Archive pour juin, 2016

OUVRIR LA PORTE DE LA CHAMBRE…

13 juin, 2016

http://www.garriguesetsentiers.org/2015/03/ouvrir-la-porte-de-la-chambre.html

OUVRIR LA PORTE DE LA CHAMBRE…

Publié le 25 mars 2015 par Garrigues et Sentiers

Une réponse à ne pas savoir demeurer en repos dans une chambre Nous n’en sommes plus aujourd’hui à savoir demeurer en repos dans une chambre. Il est nécessaire d’ouvrir la porte de sa chambre sur le monde qui s’offre à nous non pas sur ce qu’il a de violent mais sur ce qu’il peut nous apporter de plus pour compléter notre paix intérieure. Jésus n’est pas un spécialiste de l’au-delà et c’est encore moins la spécialité de l’Institution ecclésiale. Nous répétons le Credo comme le bon écolier ses tables de multiplication mais à part « a été crucifié, est mort et a été enseveli… le troisième jour est ressuscité » et « je crois à la Vie Éternelle », le reste laisse fort à désirer ! Quand Jésus parle du Royaume de Dieu dans Marc 4,30 il se demande à quoi le comparer : « Comment allons-nous comparer le Royaume de Dieu ? ». Le chapitre 13 de Matthieu ne contient pas moins de 7 paraboles sur les possibilités de comparaison. On pense tout de suite aux 7 jours de la Création du monde, bien sûr, ce qui signifie que ce Royaume de Dieu naît dès cette terre en nous, grandit en nous et arrive à sa maturité en nous. Il n’est pas tenu compte du passage d’état de vie terrestre à celui de vie éternelle. Chacun de nous est invité à le rechercher en soi et à en vivre dès cette vie. Pour l’atteindre, c’est grâce aux Béatitudes et plusieurs autres textes d’Évangile incitant à plus d’humanité envers les plus pauvres que nous savons vers quoi il faut se diriger. Mais cet idéal de vie semble quasi inatteignable car nous pouvons arriver à vivre une des Béatitudes mais jamais toutes et encore la vivons-nous mal, d’où le petit nombre d’élus ; mais il y a beaucoup d’appelés et Dieu est patient. Sa patience va bien au-delà de nos quelques décennies d’existence humaine. Ces appelés continueront à être certainement appelés dans leur après-vie puisqu’il n’est pas tenu compte de la mort biologique et là ils entendront peut-être mieux l’appel que sur la terre avec toutes ses sollicitations matérielles. Il y a une autre parole de Jésus : « Vous aurez toujours des pauvres » qui veut dire qu’aucun gouvernement non plus, même le plus démocratique qui soit, ne pourra jamais atteindre l’idéal Évangélique même en traînant le socle des Droits de l’Homme derrière lui. Tout au plus pouvons-nous, nous tous, approcher au plus près de ces valeurs. Ainsi le disciple du Christ aura toujours à mener une action contre la pauvreté. Jésus termine son discours parabolique par Matthieu 13,49 « À la fin du monde les Anges se présenteront et sépareront les méchants d’entre les justes pour les jeter dans la fournaise ardente ». Jésus déjà se trompe sur la fin du monde qu’il croit devoir arriver dès sa génération. Il est clair aussi qu’il ignore tout de ce qui se passera à la fin de la vie de chacun. S’il y a plusieurs demeures dans le Royaume de Dieu, il y a une vie éternelle différente pour chaque « juste ». Mais qu’est-ce que la fournaise ardente ? De nombreuses fois, après Jean-Baptiste dans un premier temps, Jésus évoque le feu, la fournaise pour les méchants ! Bien sûr il pressent qu’un être humain qui a refusé sciemment l’Amour chaque jour de sa vie et a fait de celle-ci un chemin de haine et de violence ne pourra pas accéder à ce Royaume de Dieu. Mais alors que devient-il ? Jésus n’en sait rien sauf que le traitement sera le même pour tous les méchants Matthieu 13,49 : « là où il y a des pleurs et des grincements de dents ». Il ira dans un endroit qui ressemble fort à la terre où il y sera « jeté » donc il perdra tout ce qui faisait l’essence de son être, toute sa personnalité. Mais si cette personnalité n’était faite que de violence et de haine il vaut mieux pour lui qu’il la perde pour repartir à zéro. Dans la parabole de Lazare et du riche Luc 16,19-30 nous retrouvons cette explication de la séparation du bien et du mal plus détaillée et surtout celle-ci ne se fait plus à la fin des temps mais à la fin de la vie de chacun. Luc a dû vivre après la génération de Jésus pour s’apercevoir qu’il n’y avait pas eu de fin du monde de son temps et il n’en parle pas. Il n’est plus question de fournaise mais de l’Hadès qui est le séjour des morts. Dans Luc 16,26 il est question de cet abîme entre nous (Abraham et Lazare : le Paradis) et vous (le riche et l’Hadès). Cet abîme me semble fort être celui qui existe entre cette vie sur terre et la Vie Éternelle. N’est-ce pas la terre le séjour des morts ? Toutes nos morts, comme la mort, nous ne les connaissons que sur terre. C’est aussi sur terre que commence l’éveil là où le riche commence à évoluer et à penser aux autres, ses frères. N’avons-nous jamais réfléchi à cette parole bizarre de Jésus (toujours Luc 9,60) : « Suis moi, laisse les morts enterrer leurs morts mais toi va annoncer le Royaume de Dieu ». Nous sommes parmi ces morts complices même de ces morts et la seule façon de nous sortir de toutes nos morts et de la mort elle-même c’est de suivre Jésus, c’est-à-dire de tenter de vivre selon son message d’Amour. Jésus est le chemin, le meilleur sans doute pour atteindre le Royaume de Dieu mais un chemin parmi d’autres. Seul l’Esprit-Saint, l’Esprit d’Amour peut dire « Je suis la Vérité » car il n’est pas une personne, contrairement à son statut dans la Trinité. On ne sait trop comment le qualifier. Il est semblable à la fois à une atmosphère et à un horizon chargés d’amour, la Parole Evangélique n’étant qu’une composante de cette « Vérité » que personne ne peut détenir et surtout pas l’Institution ecclésiale. Celle-ci, quand elle bute sur un fait « religieux », emploie le mot mystère alors que de sa part ce n’est qu’une ignorance. Cet Esprit-Saint, cet Esprit d’Amour, nous fait généreusement la grâce de nous offrir plusieurs religions dans le monde y compris le Bouddhisme et l’Hindouisme et chacune de ces religions comporte une ou plusieurs vérités. Ces deux dernières religions sont très différentes des religions monothéistes. Pourtant toutes ces religions sont complémentaires. La première complémentarité qui nous saute aux yeux c’est celle existant entre le Judaïsme et le Christianisme car le second testament ne va pas sans le premier et les juifs commencent depuis un certain temps à se pencher sur l’existence de ce Jésus qui était juif comme eux, cependant sans le reconnaître comme Messie. Pour les Musulmans Jésus était un prophète et non le Fils de Dieu mais ils ne nient pas l’existence de Jésus, ils refusent simplement sa mort sur une croix. Et pour nous chrétiens Jésus était Fils de Dieu mais il était aussi prophète et n’a-t-il fait aucune erreur dans ses visions ? Donc il y a pour nous un apport des autres religions. J’en viens à une complémentarité plus délicate Jean 5,29 « Et sortiront ceux qui auront fait le bien pour une résurrection de Vie, ceux qui auront fait le mal pour une résurrection de jugement ». Qu’est ce qu’une résurrection de jugement ou résurrection de mort pour l’opposer à celle « de Vie » ? Je ne vais pas m’étendre là-dessus car ce n’est pas notre culture. Mais quand le Dalaï-lama dit : « Cette vie est comme une école où les écoliers passent d’une classe à une autre, la deuxième classe étant supérieure à la première. Si l’un de ces écoliers a mal travaillé il devra redoubler. Il en va de même pour les existences sur terre ». Les redoublements étant minoritaires, je ne suis pas loin d’être de son avis. Jésus est bien venu s’incarner sur terre alors qu’il était « auprès du Père ». Pourtant Lui n’avait nul besoin d’un redoublement mais l’Esprit d’Amour fait sans doute à certains élus la grâce de l’offre du choix de revenir sur terre pour accomplir une mission. C’est là que se trouve la complémentarité et non l’opposition avec le Bouddhisme et l’Hindouisme. À nous chrétiens il nous manquera toujours une vérité : la vérité des autres religions car nous ne voulons pas envisager une vérité supplémentaire à la nôtre un peu par orgueil et surtout en pensant détenir la « Vérité » dans sa totalité. Pourtant si Jésus ne savait pas tout, s’il s’est trompé sur la fin du monde et si de plus les récits sur la Résurrection ne sont que symboliques comme il est à prévoir, l’Esprit-Saint veut peut-être nous inviter à regarder plus loin dans l’esprit de notre temps. L’existence de plusieurs religions n’est pas un hasard. Jésus dit à ses apôtres qu’il leur enverra un autre défenseur mais il se trouve que le Christianisme n’a pas le monopole de l’Esprit-Saint. Il a celui de Jésus-Christ. Quant à l’Esprit-Saint celui-ci se répand aussi dans les autres religions et leurs voies de salut. Il faut ouvrir la porte de notre chambre intérieure et regarder un peu dans celle du voisin. L’Esprit-Saint c’est aussi l’infini de l’Amour qui peut venir habiter un seul être humain sur cette terre. Quand aux élus pas forcément chrétiens ou croyants c’est peut-être aussi une mission qui les attend après leur mort au sein même du Royaume de Dieu.

Christiane Guès

BENOÎT XVI – ANTOINE DE PADOUE

13 juin, 2016

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100210.html

BENOÎT XVI – ANTOINE DE PADOUE

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 10 février 2010

Chers frères et sœurs,

Il y a deux semaines, j’ai présenté la figure de saint François d’Assise. Ce matin, je voudrais parler d’un autre saint, appartenant à la première génération des Frères mineurs: Antoine de Padoue ou, comme il est également appelé, de Lisbonne, en référence à sa ville natale. Il s’agit de l’un des saints les plus populaires de toute l’Eglise catholique, vénéré non seulement à Padoue, où s’élève une splendide basilique qui conserve sa dépouille mortelle, mais dans le monde entier. Les images et les statues qui le représentent avec le lys, symbole de sa pureté, ou avec l’Enfant Jésus dans les bras, en souvenir d’une apparition miraculeuse mentionnée par certaines sources littéraires, sont chères aux fidèles. Antoine a contribué de façon significative au développement de la spiritualité franciscaine, avec ses dons marqués d’intelligence, d’équilibre, de zèle apostolique et principalement de ferveur mystique. Il naquit à Lisbonne dans une famille noble, aux alentours de 1195, et fut baptisé sous le nom de Fernando. Il entra chez les chanoines qui suivaient la Règle monastique de saint Augustin, d’abord dans le monastère Saint-Vincent à Lisbonne, et successivement dans celui de la Sainte-Croix à Coïmbra, centre culturel de grande renommée au Portugal. Il se consacra avec intérêt et sollicitude à l’étude de la Bible et des Pères de l’Eglise, acquérant une science théologique qu’il mit à profit dans son activité d’enseignement et de prédication. A Coïmbra eut lieu l’épisode qui marqua un tournant décisif dans sa vie: c’est là qu’en 1220, furent exposés les reliques des cinq premiers missionnaires franciscains, qui s’étaient rendus au Maroc, où ils avaient subi le martyre. Leur vie suscita chez le jeune Fernando le désir de les imiter et d’avancer sur le chemin de la perfection chrétienne: il demanda alors de quitter les chanoines augustins et de devenir Frère mineur. Sa requête fut acceptée et, ayant pris le nom d’Antoine, il partit lui aussi pour le Maroc, mais la Providence divine en décida autrement. A la suite d’une maladie, il fut contraint de rentrer en Italie et, en 1221, participa au célèbre « Chapitre des nattes » à Assise, où il rencontra également saint François. Par la suite, il vécut pendant quelques temps caché de la manière la plus totale dans un couvent près de Forlì, au nord de l’Italie, où le Seigneur l’appela à une autre mission. Invité, dans des conditions fortuites, à prêcher à l’occasion d’une ordination sacerdotale, il se révéla être doté d’une telle science et éloquence que ses supérieurs le destinèrent à la prédication. C’est ainsi que commença en Italie et en France une activité apostolique si intense et efficace qu’elle conduisit de nombreuses personnes qui s’étaient détachées de l’Eglise à revenir sur leurs pas. Antoine fut également parmi les premiers maîtres de théologie des Frères mineurs, sinon le premier. Il commença son enseignement à Bologne, avec la bénédiction de saint François, qui, reconnaissant les vertus d’Antoine, lui envoya une brève lettre qui commençait par ces paroles: « Il me plaît que tu enseignes la théologie aux frères ». Antoine posa les bases de la théologie franciscaine qui, cultivée par d’autres éminentes figures de penseurs, devait connaître son apogée avec saint Bonaventure de Bagnoregio et le bienheureux Duns Scot. Devenu supérieur provincial des Frères mineurs du nord de l’Italie, il poursuivit son ministère de la prédication, l’alternant avec des charges de gouvernement. Ayant conclu la charge de provincial, il se retira près de Padoue, où il s’était déjà rendu trois fois. A peine un an après, il mourut aux portes de la Ville, le 13 juin 1231. Padoue, qui l’avait accueilli avec affection et vénération pendant sa vie, lui rendit pour toujours honneur et dévotion. Le Pape Grégoire IX lui-même, qui, après l’avoir écouté prêcher, l’avait défini « Arche du Testament », le canonisa un an seulement après sa mort, en 1232, notamment à la suite de miracles survenus par son intercession. Au cours de la dernière période de sa vie, Antoine écrivit deux cycles de « Sermons », intitulés respectivement « Sermons du dimanche » et « Sermons sur les saints », destinés aux prêcheurs et aux enseignants des études théologiques de l’Ordre franciscain. Dans ces Sermons, il commente les textes de l’Ecriture présentés par la Liturgie, en utilisant l’interprétation patristique et médiévale des quatre sens, le sens littéral ou historique, le sens allégorique ou christologique, le sens tropologique ou moral, et le sens anagogique, qui conduit vers la vie éternelle. Aujourd’hui, on redécouvre que ces sens sont des dimensions de l’unique sens de l’Ecriture Sainte et qu’il est juste d’interpréter l’Ecriture Sainte en recherchant les quatre dimensions de sa parole. Ces Sermons de saint Antoine sont des textes théologiques et homilétiques, qui rappellent la prédication vivante, dans lesquels Antoine propose un véritable itinéraire de vie chrétienne. La richesse d’enseignements spirituels contenue dans les « Sermons » est telle que le vénérable Pape Pie XII, en 1946, proclama Antoine Docteur de l’Eglise, lui attribuant le titre de « Docteur évangélique », car de ces écrits émanent la fraîcheur et la beauté de l’Evangile; aujourd’hui encore, nous pouvons les lire avec un grand bénéfice spirituel. Dans ces Sermons, saint Antoine parle de la prière comme d’une relation d’amour, qui pousse l’homme à un dialogue affectueux avec le Seigneur, créant une joie ineffable, qui enveloppe doucement l’âme en prière. Antoine nous rappelle que la prière a besoin d’une atmosphère de silence, qui ne coïncide pas avec le détachement du bruit extérieur, mais qui est une expérience intérieure, qui vise à éliminer les distractions provoquées par les préoccupations de l’âme, en créant le silence dans l’âme elle-même. Selon l’enseignement de cet éminent Docteur franciscain, la prière s’articule autour de quatre attitudes indispensables, qui, dans le latin d’Antoine, sont définies ainsi: obsecratio, oratio, postulatio, gratiarum actio. Nous pourrions les traduire de la façon suivante: ouvrir avec confiance son cœur à Dieu; tel est le premier pas de la prière: pas simplement saisir une parole, mais ouvrir son cœur à la présence de Dieu; puis s’entretenir affectueusement avec Lui, en le voyant présent avec moi; et – chose très naturelle – lui présenter nos besoins; enfin, le louer et lui rendre grâce. Dans cet enseignement de saint Antoine sur la prière, nous saisissons l’un des traits spécifiques de la théologie franciscaine, dont il a été l’initiateur, c’est-à-dire le rôle assigné à l’amour divin, qui entre dans la sphère affective, de la volonté, du cœur et qui est également la source d’où jaillit une connaissance spirituelle, qui dépasse toute connaissance. En effet, lorsque nous aimons, nous connaissons. Antoine écrit encore: « La charité est l’âme de la foi, elle la rend vivante; sans l’amour, la foi meurt » (Sermones, Dominicales et Festivi, II, Messaggero, Padoue 1979, p. 37). Seule une âme qui prie peut accomplir des progrès dans la vie spirituelle: tel est l’objet privilégié de la prédication de saint Antoine. Il connaît bien les défauts de la nature humaine, notre tendance à tomber dans le péché, c’est pourquoi il exhorte continuellement à combattre la tendance à l’avidité, à l’orgueil, à l’impureté, et à pratiquer au contraire les vertus de la pauvreté et de la générosité, de l’humilité et de l’obéissance, de la chasteté et de la pureté. Aux débuts du XIIIe siècle, dans le cadre de la renaissance des villes et du développement du commerce, le nombre de personnes insensibles aux besoins des pauvres augmentait. Pour cette raison, Antoine invite à plusieurs reprises les fidèles à penser à la véritable richesse, celle du cœur, qui rend bons et miséricordieux, fait accumuler des trésors pour le Ciel. « O riches – telle est son exhortation – prenez pour amis… les pauvres, accueillez-les dans vos maisons: ce seront eux, les pauvres, qui vous accueilleront par la suite dans les tabernacles éternels, où résident la beauté de la paix, la confiance de la sécurité, et le calme opulent de l’éternelle satiété » (ibid., n. 29). N’est-ce pas là, chers amis, un enseignement très important aujourd’hui également, alors que la crise financière et les graves déséquilibres économiques appauvrissent de nombreuses personnes et créent des conditions de pauvreté? Dans mon encyclique Caritas in veritate, je rappelle: « Pour fonctionner correctement, l’économie a besoin de l’éthique; non pas d’une éthique quelconque, mais d’une éthique amie de la personne » (n. 45). Antoine, à l’école de François, place toujours le Christ au centre de la vie et de la pensée, de l’action et de la prédication. Il s’agit d’un autre trait typique de la théologie franciscaine: le christocentrisme. Celle-ci contemple volontiers, et invite à contempler les mystères de l’humanité du Seigneur, l’homme Jésus, de manière particulière le mystère de la Nativité, Dieu qui s’est fait Enfant, qui s’est remis entre nos mains: un mystère qui suscite des sentiments d’amour et de gratitude envers la bonté divine. D’une part la Nativité, un point central de l’amour du Christ pour l’humanité, mais également la vision du Crucifié inspire à Antoine des pensées de reconnaissance envers Dieu et d’estime pour la dignité de la personne humaine, de sorte que tous, croyants et non croyants, peuvent trouver dans le crucifié et dans son image une signification qui enrichit la vie. Saint Antoine écrit: « Le Christ, qui est ta vie, est accroché devant toi, pour que tu regardes dans la croix comme dans un miroir. Là tu pourras voir combien tes blessures furent mortelles, aucune médecine n’aurait pu les guérir, si ce n’est celle du sang du Fils de Dieu. Si tu regardes bien, tu pourras te rendre compte à quel point sont grandes ta dignité humaine et ta valeur… En aucun autre lieu l’homme ne peut mieux se rendre compte de ce qu’il vaut, qu’en se regardant dans le miroir de la croix » (Sermones Dominicales et Festivi III, pp. 213-214). En méditant ces paroles nous pouvons mieux comprendre l’importance de l’image du Crucifix pour notre culture, pour notre humanisme né de la foi chrétienne. C’est précisément en regardant le Crucifié que nous voyons, comme le dit saint Antoine, à quel point est grande la dignité humaine et la valeur de l’homme. En aucun autre lieu on ne peut comprendre combien vaut l’homme, pourquoi précisément Dieu nous rend aussi importants, nous voit aussi importants, au point d’être, pour Lui, dignes de sa souffrance; ainsi toute la dignité humaine apparaît dans le miroir du Crucifié et le regard vers Lui est toujours une source de reconnaissance de la dignité humaine. Chers amis, puisse Antoine de Padoue, si vénéré par les fidèles, intercéder pour l’Eglise entière, et surtout pour ceux qui se consacrent à la prédication; prions le Seigneur afin qu’il nous aide à apprendre un peu de cet art de saint Antoine. Que les prédicateurs, en tirant leur inspiration de son exemple, aient soin d’unir une solide et saine doctrine, une piété sincère et fervente, une communication incisive. En cette année sacerdotale, prions afin que les prêtres et les diacres exercent avec sollicitude ce ministère d’annonce et d’actualisation de la Parole de Dieu aux fidèles, en particulier à travers les homélies liturgiques. Que celles-ci soient une présentation efficace de l’éternelle beauté du Christ, précisément comme Antoine le recommandait: « Si tu prêches Jésus, il libère les cœurs durs; si tu l’invoques, il adoucit les tentations amères; si tu penses à lui, il illumine ton cœur; si tu le lis, il comble ton esprit » (Sermones Dominicales et Festivi, p. 59).

Le pécheur pardonné

9 juin, 2016

Le pécheur pardonné dans images sacrée Ges%C3%B9-e-la-peccatrice
http://www.chiesadicefalu.it/?p=2403

BENOÎT XVI – L’HOMME DANS LA PRIÈRE

9 juin, 2016

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/it/audiences/2011/documents/hf_ben-xvi_aud_20110504.html

BENOÎT XVI – L’HOMME DANS LA PRIÈRE

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre

Mercredi 4 mai 2011

Chers frères et sœurs,

Aujourd’hui, je voudrais entamer une nouvelle série de catéchèses. Après les catéchèses sur les Pères de l’Eglise, sur les grands théologiens du Moyen-âge, sur les grandes figures de femmes, je voudrais à présent choisir un thème qui nous tient tous très à cœur: le thème de la prière, de manière spécifique la prière chrétienne, la prière que nous a enseignée Jésus et que continue à nous enseigner l’Eglise. C’est en Jésus en effet que l’homme devient capable de s’approcher de Dieu avec la profondeur et l’intimité du rapport de paternité et de filiation. Avec les premiers disciples, avec une humble confiance, nous nous adressons alors au Maître et nous Lui demandons: «Seigneur, enseigne-nous à prier» (Lc 11, 1). Lors des prochaines catéchèses, en nous approchant de la Sainte Ecriture, de la grande tradition des Pères de l’Eglise, des Maîtres de spiritualité, de la Liturgie, nous voulons apprendre à vivre encore plus intensément notre relation avec le Seigneur, dans une sorte d’«école de prière». Nous savons bien, en effet, que la prière ne doit pas être considérée comme allant de soi: il faut apprendre à prier, comme en acquérant toujours à nouveau cet art; même ceux qui sont très avant dans la vie spirituelle sentent toujours le besoin de se mettre à l’école de Jésus pour apprendre à prier avec authenticité. Nous recevons la première leçon du Seigneur à travers Son exemple. Les Evangiles nous décrivent Jésus en dialogue intime et constant avec le Père: c’est une communion profonde de celui qui est venu dans le monde non pour faire sa volonté, mais celle du Père qui l’a envoyé pour le salut de l’homme. Dans cette première catéchèse, comme introduction, je voudrais proposer quelques exemples de prière présents dans les cultures antiques, pour relever comment, pratiquement toujours et partout celles-ci se sont adressées à Dieu. Je commence par l’ancienne Egypte, par exemple. Ici, un homme aveugle, demandant à la divinité de lui rendre la vue, atteste quelque chose d’universellement humain, qui est la pure et simple prière de requête de la part de qui se trouve dans la souffrance, cet homme prie: «Mon cœur désire te voir… Toi qui m’as fait voir les ténèbres, crée pour moi la lumière. Fais que je te voie! Penche sur moi ton visage aimé» (A. Barucq – F. Daumas, Hymnes et prières de l’Egypte ancienne, Paris 1980). Fais que je te voie; c’est là le cœur de la prière! Dans les religions de la Mésopotamie dominait un sentiment de culpabilité mystérieux et paralysant, mais sans qu’il soit privé pour autant de l’espérance de rachat et de libération de la part de Dieu. Ainsi pouvons-nous apprécier cette supplication de la part d’un croyant de ces anciens cultes, qui résonne ainsi: «Ô Dieu qui es indulgent même pour la faute la plus grave, absous mon péché…. Regarde Seigneur, ton esclave épuisé, et souffle sur lui ta brise: sans attendre pardonne-lui. Allège ta sévère punition. Libéré de mes liens, fais que je recommence à respirer; brise mes chaînes, défaits mes liens» (M.-J. Seux, Hymnes et prières aux Dieux de Babylone et d’Assyrie, Paris 1976). Autant d’expressions qui démontrent comment l’homme, dans sa recherche de Dieu, a eu l’intuition, même confusément, d’un côté de sa faute, de l’autre de l’aspect de la miséricorde et de la bonté divine. Au sein de la religion païenne, dans la Grèce antique, on assiste à une évolution très significative: les prières, tout en continuant d’invoquer l’aide divine pour obtenir la faveur céleste dans toutes les circonstances de la vie quotidienne et pour obtenir des bénéfices matériels, s’orientent progressivement vers les requêtes les plus désintéressées, qui permettent à l’homme croyant d’approfondir sa relation avec Dieu et de devenir meilleur. Par exemple, le grand philosophe Platon cite une prière de son maître, Socrate, considéré à juste titre comme l’un des fondateurs de la pensée occidentale. Socrate priait ainsi: «… donnez-moi la beauté intérieure de l’âme! Quant à l’extérieur, je me contente de celui que j’ai, pourvu qu’il ne soit pas en contradiction avec l’intérieur, que le sage me paraisse riche, et que j’aie seulement autant, d’or qu’un sage peut en supporter, et en employer» (Œuvres i. Phèdre 279c). Il voudrait avant tout avoir une beauté intérieure et être sage, et non pas riche d’argent. Dans ces superbes chefs-d’œuvre de la littérature de tous les temps que sont les tragédies grecques, aujourd’hui encore, après vingt-cinq siècles, lues, méditées et représentées, sont contenues des prières qui expriment le désir de connaître Dieu et d’adorer sa majesté. L’une de celles-ci dit: «Ô toi qui donnes le mouvement à la terre, et qui en même temps résides en elle, qui que tu sois, Jupiter, impénétrable à la vue des mortels, nécessité de la nature, ou intelligence des hommes, je te rends hommage; car, par des voies secrètes, tu gouvernes toutes les choses humaines selon la justice» (Euripide, Les Troyennes, 884-886). Dieu demeure un peu vague et toutefois, l’homme connaît ce Dieu inconnu et prie celui qui guide les destinées de la terre. Chez les Romains également, qui constituèrent ce grand Empire dans lequel naquit et se diffusa en grande partie le christianisme des origines, la prière, même si elle est associée à une conception utilitariste et fondamentalement liée à la demande de protection divine sur la vie de la communauté civile, s’ouvre parfois à des invocations admirables en raison de la ferveur de la piété personnelle, qui se transforme en louange et en action de grâces. En est témoin un auteur de l’Afrique romaine du iie siècle après Jésus Christ, Apulée. Dans ses écrits, il manifeste l’insatisfaction de ses contemporains à l’égard de la religion traditionnelle et le désir d’un rapport plus authentique avec Dieu. Dans son chef-d’œuvre intitulé Les métamorphoses, un croyant s’adresse à une divinité féminine à travers ces paroles: «Divinité sainte, source éternelle de salut, protectrice adorable des mortels, qui leur prodigues dans leurs maux l’affection d’une tendre mère; pas un jour, pas une nuit, pas un moment ne s’écoule qui ne soit marqué par un de tes bienfaits» (Apulée de Madaure, Métamorphoses, xi, 25). Pendant la même période, l’empereur Marc-Aurèle — qui était un philosophe qui réfléchissait sur la condition humaine — affirme la nécessité de prier pour établir une coopération fructueuse entre action divine et action humaine. Il écrit dans ses Souvenirs/Pensées: «Qui te dit que les dieux ne nous aident pas également en ce qui dépend de nous? Commence donc à les prier et tu verras» (Dictionnaire de Spiritualité XII/2, col. 2213). Ce conseil de l’empereur philosophe a été effectivement mis en pratique par d’innombrables générations d’hommes avant le Christ, démontrant ainsi que la vie humaine sans la prière, qui ouvre notre existence au mystère de Dieu, devient privée de sens et de référence. En effet, dans chaque prière s’exprime toujours la vérité de la créature humaine, qui d’une part fait l’expérience de la faiblesse et de l’indigence, et demande donc de l’aide au Ciel, et de l’autre est dotée d’une dignité extraordinaire, car, en se préparant à accueillir la Révélation divine, elle se découvre capable d’entrer en communion avec Dieu. Chers amis, dans ces exemples de prières des différentes époques et civilisations apparaît la conscience que l’être humain a de sa condition de créature et de sa dépendance d’un Autre qui lui est supérieur et source de tout bien. L’homme de tous les temps prie car il ne peut faire à moins de se demander quel est le sens de son existence, qui reste obscur et décourageant, s’il n’est pas mis en relation avec le mystère de Dieu et de son dessein sur le monde. La vie humaine est un mélange de bien et de mal, de souffrance imméritée et de joie et de beauté, qui nous pousse spontanément et irrésistiblement à demander à Dieu cette lumière et cette force qui puisse nous secourir sur la terre et ouvrir une espérance qui aille au-delà des frontières de la mort. Les religions païennes demeurent une invocation qui, de la terre, attend une parole du Ciel. L’un des derniers grands philosophes païens, qui vécut à une époque déjà pleinement chrétienne Proclus de Constantinople, donne voix à cette attente, en disant: «Inconnaissable, personne ne te contient. Tout ce que nous pensons t’appartient. Nos maux et nos biens sont en toi, chacune de nos aspirations dépend de toi, ô Ineffable, que nos âmes sentent présent, en t’élevant un hymne de silence» (Hymnes). Dans les exemples de prière des différentes cultures, que nous avons pris en considération, nous pouvons voir un témoignage de la dimension religieuse et du désir de Dieu inscrit dans le cœur de chaque homme, qui trouvent leur accomplissement et leur pleine expression dans l’ancien et dans le Nouveau Testament. La Révélation, en effet, purifie et porte à sa plénitude l’aspiration originelle de l’homme à Dieu, en lui offrant, dans la prière, la possibilité d’une relation plus profonde avec le père céleste. Au début de notre chemin dans l’«Ecole de la prière» nous voulons alors demander au Seigneur qu’il illumine notre esprit et notre cœur pour que la relation avec Lui dans la prière soit toujours plus intense, affectueuse et constante. Encore une fois, nous lui disons: «Seigneur, apprends-nous à prier» (Lc 11, 1).

 

HOMÉLIE DU 11E DIMANCHE ORDINAIRE C

9 juin, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 11E DIMANCHE ORDINAIRE C

2 S 12, 7-10, 13 ; Ga 2, 16, 19-21 ; Lc 7, 36 – 8, 3 (bref : 7, 36-50)

Aujourd’hui comme au temps de Jésus, bien des croyants les plus convaincus et les plus pieux n’échappent pas toujours à la tentation de se décerner eux-mêmes des prix de vertu et de multiplier les comparaisons flatteuses à leur égard. Au milieu des foules indifférentes, des infidèles et des pécheurs, ne sont-ils pas les fidèles observateurs de la Loi ? L’élite ! La satisfaction d’être en règle avec la Loi rassure et comble les esprits légalistes. Mais, nous rappelle Paul, « ce n’est pas en observant la Loi que l’homme devient juste devant Dieu, mais seulement par la foi en Jésus Christ… Car personne ne devient juste en pratiquant la Loi ». Plus fort encore, c’est précisément la Loi vénérée et observée minutieusement par les plus religieux des Juifs qui les a conduits à s’opposer à Jésus, à l’excommunier, puis à le condamner à mort. De quelle hérésie était-il coupable ? Quel crime avait-il commis ? Il avait prêché et pratiqué la supériorité de l’esprit sur la lettre, celle de la foi sur la Loi. La lettre tue. Elle a tué Jésus et les croyants peuvent continuer à le crucifier et à le faire mourir quand ils restent prisonniers de la rigidité et des étroitesses que secrète la lettre de la Loi. Ce qui sauve, ce qui fait vivre, c’est l’amour de Dieu. C’est ce même amour qui exprime dans la Loi sa radicalité, ses libertés, ses exigences. Mais une Loi qui ne peut être comprise que par la foi, seule capable de transformer des mentalités, de briser les limites de la lettre pour ouvrir le cœur et l’esprit à l’amour. Croyant engagé et pieux, le pharisien présenté par Luc l’était au plus haut point. Mais il était aussi formaliste et donc intransigeant, rivé à la sécurité des tabous et incapable de comprendre et d’évaluer, encore moins d’inventer, un geste d’amour et de miséricorde. Curieux, intrigué à méfiant, le pharisien a invité le jeune prédicateur à sa table sans pour autant se mouiller par un accueil chaleureux. La présence de Jésus rend « l’impure » audacieuse jusqu’à la témérité. Bravant les interdits, elle accable le « pur » de démonstrations surprenantes, voire ambiguës. Quel scandale ! Poli, le maître de maison se tait, mais ses yeux le trahissent. Quel spectacle, en effet, et quel enseignement dans les regards qui se croisent ! Celui de Jésus, chargé d’affection et de respect, de compréhension et de miséricorde. Lui, il a compris l’attitude et les intentions de la femme en pleurs. Elle obtiendra d’ailleurs le pardon espéré, « à cause de son grand amour ». Une femme de foi. Emotion de la pécheresse sentant fixés sur elle les yeux du Maître. Un regard bienveillant, tellement différent de ceux qui d’habitude la poursuivent. Regard du pharisien, froid, sévère et lourd de mépris pour l’indigne créature. Regard à la fois satisfait et réprobateur envers ce prophète qui prouve bien qu’il n’en est pas un. Mais que dira-t-il alors lorsqu’il verra le rabbi Jésus, au mépris des habitudes, usages et traditions, être entouré de femmes-disciples « qu’il avait délivrées d’esprits mauvais et guéries de leurs maladies » ? Un scandale sans nom. Entre-temps, grâce à Dieu, Simon aura compris qu’il ne faut pas juger sur les apparences et le qu’en dira-t-on ? Qu’il ne faut pas non plus dresser des frontières définitives entre les bons et les mauvais, les justes et les infidèles, les dignes et les indignes. N’est-ce pas grâce à la pécheresse aimante et pardonnée que Simon a découvert qu’il était, lui aussi, digne de pardon et appelé à se débarrasser de l’amour de la Loi pour vivre la Loi de l’amour ? Il ne suffit pas de « marcher droit selon la loi » pour être assuré de « marcher droit selon la vérité de l’Evangile ». De même, l’obéissance à « la pratique dominicale » ne prouve pas qu’on adopte pour autant les conséquences de conversion et d’engagement qu’exige l’eucharistie. N’est-il pas surprenant que les « justes » que nous croyons être, avons tant de difficulté pour découvrir et confesser nos péchés envers l’Amour, parce que nous observons commandements et traditions ? Aurions-nous oublié « le regard qui tue, la parole qui frappe comme un coup de poignard, l’indifférence qui raye quelqu’un de la carte, la calomnie qui casse une réputation » (1), alors que la foi engendre « le geste qui sauve, le sourire qui efface l’anonymat, l’attention qui remet à flot », la confiance qui crée, la bienveillance qui épanouit ?

(1) « Peut-on ressusciter ? », A. Reboux-Caubel, Centurion, p 23.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008

PAPE FRANÇOIS – 21. LA MISÉRICORDE HUMBLE PRIÈRE OBTENUE ( CF. LC 18,9-14 )

8 juin, 2016

http://w2.vatican.va/content/francesco/it/audiences/2016/documents/papa-francesco_20160601_udienza-generale.html

PAPE FRANÇOIS – 21. LA MISÉRICORDE HUMBLE PRIÈRE OBTENUE ( CF. LC 18,9-14 )

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 1er juin 2016

Chers frères et sœurs, bonjour !

Mercredi dernier, nous avons écouté la parabole du juge et de la veuve sur la nécessité de prier avec persévérance. Aujourd’hui, avec une autre parabole, Jésus veut nous enseigner quel est l’attitude juste pour prier et invoquer la miséricorde du Père ; comment on doit prier; l’attitude juste pour prier. C’est la parabole du pharisien et du publicain (cf. Lc 18, 9-14). Les deux protagonistes montent au temple pour prier, mais agissent de façons très difféentes, obtenant des résultats opposés. Le pharisien prie et « se tenait debout » (v. 11) et utilise beaucoup de paroles. Sa prière est certes une prière d’action de grâce adressée à Dieu, mais en réalité, c’est un étalage de ses mérites, avec un sentiment de supériorité envers les « autres hommes », qualifiés de « voleurs, injustes, adultères », comme par exemple — et il montre l’autre qui était là — « ce publicain » (v. 11). Mais c’est précisément là qu’est le problème : ce pharisien prie Dieu, mais en vérité il se tourne vers lui-même. Il prie lui-même ! Au lieu d’avoir devant les yeux le Seigneur, il a un miroir. Bien que se trouvant dans le temple, il ne ressent pas la nécessité de se prosterner devant la majesté de Dieu; il se tient debout, il se sent sûr, comme s’il était le maître du temple ! Il énumère les bonnes œuvres commises : il est irrépréhensible, il observe la Loi au-delà de ce qui est dû ; jeûne « deux fois par semaine » et paie la « dîme » de tout ce qu’il possède. En somme, plus que prier, le pharisien se complaît de sa propre observance des préceptes. Et pourtant, son attitude et ses paroles sont éloignées de la façon d’agir et de parler de Dieu, qui aime tous les hommes et ne méprise pas les pécheurs. Au contraire, ce pharisien méprise les pécheurs, même quand il montre l’autre qui est là. En somme, le pharisien, qui se considère juste, néglige le commandement le plus important: l’amour pour Dieu et pour son prochain. Il ne suffit donc pas de nous demander combien nous prions, nous devons aussi nous demander comment nous prions, ou mieux, comment est notre cœur : il est important de l’examiner pour juger les pensées, les sentiments et extirper l’arrogance et l’hypocrisie. Mais moi, je me demande : peut-on prier avec arrogance ? Non. Peut-on prier avec hypocrisie ? Non. Nous devons uniquement prier en nous plaçant devant Dieu tels que nous sommes. Non pas comme le pharisien qui priait avec arrogance et hypocrisie. Nous sommes tous pris par la frénésie du rythme quotidien, souvent à la merci de sensations, étourdis, confus. ll est nécessaire d’apprendre à retrouver le chemin vers notre cœur, retrouver la valeur de l’intimité et du silence, parce que c’est là que Dieu nous rencontre et nous parle. Ce n’est qu’à partir de là que nous pouvons, à notre tour, rencontrer les autres et parler avec eux. Le pharisien s’est mis en route vers le temple, il est sûr de lui, mais il ne s’aperçoit pas qu’il a égaré le chemin de son cœur. Le publicain en revanche — l’autre — se présente au temple l’âme humble et repentie : « se tenant à distance, il n’osait même pas lever les yeux vers le ciel; mais il se frappait la poitrine » (v. 13). Sa prière est très brève, elle n’est pas aussi longue que celle du pharisien : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis ». Rien de plus. Quelle belle prière ! En effet, les collecteurs d’impôts — appelés précisément, « publicains » — étaient considérés comme des personnes impures, soumises aux dominateurs étrangers, ils étaient mal vus des gens et associés en général aux « pécheurs ». La parabole enseigne que l’on est juste ou pécheur non pas en raison de son appartenance sociale, mais selon sa façon de se comporter envers Dieu et de se comporter envers ses frères. Les gestes de pénitence et les quelques paroles simples du publicain témoignent de sa conscience en ce qui concerne sa misérable condition. Sa prière est essentielle. Il agit en personne humble, sûr uniquement d’être un pécheur qui a besoin de pitié. Si le pharisien ne demandait rien parce qu’il avait déjà tout, le publicain ne peut que mendier la miséricorde de Dieu. Et cela est beau : mendier la miséricorde de Dieu ! Se présentant « les mains vides », le cœur nu et se reconnaissant pécheur, le publicain nous montre à tous la condition nécessaire pour recevoir le pardon du Seigneur. À la fin, c’est précisément lui, si méprisé, qui devient une icône du véritable croyant. Jésus conclut la parabole par une phrase : « Je vous le déclare : quand ce dernier — c’est-à-dire le publicain — redescendit dans sa maison, c’est lui qui était devenu un homme juste, plutôt que l’autre. Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé » (v. 14). De ces deux hommes, lequel est corrompu ? Le pharisien. Le pharisien est précisément l’icône du corrompu qui fait semblant de prier, mais qui n’arrive qu’à se pavaner devant un miroir. C’est un corrompu qui fait semblant de prier. Ainsi, dans la vie, celui qui se croit juste et juge les autres et les méprise, est un corrompu et un hypocrite. L’orgueil compromet toute bonne action, vide la prière, éloigne de Dieu et des autres. Si Dieu privilégie l’humilité, ce n’est pas pour nous avilir : l’humilité est plutôt la condition nécessaire pour être relevés par Lui, afin de faire l’expérience de la miséricorde qui comble nos vides. Si la prière de l’orgueilleux n’atteint pas le cœur de Dieu, l’humilité du misérable l’ouvre pleinement. Dieu a une faiblesse : la faiblesse des humbles. Devant un cœur humble, Dieu ouvre entièrement son cœur. C’est cette humilité que la Vierge Marie exprime dans le cantique du Magnificat : « Il s’est penché sur son humble servante [...] Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent » (Lc 1, 48-50). Qu’elle, qui est notre Mère, nous aide à prier avec le cœur humble. Et nous, répétons trois fois cette belle prière : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis ».

 

Moses holding his staff at the Battle of Rephidim in the painting Victory O Lord! by J.E. Millais

7 juin, 2016

Moses holding his staff at the Battle of Rephidim in the painting Victory O Lord! by J.E. Millais dans images sacrée

https://en.wikipedia.org/wiki/Staff_of_Moses

LES PARADOXES DE LA TERRE PROMISE

7 juin, 2016

http://www.mondedelabible.com/les-paradoxes-de-la-terre-promise/

LES PARADOXES DE LA TERRE PROMISE

Par Hélène Roquejoffre dans Archéologie, vallee du Jourdainpar Katell Berthelot historienne du judaïsme à l’époque hellénistique et romains (CNRS – Aix-Marseille Université)

La notion de Terre promise occupe une place centrale dans la pensée juive. Dans la Bible, en effet, Dieu destine la «?terre de Canaan?» aux fils de Jacob, dans la lignée d’Abraham. Pourtant, ce don, aux contours peu définis, n’a pas été sans poser de questions à ses destinataires. Comment, face aux rebondissements de son histoire, Israël a-t-il perçu et interprété la promesse divine?? Katell Berthelot, chargée de recherche au CNRS, nous introduit à l’histoire de ce long débat. La «?Terre promise?» n’existe pas. Du moins, l’expression en tant que telle n’apparaît nulle part dans les Écritures, et les appellations ô combien familières de nos jours de «?Terre sainte?» et de «?terre d’Israël?» sont rares (lire l’encadré p. 20). Bien que cette terminologie fasse défaut, la terre donnée par Dieu à Israël, désignée à l’origine comme «?terre de Canaan?», revêt une importance cruciale dans le Pentateuque et dans les livres dits «?historiques?» des Écritures. Avec la Torah, elle constitue l’un des deux piliers de l’alliance entre Dieu et son peuple. Cette terre a un statut distinct, une forme de «?sainteté?», de par le rapport particulier qu’elle entretient avec Dieu, comme le souligne Deutéronome 11,11-12?: «?Le pays dans lequel vous entrez pour en prendre possession est […] un pays dont l’Éternel, ton Dieu, prend soin [litt.?: scrute, sonde], et sur lequel l’Éternel, ton Dieu, a continuellement les yeux, du commencement à la fin de l’année.?» C’est pourquoi certaines sources rabbiniques établiront par la suite un rapport d’analogie entre la terre choisie et élue par Dieu entre toutes, et le peuple choisi et élu par Dieu entre tous. Ce passage du Deutéronome contient comme le germe de la vision essentialiste et mystique de la terre d’Israël qui se développera par la suite dans certains courants du judaïsme, en particulier au Moyen Âge, par exemple chez Juda Hallévi (Kuzari II,10-24). Cependant le concept de Terre promise ou de terre d’Israël ne se développe pas de façon linéaire dans l’histoire de la pensée juive. Au moment du retour de l’Exil et durant la période du second Temple, les textes témoignent d’une focalisation sur le Temple et sur Jérusalem, et n’évoquent que rarement la terre et la promesse faite à Abraham. À l’inverse, il semble que la perte du Temple et de Jérusalem suite aux révoltes contre Rome de 66-73 et 132-135 ap. J.-C. ait paradoxalement contribué à revaloriser la terre comme élément de la relation entre Dieu et Israël, du moins dans les sources rabbiniques de Palestine. Le judaïsme babylonien, lui, conserve à la terre son importance biblique et son rôle eschatologique, mais ne l’exalte pas à la façon des sources palestiniennes. La Terre promise se dérobe en fait le plus souvent à la possession réelle, ce qui conduit à s’interroger sur la façon dont le don de la terre à Abraham et ses descendants fut compris par les générations successives, depuis la rédaction des livres bibliques jusqu’à leurs lointaines relectures talmudiques. Le don de la terre par Dieu?: à qui?? quand?? comment?? La Bible hébraïque fait très fréquemment référence au don de la terre de Canaan à Abraham et à sa descendance. Pourtant, Abraham lui-même se désigne comme un étranger résident en Canaan (Genèse 23,4), et achète un terrain pour enterrer sa femme au prix d’une somme rondelette versée à Efrôn le Hittite. Le pays est d’ores et déjà donné par Dieu, mais pas encore effectivement possédé, car les Cananéens l’habitent encore. Genèse 15,16 explique que les descendants d’Abraham connaîtront l’exil et reviendront en terre de Canaan (sous-entendu?: pour en prendre vraiment possession) quatre générations plus tard, car «?l’iniquité des Amorites [une des peuplades de Canaan] n’est pas à son comble?». L’expression «?Terre promise?» renvoie donc au fait que le don à Abraham n’est pas immédiatement suivi de sa réalisation. De facto, la terre est davantage promise que donnée. En outre, la terre est donnée mais reste simultanément à conquérir, c’est une terre qu’il faut à la fois recevoir et prendre. Dieu annonce qu’il chassera les Cananéens devant les Israélites, mais selon d’autres textes et le récit du livre de Josué, les enfants d’Israël doivent combattre eux-mêmes pour entrer en possession de l’héritage promis. Cependant, si dans l’histoire de la pensée juive le don de la terre est perçu comme valable pour toutes les générations, le commandement de la conquête guerrière, lui, n’est pas nécessairement compris comme une obligation atemporelle?; certains sionistes religieux, au XXe ?siècle, établiront ainsi une différence nette entre l’obligation d’habiter le pays et celle de le conquérir par les armes, ne reconnaissant comme légitime que la négociation ou l’achat de terres.

Selon quelles frontières ? La question de la réalisation de la promesse et de la possession du pays pose du même coup celle des frontières. Quelles sont les limites géographiques qui permettent de considérer la promesse comme accomplie?? La Bible hébraïque contient plusieurs conceptions des frontières de la Terre promise. D’après la plus répandue, le territoire s’étend «?de Dan [au nord, au pied du mont Hermon] jusqu’à Beersheva [au sud, dans le Néguev]?», tandis que la mer Méditerranée et le Jourdain constituent les frontières occidentale et orientale (1 Samuel 3,20?; Nombres 33,50-51), laissant ainsi la rive orientale du Jourdain à l’extérieur de la Terre promise. Deux autres traditions conçoivent toutefois le territoire de manière plus étendue. La première, d’origine sacerdotale, se limite encore à la bande de terre allant de la Méditerranée au Jourdain, bornée par le torrent d’Égypte au sud?; mais la frontière nord est repoussée jusqu’à un lieu décrit comme «?l’entrée de Hamath?», au nord du Liban actuel (Nombres 34,1-12). Une autre tradition encore, que l’on peut qualifier de maximaliste et d’utopique, envisage un territoire allant du torrent d’Égypte (ou encore du Nil) jusqu’à l’Euphrate, en incluant une bonne partie du Liban et de la Syrie actuels, ainsi que la rive orientale du Jourdain (Genèse 15,18?; Deutéronome 1,7 ou 11,24). Alors qu’à partir de la chute du royaume du Nord au VIIIe?siècle, la terre habitée par les Israélites s’est généralement limitée à la Judée (selon des frontières elles-mêmes soumises à fluctuation), certains textes de la période du second Temple comme l’Apocryphe de la Genèse et le Livre des Jubilés (IIe?siècle av. J.-C.) reproduisent la vision territoriale grandiose qui fait s’étendre le pays de l’Égypte à l’Euphrate. Dans la littérature rabbinique, à l’inverse, la terre d’Israël est plutôt définie en fonction de l’application de certaines lois agricoles, et délimitée selon un tracé inédit, qui établit la limite sud à Ashqelôn et la limite nord à Akko, par exemple. Selon la halakha rabbinique (lire p. 32-37), les frontières d’Eretz Israël incluent en fait les lieux où ceux qui revinrent de Babylone étaient censés s’être installés lors de leur retour à Sion. Fait significatif, la référence en matière de délimitation territoriale ne réside plus alors dans les promesses faites aux patriarches, mais dans la mémoire du retour de l’Exil, soit l’expérience de la perte de la terre et de la restauration.

À quelles conditions ? L’historiographie biblique, de Josué à 2 Rois ou 2 Chroniques, peut être interprétée comme une tentative de rendre compte de la perte de la terre et du sanctuaire, expliquée par l’infidélité du peuple et surtout de ses dirigeants vis-à-vis de l’alliance conclue entre Dieu et Israël. Le caractère conditionnel de l’occupation de la Terre promise est donc présupposé à toutes les pages. Lors de la conquête par Josué, déjà, les Cananéens sont chassés et dépossédés à cause de leur «?iniquité?» ou de leurs «?abominations?» (Genèse 15,16?; Lévitique 18), c’est-à-dire du fait d’une culpabilité d’ordre moral-religieux. Israël est explicitement prévenu qu’un sort similaire l’attend s’il ne respecte pas les commandements de l’alliance et se livre à l’idolâtrie et aux crimes qui lui sont traditionnellement associés (meurtres, adultères, vols, parjures…), ou encore oublie la justice sociale et néglige le shabbat. Pour l’exégète israélien Moshe Weinfeld, auteur d’un ouvrage incontournable sur la promesse de la terre et l’héritage du pays de Canaan par les Israélites, ce sont précisément les implications religieuses et éthiques de la présence en Canaan qui constituent la spécificité de la relation d’Israël avec la Terre promise. Selon lui, le caractère conditionnel de l’occupation du pays serait toutefois une idée tardive, postérieure à la chute du royaume du Nord?; les plus anciennes traditions (reflétées par exemple en Genèse 13,15?; 17,8?; Exode 32,13) véhiculeraient l’idée que le pays était donné pour toujours à Israël. Sur ce point son collègue hollandais Ed Noort va même plus loin. Pour lui, l’idée de conditionnalité serait plus récente encore, et ne remonterait qu’aux auteurs deutéronomistes tardifs, post-exiliques. À partir de l’époque du second Temple, en tout cas, la vision deutéronomiste est bien enracinée?: la perte de la terre représente une éventualité très réelle dans les esprits, tout comme son corollaire, la possibilité de la restauration nationale et territoriale.

Un droit de propriété pour Israël? Si le don divin ne garantit pas la jouissance effective de la possession de la terre, établit-il en revanche un droit de propriété inaliénable pour Israël vis-à-vis des autres peuples?? Notons tout d’abord l’insistance paradoxale, dans les Écritures, sur l’origine non-autochtone des Hébreux. La terre de Canaan n’est pas présentée comme la patrie du peuple d’Israël, ni comme celle de son ancêtre Abraham. Ce dernier est en quelque sorte un exilé en Canaan, ou du moins un immigré. De droit du sol, il ne saurait être question. En outre, la liste des territoires des nations en Genèse 10 laisse entendre que les Cananéens sont légitimement établis en Canaan, ce que suggère aussi la désignation même du pays comme «?terre de Canaan?». Sur ce point, certaines sources juives de la période du second Temple proposent une relecture radicale, qui sera reprise par la suite dans la littérature rabbinique. D’après le Livre des Jubilés, lors du partage des terres entre les fils de Noé, le pays de Canaan faisait en réalité partie du lot de Shem, et devait revenir à ses descendants israélites par droit d’héritage. Canaan et ses descendants se l’approprièrent de force et encoururent la malédiction correspondante. L’insistance nouvelle sur un droit de propriété originel (anté-abrahamique?!) transmis par héritage, justifiant une conquête postérieure, s’explique probablement par le contexte hellénistique de la rédaction des Jubilés?; l’argument est en effet récurrent dans les inscriptions et les textes littéraires hellénistiques traitant de conflits territoriaux. Il est également utilisé par l’Asmonéen Simon lors du conflit avec le roi séleucide Antiochos VII à propos de certains territoires de la Judée (1?Maccabées 15,33-34). Cette juridicisation du rapport à la terre se retrouve par la suite dans plusieurs sources rabbiniques. Dans le Sifra, un commentaire du Lévitique du IIIe?siècle ap. J.-C., le peuple d’Israël reproche à Dieu de lui avoir donné une terre qui appartenait déjà à un autre peuple?; sans se démonter, Dieu rétorque qu’elle était dès l’origine la propriété d’Israël comme descendant de Shem, et que les Cananéens ne firent que servir de gardiens des lieux jusqu’à l’arrivée d’Israël… Les paradoxes attachés à la notion de Terre promise sont donc nombreux, qu’il s’agisse de l’incertitude sur la temporalité de la promesse, déjà accomplie ou encore en devenir, de la tension liée à la présence d’autres peuples dans le pays donné en héritage, ou encore du contraste entre l’affirmation du caractère inaliénable du don et la réalité des invasions étrangères et de la perte répétée de souveraineté.

 

EST-CE MOI OU EST-CE LE SEIGNEUR?

7 juin, 2016

http://www.bible-notes.org/article-17-est-ce-moi-ou-est-ce-le-seigneur.html

EST-CE MOI OU EST-CE LE SEIGNEUR?

«Et Moïse dit à l’Eternel: Pourquoi as-tu fait ce mal à ton serviteur? Et pourquoi n’ai-je pas trouvé grâce à tes yeux, que tu aies mis sur moi le fardeau de tout ce peuple? Est-ce moi qui ai conçu tout ce peuple? Est-ce moi qui l’ai enfanté, pour que tu me dises: Porte-le dans ton sein, comme le nourricier porte l’enfant qui tette, jusqu’au pays que tu as promis par serment à ses pères? … Je ne puis, moi seul, porter tout ce peuple, car il est trop pesant pour moi. Et si tu agis ainsi avec moi, tue-moi donc, je te prie, si j’ai trouvé grâce à tes yeux, et que je ne voie pas mon malheur»
(Nombres 11: 11-15).

Nous trouvons ici l’esprit de Moïse accablé sous la lourde responsabilité qui lui était confiée; il exprime la peine de son coeur dans ces paroles.
Evidemment, Moïse abandonne un poste d’honneur. Si Dieu se plaisait à faire de lui l’unique instrument pour conduire l’assemblée, Il lui conférait, en réalité, une dignité et un privilège particulièrement grands. La responsabilité était très lourde, il est vrai, mais la foi reconnaissait que Dieu était amplement suffisant pour permettre à son serviteur d’y faire face.
Cependant, ce précieux serviteur manqua d’assurance dans les ressources de Dieu. Il dit: «Je ne puis, moi seul, porter tout ce peuple, car il est trop pesant pour moi». Il ne lui était pourtant pas demandé de porter seul le peuple, car Dieu était avec lui. Il n’était que le moyen que Dieu employait. Moïse aurait aussi bien pu dire de sa verge qu’elle portait le peuple. Or, qu’était-il lui-même, sinon un simple instrument dans la main de Dieu, comme la verge dans la sienne?
C’est ainsi que les serviteurs de Dieu sont souvent défaillants. Un tel manquement est d’autant plus dangereux qu’il est revêtu d’une apparence d’humilité. Reculer devant une lourde responsabilité semble résulter de la méfiance de soi-même et d’une profonde humilité d’esprit. Mais, il faut rechercher à savoir si vraiment Dieu m’a imposé cette responsabilité. Si oui, Il m’accompagnera certainement dans l’exercice de celle-ci. Lui étant avec moi, je peux toutes choses. Avec Lui, le poids d’une montagne n’est rien; sans Lui, le poids d’une plume est accablant!
C’est une chose toute différente si un homme, dans la vanité de ses pensées, s’engage à prendre sur ses épaules un fardeau que Dieu n’a jamais eu l’intention de lui faire porter et, par conséquent, ne l’y a jamais préparé. Nous pouvons donc, certainement, nous attendre à le voir accablé sous son poids. Mais si Dieu le place sur lui, Il le qualifiera et le fortifiera pour en assumer la charge.
Ce n’est jamais le fruit de l’humilité que de quitter un poste où l’on a été établi par Dieu. Au contraire, la plus grande humilité aura son expression si l’on y reste dans une simple dépendance de Dieu. Reculer devant un service en prétendant en être incapable montre que l’on est occupé de soi-même. Dieu ne nous appelle pas au service en raison de nos capacités, mais des siennes; aussi, à moins que je ne sois rempli de pensées au sujet de moi-même ou que ma confiance en Dieu fasse défaut, les lourdes responsabilités du service ou du témoignage ne pourront être abandonnées.
Toute puissance est à Dieu: que cette puissance soit exercée par un seul agent ou soixante-dix, elle est absolument la même. Par conséquent, si un agent refuse cette dignité, c’est bien dommage pour lui! Dieu n’oblige pas un serviteur à demeurer dans une position d’honneur, s’il ne met pas sa confiance en Lui pour l’occuper. Le chemin est toujours libre pour abandonner cette dignité: ainsi en a-t-il été de Moïse. Comme il se plaignait du fardeau, celui-ci lui a été rapidement retiré, avec le grand honneur d’être admis à le porter. «Et l’Eternel dit à Moïse: assemble-moi soixante-dix des anciens d’Israël, que tu sais être les anciens du peuple et ses magistrats, et amène-les à la tente d’assignation, et ils se tiendront là avec toi. Et je descendrai, et je parlerai là avec toi, et j’ôterai de l’Esprit qui est sur toi, et je le mettrai sur eux, afin qu’ils portent avec toi le fardeau du peuple, et que tu ne le portes pas toi seul» (Nombres 11: 16-17).
Nous ne voyons pas l’introduction de puissance nouvelle. C’est le même Esprit, que ce soit en un seul ou en soixante-dix. Il n’y a ni plus de valeur ni plus de vertu dans la chair de soixante-dix hommes que dans la chair d’un seul. «C’est l’Esprit qui vivifie; la chair ne profite de rien» (Jean 6: 63). En fait de puissance, rien n’a été gagné; mais en fait de dignité, beaucoup a été perdu par ce refus de Moïse.
Un peu plus loin, au chapitre 11 des Nombres, nous trouvons Moïse qui exprime des paroles d’incrédulité attirant de la part de l’Eternel une répréhension sévère. «La main de l’Eternel est-elle devenue courte? Tu verras maintenant si ce que j’ai dit t’arrivera ou non». En comparant les versets 11 à 15 aux versets 21 et 22, nous découvrons un enseignement bien solennel: l’homme qui recule devant la responsabilité, en s’abritant derrière sa faiblesse, est en grand danger de mettre en doute la plénitude et la suffisance des ressources de Dieu.
Toute cette scène enseigne une leçon très précieuse à tout serviteur de Christ qui peut être tenté de se sentir seul ou accablé dans son travail. Que celui-là ait bien à l’esprit que le travail opéré par le Saint Esprit avec un seul instrument est aussi bon que s’Il en utilise soixante-dix. S’Il n’agit pas, soixante-dix ne valent pas plus qu’un seul! Tout cela dépend de l’énergie du Saint Esprit. Avec Lui, un seul homme peut tout faire, tout endurer, tout supporter. Sans lui, soixante dix hommes ne peuvent rien faire.
Que le serviteur solitaire se souvienne, pour la consolation et l’encouragement de son coeur abattu, que comptant sur la présence et la puissance du Saint Esprit, il n’a pas lieu de se plaindre de son fardeau ni de soupirer après un partage du travail. Si Dieu honore un homme en lui donnant beaucoup de travail à faire, qu’il se réjouisse en cela et ne murmure pas; car s’il murmure, il risquerait de perdre rapidement cet honneur. Dieu n’est pas embarrassé pour trouver des instruments. Il pourrait, des pierres, susciter des enfants à Abraham. Il peut, de ces mêmes pierres, susciter les agents nécessaires pour poursuivre son oeuvre glorieuse!
Oh, qu’un coeur prêt à son service est désirable! Un coeur patient, humble, débarrassé de lui-même, dévoué! Un coeur prêt à servir en compagnie d’autres serviteurs, prêt à servir seul. Un coeur si rempli d’amour pour Christ, qu’il trouvera sa joie à Le servir, quel que soit ce service!
C’est assurément un besoin bien actuel. Que le Saint Esprit réveille donc nos coeurs à un sentiment plus profond de la grande valeur du nom de Jésus. Que nous soyons rendus capables de répondre d’une façon plus claire, plus compète, non équivoque, à l’amour immuable de son coeur!

 

CHRIST WITH THE SON OF THE WIDOW OF NAIN

3 juin, 2016

CHRIST WITH THE SON OF THE WIDOW OF NAIN dans images sacrée egallery5-14

http://www.catholictradition.org/Easter/gallery64.htm

1234