HOMÉLIE DU 4 NOVEMBRE 2018 ANNÉE B. « Quel est le premier de tous les commandements ? »
2 novembre, 2018HOMÉLIE DU 4 NOVEMBRE 2018 ANNÉE B. « Quel est le premier de tous les commandements ? »
Textes: Deutéronome 6, 2-6, Hébreux 7, 23-28 et Marc 12, 28b-34.
« Quel est le premier de tous les commandements ? » Domaine public J’aimerais cela entendre Jésus me dire « Tu n’es pas loin du Royaume de Dieu ». Et vous? C’est ce qu’il a dit à ce scribe qui venait honnêtement chercher des lumières auprès de lui pour son cheminement de vie. Regardons cette scène très parlante pour nous, car nous sommes, je l’espère, comme ce scribe, des personnes qui cherchent Dieu. Notre recherche de Dieu, comme celle du scribe, doit s’appuyer sur des bases fermes. Celles-ci sont des incontournables qui sont rappelés ici par Jésus. I – Le premier commandement Le premier fondement de notre recherche de Dieu se doit de donner la priorité à Dieu. C’est ce que les croyants et les croyantes du peuple d’Israël avaient compris. Le texte de la première lecture le proclame avec clarté et sans équivoque : « Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l’Unique. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force ». Ce « Écoute, Israël » a traversé les siècles. Il est devenu le cœur de la prière que tout juif croyant répétait le matin et le soir et que les juifs d’aujourd’hui récitent encore à chaque jour. C’est comme l’équivalent du « Notre Père » des chrétiens. On appelle cette prière le « Shema’ Israël » où le mot « Shema’ » est le mot hébreu pour dire « Écoute ». Le « Shema’ Israël » s’inspire du texte du Deutéronome que nous avons entendu dans la première lecture. Il a subi des ajouts au cours des siècles, mais son but est toujours le même : proclamer l’absolu et la priorité de Dieu dans toutes les sphères de la vie personnelle et dans la société. Il ne s’agit pas seulement d’une affirmation, mais aussi et surtout d’une conviction vécue avec son coeur : « Ces paroles que je te donne aujourd’hui resteront dans ton cœur. » L’attitude du bon juif, du scribe qui rencontre Jésus ici, est une attitude de relation personnelle et de communion intime avec Dieu. Elle se manifeste non seulement dans le respect de ses lois, mais aussi par des sentiments d’amour, de reconnaissance, de confiance. Les psaumes que vous connaissez bien en sont remplis. « Je t’aime, Seigneur, ma force : Seigneur, mon roc, ma forteresse » proclame le chant de méditation d’aujourd’hui. (Psaume 17, 2). II – Le second commandement En écoutant la suite de la réponse de Jésus au scribe, nous passons à un autre fondement essentiel dans notre recherche de Dieu . Après avoir répondu que le premier commandement est «Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force », Jésus, reprenant l’enseignement déjà présent dans l’Ancien Testament, continue en disant « Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là ». On ne peut manquer d’être un peu surpris d’entendre ici le « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». C’est normal, car on identifie cette invitation à la nouveauté du message et de la prédication de Jésus. Mais, on voit ici que Jésus ne l’a pas créée. Elle faisait déjà partie de l’Ancien Testament. Jésus cependant l’a reprise et il en fait l’essentiel de son message. Il a lié les deux commandements l’un à l’autre. Pas d’amour de Dieu sans amour du prochain et pas d’amour du prochain sans amour de Dieu. L’amour du prochain pour Jésus est le visage que prend l’amour de Dieu dans la vie du croyant. L’apôtre saint Jean et ses disciples l’avaient bien compris. On lit, en effet, dans la première Lettre de saint Jean « Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas ». (I Jean 4, 20) Et dans la suite de notre scène, Jésus reconnaît que le scribe est sur cette voie qu’Il prêchera par le « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés ». Il lui dit avec affection « Tu n’es pas loin du royaume de Dieu ». III – Application Nous sommes invités nous aussi comme le scribe à nous laisser imprégner de l’amour de Dieu que nous aimerons de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit et de toute notre force. Cet amour de Dieu nous tournera vers les autres car, comme Jésus le dit ailleurs dans l’Évangile, les autres, spécialement les plus démunis et les plus pauvres, sont Dieu lui-même qui vient à notre rencontre dans nos vies de chaque jour. Le pape Paul VI qui a terminé le Concile Vatican II en 1965 et qui vient d’être reconnu comme saint canonisé le 14 octobre 2018, l’avait bien compris. Permettez-moi de vous citer une phrase de lui que le frère Roger de Taizé avait retenue et qu’il utilisait souvent dans sa prédication. Saint Paul VI avait l’habitude de dire : « L’homme est sacré par l’innocence de son enfance, le mystère de sa pauvreté,… à travers le visage de tout homme – spécialement lorsque les larmes et les souffrances l’ont rendu plus transparent – nous pouvons reconnaître le visage du Christ ». Oui ! À travers ceux et celles que nous rencontrons, que nous servons, qui sont délaissés, qui vivent l’isolement, à travers le pauvre, le malade ou la personne âgée que nous visitons etc. c’est Jésus que nous rencontrons. « Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !” (Mathieu 25, 35-36).
Conclusion Que cette Eucharistie dominicale nous rende de plus en plus conscients et conscientes du lien qu’il y a entre l‘amour de Dieu et l’amour du prochain et fasse de nous des disciples-missionnaires comme le souhaite le pape François. En partageant le Corps et le Sang du Christ nous trouvons la force et l’élan nécessaires pour vivre ce défi d’une remise totale à Dieu qui nous tourne vers nos frères et soeurs à la suite de celui qui est devenu par sa mort sur la croix, comme le dit si bien la Lettre aux Hébreux dans la deuxième lecture, le grand prêtre « qu’il nous fallait : saint, innocent, immaculé » et qui est toujours vivant pour intercéder en notre faveur. Amen!
Mgr Hermann Giguère, P.H. Faculté de théologie et de sciences religieuses l’Université Laval Séminaire de Québec