HOMÉLIE DU 2E DIMANCHE DE L’AVENT B
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Saint Jean-Baptiste
HOMÉLIE DU 2E DIMANCHE DE L’AVENT B
Is 40, 1-5.9-11 ; 2 P 2, 3, 8-14 ; Lc 3, 4-6
Nous avons tous déjà eu l’occasion de voir de grands travaux de terrassement. Souvenons-nous du tunnel sous la Manche, par exemple. On a utilisé d’énormes machines de 150 mètres de long et pesant chacune 400 tonnes. Rappelez-vous l’ampleur des travaux, les obstacles à franchir, la patience nécessaire pour tracer une voie sous la Manche, afin que trains et voitures puissent passer » à roues sèches « . Impressionnant !
L’auteur du livre d’Isaïe a été lui aussi très impressionné. Au cours de son exil à Babylone, il y a près de 2500 ans, il a très probablement, comme ses concitoyens, travaillé comme esclave dans les grands travaux de remblaiement et de nivellement. Notamment pour tracer une route dans le désert, à l’est du Jourdain, pour le retour du roi victorieux, Ou encore cette fameuse voie sacrée, construite à Babylone et réaménagée chaque année, pour que les fidèles puissent venir en procession jusqu’au temple, pour honorer le dieu Mardouk.
Pour relever le moral de ses troupes, et faire espérer un prochain retour au pays, le prophète s’est servi de ces chefs-d’œuvre du génie civil et de ses prouesses techniques pour les traduire en un langage symbolique et spirituel : » Préparez à travers le désert le chemin du Seigneur « . Cinq cents ans plus tard, Jean Baptiste va reprendre à son compte les mêmes images. Comme nous pouvons nous aussi les reprendre aujourd’hui et les actualiser.
La période de l’Avent est bien là pour nous réveiller et nous mobiliser. Il y a de grands travaux à entreprendre pour tracer dans le désert du monde et les terres arides de notre cœur un chemin, une route pour le Seigneur. Ce qui demande conviction et patience, confiance et persévérance.
Sur le terrain matériel, la météo par exemple, peut être très dérangeante, sans parler de grèves toujours possibles et des obstacles imprévus. Sur le plan spirituel, il peut y avoir des tentations auxquelles on succombe. Le découragement qui s’infiltre. La foi qu faiblit. La paresse qui s’installe. La gourmandise, de nourriture ou de plaisirs qui nous alourdissent de corps et d’âme.
Encore faut-il savoir qu’il y a une triple venue du Seigneur. Comme le prêchait saint Bernard : Dans la première, le Christ est venu dans la chair et la faiblesse. Il a vécu avec les hommes et les femmes de son temps. Beaucoup l’ont pris en haine. Plus tard, à la fin, il viendra dans la gloire et la majesté, pour séparer les brebis des chèvres.
Mais, entre les deux, il y a la venue intermédiaire, journalière. Celle qui reste cachée, présente en esprit. Elle a été annoncée par Jésus lui-même : « Si quelqu’un m’aime, il gardera mes paroles et mon Père l’aimera et nous viendrons à lui ». Puisqu’ils trouveront la porte de notre cœur ouverte. C’est d’ailleurs ainsi que Marie a préparé la venue du Seigneur. Elle est le modèle de l’Avent, celui de la patience et de l’espérance. Avant même de concevoir Jésus dans la chair, Marie l’avait accueilli et conçu dans la foi. « Heureuse celle qui t’a porté et allaité », s’exclamera un jour une femme. « Heureux plutôt ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui l’observent », répond Jésus (Lc 11, 27-28).
Tout cela veut dire que l’œuvre du Sauveur, le Salut qu’il offre, l’établissement de son Royaume de justice et de paix, ne nous est pas offert clé sur la porte. Il ne dépend pas non plus uniquement de nos efforts.
De même, le Royaume de Dieu se développe lentement. Nous pouvons cependant le reconnaître à des signes de croissance. Mais pas seulement dans les champs cultivés par les Eglises. Tout progrès d’une véritable justice, tout effort authentique de paix, toute démarche sincère de pardon et d’amour du prochain, contribue à la croissance du Royaume et en prépare l’achèvement.
Libérateur et Berger, Seigneur et Serviteur, Chemin, Vérité et Vie, Jésus est venu, il reviendra et ne cesse de venir chaque jour pour faire toutes choses nouvelles. Mais pas sans nous. Pas sans les grands travaux que suppose une conversion. Il s’agit de désencombrer nos étables, rectifier le tracé de nos chemins, abaisser nos montagnes d’orgueil et d’intolérance, combler les vides de nos existences que nous croyons si remplies. Le repas de la Parole et du Pain y contribue. Il est un peu le sacrement de la patience de Dieu. L’eucharistie est d’ailleurs célébrée » jusqu’à ce qu’il revienne « . Elle est un lent et patient retour du Seigneur dans l’histoire de l’humanité, et de chacun de nous en particulier.
« Heureux qui écoute la Parole de Dieu et qui la garde ». Et pour cela, il faut la méditer, la ruminer, et la digérer, pour qu’elle se transforme en actes.
P. Fabien Deleclos (T)
1925 – 2008
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