Archive pour le 24 septembre, 2016

PAPE FRANÇOIS – L’HOMME RICHE ET DU PAUVRE LAZARE.

24 septembre, 2016

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/audiences/2016/documents/papa-francesco_20160518_udienza-generale.html

PAPE FRANÇOIS – L’HOMME RICHE ET DU PAUVRE LAZARE.

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 18 mai 2016

Chers frères et sœurs, bonjour !

Je désire m’arrêter aujourd’hui avec vous sur la parabole de l’homme riche et du pauvre Lazare. La vie de ces deux personnes semble se dérouler sur des rails parallèles: leurs conditions de vie sont opposées et ne sont pas entièrement communicantes. Le portail de la maison du riche est toujours fermé au pauvre, qui gît dehors, en cherchant à manger quelques restes de la table du riche. Celui-ci porte des vêtements de luxe, alors que Lazare est couvert de plaies ; le riche fait chaque jour de somptueux banquets, alors que Lazare meurt de faim. Seuls les chiens prennent soin de lui et viennent lécher ses plaies. Cette scène rappelle le dur reproche du Fils de l’homme lors du Jugement dernier : « Car j’ai eu faim et vous ne m’avez pas donné à manger, j’ai eu soif et vous ne m’avez pas donné à boire, j’étais [...] nu et vous ne m’avez pas vêtu (Mt 25, 42-43). Lazare représente bien le cri silencieux des pauvres de tous les temps et la contradiction d’un monde dans lequel d’immenses richesses et ressources sont entre les mains de quelques personnes. Jésus dit qu’un jour, cet homme riche mourut : les pauvres et les riches meurent, ils ont le même destin, comme nous tous, il n’y a pas d’exception à cela. Et alors cet homme s’adressa à Abraham en le suppliant avec le nom de « père » (vv. 24.27). Il revendique donc d’être son fils, appartenant au peuple de Dieu. Pourtant, pendant sa vie, il n’a montré aucune considération envers Dieu, il a au contraire fait de lui-même le centre de tout, enfermé dans son monde de luxe et de gaspillage. Excluant Lazare, il n’a aucunement tenu compte ni du Seigneur, ni de sa loi. Ignorer le pauvre est mépriser Dieu ! Nous devons bien nous rappeler de cela : ignorer le pauvre est mépriser Dieu. On doit remarquer un détail dans la parabole : le riche n’a pas de nom, mais ils est seulement appelé par un adjectif : « le riche » ; alors que celui du pauvre est répété cinq fois et « Lazare » signifie « Dieu aide ». Lazare, qui gît devant la porte, est un rappel vivant fait au riche, pour se souvenir de Dieu, mais le riche n’écoute pas ce rappel. Il sera donc condamné, non pour ses richesses, mais pour avoir été incapable de sentir de la compassion à l’égard de Lazare et de le secourir. Dans la deuxième partie de la parabole, nous retrouvons Lazare et le riche après leur mort (vv. 22-31). dans l’au-delà, la situation s’est retournée : le pauvre Lazare est emporté par les anges au ciel auprès d’Abraham, le riche est en revanche précipité dans les tourments. Alors le riche « lève les yeux et voit de loin Abraham, et Lazare en son sein ». Il lui semble voir Lazare pour la première fois, mais ses paroles le trahissent : « Père Abaraham — dit-il — aie pitié de moi et envoie Lazare tremper dans l’eau le bout de son doigt pour me rafraîchir la langue, car je suis tourmenté dans cette flamme ». À présent, le riche reconnaît Lazare et lui demande de l’aide, alors que lorsqu’il était en vie, il faisait semblant de ne pas le voir. — Combien de fois de nombreuses personnes font semblant de ne pas voir les pauvres! Pour eux, les pauvres n’existent pas —. Auparavant, il lui refusait jusqu’aux restes de sa table, et à présent, il voudrait qu’il lui apporte à boire! Il croit pouvoir encore s’arroger des droits en raison de sa précédente condition sociale. Déclarant qu’il est impossible d’exaucer sa requête, Abraham en personne offre la clé de tout le récit : il explique que les biens et les maux ont été distribués de manière à compenser l’injustice terrestre, et la porte qui séparait le riche du pauvre pendant leur vie s’est transformée en un « grand abîme ». Tant que Lazare gisait devant sa maison, il existait la possibilité du salut pour le riche, ouvrir la porte, aider Lazare, mais à présent que tous les deux sont morts, la situation est devenue irréparable. Dieu n’est jamais appelé directement en cause, mais la parabole met clairement en garde: la miséricorde de Dieu envers nous est liée à notre miséricorde envers notre prochain: quand celle-ci manque, l’autre non plus ne trouve pas de place dans notre cœur fermé, elle ne peut pas entrer. Si je n’ouvre pas tout grand la porte de mon cœur au pauvre, cette porte reste fermée. À Dieu aussi. Et cela est terrible. À ce moment-là, le riche pense à ses frères, qui risquent de finir de la même façon, et il demande que Lazare puisse retourner dans le monde pour les admonester. Mais Abraham réplique : « Ils ont Moïse et les prophètes, qu’ils les écoutent ». Pour nous convertir, nous ne devons pas attendre des événements prodigieux; mais ouvrir notre cœur à la parole de Dieu, qui nous appelle à aimer Dieu et notre prochain. La Parole de Dieu peut faire revivre un cœur desséché et le guérir de sa cécité. Le riche connaissait la Parole de Dieu, mais il ne l’a pas laissée entrer dans son cœur, il ne l’a pas écoutée, il a donc été incapable d’ouvrir les yeux et d’avoir de la compassion pour le pauvre. Aucun messager et aucun message ne pourront remplacer les pauvres que nous rencontrons sur notre chemin, car en eux, c’est Jésus lui-même qui vient à notre rencontre : « Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40), dit Jésus. Ainsi, dans le retournement des destins que la parabole décrit est caché le mystère de notre salut, dans lequel Jésus unit la pauvreté à la miséricorde. Chers frères et sœurs, en écoutant cet Évangile, nous tous, avec les pauvres de la terre, nous pouvons chanter avec Marie : « Il a renversé les potentats de leurs trônes et élevé les humbles, il a comblé de biens les affamés et renvoyé les riches les mains vides » (Lc 1, 52-53).

Rich man and Lazarus

24 septembre, 2016

Rich man and Lazarus dans images sacrée Fedor_Bronnikov_007

https://en.wikipedia.org/wiki/Rich_man_and_Lazarus

HOMÉLIE DU 26E DIMANCHE ORDINAIRE C

24 septembre, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 26E DIMANCHE ORDINAIRE C

Am 6, 1-7 ; 1 Tm 6, 11-16 ; Lc 16, 19-31

Il est intéressant de constater que les actualités fournies par la presse sont souvent aussi des actualités de l’Evangile. Ainsi, dimanche dernier la première lecture nous racontait que, huit siècles avant Jésus Christ, Monsieur Amos, prophète indépendant, dénonçait le très prospère royaume d’Israël. Pourquoi ? Parce que, derrière une façade brillante et des fêtes religieuses imposantes, il avait découvert un monde d’injustice et d’exploitation des plus pauvres. Ce qui restait d’actualité au temps de Jésus. D’où, cet avertissement évangélique : « Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’Argent ». Il y a quelques années, dans un quotidien, un compositeur de chanson titrait son article :  » L’argent n’a pas d’odeur… « . Et quelques pages plus loin, le programme TV annonçait une émission consacrée à une nation « pourrie par le fric » et affirmait que « la misère et la faim sont une prison où plus d’un milliard de femmes, d’hommes et d’enfants consument leur existence ». Ce dimanche, Monsieur Amos, gardien de gros bétail, un personnage aisé, et le Docteur Luc, évangéliste de surcroît, viennent nous secouer et nous interpeller pour les mêmes raisons. Ne serions-nous pas plus ou moins esclaves de l’argent ? ou tout simplement trop peu attentifs ou trop peu soucieux de bien le gérer selon l’esprit de l’évangile ? D’où, une parabole, c’est-à-dire une histoire inventée, mais à partir de faits réels tirés de l’actualité. Une actualité qui est de toutes les époques. D’un côté, un riche, qui peut aussi être un pays tout entier, et qui n’est pas qualifié de mauvais riche. Tout simplement un riche anonyme. Il vit dans un certain luxe. Ce qui n’est pas interdit. Il appartient à une famille qui « possède des biens », et il a cinq frères bien dans leurs papiers. Cet homme, sans doute élégant et fin gourmet, était même un croyant, pratiquant fidèle et fier de l’être. Un homme comblé, parmi beaucoup d’autres. Jésus ne vise donc personne en particulier. L’autre personnage, autre nation : Lazare. On sort de l’anonymat. Mais c’est un personnage fictif qui signifie « Dieu a aidé ». Tout un symbole ! Mais Lazare est d’un autre monde, là où l’on manque de tout, y compris du nécessaire et même de l’indispensable. Tout comme cette femme indienne, de la catégorie des intouchables, qui a vendu son bébé pour 130 dollars après avoir vu son autre fils de deux ans mourir de malnutrition. L’argent de la vente a servi à éponger les dettes de la famille et à acheter de la nourriture. Le riche n’a rien refusé à Lazare, il ne l’a pas chassé. Ce qui n’est pas toujours le cas. Mais il ne l’a même pas vu, dirait-on, comme s’il était aveugle et inconscient. Il y a comme un mur entre les deux, ou un grand abîme apparemment infranchissable. Pourtant, l’homme comblé, croyant, pratiquant, qui plus loin interpelle son père Abraham et qui se préoccupe avec beaucoup de cœur de ses cinq frères, aurait dû savoir que la loi de l’Alliance, dont il se réclame, et même aujourd’hui celle des droits et devoirs de la personne humaine, demande précisément de « rompre les chaînes injustes…, de partager le pain avec l’affamé, d’héberger les pauvres sans abri, de vêtir celui qui est nu ». Ce que les prophètes n’ont cessé de répéter au cours des siècles. Or, cet habitué du Temple est resté sourd à la Parole. Tout comme ses frères qui multipliaient sans doute les pratiques religieuses, se passionnaient pour les visions et espéraient des miracles, mais délaissaient la parole prophétique des Ecritures qui aurait pu les éclairer et les convertir. Bien sûr, à l’époque, les croyants étaient persuadés que les richesses étaient signes de la bienveillance de Dieu à leur égard. Une sorte de récompense pour bonne conduite dans l’observance de la Loi de Moïse… Mais la Loi de Moïse précisait déjà : « S’il y a chez toi un indigent… tu ne raidiras pas ton cœur et tu ne fermeras pas ta main devant ton frère indigent… Je te le commande : tu devras ouvrir ta main pour ton frère, pour ton pauvre, pour ton indigent dans ton pays » (Dt 15, 7-11). Or, aujourd’hui, tout a pris des dimensions planétaires, y compris la pauvreté, la misère, l’exclusion, le chômage. Les Lazare sont légion. Et ils doivent se contenter des miettes de nos sociétés dites d’abondance. Il en est même accroupis le long de notre table, comme le disait déjà le Père Lebret il y a plus de cinquante ans. Aujourd’hui, ajoutait-il, Lazare, c’est la majorité de l’humanité, et il a beaucoup d’enfants. Il va bientôt devenir 80 ou 90 % de la population du monde. Une menace pour notre paix et notre sécurité. Or, ce qu’il attend, c’est « de la compréhension et de l’amour ». Il nous appartient donc de faire, à tous les niveaux, un usage biblique, évangélique, de toutes nos richesses, y compris celles du cœur, de l’intelligence et de l’imagination. Elles nous pousseront à l’initiative, si modeste soit-elle, de manière à pouvoir « inviter des pauvres à notre table ». C’est-à-dire la table de la connaissance, la table de la culture, celle du progrès et du développement, celle des soins de santé et de la dignité respectée, tout comme la table des échanges commerciaux.

N’attendons pas demain pour mieux servir Dieu en nos frères et sœurs éprouvés comme Lazare.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008