HOMÉLIES DU 3E DIMANCHE DE CARÊME, B
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expulsion des marchands du Temple
HOMÉLIES DU 3E DIMANCHE DE CARÊME, B
Ex 20, 1-17 ; 1 Co 1, 22-25 ; Jn 2, 13-25
Les grands lieux de culte et de pèlerinage sont toujours « providence » pour les commerçants. Pour les desservants également, clergé, congrégations religieuses ou autres animateurs. Une source intarissable de revenus souvent importants, assurés, réguliers et peu sensibles aux fluctuations économiques.
Images, statues, médailles, reproductions de tous genres, cierges de toutes formes et de toutes couleurs, de cire ou même électrifiés, souvenirs et gadgets religieux hétéroclites se vendent bien… Et sur ce marché à succès, même le mauvais goût ne constitue pas un frein ou un obstacle.
C’est sans doute à ce genre de « trafic » que l’on songe en lisant le célèbre épisode de Jésus chassant les marchands du Temple. Une interprétation au premier degré, spontanée, facile, mais sans doute trop superficielle.
Ce n’est certes pas le commerce qui est ici blâmé, mais bien l’endroit où il s’exerce. Si la foire est utile et même nécessaire, elle ne peut pour autant envahir le sanctuaire.
L’être religieux a besoin de signes extérieurs pour exprimer ses croyances et ses dévotions, pour manifester sa foi. Culte privé ou public, liturgie populaire ou officielle, célébration modeste ou solennelle, pièce de la pauvre veuve ou somptueuse offrande de riche, il y a toujours une exigence matérielle, une implication commerciale. C’est la loi de l’incarnation et les religions populaires y sont particulièrement sensibles.
« Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ». Mais si le fouet du prophète vise les comptoirs et les vendeurs, sa colère menaçante et le scandale provoqué ne visent-ils pas prêtres, pharisiens, docteurs et autres maîtres du Temple et de la Loi ?
Malgré les avertissements répétés des prophètes et les signes fournis par le perturbateur nazaréen, l’ »élite » n’a pas compris que « le règne de Dieu est arrivé ».
En ces temps-là, annonçait Zacharie, « une source jaillira pour purifier de leurs souillures et de leurs péchés les descendants de David et les habitants de Jérusalem… En ce jour-là n’importe quel chaudron sera propre au service du Seigneur le tout-puissant… Et il n’y aura plus de marchands dans le Temple du Seigneur en ce jour-là » (Za 13, 1 et 14, 21).
C’en est fini de l’ordre religieux représenté par la Loi et le Temple, « ombres et figures ». C’est l’avènement d’un ordre nouveau, « lumière et réalité ». La crainte cèdera la place à l’amour, l’obéissance deviendra attachement, les observances se transformeront en communion…
En ces jours-là, le Messie sera le seul Temple et Dieu habitera le corps de son Christ qui est l’Eglise de chair… En ces jours-là, tous les êtres humains seront plus respectables que les pierres consacrées, plus saints que « les chaudrons bénis, les coupes d’aspersion devant l’autel » (Za).
Le royaume nouveau, c’est bien la destruction et la mort d’une certaine conception de Dieu, de la Loi et du Temple. Il faut toujours, en effet, que le Dieu de l’homme meure pour que se révèle la vérité de Dieu.
C’est le fouet à la main que Jésus provoque clergé et fidèles, leur révèle son identité et justifie mystérieusement son geste. Il veut en finir avec un trafic religieux où la divinité vend ses faveurs, où les fidèles, à force de rites et de célébrations, achètent grâces et salut, où ils multiplient les contrats d’assurance au prix d’oboles, de prières et de sacrifices… Ce n’est pas seulement brebis, bœufs et colombes qu’il faut chasser du Temple, mais bien cette soumission craintive au code impitoyable de la Loi et ses prescriptions minutieuses, l’obéissance servile, le ritualisme magique, les attitudes de coupable et de perpétuel accusé.
La vérité sur Dieu, c’est une relation d’amour, non de crainte. Son alliance est de tendresse et de fidélité. La Loi est d’abord sa présence et l’invitation à l’obéissance est celle d’un père qui trace la voie à ses enfants.
Il y a un chemin qui mène vers lui. Son nom est Jésus Christ. Il y a un temple qu’il ne quitte jamais, et c’est le cœur de l’homme et de la femme. C’est là son premier et plus précieux tabernacle.
P. Fabien Deleclos, franciscain (T)
1925 – 2008
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