Archive pour avril, 2018

SOLENNITÉ DE SAN GIUSEPPE ARTIGIANO ET GROUPE DE TRAVAIL – HOMÉLIE DE PAUL VI

30 avril, 2018

http://w2.vatican.va/content/paul-vi/it/homilies/1968/documents/hf_p-vi_hom_19680501.html

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Saint Joseph Travailleur

(Google traduction de l’italien)

SOLENNITÉ DE SAN GIUSEPPE ARTIGIANO ET GROUPE DE TRAVAIL – HOMÉLIE DE PAUL VI
 
Mercredi 1er mai 1968

L’ACTION MATERNELLE ET REDEMPTEUR DE L’EGLISE

Fils et filles bien-aimés!

Ici nous célébrons ensemble le 1er mai, la fête du travail. C’est un nouveau parti qui a trouvé sa place dans le calendrier religieux ces derniers temps; et il est clair que l’Eglise, en introduisant dans la série de ses célébrations sacrées, manifesté une intention rédemptrice, presque un désir de récupérer, et certainement un but sanctifiante. Il a produit un écart dans les derniers siècles entre la psychologie du travail et religieux, un détachement qui a eu des répercussions sociales, et qui les maintient encore loin de la foule de nombreux foi des hommes et des femmes qui ne travaillent pas seulement leur profession, mais aussi leur qualification spirituelle, l’expression de leur conception suprême de la vie, en opposition au christianisme. C’est l’un des plus grands malentendus de la société moderne, et chacun devrait savoir se débrouiller, non seulement pour louer la vérité, mais aussi pour le bénéfice du travail lui-même et des travailleurs, celui du travail et de l’activité productive leur vie l’empreinte distinctive.

TRAVAILLER COMME TOUTES LES ACTIVITÉS HUMAINES HONNÊTES SONT SACRÉES
En effet, en ce qui concerne le travail, la pensée chrétienne, et pour elle l’Église, la considère comme une expression des facultés humaines, et non seulement des facultés physiques, mais aussi spirituelles, qui impriment le signe de la personnalité dans le travail manuel. humain, et donc son progrès, sa perfection, et finalement son utilité économique et sociale. Le travail est l’explication normale des facultés humaines, physiques, morales et spirituelles! et donc il couvre la dignité, le talent, le génie perfectif et productif de l’homme. Sa pédagogie fondamentale s’exprime, elle marque l’envergure de son développement. Il obéit au plan primitif de Dieu le créateur, qui voulait l’explorateur de l’homme, conquérant, dominateur du pays, ses trésors, son énergie, ses secrets. Donc ce n’est pas un travail, en soi, une punition, une décadence, un joug esclave, comme les anciens l’ont considéré, même les meilleurs; mais c’est l’expression du besoin naturel de l’homme d’exercer ses forces et de les mesurer aux difficultés des choses, de les réduire à son service; c’est l’explication libre et consciente des facultés humaines, des mains humaines guidées par son intelligence. Le travail est donc noble et, comme toute activité humaine honnête, il est sacré.

ASSURER VOTRE JUSTICE AU TRAVAIL QUI FAIT UN VISAGE HUMAIN FORT ET LIBRE
Ici, parmi les nombreuses, deux questions arrêtent le cours facile de ces pensées. Et c’est: que faut-il dire du travail quand il est lourd, oppressif, inepte pour atteindre son premier résultat, pain, suffisance économique pour la vie? quand sert-il à augmenter la richesse des autres avec la difficulté et la misère de la sienne? quand est-ce un indice, et presque un sceau d’inégalité économique et sociale insurpassable et insupportable? La réponse théorique est facile, même si dans la pratique c’est souvent très difficile; mais c’est une réponse forte à la souffrance humaine, une force finalement victorieuse: nous devons exiger des conditions de travail meilleures et progressivement meilleures; doit être assurée à travailler sa justice, qui change de travailler son mal et le visage humilié, et en fait un visage vraiment humain, forte, libre, heureux, irradiée par la conquête non seulement des biens économiques, assez pour une vie décente et saine, mais aussi des biens supérieurs de la culture, du rafraîchissement, de la joie légitime de vivre et de l’espérance chrétienne.

IL EST NÉCESSAIRE DE VENIR À UN ORDRE CORRECT POUR TOUT LE MONDE ET À LA VISION CHRÉTIENNE DE LA SOCIÉTÉ
Beaucoup a déjà été fait dans ce sens, mais il reste encore beaucoup à faire. Les grandes encycliques papales ont élevé une voix haute et sérieuse à cet égard; et ainsi celle des Pasteurs et des Maîtres et des Exposants du laïcat catholique. Aujourd’hui, nous nous souvenons de ces mots magistraux, tels que ceux dans lesquels résonnent les échos de nos textes liturgiques. L’Église honore ainsi le travail, et marche aussi, certainement pas à l’arrière, sur la route principale de la civilisation de votre temps.
L’autre question qui se pose à parler du travail, est liée à la nouvelle forme, qui a pris le lieu de travail moderne, la forme industrielle, celle de la machine, celle de production massive, qui a transformé notre société, marquant la distinction et l’opposition des classes sociales. Que dirons-nous? nous avons tellement dit, écrit, opéré sur ce thème, que nous ne voudrions pas paraître simplistes dans nos réponses. Mais vous connaissez la simplicité de base de cette conversation. La première réponse est la suivante: l’Église admire et encourage cette expression puissante du travail moderne: parce qu’elle vise à multiplier les biens économiques en modou que tout le monde peut, dans une mesure suffisante, en profiter; et parce que, alimenté par la machine, le travail est devenu moins lourd sur les épaules de l’homme (voir Danusso). Nous pourrions aussi dire: parce qu’organisé, le travail moderne produit de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles solidarités, de nouvelles amitiés entre ceux qui vous attendent, surtout parmi les ouvriers; et cela est un bon, si en effet la solidarité qui les unit et donne à l’entreprise un tissu plus compact des relations humaines et plus consciente, qui les associe à la première rencontre de leur classe aux divisions fonctionnelles essentielles du travail comprimée et organisée pour accomplir et ensuite la protection des intérêts communs; mais ensemble ils forment la conception organique de la société, il ne devrait pas être par l’impact de la cupidité contradictoires et inconciliables, mais par l’harmonie des dialectiques de collaboration à un ordre approprié pour tous et la participation à un bien commun à une distribution rationnelle. Espérons que ce soit encore largement, mais aussi la réalité, qui mûrit là où la vision chrétienne de la société et le concept sacré de la personne humaine, que seul l’Évangile peut définir et défendre ultimement, acquièrent la mentalité du progrès moderne. NAZARETH FABBROW « NOUS ENVERRONS ET BENISSONS TOUS LES TRAVAILLEURS » Combien de choses nous avons encore à dire! mais c’est presque par lui-même: la religion est à la racine et est au sommet du processus qui rend le concept et la réalité du travail si grands. Elle a aussi sa propre doctrine pour l’aspect de la fatigue et de la punition, que le travail ne perd jamais et qui rappelle sa malheureuse origine (voir Gen. 3, 19), rappelle son heureux et sublime épilogue, sa valeur. rédempteur (voir Matt 5, 6); et presque l’enseignement ne suffisait pas à nous persuader de l’honneur et de l’amour que nous devons au travail humain, notre religion, un exemple et un protecteur nous offre aujourd’hui, l’humble et grand saint Joseph, maître de l’opéra à ce Christ dont les mains divines ont produit l’œuvre de la création et de la rédemption. Adorons Joseph, le forgeron de Nazareth; et en son nom, nous saluons et bénissons tous les ouvriers aujourd’hui, et puisque, d’une manière ou d’une autre, ils sont tous de vous, du fond du cœur, nous vous bénissons tous.

PAPE FRANÇOIS – FÊTE DE SAINT MARC ÉVANGÉLISTE (25 avril 2017)

24 avril, 2018

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/cotidie/2017/documents/papa-francesco-cotidie_20170425_messe-pour-tawadros.html

imm fra

Saint Marc L’Evangeliste

PAPE FRANÇOIS – FÊTE DE SAINT MARC ÉVANGÉLISTE (25 avril 2017)

MÉDITATION MATINALE EN LA CHAPELLE DE LA MAISON SAINTE-MARTHE

Messe pour Tawadros II

(L’Osservatore Romano, Édition hebdomadaire n° 018 du 04 mai 2017)

A quelques jours du voyage en Egypte, le Pape a offert la Messe «pour mon frère Tawadros II, patriarche d’Alexandrie des Coptes». «Aujourd’hui est la fête de saint Marc évangéliste, fondateur de l’Eglise d’Alexandrie», a dit le Pape, en demandant «la grâce que le Seigneur bénisse nos deux Eglises par l’abondance de l’Esprit Saint». Les paroles de Marc «à la fin de l’Evangile» (16, 15-20), proposées par la liturgie du jour, ont été le fil conducteur de la méditation du Pape: «Allez dans le monde entier, proclamez l’Evangile à toute la création». Dans ce mandat, «il y a la mission que Jésus donne aux disciples: la mission d’annoncer l’Evangile, de proclamer l’Evangile». C’est une invitation à «sortir, aller». Les chrétiens sont appelés à «sortir pour annoncer, et c’est dans cette sortie que se déroule, se joue la vie du prédicateur: il n’est pas en lieu sûr, il n’y a pas d’assurance-vie pour les prédicateurs». «Tout d’abord: allez, sortez», parce que «l’Evangile, l’annonce de Jésus Christ, se fait toujours en sortie, toujours en chemin». Et «tant en chemin physique qu’en chemin spirituel ou en chemin de la souffrance: pensons à l’annonce de l’Evangile de tant de malades qui offrent leurs douleurs pour l’Eglise, pour les chrétiens». Ce sont des personnes qui «sortent d’elles-mêmes». Mais «comment est le style de cette annonce?». «Saint Pierre, qui a été le maître de Marc, est très clair dans la description de ce style: «Revêtez-vous tous d’humilité dans vos rapports mutuels». L’Evangile doit être annoncé avec humilité, parce que le Fils de Dieu s’est humilié, il s’est anéanti: le style de Dieu est celui-ci, ce n’est pas un autre». Il faut de «l’humilité: l’Evangile ne peut être annoncé par le pouvoir humain, il ne peut être annoncé avec l’esprit de grimper et d’aller plus haut, non! Cela n’est pas l’Evangile!». L’humilité est nécessaire «parce que nous apportons une annonce d’humiliation, de gloire, mais à travers l’humiliation». Et «l’annonce de l’Evangile subit la tentation; la tentation du pouvoir, de l’orgueil, des nombreuses mondanités qui existent et qui nous conduisent à prêcher ou à réciter». Oui, «parce qu’un Evangile édulcoré, sans force, un Evangile sans le Christ crucifié et ressuscité n’est pas une prédication». « L’annonce de l’Evangile, si elle est vraie, subit la tentation». «Si un chrétien qui dit annoncer l’Evangile par la parole ou par le témoignage, n’est jamais tenté», le diable ne s’en préoccupe pas «et si le diable ne se préoccupe pas, c’est parce que nous ne lui posons pas de problèmes, parce que nous prêchons une chose qui ne sert pas». Voilà pourquoi «dans la véritable prédication, il y a toujours un peu de tentation et aussi de persécution». En somme, «style d’humilité, chemin — parce que l’on sort — chemin de tentation, mais l’espérance» ne doivent jamais manquer. En effet, Pierre écrit: «Quand vous aurez un peu souffert, le Dieu de toute grâce, qui vous a appelés à sa gloire éternelle, dans le Christ, vous rétablira lui-même, vous affermira, vous fortifiera». Et «ce sera précisément le Seigneur qui nous reprendra, qui nous donnera la force, parce que c’est ce que Jésus a promis quand il a envoyé les apôtres». « Que le Seigneur nous donne cette grâce, à nous tous baptisés, de prendre la voie de l’évangélisation avec humilité, avec confiance en Lui-même, en annonçant le véritable Evangile: “Le Verbe s’est fait chair”».

 

PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002)

23 avril, 2018

http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/chrstuni/documents/rc_pc_chrstuni_doc_20020107_peace-kasper_fr.html

PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002) dans PAIX (LA) Saint_Bonnet_le_Ch%C3%A2teau-Anges_musiciens_04

Saint Bonnet le Château-Anges musiciens

CONSEIL PONTIFICAL POUR LA PROMOTION DE L’UNITÉ DES CHRÉTIENS

PAIX DANS LE MONDE, DIALOGUE ENTRE LES CHRÉTIENS ET LES AUTRES RELIGIONS (2002)

La paix, shalom, est au centre du message de l’Ancien et du Nouveau Testament. Paix, shalom dans la Bible, n’est pas seulement le salut normal que serait une formule de politesse; paix, shalom, est une promesse eschatologique venant de Dieu et un souhait de bénédiction entre les hommes. En effet, Jésus-Christ lui-même est notre paix (cf. Ep 2, 1). Bénis par Dieu en Jésus-Christ, les chrétiens doivent être entre eux une bénédiction et une bénédiction pour toutes les nations. « Heureux les artisans de la paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9). L’Eglise est donc appelée à être le signe, l’instrument et le témoin de la paix, paix avec Dieu et entre les hommes (cf. Lumen gentium, nn. 1 et 13).
Paix, justice et pardon
La paix entre les hommes, cette tranquillitas ordinis enseignée par saint Augustin, à laquelle le Pape Jean-Paul II s’est référé dans son Message pour la Journée de la Paix du 1er janvier (cf. n. 3), ne doit toutefois pas être entendue seulement au sens de silence des armes et absence de guerre. Elle est le fruit de l’ordre insufflé par son fondateur dans la société humaine (cf. Gaudium et spes, n. 78), et elle présuppose un engagement constant pour instaurer la justice dans le monde. Comme l’affirme l’Ecriture, la paix véritable est le « fruit de la justice » (Is 32, 17; cf. Jc 3, 18).
Par justice, il faut entendre la reconnaissance de la dignité de chaque personne, ses droits fondamentaux en tant qu’être humain, la liberté de chacun, l’absence de discrimination au nom de la foi, de l’origine, de la culture, du sexe. Par justice, il faut entendre le droit de chaque créature humaine à la vie, à la terre, à la nourriture, à l’eau, et à une éducation qui la rende plus pleinement consciente des droits qui sont les siens, et capable d’autodétermination dans sa propre vie. Ce bien de la personne présuppose le bien commun, la justice sociale, surtout pour les pauvres, l’équilibre social et la stabilité de l’ordre social et politique.
Face à un monde marqué par le péché, l’égoïsme et l’envie, un monde qui trop souvent nie avec violence la justice, et bouleverse, dans le cercle vicieux des conflits, la tranquillitas ordinis, qui est la condition nécessaire et la substance même de la paix, il est impossible d’instaurer la paix sans la « sollicitude miséricordieuse et providentielle de Dieu, qui connaît les chemins permettant d’atteindre les coeurs les plus endurcis et de tirer de bons fruits même d’une terre aride et inféconde » (Message pour la Journée mondiale de la Paix, 1er janvier 2002, n. 1, cf. ORLF n. 50 du 11 décembre 2001). La paix est le don du pardon, de la rédemption et de la nouvelle création; tout comme l’amour, la joie, la pénitence, la bienveillance, la bonté, elle est le fruit de l’Esprit (cf. Ga 5, 22). Le Royaume de Dieu est justice, paix et joie dans l’Esprit (cf. Rm 14, 17).
Cette espérance doit toujours plus profondément animer notre prière. La paix doit être constamment implorée, afin qu’elle puisse nous être accordée et être sauvegardée. Mais l’arme de la prière renforce aussi notre engagement à renverser les situations d’injustice, et à agir ensemble pour l’édification d’un monde plus juste. Guidés par la mansuétude de Celui qui a prédit la justice pour les pauvres du Royaume, les chrétiens savent que « la capacité de pardonner est à la base de tout projet d’une société à venir plus juste et solidaire » (ibid. n. 9).
Les chrétiens savent que la haine ethnique, raciale, religieuse, cette spirale de la violence qui frappe indistinctement victimes et bourreaux, peut avoir un antidote: le pardon. Seul le pardon, en effet, nous situe au-dessus des accusations; nous permet de ne pas rendre coupables à cause de quelques uns, des peuples entiers; de ne pas faire retomber sur les fils les fautes des pères. Le pardon, qui dépend de chacun de nous, peut rétablir la justice et nous conduire d’une situation de guerre à un état de paix.
Réconciliation et paix entre les chrétiens
C’est précisément à propos de ce lien entre la paix, la justice et le pardon qu’il faut souligner l’importance du dialogue oecuménique et de la collaboration entre tous les chrétiens. « Aux yeux du monde l’action conjuguée des chrétiens dans la société revêt alors la valeur transparente d’un témoignage chrétien rendu en commun au nom du Seigneur » (Ut unum sint, n. 75). Mais il y a plus. Accablés par leur histoire, faite de disputes et d’affrontements, coupables d’avoir quelquefois prêché et imposé l’Evangile du Christ également par les armes, les chrétiens se sont engagés, particulièrement au cours de ce siècle, sur le chemin lent et difficile de leur pardon réciproque. Il n’y a pas d’oecuménisme sans conversion et sans pardon (cf. ibid., n. 15s, n. 33). La honte et le repentir intérieur pour le scandale de la division, un repentir suscité par l’Esprit, sont à la base du mouvement oecuménique (cf. Unitatis redintegratio, n. 1).
Aujourd’hui, les chrétiens ont franchi le seuil du troisième millénaire, et se trouvent face à un choix responsable, difficile, essentiel. L’engagement oecuménique, la promotion de l’unité des chrétiens est l’un des grands défis et des devoirs les plus urgents au début du nouveau millénaire (cf. Novo millennio ineunte, nn. 12 et 48). Les chrétiens sont appelés à « promouvoir une spiritualité de la communion » (ibid. n. 43s), et être ainsi « lumière du monde », « ville sise au sommet d’un mont » (Mt 5, 14).
Ils prêchent le pardon, cette forme particulière de l’amour (cf. Message, op. cit., n. 2) et, peu à peu, se l’appliquent à eux-mêmes, à leurs Eglises en Orient et en Occident. Dialoguer, se rencontrer, purifier leurs mémoires, est pour les Eglises un acte de courage et un engagement exigeant. Elles savent que « la cohérence et l’honnêteté des intentions et des affirmations de principe se vérifient quand on les applique à la vie concrète » (Ut unum sint, n. 74). Cela les pousse, dans la situation actuelle, à avoir entre elles un comportement exemplaire, qui offre au monde un témoignage de pardon, de concorde, de dialogue, qui exige d’être d’autant plus profond que les divergences semblent insurmontables.
Malgré les divisions persistantes, les Eglises, grâce à l’expérience du dialogue qu’elles sont en train de vivre, ont pu, jusqu’à aujourd’hui, démontrer au moins que le processus de purification de la mémoire de leur passé entraîne peu à peu une évolution qui fait prévaloir « la « Loi nouvelle » de l’esprit de charité. La « fraternité universelle » des chrétiens est devenue une ferme conviction oecuménique » (ibid., n. 42). Ils vivent déjà dans une communion réelle et profonde, même si elle n’est malheureusement pas encore parfaite (cf. ibid., nn. 11-14). Pour servir la paix et en donner l’exemple, ils peuvent et doivent, dès aujourd’hui, collaborer étroitement entre eux.
Dialogue oecuménique et dialogue interreligieux
L’attitude des Eglises et la prédisposition au pardon, qu’elles appliquent à leurs relations réciproques, doivent les conduire à dialoguer ensemble avec les autres religions et les autres cultures afin que la morale oecuménique, qu’elles recherchent dans leurs actions, se reflète dans les rapports et dans le dialogue avec les autres religions, en vue d’une collaboration qui vise à réaffirmer les valeurs de la vie et de la culture humaine.
Le dialogue oecuménique et le dialogue interreligieux sont liés l’un à l’autre, mais ils ne se confondent pas l’un avec l’autre. Il existe entre les deux une différence spécifique et qualitative, et c’est pour cette raison qu’il faut bien les distinguer. Le dialogue oecuménique ne se fonde pas seulement sur la tolérance et le respect dû à chaque conviction humaine et en particulier religieuse; pas plus qu’il ne se fonde seulement sur un philanthropisme libéral ou une simple politesse bourgeoise; au contraire, le dialogue oecuménique s’enracine dans la foi commune en Jésus-Christ et dans la reconnaissance réciproque du baptème au moyen duquel tous les baptisés sont membres de l’unique Corps du Christ (cf. Ga 3, 28; 1 Co 12, 13; Ut unum sint, n. 42) et ils peuvent prier ensemble comme nous l’a enseigné Jésus, « notre Père ». Dans les autres religions, l’Eglise reconnaît un rayon de cette vérité « qui éclaire chaque homme » (Jn 1, 9), mais qui n’est révélée pleinement qu’en Jésus-Christ; lui seul est « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6; cf. Nostra aetate, n. 2). C’est pour cela qu’il est ambigu de parler du dialogue interreligieux en terme de macrooecuménisme ou d’une phase nouvelle et plus large de l’oecuménisme.
Les chrétiens et les partisans des autres religions peuvent prier, mais ils ne peuvent prier ensemble. Tout syncrétisme est exclu. Néanmoins, ils partagent le sens et le respect de Dieu ou du Divin et le désir de Dieu ou du Divin; le respect pour la vie, le désir de la paix avec Dieu ou avec le Divin, entre les hommes et dans l’univers; ils partagent beaucoup de valeurs morales. Ils peuvent et doivent collaborer pour défendre et promouvoir ensemble, au profit de tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté. Cela est particulièrement vrai pour les religions monothéistes, qui voient en Abraham leur père dans la foi.
L’invitation pour la Journée de prière pour la paix dans le monde est une façon de réaffirmer tout cela. L’Eglise catholique voit dans cette participation une occasion utile pour témoigner ensemble que « les chrétiens se sentent toujours plus interpellés par la question de la paix » (Ut unum sint, n. 76). En respectant les critères de la recherche de leur propre unité, les chrétiens respectent les autres religions. Ils savent que la « loi nouvelle » de l’esprit de charité encourage à accueillir les autres, n’exclut pas la légitime diversité. Ils savent qu’ils ont en commun avec les autres religions l’arme de la prière pour implorer la paix.
Face à ce mal terrible qu’est l’absence de paix, face à la chaîne infinie de deuils qu’apporte la guerre, ils savent qu’il n’y a qu’une seule alternative: donner un témoignage de pardon réciproque et de tranquillitas ordinis entre eux. Ainsi, nous demandons à tous de parcourir avec nous le même chemin d’espoir vers la justice, la réconciliation et la paix.

Cardinal Walter Kasper,
Président du Conseil pontifical pour l’Unité des Chrétiens

HOMÉLIE DU 4ÈME DIMANCHE DE PÂQUES

20 avril, 2018

http://preparonsdimanche.puiseralasource.org/?p=homelie&id=625

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HOMÉLIE DU 4ÈME DIMANCHE DE PÂQUES

« L’amour vrai ne se démontre pas. Il se montre ». C’est ce message que nous trouvons tout au long des lectures bibliques de ce dimanche. Nous avons tout d’abord le discours de Pierre. Nous nous rappelons qu’il a eu peur de la dénonciation d’une servante qui l’avait reconnu comme disciple de Jésus au moment de sa Passion. Face au danger qui pesait sur lui, il l’a renié trois fois. Aujourd’hui, il affronte avec audace les terribles autorités de Jérusalem, celles-là même qui ont crucifié Jésus. Il répond que si le boiteux a été guéri c’est par le nom de Jésus.
C’est aussi important pour nous. Jésus est capable de rendre la santé physique. Mais la bonne nouvelle de ce jour, c’est qu’il assure le salut de tous les hommes. Il n’y a aucun autre salut ailleurs qu’en lui. Il nous faut redécouvrir toute la richesse de ce mot « Salut » : il s’agit de toute la richesse de vie et d’amour auxquels tout homme aspire. C’est le Christ ressuscité qui répond à cette attente. « Aucun autre nom n’est donné aux hommes qui puisse nous sauver ».
La lettre de saint Jean (2ème lecture) va dans le même sens. Nous sommes peut-être trop habitués à entendre que Dieu nous aime. C’est vrai que nous sommes devenus des enfants gâtés. Mais il nous faut imaginer le bouleversement de cette révélation d’amour a pu provoquer à l’époque. Elle s’adressait aux grandes cités de l’empire Romain, à des gens exploités et méprisés, à des mal-aimés de Corinthe et d’Éphèse. Pour eux c’était un véritable renversement. Le monde de l’amour n’avait rien à voir avec celui du pouvoir.
Ce qui est premier c’est cette révélation inimaginable d’un Dieu dont le nom est « Amour ». Nous y avons été plongés au jour de notre baptême. « Mes bien-aimés, voyez comme il est grand l’amour dont le Père nous a comblés. Il a voulu que nous soyons enfants de Dieu ». C’est une expérience vraiment extraordinaire. Il s’agit moins d’aimer que de se savoir aimés par lui. Pour nous, cela a commencé au jour de notre baptême et cela se développe tout au long de notre vie. Un jour viendra où nous atteindrons la parfaite ressemblance avec le Fils de Dieu. « Nous luis serons semblables parce que nous le verrons tel qu’il est ». Il suffit de se laisser aimer.
L’Évangile nous présente Jésus comme le bon berger. La Bible utilise souvent cette image pour parler des responsables du peuple ou encore du Roi-Messie. C’est au moment du danger qu’on reconnaît le vrai berger. Quand ça devient vraiment dangereux, le mercenaire ne pense qu’à se mettre en sécurité. Pour lui, les brebis c’est secondaire. Avec Jésus c’est différent. Sa priorité c’est de sauver tous les hommes ; il est le « berger de toute humanité ». Il connait chacune de ses brebis. Il ne faut pas se tromper sur le sens du mot connaître. Ce n’est pas comme quand on dit : « Je connais tous mes dossiers ». La connaissance dont il est question est communication, échange, dialogue. C’est une communication de pensée et de cœur.
Oui, Jésus nous connaît tous au plus profond de nous-mêmes. Et quand il dit cela, il ne pense pas seulement aux bons chrétiens. Il pense aussi à tous ceux qui ne le connaissent pas, ceux qui organisent leur vie en dehors de Dieu. D’une façon ou d’une autre, tous font partie de son bercail. Malheureusement, il se trouve des mauvais bergers qui font tout pour sortir Dieu de nos vies ; et comme la nature a horreur du vide, c’est la Loi du plus fort, du plus puissant, la Loi de l’argent qui a pris ses quartiers parmi nous. Mais Jésus ne cesse de vouloir « rassembler les enfants de Dieu qui sont dispersés ».
Le Seigneur compte sur nous pour participer à sa mission de bon berger. C’est pour répondre à cet appel que des chrétiens s’engagent comme catéchistes ou encore dans des aumôneries de collèges, d’hôpitaux et même dans les prisons. Avec Jésus, il n’y a pas de situation désespérée. Son amour est offert à tous les hommes. Il est capable de les sortir de la délinquance, de la drogue et de tout ce qui les détruit. Nous avons de nombreux témoignages de gens qui disent que leur rencontre avec lui a changé leur vie.
En ce jour, nous célébrons la 52ème journée mondiale des vocations. Le Seigneur continue d’appeler des prêtres, des diacres, des religieux et religieuses et des laïcs pour participer à son œuvre de rassemblement. Le Cardinal Marty disait qu’il n’appelle pas « que les enfants sages ». Nous sommes tous engagés pour cette mission. Ne disons pas que nous sommes trop âgés, trop jeunes ou trop fatigués… l’appel du Seigneur est vraiment là. Et il nous redit : « Ne crains pas, je suis avec toi. »
Si nous allons communier au Corps et au sang du Christ c’est pour puiser à la source de cet amour qui est en Dieu, c’est pour entrer dans ce projet qui anime Jésus. Alors oui, nous te prions Seigneur : donne-nous force et courage pour rester fidèles à cette mission que tu nous confies.

Sources : Revues Signes, Feu Nouveau, homélies pour l’année B (Amédée Brunot),

Jean Compazieu, prêtre de l’Aveyron

PAPE FRANÇOIS – I – CATÉCHÈSE SUR LE BAPTÊME

18 avril, 2018

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/audiences/2018/documents/papa-francesco_20180411_udienza-generale.html

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Baptême de Jésus

PAPE FRANÇOIS – I CATÉCHÈSE SUR LE BAPTÊME

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre

Mercredi 11 avril 2018

Chers frères et sœurs, bonjour!

Les cinquante jours du temps liturgique pascal sont propices pour réfléchir sur la vie chrétienne qui, de par sa nature, est la vie qui provient du Christ même. Nous sommes, en effet, chrétiens dans la mesure où nous laissons vivre Jésus en nous. D’où partir alors pour raviver cette conscience, sinon du début, du Sacrement qui a allumé en nous la vie chrétienne? C’est le baptême. La Pâque du Christ, avec sa charge de nouveauté, nous touche à travers le baptême pour nous transformer à son image: les baptisés sont de Jésus Christ, c’est Lui le Seigneur de leur existence. Le baptême est le «fondement de toute la vie chrétienne» (Catéchisme de l’Eglise catholique, n. 1213). C’est le premier des sacrements, dans la mesure où il est la porte qui permet au Christ Seigneur de demeurer dans notre personne et à nous de nous plonger dans son Mystère.
Le verbe grec «baptiser» signifie «plonger» (cf. CEC, n. 1214). Le bain avec l’eau est un rite commun à diverses croyances pour exprimer le passage d’une condition à une autre, signe de purification pour un nouveau début. Mais pour nous, chrétiens, il ne doit pas nous échapper que si c’est le corps qui est plongé dans l’eau, c’est l’âme qui est plongée dans le Christ pour recevoir le pardon du péché et resplendir de lumière divine (cfr. Tertullien, La résurrection des morts, VIII, 3: CCL 2, 931; PL 2, 806). En vertu de l’Esprit Saint, le baptême nous plonge dans la mort et la résurrection du Seigneur, en noyant dans la source baptismale l’homme ancien, dominé par le péché qui sépare de Dieu, et en faisant naître l’homme nouveau, recréé en Jésus. En Lui, tous les fils d’Adam sont appelés à une vie nouvelle. Cela signifie que le baptême est une renaissance. Je suis sûr, tout à fait sûr, que nous nous souvenons tous de notre date de naissance: sûr. Mais je me demande, j’ai quelques doutes, et je vous demande à vous: est-ce que chacun de vous se rappelle quelle était la date de son baptême? Certains disent oui — c’est bien. Mais c’est un oui un peu faible, parce que peut-être beaucoup ne s’en rappellent-ils pas. Mais si nous fêtons le jour de la naissance, comment ne pas fêter — au moins se rappeler — le jour de la renaissance? Je vous donnerai un devoir à la maison, un devoir à faire aujourd’hui à la maison. Que ceux de vous qui ne se rappellent pas la date de leur baptême la demandent à leur mère, leur oncle et tante, à leurs petits-enfants: «Connais-tu la date de ton baptême?», et ne jamais l’oublier. Et ce jour-là, rendre grâce au Seigneur, parce que c’est précisément le jour où Jésus est entré en moi, l’Esprit Saint est entré en moi. Avez-vous bien compris le devoir à faire à la maison? Nous devons tous connaître la date de notre baptême. C’est un autre anniversaire: l’anniversaire de la renaissance. N’oubliez pas de faire cela, s’il vous plaît.
Rappelons les dernières paroles du Ressuscité aux apôtres; elles représentent un mandat précis: «Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit» (Mt 28, 19). A travers le bain baptismal, celui qui croit dans le Christ est plongé dans la vie même de la Trinité.
En effet, l’eau du baptême n’est pas une eau quelconque, mais l’eau sur laquelle est invoqué l’Esprit qui «donne la vie» (Credo). Pensons à ce que Jésus dit à Nicodème pour lui expliquer la naissance à la vie divine: «A moins de naître d’eau et d’Esprit, nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu. Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l’Esprit est esprit» (Jn 3, 5-6). C’est pourquoi le baptême est appelé également «régénération»: nous croyons que Dieu, «par sa seule miséricorde… nous a sauvés par le bain de la régénération et de la rénovation en l’Esprit Saint» (Tt 3, 5).
Le baptême est donc un signe concret de renaissance, pour marcher dans une nouveauté de vie. C’est ce que rappelle saint Paul aux chrétiens de Rome: «Ignorez-vous que, baptisés dans le Christ Jésus, c’est dans sa mort que tous nous avons été baptisés? Nous avons donc été ensevelis avec lui par le baptême dans la mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions nous aussi dans une vie nouvelle» (Rm 6, 3-4).
En nous plongeant dans le Christ, le baptême fait également de nous des membres de son Corps, qui est l’Eglise, et nous fait participer à sa mission dans le monde (cf. CEC, n. 1213). Nous baptisés ne sommes pas isolés: nous sommes membres du Corps du Christ. La vitalité qui jaillit de la source baptismale est illustrée par ces paroles de Jésus: «Je suis la vigne; vous, les sarments. Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit» (cf. Jn 15, 5). Une même vie, celle de l’Esprit Saint, coule du Christ aux baptisés, en les unissant en un seul Corps (cf. 1 Co 12, 13), chrismé par la sainte onction et nourri à la table eucharistique.
Le baptême permet au Christ de vivre en nous et à nous de vivre unis à Lui, pour collaborer dans l’Eglise, chacun selon sa condition, à la transformation du monde. Reçu une seule fois, le bain baptismal illumine toute notre vie, en guidant nos pas vers la Jérusalem du Ciel. Il y a un avant et un après le baptême. Le Sacrement suppose un chemin de foi, que nous appelons catéchuménat, évident lorsque c’est un adulte qui demande le baptême. Mais les enfants aussi, depuis l’antiquité, sont baptisés dans la foi de leurs parents (cf. Rite du baptême des enfants, introduction, n. 2). Et sur ce point, je voudrais vous dire quelque chose: certains pensent: mais pourquoi baptiser un enfant qui ne comprend pas? Attendons qu’il grandisse, qu’il comprenne et que ce soit lui-même qui demande le baptême. Mais cela signifie ne pas avoir confiance dans l’Esprit Saint, parce que quand nous baptisons un enfant, l’Esprit Saint entre dans cet enfant, et l’Esprit Saint fait croître chez cet enfant, depuis l’enfance, des vertus chrétiennes qui ensuite s’épanouiront. Il faut toujours donner cette opportunité à tous, à tous les enfants, d’avoir en eux l’Esprit Saint qui les guide pendant leur vie. N’oubliez pas de baptiser les enfants! Personne ne doit mériter le baptême, qui est toujours un don gratuit pour tous, adultes et nouveau-nés. Mais comme cela a lieu pour une semence pleine de vie, ce don s’enracine et porte du fruit dans un terrain alimenté par la foi. Les promesses baptismales que nous renouvelons chaque année lors de la Veillée pascale doivent être ravivées chaque jour afin que le baptême «christifie»: nous ne devons pas avoir peur de ce mot; le baptême nous «christifie», celui qui a reçu le baptême est «christifié», ressemble au Christ, se transforme dans le Christ et il en fait véritablement un autre Christ.

LA MUSIQUE DES PREMIERS CHRÉTIENS

17 avril, 2018

http://apemutam.free.fr/musichretiens.htm

fr  cantico del mar rosso (1)

La chanson de la mer Rouge

LA MUSIQUE DES PREMIERS CHRÉTIENS

L’église primitive
L’évolution historique de la musique chrétienne est indissociable de l’histoire des peuples et de la politique de l’Eglise. La notation musicale, telle que nous sommes capables de la décrypter aujourd’hui, remonte au VIIIe siècle et n’est exactement compréhensible qu’à partir du deuxième millénaire. Pourtant, nous connaissons les chants créés à partir du IVe siècle ; ce sont elles qui figurent sur les manuscrits médiévaux, d’abord transmises oralement, puis notées et inlassablement recopiées, parfaitement identiques. Partie intégrante de la liturgie, la musique sacrée devint immuable dès qu’elle fut fixée autoritairement.
À travers l’histoire des premiers Chrétiens, nous percevons, même si le domaine de l’hypothèse reste incontournable, la mutation du chant hébraïque en cantilènes chrétiennes, la succession chronologique des enrichissements d’origine hellénistique, païenne et hétérodoxe
Les Actes des Apôtres constituent la source principale concernant la vie de la première communauté chrétienne. Jour après jour, les Chrétiens de Jérusalem fréquentent assidûment le Temple (Actes II-46). Les apôtres, Pierre et Jean, y montent pour la prière de la 9e heure (Actes III, 1). Toutefois, ils forment un groupe particulier au sein d’Israël (V, 13) et se réunissent pour rompre le pain et prier dans leurs maisons (II, 46). La chambre haute, vaste et non réservée pour l’habitation, convenait bien pour les réunions nombreuses. De forme et de tradition hébraïque, les premiers chants adressés au Christ naquirent probablement ici. Néanmoins, ils ne constituent qu’une lointaine racine du « chant grégorien » dont la particularité est d’être adapté au latin.
Les païens convertis par Paul à Corinthe (Actes XVIII, 6), ville fortement latinisée, apportèrent inévitablement leurs traditions musicales aux « hymnes chantées à Dieu de tout cœur », recommandées par l’apôtre aux Colossiens (Col III, 16) et aux Ephésiens (Eph V, 19). Il avait fait de même avec Silas, lors de son emprisonnement à Philippes (Actes XVI, 25), colonie romaine essentiellement latine, à qui il adressa « le chant de l’église apostolique » (Ph II, 6 11). La majorité de sa correspondance (épîtres) partit d’Ephèse, promise à une forte influence sur la forme musicale ; les destinataires, Hellénistes, Hébreux parlant aussi l’araméen, Latins de Rome et de Grèce, constituèrent la genèse du chant romain.
En dépit de notation musicale, quelques textes permettent d’établir le contexte d’utilisation de la musique religieuse et la chronologie des influences. Très tôt, les écrits témoignent du chant alterné entre deux groupes ou entre l’officiant et les fidèles. Dans un rapport à Trajan (Epistola X, 97) sur les chrétiens de Bithynie (nord de la Turquie), dont il était gouverneur, Pline le Jeune (62-114) mentionne « des Chrétiens qui se réunissent à jour fixe, pour chanter, avant l’aube, des hymnes alternées au Christ, comme à Dieu. » Quant aux écrivains africains, ils se caractérisent par leur conservatisme ; l’introduction d’instruments pendant le culte des églises d’Orient est condamnée par Clément d’Alexandrie à la fin du IIe siècle (Paedagogia II, 4) : « Parce qu’ils peuvent être utilisés au délassement, après les repas par exemple, ils ne conviennent pas à l’église ».
Les inventions des hétérodoxes
Liés à aucun canon, progressistes par la pensée, libres dans leur expression artistique, les hétérodoxes (parfois déclarés hérétiques) initièrent des pratiques liturgiques originales ; les plus efficaces pour motiver les foules de croyants furent adoptées par les évêques des grandes églises.
La puissance de la pensée gnostique entraîna l’Eglise à se définir par rapport à elle. Sources indirectes, les condamnations des Pères de l’Eglise fournissent quelques indications sur leurs pratiques liturgiques. Critiquant Marcion, Hippolyte (début 3e) nous apprend que l’église de Sinope, dans le Pont (sud de la Mer Noire), effectuait la prière vers l’orient, chantait des psaumes, et des hymnes composées par les chrétiens. Tertullien dénonce « la démence avec laquelle ces textes sont rédigés » (Adversus Marcionem) et attaque violemment Valentin : « Laissons les psaumes de Valentin qu’il introduit avec une impudence sans égale, comme s’ils étaient l’œuvre d’un auteur méritant (De Carne Christi) ; « Nous désirons qu’on chante, non cette sorte de psaume des hérétiques, des apostats, de Valentin le Platonicien, mais ceux du prophète David qui sont très saints et complètement admis, classiques. » Selon Amédée Gastoué, les papyrus d’origine gnostique, conservés à Berlin et Paris, contiennent des hymnes dans lesquelles on reconnaît l’influence, et parfois le mélange d’éléments juifs, païens et chrétiens. L’un d’entre eux (IVe siècle) renferme des indications musicales : tremblement, silence, sifflement, son harmonieux, souffle vocal, son émis avec force, forte descente de la finale. On y remarque des influences apparentées à la fois au judaïsme, au christianisme et au paganisme.
À la fin du deuxième siècle, le principal foyer du christianisme araméen se situait en Osroène dont le roi, Agbar IX (179-214), se serait converti au christianisme. Élevé à sa cour, Bardesane composa un grand nombre de madrasé, sortes d’instructions lyriques avec refrain. En les faisant chanter par des chœurs, son fils Harmonius apparaît comme l’inventeur du chant responsorial. Adepte d’une cosmologie particulière, (Dieu aurait créé un monde mêlé de lumière et de ténèbres. Le corps appartient au second, soumis aux astres d’où viennent les maux physiques, il ne ressuscite pas), Bardesane suscitera à Edesse, au siècle suivant, la réprobation d’Ephrem qui, le considérant hérétique, remplacera ses hymnes par les siennes, mais conservera le chant responsorial apparemment entré dans les habitudes cultuelles.
En 260, Paul de Samosate fut nommé évêque d’Antioche. Typiquement oriental, il employait les usages de la Syrie de l’est, la psalmodie responsoriale, dans laquelle il introduisit l’alternance d’un chœur de vierges et d’un chœur d’hommes, première mention du chant antiphonique. Dans la musique grecque, Antiphonia désignait l’octave, c’est-à-dire deux notes qui semblent identiques.
Le IVe siècle fut dominé par les divisions sur le dogme trinitaire. Notre époque scientifique l’admet sans sourciller ; pour les théologiens de l’Antiquité tardive, sa définition n’allait pas de soi. Arius, prêtre de l’église d’Alexandrie connut une audience considérable en professant que « dans la Trinité, le fils n’était pas de même nature que le père ». Pour soutenir sa propagande doctrinale, il résuma sa théologie dans un cantique en vers populaires que chantaient matelots, meuniers et voyageurs.
En 386, l’impératrice-mère Justine, régente pour son fils Valentinien II, souhaita qu’une des 21 basiliques de Rome fût réservée au culte arien. En cela, elle fit preuve d’une tolérance qui manqua au chef de l’église milanaise, Ambroise, importante personnalité de l’aristocratie romaine, fils d’un préfet du prétoire, la plus haute charge civile de la hiérarchie impériale. Présent à la veille de sa conversion, saint Augustin relata cet événement capital pour l’histoire de la musique (Confessions IX, livre VII) : « Le peuple plein de zèle, résolut de mourir pour son évêque, passait les nuits entières à l’église. Pour empêcher que le peuple ne s’ennuyât d’un si long et pénible travail, on ordonna qu’on chanterait des psaumes et des hymnes selon l’usage de l’Eglise d’Orient ». Œuvres poétiques versifiées en langue vernaculaire, pourvues d’une mélodie syllabique (une note par syllabe) identique pour toutes les strophes, les hymnes étaient utilisées à Poitiers par Hilaire, depuis son retour d’exil oriental (vers 356), ce que méconnaît l’évêque d’Hippone. Le caractère populaire des cantilènes, sans doute, les fidèles préféraient-ils les airs proches de leur tradition aux inventions des spécialistes, et l’utilisation du latin (à Rome, le grec restera la langue du culte jusqu’en 382) connut un immense succès. Le texte n’était plus emprunté à la Bible, chaque créateur pouvait s’exprimer au gré de son inspiration, ou des nécessités du moment. Chant de propagande, facile à entonner et à mémoriser, les hymnes se termineront désormais par la doxologie des oraisons, prescrite par les canons d’Hippolyte dès 200 : « Gloria tibi patri, et filio, et spiritui sancto, in saecula saeculorum, amen », hommage à la Sainte Trinité, origine de « au nom du Père, du Fils et du saint Esprit ». Par les hymnes, la musique exprima sa capacité à véhiculer un message. Ce service rendu aux théologiens lui fut bien utile lorsque les ermites des déserts égyptiens jetèrent l’anathème sur l’art utilisé pour les jeux païens, indigne à la louange de Dieu. Mais sa capacité à souder une communauté et la réticence des hauts dirigeants de l’Eglise, (les hommes les plus cultivés de leur temps), à se séparer, se priver d’un art dont ils admiraient la beauté, lui permirent de rester indissociable de la louange divine. Saint Augustin (354-430) s’en confesse (X, 33) : « Le plaisir de l’oreille, qui ne devrait pas affaiblir la vigueur de notre esprit, me trompe souvent lorsque le sens de l’ouïe n’accompagne pas la raison ; ainsi, je pèche sans y penser. »
Malgré l’exemple d’Ambroise, l’église occidentale répugnera l’usage de la poésie liturgique, préférant les textes extraits de l’écriture sainte, modifiée pour obtenir quelque régularité dans sa forme.
L’introduction des hymnes alla de pair avec celle du chant en chœur des psaumes, selon deux dispositions : antiphona (chant antiphonique) s’appliqua aux versets repris à plein chœur lorsque les psaumes étaient chantés à chœurs alternés ; responsorum : (chant responsorial) lorsque le chœur répondait au chantre soliste. En Gaule, l’usage du chant antiphonique fut tardif : au Ve siècle à Arles, seulement au VIIe à Avignon.
Charlemagne invente « le chant grégorien »
À partir du quatrième siècle, la musique sacrée occidentale se constitua dans des centres importants qui attacheront leur nom aux répertoires : Ambrosien (saint Ambroise) à Milan, Bénéventin dans la région de Naples, Wisigothique en Espagne, Gallican en Gaule, auxquels il faut ajouter les différentes pratiques romaines, pontificale, presbytérale, monacales. Échanges, emprunts, adoptions de textes et de pratiques entre les diverses traditions enrichirent les répertoires.
Dès 370, le pape Damase éprouva le besoin d’organiser le chant liturgique. Il ne s’agissait pas encore de noter les mélodies, mais d’établir celles, de tradition orale, qui accompagneraient les diverses parties du culte romain. Dans ses parties essentielles, il fixa le canon de la messe tel que nous le connaissions avant Vatican II. Deux groupes de chants étaient employés : ceux de « l’Ordinaire » ou « Commun », immuables tout au long de l’année et ceux du « Propre du temps et des saints » ou « Temporal » qui variaient suivant le calendrier de l’année liturgique et des fêtes. L’apport constant de nouveaux saints entraîna tout au long des siècles la composition de pièces spécifiques.
Avec la règle bénédictine (vers 540), la journée monastique fut rythmée par des offices placés à heures régulières, dans lesquels le chant revêtit une importance considérable. Un répertoire particulier, consigné dans les antiphonaires monastiques, se développa par rapport à la liturgie romaine. Pour la première fois, les hymnes apparurent dans le cadre liturgique.
La Réforme Carolingienne
Des liens très étroits tissés entre Dagobert Ier (623-639) et les églises épiscopales et monastiques furent un puissant agent de stabilité politique. Le roi mérovingien consentit au Clergé des donations considérables. Ses successeurs connurent une grave crise financière qui leur ôta tout moyen de gouverner efficacement. Maire du palais d’Austrasie, Charles Martel rétablit les guerres annuelles et offrit à ses soldats les hautes charges civiles et religieuses. À sa mort, en 741, les troubles qui ébranlèrent le royaume sonnèrent l’alarme pour son fils, Pépin le Bref. Habilement, il entreprit de se réconcilier avec la seule force sans laquelle rien n’était possible : l’Eglise. L’évêque saint Boniface lui exposa sa situation « plus de Synode depuis un siècle, un grand nombre d’évêchés aux mains des laïques, des liturgies diverses. » Corrigeant les excès de son père, il lança un vaste programme de réformes ecclésiastiques et se posa en protecteur du pape contre les Lombards.
Le 6 janvier 754, Chrodegang, évêque de Metz, mit en sécurité le pape en France. Les spécialistes du chant romain l’influencèrent considérablement. Dans sa cathédrale, il instaura le chant à la romaine et introduisit une schola cantorum, communauté de moines instituée pour chanter à la perfection, comme dans les basiliques de Rome. Des écoles de chantres, véritables réseaux de formation, s’attachèrent à ces ensembles.
Persuadé du rôle majeur de la religion chrétienne pour l’acquisition d’une stabilité politique à l’intérieur du royaume, Pépin décida d’unifier la liturgie selon le modèle romain. Roi des Francs, souverain germanique, il visait principalement l’ère géographique du chant gallican. Sous le gouvernement des maires du palais, l’absence d’organisation de la vie ecclésiastique avait favorisé les diversités créatrices, à tel point que cette époque est qualifiée d’âge d’or du chant grégorien. Les liturgistes de la Gaule multipliaient les encensements, lisaient solennellement les Evangiles, ajoutaient des prières pour exprimer des intentions absentes du Canon romain. Sans archétype comparable au chant romain, caractérisé par des textes plus longs, le chant gallican s’était développé singulièrement. Seuls quelques éléments intégrés dans la liturgie romano-franque nous sont connus, difficiles à déterminer, même si Walafrid Strabon, épistolier du monastère de Reichenau, affirmait en 841 « que les éléments maintenus en usage pouvaient être identifiés par l’oreille à certaines tournures de la mélodie et du texte ».
En 760, Pépin demanda au pape Paul Ier, des livres liturgiques destinés à l’unification du rite. En les complétant par des mélodies autochtones, particulièrement la riche hymnodie et les fêtes gallicanes, les liturgistes francs confectionnèrent le sacramentaire gélasien-franc. Très complet, parfaitement adapté aux exigences des paroisses du royaume, il connut une diffusion limitée, Pépin n’ayant pas trouvé le moyen de l’imposer largement.
Au lieu de se servir de la compilation de son père, Charlemagne demanda à Adrien 1er, le sacramentaire grégorien, dans le but de donner encore plus de légitimité au livre. Le pape fut très embarrassé par la demande, car aucun ouvrage ne faisait autorité à Rome. La messe, en face de l’assemblée qui prenait part à l’Offertoire et aux processions, était dite selon des formules de prières et de préfaces très particulières. Elles comprenaient un choix de versets des psaumes et des passages de l’écriture en rapport avec la fête du jour et s’étaient enrichies d’adjonctions orientales sous le pape grec Sergius 1er (687-701), dont l’Agnus Dei. En outre, il fallait distinguer : la liturgie papale qui utilisait le sacramentaire grégorien et le rite presbytéral qui se référait au gélasien (Gélase 492-496). Adrien voulut tout de même satisfaire l’Empereur et adressa un sacramentaire réservé à la liturgie stationnale papale, celle où les fidèles étaient invités à se rassembler dans une église différente, d’un dimanche à l’autre.
Charlemagne s’était entouré d’un groupe d’érudits chargés de le conseiller sur les problèmes théologiques : Paul Diacre (†799), auteur de l’hymne « ut queant laxis » en l’honneur de saint Jean Baptiste, dont les premières syllabes serviront à nommer les notes de la gamme, Théodulf d’Orléans compositeur de l’hymne « gloria laus et honor » incorporé, jusqu’en 1964, à la liturgie du dimanche des rameaux, Benoît d’Aniane, réformateur de la Règle bénédictine. Ils comprirent rapidement que le sacramentaire d’Adrien ne contenait que les grandes fêtes célébrées par le pape en personne dans les églises de Rome, le complétèrent par le gélasien-franc dont l’usage s’était perpétué, et fixèrent le rite carolingien.
Jusqu’à la fin du XIe siècle, les textes nécessaires à la célébration de la messe se partagèrent en trois livres : le sacramentaire qui contenait le Canon (ensemble des prières et cérémonies de la messe, depuis la Préface jusqu’au Notre Père) et une partie de l’ordinaire ; le lectionnaire, qui comportait les leçons, les Epîtres et les Evangiles ; l’antiphonaire, qui comportait les paroles de l’Introït et les autres parties chantées de la cérémonie. Peu à peu, ces trois livres fusionnèrent, le missel les combina tous les trois. Le Ve et le VIe siècle fut une époque de compilation de sacramentaires et de lectionnaires romains. Les antiennes et les répons du temporal datent du VIIe. Vers 600, les seules fêtes spéciales étaient Noël, l’Epiphanie, Pâques et Pentecôte. Sous le pape grec Serge Ier (687-701) plusieurs fêtes byzantines de la Sainte vierge furent adoptées : la Nativité (8 septembre), 1er janvier (ex fête de Marie), la purification (2 février), l’Annonciation (25 mars) l’Assomption (15 août). Au VIIIe siècle, le calendrier romain se développa considérablement. Les corps des martyres, célébrés dans les églises de cimetières où étaient déposées les reliques, furent transférés dans la cité.
L’invention de l’écriture musicale
Afin de permettre aux cadres de l’Eglise de suivre ses « ordines » : il « inventa l’école ». La responsabilité d’organiser un enseignement pour les clercs, sur lesquels devait reposer l’administration de l’empire, échut à Alcuin. Les capitulaires établirent un système d’instruction au niveau de la paroisse, du monastère et de la cathédrale ; l’organisation de scriptoria dans tous les monastères de l’empire multiplia les copies d’auteurs classiques et patristiques. Pour l’antiphonaire, il fallut inventer la notation musicale. Depuis toujours, ignorant la notation usée des Grecs, la cantilène chrétienne se transmettait oralement. Dans les monastères, les enfants apprenaient par cœur, pendant plusieurs années, l’ensemble des chants. Le premier système de notation consista en un procédé mnémotechnique placé sur les paroles : le neume. Leur forme correspondait à la chironomie employée par le chef de chœur et variait sensiblement selon les écoles d’écriture. Ce qui nous paraît aujourd’hui primordial, la mélodie, les notes et les intervalles restaient indéterminables ; les signes étaient placés « in campo aperto » (à champ ouvert) c’est-à-dire sans ligne de portée. Les notateurs, sans doute les premiers chantres, se souciaient plutôt de l’interprétation, du discours verbo-mélodique et de l’accentuation.
L’adoption en bloc, sur décision autoritaire, d’un répertoire de chant particulièrement étendu ne se réalisa pas sans difficulté. Il fallut, pour réussir sa diffusion, l’attribuer à une figure emblématique. Les Carolingiens choisirent le Pape Grégoire le Grand, placé par eux-mêmes vers 800, parmi les quatre grands Docteurs de l’Eglise latine, à l’égal des saints : Ambroise, Jérôme et Augustin.
Dogmatique, juridictionnel et disciplinaire, il avait conduit la chrétienté avec l’esprit autoritaire d’un magistrat romain. Mais sa correspondance (850 lettres conservées) ne contient aucune trace de musique. La vie de saint Grégoire, relatée par Jean Diacre vers 873, le fit centonisateur (celui qui réunit des fragments épars pour en faire des pièces définitives), créateur de la schola cantorum dont la réputation pour la centonisation était grande, et sans doute la seule à pouvoir l’effectuer. Tout au long du récit, la tâche de justification reste présente, Charlemagne y tient d’ailleurs une place prépondérante : « Quel est celui, interrogea-t-il, qui a l’eau la plus claire, le ruisseau ou la source ? » « La source » répondit-on. « Eh bien nous aussi qui jusqu’à présent nous sommes abreuvés au ruisseau devons remonter à la source éternelle » Ce qui signifiait : adopter la liturgie carolingienne présentée comme romaine, œuvre de saint Grégoire le Grand. La supercherie fonctionna parfaitement, aujourd’hui encore, la dénomination « chant grégorien » reste inévitable, en dehors des réunions de spécialistes.

Lionel DIEU

AUJOURD’HUI EST L’ANNIVERSAIRE DU PAPE BENOIT – 91 ANS – UNE PENSÉE AFFECTUEUSE ET DÉFÉRENTE – BENOÎT XVI – Les cathédrales romanes et gothiques, l’arrière-plan théologique

16 avril, 2018

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AUJOURD'HUI EST L'ANNIVERSAIRE DU PAPE BENOIT - 91 ANS - UNE PENSÉE AFFECTUEUSE ET DÉFÉRENTE - BENOÎT XVI - Les cathédrales romanes et gothiques, l'arrière-plan théologique dans ANNIVERSAIRE DU PAPE BENOIT 121124_pope_praying_ap_605

AUJOURD’HUI EST L’ANNIVERSAIRE DU PAPE BENOIT – 91 ANS – UNE PENSÉE AFFECTUEUSE ET DÉFÉRENTE – BENOÎT XVI – Les cathédrales romanes et gothiques, l’arrière-plan théologique

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 18 novembre 2009

Les cathédrales romanes et gothiques, l’arrière-plan théologique

Chers frères et sœurs!

Dans les catéchèses des dernières semaines, j’ai présenté plusieurs aspects de la théologie médiévale. Mais la foi chrétienne, profondément enracinée chez les hommes et les femmes de ces siècles, ne donna pas seulement origine à des chefs-d’œuvre de littérature théologique de la pensée et de la foi. Celle-ci inspira également l’une des créations artistiques les plus élevées de la civilisation universelle: les cathédrales, véritable gloire du Moyen-âge chrétien. En effet, pendant environ trois siècles, à partir du début du XI siècle, on assista en Europe à une ferveur artistique extraordinaire. Un ancien chroniqueur décrit ainsi l’enthousiasme et le zèle de cette époque: « Il se produisit que, partout dans le monde, mais spécialement en Italie et dans les Gaules, on commença à reconstruire les églises, bien qu’un grand nombre, qui étaient encore en bonnes conditions, n’avaient pas besoin d’une telle restauration. C’était comme une compétition entre un peuple et l’autre; on aurait cru que le monde, se débarrassant des vieux haillons, voulait revêtir partout le vêtement blanc de nouvelles églises. En somme, presque toutes les églises cathédrales, un grand nombre d’églises monastiques, et même les oratoires de villages, furent alors restaurés par les fidèles » (Rodolphe le Glabre, Historiarum 3, 4).
Divers facteurs contribuèrent à cette renaissance de l’architecture religieuse. Tout d’abord, les conditions historiques plus favorables, telles qu’une plus grande sécurité politique, accompagnée par une croissance constante de la population et par le développement progressif des villes, des échanges et de la richesse. En outre, les architectes trouvaient des solutions techniques toujours plus élaborées pour augmenter les dimensions des édifices, en assurant dans le même temps leur solidité et un aspect majestueux. Ce fut cependant principalement grâce à l’ardeur et au zèle spirituel du monachisme en pleine expansion que furent élevées des églises abbatiales, où la liturgie pouvait être célébrée avec dignité et solennité, et où les fidèles pouvaient s’arrêter en prière, attirés par la vénération des reliques des saints, buts de pèlerinages incessants. C’est ainsi que naquirent les églises et les cathédrales romanes, caractérisées par le développement longitudinal, en longueur, des nefs pour accueillir de nombreux fidèles; des églises très solides, avec des murs épais, des voûtes en pierre et des lignes simples et essentielles. Une nouveauté est constituée par l’introduction des sculptures. Les églises romanes étant le lieu de la prière monastique et du culte des fidèles, les sculpteurs, plus que se préoccuper de la perfection technique, soignèrent en particulier la finalité éducative. Etant donné qu’il fallait susciter dans les âmes des impressions fortes, des sentiments qui puissent inciter à fuir le vice, le mal et à pratiquer la vertu, le bien, le thème récurrent était la représentation du Christ comme juge universel, entouré des personnages de l’Apocalypse. Ce sont en général les portails des églises romanes qui offrent cette représentation, pour souligner que le Christ est la Porte qui conduit au Ciel. Les fidèles, en franchissant le seuil de l’édifice sacré, entrent dans un temps et dans un espace différents de ceux de la vie ordinaire. Outre le portail de l’église, les croyants en Christ, souverain, juste et miséricordieux, pouvaient dans l’intention des artistes goûter une anticipation de la béatitude éternelle dans la célébration de la liturgie et dans les actes de piété effectués à l’intérieur de l’édifice sacré.
Au XII et au XIII siècle, à partir du nord de la France, se diffusa un autre type d’architecture dans la construction des édifices sacrés, l’architecture gothique, avec deux caractéristiques nouvelles par rapport au roman, c’est-à-dire l’élan vertical et la luminosité. Les cathédrales gothiques montraient une synthèse de foi et d’art harmonieusement exprimée à travers le langage universel et fascinant de la beauté, qui aujourd’hui encore suscite l’émerveillement. Grâce à l’introduction des voûtes sur croisée d’ogives, qui reposaient sur de robustes pilastres, il fut possible d’élever considérablement la hauteur. L’élan vers le haut voulait inciter à la prière et était dans le même temps une prière. La cathédrale gothique entendait traduire ainsi, dans ses lignes architecturales, l’aspiration des âmes vers Dieu. En outre, avec les nouvelles solutions techniques adoptées, les murs du périmètre pouvaient être percés et embellis par des vitraux polychromes. En d’autres termes, les fenêtres devenaient de grandes images lumineuses, parfaitement adaptées pour instruire le peuple dans la foi. Dans celles-ci – scène par scène – étaient racontés la vie d’un saint, une parabole, ou d’autres événements bibliques. Des vitraux peints, une cascade de lumière se déversait sur les fidèles pour leur raconter l’histoire du salut et les entraîner dans cette histoire.
Une autre caractéristique des cathédrales gothiques est constituée par le fait qu’à leur construction et à leur décoration, de manière différente mais en chœur, participait toute la communauté chrétienne et civile; les humbles et les puissants, les analphabètes et les savants participaient, car dans cette maison commune, tous les croyants étaient instruits dans la foi. La sculpture gothique a fait des cathédrales une « Bible de pierre », en représentant les épisodes de l’Evangile et en illustrant les contenus de l’année liturgique, de la Nativité à la Glorification du Seigneur. En outre, au cours de ces siècles se diffusait toujours davantage la perception de l’humanité du Seigneur, et les souffrances de sa Passion étaient représentées de manière réaliste: le Christ souffrant (Christus patiens) devint une image aimée de tous, et en mesure d’inspirer la piété et le repentir pour les péchés. Les personnages de l’Ancien Testament ne manquaient pas, dont l’histoire devint ainsi familière aux fidèles qui fréquentaient les cathédrales comme partie de l’unique et commune histoire du salut. Avec ses visages empreints de beauté, de douceur, d’intelligence, la sculpture gothique du xiii siècle révèle une piété heureuse et sereine, qui se plaît à diffuser une dévotion sincère et filiale envers la Mère de Dieu, parfois vue comme une jeune femme, souriante et maternelle, et principalement représentée comme la souveraine du ciel et de la terre, puissante et miséricordieuse. Les fidèles qui remplissaient les cathédrales gothiques aimaient y trouver également des expressions artistiques rappelant les saints, modèles de vie chrétienne et intercesseurs auprès de Dieu. Et les manifestations « laïques » de l’existence ne manquèrent pas; voilà alors apparaître, ici et là, des représentations des travaux des champs, des sciences et des arts. Tout était orienté et offert à Dieu dans le lieu où l’on célébrait la liturgie. Nous pouvons mieux comprendre le sens qui était attribué à une cathédrale gothique, en considérant le texte de l’inscription gravée sur le portail central de Saint-Denis, à Paris: « Passant, toi qui veux louer la beauté de ces portes, ne te laisse éblouir ni par l’or, ni par la magnificence, mais plutôt par le dur labeur. Ici brille une œuvre célèbre, mais veuille le ciel que cette œuvre célèbre qui brille fasse resplendir les esprits, afin qu’avec les vérités lumineuses ils s’acheminent vers la véritable lumière, dont le Christ est la véritable porte ».
Chers frères et sœurs, j’ai plaisir à souligner à présent deux éléments de l’art roman et gothique également utiles pour nous. Le premier: on ne peut pas comprendre les chefs-d’œuvre artistiques nés en Europe dans les siècles passés si l’on ne tient pas compte de l’âme religieuse qui les a inspirés. Un artiste, qui a toujours témoigné de la rencontre entre esthétique et foi, Marc Chagall, a écrit que « pendant des siècles les peintres ont trempé leur pinceau dans cet alphabet coloré qu’était la Bible ». Quand la foi, de manière particulière célébrée dans la liturgie, rencontre l’art, il se crée une harmonie profonde, car tous les deux peuvent et veulent parler de Dieu, en rendant visible l’Invisible. Je voudrais partager cela lors de la rencontre avec les artistes du 21 novembre, en leur renouvelant cette proposition d’amitié entre la spiritualité chrétienne et l’art, souhaitée par mes vénérés prédécesseurs, en particulier par les serviteurs de Dieu Paul vi et Jean-Paul ii. Le deuxième élément: la force du style roman et la splendeur des cathédrales gothiques nous rappellent que la via pulchritudinis, la voie de la beauté, est un parcours privilégié et fascinant pour s’approcher du Mystère de Dieu. Qu’est la beauté, que les écrivains, les poètes, les musiciens, les artistes contemplent et traduisent dans leur langage, sinon le reflet de la splendeur du Verbe éternel fait chair? Saint Augustin affirme: « Interroge la beauté de la terre, interroge la beauté de la mer, interroge la beauté de l’air diffus et léger. Interroge la beauté du ciel, interroge l’ordre des étoiles, interroge le soleil, qui avec sa splendeur éclaire le jour; interroge la lune, qui avec sa clarté modère les ténèbres de la nuit. Interroge les bêtes sauvages qui nagent dans l’eau, qui marchent sur la terre, qui volent dans l’air: des âmes qui se cachent, des corps qui se montrent; visible celui qui se fait guider, invisible celui qui guide. Interroge-les! Tous répondront: Regarde-nous: nous sommes beaux! Leur beauté les fait connaître. Cette beauté changeante… qui l’a créée, sinon la Beauté immuable? » (Sermo ccxli, 2: PL 38, 1134).

Chers frères et sœurs, que le Seigneur nous aide à redécouvrir la voie de la beauté comme l’un des itinéraires, peut-être le plus attirant et fascinant, pour parvenir à rencontrer et à aimer Dieu.

HOMÉLIE DU 3E DIMANCHE DE PÂQUES, B

13 avril, 2018

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 3E DIMANCHE DE PÂQUES, B dans HOMÉLIE SERMON ET..♥♥♥ on-the-road-to-emmaus

Emmaus

HOMÉLIE DU 3E DIMANCHE DE PÂQUES, B

Ac 3, 13-15, 17-19 ; 1 Jn 2, 1-5 ; Lc 24, 35-48

La culture biblique crie famine. C’est ce que révèle un sondage fait auprès de 1250 jeunes italiens de 13 à 19 ans. Quels sont les noms des quatre évangélistes ? 64 % de mauvaises réponses. Que signifie « évangile » ? 31 % des étudiants l’ignoraient. Tout comme 52 % ignoraient qui étaient Abraham et Noé. Vous avez sans doute entendu parler de la Genèse (« Genesi » en italien) ? Tous ont répondu « oui », mais pour 36 % il s’agissait du groupe rock anglais « Genesis ».
Pourquoi vous raconter ces petits faits ? Parce que deux mots m’ont particulièrement frappé dans la méditation des textes liturgiques de ce dimanche : « ignorance » et « connaissance ». Un véritable péché d’ignorance qui va jusqu’au crime (1e lecture) et une connaissance dans laquelle il n’y a pas une once de vérité (2e lecture).
D’où cette prière d’accueil à la proclamation de l’évangile : Seigneur Jésus, fais-nous comprendre les Ecritures ! Que notre cœur devienne brûlant tandis que tu nous parles. Et la réponse donnée par Jésus en saint Luc : « Alors, il ouvrit l’esprit de ses disciples à l’intelligence des Ecritures », eux qui, cependant, croyaient bien les connaître. Ce qui n’est pas notre cas puisque, en général, nous les connaissons peu et très mal.
Ce que Luc veut nous faire comprendre entre autres choses, c’est que les Ecritures (c’est-à-dire, à l’époque, l’Ancien Testament) ne peuvent bien se comprendre qu’à partir de la résurrection de Jésus. D’une certaine manière, la Bible se lit à l’envers, en commençant par la dernière partie, c’est-à-dire le Nouveau Testament. Pour nous, Jésus est l’interprète parfait de toutes les Ecritures, non seulement par son enseignement et ses commentaires, mais parce qu’il les a réalisées par sa vie, le don de sa vie et sa résurrection. En Jésus, la Loi, les Prophètes, les Psaumes, le vrai culte, ont été parfaitement accomplis.
Les apôtres savaient ce qui avait été écrit sur le Messie dans la Loi, les Prophètes et les Psaumes, mais ils n’avaient pas réussi à mettre un lien entre le Messie décrit et annoncé, et Jésus de Nazareth. Ils n’avaient pas compris. C’est lorsqu’ils auront fait l’expérience du Christ ressuscité que ces « lents à croire » vont non seulement comprendre et connaître, mais vivre autrement.
Ils ne se contenteront pas d’une connaissance de tête, d’intelligence et de mémoire, mais, par leur vie, ils deviendront des témoins du Messie mort et ressuscité.. D’où, l’importance de la lettre de Jean, qui nous explique que la vraie connaissance n’est pas d’ordre cérébral, elle est incarnation dans la vie quotidienne, une réalité visible, palpable.
Qui prétend connaître le Christ uniquement en brandissant un examen sans faute est un menteur. Seuls peuvent dire « Je le connais » ceux et celles qui gardent fidèlement sa Parole. Alors, ils rendent visible et rayonnante la vérité, c’est-à-dire l’amour de Dieu. La connaissance est expérience. Elle met en œuvre l’intelligence, le cœur, la volonté, et même le corps. Expérience de Dieu par la Parole écoutée et appliquée, les signes perçus dans le culte, dans les sacrements, dans le jardin de la nature, le témoignage et les événements, signes des temps.
Connaître quelqu’un, c’est créer des liens et des liens qui engagent. C’est s’aventurer sur le chemin de la communion, de l’harmonie des cœurs et des esprits, mais aussi de l’action commune.
Connaître le Seigneur, c’est l’aimer, reconnaître ses plans, ses projets, ses volontés, s’y soumettre et les vouloir. C’est se mettre en état permanent d’accueil et de conversion.
C’est pourquoi la Parole de Dieu ne doit pas seulement être écoutée, mais méditée et priée, pour qu’elle puisse être traduite en comportements de vie ou imitation du modèle. « En n’oubliant jamais, écrivait en substance un spirituel du Xe siècle, que le Christ, qui est la paix céleste, a été traité comme un révolté et un brigand. Il a exposé l’évangile, et on en a fait un blasphémateur de la Loi. Il a accompli les Prophètes et fut jugé comme un transgresseur des Ecritures ».
Vous avez écouté l’évangile. Cela se passait il y a plus de deux mille ans. Cela se passe aujourd’hui ici, chez nous. Le Christ est présent dans nos assemblées d’hommes et de femmes de peu de foi. C’est pour nos esprits lents à croire qu’il proclame d’abord la Parole et nous ouvre l’esprit à l’intelligence des Ecritures. C’est lui encore qui, tout à l’heure, nous dira ‘La Paix soit avec vous », avant de partager le Pain qui fait l’unité de son Corps-Eglise. Puis, il nous dispersera dans le monde en mission de service et de témoignage. Aujourd’hui encore, comme à Jérusalem à ses disciples, il nous dit : « C’est vous qui êtes mes témoins ».

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)
1925 – 2008

LE CHRIST AUX MILLE VISAGES

11 avril, 2018

https://jesus.catholique.fr/questions/ou-est-jesus-aujourdhui/le-christ-aux-mille-visages/

per it Il Gesù di Antonello Da Messinal

Le visage du Christ, Antonello da Messina

LE CHRIST AUX MILLE VISAGES

Christ aux 1000 visage

Trouver une œuvre d’art ou une image illustrant cette question n’est pas forcément chose simple.
En effet, il s’agit de rendre visible une absence. Une absence sur laquelle est fondée la foi chrétienne ! Si les apôtres ont cru, plus particulièrement Pierre et Jean, c’est parce qu’au matin de Pâques, ils trouvent selon ce que leur avait annoncé Marie-Madeleine, le tombeau vide (Jean 20, 1-8).
Aujourd’hui, Jésus Christ se donne à reconnaître dans le Corps des Écritures, Lui qui est Parole de Dieu, dans son Corps sous la forme du pain consacré à la messe et dans son Corps qu’est l’Eglise dont Il est la tête (1Corinthiens, 12, 27).
Les plus anciens d’entre nous ont peut-être encore en mémoire le chant « Je cherche le visage du Seigneur » popularisé par John Littleton : Je cherche le visage, le visage du Seigneur, Je cherche son image tout au fond de vos cœurs.
Le visage est un élément essentiel du corps humain. Ce terme d’ailleurs ne s’applique qu’à l’homme Le visage est celui par lequel nous exprimons qui nous sommes et qui traduit nos sentiments. Dévisager quelqu’un peut conduire à ne pas le reconnaître, à ne pas lui reconnaître une égale dignité. Cracher au visage de quelqu’un, comme l’ont fait les soldats au visage du Christ, c’est nier son existence humaine.
Chacun des baptisés est appelé à être visage du Seigneur, à faire rayonner sur son propre visage, le visage de Dieu (Nombres 6, 25), afin que tous ceux qu’ils rencontrent découvrent qu’ils sont « envisagés » par le Seigneur.
N’est-ce pas ce que nous donne à voir ce « Christ aux mille visages » ?
Constitué de photos d’hommes, de femmes, d’enfants, de personnalités connues ou de simples anonymes, de toutes nationalités, ce visage du Christ nous redit à sa manière ce que saint Paul écrivait aux Galates : « il n’y a plus ni Juif, ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous vous n’êtes qu’un en Jésus-Christ » (Galates 3, 28)
Oui c’est bien l’unité que les chrétiens ont à vivre -unité avec le Seigneur, unité entre eux et unité avec leurs frères en humanité – qui donne à reconnaître Jésus et à croire qu’Il est l’envoyé de son Père pour le Salut du monde. Cette unité que Lui-même vit avec son Père dans la puissance d’amour de l’Esprit (Jean 17, 21).

Bertane Poitou, déléguée diocésaine à la communication, diocèse de Saint-Claude

BENOÎT XVI – SAINT EPHREM LE SYRIEN (306-373) (Audience 2007)

9 avril, 2018

https://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2007/documents/hf_ben-xvi_aud_20071128.html

imm fr

SAINT EPHREM LE SYRIEN (306-373)

BENOÎT XVI – SAINT EPHREM LE SYRIEN (306-373) (Audience 2007)

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 28 novembre 2007

Chers frères et sœurs,

Selon l’opinion commune d’aujourd’hui, le christianisme serait une religion européenne, qui aurait ensuite exporté la culture de ce continent dans d’autres pays. Mais la réalité est beaucoup plus complexe, car la racine de la religion chrétienne se trouve dans l’ancien Testament et donc à Jérusalem et dans le monde sémitique. Le christianisme se nourrit toujours à cette racine de l’Ancien Testament. Son expansion au cours des premiers siècles a eu lieu aussi bien vers l’Occident – vers le monde gréco-latin, où il a ensuite inspiré la culture européenne – que vers l’Orient, jusqu’à la Perse, à l’Inde, contribuant ainsi à susciter une culture spécifique, en langues sémitiques, avec une identité propre. Pour montrer cette multiplicité culturelle de l’unique foi chrétienne des débuts, j’ai parlé dans la catéchèse de mercredi dernier d’un représentant de cet autre christianisme, Aphraate le Sage persan, presque inconnu chez nous. Dans cette même optique, je voudrais aujourd’hui parler de saint Ephrem le Syrien, né à Nisibe vers 306 dans une famille chrétienne. Il fut le représentant le plus important du christianisme de langue syriaque et réussit à concilier d’une manière unique la vocation du théologien et celle du poète. Il se forma et grandit à côté de Jacques, Evêque de Nisibe (303-338), et il fonda avec lui l’école de théologie de sa ville. Ordonné diacre, il vécut intensément la vie de la communauté chrétienne locale jusqu’en 363, année où la ville de Nisibe tomba entre les mains des Persans. Ephrem immigra alors à Edesse, où il poursuivit son activité de prédicateur. Il mourut dans cette ville en l’an 373, victime de la contagion de la peste qu’il avait contractée en soignant les malades. On ne sait pas avec certitude s’il était moine, mais il est cependant certain qu’il est resté diacre pendant toute sa vie et qu’il a embrassé l’état de virginité et de pauvreté. C’est ainsi qu’apparaît dans la spécificité de son expression culturelle, l’identité chrétienne commune et fondamentale: la foi, l’espérance – cette espérance qui permet de vivre pauvre et chaste dans ce monde, en plaçant toutes ses attentes dans le Seigneur – et, enfin, la charité, jusqu’au don de soi-même dans le soin des malades de la peste.
Saint Ephrem nous a laissé un grand héritage théologique: sa production considérable peut se regrouper en quatre catégories: les œuvres écrites en prose ordinaire (ses œuvres polémiques, ou bien les commentaires bibliques); les œuvres en prose poétique; les homélies en vers; et enfin les hymnes, qui sont certainement l’œuvre la plus vaste d’Ephrem. Il s’agit d’un auteur riche et intéressant sous de nombreux aspects, mais en particulier sous le profil théologique. Si nous voulons aborder sa doctrine, nous devons insister dès le début sur ceci: le fait qu’il fait de la théologie sous une forme poétique. La poésie lui permet d’approfondir la réflexion théologique à travers des paradoxes et des images. Dans le même temps sa théologie devient liturgie, devient musique: en effet, c’était un grand compositeur, un musicien. Théologie, réflexion sur la foi, poésie, chant, louange de Dieu vont de pair; et c’est précisément dans ce caractère liturgique qu’apparaît avec limpidité la théologie d’Ephrem, la vérité divine. Dans sa recherche de Dieu, dans sa façon de faire de la théologie, il suit le chemin du paradoxe et du symbole. Il privilégie largement les images contrastantes, car elles lui servent à souligner le mystère de Dieu.
Je ne peux pour le moment présenter que peu de chose de lui, également parce que la poésie est difficilement traduisible, mais pour donner au moins une idée de sa théologie poétique, je voudrais citer en partie deux hymnes. Tout d’abord, également en vue du prochain Avent, je vous propose plusieurs images splendides tirées des hymnes Sur la nativité du Christ. Devant la Vierge, Ephrem manifeste son émerveillement avec un ton inspiré:

« Le Seigneur vint en elle pour se faire serviteur.
Le Verbe vint en elle
pour se taire dans son sein.
La foudre vint en elle
pour ne faire aucun bruit.
Le pasteur vint en elle
et voici l’Agneau né, qui pleure sans bruit.
Car le sein de Marie
a renversé les rôles:
Celui qui créa toutes choses
est entré en possession de celles-ci, mais pauvre.
Le Très-Haut vint en Elle (Marie),
mais il y entra humble.
La splendeur vint en elle,
mais revêtue de vêtements humbles.
Celui qui dispense toutes choses
connut la faim.
Celui qui étanche la soif de chacun
connut la soif.
Nu et dépouillé il naquit d’elle,
lui qui revêt (de beauté) toutes choses »
(Hymne « De Nativitate » 11, 6-8)

Pour exprimer le mystère du Christ, Ephrem utilise une grande diversité de thèmes, d’expressions, d’images. Dans l’une de ses hymnes, il relie de manière efficace Adam (au paradis) au Christ (dans l’Eucharistie):

« Ce fut en fermant
avec l’épée du chérubin,
que fut fermé
le chemin de l’arbre de la vie.
Mais pour les peuples,
le Seigneur de cet arbre
s’est donné comme nourriture
lui-même dans l’oblation (eucharistique).
Les arbres de l’Eden
furent donnés comme nourriture
au premier Adam.
Pour nous, le jardinier
du Jardin en personne
s’est fait nourriture
pour nos âmes.
En effet, nous étions tous sortis
du Paradis avec Adam,
qui le laissa derrière lui.
A présent que l’épée a été ôtée
là-bas (sur la croix) par la lance
nous pouvons y retourner »
(Hymne 49, 9-11).

Pour parler de l’Eucharistie, Ephrem se sert de deux images: la braise ou le charbon ardent, et la perle. Le thème de la braise est tiré du prophète Isaïe (cf. 6, 6). C’est l’image du séraphin, qui prend la braise avec les pinces, et effleure simplement les lèvres du prophète pour les purifier; le chrétien, en revanche, touche et consume la Braise, qui est le Christ lui-même:

« Dans ton pain se cache l’Esprit
qui ne peut être consommé;
dans ton vin se trouve le feu
qui ne peut être bu.
L’Esprit dans ton pain, le feu dans ton vin:
voilà une merveille accueillie par nos lèvres.
Le séraphin ne pouvait pas approcher ses doigts de la braise,
qui ne fut approchée que de la bouche d’Isaïe;
les doigts ne l’ont pas prise, les lèvres ne l’ont pas avalée;
mais à nous, le Seigneur a permis de faire les deux choses.
Le feu descendit avec colère pour détruire les pécheurs,
mais le feu de la grâce descend sur le pain et y reste.
Au lieu du feu qui détruisit l’homme,
nous avons mangé le feu dans le pain
et nous avons été vivifiés »
(Hymne « De Fide » 10, 8-10).

Voilà encore un dernier exemple des hymnes de saint Ephrem, où il parle de la perle comme symbole de la richesse et de la beauté de la foi:
« Je posai (la perle), mes frères, sur la paume de ma main,
pour pouvoir l’examiner.
Je me mis à l’observer d’un côté puis de l’autre:
elle n’avait qu’un seul aspect de tous les côtés.
(Ainsi) est la recherche du Fils, impénétrable, car elle n’est que lumière.
Dans sa clarté, je vis la Limpidité,
qui ne devient pas opaque;
et dans sa pureté,
le grand symbole du corps de notre Seigneur,
qui est pur.
Dans son indivisibilité, je vis la vérité,
qui est indivisible »
(Hymne « Sur la Perle » 1, 2-3).

La figure d’Ephrem est encore pleinement actuelle pour la vie des différentes Eglises chrétiennes. Nous le découvrons tout d’abord comme théologien, qui, à partir de l’Ecriture Sainte, réfléchit poétiquement sur le mystère de la rédemption de l’homme opérée par le Christ, le Verbe de Dieu incarné. Sa réflexion est une réflexion théologique exprimée par des images et des symboles tirés de la nature, de la vie quotidienne et de la Bible. Ephrem confère un caractère didactique et catéchistique à la poésie et aux hymnes pour la liturgie; il s’agit d’hymnes théologiques et, dans le même temps, adaptées à la récitation ou au chant liturgique. Ephrem se sert de ces hymnes pour diffuser, à l’occasion des fêtes liturgiques, la doctrine de l’Eglise. Au fil du temps, elles se sont révélées un moyen de catéchèse extrêmement efficace pour la communauté chrétienne.
La réflexion d’Ephrem sur le thème de Dieu créateur est importante: rien n’est isolé dans la création, et le monde est, à côté de l’Ecriture Sainte, une Bible de Dieu. En utilisant de manière erronée sa liberté, l’homme renverse l’ordre de l’univers. Pour Ephrem, le rôle de la femme est important. La façon dont il en parle est toujours inspirée par la sensibilité et le respect: la demeure de Jésus dans le sein de Marie a grandement élevé la dignité de la femme. Pour Ephrem, de même qu’il n’y a pas de Rédemption sans Jésus, il n’y a pas d’incarnation sans Marie. Les dimensions divines et humaines du mystère de notre rédemption se trouvent déjà dans les textes d’Ephrem; de manière poétique et avec des images fondamentalement tirées des Ecritures, il anticipe le cadre théologique et, d’une certaine manière, le langage même des grandes définitions christologiques des Conciles du V siècle.
Ephrem, honoré par la tradition chrétienne sous le titre de « lyre de l’Esprit Saint », resta diacre de son Eglise pendant toute sa vie. Ce fut un choix décisif et emblématique: il fut diacre, c’est-à-dire serviteur, que ce soit dans le ministère liturgique, ou, plus radicalement, dans l’amour pour le Christ, qu’il chanta de manière inégalable, ou encore, dans la charité envers ses frères, qu’il introduisit avec une rare habileté dans la connaissance de la Révélation divine.

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