HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « MON FILS QUE VOILÀ ÉTAIT MORT, ET IL EST REVENU À LA VIE »
le fils prodigue
HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « MON FILS QUE VOILÀ ÉTAIT MORT, ET IL EST REVENU À LA VIE »
Josué 5, 9a.10-12, 2 Corinthiens 5, 17-21 et Luc 15, 1-3.11-32.
Lors d’une retraite internationale à Assise, j’ai eu l’occasion de vivre une célébration du sacrement de la réconciliation tout à fait particulière. Cette célébration animée par des membres de la Communauté du Chemin Neuf m’avait marqué. S’inspirant de la parabole du fils prodigue ou mieux du père miséricordieux, le groupe a commencé par mimer sans paroles le récit de cette parabole archiconnue. Ils l’ont fait avec un art consommé. Par leurs gestes et leurs attitudes inspirés de la parabole, ils nous faisaient entrer petit à petit dans la démarche du sacrement de la réconciliation.
En effet, le sacrement de la réconciliation ou du pardon est à l’image de ces retrouvailles du fils prodigue avec son père. C’est donc en m’inspirant de la parabole de saint Luc que nous venons d’entendre, que je voudrais, ce matin, nous aider à entrer dans le sacrement de la réconciliation en rappelant et commentant brièvement les actes qui le constituent et que le Catéchisme de l’Église catholique appelle les actes du pénitent : la contrition, l’aveu ou la confession des fautes et la pénitence ou la satisfaction (no 1450).
Reprenons donc le récit de saint Luc pour approfondir la démarche de réconciliation que nous sommes invités à faire durant le temps du Carême. Commençons par la contrition.
I – La contrition
Le Catéchisme de l’Église catholique la définit ainsi : Elle est « une douleur de l’âme et une détestation du péché commis avec la résolution de ne plus pécher à l’avenir » (no 1451).
Regardons comment le fils prodigue vit cette attitude de contrition. Celui-ci commence par prendre conscience de sa situation. Il se regarde au moment où il a tout perdu et, alors, en lui naît le désir de revenir sur les gestes qu’il a fait. Il en est profondément attristé. « Alors il rentra en lui-même et se dit ‘Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim !’ » Cette ouverture ici dans le cas du fils prodigue a un côté intéressé. Il voit ce qu’il a laissé et il se compare aux ouvriers de son père. C’est ce qu’on a appelé la « contrition imparfaite ».
L’attitude du fils prodigue, même si elle est intéressée, marque le début d’un retournement, d’une mise en marche. Et un tel ébranlement de la conscience peut amorcer une évolution intérieure qui permet d’aller plus loin que son intérêt et son profit personnel pour s’en remettre à l’amour désintéressé, ce qui est la « contrition parfaite » qui provient de l’amour de Dieu aimé plus que tout (cf. no 1452).
Nous avons là l’essentiel qui est au cœur de toute démarche pénitentielle de conversion. La personne est non seulement touchée par sa situation de refus ou de faute, mais elle est prête à mettre tout son cœur et ses efforts pour en sortir. Comment le faire ? En avouant et en confessant ses fautes.
II – L’aveu ou la confession
L’aveu ou la confession de ses péchés ou de ses fautes est le deuxième acte demandé à toute personne qui se présente au sacrement de la réconciliation. Dans le Catéchisme de l’Église catholique on cite cette belle phrase de saint Augustin pour décrire ce geste : « Le commencement des œuvres bonnes, c’est la confession des œuvres mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière » (S. Augustin, ev. Jo. 12, 13).
Le fils prodigue vit cet aveu intensément tout d’abord dans son cœur avant la rencontre de son père. Il en fait une visualisation : « Je lui dirai : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers’ ». C’est là qu’on voit qu’il est important de s’arrêter de temps à autre pour relire sa vie et faire le point.
Une fois cette prise de conscience faite, le fils prodigue passe à l’acte. Il se lève et se met en marche. Il arrive non loin de la maison de son père qui l’aperçoit. Une fois devant lui, il tombe à genoux en se jetant dans ses bras et il confesse sa faute : « Le fils lui dit : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.’ »
Cet aveu ou confession dans la pratique actuelle du sacrement de la réconciliation porte sur les fautes graves, mais il porte aussi sur tout ce qui nous éloigne de notre vocation de disciple de Jésus. Rien de ce que nous vivons n’y échappe : vie sociale, personnelle, familiale, ecclésiale, spirituelle etc. L’examen de conscience, une pratique recommandée par les Exercices spirituels de saint Ignace, est très approprié pour nous permettre de faire ainsi le point dans nos vies et de mieux profiter de nos rencontres avec Dieu par l’intermédiaire du prêtre dans le sacrement de la réconciliation.
On peut le faire de diverses façons : à partir de textes de la Parole de Dieu comme celui des Béatitudes par exemple, à partir de nos conditions de vie et de nos obligations familiales ou professionnelles, à partir des commandements de Dieu etc. L’important c’est de le faire dans un climat de prière. Saint Ignace y insiste au no 43 des Exercices en présentant les cinq points de cet examen : rendre grâce à Dieu pour les bénédictions reçues, demander la grâce de connaître nos péchés et de les éradiquer, demander des comptes à l’âme des pensées, des mots et des actions, demander pardon à Dieu pour nos manquements, proposer de nous racheter par sa grâce.
III – La pénitence ou la satisfaction
Revenons au fils prodigue. Les paroles qu’il a longuement méditées sont à peine prononcées dans son aveu, sa confession, que son père lui manifeste un pardon total rempli de la joie de retrouver son fils qu’il avait perdu. « Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé ».
C’est ce qui nous arrive à chaque fois que nous nous approchons du sacrement de la réconciliation. Dieu par le ministère du prêtre qui nous reçoit et nous écoute nous prend dans ses bras et nous revêt de la joie de nous retrouver près de lui dans des sentiments de regret et avec une volonté d’aller plus loin sur le chemin de la sainteté dans l’avenir .
Cette volonté d’aller plus loin nous incitera à corriger ce qu’il y a à corriger chez nous, à limiter les marques des fautes passées par une claire volonté de pénitence ou de satisfaction comme le dit le Catéchisme de L’Église catholique : « Relevé du péché, le pécheur doit encore recouvrer la pleine santé spirituelle ». (no 1459)
Cette étape de « recouvrement de la pleine santé spirituelle » nous renvoie à nos occupations quotidiennes avec un regard nouveau pour tenter avec la grâce de Dieu de devenir de plus en plus de dignes fils ou filles de Dieu.
Conclusion
Ce bref parcours de la parabole bien connue du fils prodigue ou du père miséricordieux en lien avec la démarche que nous faisons dans le sacrement de la réconciliation pourra, je l’espère, nous aider à mieux vivre ce sacrement en ce temps du Carême.
Qu’il soit toujours pour nous une rencontre où comme le fils prodigue nous nous jetons dans les bras de celui qui est notre Père miséricordieux. et qui nous invite chaque fois que nous nous approchons du sacrement de la réconciliation à célébrer avec lui cette rencontre.
Comme le fils prodigue l’a fait avec son père, dans cette Eucharistie ce matin, partageons avec notre Père miséricordieux le banquet qu’il a préparé pour nous où son Fils bien-aimé se donne à nous dans son Corps et dans son Sang pour que nous vivions de sa vie.
Et je vous souhaite une belle célébration du sacrement de la réconciliation si vous décidez de la faire en ce Carême 2019.
Amen!
Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec
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