Archive pour avril, 2020

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – « …aujourd’hui la 50e journée mondiale de la terre » (22.4.20)

29 avril, 2020

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PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – « …aujourd’hui la 50e journée mondiale de la terre » (22.4.20)

Bibliothèque du palais apostolique
Mercredi 22 avril 2020

Chers frères et sœurs, bonjour!

Nous célébrons aujourd’hui la 50e journée mondiale de la terre. C’est une opportunité pour renouveler notre engagement à aimer notre maison commune et à prendre soin de celle-ci et des membres les plus vulnérables de notre famille. Comme cette pandémie tragique de coronavirus nous le démontre, ce n’est qu’ensemble et en prenant en charge les personnes les plus fragiles que nous pouvons vaincre les défis mondiaux. La Lettre encyclique Laudato si’ porte précisément ce sous-titre: «Sur la sauvegarde de la maison commune». Aujourd’hui, nous réfléchirons un peu ensemble sur cette responsabilité qui caractérise «notre passage sur cette terre» (LS, n. 160). Nous devons grandir dans la conscience de la sauvegarde de la maison commune.
Nous sommes faits de matière terrestre, et les fruits de la terre soutiennent notre vie. Mais, comme nous le rappelle le livre de la Genèse, nous ne sommes pas simplement «terrestres»: nous portons en nous également le souffle vital qui vient de Dieu (cf. Gn 2, 4-7). Nous vivons donc dans la maison commune comme une unique famille humaine et dans la biodiversité avec les autres créatures de Dieu. Comme imago Dei, image de Dieu, nous sommes appelés à avoir soin de toutes les créatures et à les respecter et à nourrir l’amour et la compassion pour nos frères et sœurs, en particulier les plus faibles, à l’imitation de l’amour de Dieu pour nous, manifesté dans son Fils Jésus, qui s’est fait homme pour partager cette situation avec nous et nous sauver.
A cause de l’égoïsme, nous avons manqué à notre responsabilité de gardiens et d’administrateurs de la terre. «Il suffit de regarder la réalité avec sincérité pour constater qu’il y a une grande détérioration de notre maison commune» (ibid., n. 61). Nous l’avons polluée, nous l’avons pillée, en mettant en danger notre propre vie. C’est pourquoi divers mouvements internationaux et locaux se sont formés pour éveiller les consciences. J’apprécie sincèrement ces initiatives, et il sera encore nécessaire que nos enfants descendent dans la rue pour nous enseigner ce qui est évident, c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’avenir pour nous si nous détruisons l’environnement qui nous soutient.
Nous avons failli à prendre soin de la terre, notre maison-jardin, et à prendre soin de nos frères. Nous avons péché contre la terre, contre notre prochain et, en définitive, contre le Créateur, le Père bon qui s’occupe de chacun et qui veut que nous vivions dans la communion et dans la prospérité. Et comment réagit la terre? Il y a un dicton espagnol qui est très clair sur cela, il dit la chose suivante: «Dieu pardonne toujours; nous, les hommes, pardonnons certaines fois et d’autres pas; la terre ne pardonne jamais». La terre ne pardonne pas: si nous avons détérioré la terre, la réponse sera très dure.
Comment pouvons-nous rétablir une relation harmonieuse avec la terre et le reste de l’humanité? Une relation harmonieuse… Très souvent, nous perdons la vision de l’harmonie: l’harmonie est l’œuvre de l’Esprit Saint. Comment pouvons-nous rétablir cette harmonie également dans la maison commune, dans la terre, également dans notre relation avec les gens, avec notre prochain, avec les plus pauvres? Nous avons besoin d’une nouvelle manière de regarder notre maison commune. Entendons-nous: celle-ci n’est pas une réserve de ressources à exploiter. Pour nous croyants, le monde naturel est l’«Evangile de la Création», qui exprime la puissance créatrice de Dieu qui a façonné la vie humaine et fait exister le monde avec ce qu’il contient pour soutenir l’humanité. Le récit biblique de la création se conclut ainsi: «Dieu vit tout ce qu’il avait fait: cela était très bon» (Gn 1, 31). Quand nous voyons ces tragédies naturelles qui sont la réponse de la terre à nos mauvais traitements, je me dit: «Si je demande maintenant au Seigneur ce qu’il en pense, je ne crois pas qu’il me dira que c’est une très bonne chose». C’est nous qui avons abîmé l’œuvre du Seigneur!
En célébrant aujourd’hui la journée mondiale de la terre, nous sommes appelés à retrouver le sens du respect sacré de la terre, car celle-ci n’est pas seulement notre maison, mais aussi la maison de Dieu. Cela fait naître en nous la conscience d’être sur une terre sacrée!
Chers frères et sœurs, «réveillons le sens esthétique et contemplatif que Dieu a mis en nous» (Exhort. ap. post-syn. Querida Amazonia, n. 56). La prophétie de la contemplation est quelque chose que nous apprenons en particulier des peuples originels, qui nous enseignent que nous ne pouvons pas prendre soin de la terre si nous ne l’aimons pas et ne la respectons pas. Ils ont cette sagesse du «bien vivre», pas au sens de prendre du bon temps, non: mais de vivre en harmonie avec la terre. Ils appellent cette harmonie «le bien vivre».
Dans le même temps, nous avons besoin d’une conversion écologique qui s’exprime à travers des actions concrètes. En tant que famille unique et interdépendante, nous avons besoin d’un projet partagé pour conjurer les menaces contre notre maison commune. «L’interdépendance nous oblige à penser à un monde unique, à un projet commun» (LS, n. 164). Nous sommes conscients de l’importance de collaborer en tant que communauté internationale pour la protection de notre maison commune. J’exhorte ceux qui détiennent l’autorité à guider le processus qui conduira à deux conférences internationales importantes: la cop15 sur la biodiversité à Kunming (Chine) et la cop26 sur les changements climatiques à Glasgow (Royaume-Uni). Ces deux rencontres sont très importantes.
Je voudrais encourager à organiser des interventions concertées également au niveau national et local. Il est bon de se réunir ensemble de toute condition sociale et de donner vie également à un mouvement populaire venant «de la base». La journée mondiale de la terre, que nous célébrons aujourd’hui, est née précisément ainsi. Chacun de nous peut apporter sa propre petite contribution: «Il ne faut pas penser que ces efforts ne vont pas changer le monde. Ces actions répandent dans la société un bien qui produit toujours des fruits au-delà de ce que l’on peut constater, parce qu’elles suscitent sur cette terre un bien qui tend à se répandre toujours, parfois de façon invisible» (LS, n. 212).
En ce temps pascal de renouveau, engageons-nous à aimer et à apprécier le magnifique don de la terre, notre maison commune, et à prendre soin de tous les membre de la famille humaine. Comme les frères et sœurs que nous sommes, supplions ensemble notre Père céleste: «Envoies ton esprit, renouvelle la face de la terre» (cf. Ps 104, 30).

Speaker :
Je salue cordialement les personnes de langue française.
En ce temps pascal de renouvellement, engageons-nous à aimer et apprécier le don magnifique de la terre, notre maison commune, et à prendre soin de tous les membres de la famille humaine. En ce temps d’incertitudes, je demande à Dieu de vous soutenir dans l’espérance, l’amour et la solidarité les uns envers les autres.
Que Dieu vous bénisse !

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « ILS LE RECONNURENT »

24 avril, 2020

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Emmaus

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A « ILS LE RECONNURENT »

Textes : Actes 2, 14.22b-33, 1 Pierre 1, 17-21 et Luc 24, 13-3 Disciples d’Emmaüs.

Marchons, si vous le voulez bien avec les deux disciples qui s’en vont pensifs et remplis des événements des derniers jours qu’ils ont vécus. Ils en font comme la synthèse. Ils se remémorent les évènements. Ce faisant ils cherchent, comme il nous arrive de le faire assez souvent, quel est le sens de ce qui vient de se passer.

I – La route
En marchant sur la route vers Emmaüs, les deux disciples partagent en s’inspirant des Écritures qu’ils connaissent bien. Ils se rappellent aussi les enseignements de Jésus qu’ils ont côtoyé avant sa mort, mais la lumière ne vient pas. Ils se sentent accablés et même perplexes, car ils ne comprennent pas. Survient alors un voyageur comme eux. Il les suit et finalement la conversation s’engage. Les deux disciples se laissent aller à raconter leurs déboires et leurs inquiétudes. Ils partagent même leur désespoir. Car ils avaient mis leur confiance et leur espérance en celui qui est mort sur une croix le vendredi précédent. Leur chemin est un chemin de croix, pourrait-on dire. Ils ne comprennent pas.
Ils ne savent pourquoi, mais ils sentent maintenant que cet étranter s’est joint à eux une présence qui leur fait du bien. Avec la mort de Jésus, ils ont vécu le mystère du deuil et de l’absence. Ce mystère de l’absence les écrase. Ils n’en sortent pas. Ils ont beau parler de lui, se rappeler les moments heureux vécus avec lui, l’absence leur pèse lourd.
Et maintenant à mesure que la route avance leurs cœurs vibrent. Une rencontre à nulle autre comparable se prépare. Écoutons saint Luc qui nous la décrit en détail.

II – La rencontre
Le compagnon qui marche avec eux les apostrophe : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? » Par le jeu des retours à l’Écriture et à la Parole de Dieu, leur compagnon donne sens à ce qu’ils ont vécu. « Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture ce qui le concernait ». Les deux disciples perçoivent alors le renversement que Dieu provoque pour son Peuple qui attendait un souverain triomphant et à qui il donné un Serviteur souffrant qui se présente comme l’Agneau sacrifié pour le salut de toutes et de tous. Ces paroles relues dans le prophète Isaïe les éclairent. Elles contribuent à changer leur perspective et leur vision.
Lorsqu’il est l’heure de souper, ils cassent la croûte avec leur compagnon et là tout se dévoile. Lorsque les gestes que Jésus a légués à ses disciples sont reproduits – la fraction du pain – ils perçoivent dans leur foi en la Parole de Dieu que c’est le Christ qui est avec eux. Alors leurs yeux s’ouvrent et ils le reconnaissent. Ils ne seront plus les mêmes. Ils ont rencontré le Seigneur ressuscité.
À mesure qu’ils partageaient avec l’étranger qui les avait rejoints, ils avaient senti en eux non pas seulement des mots qui montaient, mais un je ne sais quoi de plus. « Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » constatent-ils alors.
Eh oui! pour eux dans la fraction du pain, les mots laissent place à une relation de personne à personne, à une rencontre inexprimable, mais bien réelle. L’absence physique demeure bien sûr, mais elle n’empêche pas une présence autre de la personne aimée. C’est ce dont ils témoignent aux autres disciples. « Ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain ».
Ayant vécu la fin tragique de Jésus qui les a privés d’une présence physique qui soutenait leur attachement à lui : « Nous pensions qu’il était celui qui nous sauverait, qui rétablirait la gloire d’Israël », les deux disciples marchaient sans but. Et maintenant ils reconnaissent Jésus bien vivant et présent par les gestes de la fraction du pain.

III – La foi renouvelée
Jésus est bien vivant, telle est le coeur de la foi chrétienne. Saint Pierre l’explique aux gens de Jérusalem le matin de la Pentecôte dans ce merveilleux texte que nous avons dans la première lecture. Après avoir lui aussi, comme le compagnon des disciples d’Emmaüs, reprit le message des Écritures, il en dégage les mots de David qui annoncent la résurrection de Jésus.
Je vous cite ses paroles : « En effet, c’est de lui que parle David dans le psaume : Je voyais le Seigneur devant moi sans relâche : il a vu d’avance la résurrection du Christ, dont il a parlé ainsi : il n’a pas été abandonné à la mort, et sa chair n’a pas vu la corruption. Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit Saint qui était promis, et il l’a répandu sur nous, ainsi que vous le voyez et l’entendez ».
Saint Pierre met le doigt sur le message essentiel de la Bonne Nouvelle qu’il prêche : la résurrection de Jésus. Parce que Jésus est Ressuscité les limites du temps et de l’espace sont tombées. Toute personne peut, en quelque temps et dans n’importe quel lieu, le rencontrer elle aussi comme les disciples d’Emmaüs ont eu la chance de le faire. Cette rencontre avec le Ressuscité se fait par la Parole de Dieu et par le partage du Pain. La Parole et le Pain sont pour nous des signes de la présence du Ressuscité et en même temps un envoi vers nos frères et sœurs. Les disciples d’Emmaüs nous amènent sur un chemin combien stimulant : celui de la foi au Christ Ressuscité.
Le chrétien, sans avoir toutes les réponses, prend le beau risque de la foi. Ce « beau risque » c’est celui de l’attachement à la personne de Jésus que nous reconnaissons toujours vivant et que nous retrouvons de diverses manières : dans l’autre que je regarde comme un frère et une sœur, dans le pain et le vin partagés dans l’Eucharistie, dans le souffle de l’Esprit au cœur du plus petit, dans l’étranger, dans l’enfant qui pleure, dans le jeune qui se cherche etc.
Quel beau risque de chercher Jésus et de le chercher sans se lasser ! La vie d’un chrétien n’est pas une « assurance tous risques ». Elle comporte ses moments d’hésitations, de doutes, de retards, de lenteurs, mais elle est remplie d’une espérance fondée sur la foi en la Résurrection du Jésus.

Conclusion
Pâques se continue et nous avons-nous aussi comme les disciples d’Emmaüs à cheminer avec la Parole de Dieu, ce que nous faisons en particulier à chaque dimanche dans l’Eucharistie dont le souper d’Emmaüs est une belle image.
C’est en partageant les signes de la présence du Ressuscité que les disciples ont pu reprendre, joyeux et rassurés, leur route de tous les jours. C’est en partageant dans l’Eucharistie que nous le ferons nous aussi assurés que le Seigneur Ressuscité est toujours présent avec nous.
N’ayons pas peur de lui redire comme les disciples d’Emmaüs : « Reste avec nous ! »
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

BENOÎT XVI – AUDIENCE GÉNÉRALE – Le ‘Grand Hallel’ Psaume 136 (135)

20 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2011/documents/hf_ben-xvi_aud_20111019.html

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BENOÎT XVI – AUDIENCE GÉNÉRALE – Le ‘Grand Hallel’ Psaume 136 (135)

Place Saint-Pierre
Mercredi 19 octobre 2011

Chers frères et sœurs,

je voudrais méditer aujourd’hui avec vous sur un Psaume qui résume toute l’histoire du salut dont l’Ancien Testament nous apporte le témoignage. Il s’agit d’un grand hymne de louange qui célèbre le Seigneur dans les manifestations multiples et répétées de sa bonté tout au long de l’histoire des hommes : c’est le Psaume 136 — ou 135 selon la tradition gréco-latine.
Prière solennelle d’action de grâce, connu comme le « Grand Hallel », ce Psaume est chanté traditionnellement à la fin du repas pascal juif et a probablement été prié également par Jésus lors de la dernière Pâque célébrée avec les disciples ; c’est à lui en effet que semble faire allusion l’annotation des évangélistes : « Après le chant des psaumes, ils partirent pour le mont des Oliviers » (cf. Mt 26, 30; Mc 14, 26). L’horizon de la louange illumine ainsi le chemin difficile du Golgotha. Tout le Psaume 136 se déroule sous forme de litanie, rythmée par la répétition de l’antienne « car éternel est son amour ». Tout au long de la composition, sont énumérés les nombreux prodiges de Dieu dans l’histoire des hommes et ses interventions constantes en faveur de son peuple ; et à chaque proclamation de l’action salvifique du Seigneur répond l’antienne avec la motivation fondamentale de la louange : l’amour éternel de Dieu, un amour qui, selon le terme hébreu utilisé, implique fertilité, miséricorde, bonté, grâce, tendresse. Tel est le motif unifiant de tout le Psaume, répété toujours sous la même forme, tandis que changent ses manifestations ponctuelles et paradigmatiques : la création, la libération de l’exode, le don de la terre, l’aide providentielle et constante du Seigneur à l’égard de son peuple et de chaque créature.
Après une triple invitation à l’action de grâce au Dieu souverain (vv. 1-3), on célèbre le Seigneur comme Celui qui a fait « des merveilles » (v. 4), dont la première est la création : le ciel, la terre, les étoiles (vv. 5-9). Le monde créé n’est pas un simple scénario dans lequel s’inscrit l’action salvifique de Dieu, mais c’est le début même de cette action merveilleuse. Avec la création, le Seigneur se manifeste dans toute sa bonté et sa beauté, il se compromet avec la vie, révélant une volonté de bien dont jaillit toute autre action de salut. Et dans notre Psaume, faisant écho au premier chapitre de la Genèse, le monde créé est synthétisé dans ses éléments principaux, en insistant en particulier sur les astres, le soleil, la lune, les étoiles, créatures magnifiques qui gouvernent le jour et la nuit. On ne parle pas ici de la création de l’être humain, mais il est toujours présent ; le soleil et la lune sont pour lui — pour l’homme — pour rythmer le temps de l’homme, le mettant en relation avec le Créateur en particulier à travers l’indication des temps liturgiques.
C’est précisément la fête de Pâques qui est évoquée immédiatement après lorsque, passant à la manifestation de Dieu dans l’histoire, commence le grand événement de la libération de l’esclavage de l’Egypte, de l’exode, retracé dans ses éléments les plus significatifs : la libération de l’Egypte avec la plaie des premiers-nés égyptiens, le départ de l’Egypte, le passage de la Mer Rouge, le cheminement dans le désert jusqu’à l’entrée en terre promise (vv. 10-20). Nous nous trouvons au moment originel de l’histoire d’Israël. Dieu est intervenu à travers toute sa puissance pour conduire son peuple à la liberté; à travers Moïse, son envoyé, il s’est imposé au pharaon, se révélant dans toute sa grandeur et, enfin, a écrasé la résistance des Egyptiens par le terrible fléau de la mort des premiers-nés. Ainsi, Israël peut quitter le pays de l’esclavage, avec l’or de ses oppresseurs (cf. Ex 12, 35-36), « sortant la main haute » (Ex 14, 8), sous le signe exultant de la victoire. Au bord de la Mer rouge également, le Seigneur agit avec une puissance miséricordieuse. Devant un peuple d’Israël effrayé à la vue des Egyptiens qui le poursuivent, au point de regretter d’avoir quitté l’Egypte (cf. Ex 14, 10-12), Dieu, comme le dit notre Psaume, « sépara en deux parts la mer des Joncs… fit passer Israël en son milieu… Y culbutant pharaon et son armée » (vv. 13-15). L’image de la Mer rouge « séparée en deux » semble évoquer l’idée de la mer comme un grand monstre qui est coupé en deux morceaux et est rendu ainsi inoffensif. La puissance du Seigneur vainc le danger des forces de la nature et des forces militaires déployées par les hommes: la mer, qui semblait barrer la route au peuple de Dieu, laisse passer Israël au sec, puis se referme sur les Egyptiens, les emportant. « La main forte et le bras étendu » du Seigneur (cf. Dt 5, 15; 7, 19; 26, 8) se montrent ainsi dans toute leur force salvifique: l’oppresseur injuste a été vaincu, englouti par les eaux, tandis que le peuple de Dieu « passe en son milieu » pour poursuivre son chemin vers la liberté.
Notre Psaume fait à présent référence à ce chemin, en rappelant par une phrase très brève le long pèlerinage d’Israël vers la terre promise : « Il mena son peuple au désert, car éternel est son amour ! » (v. 16). Ces quelques mots contiennent une expérience de quarante ans, un temps décisif pour Israël qui, se laissant guider par le Seigneur, apprend à vivre de la foi, dans l’obéissance et dans la docilité à la loi de Dieu. Ce sont des années difficiles, marquées par la dureté de la vie dans le désert, mais aussi des années heureuses, de confiance dans le Seigneur, de confiance filiale; c’est le temps de la « jeunesse » comme le définit le prophète Jérémie en parlant à Israël, au nom du Seigneur, avec des expressions pleines de tendresse et de nostalgie : « Je me rappelle l’affection de ta jeunesse, l’amour de tes fiançailles, alors que tu marchais derrière moi au désert, dans une terre qui n’est pas ensemencée » (Jr 2, 2). Le Seigneur, comme le pasteur du Psaume 23 que nous avons contemplé dans une catéchèse, a guidé son peuple pendant quarante ans, l’a éduqué et aimé, le conduisant jusqu’à la terre promise, vainquant également les résistances et l’hostilité de peuples ennemis qui voulaient faire obstacle à son chemin de salut (cf. vv. 17-20).
Dans l’énumération des « grandes merveilles » que notre Psaume énonce, on parvient ainsi au moment du don conclusif, dans l’accomplissement de la promesse divine faite aux pères : « Il donna leur terre en héritage, car éternel est son amour ! En héritage à Israël son serviteur, car éternel est son amour ! » (vv. 21-22). Dans la célébration de l’amour éternel du Seigneur, on fait à présent mémoire du don de la terre, un don que le peuple doit recevoir sans jamais en prendre possession, vivant continuellement dans une attitude de recueillement reconnaissant et plein de gratitude. Israël reçoit le territoire dans lequel habiter comme « héritage », un terme qui désigne de manière générique la possession d’un bien reçu d’un autre, un droit de propriété qui, de manière spécifique, fait référence au patrimoine paternel. Une des prérogatives de Dieu est de « donner » ; et à présent, à la fin du chemin de l’exode, Israël, destinataire du don, comme un fils, entre dans le pays de la promesse accomplie. Le temps du vagabondage, sous les tentes, dans une vie marquée par la précarité, est fini. A présent a commencé le temps heureux de la stabilité, de la joie de construire des maisons, de planter les vignes, de vivre dans la sécurité (cf. Dt 8, 7-13). Mais c’est également le temps de la tentation de l’idolâtrie, de la contamination avec les païens, de l’autosuffisance qui fait oublier l’Origine du don. C’est pourquoi le psalmiste mentionne l’humiliation et les ennemis, une réalité de mort dans laquelle le Seigneur, encore une fois, se révèle comme le Sauveur : « Il se souvint de nous dans notre abaissement, car éternel est son amour ! Il nous sauva de la main des oppresseurs, car éternel est son amour ! » (vv. 23-24).
Dès lors se pose la question: comment pouvons-nous faire de ce Psaume une prière qui soit nôtre, comment pouvons-nous nous approprier, par notre prière, de ce Psaume ? Le cadre du Psaume est important, au début et à la fin : c’est la création. Nous reviendrons sur ce point: la création comme le grand don de Dieu dont nous vivons, dans lequel il se révèle dans sa bonté et sa grandeur. Et donc, avoir à l’esprit la création comme don de Dieu est un point qui nous est commun à tous. Vient ensuite l’histoire du salut. Naturellement, nous pouvons dire: cette libération de l’Egypte, le temps du désert, l’entrée en Terre Sainte puis les autres problèmes, sont très loin de nous, ils n’appartiennent pas à notre histoire. Mais nous devons être attentifs à la structure fondamentale de cette prière. La structure fondamentale est qu’Israël se rappelle de la bonté du Seigneur. Dans cette histoire, il y a beaucoup de vallées obscures, il y a beaucoup de moments marqués par la difficulté et la mort, mais Israël se rappelle que Dieu était bon et qu’il peut survivre dans cette vallée obscure, dans cette vallée de la mort, parce qu’il se souvient. Il garde en mémoire la bonté du Seigneur, de sa puissance ; sa miséricorde vaut pour l’éternité. Et cela est important pour nous aussi : garder en mémoire la bonté du Seigneur. La mémoire devient force de l’espérance. La mémoire nous dit : Dieu existe, Dieu est bon, éternelle est sa miséricorde. Et ainsi, la mémoire ouvre, même dans l’obscurité d’un jour, d’un temps, la route vers l’avenir : elle est lumière et étoile qui nous guide. Nous avons nous aussi une mémoire du bien, de l’amour miséricordieux, éternel de Dieu. L’histoire d’Israël appartient déjà à notre mémoire aussi, la mémoire de la façon dont Dieu s’est montré, a créé son peuple. Puis Dieu s’est fait homme, l’un d’entre nous : il a vécu avec nous, il a souffert avec nous, il est mort pour nous. Il reste avec nous dans le Sacrement et dans la Parole. C’est une histoire, une mémoire de la bonté de Dieu qui nous assure sa bonté: son amour est éternel. Et puis aussi en ces deux mille ans de l’histoire de l’Eglise, il y a toujours, à nouveau, la bonté du Seigneur. Après la période obscure de la persécution nazie et communiste, Dieu nous a libérés, il a montré qu’il est bon, qu’il a de la force, que sa miséricorde vaut pour toujours. Et, comme dans l’histoire commune, collective, est présente cette mémoire de la bonté de Dieu, elle nous aide, elle devient étoile de l’espérance, ainsi, chacun aussi a son histoire personnelle de salut, et nous devons réellement tirer profit de cette histoire, avoir toujours à l’esprit la mémoire des grandes choses qu’il a faites dans ma vie aussi, pour avoir confiance : sa miséricorde est éternelle. Et si aujourd’hui, je suis dans la nuit obscure, demain, Il me libère car sa miséricorde est éternelle.
Revenons au Psaume, parce que, à la fin, il revient à la création. Le Seigneur — c’est ce qui est dit — « à toute chair, il donne le pain, éternel est son amour ! » (n. 25). La prière du Psaume se conclut par une invitation à la louange : « Rendez grâce au Dieu du ciel, éternel est son amour ! ». Le Seigneur est le Père bon et prévoyant, qui donne son héritage à ses fils et offre à tous la nourriture pour vivre. Le Dieu qui a créé les cieux et la terre et les grandes lumières célestes, qui entre dans l’histoire des hommes pour conduire au salut tous ses enfants est le Dieu qui comble l’univers de sa présence de bien en étant attentif à la vie et en donnant du pain. La puissance invisible du Créateur et Seigneur chantée dans le Psaume se révèle dans la petite visibilité du pain qu’il nous donne, avec lequel il nous fait vivre. Et ainsi, ce pain quotidien symbolise et synthétise l’amour de Dieu comme Père, et nous ouvre à l’accomplissement néo-testamentaire, à ce « pain de vie », l’Eucharistie, qui nous accompagne dans notre existence de croyants, en anticipant la joie définitive du banquet messianique au Ciel.
Frères et sœurs, la louange de bénédiction du Psaume 136 nous a fait reparcourir les étapes les plus importantes de l’histoire du salut, jusqu’à parvenir au mystère pascal, où l’action salvifique de Dieu arrive à son sommet. Avec une joie reconnaissante nous célébrons donc le Créateur, Sauveur et Père fidèle, qui « a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle » (Jn 3, 16). Dans la plénitude des temps, le Fils de Dieu se fait homme pour donner la vie, pour le salut de chacun de nous, et il se donne comme pain dans le mystère eucharistique pour nous faire entrer dans son alliance qui fait de nous ses fils. C’est à ce point que s’élève la bonté miséricordieuse de Dieu et la sublimité de son « amour pour toujours ».
Je veux donc conclure cette catéchèse en faisant miennes les paroles que saint Jean écrit dans sa Première Lettre et que nous devrions toujours avoir à l’esprit dans notre prière : « Voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés fils de Dieu — et nous le sommes » (1 Jn 3, 1). Merci.

HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A OU DIMANCHE DE LA MISÉRICORDE DIVINE « VIVANT POUR DIEU ÉTERNELLEMENT »

17 avril, 2020

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HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DE PÂQUES ANNÉE A OU DIMANCHE DE LA MISÉRICORDE DIVINE « VIVANT POUR DIEU ÉTERNELLEMENT »

Textes : Actes 2, 42-47, 1 Pierre 1, 3-9 et Jean 20, 19-31.

Habituellement, le 2e dimanche de Pâques que nous vivons met devant nos yeux les nouveaux baptisés qui depuis la Vigile pascale ont été revêtus d’un vêtement blanc marquant leur passage avec le Christ ressuscité vers une vie nouvelle pour Dieu. Hélas en 2020, en raison de la pandémie de la maladie du coronavirus COVID-19 les baptêmes dans la Nuit de Pâques n’ont pas eu lieu. Quoiqu’il en soit, le symbolisme de la liturgie demeure. Dans les temps anciens, les nouveaux baptisés portaient leur vêtement blanc, leur aube blanche, pendant toute la semaine et le huitième jour ils le déposaient à l’église et on donnait au 2e Dimanche de Pâques le nom de Dimanche « in albis ».
Depuis 2008, ce 2e dimanche de Pâques a été nommé par saint Jean-Paul II le Dimanche de la Miséricorde divine. Ce faisant il donnait suite au message diffusé par sainte Faustine Kowalska (25 août 1905-5 octobre 1938), religieuse polonaise du diocèse de Cracovie, lui demandant de répandre une image de Jésus miséricordieux où il est écrit « Jésus, j’ai confiance en toi » et de proposer que le 2e dimanche de Pâques soit celui de la Miséricorde divine.

Comment vivre les beautés de ce 2e Dimanche de Pâques dont les lectures sont des plus stimulantes ?

I – Pâques dure cinquante jours
Commençons par prendre conscience que la fête de Pâques s’étend sur cinquante jours que nous appelons le « Temps de Pâques ». On ne peut découvrir et expliciter toutes les richesses de Pâques en une seule fois. Il fait bon de se laisser habiter en profondeur par ce mystère fondamental de la foi chrétienne. En effet, comme dit saint Paul, si le Christ n’est pas ressuscité, ma foi est vaine (I Corinthiens 15, 14). Elle n’a pas de sens.
Au cours des jours du Temps pascal, nous sommes replongés dans les eaux de notre baptême, nous revivons les découvertes des Apôtres et des disciples après la Pentecôte, nous relisons les Écritures avec une lumière nouvelle et nous comprenons que Celui dont parlaient les Écritures de l’Ancien Testament depuis Abraham en passant par Moïse et les prophètes c’est Jésus.
Comme le proclame saint Pierre aux gens réunis autour de lui et des apôtres le jour de la Pentecôte « ce Jésus que vous avez crucifié, Dieu a fait de lui le Seigneur et le Christ » (Actes 2, 37). Oui! dans son abaissement sur la croix, Jésus a porté toutes les fragilités et les péchés du monde. Il a été relevé par Dieu qui l’a exalté et nous l’a donné comme « premier ressuscité parmi ceux qui se sont endormis » (I Corinthiens 15, 20), notre frère Premier-né « vivant pour Dieu éternellement ». Il « est revenu à la vie, et c’est pour Dieu qu’il vit », écrit saint Paul (Romains 6, 10).
De même, comme baptisés, nous le suivons dans sa mort et sa résurrection. « Dans notre vie comme dans notre mort, nous appartenons au Seigneur » (Romains 14, 8). C’est dans ce contexte baptismal que nous sommes passés avec Jésus de la mort à la vie, d’une mortalité marquée par la finitude à une vie qui ne finit plus, à la vie éternelle.
Comment recevoir ce Mystère de la Résurrection dans nos vies ?

II – La Résurrection de Jésus, une grâce à découvrir
Les trois lectures entendues seront ici pour nous autant de voies pour nous aider à entrer dans le Mystère de la Résurrection de Jésus.
La première nous indique que c’est en communauté que nous faisons une véritable rencontre du Christ ressuscité. Voyez la petite communauté naissante celle de de tous les croyants qu’on nous présente unie dans la même foi : « Les frères étaient assidus à l’enseignement des Apôtres et à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. La crainte de Dieu était dans tous les cœurs à la vue des nombreux prodiges et signes accomplis par les Apôtres. Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; se tenant dans le Temple et attirant de plus en plus de personnes qui adhèrent au Seigneur par la foi ». Le témoignage que nous avons à rendre encore aujourd’hui est le même. C’est celui d’une foi commune vécue en communauté qui interpelle dans notre monde éclaté et invite à reconnaître Jésus comme Seigneur et Sauveur.
La seconde lecture tirée de la Première Lettre attribuée a saint Pierre invite les personnes croyantes à exprimer sans peur leur foi dans l’héritage reçu de Jésus, un héritage de vie éternelle que les soucis et le temps ne peuvent amoindrir, un héritage qui mène dans l’intimité de Dieu en union avec Jésus Ressuscité. Comme dit saint Pierre, c’est « un héritage qui ne connaîtra ni corruption, ni souillure, ni flétrissure. Cet héritage vous est réservé dans les cieux, à vous que la puissance de Dieu garde par la foi, pour un salut prêt à se révéler dans les derniers temps. Aussi vous exultez de joie ». Nous sommes les héritiers et les héritières d’une Bonne Nouvelle dont notre monde a un grand besoin. Que notre vie laisse paraître la joie qui nous habite. Oui! Exultons de joie. Ceux et celless qui nous croiseront le remarqueront. C’est le plus beau témoignage que nous pouvons donner et qui est à la portée de toutes les personnes quelles qu’elles soient.
Enfin en troisième lieu, l’évangile nous présente deux visites de Jésus Ressuscité qui sont des rencontres inoubliables pour les disciples. L’une à tout le groupe au soir de Pâques sans la présence de Thomas et l’autre une semaine plus tard. Thomas en apprenant que les autres apôtres avait rencontré le Ressuscité ne voulait pas croire ce qu’on lui racontait. Et une semaine plus tard nous le retrouvons à genoux devant le Ressuscité lui disant « Mon Seigneur et mon Dieu ». Les hésitations et les doutes de Thomas ressemblent aux nôtres parfois. Nos sens et notre raison cherchent des preuves de la résurrection. Ils n’en auront jamais. C’est une affaire de foi, une foi qui s’appuie sur des témoins qui ont fait une rencontre avec le Ressuscité qui remplit leur cœur d’une présence à nulle autre pareille. C’est ce qu’ont vécu les premiers témoins : les apôtres, Marie-Madeleine, les disciples d’Emmaüs et c’est ce que nous sommes invités à vivre. « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ».
Nous sommes donc invités ce matin à recevoir le mystère de la Résurrection dans la foi à travers des questionnements parfois semblables à ceux de l’apôtre Thomas, mais avec une confiance absolue dans le témoignage des premiers disciples qui ont vu et reconnu la présence de Jésus Ressuscité toujours vivant.

III- La fête de la Miséricorde divine
Ajoutons en terminant un mot sur la fête de la Miséricorde divine associée au 2e Dimanche de Pâques. La prière « Jésus, j’ai confiance en toi » (Jezu ufam tobie en polonais) qui figure sur l’image de Jésus miséricordieux de sainte Faustine exprime notre assurance que Dieu ouvre ses bras à toutes les personnes sans faire de distinction car « la puissance de Dieu est amour et sa justice est miséricorde » dit justement le pape François dans un tweet posté sur son compte Twitter. Notre attitude de confiance est l’expression concrète de notre abandon à la Miséricorde divine. En nous jetant dans les bras de Jésus nous nous remettons totalement entre les mains de la Miséricorde divine.
Sainte Faustine propose des moyens concrets pour développer ce sens de la Miséricorde divine comme le chapelet de la miséricorde, l’arrêt pour un moment de prière dans l’après-midi à 15 heures l’heure de la mort du Christ en croix, la prière devant l’image de Jésus miséricordieux, la neuvaine de la miséricorde du Vendredi Saint au 2e dimanche de Pâques.
Ces gestes de dévotion ont été entérinés par l’autorité de l’Église en nommant le 2e dimanche de Pâques le Dimanche de la Miséricorde divine. Ils rejoignent plusieurs chrétiens et chrétiennes.

Conclusion
Que la célébration eucharistique de ce dimanche vécue soit en famille soit par internet ou par la télévision à cause du confinement où nous relègue la COVID-19 nous garde malgré tout dans la joie de Pâques et la confiance dans le Père qui a ressuscité Jésus pour en faire le Seigneur et le Sauveur de l’humanité.
Ainsi nous pourrons, chacun et chacune dans nos milieux de travail, dans nos familles, dans nos lieux de loisirs et/ou de retraite être des témoins que Jésus est vivant et que la puissance de Dieu qui l’a ressuscité des morts se manifeste principalement dans la miséricorde.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Séminaire de Québec
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval

14 avril 2020

« La Fête de la Miséricorde est issue de mes entrailles, je désire qu’elle soit fêtée solennellement le premier dimanche après Pâques. Le genre humain ne trouvera pas la paix tant qu’il ne se tournera pas vers la source de ma Miséricorde. » (Petit Journal de saint Faustine Kowalska, § 699).
« Dis, ma fille, que la fête de la Miséricorde a jailli de mes entrailles pour la consolation du monde entier. » (Ibidem § 1517).

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE (sur la Semaine Sante) (8.4.20)

15 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/francesco/it/audiences/2020/documents/papa-francesco_20200408_udienza-generale.html

fr

(ils l’ont reconnu quand il a rompu du pain, l’évangile d’aujourd’hui)

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE (sur la Semaine Sante) (8.4.20)

Bibliothèque du palais apostolique
Mercredi 8 avril 2020

Chers frères et sœurs, bonjour!

Durant ces semaines d’appréhension pour la pandémie qui cause tant de souffrances dans le monde, parmi les nombreuses questions que nous nous posons, il peut y en avoir également certaines sur Dieu: que fait-il face à notre douleur? Où est-il quand tout va mal? Pourquoi ne nous résoud-il pas rapidement les problèmes? Ce sont des interrogations que nous nous posons sur Dieu.
Le récit de la Passion de Jésus, qui nous accompagne au cours de ces jours saints, peut nous aider. Là aussi, en effet, tant d’interrogations s’accumulent. Les gens, après avoir écouté Jésus triomphalement à Jérusalem, se demandent s’il aurait finalement libéré le peuple de ses ennemis (cf. Lc 24, 21). Ils s’attendaient pour leur part à un Messie puissant et triomphant, avec l’épée. Au contraire, arrive un doux et humble de cœur, qui appelle à la conversion et à la miséricorde. Et c’est précisément la foule, qui l’avait d’abord glorifié, qui crie: «Qu’il soit crucifié» (Mt 27, 23). Ceux qui le suivaient, confus et effrayés, l’abandonnent. Ils pensaient: si tel est le sort de Jésus, ce n’est pas lui le Messie, parce que Dieu est fort, et Dieu est invincible.
Mais, si nous continuons à lire le récit de la Passion, nous trouvons un fait surprenant. Quand Jésus meurt, le centurion romain qui n’était pas croyant, qui n’était pas juif, mais qui était païen, qui l’avait vu souffrir sur la croix, et l’avait entendu pardonner chacun, qui avait touché du doigt son amour sans mesure, confesse: «Vraiment cet homme était fils de Dieu!» (Mc 15, 39). Il dit précisément le contraire des autres. Il dit que c’est Dieu qui est là, que c’est véritablement Dieu.
Nous pouvons nous demander aujourd’hui: quel est le véritable visage de Dieu? D’habitude, nous projetons en Lui ce que nous sommes, au plus haut degré: notre succès, notre sens de la justice, et aussi notre indignation. Mais l’Evangile nous dit que Dieu n’est pas ainsi. Il est différent et nous ne pouvions pas le connaître avec nos seules forces. C’est pourquoi il s’est fait proche, il est venu à notre rencontre et précisément à Pâque, il s’est révélé complètement. Et où s’est-il s’est révélé complètement? Sur la croix. C’est là que nous découvrons les traits du visage de Dieu. N’oublions pas, frères et sœurs, que la croix est la chaire de Dieu. Il nous fera du bien de regarder le Crucifix en silence et de voir qui est notre Seigneur: c’est Celui qui ne pointe le doigt contre personne, ni même contre ceux qui le crucifient, mais qui ouvre tout grands ses bras à tous; qui ne nous écrase pas par sa gloire, mais qui se laisse dépouiller pour nous; qui ne nous aime pas en paroles, mais qui nous donne la vie en silence; qui ne nous contraint pas, mais qui nous libère; qui ne nous traite pas en étrangers, mais qui prend sur lui notre mal, qui prend sur lui nos péchés. Ainsi, pour nous libérer des préjugés sur Dieu, regardons le Crucifix. Puis, ouvrons l’Evangile. En ces jours, tous en quarantaine et à la maison, enfermés, prenons ces deux choses en main: le Crucifix, regardons-le; et ouvrons l’Evangile. Ce sera pour nous — disons-le ainsi — comme une grande liturgie domestique, parce que ces jours-ci, nous ne pouvons pas aller à l’église. Crucifix et Evangile!
Dans l’Evangile, nous lisons que, quand les gens vont voir Jésus pour le faire roi, par exemple après la multiplication des pains, Il s’en va (cf. Jn 6, 15). Et quand les diables veulent lui révéler sa majesté divine, Il les réduit au silence (cf. Mc 1, 24-25). Pourquoi? Parce que Jésus ne veut pas être mal compris, il ne veut pas que les gens confondent le vrai Dieu, qui est amour humble, avec un dieu faux, un dieu mondain qui se donne en spectacle et qui s’impose par la force. Ce n’est pas une idole. C’est Dieu qui s’est fait homme, comme chacun de nous, et qui s’exprime comme un homme mais avec la force de sa divinité. En revanche, quand l’identité de Jésus est-elle proclamée de façon solennelle dans l’Evangile? Quand le centurion dit: «Vraiment cet homme était Fils de Dieu!». On le dit là, dès qu’il a donné sa vie sur la croix, parce que l’on ne peut plus se tromper: on voit que Dieu est tout-puissant dans l’amour, et pas d’une autre manière. C’est sa nature, parce qu’il est fait ainsi. Il est l’Amour.
On pourrait objecter: «Qu’ai-je à faire d’un Dieu si faible, qui meurt? Je préférerais un dieu fort, et un Dieu puissant!». Mais, vous savez, le pouvoir passe en ce monde, tandis que l’amour reste. Seul l’amour protège la vie que nous avons, parce qu’il embrasse nos fragilités et les transforme. C’est l’amour de Dieu qui à Pâque a guéri notre péché avec son pardon, qui a fait de la mort un passage de vie, qui a changé notre peur en confiance, notre angoisse en espérance. Pâque nous dit que Dieu peut transformer tout en bien. Qu’avec Lui, nous pouvons véritablement être sûrs que tout ira bien. Et cela n’est pas une illusion, parce que la mort et la résurrection de Jésus ne sont pas une illusion: c’est une vérité! Voilà pourquoi, le matin de Pâque, on nous dit: «N’ayez pas peur!» (cf. Mt 28, 5). Et les interrogations angoissantes sur le mal ne disparaissent pas d’un coup, mais trouvent dans le Ressuscité le fondement solide qui nous permet de ne pas faire naufrage.
Chers frères et sœurs, Jésus a changé l’histoire en se faisant proche de nous et en a fait une histoire de salut, bien qu’encore marquée par le mal. En offrant sa vie sur la croix, Jésus a également vaincu la mort. Du cœur ouvert du Crucifié, l’amour de Dieu atteint chacun de nous. Nous pouvons changer nos histoires en nous approchant de lui, en accueillant le salut qu’il nous offre. Frères et sœurs, ouvrons-lui tout notre cœur dans la prière, cette semaine, en ces jours: avec le Crucifix et avec l’Evangile. N’oubliez pas: Crucifix et Evangile. La liturgie domestique sera celle-ci. Ouvrons-lui tout notre cœur dans la prière, laissons son regard se poser sur nous, et nous comprendrons que nous ne sommes pas seuls, mais aimés, parce que le Seigneur ne nous abandonne pas et ne nous oublie pas, jamais. Et avec ces pensées, je vous souhaite une Sainte Semaine et une Sainte Pâque.

Frères et sœurs, Jésus a changé l’histoire marquée par le mal en une histoire de salut. Avec son cœur ouvert de Crucifié, il rejoint chacun de nous dans ces moments d’angoisses, de difficultés et de souffrance. En cette Semaine Sainte, qu’au milieu des drames et des épreuves que nous vivons, nos cœurs s’établissent fermement dans le Christ mort et ressuscité. Que Dieu vous bénisse!

 

Aujourd’hui à 17 h à Turin, exposition du Suaire et prière

11 avril, 2020
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Le Christ est ressuscité! Meilleurs voeux à tous

11 avril, 2020

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HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DE PÂQUES 2020 ANNÉE A « RESSUSCITÉS AVEC LE CHRIST »

10 avril, 2020

https://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-dimanche-de-Paques-2020-Annee-A-Ressuscites-avec-le-Christ_a945.html

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HOMÉLIE POUR LE DIMANCHE DE PÂQUES 2020 ANNÉE A « RESSUSCITÉS AVEC LE CHRIST »

Textes : Lectures du jour : Actes des Apôtres 10, 34c.37-43, Colossiens 3, 1-4 et Jean 20, 1-9 Marie Madeleine au tombeau

À chaque célébration eucharistique, après la consécration, le président proclame : « Il est grand le mystère de la foi ». L’assemblée répond : « Nous proclamons ta mort, Seigneur Jésus, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ».
Cette belle réponse de l’assemblée situe la résurrection de Jésus dans l’ensemble du mystère du Salut. Elle en est le cœur, mais elle ne peut être isolée de la Passion et du Retour du Christ en gloire. La résurrection n’est pas un prodige fantastique. Elle est un moment essentiel de notre foi en l’amour de Dieu qui se donne au monde dans son Fils Jésus. Elle nous invite comme le dit saint Paul dans la première lecture à « recherchez les réalités d’en haut ». C’est ce que les premiers témoins que sont Marie-Madeleine, Pierre et Jean ont été amenés à faire à la suite de leur découverte du tombeau vide.

I – Les premiers arrivés au tombeau de Jésus
Mettons-nous à leur place. D’abord Marie-Madeleine. Pleine d’amour pour Jésus, elle ne l’oublie pas et vient avec cœur lui rendre les derniers hommages qui sont de nettoyer son corps, de le purifier et de le remettre en place. Ô surprise, elle ne trouve pas le corps dans le tombeau où on l’avait mis. Elle n’en croit pas ses yeux et s’en va prévenir Pierre.
Celui-ci avec l’autre disciple, probablement Jean, se rend au tombeau. Jean qui est plus jeune arrive avant lui. Il attend Pierre qui, lui, regarde à l’intérieur. Il aperçoit les linges posés à plat, le suaire (le linge qui avait enveloppé le corps de Jésus) roulé à part à sa place. Sous le choc, il laisse entrer l’autre disciple, Jean. Là se produit un événement majeur que l’évangéliste résume en deux mots qui sont la clé pour méditer ce mystère de la résurrection de Jésus : « Il vit, et il crut ».

II – Le mystère de la résurrection de Jésus
Pourquoi le disciple croit-il? On pourrait penser que le tombeau vide est suffisant pour cet acte de foi. Mais n’est pas le cas.
La résurrection de Jésus ne se démontre pas par des preuves tangibles. Le tombeau vide n’est pas une preuve en soi. Il est un signe. Il n’est pas la raison de l’acte de foi du disciple. S’il croit à la résurrection de son Maître mort sur la croix deux jours plus tôt, c’est qu’il comprend en cet instant que le plan de Salut de Dieu, révélé dans les Écritures, s’achève dans la résurrection de son Fils qu’il relève du tombeau et qui continue ainsi d’être toujours vivant.
C’est pourquoi, nous le redisons à chaque messe comme je l’ai souligné en commençant : « Nous proclamons ta mort, nous célébrons ta résurrection et nous attendons ta venue dans la gloire ».

III – Application
« Il vit et il crut ». En ce Dimanche de Pâques nous sommes invités à aller au tombeau nous aussi, à regarder à l’intérieur avec les yeux de notre imagination. Comme Marie-Madeleine, comme Pierre et l’autre disciple, Jean, nous verrons les linges et le suaire. Nous regarderons le lieu en détail, mais notre imagination sera impuissante à nous montrer Jésus ressuscité.
La seule voie qui nous est accessible c’est celle de la foi. Cette foi n’est pas une fuite en avant ou une représentation ésotérique. Elle s’appuie sur la Parole de Dieu. Celui-ci nous donne son Fils qui, par son abaissement de la Croix, mérite l’exaltation de la résurrection qui fait toutes choses nouvelles.
« Si le Christ n’est pas ressuscité, dit saint Paul, ma foi est vaine ». (I Corinthiens 15, 17). La résurrection de Jésus ouvre toute grande la porte des réalités d’en haut à ses frères et sœurs que nous sommes. Comme Jésus ressuscité qui désormais vit totalement pour Dieu, et avec lui, nous mourons à ce qui nous écrase. Nous nous relevons avec lui de nos tombeaux et nous vivons pour Dieu.
« Lui qui est vivant, c’est pour Dieu qu’il est vivant. De même, vous aussi, pensez que vous êtes morts au péché, mais vivants pour Dieu en Jésus Christ » écrit saint Paul dans sa lettre aux chrétiens de Rome. (Romains 6, 9-11)

Conclusion
Demandons au Seigneur en ce beau jour de Pâques de sortir de nos tombeaux de toutes sortes. C’est un jour de joie. C’est un jour de libération. Avec le Christ ressuscité, recherchons les choses d’en haut comme nous y invite saint Paul dans la deuxième lecture car nous sommes ressuscités avec le Christ.
Nous pourrons ainsi apporter dans notre monde une note d’espérance et de joie. « La résurrection du Christ, écrit le pape François dans La joie de l’Évangile, produit partout les germes de ce monde nouveau; et même s’ils venaient à être taillés, ils poussent de nouveau, car la résurrection du Seigneur a déjà pénétré la trame cachée de cette histoire, car Jésus n’est pas ressuscité pour rien. Ne restons pas en marge de ce chemin de l’espérance vivante! » (Evangelii Gaudium, 278)
Avec nos frères et sœurs chrétiens d’Orient saluons-nous en ce jour de Pâques en disant : « Christos anesti. Alithos anesti! » « Christ est ressuscité. Il est vraiment ressuscité ».
Que cette salutation, en cette période de pandémie du coronavirus, mette en nous et chez nos dirigeants un espoir fondé d’en sortir victorieux et nous donne l’énergie pour suivre les directives qui éloigneront de nous ce virus invisible mais bien présent et qui a déjà fauché des milliers de vies humaines. Ayons une pensée pour ces personnes décédées et confions les à la miséricorde du Seigneur.

Amen!
__________________________________

Joyeuses Pâques !

Regarde !
La pierre du tombeau a basculé
Elle laisse passer le Vivant.

Entre ciel et terre,
Déchirure de lumière
Éclatée en millions d’étincelles.

Joyeuse nouvelle portée au monde
Comme levain, semence et feu.

Dieu-passant
Dieu-passage
Dieu-Pâque !

Dieu pour toujours
Au milieu de nous!
Alleluia !

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 1er avril 2020

8 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/francesco/fr/audiences/2020/documents/papa-francesco_20200401_udienza-generale.html

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La trahison de Judas, l’évangile d’aujourd’hui

PAPE FRANÇOIS – AUDIENCE GÉNÉRALE – 1er avril 2020

Bibliothèque du palais apostolique

Chers frères et sœurs, bonjour!

Nous lisons aujourd’hui ensemble la sixième béatitude, qui promet la vision de Dieu et qui a comme condition la pureté du cœur.
Un Psaume dit: «De toi mon cœur a dit: “Cherche sa face”. C’est ta face, Yahvé, que je cherche, ne me cache point ta face» (27, 8-9).
Ce langage manifeste la soif d’une relation personnelle avec Dieu, pas mécanique, pas un peu nébuleuse, non: personnelle, que le livre de Job exprime également comme le signe d’une relation sincère. Le livre de Job dit ainsi: «Je ne te connaissais que par ouï-dire, mais maintenant mes yeux t’ont vu» (Jb 42, 5). Et très souvent je pense que c’est le chemin de la vie, dans nos relations avec Dieu. Nous connaissons Dieu par ouï-dire, mais avec notre expérience nous allons de l’avant, de l’avant, de l’avant et, à la fin, nous le connaissons directement, si nous sommes fidèles… Et cela est la maturité de l’Esprit.
Comment arriver à cette intimité, à connaître Dieu avec les yeux? On peut penser aux disciples d’Emmaüs, par exemple, qui ont le Seigneur Jésus à côté d’eux, «mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître» (Lc 24, 16). Le Seigneur ouvrira leur regard au terme d’un chemin qui atteint son sommet dans la fraction du pain et qui avait commencé par un reproche: «Cœurs sans intelligence, lents à croire tout ce qu’ont annoncé les prophètes» (cf. Lc 24, 25). C’est le reproche du début. Voilà l’origine de leur cécité: leur cœur sans intelligence et lent. Et quand le cœur est sans intelligence et lent, on ne voit pas les choses. On voit les choses comme embrumées. C’est là que se trouve la sagesse de cette béatitude: pour pouvoir contempler, il est nécessaire de rentrer en nous et de laisser place à Dieu, car, comme le dit saint Augustin, «Dieu m’est plus intime que moi-même» («interior intimo meo»: Confessions, iii, 6, 11). Pour voir Dieu, il n’y a pas besoin de changer de lunettes ou de point d’observation, ou de changer les auteurs théologiens qui enseignent le chemin: il faut libérer le cœur de ses tromperies! C’est la seule route.
C’est une maturation décisive: lorsque nous nous rendons compte que, souvent, notre pire ennemi est caché dans notre cœur. La bataille la plus noble est celle contre les tromperies intérieures qui engendrent nos péchés. Car les péchés changent la vision intérieure, ils changent l’évaluation des choses, ils font voir des choses qui ne sont pas vraies, ou tout au moins qui ne sont pas aussi vraies.
Il est donc important de comprendre ce qu’est la «pureté du cœur». Pour le faire, il faut rappeler que pour la Bible, le cœur ne consiste pas seulement dans les sentiments, mais qu’il est le lieu le plus intime de l’être humain, l’espace intérieur ou une personne est elle-même. Cela, selon la mentalité biblique.
L’Evangile de Matthieu dit: «Si donc lalumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténèbres ce sera!» (6, 23). Cette «lumière» est le regard du cœur, la perspective, la synthèse, le point à partir duquel on lit la réalité (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 143).
Mais que veut dire un cœur «pur»? Celui qui a un cœur pur vit en présence du Seigneur, en conservant dans son cœur ce qui est digne de la relation avec Lui; ce n’est qu’ainsi qu’il possède une vie «unifiée», linéaire, qui n’est pas tortueuse mais simple.
Le cœur purifié est donc le résultat d’un processus qui implique une libération et un renoncement. Le pur de cœur ne naît pas tel, il a vécu une simplification intérieure, en apprenant à renier le mal en lui, une chose qui dans la Bible est appelée la circoncision du cœur (cf. Dt 10, 16; 30, 6; Ez 44, 9; Jr 4, 4).
Cette purification intérieure implique la reconnaissance de cette partie du cœur qui est sous l’influence du mal — «Vous savez, Père, je sens ainsi, je pense ainsi, je vois ainsi, et c’est laid»: reconnaître la partie laide, la partie qui est embrumée par le mal — pour apprendre l’art de se laisser toujours enseigner et conduire par l’Esprit Saint. Le chemin du cœur malade, du cœur pécheur, du cœur qui ne peut pas bien voir les choses, parce qu’il est dans le péché, est l’œuvre de l’Esprit Saint qui conduit à la plénitude de la lumière du cœur. C’est lui qui nous guide pour accomplir ce chemin. Voilà, à travers ce chemin du cœur, nous arrivons à «voir Dieu».
Dans cette vision béatifique, il y a une dimension future, eschatologique, comme dans toutes les Béatitudes: c’est la joie du Royaume des cieux vers lequel nous allons. Mais il y a aussi l’autre dimension: voir Dieu signifie comprendre les desseins de la Providence dans ce qui nous arrive, reconnaître sa présence dans les sacrements, sa présence dans nos frères, en particulier pauvres et qui souffrent, et le reconnaître là où Il se manifeste (cf. Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 2519).
Cette béatitude est un peu le fruit des précédentes: si nous avons écouté la soif de bien qui nous habite et que nous sommes conscients de vivre de miséricorde, un chemin de libération commence qui dure toute la vie et qui conduit jusqu’au Ciel. C’est un travail sérieux, un travail que fait l’Esprit Saint si nous lui laissons place pour qu’il le fasse, si nous sommes ouverts à l’action de l’Esprit Saint. C’est pourquoi nous pouvons dire que c’est une œuvre de Dieu en nous — dans les épreuves et dans les purifications de la vie — et cette œuvre de Dieu et de l’Esprit Saint conduit à une grande joie, à une vraie paix. N’ayons pas peur, ouvrons les portes de notre cœur à l’Esprit Saint pour qu’il nous purifie et nous fasse avancer sur ce chemin vers la joie en plénitude.
Je salue cordialement les personnes de langue française. Frères et sœurs, profitons de ce temps de carême pour entendre cette soif de Dieu qui habite en nous. Poursuivons notre chemin de libération, à travers les épreuves et les purifications de la vie, qui nous conduise à la gloire du ciel. Que Dieu vous bénisse.

 

MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – 21 avril 2011

6 avril, 2020

http://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2011/documents/hf_ben-xvi_hom_20110421_coena-domini.html

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MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI – 21 avril 2011

Basilique Saint-Jean-de-Latran

Chers frères et sœurs,

«J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir!» (Lc22, 15). Par ces mots, Jésus a ouvert la célébration de son dernier banquet et de l’institution de la sainte Eucharistie. Jésus est allé au devant de cette heure, en la désirant. Au fond de lui-même, il a attendu ce moment où il se donnerait lui-même aux siens sous les espèces du pain et du vin. Il a attendu ce moment qui aurait dû être en quelque sorte les véritables noces messianiques: la transformation des dons de cette terre et le fait de devenir un avec les siens, pour les transformer et inaugurer ainsi la transformation du monde. Dans le désir de Jésus, nous pouvons reconnaître le désir de Dieu lui-même – son amour pour les hommes, pour sa création, un amour en attente. L’amour qui attend le moment de l’union, l’amour qui veut attirer les hommes à soi, pour ainsi réaliser entièrement le désir de la création elle-même: en effet, celle-ci est tendue vers la manifestation des fils de Dieu (cf. Rm 8, 19). Jésus nous désire, il nous attend. Et nous, le désirons-nous vraiment? Nous sentons-nous poussés intérieurement à le rencontrer? Désirons-nous ardemment sa proximité, devenir un avec lui, don qu’il nous fait dans la sainte Eucharistie? Ou bien sommes-nous indifférents, distraits, remplis d’autres choses? D’après les paraboles de Jésus sur les banquets, nous savons qu’il connaît la réalité des places restées vides, la réponse négative, le désintérêt pour lui et pour sa proximité. Les places vides au banquet nuptial du Seigneur, avec ou sans excuses, sont pour nous, depuis longtemps désormais, non pas une parabole, mais une réalité présente, précisément dans ces pays auxquels il avait manifesté sa proximité particulière. Jésus savait aussi que des invités seraient venus, oui, mais sans être revêtus de l’habit nuptial – sans la joie de sa proximité, suivant seulement une habitude, et avec une tout autre orientation de leur vie. Saint Grégoire le Grand, dans une de ses homélies, se demandait: quel genre de personnes sont celles qui viennent sans habit nuptial? En quoi consiste cet habit et comment l’acquiert-on? Sa réponse est: ceux qui ont été appelés et viennent ont en quelque sorte la foi. C’est la foi qui leur ouvre la porte. Mais il leur manque l’habit nuptial de l’amour. Celui qui ne vit pas la foi en tant qu’amour n’est pas préparé pour les noces et il est jeté dehors. La communion eucharistique requiert la foi, mais la foi requiert l’amour, autrement elle est morte aussi comme foi.
À travers les quatre Évangiles, nous savons que le dernier banquet de Jésus, avant sa Passion, a été aussi un lieu d’annonce. Jésus a proposé encore une fois avec insistance les éléments fondamentaux de son message. Parole et Sacrement, message et don sont inséparablement unis. Cependant, durant son dernier banquet, Jésus a surtout prié. Matthieu, Marc et Luc utilisent deux mots pour décrire la prière de Jésus au moment central de la Cène: «eucharistesas» et «eulogesas» – «remercier» et «bénir». Le mouvement ascendant du remerciement et celui descendant de la bénédiction vont ensemble. Les paroles de la transsubstantiation font partie de cette prière de Jésus. Ce sont des paroles de prière. Jésus transforme sa Passion en prière, en offrande au Père pour les hommes. Cette transformation de sa souffrance en amour possède une force transformante pour les dons dans lesquels, à présent, il se donne lui-même. Il nous les donne afin que nous-mêmes et le monde soyons transformés. Le but véritable et dernier de la transformation eucharistique c’est notre transformation elle-même dans la communion avec le Christ. L’Eucharistie vise l’homme nouveau, le monde nouveau tel qu’il peut naître uniquement à partir de Dieu à travers l’œuvre du Serviteur de Dieu.
Grâce à Luc et surtout à Jean, nous savons que Jésus dans sa prière durant la Dernière Cène a aussi adressé des suppliques au Père – suppliques qui, en même temps, contiennent des appels à ses disciples d’alors et de tout temps. En cette heure, je voudrais choisir uniquement une supplique que, selon Jean, Jésus a répétée quatre fois au cours de sa Prière sacerdotale. Combien a-t-elle dû le préoccuper en son for intérieur! Elle reste constamment sa prière au Père pour nous: c’est la prière pour l’unité. Jésus dit explicitement que cette supplique n’est pas valable seulement pour les disciples présents à ce moment-là, mais qu’elle concerne tous ceux qui croiront en lui (cf. Jn 17, 20). Elle demande que tous soient un «comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, afin que le monde croie» (Jn 17, 21). L’unité des chrétiens ne peut se réaliser que si les chrétiens sont intimement unis à lui, à Jésus. Foi et amour pour Jésus, foi dans son être un avec le Père et ouverture à l’unité avec lui sont essentiels. Cette unité n’est donc pas seulement quelque chose d’intérieur, de mystique. Elle doit devenir visible, visible au point de constituer pour le monde la preuve que Jésus a été envoyé en mission par le Père. C’est pour cela que cette supplique a un sens eucharistique caché que Paul a clairement mis en évidence dans la Première Lettre aux Corinthiens: «Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, à plusieurs nous ne sommes qu’un corps, car tous nous participons à ce pain unique.» (1 Co 10, 16s). Avec l’Eucharistie naît l’Église. Nous tous nous mangeons le même pain, nous recevons le même corps du Seigneur, ce qui signifie qu’Il ouvre chacun de nous, au-delà de lui-même. Il nous rend tous un. L’Eucharistie est le mystère de la proximité et de la communion intimes de chacun avec le Seigneur. Et, en même temps, elle est l’union visible de tous. L’Eucharistie est Sacrement de l’unité. Elle parvient jusque dans le mystère trinitaire, et elle crée ainsi, en même temps, l’unité visible. Disons-le encore une fois: elle est la rencontre très personnelle avec le Seigneur et, toutefois, elle n’est jamais seulement un acte individuel de dévotion. Nous la célébrons nécessairement tous ensemble. Dans chaque communauté, le Seigneur est présent de manière totale. Mais il est un seul dans toutes les communautés. C’est pourquoi les paroles: «Una cum Papa nostro et cum Episcopo nostro» font nécessairement partie de la prière eucharistique de l’Église. Ce n’est pas un ajout extérieur à ce qui se produit intérieurement, mais une expression nécessaire de la réalité eucharistique elle-même. Et nous mentionnons le Pape et l’Évêque par leur nom: l’unité est tout-à-fait concrète, elle porte des noms. Ainsi l’unité devient visible, elle devient signe pour le monde et elle établit pour nous-mêmes un critère concret.
Saint Luc a conservé pour nous un élément concret de la prière de Jésus pour l’unité: «Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment; mais moi j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères» (Lc 22, 31s). Aujourd’hui nous constatons de nouveau avec douleur qu’il a été concédé à Satan de cribler les disciples, de manière visible, face au monde entier. Et nous savons que Jésus prie pour la foi de Pierre et de ses successeurs. Nous savons que Pierre qui, à travers les eaux agitées de l’histoire va à la rencontre du Seigneur et risque de couler, est toujours à nouveau soutenu par la main du Seigneur et guidé sur les eaux. Mais après suit une annonce et une tâche. «Toi donc, quand tu seras revenu…»: Tous les êtres humains, excepté Marie, ont continuellement besoin de conversion. Jésus prédit à Pierre sa chute et sa conversion. De quoi Pierre a-t-il dû se convertir? Au début, lors de son appel, effrayé par le pouvoir divin du Seigneur et par sa propre misère, Pierre avait dit: «Éloigne-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur!» (Lc 5, 8). À la lumière du Seigneur, il reconnaît son imperfection. C’est précisément ainsi, dans l’humilité de celui qui se sait pécheur, qu’il est appelé. Il doit toujours retrouver à nouveau cette humilité. Près de Césarée de Philippe, Pierre n’avait pas voulu accepter que Jésus ait à souffrir et à être crucifié. Cela n’était pas conciliable avec l’image qu’il se faisait de Dieu et du Messie. Au Cénacle, il n’a pas voulu accepter que Jésus lui lave les pieds: cela n’allait pas avec son idée de la dignité du Maître. Au Jardin des Oliviers, il a frappé de son glaive. Il voulait démontrer son courage. Cependant, devant la servante, il a affirmé ne pas connaître Jésus. À ce moment-là, cela ne lui semblait qu’un petit mensonge, pour pouvoir rester près de Jésus. Son héroïsme s’est effondré à cause d’un jeu mesquin pour une place au centre des évènements. Nous tous nous devons toujours à nouveau apprendre à accepter Dieu et Jésus Christ tel qu’il est, et non tel que nous voudrions qu’il soit. Nous aussi nous avons du mal à accepter qu’il se soit lié aux limites de son Église et de ses ministres. Nous non plus nous ne voulons pas accepter qu’il soit sans pouvoir en ce monde. Nous aussi nous nous cachons derrière des prétextes, lorsque notre appartenance au Christ devient trop coûteuse et trop dangereuse. Nous tous nous avons besoin de conversion pour accueillir Jésus dans son être-Dieu et son être-Homme. Nous avons besoin de l’humilité du disciple qui observe la volonté du Maître. En cette heure, nous voulons le prier de nous regarder nous aussi comme il a regardé Pierre, au moment propice, avec ses yeux bienveillants, et de nous convertir.
Pierre, le converti, est appelé à affermir ses frères. Ce n’est pas un fait extérieur que cette tâche lui soit confiée au Cénacle. Le service de l’unité a son lieu visible dans la célébration de la sainte Eucharistie. Chers amis, pour le Pape c’est un grand réconfort que de savoir qu’au cours de chaque Célébration eucharistique, tous prient pour lui; que notre prière s’unit à la prière du Seigneur pour Pierre. C’est seulement grâce à la prière du Seigneur et de l’Église que le Pape peut accomplir sa tâche d’affermir ses frères – de paître le troupeau de Jésus et de se porter garant de cette unité qui devient témoignage visible de la mission de Jésus de la part du Père.
«J’ai ardemment désiré manger cette Pâque avec vous». Seigneur, tu nous désires, tu me désires. Tu désires te donner toi-même à nous dans la sainte Eucharistie, t’unir à nous. Seigneur, suscite aussi en nous le désir de toi. Renforce-nous dans l’unité avec toi et entre nous. Donne à ton Église l’unité, afin que le monde croie. Amen.

 

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