Archive pour mars, 2019

HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « MON FILS QUE VOILÀ ÉTAIT MORT, ET IL EST REVENU À LA VIE »

29 mars, 2019

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fr figliol_prodigo

le fils prodigue

HOMÉLIE POUR LE 4E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « MON FILS QUE VOILÀ ÉTAIT MORT, ET IL EST REVENU À LA VIE »

Josué 5, 9a.10-12, 2 Corinthiens 5, 17-21 et Luc 15, 1-3.11-32.

Lors d’une retraite internationale à Assise, j’ai eu l’occasion de vivre une célébration du sacrement de la réconciliation tout à fait particulière. Cette célébration animée par des membres de la Communauté du Chemin Neuf m’avait marqué. S’inspirant de la parabole du fils prodigue ou mieux du père miséricordieux, le groupe a commencé par mimer sans paroles le récit de cette parabole archiconnue. Ils l’ont fait avec un art consommé. Par leurs gestes et leurs attitudes inspirés de la parabole, ils nous faisaient entrer petit à petit dans la démarche du sacrement de la réconciliation.
En effet, le sacrement de la réconciliation ou du pardon est à l’image de ces retrouvailles du fils prodigue avec son père. C’est donc en m’inspirant de la parabole de saint Luc que nous venons d’entendre, que je voudrais, ce matin, nous aider à entrer dans le sacrement de la réconciliation en rappelant et commentant brièvement les actes qui le constituent et que le Catéchisme de l’Église catholique appelle les actes du pénitent : la contrition, l’aveu ou la confession des fautes et la pénitence ou la satisfaction (no 1450).
Reprenons donc le récit de saint Luc pour approfondir la démarche de réconciliation que nous sommes invités à faire durant le temps du Carême. Commençons par la contrition.
I – La contrition
Le Catéchisme de l’Église catholique la définit ainsi : Elle est « une douleur de l’âme et une détestation du péché commis avec la résolution de ne plus pécher à l’avenir » (no 1451).
Regardons comment le fils prodigue vit cette attitude de contrition. Celui-ci commence par prendre conscience de sa situation. Il se regarde au moment où il a tout perdu et, alors, en lui naît le désir de revenir sur les gestes qu’il a fait. Il en est profondément attristé. « Alors il rentra en lui-même et se dit ‘Combien d’ouvriers de mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim !’ » Cette ouverture ici dans le cas du fils prodigue a un côté intéressé. Il voit ce qu’il a laissé et il se compare aux ouvriers de son père. C’est ce qu’on a appelé la « contrition imparfaite ».
L’attitude du fils prodigue, même si elle est intéressée, marque le début d’un retournement, d’une mise en marche. Et un tel ébranlement de la conscience peut amorcer une évolution intérieure qui permet d’aller plus loin que son intérêt et son profit personnel pour s’en remettre à l’amour désintéressé, ce qui est la « contrition parfaite » qui provient de l’amour de Dieu aimé plus que tout (cf. no 1452).
Nous avons là l’essentiel qui est au cœur de toute démarche pénitentielle de conversion. La personne est non seulement touchée par sa situation de refus ou de faute, mais elle est prête à mettre tout son cœur et ses efforts pour en sortir. Comment le faire ? En avouant et en confessant ses fautes.
II – L’aveu ou la confession
L’aveu ou la confession de ses péchés ou de ses fautes est le deuxième acte demandé à toute personne qui se présente au sacrement de la réconciliation. Dans le Catéchisme de l’Église catholique on cite cette belle phrase de saint Augustin pour décrire ce geste : « Le commencement des œuvres bonnes, c’est la confession des œuvres mauvaises. Tu fais la vérité et tu viens à la Lumière » (S. Augustin, ev. Jo. 12, 13).
Le fils prodigue vit cet aveu intensément tout d’abord dans son cœur avant la rencontre de son père. Il en fait une visualisation : « Je lui dirai : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi. Je ne suis plus digne d’être appelé ton fils. Traite-moi comme l’un de tes ouvriers’ ». C’est là qu’on voit qu’il est important de s’arrêter de temps à autre pour relire sa vie et faire le point.
Une fois cette prise de conscience faite, le fils prodigue passe à l’acte. Il se lève et se met en marche. Il arrive non loin de la maison de son père qui l’aperçoit. Une fois devant lui, il tombe à genoux en se jetant dans ses bras et il confesse sa faute : « Le fils lui dit : ‘Père, j’ai péché contre le ciel et envers toi.’ »
Cet aveu ou confession dans la pratique actuelle du sacrement de la réconciliation porte sur les fautes graves, mais il porte aussi sur tout ce qui nous éloigne de notre vocation de disciple de Jésus. Rien de ce que nous vivons n’y échappe : vie sociale, personnelle, familiale, ecclésiale, spirituelle etc. L’examen de conscience, une pratique recommandée par les Exercices spirituels de saint Ignace, est très approprié pour nous permettre de faire ainsi le point dans nos vies et de mieux profiter de nos rencontres avec Dieu par l’intermédiaire du prêtre dans le sacrement de la réconciliation.
On peut le faire de diverses façons : à partir de textes de la Parole de Dieu comme celui des Béatitudes par exemple, à partir de nos conditions de vie et de nos obligations familiales ou professionnelles, à partir des commandements de Dieu etc. L’important c’est de le faire dans un climat de prière. Saint Ignace y insiste au no 43 des Exercices en présentant les cinq points de cet examen : rendre grâce à Dieu pour les bénédictions reçues, demander la grâce de connaître nos péchés et de les éradiquer, demander des comptes à l’âme des pensées, des mots et des actions, demander pardon à Dieu pour nos manquements, proposer de nous racheter par sa grâce.
III – La pénitence ou la satisfaction
Revenons au fils prodigue. Les paroles qu’il a longuement méditées sont à peine prononcées dans son aveu, sa confession, que son père lui manifeste un pardon total rempli de la joie de retrouver son fils qu’il avait perdu. « Mon fils que voilà était mort, et il est revenu à la vie; il était perdu, et il est retrouvé ».
C’est ce qui nous arrive à chaque fois que nous nous approchons du sacrement de la réconciliation. Dieu par le ministère du prêtre qui nous reçoit et nous écoute nous prend dans ses bras et nous revêt de la joie de nous retrouver près de lui dans des sentiments de regret et avec une volonté d’aller plus loin sur le chemin de la sainteté dans l’avenir .
Cette volonté d’aller plus loin nous incitera à corriger ce qu’il y a à corriger chez nous, à limiter les marques des fautes passées par une claire volonté de pénitence ou de satisfaction comme le dit le Catéchisme de L’Église catholique : « Relevé du péché, le pécheur doit encore recouvrer la pleine santé spirituelle ». (no 1459)
Cette étape de « recouvrement de la pleine santé spirituelle » nous renvoie à nos occupations quotidiennes avec un regard nouveau pour tenter avec la grâce de Dieu de devenir de plus en plus de dignes fils ou filles de Dieu.

Conclusion
Ce bref parcours de la parabole bien connue du fils prodigue ou du père miséricordieux en lien avec la démarche que nous faisons dans le sacrement de la réconciliation pourra, je l’espère, nous aider à mieux vivre ce sacrement en ce temps du Carême.
Qu’il soit toujours pour nous une rencontre où comme le fils prodigue nous nous jetons dans les bras de celui qui est notre Père miséricordieux. et qui nous invite chaque fois que nous nous approchons du sacrement de la réconciliation à célébrer avec lui cette rencontre.
Comme le fils prodigue l’a fait avec son père, dans cette Eucharistie ce matin, partageons avec notre Père miséricordieux le banquet qu’il a préparé pour nous où son Fils bien-aimé se donne à nous dans son Corps et dans son Sang pour que nous vivions de sa vie.
Et je vous souhaite une belle célébration du sacrement de la réconciliation si vous décidez de la faire en ce Carême 2019.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec

PRIÈRE, ÉCHO DE L’ANGOISSE DE L’HOMME DE TERESA DELLA CROCE *

26 mars, 2019

http://www.usminazionale.it/05-2004/dellacroce.htm

fr  la madonna e due gruppi oranti

Marie et Jésus et deux groupes de fidèles

(google traduction de l’italien)

PRIÈRE, ÉCHO DE L’ANGOISSE DE L’HOMME DE TERESA DELLA CROCE *

Une appréhension inquiète, un lieu de boue habituel pour notre époque, trouve son fondement dans les cendres. Penché en avant, chargé de certitudes stupéfiantes, rassasié de doutes, l’homme s’expose à peine, comme de l’argile, à la morsure du silence, aux goulots d’étranglement de l’attente de découvrir en lui la stabilité de la terre cuite, de la maturité dans l’Esprit. Anxiété qui gonfle l’utérus 1 c’est le symptôme le plus évident de ce malaise intérieur, que peu de gens savent nommer. Des bruits, des lumières, de l’agitation, de la manie, des souffrances comme des étincelles glissent vers le haut, tandis que nos sens se retrouvent tous près des rochers de la frénésie de la vie quotidienne. Celui qui ne parvient pas à suivre sa paresse et migre d’un sentiment à l’autre lie ou sépare les pensées faibles est impérieusement rejeté par celui-ci. Il faut trouver le courage de nier une réalité faite d’apparence, de vide, de barques de roseaux qui ne gardent pas la véhémence des vagues. Il est urgent de récupérer tout ce qui fait de l’homme le maître du temps et non l’esclave des modes, des coutumes, des traditions évidentes, la paille sèche balayée dans une conjoncture par le vent de nouveautés exaspérées. Dans ce tourbillon de troubles, l’homme a peur du silence, de l’inconnu, de la peur de s’arrêter, de la peur de s’arrêter. Il a peur, peur de ce qu’il n’est pas capable de dominer, de contrôler et de gérer, comme l’attente et la solitude. Peur de l’inconnu, de l’insaisissable qui recouvre l’esprit. Lorsqu’il sent quelque chose au-dessus de lui, nourriture de tourment pour chaque jour de sa vie, afin de ne pas faire grandir l’inquiétude, avec des remèdes de tranquillité, il s’étire à la recherche de quelqu’un qui sait et peut lui donner la paix. Un fossé s’ouvre alors sur le carrefour existentiel. Peut choisir. Une rituelle exacte commence souvent, le plus souvent faite de prières courtes et granuleuses, de médailles et de petites images, de bougies allumées ajoutées aux amulettes; la Bible à portée de main et les signes de croix marquent des jugements vagues pour tout ce qui tourne autour de moments de panique qui s’emparent de la pitié. Dans ce cas, l’angoisse, la peur, la peur sont le bruissement de l’action quotidienne. Mais plus rarement, s’il écoute, il entre en contact avec lesouvenir de Dieu .
Je me suis souvenu de Dieu et je me suis réjoui
L’homme voit sa propre faiblesse, en fait l’expérience et apprend à la connaître. Saint Isaac proclame ce Bienheureux 2 et ajoute: « L’homme qui a appris à mesurer la mesure de sa propre faiblesse a atteint la perfection de l’humilité » 3 . Il est disposé à écouter le shofar qui, pour tous, résonne du retour au dialogue avec Dieu, de l’appel à la prière 4 , de la mémoire des dieux.
Dans la chaleur de la sérénité, dans les bassins de l’anxiété, il ressent le besoin d’être fasciné par l’Absolu et de s’autoriser des moments de vie solitaire à trouver un équilibre intérieur dans le calme, dans cette tranquillité qui n’est plus un état de une âme qui passe, mais plutôt un mode de vie, un état de vie, c’est précisément le passage « intérieur » de troubles, d’agitation, de découragement, dans le sentiment de se sentir en contact avec la recherche passionnée de ce qui vit en nous, le seulement calme: paix en Dieu. Invitation à arrêter: « Stop! et sachez que je suis Dieu  » (Psaume 46).
Tais-toi et tu seras tranquille où que tu vives
La recherche de la tranquillité, pour esichia est importante pour la prière. Les pères du désert recommandent le silence: ne fermez pas les lèvres, mais gardez l’esprit tranquille pour ne pas être submergé par les bruits, les nombreuses voix, les échos de distractions. Esprit solitaire, car ce n’est que dans la solitude que le silence peut parler et faire des merveilles. Et la solitude a sa place propre qui est la figure concrète de la garde d’une dimension intérieure: la cellule, la pièce la plus intime dans laquelle on s’organise pour la rencontre avec Dieu.Le souvenir constant et habituel de Dieu, la prière ont leur jaillit de l’immobilisme assidu au lieu du silence.
Teresa de Lisieux raconte: « Enfant, j’allais derrière mon lit, dans un coin que je pouvais facilement fermer avec un rideau et j’y pensais, je cherchais Dieu » 5 . La vacare Deo, percevant son absence et la cherchant dans la prière, est elle-même une réponse à un appel, une écoute incessante et vigilante qui n’interfère pas avec les diaphragmes immobiles de la dureté de l’audition, mais s’ouvre à la voix qui vit au plus profond de nous: Père notre 6 .
L’écoute appelle à la vigilance et à l’humilité
Tous les hommes calmes ne sont pas humbles, mais tous les hommes humbles sont calmes. L’homme de notre époque, au contraire, est agité, parle de l’usure des mots, ne comprend pas et ne tolère pas l’écoute, un espace de liberté pour parler aux autres. Et sa non-écoute l’amène à utiliser le langage de l’astuce qui crée des conflits, des incompréhensions, des injustices, des pensées tourmentantes, des drames profonds, à camper au bord de son cœur en ruine et de son esprit dépourvu de sagesse pour se ronger dans cette folie implacable. qui submerge et persécute … Il semble difficile et difficile d’atteindre le silence de toutes les pensées. La garde du cœur requiert vigilance et humilité. La garde de l’esprit est un exercice difficile. La vigilance sur son propre territoire, car le sentiment ne dépasse pas la compréhension ou la volonté,
Humilité de s’accueillir comme une argile mêlée d’esprit, adhérant à la terre, mais portée par le souffle de l’éternel sur des chemins de vérité. Privé de cette habitude , l’homme sirote l’iniquité comme de l’eau douce, il ne trouve plus son visage et cherche frénétiquement des flaques dans lesquelles se refléter dans l’espoir de se retrouver. L’humilité fait de l’homme une créature sereine, qui n’a pas besoin de se vanter, une créature qui réconcilie la réconciliation avec la vie et avec lui-même, une créature capable d’écouter et donc de prononcer des paroles sages, une créature capable de prier.
L’humilité oblige l’autre à faire le tour de mes idées et à ajouter les siennes, laissant la porte de ma pièce secrète grande ouverte en m’invitant, m’invitant à vivre avec un cœur ouvert, et je me retrouve en proie au dialogue d’amour, de prière, de me dire et de me faire dire de Dieu, de l’homme, au pays de ma nudité 7 .
Sans humilité, la prière s’abîme dans un monologue, plonge dans l’abîme des incohérences quotidiennes et de la sclérose de la pauvreté que nous sommes. Nous ne pouvons que nous approcher de Dieu en respirant l’ humus de notre péché. Par l’humilité, nous faisons l’expérience de la distance qui nous sépare de lui et amour de Dieu pour l’homme. Nous abordons ensuite le Mystère en laissant nos solitudes sans route, nos veilles passées dans un tourment sans espoir, ébloui par la nuit de la présomption. Rappelez-vous Isaac de Ninive: « Quand dans la prière vous vous mettez devant Dieu, votre pensée devient simple … Dieu, voyant vos désirs, la pureté de vos pensées qui reposent en lui et non en vous, votre espoir confiant, vous apportera ce pouvoir impénétrable et vous aurez conscience de le posséder. La conscience de ce pouvoir a permis à certains d’affronter les flammes sans crainte, d’autres de marcher sur l’eau avec la certitude de ne pas sombrer  » 8 .
Ce pouvoir extraordinaire, cette humilité, est à la fois source et fruit de la prière. S’ouvre à Dieu et à l’homme. Il s’ouvre à la pro-existence, être là pour l’autre, pour offrir l’espoir d’un amour qui sait se rendre présent. Cela se produit non seulement avec ceux que nous rencontrons et avec qui nous vivons, mais avec ceux qui « vont » spirituellement dans le secret de la prière.
Au moins souvent dans la vie
Combien de fois notre prière laisse notre regard se poser sur le mal du monde, oublie la croix de Christ: nous nous rendons au désespoir. Nous ne pouvons rencontrer que des bêtises si, accroupis au bord du mal, comme des spectateurs inexpérimentés, nous brisons les réseaux de déception dans la pêche d’une petite œuvre de bienfaisance. Du rivage du mal, il n’y a pas d’autre solution que de pleurer et de se lamenter. La distance de Dieu, la rébellion de l’intelligence obstinée de l’homme, la revendication de son autonomie, ont affecté l’histoire des hommes qui, du plus profond d’un sentiment transcendé, devient «une voix qui crie l’homme à son dernier souffle: aujourd’hui, s’il vous plaît » 9 .
On a la présomption de pouvoir prier pour le mal qui nous afflige, nous écrase, nous dévore, sans considérer la croix de Christ, ne fournissant que notre douleur. Si nous apprenons à prier avant le crucifix, nous voyons l’amour de Dieu pour l’homme, le Christ devient notre prière, c’est le cœur de la prière.
Apprenons à remercier pour tout 10 : pour les tribulations et les souffrances, pour tout ce qui nous arrive et pour notre soeur, pour notre frère, car nous devons entrer dans le royaume avec beaucoup de souffrances 11 , réconfortées par la foi qui nous permet de voir  » les premières lumières du sabbat  » (Lc 23,54). Soucieux de ces mots: « Ton frère sera ressuscité » (Jn 11,23), l’homme de tous les temps sera capable de construire des camps d’amour dans le travail des activités les plus ordinaires, dans l’exécution de tâches quotidiennes, dans la sanctification de la réalité, en prière d’aujourd’hui et d’attente qui n’a plus de mots.
Aujourd’hui, s’il vous plaît (He 4: 7)
Dans un monde d’ombres et de silence, dans lequel les voix – l’une derrière l’autre – mettent fin à leur race effrénée, dans ce monde intérieur qui assaille, saisit et piège insidieusement la pensée dans un sentiment monstrueux, la beauté de l’intégrité L’humain ne peut que raconter l’invitation brûlante à se libérer des chaînes de soi, pour retracer le chemin de la distance et revenir à la source. Convoquez-vous aujourd’hui. La métanoïa est un don de Dieu, l’origine et le fruit des œuvres de la foi, d’abord la prière.
Parfois, la douleur laisse des signes inoubliables que seule la présence assidue de la prière peut guérir. Il est plus facile de revenir en arrière que de continuer, car le souvenir des échecs, des angoisses et des peurs est un expert en précision. « Je me suis écrasé au cours des temps dont j’ignore l’ordre, et mes pensées, ces entrailles intimes de mon âme, sont déchirées par de multiples tumultes ».Expérience d’un homme symbolique, Agostino, qui a lu le secret de Dieu sur les rochers d’une vie qui a été découverte dans la prière, sur les chemins de son intériorité, après s’être dispersée dans une quête étrangère à son être. C’est l’expérience de l’homme de tous les temps. Incroyable cet homme qui n’arrête jamais de découvrir! Un mystère de plénitude et de fragilité, une parabole d’un voyage qui le mène de lui-même à la découverte de son sens. Il vit, mais ne peut définir sa vie, si ce n’est en écrivant des pages d’histoire, des pages sacrées ou des pages maudites, des pages qu’il déchire et des pages qu’il reconstruit.
Le chemin de l’existence, cette réparation aujourd’huice qui semble déchiré depuis toujours est la merveilleuse aventure de la prière. Rendre l’homme à lui-même, quelle tâche supérieure? Rendez-le à la beauté, au bien, à ce qui est vrai et ne finit pas. C’est un voyage de recherche dans lequel l’homme demande à ne pas partir pour ne pas se perdre, un chemin dans lequel l’homme fait confiance à un autre homme, aussi fragile qu’il soit en tant que fils de l’homme, sauveur pour lui en tant que Fils de Dieu: un homme qui peut lui montrer le chemin du retour. Cette expérience est aussi une prière. La personne qui regarde regarde, observe et acquiert la capacité de voir. C’est la prière qui transforme le regard, pour ouvrir la conscience à la précarité de la vie, à la plénitude de la communion avec le vivant et avec Dieu. oeil clair, esprit éveillé. Celui qui ne se retire pas de la conversion, mais persévère dans la prière, sait voir Dieu, sait le reconnaître dans les Écritures, dans la table de la Parole et du Pain, en toutes choses.. « L’âme purifiée par les passions et illuminée par la contemplation des dernières choses habite en Dieu et sa prière est vraie » 12 .
Qui prie, ressemble à un explorateur
« Dieu a créé l’homme en tant qu ‘ » explorateur  » (Qo 1,13) pour marcher vers la vérité et ne rien laisser au hasard malgré le chantage constant du doute » (FR 21) . Appelés à franchir les limites d’une connaissance naturelle et sensorielle, par la foi et des œuvres de la foi 13 , l’homme perdu, sceptique et incroyant peut retrouver la confiance dans sa capacité à refléter 14 critique sur des données réelles, et le sens de la vie : Qui sont-ils? D’où je viens? Où est-ce que je vais Pourquoi le mauvais? La capacité métaphysique de l’homme fait de lui un homme en prière qui lève les yeux et vole vers la vérité 15. Le moteur de ce vol est la prière.
Pour répondre à la question troublante de signification qui se cache dans sa vie, la personne humaine cherche à acquérir une connaissance profonde et réaliste de elle-même, de son potentiel et de ses limites, ainsi qu’une certaine conscience de sa propre personnalité afin de guider à la réalisation de ses idéaux, de manière constructive, toutes les énergies à sa disposition 16 .
Par une prière assidue, la personne se voit orientée vers le bien absolu, cet effort « découle de l’intuition et de l’expérience de la créaturalité et des limites de la personne qui aspire à se dépasser pour atteindre la plénitude de sa propre personnalité » 17 . La prière assimile progressivement les valeurs librement choisies, ordonnées pour rechercher le dépassement de soi et non pour le plaisir, tend naturellement à son but ultime, Dieu, le bien souhaitable en lui-même, digne d’être aimé, recherché, la liberté infinie en auquel il trouve sa liberté en tant que fils dans le Fils: »Nous recevons de lui, qui est la norme concrète et parfaite de toute activité morale, la liberté d’accomplir la volonté de Dieu et d’accomplir notre destin en tant que fils libres du Père » 18 .
Libre et fragile, ouvert à l’Absolu mais tenté par le parent, l’homme qui prie, intériorisant les valeurs éternelles en vue d’une réponse personnelle toujours plus riche à l’amour du Seigneur, assume la responsabilité de sa vie par des choix libres et conscients réponse à l’appel que Dieu adresse à chacun. En fait « Dieu n’a pas voulu créer un musée, mais un univers vivant et libre, créé ou discrédité. Chacune est la source d’un pouvoir créateur, la source d’un possible dépassement, capable de faillir à sa dignité » 19 .
Prière par vocation
Appelée à se transcender, la personne humaine peut disperser cette impulsion vitale profonde dans une horizontalité de possession et un épanouissement immédiat qui l’enferme dans la barrière de ressources évidentes et l’exclut de la possibilité de tirer de nouvelles forces d’un potentiel qui lui est inconnu, mais de son patrimoine constituant . Élu par vocation à ruminer dans le cœur la parole que comme une graine qui germe à la contemplation est une force invoquant l’Esprit et la parole avec laquelle Dieu parle à sa créature, l’homme de prière est celui qui s’applique à la lecture aimante des Écritures. L’homme, si, après avoir purifié son cœur, il reçoit la parole de Dieu et y habite (voir 2Gv 9), il émet de bonnes pensées pour que les commandements de Dieu demeurent en lui  » 20 . C’est la fécondité d’une prière authentique. Dans le secret d’une vie abondante, marquée par l’action de grâce et la question, de la supplication à la contemplation, la prière conduit à l’atteinte de la plénitude, de la maturité, pour devenir ce pour quoi nous sommes nés: hommes et femmes unifiés par le don de l’Esprit .
Un modèle de développement d’une vie de prière qui guide l’action peut être celui de la spirale: chaque phase absorbe les phases précédentes et progresse vers un niveau d’intégration plus élevé. Un modèle qui exprime la continuité dynamique. C’est un chemin « intelligent », tracé par la grâce qui trouve la disponibilité intérieure et s’ouvre à une vie sans fin, le visage de Dieu en nous, une eau vive qui murmure son propre nom provenant des sources pures de l’être. Ensuite, nous pouvons rendre « notre homme » visible. Théophile d’Antioche l’a écrit dans son dialogue avec le païen de son temps: « Si tu me dis: » Montre-moi ton Dieu « , je pourrais te répondre: » Montre-moi ton homme et je te montrerai mon Dieu «  » 21. Le visage de l’homme a en soi les traits de son créateur. La prière nous permet de voir le visage de Dieu dans nos frères et sœurs avec des yeux brillants .
La relation dans laquelle chaque personne trouve la plénitude de son propre être est celle avec le divin, donc avec un tu qui n’est pas égal, mais qui est à l’origine de son existence, la source à partir de laquelle il doit être reçu, Celui qu’il prie . Ce n’est pas l’altérité horizontale, la sphère dans laquelle la créature trouve son accès à Dieu, mais la verticale. Ce n’est qu’après avoir défini les limites de sa propre autonomie vis-à-vis de Celui qui l’a créé, que par la prière, que l’homme peut déchiffrer, à la face de son frère et de sa soeur, l’image de Dieu 22 .
A ce stade , nous pouvons savoir où il est allé se cacher un homme qui n’a pas mis en place son être Dominus de ses propres pensées, des sentiments, des expériences, mais elle est restée modérée, harnaché dans une prière des mots, des sons et petit coeur … où est allé à la rencontre d’une personne qui se reflète dans la flaque de possession et échappe à un engagement de justice … où un être humain qui, au lieu de protéger la création, ses frères et ses sœurs, a tenté de les exproprier leur dignité de se sentir maître.
Plénitude de la vie
Le commandement de l’amour, une synthèse admirable de la shekinah (présence) de Dieu, réalisée dans le Christ, verbum salutis , sera toujours l’objet séduisant de la volonté du priant , le charme irrésistible qui le mène au telos de son voyage: la communion parfaite avec Dieu, avec des frères et des soeurs. « La nature intelligente de la personne humaine peut et doit atteindre la perfection. Ceci, par la sagesse, attire doucement l’esprit à rechercher et à aimer le vrai et le bien; l’homme qui en mange est conduit à travers le visible vers l’invisible »(GS 15). Dans la folie de la croix, le secret du mystère est enfermé là où le paradoxe de l’amour qui désarme parle du Père miséricordieux et nous réconforte sur le chemin de la vie pour nous confier à lui, sachant que « nous restons dans la nuit mais sous les étoiles » .
Au-delà de toutes les énigmes, des inconnus, de la tortuosité, des courbes du destin humain dans le monde, la vérité sur l’homme que Dieu a écrite dans les pages d’une histoire extraordinaire du salut est affirmée dans l’expérience d’une nouvelle humanité, celle du Christ, dans laquelle chaque personne est appelée à participer pleinement à la vie de Dieu (2Pt 1,4). Dans l’agitation créatrice de l’homme, générée par la conscience de la limite de la temporalité, bat ce qui est le plus profondément humain: le désir de retourner à la Source de sa propre image, la nostalgie d’être réuni avec Celui de qui il a reçu l’empreinte d’être . Cette nostalgie est une prière.
La personne humaine est vraiment un être visité, une demeure ouverte à l’hospitalité au nom de cette ressemblance avec Dieu qui la rend capable de préserver l’authenticité de la vie, devenant pour les choses, les événements, les personnes, une icône de la prière. La biographie de l’homme est une croissance jusqu’à ce qu’il s’identifie à la parole que Dieu a prononcée sur lui, une Parole de vie qui ne s’efface jamais. La personne humaine reste l’environnement privilégié de la rencontre avec l’Être.
… en guise de conclusion
L’expérience du sommeil qui s’enlève chaque nuit nous rappelle que l’on peut aller de l’imperfection à l’accomplissement, en être le miroir, non pas pour anéantir la nuit, mais pour y reposer, non plus en tant qu’homo dormiens, celui qui ne s’interroge jamais, qui vit sans intérêts, qui ne veut pas voir ou entendre, qui ne se laisse pas toucher, qui vit dans la peur, superficiellement plus que dans la profondeur, et pour la peur quantifie les prières, qui sont confrontées dans les événements à rester dans une position horizontale, somnolant … mais comme un homo vigilans, le vrai priant, celui qui est toujours présent pour lui-même et pour les autres, pour son travail et son service, celui qui, de façon responsable, ne s’épuise pas immédiatement, mais sait se mesurer à l’attente longue et patiente, celui qui exprime le tout qui se trouve dans chaque fragment de sa vie, celui qui n’a plus peur de se sentir vulnérable, car il sait que les blessures de son humanité peuvent être transformées en fentes à travers lesquelles la vie entre dans le temps qui passe, une vie qui, réalisant enfin sa fin, chante à l’Amour avec son « cœur blessé » , enveloppé dans une « flamme qui consomme et ne donne aucune douleur » et qui est prêt à « casser la toile » pour la rencontrer définitivement .La souffrance n’est plus un fardeau de désordre, mais un poids ordonné, le poids doux de la limite, protégé par la « délicieuse peste » et toujours ouvert à la « rencontre douce » : « Le Bien-aimé est la montagne, les vallées solitaires et riches de ‘ombre … c’est comme une nuit calme, très proche de l’aube du matin, musique silencieuse, solitude sonore … Qui peut guérir mon cœur blessé? … c’est une flamme qui consume et ne fait pas souffrir! O bien-aimé, brise la toile à la douce rencontre «  .

L’ANNONCIATION DU SEIGNEUR (De l’Evangile selon saint Luc1,26-38)

25 mars, 2019

http://www.umanesimocristiano.org/it/details-articles/l%E2%80%99annunciazione-del-signore/25796458/

fr Annunciazione-Gudo-Reni-696x406

L’ANNONCIATION DU SEIGNEUR (De l’Evangile selon saint Luc1,26-38)

(traduction Google de l’italien)

7

En ce momentlà, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, à une vierge fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph. La vierge s’appelait Maria. Entrant en elle, il dit: « Rallégrati, plein de grâce: le Seigneur est avec toi ».
À ces mots, elle était très contrariée et se demandait quel sens avait une telle salutation. L’ange lui dit: « Ne crains pas, Marie, parce que tu as trouvé grâce auprès de Dieu. Et voici, tu concevras un enfant, tu l’accoucheras et tu l’appelleras Jésus. Il sera grand et il sera appelé Fils du Très Haut; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père et régnera à jamais sur la maison de Jacob et son royaume n’aura pas de fin « .
Puis Marie dit à l’ange: « Comment cela se passera-t-il, car je ne connais personne? » L’ange a répondu: « Le Saint-Esprit viendra sur vous et la puissance du Très Haut vous couvrira de son ombre. Celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu, et voici Elisabeth, votre parente, a elle aussi conçu un fils dans sa vieillesse, et c’est le sixième mois pour elle, qui s’appelait stérile: rien n’est impossible à Dieu ».
Alors Marie a dit: « Voici la servante du Seigneur: que cela soit fait pour moi selon ta parole ». Et l’ange se détourna d’elle.

Oujourd’hui les yeux de tout le tour de Nazareth Eglise.
Comment tomber amoureux de la scène de l’Annonciation!
Marie est réunie dans la prière … elle applique toutes ses facultés à la conversation avec Dieu: dans la prière, elle connaît la Volonté divine; et avec la prière il en fait la vie de sa vie.
Aujourd’hui, les yeux de toute l’Église sont tournés vers Nazareth.
L’annonciation, relatée au début de l’évangile de saint Luc, est un événement humble et caché: personne ne l’a vue, personne ne l’a connu, sinon Marie, mais en même temps décisive pour l’histoire de l’humanité.
Saint Augustin a écrit: «Il a choisi la mère qu’il avait créée; il a créé la mère qu’il avait choisie  » (voir Sermo 69, 3, 4).
L’Incarnation du Fils de Dieu est le mystère central de la foi chrétienne et Marie y occupe une place de premier ordre. Pour cette raison, en contemplant le Mystère de l’Incarnation, nous ne pouvons pas ne pas tourner nos yeux vers elle, nous émerveiller, nous remercier et aimer pour voir comment, en entrant dans le monde, elle a voulu compter sur le libre consentement d’une de ses créatures. . Ce n’est que lorsque la Vierge a répondu à l’ange: «Je suis ici la servante du Seigneur; fais-le pour moi selon ta parole  » ( Lc 1,38), à partir de ce moment, la Parole éternelle du Père a commencé son existence humaine dans le temps.
Pour comprendre ce qui s’est passé à Nazareth il y a deux mille ans, nous devons revenir à la lecture de la Lettre aux Hébreux. Ce texte nous permet d’écouter une conversation entre le Père et le Fils sur le plan de Dieu de toute éternité. «Vous ne vouliez ni sacrifice ni offre, un corps à la place m’a préparé. Vous n’avez pas aimé les holocaustes ou les sacrifices pour le péché. Alors je dis: Voici, je viens faire ta volonté, ô Dieu  » (10: 5-7). La Lettre aux Hébreux nous dit que, obéissant à la volonté du Père, la Parole éternelle vient parmi nous pour offrir le sacrifice qui dépasse tous les sacrifices offerts dans l’Alliance précédente. C’est le sacrifice éternel et parfait qui rachète le monde.
Quand la Vierge a dit son « oui » à l’ annonce de l’Ange, Jésus a été conçu et avec lui a commencé la nouvelle ère de l’histoire, qui serait alors sanctionnée dans la Pâque comme « une nouvelle et éternelle alliance ». En réalité, le « oui » de Marie est le reflet parfait de celui du Christ lui-même lorsqu’il est entré dans le monde, comme l’écrit la Lettre aux Hébreux interprétant le Psaume 39 : « Voici, je viens – à cause de moi, cela est écrit dans le rouleau du livre – faire ta volonté, ô Dieu  » (He 10: 7).
L’obéissance du Fils se reflète dans l’obéissance de la Mère et ainsi, pour la rencontre de ces deux « oui », Dieu fut capable d’assumer un visage d’homme. C’est pourquoi l’Annonciation est aussi une célébration christologique, car elle célèbre un mystère central du Christ: son incarnation.
« Me voici, je suis la servante du Seigneur, que cela me soit fait selon votre Parole ».
Comment cela se passera-t-il si je ne connais pas d’homme? (Lc 1:34).
Marie est une créature privilégiée dans l’histoire du salut: en elle le Verbe s’est fait chair et a habité parmi nous (Jn 1,14). Il était pourtant un témoin discret, qui savait rester caché; il n’a pas aimé recevoir des éloges, car il n’aspirait pas à sa propre gloire.
Notre-Dame écoute attentivement ce que le Seigneur lui demande, réfléchit sur ce qu’elle ne comprend pas, demande ce qu’elle ne sait pas. Ensuite, il se consacre totalement à l’accomplissement de la volonté divine: « Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait ce que tu as dit ». N’est-ce pas merveilleux?
Marie Très Sainte, enseignante de toutes nos actions, nous enseigne ainsi que l’obéissance à Dieu n’est pas une servilité, elle ne soumet pas la conscience: elle nous pousse dans nos profondeurs à découvrir la liberté des enfants de Dieu.
Le pape Benoît XVI dans la basilique de l’Annonciation du 14 mai 2009 a déclaré: « L’histoire de l’Annonciation illustre l’extraordinaire bonté de Dieu . Réfléchir sur ce joyeux mystère nous donne l’espoir, l’espoir certain que Dieu continuera à diriger notre histoire, à agir avec puissance créatrice pour atteindre les objectifs qui semblent impossibles au calcul humain. Cela nous met au défi de nous ouvrir à l’action transformante de l’Esprit Créateur qui nous rend nouveaux, nous unit avec Lui et nous remplit de sa vie. Il nous invite, avec une gentillesse exquise, à lui permettre de vivre en nous, d’accepter la Parole de Dieu dans nos cœurs, nous permettant de lui répondre avec amour et de nous aimer les uns les autres « . Que demandons-nous à la mère de Dieu aujourd’hui?
Quand Paul VI a visité les lieux de l’annonciation à Nazareth, il l’a appelé « L’école de l’Évangile ». Et il a ajouté: « Ici, on apprend à observer, à écouter, à méditer, à pénétrer dans le sens si profond et mystérieux de cette apparition très simple, très humble et magnifique » (5 janvier 1964).
Aujourd’hui, nous louons la Sainte Vierge pour sa foi et, avec Sainte Elisabeth, nous lui disons également: « Heureuse celle qui a cru » ( Lc 1 , 45) . Comme l’a dit saint Augustin, Marie a conçu le Christ d’abord dans son cœur avec la foi, laquelle dans son ventre; Marie a cru et a accompli en elle ce qu’elle croyait (voir Sermo 215, 4: PL 38.1074).
Prions le Seigneur pour augmenter notre foi, pour la rendre active et fructueuse dans l’amour. Demandons-lui de pouvoir, comme Marie, accueillir la Parole de Dieu dans nos cœurs et la pratiquer avec docilité et constance. Demandons à Marie un grand renouveau de foi, un profond renouveau de foi: une profession consciente et courageuse du Credo. Que la Vierge Mère nous obtienne de Celui qui s’est incarné dans son ventre pour son fiat généreux dans l’ Annonciation le chemin de l’obéissance humble et joyeuse à l’Évangile.

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C – DES VISITES INATTENDUES

22 mars, 2019

http://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-3e-dimanche-du-careme-Annee-C-Des-visites-inattendues_a884.html

Le figuier stérile

Le figuier stérile

HOMÉLIE POUR LE 3E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C – DES VISITES INATTENDUES

Textes: Exode 3, 1-8a.10.13-15, 1 Corinthiens 10, 1-6.10-12 et Luc 13, 1-9.

Vous est-il déjà arrivé dans votre vie de tous les jours un événement inattendu ? Je serais surpris que ce ne soit pas le cas. Ce peut être un accident comme dans le cas de la chute d’une tour dont parle l’Évangile ou de l’effondrement d’un toit sous le poids de la neige comme il est arrivé plusieurs fois cet hiver au Québec, ce peut être une rencontre qui change la vie comme dans le cas de Moïse, mais peu importe l’évènement, très souvent il ne s’agit pas de simples aléas, de simples coïncidences. Ces événements peuvent, sur un plan spirituel, se révéler comme des visites spéciales, des rencontres avec le Dieu de l’inattendu qui nous invite ainsi à aller plus loin.

I – La vocation de Moïse
C’est ce qui s’est produit avec Moïse dans l’épisode du buisson ardent que nous présente la première lecture. On y retrouve Moïse qui s’est enfui d’Égypte après avoir tué un égyptien. Il s’est installé au désert. Il fait paître les moutons de son beau-père. Il s’est créé une vie simple sans problème et se contente de filer des jours heureux.
Mais voilà que dans le déroulement de sa vie bien ordinaire, sans préparation spéciale, il est visité par Dieu. C’est cette visite qui nous a été racontée il y a un instant. Cette visite va changer la vie de Moïse pour toujours. Si Dieu l’a choisi depuis longtemps, Moïse, lui, ne le sait pas. Il est un bon Israélite vénérant le Dieu de ses pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Et voilà qu’il va être l’objet d’une révélation qui va changer la suite de l’histoire d’Israël. Le buisson en feu ne se consume pas. Une voix sort de celui-ci. « Moïse ! Moïse ! ». Le Dieu de ses pères l’appelle et Moïse répond : « Me voici ». Il reçoit la mission d’être le porte-parole de Dieu auprès de son peuple. « Je t’envoie chez Pharaon : tu feras sortir d’Égypte mon peuple, les fils d’Israël ».
Pour réaliser sa mission, Moïse désire, à juste titre, connaître celui pour qui il va parler et donner sa vie. « Ils vont me demander quel est son nom ; que leur répondrai-je ? ». Et il entend une réponse qui donne le nom de son Dieu : « Je suis qui je suis ». Dieu se laisse chercher, il est celui qui est, « Je suis qui je suis » ou encore « Je serai qui je serai ». En d’autres mots, entre en relation avec moi et tu sauras qui je suis. C’est la rencontre avec Dieu qui est importante. Elle est ineffable. Les mots ne peuvent jamais bien l’exprimer.
Lee nom de Dieu donné à Moïse s’écrit dans une formule en quatre lettres : le « tétragramme sacré » en hébreu. Il est très difficile de le traduire exactement car nous n’avons pas les voyelles qui vont avec ces quatre lettres. Dans plusieurs traductions modernes de la Bible on a utilisé le terme « Yaweh » comme nom du Dieu de Moïse et d’Israël, mais la traduction liturgique est plus précise et donne le sens profond de cette révélation de Dieu à Moïse « Je suis qui je suis ».
C’est toute la richesse de l’image du buisson ardent que de nous permettre d’entrer dans un mouvement de relation avec Dieu, dans une dynamique de rencontre. Nous sommes tous et toutes un peu comme Moïse. Il est arrivé ou il arrivera que Dieu se fera présent à notre cœur. Il viendra déranger notre train-train quotidien avec une présence inattendue. Saurons-nous lui répondre « Me voici » comme Moïse? À chacun de se préparer à ces visites. Je connais quelqu’un, un ami, qui a fait cette rencontre en vivant un dépouillement de son intégrité physique dû à la maladie de Parkinson. Ces moments furent pour lui, disait-il, des moments d’intense remise à Dieu et il en est ressorti plus que jamais à l’écoute de la présence de Celui qui est la vie.

II – La vie courante et ses surprises
L’histoire de Moïse et celle de mon ami revêtent un caractère exceptionnel. Notre Dieu de l’inattendu se manifesterait-il uniquement ainsi ?
Hé bien non! L’évangile nous en donne deux exemples pris dans l’actualité du temps de Jésus : celui des galiléens massacrés par Pilate et celui des personnes tuées par la chute de la Tour de Siloé. « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? » demande Jésus et il répond « Eh bien, je vous dis : pas du tout ! ». Et les personnes tuées par la Tour de Siloé « Pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? » demande Jésus et il donne la même réponse « Eh bien, je vous dis : pas du tout ! ».
Mais remarquez la suite des réponses de Jésus. Elles nous invitent, comme dans le cas de Moïse, à la rencontre avec Dieu qui se manifeste dans ces événements inattendus. Jésus invite à avoir un coeur ouvert et des yeux prêts à voir les visites de Dieu. Il invite à la conversion. « Si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. » Cette invitation n’est pas une culpabilisation, mais une incitation à aller plus loin que ce qui est visible. La conversion est de cet ordre. Elle est un retournement du cœur, une manière de se mettre le cœur à la bonne place, pourrait-on dire. La conversion ouvre la porte à la reconnaissance de l’action de Dieu dans nos vies.
En effet, Dieu est toujours à l’œuvre, mais bien souvent nous ne le voyons pas ou nous ne prenons pas la peine d’y porter attention. Voilà pourquoi Dieu parfois nous fait des signes inattendus qui sont pour nous des chemins nouveaux qui s’ouvrent.

III – Application
Il nous revient d’entrer ou non dans ces chemins. Nous avons le choix de devenir comme le figuier stérile de l’évangile qui ne produit aucun fruit ou de nous mettre à l’oeuvre en sachant que le propriétaire qui est Dieu et le vigneron qui est Jésus nous laissent toujours la chance de bêcher et de cultiver notre jardin.
Toute vie humaine est parsemée de visites inattendues de Dieu. Ces visites ont commencées avec notre baptême. Elles se continuent à chaque dimanche dans l’Eucharistie. Elles s’expriment dans la prière. Elles se vivent dans la rencontre du pauvre, du prisonnier, du réfugié, de la personne exploitée, du démuni etc. qui sont Jésus parmi nous. « Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli etc. » (Mathieu 25, 35).
Saint Paul ne dit pas autre chose lorsque, dans la deuxième lecture, il reprend l’image du Rocher d’où est sortie de l’eau dans l’Ancien Testament. Il fait une application directe de cette image à Jésus Ressuscité qu’il compare à ce rocher. En effet, la vie du Peuple de Dieu qui est l’Église et le Corps mystique du Christ est la vie même de Jésus. Il n’y pas d’autre vie pour le baptisé que d’être plongé dans la vie du Seigneur Ressuscité.

Conclusion
Frères et sœurs, buvons à ce Rocher qui est le Christ. Partageons entre nous les visites qu’il nous fait et qu’il fait dans notre monde. Demandons-lui de savoir les reconnaître et d’en témoigner.
Lorsque nous aurons accepté de nous laisser déranger, de nous laisser surprendre par le Dieu de l’inattendu au cœur de nos vies, nous ne serons plus jamais les mêmes personnes.
Peut-être que notre Carême 2019 est un moment de visite inattendue de Dieu dans notre vie ? Pourquoi pas?
Laissons la grâce de Dieu en nous ouvrir nos cœurs et nos yeux aux signes de sa présence toujours vivante dans notre monde et dans nos vies. Telle est la prière que je fais ce matin pour chacune et chacun d’entre nous.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Lavail
Séminaire de Québec
19 mars 2019

PSAUME 131. SEIGNEUR JE N’A PAS LE COEUR FIER

21 mars, 2019

http://www.spiritualite2000.com/2004/02/psaume-131-seigneur-je-nai-pas-le-coeur-fier/

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PSAUME 131. SEIGNEUR JE N’A PAS LE COEUR FIER

Par Hervé Tremblay, o.p.

L’image de l’enfant dans les bras de sa mère a toujours frappé l’imagination et suscité des sentiments. Il a été facile de l’appliquer à diverses attitudes ou expériences religieuses. Un tout petit psaume de trois versets seulement le fait audacieusement.

1 Seigneur, je n’ai pas le cœur fier
ni le regard ambitieux ;
je ne poursuis ni grands desseins,
ni merveilles qui me dépassent.
2 Non, mais je tiens mon âme
tranquille et silencieuse ;
mon âme est en moi comme un enfant,
comme un petit enfant contre sa mère.
3 Attends le Seigneur, Israël,
maintenant et à jamais.

Texte
• Le titre du psaume porte : « Cantique des montées. De David ». Il s’agit ici du douzième psaume des montées (cf. Ps 120-134) qui étaient chantés par les pèlerins se rendant à Jérusalem.
• v.2a Le texte hébreu commence avec « si ne… pas », qui introduit une formule de serment (cf. Ps 89,36 ; 95,11). Il conviendrait donc de traduire à l’aide d’une périphrase : « Qu’il m’arrive malheur si je ne tiens mon âme… ».
• v.2d littéralement : « comme cet enfant sevré, mon âme est en moi ». Certains ont traduit « comme un bébé repu ( !) ».
• Il n’est pas certain que le v.3 faisait partie du poème à l’origine. La plupart des commentateurs le considère comme un ajout liturgique visant à adapter une profession de confiance individuelle à une situation collective.

Genre littéraire
Il s’agirait d’un psaume de confiance. Les Psaumes de supplication constituent la majorité des poésies du Psautier. Mais la confiance, qui est le motif de la supplication, constitue le thème principal de quelques psaumes : Ps 3 ; 4 ; 11 ; 16 ; 23 ; 27 ; 62 ; 121 ; 131. Ces chants sont d’une haute portée spirituelle et sont souvent les plus connus et les plus aimés des croyants. Il n’y a pas vraiment de structure associée au genre littéraire, tout au plus rencontre-t-on une invocation du nom divin et de sa divine puissance suivie de l’expression du sentiment de confiance que ce nom puissant inspire. Le psalmiste chante sa sécurité en Dieu, sa paix et sa joie (cf. Ps 3,7 ; 4,9 ; 23,4-5 ; 27,1.3), son intimité avec le Seigneur (cf. Ps 16,5-11). Le Ps 131 est un des psaumes les plus doux, les plus détendus dans un psautier rempli de lamentations et d’hymnes parfois grandiloquents.

Structure
La structure du psaume repose sur deux tableaux antithétiques qui correspondent aux deux premiers versets. Le premier tableau est négatif et décrit ce que n’est pas la confiance en Dieu (v.1) : pas d’orgueil, pas d’arrogance, pas d’ambition démesurée. Le second est positif et décrit ce qu’est la confiance en Dieu (v.2). Ils convergent tous les deux dans le v.3 qui fait la synthèse du message et exprime la confiance d’Israël en Dieu.

Commentaire
• v.1 Le psaume s’ouvre avec un aveu d’humilité d’une grande simplicité mais aussi d’une grande intensité. Aussi certains commentateurs ont-ils voulu identifier le psalmiste à un grand personnage assagi par les épreuves et les mauvaises expériences de la vie. Le psaume laisserait entendre à mi-mots que les projets et les actes du psalmiste n’ont pas toujours été aussi sages et modérés dans le passé. Sans doute même a-t-il beaucoup lutté soit pour recouvrer sa situation première particulièrement florissante, soit pour acquérir tel avantage important devant améliorer sa condition. Mais l’expérience l’aurait instruit de la vanité de telles recherches.
De toutes façons il sait désormais que la vie ne donne pas ce qu’on attend d’elle ; il reste donc à changer de tactique, avec le Seigneur.
On remarque dans ce premier verset le développement ascendant de la pensée. En premier lieu, à l’intérieur de l’homme, il y a le cœur (v.1a) siège de la réflexion dans la Bible (et non pas des sentiments, comme dans nos cultures !) ; en deuxième lieu, l’attitude extérieure manifestée par les yeux (v.1b) qui expriment la décision prise (cf. Ps 18,28 ; 101,5 ; Pr 6,17 ; 21,4); en troisième lieu, l’image du chemin (v.1c) indique les démarches entreprises. En effet, cette dernière partie du verset serait mieux traduite par : « Je n’ai pas pris un chemin de grandeurs ». L’orgueilleux s’illusionne en voulant accomplir les œuvres de Dieu et réaliser le salut par ses propres forces. Sur l’orgueil humain et l’humilité, la Bible a de beaux passages : Si 3,17-27 ; Is 2,11-17 ; Nb 12,3 et Si 45,4 sur l’humilité et la douceur de Moïse.
• v.2 C’est la partie positive du psaume. L’ambiance de confiance en Dieu est évoquée par les images de paix et de silence qui contrastent avec les attitudes hautaines et tapageuses auxquelles faisait allusion le v.1. Ici, l’âme est comparée à un enfant sevré qui, pour cette raison, repose en paix sur sa mère. L’idée est aussi simple et naturelle que celle d’un enfant qui, après la tétée repose tranquillement, repu, sur le sein de sa mère, avec laquelle il vit une intimité toute spéciale.
Instruit par l’expérience et travaillé par la grâce, le psalmiste en est même venu à renoncer à toute revendication excessive et il s’est établi dans un climat de calme et de silence intérieur (cf. Ps 37,7 ; 62,2), d’attente paisible (Is 30,15). L’image de l’enfant est d’autant plus parlante que celui-ci est dit « sevré ». L’auteur déclare en être venu à sevrer son âme de toutes ses aspirations naturelles, de sorte qu’elle demeure en lui, non plus comme le nourrisson qui réclame de sa mère qu’elle l’allaite – et cela avec toute l’avidité que l’on sait ! – mais comme l’enfant sevré qui n’éprouve plus de faim instinctive et inquiète et qui s’abandonne blotti dans les bras de sa mère, comme un enfant qui ne désire plus rien. Le psalmiste s’est rendu maître de lui-même et, faisant désormais confiance à la providence, s’est remis à elle en tout. Il y a gagné la sérénité et la paix, qui sont le lot des chercheurs de Dieu.
• v.3 Une probable addition en vue de l’emploi liturgique du psaume. Comme c’est le cas pour d’autres psaumes (cf. Ps 130,7-8), où l’on passe du singulier au pluriel, l’exhortation finale du petit Ps 131 s’adresse également à Israël dont la prière est le plus souvent communautaire. À l’exemple des individus, le peuple de l’alliance constitue une création fragile qui doit s’abandonner à son Seigneur, de qui il reçoit vie, énergie, espérance et sécurité. Le message individuel du poème est donc appliqué à tout Israël. Sans chercher la gloire humaine ou le succès, sans s’agiter fébrilement pour réparer ses revers ou satisfaire ses désirs de vengeance et de suprématie politique, le peuple de Dieu doit faire totalement confiance au Seigneur qui est comme une mère qui prend soin de ses fidèles.
Enseignement
Le charme de ce psaume provient du fait qu’il décrit en quelques mots la scène d’une mère qui tient dans ses bras son bébé endormi qu’elle vient d’allaiter. La relation amoureuse qui unit la mère à son enfant illustre à merveille le rapport entre Dieu et le fidèle. La même idée est exprimée dans quelques passages bibliques : Is 49,15 ; 66,11-14 ; Os 11,3-4. Davantage encore, le charme du symbolisme de l’enfant pour la spiritualité et l’importance de l’abandon à Dieu constituent deux motifs constants dans la littérature religieuse. Le croyant, en paix désormais, renonçant à toute recherche de grandeur humaine, s’abandonne au Seigneur avec la simplicité d’un enfant, sans inquiétude ni ambition. La même confiance filiale est demandée à tout le peuple de Dieu (v.3).
Le psalmiste a misé toute sa vie, symbolisée par l’emploi du mot « âme » ou « souffle » (v.2), entre les mains du Seigneur. L’image de l’enfant vise à exprimer plusieurs sentiments : sérénité, repos, acceptation de sa propre dépendance, abandon. Le bébé sevré n’a plus besoin de sa mère uniquement pour satisfaire son besoin primaire et instinctif de nourriture ; retourner sur le sein de sa mère répond au besoin encore plus fondamental de sécurité, d’intimité, d’affection. Transposé, comme c’est le cas ici, dans l’ordre des relations de l’homme avec Dieu, ce langage décrit les bases mêmes de toute spiritualité basée non pas sur la simple satisfaction des besoins ou l’exaucement des prières, mais sur une relation vivante, confiante et amoureuse.
Pour en arriver ainsi à un total abandon, il faut avoir longuement digéré, approfondi et intériorisé ses propres questions, ses crises, ses épreuves et ses remises en question. Ce psaume ne parle pas d’une connaissance spéculative et abstraite de notre petitesse, mais d’acceptation des limites de la vie et de la dépendance de Dieu, de l’abandon filial à la conduite du Seigneur qui est comme une mère…
Citation dans le Nouveau Testament
On pense tout de suite, à cause de l’image de l’enfant, à Mt 18,3-5//Mc 9,36-37//Lc 9,47-48 (devenir comme des enfants pour entrer dans le royaume des cieux) et Mt 19,13-14//Mc 10,13-15//Lc 18,16-17 (le royaume des cieux est à ceux qui sont comme les enfants). Mais on peut aussi considérer l’humilité du publicain (Lc 18,13-14) ou des premiers chrétiens (1 Co 1,26-29). Quant à la confiance en Dieu, voir Mt 6,25-34//Lc 12,22-32 ou encore Jn 14,27 :« Que votre cœur ne se trouble pas ».
Dans la théologie et la spiritualité chrétienne
On ne sera pas surpris d’apprendre que certains Pères de l’Église ont appliqué le psaume à la Vierge Marie, mère de Jésus. Mais on l’a surtout appliqué à l’humilité, à la confiance et au repos du croyant en Dieu. On pense à la célèbre phrase de saint Augustin : « Tu nous as fait pour toi, ô mon Dieu, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi ».
Un peu plus tard, la Règle de saint Benoît (5e siècle), dans son long chapitre 7, fait de l’humilité une base de l’institution monastique et cite le Ps 131. Ce psaume illustre à merveille la spiritualité de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Sa doctrine a été qualifiée « d’enfance spirituelle » ou, mieux, de « petite voie ». L’image du repos en Dieu servira encore de base à toute la spiritualité de plusieurs saints, dont saint Bernard, Édith Stein, Élisabeth de la Trinité ou Henri Bergson.
Dans la liturgie
Le Ps 131 est assez peu utilisé. À la liturgie des Heures, on le prie le samedi de la 1re semaine du psautier à l’office des lectures du temps ordinaire ainsi que le mardi de la 3e semaine aux vêpres. À l’Eucharistie, le Ps 131 est le psaume responsorial du 31e dimanche de l’année A où il répond à la première lecture tirée de Malachie 1-2. C’est Mal 2,10 qui semble avoir motivé le choix du psaume : « Et nous, le peuple de Dieu, n’avons-nous pas tous un seul Père ? N’est-ce pas un seul Dieu qui nous a créés ? » Durant la semaine, il est utilisé le 31e lundi des années paires, alors qu’il fait office de psaume responsorial à Ph 2,1-4, où saint Paul parle des dispositions qui doivent animer les chrétiens ; également, le 31e mardi des années impaires, alors qu’il répond à Rm 12,5-16a qui décrit la vie des communautés chrétiennes.

MESSE SOLENNELLE D’INAUGURATION DU PONTIFICAT DU PAPE FRANÇOIS – 19 MARS 2013, SOLENNITÉ DE SAINT JOSEPH

18 mars, 2019

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/homilies/2013/documents/papa-francesco_20130319_omelia-inizio-pontificato.html

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MESSE SOLENNELLE D’INAUGURATION DU PONTIFICAT DU PAPE FRANÇOIS – 19 MARS 2013, SOLENNITÉ DE SAINT JOSEPH

HOMÉLIE DU PAPE FRANÇOIS

Place Saint-Pierre

Chers frères et sœurs !

Je remercie le Seigneur de pouvoir célébrer cette Messe de l’inauguration de mon ministère pétrinien en la solennité de saint Joseph, époux de la Vierge Marie et Patron de l’Église universelle : c’est une coïncidence très riche de signification, et c’est aussi la fête de mon vénéré Prédécesseur : nous lui sommes proches par la prière, pleins d’affection et de reconnaissance.
Je salue avec affection les Frères Cardinaux et Évêques, les prêtres, les diacres, les religieux et les religieuses et tous les fidèles laïcs. Je remercie de leur présence les représentants des autres Églises et Communautés ecclésiales, de même que les représentants de la communauté juive et d’autres communautés religieuses. J’adresse mon cordial salut aux Chefs d’État et de Gouvernement, aux Délégations officielles de nombreux pays du monde et au Corps diplomatique.
Nous avons entendu dans l’Évangile que « Joseph fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse » (Mt 1, 24). Dans ces paroles est déjà contenue la mission que Dieu confie à Joseph, celle d’être custos, gardien. Gardien de qui ? De Marie et de Jésus ; mais c’est une garde qui s’étend ensuite à l’Église, comme l’a souligné le bienheureux Jean-Paul II : « Saint Joseph a pris un soin affectueux de Marie et s’est consacré avec joie à l’éducation de Jésus Christ, de même il est le gardien et le protecteur de son Corps mystique, l’Église, dont la Vierge sainte est la figure et le modèle » (Exhort. apost. Redemptoris Custos, n. 1).
Comment Joseph exerce-t-il cette garde ? Avec discrétion, avec humilité, dans le silence, mais par une présence constante et une fidélité totale, même quand il ne comprend pas. Depuis son mariage avec Marie jusqu’à l’épisode de Jésus, enfant de douze ans, dans le Temple de Jérusalem, il accompagne chaque moment avec prévenance et avec amour. Il est auprès de Marie son épouse dans les moments sereins et dans les moments difficiles de la vie, dans le voyage à Bethléem pour le recensement et dans les heures d’anxiété et de joie de l’enfantement ; au moment dramatique de la fuite en Égypte et dans la recherche inquiète du fils au Temple ; et ensuite dans le quotidien de la maison de Nazareth, dans l’atelier où il a enseigné le métier à Jésus.
Comment Joseph vit-il sa vocation de gardien de Marie, de Jésus, de l’Église ? Dans la constante attention à Dieu, ouvert à ses signes, disponible à son projet, non pas tant au sien propre ; et c’est cela que Dieu demande à David, comme nous l’avons entendu dans la première Lecture : Dieu ne désire pas une maison construite par l’homme, mais il désire la fidélité à sa Parole, à son dessein ; c’est Dieu lui-même qui construit la maison, mais de pierres vivantes marquées de son Esprit. Et Joseph est « gardien », parce qu’il sait écouter Dieu, il se laisse guider par sa volonté, et justement pour cela il est encore plus sensible aux personnes qui lui sont confiées, il sait lire avec réalisme les événements, il est attentif à ce qui l’entoure, et il sait prendre les décisions les plus sages. En lui, chers amis, nous voyons comment on répond à la vocation de Dieu, avec disponibilité, avec promptitude, mais nous voyons aussi quel est le centre de la vocation chrétienne : le Christ ! Nous gardons le Christ dans notre vie, pour garder les autres, pour garder la création !
La vocation de garder, cependant, ne nous concerne pas seulement nous les chrétiens, elle a une dimension qui précède et qui est simplement humaine, elle concerne tout le monde. C’est le fait de garder la création tout entière, la beauté de la création, comme il nous est dit dans le Livre de la Genèse et comme nous l’a montré saint François d’Assise : c’est le fait d’avoir du respect pour toute créature de Dieu et pour l’environnement dans lequel nous vivons. C’est le fait de garder les gens, d’avoir soin de tous, de chaque personne, avec amour, spécialement des enfants, des personnes âgées, de celles qui sont plus fragiles et qui souvent sont dans la périphérie de notre cœur. C’est d’avoir soin l’un de l’autre dans la famille : les époux se gardent réciproquement, puis comme parents ils prennent soin des enfants et avec le temps aussi les enfants deviennent gardiens des parents. C’est le fait de vivre avec sincérité les amitiés, qui sont une garde réciproque dans la confiance, dans le respect et dans le bien. Au fond, tout est confié à la garde de l’homme, et c’est une responsabilité qui nous concerne tous. Soyez des gardiens des dons de Dieu !
Et quand l’homme manque à cette responsabilité, quand nous ne prenons pas soin de la création et des frères, alors la destruction trouve une place et le cœur s’endurcit. À chaque époque de l’histoire, malheureusement, il y a des « Hérode » qui trament des desseins de mort, détruisent et défigurent le visage de l’homme et de la femme.
Je voudrais demander, s’il vous plaît, à tous ceux qui occupent des rôles de responsabilité dans le domaine économique, politique ou social, à tous les hommes et à toutes les femmes de bonne volonté : nous sommes « gardiens » de la création, du dessein de Dieu inscrit dans la nature, gardiens de l’autre, de l’environnement ; ne permettons pas que des signes de destruction et de mort accompagnent la marche de notre monde ! Mais pour « garder » nous devons aussi avoir soin de nous-mêmes ! Rappelons-nous que la haine, l’envie, l’orgueil souillent la vie ! Garder veut dire alors veiller sur nos sentiments, sur notre cœur, parce que c’est de là que sortent les intentions bonnes et mauvaises : celles qui construisent et celles qui détruisent ! Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, et même pas non plus de la tendresse !
ici j’ajoute alors une remarque supplémentaire : le fait de prendre soin, de garder, demande bonté, demande d’être vécu avec tendresse. Dans les Évangiles, saint Joseph apparaît comme un homme fort, courageux, travailleur, mais dans son âme émerge une grande tendresse, qui n’est pas la vertu du faible, mais au contraire, dénote une force d’âme et une capacité d’attention, de compassion, de vraie ouverture à l’autre, d’amour. Nous ne devons pas avoir peur de la bonté, de la tendresse !
Aujourd’hui, en même temps que la fête de saint Joseph, nous célébrons l’inauguration du ministère du nouvel Évêque de Rome, Successeur de Pierre, qui comporte aussi un pouvoir. Certes, Jésus Christ a donné un pouvoir à Pierre, mais de quel pouvoir s’agit-il ? À la triple question de Jésus à Pierre sur l’amour, suit une triple invitation : sois le pasteur de mes agneaux, sois le pasteur de mes brebis. N’oublions jamais que le vrai pouvoir est le service et que le Pape aussi pour exercer le pouvoir doit entrer toujours plus dans ce service qui a son sommet lumineux sur la Croix ; il doit regarder vers le service humble, concret, riche de foi, de saint Joseph et comme lui, ouvrir les bras pour garder tout le Peuple de Dieu et accueillir avec affection et tendresse l’humanité tout entière, spécialement les plus pauvres, les plus faibles, les plus petits, ceux que Matthieu décrit dans le jugement final sur la charité : celui qui a faim, soif, est étranger, nu, malade, en prison (cf. Mt 25, 31-46). Seul celui qui sert avec amour sait garder !
Dans la deuxième Lecture, saint Paul parle d’Abraham, qui « espérant contre toute espérance, a cru » (Rm 4, 18). Espérant contre toute espérance ! Aujourd’hui encore devant tant de traits de ciel gris, nous avons besoin de voir la lumière de l’espérance et de donner nous-mêmes espérance. Garder la création, tout homme et toute femme, avec un regard de tendresse et d’amour, c’est ouvrir l’horizon de l’espérance, c’est ouvrir une trouée de lumière au milieu de tant de nuages, c’est porter la chaleur de l’espérance ! Et pour le croyant, pour nous chrétiens, comme Abraham, comme saint Joseph, l’espérance que nous portons a l’horizon de Dieu qui nous a été ouvert dans le Christ, est fondée sur le rocher qui est Dieu.
Garder Jésus et Marie, garder la création tout entière, garder chaque personne, spécialement la plus pauvre, nous garder nous-mêmes : voici un service que l’Évêque de Rome est appelé à accomplir, mais auquel nous sommes tous appelés pour faire resplendir l’étoile de l’espérance : gardons avec amour ce que Dieu nous a donné !
Je demande l’intercession de la Vierge Marie, de saint Joseph, des saints Pierre et Paul, de saint François, afin que l’Esprit Saint accompagne mon ministère et je vous dis à tous : priez pour moi ! Amen.

 

HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « ILS PARLAIENT DE SON DÉPART QUI ALLAIT S’ACCOMPLIR À JÉRUSALEM »

15 mars, 2019

http://www.hgiguere.net/Homelie-pour-le-2e-dimanche-du-careme-Annee-C-Ils-parlaient-de-son-depart-qui-allait-s-accomplir-a-Jerusalem_a883.html

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HOMÉLIE POUR LE 2E DIMANCHE DU CARÊME ANNÉE C « ILS PARLAIENT DE SON DÉPART QUI ALLAIT S’ACCOMPLIR À JÉRUSALEM »

Textes: Genèse 15, 5-12.17-18, Philippiens 3, 17 – 4, 1 et Luc 9, 28b-36.

La transfiguration de Jésus sur le mont Thabor représentée dans cette reproduction d’un tableau de Raphaël qui se trouve au Séminaire de Québec est le dernier tableau peint par Raphaël, commencé en 1518, inachevé de sa main en 1520, date de sa mort. (Crédits photo : H. Giguère)
La transfiguration de Jésus sur le mont Thabor représentée dans cette reproduction d’un tableau de Raphaël qui se trouve au Séminaire de Québec est le dernier tableau peint par Raphaël, commencé en 1518, inachevé de sa main en 1520, date de sa mort. (Crédits photo : H. Giguère)
Le récit de l’événement de la Transfiguration de Jésus revient à chaque année lors du 2e dimanche du Carême. Ce n’est pas sans raison. Après avoir rappelé le combat de Jésus au désert, la liturgie nous le présente glorieux et lumineux, rempli de la présence de Dieu. Ce choix est important car il met devant nos yeux Jésus qui se révèle comme le Fils bien-aimé de Dieu, son Envoyé, car Jésus accompli les promesses de Dieu et il réalise la Nouvelle Alliance avec lui. Sa place est au coeur de l’histoire du salut.
C’est pourquoi, la liturgie va nous rappeler dans les dimanches qui viennent quatre grands moments de l’histoire du salut tirés de l’Ancien Testament qui éclairent la mission de Jésus. Ce sont l’Alliance de Dieu avec Abraham, la révélation du nom de Dieu, la Pâque de l’entrée dans la Terre promise et le retour des exilés de Babylone. L’événement de la Transfiguration que nous raconte saint Luc les intègre de façon imagée par la présence de Moïse et d’Élie à côté de Jésus.
I – La scène de la Transfiguration
Saint Luc situe la scène de la Transfiguration sur une montagne qui n’est pas nommée, mais qu’on identifie aujourd’hui au Mont Thabor en Palestine. Ce n’est pas sans raison, car dans les Écritures la montagne est un symbole très présent pour marquer la proximité de Dieu. Elle est souvent le lieu où il se révèle comme lors de la remise des dix commandements à Moïse sur le mont Sinaï. Le décor choisi ici n’échappe pas à cette règle.
En montant avec Jésus sur la montagne les disciples Pierre, Jacques et Jean sont prêts intérieurement à une rencontre. Celle-ci sera au-delà de toutes leurs attentes. On le voit par leur réactions : émerveillées, éblouis, comblés de paix ils veulent seulement que ce moment s’éternise ; « Faisons trois tentes ». Ils réalisent aussi que celui qu’ils suivent depuis quelque temps n’est pas un jeune juif de Nazareth comme les autres. Non seulement, il est imprégné de l’histoire du peuple d’Israël comme ils le sont eux-mêmes, mais il se situe à un autre niveau où il prend le relais des grands prophètes qu’Élie représente.
L’éclat qu’ils perçoivent chez lui n’est pas seulement extérieur. La lumière qui les éblouit est celle d’une source intérieure. Ils ne peuvent en dire plus pour l’instant, mais ils resteront marqués à jamais par ce moment. Dans la seconde lettre attribuée à saint Pierre, on rappelle cet événement ainsi : « En effet, ce n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur. Car il a reçu de Dieu le Père l’honneur et la gloire quand, depuis la Gloire magnifique, lui parvint une voix qui disait : Celui-ci est mon Fils, mon bien-aimé ; en lui j’ai toute ma joie. Cette voix venant du ciel, nous l’avons nous-mêmes entendue quand nous étions avec lui sur la montagne sainte ». (2 Pi 1, 16-18)
Les témoins de l’événement de la Transfiguration ont retenu l’essentiel : Jésus est le Fils-bien aimé du Père qui le donne à ses enfants pour leur salut ce que proclame la voix qui se fait entendre « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le ! ». La Transfiguration annonce, écrit saint Luc, le départ de Jésus « qui allait s’accomplir à Jérusalem ». Son départ, c’est le moment de la remise de sa vie à son Père que fera Jésus sur le Calvaire à Jérusalem. La vie tout entière de Jésus est une marche vers ce moment majeur où il offre tout ce qu’il est pour le salut de toute l’humanité. Ce faisant, Jésus accomplit en plénitude l’Alliance que Dieu a commencée depuis les jours d’Abraham.
II – Une alliance inédite
Cette Alliance de Dieu avec Abraham nous est relatée dans la première lecture qui nous raconte le moment où Abraham prend conscience que son Dieu s’est lié à lui par pure gratuité et qu’il ne l’abandonnera jamais lui et sa descendance. La Nouvelle Alliance en Jésus viendra compléter et accomplir totalement l’Alliance déjà en oeuvre en lui donnant sa forme définitive dans l’offrande que Jésus fera de sa vie.
La description de l’Alliance de Dieu avec Abraham est faite en utilisant les usages d’une culture qui n’est plus la nôtre, mais elle est parlante. Dans la culture ancienne, le feu symbolise la présence de Dieu, et les offrandes sont le signe de ce que les personnes sont prêtes à apporter dans le geste d’alliance. Elles y mettent le plus beau et le meilleur de ce qu’elles ont et de ce qu’elles sont sans exiger de retour. Et alors la merveille se produit, le feu de l’amour de leur Dieu prend ce qui a été apporté et le transforme en un feu divin qui les habitera tous les jours de leurs vies. Le sommeil d’Abraham est une image de l’abandon et de l’accueil total de l’action de Dieu sans poser de questions. Abraham reçoit la présence de Dieu comme un don gratuit.
III- Application
Avec ces images du feu et de la lumière, les textes des lectures d’aujourd’hui veulent ouvrir nos cœurs à ce qui nous dépasse. Le chemin du Carême ne fait pas que rappeler le souvenir des évènements de la vie de Jésus, il nous fait entrer dans un monde au-delà de nos espoirs humains et toucher du doigt le mystère d‘un Dieu qui se fait proche de nous comme il l’a fait pour Abraham et pour Jésus. Ce n’est pas un Dieu inaccessible que révèle la lumière éblouissante de la Transfiguration. Au contraire, elle le montre bien incarné dans son Fils qui s’est fait l’un de nous, vrai Dieu et vrai homme. « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le ! »
Que cette Eucharistie fasse de nous des personnes de plus en plus attentives à la parole et à la présence du Fils bien-aimé qui veut nous entraîner à sa suite dans ce temps du Carême qui nous est donné pour nous renouveler et nous préparer aux Jours Saints et à Pâques.
Amen!

Mgr Hermann Giguère P.H.
Faculté de théologie et de sciences religieuses
de l’Université Laval
Séminaire de Québec
12 mars 2019

 » ACCEPTEZ-VOUS DONC COMME CHRIST VOUS A AUSSI REÇUS, POUR LA GLOIRE DE DIEU » (ROM. 15: 7)

14 mars, 2019

http://www.atma-o-jibon.org/italiano10/parola_feb15.htm

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Saulo« 

ACCEPTEZ-VOUS DONC COMME CHRIST VOUS A AUSSI REÇUS, POUR LA GLOIRE DE DIEU »
(ROM. 15: 7)

Voulant se rendre à Rome et, de là, se rendre en Espagne, l’apôtre Paul est précédé de sa « Lettre » aux communautés chrétiennes présentes dans cette ville! En eux, qui seront bientôt témoins, avec un nombre incalculable de martyrs, d’une adhésion sincère et profonde à l’Évangile, des tensions, des incompréhensions et même des rivalités ne manquent pas, comme ailleurs. En fait, les chrétiens de Rome présentent des antécédents sociaux, culturels et religieux variés. Il y a des gens qui viennent du judaïsme, du monde hellénique et de l’ancienne religion romaine: peut-être du stoïcisme ou d’autres orientations philosophiques … Ils portent en eux leurs traditions de pensée et leurs convictions éthiques! Certains sont dits « faibles », car ils suivent des coutumes alimentaires particulières: ils sont, par exemple, végétariens, ou coller à des calendriers, qui indiquent des jours spéciaux de jeûne; d’autres sont dits « forts », car, libres de ces conditionnements, ils ne sont pas liés à des tabous alimentaires ni à des rituels spéciaux! À tous, Paolo adresse une invitation pressante …
« Acceptez-vous donc, exactement comme Christ vous a accueilli, pour la gloire de Dieu! »
Déjà auparavant, dans la « Lettre », il avait abordé le sujet, s’adressant tout d’abord aux « forts », pour les inviter à « accueillir » les « faibles », « sans discuter de leurs opinions »; ensuite, aux « faibles », parce qu’ils accueillent à leur tour les « forts », sans les juger, après avoir été eux-mêmes « accueillis » par Dieu …
En fait, Paolo est convaincu que tout le monde, malgré la diversité des opinions et des coutumes, agit par amour pour le Seigneur! Il n’y a donc aucune raison de juger, ceux qui pensent autrement, encore moins de le scandaliser, de manière arrogante et avec un sentiment de supériorité … Ce que nous devons plutôt viser, c’est le bien de tous, « l’édification mutuelle »: c’est-à-dire la construction de la Communauté, son unité (voir « Rm 14,1-23″)!
Il s’agit d’appliquer, également dans ce cas, la grande norme de la vie chrétienne, que Paul avait rappelée un peu plus tôt dans la « Lettre »: « La plénitude de la Loi est charité » (« Rom. 13.10″). Ne se comportant plus « selon la charité » (« Rom. 14.15″), les chrétiens de Rome avaient échoué dans l’esprit de fraternité, qui devait animer les membres de chaque communauté!
L’Apôtre propose, comme modèle d’acceptation mutuelle, celui de Jésus lorsque, dans sa mort, au lieu de se plaire à lui-même, il a pris sur lui nos faiblesses (voir « Rm 15.1-3″). .. D’en haut, de la Croix, il a attiré chacun vers soi et a accueilli le Juif John et le Centurion romain: Marie-Madeleine, ainsi que le criminel crucifié avec lui!
« Acceptez-vous donc, exactement comme Christ vous a accueilli, pour la gloire de Dieu! »
Même dans nos communautés chrétiennes, bien qu’étant tous « aimés de Dieu et des saints, par appel » (« Rom 1,7″), il existe, comme ceux de Rome, des désaccords et des contrastes entre différentes façons de voir, et cultures, souvent distantes les unes des autres … Souvent, traditionalistes et innovateurs s’opposent – pour utiliser une langue, peut-être un peu simpliste, mais tout de suite compréhensible -: les gens plus ouverts, les autres plus fermés, intéressé par un christianisme plus social ou plus spirituel! Les différences sont alimentées par des convictions politiques et des contextes sociaux différents … Le phénomène d’immigration actuel ajoute de nouvelles composantes à nos assemblées liturgiques et aux divers groupes ecclésiaux, de diversification culturelle et d’origine géographique!
La même dynamique peut être déclenchée, dans les relations entre chrétiens de différentes Églises, mais aussi au sein de la famille, sur le lieu de travail ou en politique … Puis la tentation de juger, qui ne pense pas comme nous, et de se considèrent supérieurs, dans une opposition stérile, et exclusion, réciproque!
Le modèle proposé par Paul n’est pas l’uniformisme, qui s’aplatit, mais la communion, entre différents, qui enrichit! Pas par hasard, deux chapitres auparavant, dans la même « Lettre », parlent de l’unité du corps et de la diversité des membres, ainsi que de la variété des charismes qui enrichissent et animent la Communauté (voir « Rm 12.3 -13 « ). Le modèle n’est pas, pour reprendre une image du pape François, la sphère, où chaque point est équidistant, du centre, sans qu’il y ait de différence entre un point et un autre … Le modèle est le polyèdre, qui a des surfaces différentes, entre eux, et une composition asymétrique, où tous les biais conservent leur originalité! « Même les gens, qui peuvent être critiqués pour leurs erreurs, ont quelque chose à contribuer, qui ne doit pas être perdu … C’est l’union des peuples, qui, dans l’ordre universel, ils conservent leur particularité; c’est la totalité des gens, dans une société qui cherche un bien commun qui incorpore vraiment tout! ».
« Acceptez-vous donc, exactement comme Christ vous a accueilli, pour la gloire de Dieu! »
La « Parole de Vie » est une invitation pressante à reconnaître le positif qui existe dans l’autre, du moins pour le fait que Christ a donné sa vie, même pour cette personne, que je serais amené à juger … C’est une invitation à écouter, laisser tomber les mécanismes de défense: rester ouvert au changement, accueillir la diversité, dans le respect et l’amour, se réunir pour former une Communauté plurielle et unie!
Cette « Parole » a été choisie par « l’Église évangélique », en Allemagne, pour être vécue par ses membres et pour être sa lumière, pour toute l’année 2015 … Pour la partager, au moins ce mois-ci, parmi les membres de diverses Églises , il veut déjà être un signe d’acceptation mutuelle!
Ainsi, nous pourrons rendre gloire à Dieu avec un seul cœur et une seule voix (« Rom 15.6″), car, comme le disait Chiara Lubich, dans la « Cathédrale réformée » de Pierre « , à Genève: » Le temps présent [...] demande l’amour de chacun de nous: unité, communion, solidarité! Et il appelle aussi les Eglises à reconstruire l’unité, rompue depuis des siècles … C’est la « réforme des réformes » que le Ciel nous demande! C’est le premier pas nécessaire vers la fraternité universelle, avec tous les hommes et toutes les femmes du monde … Le monde, en fait, croira si nous sommes unis! « .

Fabio Ciardi

BASILE DE CÉSARÉE : HOMÉLIE 6, SUR L’AVARICE

13 mars, 2019

http://www.patristique.org/Basile-de-Cesaree-Homelie-6-sur-l.html

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Carême 

BASILE DE CÉSARÉE : HOMÉLIE 6, SUR L’AVARICE

par Luc Fritz

Vendredi 6 novembre 2009 — Dernier ajout vendredi 9 avril 2010
Homélie de saint Basile de Césarée sur cette parole de l’évangile de Luc : « Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands » (Lc 12, 18) et sur l’avarice.

l y a deux sortes de tentations. Ou bien les peines éprouvent les cœurs, comme l’or dans la fournaise (cf. Sg 3, 6), lorsque par la patience qu’elles exigent, elles montrent qu’ils ne méritaient pas la considération dont ils jouissaient ; ou bien c’est la prospérité même qui devient souvent pour le plus grand nombre une épreuve. Ce sont deux choses également difficiles pour l’âme, de ne pas se laisser abattre par les traverses et de ne pas se porter aux excès dans la prospérité.
Nous avons un exemple de la première sorte de tentation dans Job, ce grand homme, cet invincible athlète qui soutint toute la violence du diable, comme le cours impétueux d’un torrent, d’un cœur inébranlable et d’un esprit tranquille, et apparut d’autant plus grand au sortir des tentations que les luttes engagées avec lui par son ennemi paraissaient terribles et fatales.
En autres exemples de tentation qui se présentent dans la prospérité, il y a ce riche dont on vient de parler : il possédait des richesses et il en espérait d’autres. Le bon Dieu ne l’avait pas condamné d’abord à cause de sa dureté, et toujours ajoutait de nouvelles richesses à ses richesses premières, pour voir si, l’ayant enfin rassasié, il pourrait inviter son âme à la sociabilité et à la douceur : « Il y avait un homme riche, dit l’Écriture, dont le domaine avait beaucoup rapporté, et il s’entretenait ainsi en lui-même : Que ferai-je ? Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands. » (Lc 12, 16-18).
Pourquoi donc avait tant rapporté le domaine de cet homme qui ne devait faire aucun bon usage de sa richesse ? Pour que parût davantage la longanimité d’un Dieu dont la bonté s’étend jusqu’à de tels individus : « Il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes, et il fait lever le soleil sur les méchants et sur les bons » (Mt 5, 45). Mais une pareille bonté de la part de Dieu appelle sur les criminels un châtiment plus grand. Il a répandu les pluies sur la terre cultivée par des mains avares ; il a donné le soleil pour échauffer les semences et multiplier les fruits, grâce à la fertilité du sol. C’est de Dieu que viennent ces avantages : une terre convenable, un air bien tempéré, des semences abondantes, des bœufs qui prêtent leur concours, et tout ce qui permet à l’agriculture de prospérer. Or, qu’y avait-il en notre homme ? L’aigreur du caractère, la haine à l’égard des autres hommes, l’égoïsme. C’est ainsi qu’il répondait à son bienfaiteur. Il ne se souvenait pas de notre commune nature ; il ne pensait pas qu’il faut distribuer son superflu aux pauvres ; il ne tenait aucun compte du précepte : « Ne manque pas de faire du bien au pauvre » (Pr 3, 27), et « Que l’aumône et que la foi ne te quittent pas » (Pr 3, 3), et « Romps ton pain pour celui qui a faim » (Is 58, 7). Tous les prophètes, tous les docteurs lui criaient ces enseignements, mais ils n’étaient pas entendus : ses greniers craquaient, trop étroits pour contenir le blé qu’on y avait entassé, mais son cœur cupide n’était pas rempli.
Comme il ne cessait d’ajouter de nouvelles récoltes aux anciennes, et d’accroître sa richesse par les apports de chaque année, il tomba dans un embarras inextricable : il refusait de laisser partir les vieilles récoltes, à cause de son avarice, et il ne pouvait pas recevoir les nouvelles, à cause de la trop grande quantité qu’il avait déjà. Aussi, ses desseins étaient-ils sans effet, ses préoccupations sans remède. Que ferai-je ? Qui n’aurait pitié d’un homme aussi tourmenté ? Malheureux à cause de la fertilité de son domaine, il est à plaindre pour les biens qu’il possède, plus à plaindre encore pour ceux qu’il atttend. Ce ne sont pas des revenus que la terre lui procure, ce sont des gémissements qu’elle lui enfante. Ce n’est pas l’abondance des fruits qu’elle lui prodigue, ce sont des soucis, des chagrins et un embarras terrible. Il se plaint à la manière des pauvres. Ne fait-il pas entendre aussi cette parole, celui qui est pressé par la misère ? Que ferai-je ? Comment me procurer la nourriture ? Comment me procurer le vêtement ? Ces questions, le riche lui aussi les pose. Son cœur s’afflige, dévoré par les soucis. Ce qui réjouit les autres, consume de chagrin l’avare. Il n’est pas heureux de voir tous ses magasins remplis, et la richesse qui afflue et qui déborde de ses greniers blesse son âme effrayée à la seule pensée de jeter un regard sur ceux du dehors, et d’être la cause d’un peu de soulagement pour les malheureux.
2. Le mal dont souffre son âme me paraît semblable à celui qu’éprouvent les gloutons : ils aiment mieux crever de gloutonnerie que de partager leurs restes avec les pauvres. Écoute, ô homme, celui qui t’a pourvu. Souviens-toi de toi-même, qui tu es, quel bien tu administres, de qui tu l’as reçu, pourquoi tu as été préféré à la plupart. Tu as été fait serviteur d’un Dieu bon, intendant de tes compagnons d’esclavages ; ne crois pas que tout a été préparé pour ton ventre. Délibère au sujet des biens que tu as en mains avec la pensée que ce sont ceux d’autrui : ils te charment un peu de temps, puis ils s’écrouleront et disparaîtront, mais il t’en sera demandé un compte exact. Tu tiens toute ta richesse ramassée et renfermée derrière des portes et des verrous ; tu en as interdit l’accès par des sceaux, et cependant tu ne peux dormir à cause des soucis, et tu tiens conseil en toi-même, car tu te sers de toi-même comme d’un conseiller sans raison. Que ferai-je ? Il était tout simple de dire : je rassasierai les âmes de ceux qui ont faim, j’ouvrirai mes greniers et j’inviterai tous les pauvres. J’imiterai Joseph et je me ferai le héraut de la bonté. Je prononcerai des paroles magnanimes : « Vous tous qui manquez de pain, venez à moi ; vous aurez part, chacun suivant ses besoins, aux biens dont Dieu m’a gratifié ; vous y puiserez comme à des fontaines publiques. » Mais toi, tu n’es pas ainsi. Pourquoi ? Tu envies aux hommes l’usage des richesses, et, réunissant en ton âme un conseil de méchants, tu t’inquiètes, non de savoir comment tu pourras distribuer à chacun le nécessaire, mais comment, après avoir reçu tous les biens, tu pourras empêcher tout le monde d’en jouir. Ceux qui lui redemandaient son âme était là (Lc 12, 20), et lui s’entretenait de sa nourriture avec son âme. Cette nuit-là même il était enlevé, et il s’imaginait de nombreuses années de jouissance. Il lui fut accordé de former tous les desseins et de manifester sa pensée, afin que la sentence qu’il devait entendre fût digne du choix qu’il aurait fait.
3. Prends garde d’éprouver le même sort. L’histoire de cet homme a été écrite pour que nous évitions de lui ressembler. Imite la terre, ô homme : porte du fruit comme elle, ne te montre pas pire que la nature inanimée. Au surplus, la terre ne nourrit pas ses fruits pour sa propre jouissance, mais pour ton utilité ; tandis que toi, tous les fruits que tu montres de ta bienfaisance, tu les ramasses pour toi-même, parce que la récompense que méritent les bonnes œuvres revient aux bienfaiteurs. Tu as donné à celui qui avait faim, et ce que tu as donné est de nouveau à toi et te revient avec des intérêts. De même, en effet, que le blé, lorsqu’il est tombé en terre, devient un gain pour celui qui l’y a jeté, de même le pain, offert à celui qui a faim, produit dans la suite de multiples avantages. Que la fin de l’agriculture soit donc pour toi le commencement des semailles célestes : « Semez, dit l’Écriture, pour vous-mêmes dans la justice » (Gn 10, 12). Pourquoi donc te tourmentes-tu, pourquoi te frappes-tu toi-même dans tes efforts pour enfermer ta richesse dans le mortier et les briques ? « Une bonne renommée vaut mieux que de grandes richesses » (Pr 22, 1). Si tu admires l’argent à cause de la considération qu’il procure, considère combien il est plus profitable pour ta gloire d’être appelé père de milliers d’enfants que d’avoir dans ta bourse des milliers de statères. Tu laisseras là ton argent, même si tu ne le veux pas ; au contraire, tu emporteras devant le Maître l’honneur qui te reviendra de tes bonnes œuvres, lorsqu’un peuple entier t’entourera en présence du Juge commun, t’appellera nourricier, bienfaiteur, et te donnera tous les noms de la bonté. Ne vois-tu pas ceux qui, dans les théâtres, pour l’honneur d’un moment, les acclamations et les applaudissements du peuple, jettent leur fortune aux lutteurs au pancrace, aux comédiens et à ces hommes qui luttent contre les bêtes féroces et dont la vue seule inspirerait le dégoût ? Et toi, tu regardes à la dépense, alors que tu dois t’élever à une si grande gloire ? C’est Dieu qui t’approuvera, ce sont les anges qui t’acclameront bienheureux : une gloire éternelle, une couronne de justice, le royaume des cieux, tels sont les prix que tu recevras pour l’intendance de ces richesses corruptibles. Mais tu ne te soucies de rien de tout cela, et, par suite de ton zèle pour les biens présents, tu méprises ceux que tu dois espérer. Allons ! Distribue donc de toutes manières ta richesse, sois libéral et magnifique dans tes dépenses pour les indigents. Que l’on dise aussi de toi : « Il a dispersé ses biens, il les a donnés aux pauvres ; sa justice demeure pour l’éternité » (Ps 111, 9). Ne profite pas de la détresse pour vendre cher. N’attends pas la disette pour ouvrir tes greniers, « car celui qui vend son blé au poids de l’or est maudit du peuple » (Pr 11, 26). N’attends pas la famine pour en tirer de l’or, la misère commune en vue de ton opulence personnelle. Ne deviens pas un trafiquant des calamités humaines. Ne fais pas de la colère de Dieu une occasion d’accroître ta fortune. Ne ravive pas les blessures de ceux que les fouets ont meurtris. Mais tu portes tes regards du côté de l’or, et tu les détournes de ton frère. Tu reconnais l’empreinte des pièces de monnaie et tu distingues les vraies des fausses, mais ton frère dans le besoin, tu l’ignores complètement.
4. La belle couleur de l’or te procure une jouissance extrême, mais tous les gémissements dont le pauvre te poursuit, tu les comptes pour rien. Comment te mettre sous les yeux les souffrances de l’indigent ? Ce malheureux, après avoir inspecté sa maison, voit qu’il n’y a pas d’or chez lui, qu’il n’y en aura jamais ; que ses meubles et ses vêtements ont l’aspect misérable de la propriété des pauvres, d’une valeur totale de quelques oboles. Que faire donc ? Il tourne enfin les yeux vers ses enfants, pour les conduire au marché et trouver ainsi un moyen de retarder la mort. Considère ici le combat que se livrent la faim qui presse et les sentiments paternels. Celle-là menace notre homme de la mort la plus affreuse, la nature le tire de son côté et essaye de lui persuader de mourir avec ses enfants. Souvent il se décide, aussi souvent il revient sur sa décision ; finalement il succombe, contraint par la nécessité et l’implacable besoin. Et quel conseil tient-il en lui-même ce père ? « Lequel vendrai-je en premier ? Lequel le marchand de blé verra-t-il avec plus de plaisir ? Faut-il aller vers le plus âgé ? Mais je respecte en lui le droit d’aînesse. Vers le plus jeune ? Mais j’ai pitié de son âge qui ne sait pas encore ce que c’est que le malheur. Celui-ci est le portrait frappant de ses parents, celui-là est doué pour les études. Hélas ! Quel embarras ! Que devenir ? Sur lequel d’entre-eux vais-je tomber ? Quelle âme de la bête sauvage faut-il que je revête ? Comment pourrai-je oublier la nature ? Si je les garde tous, je les verrai tous consumés par la souffrance. Si j’en vends un, de quel œil regarderai-je ceux qui resteront, devenu désormais pour eux suspect de trahison ? Comment pourrai-je habiter ma maison, après m’être privé moi-même de mon enfant ? Comment m’assoirai-je à ma table qui connaîtra l’abondance à un pareil prix ? » Et il va, inondé de larmes, vendre le plus aimé de ses fils. Toi, cependant, tu restes inflexible devant sa douleur, tu ne tiens pas compte de la nature. La faim presse cet infortuné, et toi, tu le fais attendre, tu te moques de lui, tu prolonges son malheur. Il offre ses entrailles pour payer sa nourriture, et non seulement ta main n’est pas paralysée quand elle reçoit le prix que tu tires d’une telle détresse, mais tu discutes même sur ce prix, comme si tu offrais trop, tu t’efforces de recevoir beaucoup tout en donnant peu, et tu te sers de tous les moyens pour rendre plus accablant le malheur de cet infortuné. Ses larmes n’excitent pas ta pitié, ses gémissements n’amollissent pas ton cœur ; tu es inflexible et inexorable. Tout à tes yeux devient or, l’or obsède ton imagination ; c’est l’objet de tes rêves quand tu es endormi, de tes préoccupations quand tu es éveillé. De même, en effet, que ceux que la folie égare ne voient pas les objets réels, mais ce que leur hallucination leur présente d’après leur passion ; ainsi, ton âme, possédée par l’avarice, voit partout l’or, partout l’argent. Tu verrais avec plus de plaisir l’or que le soleil. Ton voeu est que tout se change en or, et tu t’appliques à le réaliser dans la mesure de tes forces.
5. Quelle invention ne mets-tu pas en mouvement à cause de l’or ? Le blé pour toi devient or, le vin se durcit en or, la laine pour toi se change en or ; tout commerce, tout projet que tu formes te rapporte de l’or. L’or se donne naissance à lui-même, multiplié qu’il est par les intérêts ; et l’on n’est pas rassasié, et l’on ne peut trouver de terme à ses désirs. Souvent on laisse les enfants gourmands se gorger sans réserve de ce qu’ils aiment le plus, pour que la satiété excessive engendre en eux le dégoût. Avec l’avare, il n’en est pas ainsi : plus il se remplit, plus il désire. « Si la richesse afflue vers vous, ne l’attachez pas à votre cœur » (Ps 61, 11). Or, tu retiens le flot qui coule devant toi et tu lui fermes tous ses passages. Mais, tandis que vous gardez la fortune stagnante, que vous fait-elle ? Elle rompt ses digues, et, après avoir été violemment contenue, elle déborde, détruit les greniers du riche, rase ses magasins, comme un ennemi qui envahit un territoire. Il va les reconstruire plus grands ? Il ne sait s’il ne les laissera pas détruits à son successeur. Car il pourrait lui-même disparaître, emporté avant qu’il ait pu les relever d’après le projet inspiré par son avarice. Que cet homme ait la fin que méritent ses mauvais desseins !
Mais vous, si vous m’en croyez, vous ouvrirez toutes les portes de vos magasins et vous procurerez à vos richesses de larges débouchés. Comme un grand fleuve qui se répand par mille canaux sur une terre fertile, permettez à vos richesses de se disperser et de s’en aller, par des voies diverses, dans les maisons des pauvres. L’eau devient plus abondante dans les puits où on la tire, et croupit dans ceux qui ne servent pas. De même, la richesse immobilisée est inutile ; mais, si elle est mise en mouvement et en circulation, elle devient utile à tous et féconde. Quelle louange t’adresseront ceux à qui tu auras fait du bien ! Garde-toi de la mépriser ! Quelle récompense te décernera le juste Juge ! Garde-toi d’en douter ! Que partout se présente à toi l’exemple de ce riche accusé d’avarice, qui, gardant les biens qu’il avait déjà, s’inquiétait pour les biens à venir, et, dans l’incertitude où il était de vivre le lendemain, avait péché le jour même pour le lendemain. Le suppliant n’était pas encore venu, qu’il montrait d’avance sa cruauté. Il n’avait pas ramassé ses récoltes, qu’il était déjà condamné pour avarice. La terre l’accueillait avec ses productions, étalant dans les champs les épaisses moissons, montrant sur les sarments de vigne les grappes nombreuses, donnant l’olivier qui se couvre de fruits, et promettant toutes les jouissances que l’on peut cueillir sur les arbres. Notre homme, lui, n’était accueillant pour personne et ne produisait aucun fruit ; il ne possédait pas encore, qu’il portait déjà envie aux indigents. Et pourtant, que de dangers menacent les fruits avant la récolte ! La grêle les brise, la chaleur trop ardente nous les arrache des mains, l’eau qui tombe des nuages à contretemps les rend inutilisables. Tu ne pries donc pas le Seigneur de consommer ses bienfaits ? Mais non, tu te rends d’avance indigne de recevoir ce qui t’a été montré.
6. Tu t’entretiens avec toi-même dans le secret, mais tes paroles sont examinées dans le ciel. Aussi, est-ce de là que t’arrivent les réponses. Quels propos tiens-tu ? « Mon âme, tu as en réserve beaucoup de biens ; mange, bois, réjouis-toi chaque jour » (Lc 12, 19). Ô folie ! Si tu avais une âme de porc, quelle autre bonne nouvelle pourrais-tu lui annoncer ? Es-tu à ce point semblable aux bêtes, si peu intelligent quand il s’agit des biens de l’âme, que tu offres à la tienne, en signe de bon accueil, la nourriture de la chair, et que tu lui destines à cette âme tout ce que reçoivent les latrines ? Si elle possède la vertu, si elle est pleine de bonnes œuvres, si elle habite près de Dieu, elle a beaucoup de biens, qu’elle se réjouisse de la bonne joie de l’âme. Mais, puisque tes pensées sont terrestres, que tu as pour dieu ton ventre, que tu es tout charnel, asservi à tes passions, écoute le nom qui te convient, celui qu’aucun homme ne t’a donné mais le Seigneur lui-même : « Insensé ! cette nuit même on te redemandera ton âme ; et ce que tu as mis en réserve, pour qui sera-t-il ? » (Lc 12, 20). Cette dérision que t’attire ton imprudence est pire que le châtiment éternel.
En effet, celui qui, dans quelques instants, va être emporté et conduit devant le Juge, quels desseins forme-t-il ? « Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands ». Tu fais bien, lui dirais-je moi-même. Ils méritent d’être détruits tes magasins d’iniquité. Rase de tes propres mains ce que tu as construit mal à propos. Ouvre tes dépôts de grain, d’où jamais personne n’est sorti soulagé. Fais disparaître toute maison gardienne de ton avarice, renverse tes toits, démolis tes murs, montre au soleil ton blé moisi, fais sortir de prison tes richesses captives, expose au grand jour les ténébreux asiles de Mammon. « Je détruirai mes greniers et j’en construirai de plus grands ». Et si tu remplis aussi ceux-là, qu’imagineras-tu donc alors ? Est-ce que par hasard tu les détruiras encore, pour en construire encore d’autres ? Quoi de plus sort que de se fatiguer sans cesse, de s’empresser de construire pour s’empresser de détruire ? Tu as comme greniers, si tu le veux, le ventre des pauvres. Ramasse-toi un trésor dans le ciel (cf. Mt 6, 20). Ce qui est déposé là, les vers ne le mangent pas, la pourriture ne le dévore pas, les voleurs ne le dérobent pas. — Mais je partagerai avec les pauvres, quand j’aurai rempli mes seconds greniers. — Tu as fixé toi-même à ta vie un terme très éloigné. Prends garde que le temps, pressé d’arriver au jour fixé par Dieu, ne te devance, car ta promesse est une preuve, non de ta bonté, mais de ta méchanceté. En effet, tu promets, non pour donner ensuite, mais pour te soustraire au devoir présent. Qu’est-ce qui t’empêche de donner maintenant ? Le pauvre n’est-il pas là ? Tes greniers ne sont-ils pas pleins ? La récompense n’est-elle pas prête ? Le précepte n’est-il pas clair ? Celui qui a faim se consume, celui qui est nu est gelé, celui à qui on réclame une dette s’étrangle, et toi, tu renvoies ton aumône à demain ? Écoute Salomon : « Ne dis pas : Retourne chez toi et reviens, demain je donnerai ; car tu ne sais pas ce qu’enfantera le jour suivant » (Pr 3, 28 ; 27, 1). Quels commandements tu méprises, toi à qui l’avarice a bouché les oreilles ! Quelle reconnaissance tu devrais avoir pour ton bienfaiteur, combien tu devrais être joyeux et fier de l’honneur qui t’est fait, puisque tu n’as pas toi-même à causer du trouble à la porte d’autrui, et que ce sont les autres qui assiègent la tienne ! Mais tu es sombre et inabordable, tu évites les rencontres, de peur d’être forcé de laisser échapper de tes mains la moindre chose. Tu ne connais qu’un mot : je n’ai rien, je ne donnerai rien car je suis pauvre. Pauvre, tu l’es en effet, et dépourvu de tout bien : pauvre d’amour, pauvre de bonté, pauvre de foi en Dieu, pauvre d’espérance éternelle. Donne à tes frères une part de tes vers ; partage aujourd’hui avec l’indigent ce qui sera pourri demain. C’est faire preuve de la plus odieuse des avarices, que de ne pas vouloir partager avec les pauvres même ce qui se perd.
7. « À qui fais-je tort, dit l’avare, en gardant ce qui m’appartient ? » Qu’y a-t-il, dis-moi, qui t’appartienne ? Où as-tu pris quelque chose pour l’introduire dans ta vie ? Comme quelqu’un qui, après avoir occupé une place au théâtre, repousserait ceux qui voudraient entrer, parce qu’il considère comme sa propriété personnelle ce qui est mis à la disposition de tous indistinctement : tels sont les riches. Ils s’emparent d’avance de ce qui est à tous et se l’approprient en vertu du droit du premier occupant. Si chacun prenait seulement de quoi subvenir à ses besoins et laissait le superflu à l’indigent, personne ne serait riche, personne ne serait pauvre, personne ne serait dans la misère. N’es-tu pas sorti nu du sein de ta mère ? Ne t’en retourneras-tu pas nu encore dans la terre ? Les biens présents, d’où te sont-ils venus ? Si tu dis que c’est du hasard, tu es un impie, car tu ignores le Créateur et tu n’as pas de reconnaissance pour Celui qui t’a pourvu. Si tu admets que c’est de Dieu, dis-nous la raison pour laquelle tu les as reçus. Dieu serait-il injuste, lui qui nous distribue inégalement les choses nécessaires à la vie ? Pourquoi es-tu riche, toi, alors que celui-là est pauvre ? N’est-ce pas seulement pour que toi, tu reçoives la récompense de ta bonté et de ta fidèle administration, et que lui soit honoré des prix magnifiques réservés à la patience ? Mais toi, qui fais tout disparaître dans les insatiables replis de ton avarice, crois-tu ne fait tort à personne, lorsque tu dépouilles tant de gens ? Qui est l’avare ? Celui qui ne se contente pas du nécessaire. Qui est le spoliateur ? Celui qui prive chacun de ses biens. Et toi, n’es-tu pas avare, n’es-tu pas spoliateur, quand tu t’appropries les biens que tu as reçus en intendance ? Celui qui dépouille un homme de ses vêtements sera appelé voleur, et celui qui ne couvre pas l’homme qui est nu, alors qu’il peut le faire, est digne d’un autre nom ? Il appartient à celui qui a faim, le pain que tu gardes ; à celui qui est nu, le manteau que tu conserves dans tes coffres ; à celui qui est sans chaussures, la chaussure qui pourrit chez toi ; au pauvre, l’argent que tu tiens enfoui. Ainsi, tu commets autant d’injustices qu’il y a de personnes à qui tu pourrais donner.
8. « Ce sont là, dit l’avare, de belles paroles, mais l’or est encore plus beau ». Ils ont le même succès ceux qui discourent sur la chasteté devant les impudiques. Et, en effet, ces hommes, lorsqu’on accuse leur maîtresse, sont enflammés de désirs, à cause des souvenirs qu’on éveille en eux. Comment te mettre sous les yeux les souffrances du pauvre, pour que tu saches bien de quels gémissements tu fais ton trésor ? De quel prix t’apparaîtra au jour du jugement cette parole : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde. Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais nu et vous m’avez vêtu » (Mt 25, 34-36). Au contraire, quel frisson t’agitera, quelle sueur t’inondera, quelle obscurité se répandra autour de toi, si tu entends cette condamnation : « Retirez-vous de moi, maudits, allez dans les ténèbres extérieures, celles qui ont été préparées pour le diable et ses anges. Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais nu et vous ne m’avez pas vêtu » (Mt 25, 41-43). Ce n’est pas le voleur qui est accusé ici, c’est celui qui ne partage pas qui est condamné.
Pour ma part, j’ai dit ce que je croyais utile. Toi, de ton côté, si tu te laisses persuader, les biens que renferment les promesses s’offrent clairement à tes yeux. Mais, si tu refuses d’obéir, la menace est écrite. Je souhaite qu’elle ne s’exécute pas pour toi. Prends un meilleur conseil, afin que tes richesses personnelles deviennent le prix de ta rançon, et que tu parviennes aux biens célestes qui te sont préparés, par la grâce de Celui qui nous a tous appelés à son royaume, et à qui appartiennent la gloire et la puissance dans les siècles des siècles. Amen.

Source :
Yves Courtonne, Homélies sur la richesse, édition critique et exégétique, Firmin-Didot, Paris 1935, p. 14-37.

COMMENT SAINT FRANÇOIS FIT UN CARÊME DANS L’ÎLE DU LAC DE PÉROUSE,

11 mars, 2019

http://saintfrancoisdassise.com/fioretti/jeune-40-jours

fr

COMMENT SAINT FRANÇOIS FIT UN CARÊME DANS L’ÎLE DU LAC DE PÉROUSE,

ou il jeûna quarante jours et quarante nuits et ne mangea rien de plus que la moitié d’un pain.

e véritable serviteur de Dieu saint François, parce qu’en certaines choses il fut quasi un autre Christ, donné au monde pour le salut des hommes, Dieu le Père voulut le rendre sur beaucoup de point conforme et semblable à son fils Jésus-Christ, ainsi qu’il apparaît dans le vénérable collège des douze compagnons, et dans l’admirable mystère des Stigmates sacrés, et dans le jeûne continuel du saint carême, qu’il fit de la manière suivante.
Saint François se trouvant une fois, le jour du carnaval près du lac de Pérouse, dans la maison d’un de ses dévots avec qui il avait passé la nuit, fut inspiré de Dieu d’aller faire ce carême dans une île de ce lac. Ce pourquoi saint François pria ce sien dévot de le porter sur sa nacelle, pour l’amour du Christ, dans une île du lac où n’habitât personne, et de le faire la nuit du jour des Cendres pour que nul ne s’en aperçût. Celui-ci à cause de la grande dévotion qu’il avait pour saint François, satisfit diligemment à sa prière et le passa dans cette île; et saint François n’emporta avec lui rien d’autre que deux petits pains. Arrivés dans l’île, comme son ami le quittait pour retourner chez lui, saint François le pria affectueusement de ne révéler à personne qu’il était là, et de ne revenir vers lui que le Jeudi-Saint. Et là-dessus l’autre s’en alla, et saint François resta seul.
Comme il n’y avait là aucun habitation où il pût se retirer, il entra dans un taillis très touffu, où beaucoup de ronces et d’arbustes avaient formé une sorte de petite cabane ou de tanière; et en ce lieu il se mit en oraison et à contempler les choses célestes. Et il resta là tout le carême sans boire et sans manger rien d’autre que la moitié d’un de ces petits pains, comme le découvrit ce sien dévot le Jeudi Saint, quand il retourna vers lui: des deux pains il trouva l’un entier et la moitié de l’autre. On croit que l’autre moitié, saint François la mangea par respect pour le jeûne du Christ béni, qui jeûna quarante jours et quarante nuits sans prendre aucune nourriture matérielle. Et ainsi avec ce demi pain il chassa loin de lui le venin de la vaine gloire, et à l’exemple du Christ il jeûna quarante jours et quarante nuits.
Puis en ce lieu, où saint François avait fait une si merveilleuse abstinence, Dieu opéra beaucoup de miracles par ses mérites; pour cette raison, les gens commencèrent à y édifier des maisons et à y habiter; et en peu de temps, il se bâtit un bon et grand village, et là se trouve le couvent des frères qu’on appelle le couvent de l’Île; et les hommes et les femmes de ce village ont encore grand respect et dévotion pour ce lieu où saint François fit ledit carême.

A la louange du Christ. Ainsi soit-il.

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