Archive pour le 18 septembre, 2017

A L’IMAGE DE DIEU (1) et (2)

18 septembre, 2017

http://livres-mystiques.com/partieTEXTES/Besson/Articles2/alimage1.html

la mia e fr

Moïse et le mont Sinaï

Emile BESSON. Octobre 1957. A.S

A L’IMAGE DE DIEU (1) et (2)

Que l’homme ait été créé à l’image de Dieu, ceci révèle le secret de sa dignité. Et cette dignité originelle, il la conserve au travers de toutes les formes d’existence par lesquelles il plait à Dieu de le faire passer; au travers aussi de ses erreurs, de ses fautes, au travers de ses succès et de ses revers, jusqu’au jour où, ayant accompli toute sa destinée, il revêtira à jamais et dans sa plénitude cette image de Dieu qui resplendit sur sa première naissance.
Cette image de Dieu qui est nous-mêmes, elle peut s’éclairer ou se voiler suivant que nous sommes plus ou moins près de notre Créateur; elle peut se parfaire ou se dégrader. Mais, quoi que nous fassions, elle demeure; rien ni personne ne peut l’enlever, car elle est notre vie même.
« A l’image de Dieu ».Comment ne pas penser à la parabole de la drachme perdue? Cette femme avait dix drachmes; elle en perd une, et cette pièce de monnaie marquée à l’effigie royale et qui représente pour elle une grande valeur s’est égarée, elle est allée rouler misérablement dans la poussière de ce pauvre logis d’Orient.
Sous cette image familière, c’est tout le drame de la vie qui est déroulé. Que d’êtres porteurs de la pièce inestimable marquée à l’effigie du Roi des rois
laissent cette valeur infinie s’égarer, rouler misérablement dans la poussière, dans la souillure! Il n’est rien de plus saisissant que d’assister à l’égarement, à la flétrissure progressive d’une créature faite à l’image de Dieu. Rien que la crainte de ces désordres suffit à mettre dans des coeurs de mères une angoisse inexprimable. Qui dira combien d’insomnies, combien de prières brûlantes peut faire monter vers Dieu cette crainte de la forfaiture d’un être ?
Il y a une chose plus tragique encore, c’est d’assister à son propre égarement. Il y a des gens qui ont assez de contrôle sur eux-mêmes pour s’analyser, pour voir le mal grandir en eux alors qu’ils n’ont pas assez d’énergie pour réagir contre lui. On a commencé à comprendre qu’on allait s’éloigner de la voie droite; on s’est vu ensuite réaliser cet éloignement; on se souvient qu’on est allé de plus en plus loin, jusqu’au jour où l’on a compris qu’on était soi-même la drachme perdue… Bénie soit la grâce de Dieu qui met un obstacle à l’éloignement, et qui cherche avec soin la drachme perdue jusqu’à ce qu’elle l’ait trouvée!
Jusqu’à ce qu’elle l’ait trouvée. Justin Martyr, qui a été un des grands docteurs et un des martyrs du second siècle de l’ère chrétienne, raconte comment, dans sa jeunesse, il avait cherché la vérité dans tous les systèmes contemporains sans parvenir à l’appréhender. Etant un jour au bord de la mer et marchant auprès des vagues, il se sentit profondément découragé et se demanda s’il y avait encore dans le domaine spirituel quelque chose de vrai, lorsqu’il rencontra un vieillard qui lui parla avec bonté et qui, simplement, avec une autorité comme divine, lui montra en quoi il s’était trompé dans ses recherches et qu’il lui restait à trouver l’essentiel: le Christ, l’Evangile, la Vie.
Combien en est-il qui sont comme Justin! Et nous passons à côté d’eux sans les regarder. En général nous comprenons fort bien les autres; leurs opinions nous apparaissent comme des choses privées et qu’il faut respecter; nous pratiquons même, sous couleur du respect des opinions, le respect de l’égarement des êtres. Le Christ, Lui, est venu chercher et sauver ce qui était perdu; Il a apporté cette rédemption dont nous gardons la très précieuse affirmation, mais dont la réalité souvent nous échappe.
A l’image de Dieu, c’est le secret de notre vie collective. je suis à l’image de Dieu; mais tous les hommes sont également à l’image de Dieu; ils sont donc mes frères et je dois les considérer comme tels et me conduire vis-à-vis d’eux comme tels. C’est pourquoi le Christ nous dit que tout ce que nous faisons, en bien ou en mal, à l’un quelconque des hommes, c’est à Lui-même que nous le faisons. La plus misérable créature brisée par la maladie ou par le mal, l’intelligence éteinte, le dernier des sauvages, le méchant, le mauvais, le cruel, tous portent en leur centre l’image de Dieu, la promesse de tous les relèvements, de toutes les résurrections.
Antichrétiens sont les individus ou les collectivités qui ne pratiquent pas le respect de la dignité humaine. Il est dans la volonté de Dieu que l’homme jouisse de sa liberté de pensée et de jugement, de sa liberté d’opinion et de conscience. L’instinct de domination qui cherche à dégrader l’homme, à l’avilir, à l’asservir à quelque oeuvre, à quelque idéologie que ce soit est la marque du Royaume infernal de Lucifer. Le Christ a dit à Ses disciples: « Chez les païens les chefs font sentir leur domination et les grands, leur autorité. il ne doit pas en être ainsi parmi ‘vous; au contraire, que celui qui voudra être grand parmi vous soit votre serviteur ».
Antichrétien le riche qui ne prend nul souci du pauvre ou qui l’humilie de sa morgue, insultant en sa personne le Dieu à l’image de qui tous deux ont été créés.
Antichrétien l’homme qui, parce qu’il porte le titre de maître, de patron ‘ parce qu’il a un grade, s’imagine qu’il a le droit de tout faire subir à ses subordonnés ou à user à leur égard de procédés désinvoltes. Tel ce touriste, fraîchement débarqué à Rabat et qui se mettait à tutoyer un jeune Marocain rencontré dans la rue. Or ce Marocain venait de remporter l’agrégation de lettres.
Dans une prochaine chronique nous nous arrêterons sur d’autres considérations qui devraient nous être aussi évidentes que celles qui précèdent.

Emile BESSON.avril 1958.A.S

A L’IMAGE DE DIEU (2)

Il est des circonstances où l’on a beau chercher, il semble que l’on ne parvienne pas à discerner sur un être l’image de Dieu. Par exemple en présence d’un criminel en donnant à ce mot le sens le plus large.
D’autre part, le mal doit être réprimé, le crime doit être puni et la justice doit être rendue. Mais la justice – si elle veut porter son nom – doit user de discernement, rechercher les circonstances atténuantes, ne pas appliquer uniformément la même peine. La justice n’est pas une vengeance; la loi du talion n’est pas la justice; la haine est l’antithèse de la justice.
Quelle que soit la légitimité du châtiment, elle ne donne jamais le droit de mépriser le coupable. Le criminel reste un homme, un homme créé à l’image de Dieu. Et la pénalité doit avoir comme but le relèvement du malheureux, son rachat, sa réintégration dans la communauté de ceux qui se savent porteurs de l’image de Dieu.
Dans l’histoire de tous les pays il y a eu des heures sombres où la haine ou bien les passions partisanes et même les remous de l’opinion ont décidé du sort des hommes, et non pas la sereine et impartiale justice.
Si grands que soient ces pays , de tels abus de pouvoir, leur infligent une flétrissure.
Un être qui, entre tous, a droit au respect, c’est le prisonnier. Le vainqueur a devant lui un soldat désarmé, déjà un proscrit sans asile qui respire la morne atmosphère de la servitude. Naguère il combattait, il vivait; maintenant, séparé de sa patrie et de sa famille, il est entré dans le silence, il marche dans un autre univers. Nos aïeux disaient: Honneur aux vaincus!
Et voici, plus haut que toute considération, deux paroles prononcées naguère par le Maître de Sédir:
« Si vous offensez votre voisin, il ne suffit pas que votre voisin vous pardonne, il faut encore que Dieu vous pardonne, car vous savez qu?en votre voisin comme en vous-même est une étincelle de Dieu ».
« Il faut fréquenter les êtres les plus repoussants et ne mépriser personne, car ce serait offenser Dieu,
puisque son souffle est en tout être ».
Ces paroles n’ont pas besoin de commentaire; elles se comprennent d’elles-mêmes. Elles nous tracent notre devoir, notre devoir vis-à-vis de nous-mêmes, notre devoir vis-à-vis du prochain.
Notre devoir vis-à-vis de nous-mêmes: ne pas laisser s’obscurcir en nous l’image de Dieu. Ceci, nous l’avons dit précédemment.
Notre devoir vis-à-vis du prochain. Suivre l’exemple du Christ. Aimer le prochain, aider le prochain, porter le prochain, lui faire franchir les étapes de la route indéfinie qui mène au Royaume éternel. Nous souvenir qu’entre les créatures humaines il n’y a que des différences de degré et que toutes elles seront un jour réunies dans la Maison du Père.
L’Amour n’a pas de limite; il est infini; il se relève, triomphant, après chaque défaite; il ressuscite après chaque mort. Théophane disait à Stella : « Continue ta route, et ne crains point. Si tu as fait cinquante fois le même sacrifice, demeure prête à le faire cinquante fois encore si on te le demande ».
Dieu n’est pas dans l’Inaccessible ; Il est dans l’Amour; Il est dans l’exagération de l’Amour, comme le Fils de l’Homme est jusqu’à la fin des siècles dans l’exagération du sacrifice.
En vérité, l’âme humaine faite à l’image de Dieu, portée par l’Esprit de Dieu, peut l’impossible.
Immense est l’image de Dieu, immense comme Dieu Lui-même. Et, si elle se voit sur le visage de l’homme, c’est surtout dans son coeur qu’elle resplendit. Ne blessons pas le coeur de l’homme, car nous blesserions Dieu. Aimons le coeur de l’homme, de tout homme, car ainsi nous aimons Dieu.