VIE ET VOYAGES DE SAINT PAUL APÔTRE

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VIE ET VOYAGES DE SAINT PAUL APÔTRE

52. Captivité à Césarée

Vue aérienne du port de l’ancienne Césarée

Vue aérienne du port à l’ancienne Césarée


Le port de Césarée, où Paul sera emprisonné, avait une longue histoire. Au 4e siècle avant notre ère, le roi de Sidon construisit un premier port très modeste et un petit village qui prit le nom de Tour de Strabon. En 63, Pompée accorda l’autonomie au village et, sept ans plus tard, l’empereur Auguste en fit don à Hérode le Grand qui découvrit là un chantier à sa mesure. D’immenses travaux firent surgir de la mer une jetée à l’arrière de laquelle fut creusé un port de trente-deux mètres de profondeur, «plus spacieux que le Pirée», qui mettait les bateaux à l’abri de toutes les tempêtes. Il fallut douze années pour terminer les travaux du port et de la ville. Hérode en fit sa capitale avec son palais tout en marbre blanc qui était une véritable merveille.
Aujourd’hui, les sables et les siècles ont englouti la ville et une bonne partie du port. En 1946, des fouilles archéologiques ont retrouvé les remparts élevés par Saint Louis au temps des croisades (13e s.) et les restes de la ville d’Hérode, avec son hippodrome et son théâtre. Dans les ruines du théâtre, on a découvert une inscription précisant qu’il avait été dédié à l’empereur Tibère par le «prefaectus Pontius Pilatus». C’est le plus ancien document épigraphique concernant Ponce Pilate.
Quand Paul pénètre dans la ville, le palais d’Hérode est devenu la résidence officielle des procureurs romains de Judée. Antonius Félix, un esclave affranchi par l’empereur Claude, est alors en poste depuis l’an 52. Il est dépeint par Tacite comme étant «cruel et débauché, exerçant le pouvoir royal avec une âme d’esclave». Pallas, son frère, fut le favori tout-puissant et le premier ministre de l’empereur Claude, de même que celui de Néron, au début de son règne. Grâce à lui, Félix fit une brillante carrière. La grande considération dont jouissait Pallas, à Rome, lui assurait l’impunité.
L’incarcération de Paul à Césarée durera deux longues années, période monotone pour un homme qui avait été en mouvement continue depuis plusieurs années! Quelques jours après son arrivée à Césarée, le grand-prêtre Ananie se présenta entouré d’un groupe d’anciens et d’un avocat romain, un débutant dont l’inexpérience éclate au tout début du plaidoyer. Le grand-prêtre eut peine à retenir un sourire, en entendant son avocat utiliser une flatterie lourde et maladroite. Selon l’avocat, grâce à Félix, le pays jouissait d’une paix profonde; sa prévoyance avait rétabli l’ordre dans la nation. C’est pourquoi les Juifs lui devaient une grande reconnaissance. En réalité, Félix était l’un des procureurs les plus détestés qu’avait connu le pays. Les Juifs le lui montrèrent d’ailleurs, deux ans plus tard, en l’accusant d’avoir massacré à Césarée plusieurs de leurs compatriotes et d’avoir mal conduit les affaires publiques, ce qui provoqua son rappel par Néron.
Sous l’influence des Sadducéens, on porta contre Paul des accusations sur le plan politique : Paul, serait un révolutionnaire dangereux, coupable de sédition, chef d’une secte non autorisée, d’une «religio illicita». Enfin, il aurait profané le Temple de Jérusalem en y introduisant un non-Juif. Chacun de ces délits était passible de la peine de mort.

Paul devant Félix
Devant Antonius Félix, le procureur romain de la Judée, Paul réfute les accusations du grand-prêtre Ananie
Félix avait assez d’expérience pour voir clair dans le jeu de «l’honorable grand prêtre» et des membres du Sanhédrin. Il se tourna vers Paul, curieux d’entendre ce qu’il dirait. Celui-ci parla avec sagesse et ramena la situation sur le terrain du droit religieux. «Voilà de nombreuses années que tu as cette nation sous ta juridiction; aussi est-ce avec confiance que je plaiderai ma cause.» Paul laisse ainsi sous-entendre : «Tu les connais bien!». Et alors il réfute l’accusation point par point, en insistant sur le fait qu’il n’est pas infidèle à la religion de ses pères qui professent la foi messianique. Son approche religieuse, contrairement à celle des Sadducéens, se situe sur le terrain de la Loi et des Prophètes. Son enseignement sur la résurrection est celle du judaïsme, religion protégée par l’État; donc on ne peut lui reprocher de favoriser une «religion illicite». Il s’agit donc de divergences à l’intérieur des frontières de la religion juive, ce qui n’intéresse pas les Romains.
Ce plaidoyer est la première apologie officielle du christianisme devant le pouvoir de Rome.
Les chrétiens du premier siècle adopteront ce point de vue et l’utiliseront pendant de longues années. Pour les tribunaux romains, la différence essentielle entre le judaïsme et le christianisme n’existait pas encore. Ce n’est que plus tard, à la fin du règne de Néron, que les Juifs commenceront à accuser le fondateur du christianisme d’avoir été crucifié «parce qu’il était opposé à César». La justice romaine acceptera alors la différence entre les deux religions et ce point de vue juridique sera reçu définitivement par l’empereur Domitien qui déclenchera les grandes persécutions.
À la suite de la rencontre avec la Sanhédrin, Félix donna ordre de rendre l’emprisonnement de Paul aussi supportable que possible (custodia militaris). Il sera gardé dans la prison du palais mais, sa captivité sera sans dureté inutile. Ses fidèles pourront le visiter et prendre soin de lui.
Paul espérait qu’après un certain temps la pression de Jérusalem prendrait fin et qu’il serait libéré. Or toutes les informations qui parvenaient à Félix prouvaient que la situation de Paul préoccupait toujours les juifs purs et durs ainsi que les Judéo-chrétiens. Il semble y avoir eu une alliance malsaine entre ces deux groupes très différents. Les rapports étroits entre le grand prêtre et Jacques, le frère de Jésus, permettent d’en venir à cette conclusion. De temps à autre, Félix faisait à Paul de légères allusions à une rançon. Derrière le soi-disant intérêt religieux, se cachait la cupidité, si caractéristique de nombreux serviteurs de l’État.
La détention à Césarée durait déjà depuis deux ans et la situation de Paul n’aurait pas changé si, en raison d’un incident sanglant, les événements ne s’étaient précipités. Césarée était une ville où Juifs et Grecs jouissaient des mêmes droits. Il y avait cependant souvent des affrontements entre les deux groupes. Au cours d’une mêlée, les Grecs furent battus et Félix intervint pour ordonner aux Juifs d’évacuer la rue. Sur leur refus, la cohorte passa à l’attaque, provoqua un massacre et brûla plusieurs maisons juives. Leur cri de révolte parvint jusqu’à Rome, où ils jouissaient d’une grande influence. Dans ses Anti­quités, Flavius Josèphe dénonce la mauvaise administration et l’antisémitisme de Félix. Cette fois, il avait dépassé les bornes. Pallas parvient à lui sauver la vie, mais en 60, il fut remplacé par Porcius Festus.

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