuple auquel ils appartiennent et Dieu, auquel ils appartiennent par vocation. Moïse est ainsi: «Seigneur, pardonne leur péché, autrement si Tu ne pardonnes pas, efface-moi du livre que tu as écrit. Je ne veux pas faire carrière avec mon peuple».

Et telle est la prière que les vrais croyants cultivent dans leur vie spirituelle. Même s’ils font l’expérience des manquements des personnes et de leur éloignement de Dieu, ces orants ne le condamnent pas, ne les refusent pas. L’attitude de l’intercession est propre aux saints, qui, à l’imitation de Jésus, sont des “ponts” entre Dieu et son peuple. Dans ce sens, Moïse a été le plus grand prophète de Jésus, notre avocat  et intercesseur (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2577). Et aujourd’hui aussi, Jésus est le pontifex, il est le pont entre nous et le Père. Et Jésus intercède pour nous, il fait voir au Père les plaies qui sont le prix de notre salut et il intercède. Et Moïse est la figure de Jésus qui aujourd’hui prie pour nous, intercède pour nous.

Moïse nous incite à prier avec la même ardeur que Jésus, à intercéder pour le monde, à se rappeler que celui-ci, malgré toutes ses fragilités, appartient toujours à Dieu. Tous appartiennent à Dieu. Les pécheurs les plus affreux, les personnes les plus mauvaises, les dirigeants les plus corrompus sont des enfants de Dieu et Jésus sent cela et intercède pour tous. Et le monde vit et prospère grâce à la bénédiction du juste, à la prière de piété, à cette prière de piété que le saint, le juste, l’intercesseur, le prêtre, l’évêque, le Pape, le laïc, chaque baptisé, élève sans cesse pour les hommes, en chaque lieu et en chaque temps de l’histoire. Pensons à Moïse, l’intercesseur. Et quand nous avons envie de condamner quelqu’un et que nous nous mettons en colère à l’intérieur – se mettre en colère fait du bien, mais condamner ne fait pas du bien –, intercédons pour lui: cela nous aidera beaucoup.

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