HOMÉLIE DU 16E DIMANCHE ORDINAIRE A

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HOMÉLIE DU 16E DIMANCHE ORDINAIRE A

Sg 12, 13, 16-19 ; Rm 8, 26-27 ; Mt 13, 24-43

Il y a quelques années déjà, un candidat à l’émission télévisée du Jeu du Millionnaire devait répondre à la question suivante : Selon la Bible, quel est le saint qui fut ressuscité par Jésus ? Il s’agissait de choisir entre S. Jean Baptiste, S. Lazare, S. Pierre et un quatrième dont j’ai oublié le nom. Grand silence. Le jeune homme avoue son ignorance. Mais, recourant à l’avis d’un ami très cultivé, il répond S. Lazare. Ouf ! On pouvait passer à la question suivante…

« Ignorer les Ecritures, c’est ignorer le Christ », disait S. Jérôme.

Mais l’ignorance du candidat millionnaire n’était évidemment pas bien grave et celle du journaliste non plus, même si dans la Bible il n’est jamais question de saint ni de sainte, qu’il s’agisse de Marie et Joseph, Lazare, Jean Baptiste ou Pierre. Mais cela m’a rappelé une question posée par Mgr Huard : « Oserions-nous prétendre que notre foi s’alimente vraiment à la fréquentation assidue des Ecritures ?  » (1). Bonne question ! Même si, chaque dimanche, au repas de la Parole et du Pain, nous en recevons quelques miettes comme mise en appétit. C’est bien peu de chose. Et nous y communions ensuite, c’est-à-dire nous y adhérons sans pour autant avoir bien compris, et leur sens, et leurs conséquences concrètes. Or, cette Parole est Bonne Nouvelle pour aujourd’hui. Elle vient parler au cœur de nos vies, non seulement pour nous instruire, mais pour nous transformer. Pour améliorer notre existence et celle de la société. Il faut donc qu’elle soit fréquentée, étudiée, méditée, mangée, ruminée et priée pour qu’elle puisse s’incarner, c’est-à-dire se concrétiser dans notre vie quotidienne.
Dimanche dernier, la parabole nous a posé une question directe et concrète : Que faites-vous, que faisons-nous de la Parole de Dieu qui est régulièrement semée sur notre sol ? Et une question complémentaire : Quelle est la qualité de notre sol ?
Semence de vie, la Parole dite de Dieu doit pouvoir rencontrer une terre favorable, accueillante. Or, parmi les terrains qui reçoivent régulièrement la semence, il y a, disait Jésus, 75 % d’échec. Trois terrains sur quatre sont rocailleux, mal entretenus ou mal ensemencés. Il ne suffit donc pas que la graine soit jetée. Il ne suffit pas que la Parole soit lue, annoncée, proclamée. Il faut y apporter un certain intérêt.
Il ne suffit pas non plus de l’entendre, il faut encore l’écouter. Ecouter avec son cœur… L’écouter ne suffit pas, il faut s’efforcer de la comprendre, et donc de chercher à la déchiffrer, à l’interpréter. Il ne suffit pas de lui accorder de la sympathie ni même de l’admiration, il faut encore l’accueillir, lui donner une place importante, une priorité, jusqu’à vouloir la mettre en pratique, et donc lui permettre de prendre racines. Pour cela, il faut la fréquenter, l’étudier, en discuter, la partager. Nous la connaissons si peu et si mal, alors qu’elle est inépuisable et qu’elle peut constamment nous révéler du neuf et du mieux. C’est comme une plante qu’il faut cultiver, disaient les Pères de l’Eglise.
Cette parabole se prolonge aujourd’hui, avec quelques précisions à propos du bon terrain. Même quand la semence a été bien accueillie et que le grain a pris racines, il va côtoyer de mauvaises graines qui sont en nous, et que nous n’avons pas nécessairement nous-mêmes semées. Ce qui est vrai pour chacun de nous et qui est vrai pour le monde. Le bien et le mal, le bon grain et l’ivraie poussent ensemble. Ainsi, la récolte peut toujours être compromise par l’invasion de mauvaises herbes venues d’un peu partout.
A l’époque, Jésus voulait donner une leçon de patience et une leçon de tolérance à ses disciples un peu trop pressés à vouloir éliminer les pharisiens, semeurs d’ivraie, qui s’attaquaient à Jésus, le bon semeur. Les disciples étaient partisans de la manière forte : se précipiter pour arracher l’ivraie, sanctionner les mauvais semeurs et se barricader dans le ghetto d’une secte de « purs ». Ils oubliaient que dans toute personne, dans toute société, y compris religieuse, le bien et le mal sont entremêlés, la lumière et les ténèbres aussi. Il faut donc de la patience pour faire le tri, pour bien discerner. Il faut de la patience pour supporter sans agressivité ni découragement l’ivraie dans notre propre champ et dans celui des autres. Patience et tolérance pour ne pas arracher à tort et à travers. Permettre aussi au bon grain de se fortifier et de grandir, pour donner à chacun un temps de croissance et donc de conversion. Les bons ne sont pas tous d’un côté, ni les méchants tous de l’autre. Et nous ne sommes ni les juges ni les moissonneurs.
Souvenez-vous de la première lecture. Une prière : Toi Seigneur qui disposes de la force, tu juges avec indulgence. Tu nous gouvernes avec beaucoup de ménagements. Par ton exemple, tu as enseigné à ton peuple que le juste doit être humain. A ceux qui ont péché, tu accordes même la conversion.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)
1925 – 2008

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