Archive pour septembre, 2016

MESSE DE CANONISATION DE LA BIENHEUREUSE MÈRE TERESA DE CALCUTTA

11 septembre, 2016

 http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/homilies/2016/documents/papa-francesco_20160904_omelia-canonizzazione-madre-teresa.html  

 MESSE DE CANONISATION DE LA BIENHEUREUSE MÈRE TERESA DE CALCUTTA

JUBILÉ DES OPÉRATEURS ET DES VOLONTAIRES DE LA MISÉRICORDE

HOMÉLIE DU SAINT-PÈRE

Place Saint-Pierre

Dimanche, 4 septembre 2016

« Qui peut comprendre les volontés du Seigneur ? » (Sg 9, 13).

Cette interrogation du livre de la Sagesse, que nous avons écoutée dans la première lecture, nous présente notre vie comme un mystère, dont la clef d’interprétation n’est pas en notre possession. Les protagonistes de l’histoire sont toujours deux : Dieu d’une part et les hommes de l’autre. Nous avons la tâche de percevoir l’appel de Dieu et, ensuite, d’accueillir sa volonté. Mais pour l’accueillir sans hésitation, demandons-nous : quelle est la volonté de Dieu ? Dans le même passage du livre de la Sagesse, nous trouvons la réponse : « C’est ainsi que les hommes ont appris ce qui te plaît » (v. 18). Pour authentifier l’appel de Dieu, nous devons nous demander et comprendre ce qui lui plaît. Bien souvent, les prophètes annoncent ce qui plaît au Seigneur. Leur message trouve une admirable synthèse dans l’expression : « C’est la miséricorde que je veux et non des sacrifices » (Os 6, 6 ; Mt 9, 13). Toute œuvre de miséricorde plaît à Dieu, parce que dans le frère que nous aidons nous reconnaissons le visage de Dieu que personne ne peut voir (cf. Jn 1, 18). Et chaque fois que nous nous penchons sur les besoins de nos frères, nous donnons à manger et à boire à Jésus ; nous vêtons, nous soutenons et nous visitons le Fils de Dieu (cf. Mt 25, 40). En somme, nous touchons la chair du Christ. Nous sommes donc appelés à traduire dans le concret ce que nous invoquons dans la prière et professons dans la foi. Il n’y a pas d’alternative à la charité : ceux qui se mettent au service de leurs frères, même sans le savoir, sont ceux qui aiment Dieu (cf. 1Jn 3, 16-18 ; Jc 2, 14-18). La vie chrétienne, cependant, n’est pas une simple aide qui est fournie dans le temps du besoin. S’il en était ainsi, ce serait certes un beau sentiment de solidarité humaine qui suscite un bénéfice immédiat, mais qui serait stérile, parce que sans racines. L’engagement que le Seigneur demande, au contraire, est l’engagement d’une vocation à la charité par laquelle tout disciple du Christ met sa propre vie à son service, pour grandir chaque jour dans l’amour. Nous avons écouté dans l’Évangile que « de grandes foules faisaient route avec Jésus » (Lc 14, 25). Aujourd’hui, ces « grandes foules » sont représentées par le vaste monde du volontariat, ici réuni à l’occasion du Jubilé de la Miséricorde. Vous êtes cette foule qui suit le Maître et qui rend visible son amour concret pour chaque personne. Je vous répète les paroles de l’apôtre Paul : « Ta charité m’a déjà apporté de joie et de réconfort, car grâce à toi…, les cœurs des fidèles ont trouvé du repos » (Phm 7). Que de cœurs les volontaires réconfortent ! Que de mains ils soutiennent ! Que de larmes ils essuient ! Que d’amour mis dans le service caché, humble et désintéressé ! Ce service louable manifeste la foi  – manifeste la foi – et exprime la miséricorde du Père qui se fait proche de ceux qui sont dans le besoin. Suivre Jésus est un engagement sérieux et en même temps joyeux ; cela demande radicalité et courage pour reconnaître le divin Maître dans le plus pauvre ainsi que dans le marginalisé de la vie et pour se mettre à son service. C’est pourquoi, les volontaires qui, par amour pour Jésus, servent les derniers et les démunis n’attendent aucune reconnaissance ni aucune gratification, mais renoncent à tout cela parce qu’ils ont découvert l’amour authentique. Et chacun de nous peut dire : ‘‘Comme le Seigneur est venu vers moi et s’est penché sur moi en temps de besoin, de la même manière moi aussi je vais vers lui et je me penche sur ceux qui ont perdu la foi ou vivent comme si Dieu n’existait pas, sur les jeunes sans valeurs et sans idéaux, sur les familles en crise, sur les malades et les détenus, sur les réfugiés et les migrants, sur les faibles et sur ceux qui sont sans défense corporellement et spirituellement, sur les mineurs abandonnés à eux-mêmes, ainsi que sur les personnes âgées laissées seules. Partout où il y a une main tendue qui demande une aide pour se remettre debout, doit se percevoir notre présence ainsi que la présence de l’Église qui soutient et donne espérance’’. Et cela, il faut le faire avec la mémoire vivante de la main du Seigneur tendue sur moi quand j’étais à terre. Mère Teresa, tout au long de son existence, a été une généreuse dispensatrice de la miséricorde divine, en se rendant disponible à travers l’accueil et la défense de la vie humaine, la vie dans le sein maternel comme la vie abandonnée et rejetée.  Elle s’est dépensée dans la défense de la vie, en proclamant sans relâche que « celui qui n’est pas encore né est le plus faible, le plus petit, le plus misérable ». Elle s’est penchée sur les personnes abattues qu’on laisse mourir au bord des routes, en reconnaissant la dignité que Dieu leur a donnée ; elle a fait entendre sa voix aux puissants de la terre, afin qu’ils reconnaissent leurs fautes face aux crimes – face aux crimes – de la pauvreté qu’ils ont créée eux-mêmes. La miséricorde a été pour elle le ‘‘sel’’ qui donnait de la saveur à chacune de ses œuvres, et la ‘‘lumière’’ qui éclairait les ténèbres de ceux qui n’avaient même plus de larmes pour pleurer leur pauvreté et leur souffrance. Sa mission dans les périphéries des villes et dans les périphéries existentielles perdure de nos jours comme un témoignage éloquent de la proximité de Dieu aux pauvres parmi les pauvres. Aujourd’hui, je remets cette figure emblématique de femme et de consacrée au monde du volontariat : qu’elle soit votre modèle de sainteté ! Je crois qu’il nous sera un peu difficile de l’appeler sainte Teresa ; sa sainteté nous est si proche, si tendre et si féconde que spontanément nous continuerons de lui dire : ‘‘Mère Teresa’’. Que cet infatigable artisan de miséricorde nous aide à comprendre toujours mieux que notre unique critère d’action est l’amour gratuit, libre de toute idéologie et de tout lien et offert à tous sans distinction de langue, de culture, de race ou de religion. Mère Teresa aimait dire : « Je ne parle peut-être pas leur langue, mais je peux sourire ». Portons son sourire le dans le cœur et offrons-le à ceux que nous rencontrons sur notre chemin, surtout à ceux qui souffrent. Nous ouvrirons ainsi des horizons de joie et d’espérance à tant de personnes découragées, qui ont besoin aussi bien de compréhension que de tendresse.

 

James Tissot – The Return of the Prodigal Son (Le retour de l’enfant prodigue) – Brooklyn Museum

10 septembre, 2016

James Tissot - The Return of the Prodigal Son (Le retour de l'enfant prodigue) - Brooklyn Museum dans images sacrée Brooklyn_Museum_-_The_Return_of_the_Prodigal_Son_%28Le_retour_de_l%27enfant_prodigue%29_-_James_Tissot

https://en.wikipedia.org/wiki/Parable_of_the_Prodigal_Son

HOMÉLIE DU 24E DIMANCHE ORDINAIRE C

10 septembre, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 24E DIMANCHE ORDINAIRE C

Ex 32, 7-11, 13-14 ; 1 Tm 1, 12-17 ; Lc 15, 1-32

 « Qui leur fera miséricorde ? », titrait un journal racontant la triste histoire de 25 femmes qui veulent quitter la prostitution mais ne trouvent pas de travail. Fait divers parmi d’autres, qui nous offre une pressante invitation à relire avec attention les textes bibliques que nous propose notamment la liturgie. « L’équipement du chrétien se résume dans la Bible et le journal », affirmait le grand théologien Karl Barth.  Autre exemple avec les actions musclées de commandos anti-avortement contre des hôpitaux qui pratiquent l’IVG. Une croisade contre l’assassinat (d’une seule catégorie) d’innocents. Certains y voient une « courageuse réponse de chrétiens à l’enseignement du Christ et de l’Eglise ». D’autres considèrent que l’on ne peut continuer « à bafouer ainsi l’ordre divin ». Et bon nombre de ces « croisés » se prennent pour le bras justicier et vengeur du Dieu tout puissant. Mais ce visage de Dieu n’est-il pas plutôt celui de l’une des nombreuses idoles fabriquées de nos mains « et que nous mettons à notre service » ? En effet, comme le signale le missel des dimanches : « Dieu ! Nous le voudrions juge des autres, de ceux à qui nous nous opposons »; Un Dieu à notre image, intolérant, violent, rancunier et vindicatif. Déjà, l’auteur de l’Exode a voulu, par l’épisode du veau d’or et l’extraordinaire prière de Moïse, briser le masque de colère pour révéler le vrai visage de Dieu qui est celui d’une perpétuelle bienveillance, d’une indéracinable fidélité à l’alliance et à ses promesses, d’une patience de tous les instants, d’une miséricorde inépuisable. Le portrait après la caricature. Le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob n’est pas celui du « Talion », écrit Stan Rougier, mais celui du Shabbat Hannuka : « Ni par la force ni par la violence, mais par mon Esprit », dit l’Eternel. Mais infinie est la distance entre la noblesse et la sérénité des principes et l’épreuve de leur incarnation dans le concret mouvementé du quotidien. Ainsi, quand Moïse « vit le veau et les danses », il s’enflamma de colère, brisa tout ce qui lui tombait sous la main et ordonna à une élite de fidèles de tuer « qui son frère, qui son ami, qui son prochain… Et il tomba environ trois mille hommes » (Ex 32, 19-28). Mais on n’était qu’au début d’une très longue évolution spirituelle qui culminera dans la révélation et le témoignage de Jésus Christ, visage parfait du Dieu de miséricorde dont la justice et le pardon sont également infinis. Paul de Tarse, croyant sincère, familier des Ecritures et particulièrement compétent dans le domaine religieux, s’est pris longtemps pour le justicier de Dieu et de sa Loi, en s’attaquant par le blasphème, l’insulte et la persécution, à tous ceux qui marchaient dans la foulée du prophète de Nazareth, condamné et crucifié comme prétendu Messie. Et voici qu’un jour tout bascule, Paul découvre le vrai visage de Dieu qui est celui de sa miséricorde. Le savant et pieux pharisien reconnaît son ignorance et son manque de foi. Lui, le pur, se reconnaît pécheur, mais tellement pardonné qu’il en devient disciple et « premier exemple » de ceux qui croiraient en Jésus. Les trois paraboles que nous propose Luc aujourd’hui répondaient, au temps de Jésus, à ces croyants légalistes qui, au nom de leur foi et de la Loi, méprisaient et condamnaient publicains et pécheurs et dénonçaient Jésus comme un homme de mauvaise fréquentation. La parabole du père et des deux fils a tout dit sur la miséricorde de Dieu. Cependant, le disciple d’hier ou celui d’aujourd’hui, enseigné, éclairé, orienté et stimulé par la parole et l’exemple de Jésus, n’est pas pour autant un « pur », protégé de tout péché et vacciné contre l’infidélité, les déviations et les contradictions. C’est bien encore à nous tous que ces paraboles s’adressent, avec d’autant plus de force et d’urgence que nous avons peine à nous reconnaître pécheurs et pécheurs pardonnés.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925- 2008

Feast of the Nativity of the Blessed Virgin Mary

7 septembre, 2016

Feast of the Nativity of the Blessed Virgin Mary dans images sacrée
https://catholic4lifeblog.wordpress.com/2014/09/01/novena-for-nativity-of-the-blessed-virgin-mary/

ACTE DE CONSÉCRATION À MARIE – JEAN-PAUL II

7 septembre, 2016

http://w2.vatican.va/content/john-paul-ii/fr/homilies/2000/documents/hf_jp-ii_hom_20001008_act-entrustment-mary.html

JUBILÉ DES ÉVÊQUES

ACTE DE CONSÉCRATION À MARIE – JEAN-PAUL II

Dimanche 8 octobre 2000

1 «Femme, voici ton fils» (Jn 19, 26)! Tandis qu’arrive à son terme l’Année jubilaire, au cours de laquelle Toi, ô Mère, tu nous as offert à nouveau Jésus, le fruit béni de ton sein très pur, le Verbe fait chair, le Rédempteur du monde, ces paroles: « Femme, voici ton fils ! » se font pour nous particulièrement douces, paroles qui nous renvoient à Toi, te constituant notre Mère. En te confiant l’Apôtre Jean, et avec lui les fils de l’Église, et même tous les hommes, le Christ, loin d’atténuer son rôle exclusif de Sauveur du monde, le confirmait. Tu es la splendeur qui n’ôte rien à la lumière du Christ, car tu existes en Lui et par Lui. En Toi, tout est « fiat »: tu es l’Immaculée, tu es transparence et plénitude de grâce. Voici donc tes enfants rassemblés autour de Toi, à l’aube du nouveau millénaire. Aujourd’hui, par la voix du Successeur de Pierre, à laquelle s’unit celle de nombreux Pasteurs rassemblés ici de toutes les parties du monde, l’Église cherche à se réfugier sous ta protection maternelle et implore avec confiance ton intercession face aux défis de l’avenir.

2 En cette année de grâce, de nombreuses personnes ont vécu, et vivent actuellement, la joie surabondante de la miséricorde que le Père nous a donnée dans le Christ. Dans les Églises particulières répandues à travers le monde, et plus encore ici au centre de la chrétienté, les catégories les plus diverses de personnes ont accueilli ce don. Ici même, l’enthousiasme des jeunes a retenti, ici même, s’est élevé le cri implorant des malades. Ici même, sont venus des prêtres et des religieux, des artistes et des journalistes, des travailleurs et des hommes de science, des enfants et des adultes, et tous ont reconnu dans ton Fils bien-aimé le Verbe de Dieu, fait chair en ton sein. Obtiens pour nous, ô Mère, par ton intercession, que les fruits de cette Année ne soient pas perdus, et que les germes de grâce se développent jusqu’à la pleine mesure de la sainteté, à laquelle nous sommes tous appelés.

3 Aujourd’hui, nous voulons te confier l’avenir qui nous attend, te demandant de nous accompagner sur le chemin. Nous sommes les hommes et les femmes d’une époque extraordinaire, aussi exaltante que riche de contradictions. Aujourd’hui, l’humanité possède des moyens de puissance inouïe: elle peut faire de ce monde un jardin, ou le réduire à un amas de cendres. Elle a acquis des capacités extraordinaires d’intervention sur les sources mêmes de la vie: elle peut en user pour le bien, dans le cadre de la loi morale, ou bien céder à l’orgueil aveugle d’une science qui n’accepte pas de limite, au point de bafouer le respect dû à tout être humain. Aujourd’hui plus que jamais, l’humanité est à une croisée de chemins. Et, une fois encore, le salut est entièrement et seulement, ô Vierge Sainte, dans ton Fils Jésus.

4 C’est pourquoi, ô Mère, comme l’Apôtre Jean, nous voulons te recevoir chez nous (cf. Jn 19, 27), pour que tu nous apprennes à nous conformer à ton Fils. «Femme, voici tes fils!» Nous sommes ici, devant toi, pour confier à tes soins maternels nous-mêmes, l’Église, le monde entier. Implore pour nous ton Fils bien-aimé, afin qu’il nous donne en abondance l’Esprit Saint, l’Esprit de vérité qui est source de vie. Accueille-le pour nous et avec nous, comme au temps de la première communauté de Jérusalem, rassemblée autour de toi le jour de la Pentecôte (cf. Ac 1, 14). Que l’Esprit ouvre les cœurs à la justice et à l’amour, qu’il conduise les personnes et les nations à la compréhension réciproque et à une ferme volonté de paix. Nous te confions tous les hommes, à commencer par les plus faibles: les enfants non encore venus au jour et ceux qui sont nés dans des conditions de pauvreté et de souffrance, les jeunes à la recherche de sens, les personnes privées de travail et celles qui sont éprouvées par la faim et la maladie. Nous te confions les familles désagrégées, les personnes âgées privées d’assistance et tous ceux qui sont seuls et sans espérance.

5 Ô Mère, Toi qui connais les souffrances et les espérances de l’Église et du monde, assiste tes enfants dans les épreuves quotidiennes que la vie réserve à chacun et fais que, grâce aux efforts de tous, les ténèbres ne l’emportent pas sur la lumière. À toi, aurore du salut, nous confions notre marche dans le nouveau millénaire, afin que, sous ta conduite, tous les hommes découvrent le Christ, lumière du monde et unique Sauveur, qui règne avec le Père et l’Esprit Saint pour les siècles des siècles. Amen.

Sebastiano del Piombo (1535-1540), Christ Carrying the Cross

5 septembre, 2016

Sebastiano del Piombo (1535-1540), Christ Carrying the Cross dans images sacrée Piombo_Sebastiano_del_Christ_Carrying_the_Cross

http://www.wood-database.com/most-valuable-wood/

HOMÉLIE DU 23E DIMANCHE ORDINAIRE C

5 septembre, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 23E DIMANCHE ORDINAIRE C

Sg 9, 13-18 ; Phm 9b-10, 12-17 ; Lc 14, 25-33

« Que votre travail à tous deux soit béni sans que les soucis vous accablent, sans que le bonheur vous égare loin de Dieu ». Un souhait adressé bien souvent aux jeunes époux dans la bénédiction qui clôture la célébration du mariage. Ce n’est pas une raison pour se méfier du bonheur tellement désirable et légitime. Mais il est vrai que la félicité enivre. Elle peut aveugler, faire perdre la tête et embrouiller singulièrement la hiérarchie des valeurs. Qui nage dans le bien-être se croit aisément au paradis. Le ciel sur la terre ! Au risque d’oublier le véritable sens de la vie et de miser sur des choses passagères au lieu d’investir dans l’impérissable. Un manque de sagesse. La solution n’est pas de craindre ou de fuir le bonheur, mais bien de ne pas se tromper de béatitudes. Celles que nous offre et nous garantit Jésus de Nazareth sont incontestablement les plus surprenantes mais aussi les plus parfaites et les plus sûres. L’expérience ici contredit la raison. Il est vrai que la maladie, la menace d’un cataclysme, la proximité de la mort, peuvent nous rendre brusquement plus lucides. L’existence alors s’éclaire d’une lumière nouvelle. Les vanités du monde paraissent bien dérisoires. Les fortunes amassées désormais inutiles. C’est déjà l’heure de présenter le bilan et de rendre compte de sa gérance. De tous temps, des mouvements religieux ont brandi la menace de la proximité de la fin des temps pour sortir de l’indifférence, secouer la torpeur des croyants, et les inviter à une salutaire conversion. C’est un chemin pour trouver ou retrouver la sagesse qui est l’intelligence de la foi. On imagine aisément les premiers prédicateurs de l’Evangile, semant la Bonne Nouvelle de Jésus, chargés des riches promesses de libération et de justice, de bonheur et de paix… « Qui croira et sera baptisé sera sauvé » ! Mais le temps presse, car le Ressuscité va revenir. Il est proche. Tout proche… Cela vaut-il encore la peine de travailler et de se marier, d’acheter et de vendre, de bâtir et d’engendrer ? C’est l’heure du radicalisme évangélique. Tout « mépriser », tout quitter, père, mère, femme et enfant, et même rechercher le martyre pour être digne d’être reconnu comme disciple par celui qui vient. Aujourd’hui, pour exorciser nos peurs et remettre toujours à demain d’indispensables conversions, nous sourions de la simplicité naïve des premiers chrétiens, et nous laissons aux « moines et moniales » le monopole du renoncement à tous les biens et le soin de préférer le Christ à leurs familles et même à leur propre vie. Ne sommes-nous pas les vrais naïfs ? Si la fin du monde n’est pas nécessairement pour cette année, et si le Christ n’a pas révélé son retour pour l’an prochain, notre rendez-vous avec la mort, c’est-à-dire aussi avec Lui, n’est pas nécessairement très éloigné. Et la mort n’est-elle pas pour chacun la fin d’un monde ? Naïveté encore, dangereuse et aveugle, d’imaginer que les renoncements et préférences évoqués par Luc ne s’adressent qu’à quelques rares volontaires. C’est à la foule que Jésus les propose. Et ce ne sont pas de simples conseils qu’il lui a offerts. Il s’agit bien de conditions nécessaires et indispensables pour être son disciple et se réclamer de lui. Ces exigences peuvent paraître sévères et même inhumaines. C’est en réalité le prix de tout amour véritable. Quels que soient les termes utilisés, préférer, sacrifier, renoncer… Il s’agit toujours et en toute circonstance de chercher et de respecter les priorités de la route que Dieu nous propose pour bâtir et atteindre le royaume. C’est se détourner des chemins sans issue, même s’ils paraissent bordés de roses sans épines. C’est purifier constamment notre cœur et notre regard. C’est investir ses talents et ses énergies dans l’entreprise du prophète de Nazareth et vivre de son esprit dans le monde ou dans le cloître, la ville ou le désert, la pauvreté ou la richesse, la santé ou la maladie, la famille selon la chair ou celle selon l’esprit. Une sagesse qui contredit celle du monde, mais suscite d’inébranlables bienheureux. Chaque eucharistie nous donne l’occasion de nous asseoir pour bien vérifier si nous voulons prendre les moyens nécessaires pour être vraiment les disciples du Christ, et pas seulement une foule qui admire, qui prie, qui chante et qui applaudit.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008

123