HOMÉLIE DU 10E DIMANCHE ORDINAIRE C
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HOMÉLIE DU 10E DIMANCHE ORDINAIRE C
1 R, 17, 17-24 ; Ga 1, 11-19 ; Lc 7, 11-17
Dans la vie quotidienne et sous tous les climats, il est des aveux et des confidences qui constituent de véritables clichés tant ils évoquent à la fois les mêmes angoisses, des interrogations et des révoltes identiques. « Depuis la mort de mon mari, ma foi ne cesse de faiblir. Elle aussi va mourir… ». « J’ai vu à la TV des corps d’enfants déchiquetés par les bombes. Pourquoi Dieu permet-il ces massacres d’innocents ? ». Il y a aussi l’angoisse viscérale qui éclate et envahit tout l’être quand on a frôlé la mort ou quand celle des autres nous rappelle sans ménagement que notre tour viendra. Chose étrange et finalement révélatrice, la peur de la mort et son « non sens » augmente au même rythme que celui des moyens trouvés pour la retarder, l’adoucir ou la faire oublier. Au siècle des assurances tous risques, il en est un que rien ni personne ne peut couvrir… Et nous cherchons fébrilement des coupables. Dieu lui-même n’échappe pas à nos soupçons, reproches et accusations. Lui qui est qualifié de bon et qui peut tout, pourquoi laisse-t-il partir tant de jeunes pleins d’espérance, tant d’hommes et de femmes encore indispensables ? Et pourquoi prolonge-t-il l’existence de tant d’autres dont « la vie ne vaut plus la peine d’être vécue » ? C’est peut-être pour avoir perdu le vrai sens de la vie que le sens de la mort nous échappe. La « Bonne Nouvelle » de Jésus Christ contient tous les éléments de réponse à nos craintes et à nos ignorances, à nos erreurs et nos illusions. Mais ils ne s’emboîtent pas selon nos plans et nos critères. La mort ne relève pas d’une notion de justice, si ce n’est la garantie pour tout être humain de connaître un jour l’arrêt définitif d’un mode « biologique » d’existence. Le Christ lui-même n’a pas échappé à la mort corporelle, ni même à l’angoisse dans l’ultime solitude. Les deux récits de réanimation que la liturgie nous invite à méditer ce jour ne sont pas simplement deux miracles offerts à notre admiration, mais des signes qu’il faut lire, des messages à comprendre pour éclairer et nourrir notre foi. Jésus n’est pas venu modifier ni bouleverser les lois de la nature. Il n’a pas parcouru villes et villages pour arrêter les convois funèbres et rendre les défunts à leurs familles… Par contre, il a vu et regardé les souffrances humaines avec les yeux du cœur, la sollicitude et la tendresse du Père. Il s’est laissé bouleverser. Il a pris part aux peines, aux tristesses et aux deuils. A ces contemporains qui croyaient que la mort des innocents était châtiment pour des péchés, Jésus est venu révéler un Dieu d’amour, de miséricorde et de vie. Un Dieu infiniment et éternellement créateur, nous offrant même la mort comme un « accouchement de la vie ». La valeur suprême de la vie étant celle de la communion au Christ, qui est victoire de l’amour sur le péché. « Ne pleure pas… Lève-toi ». Ces invitations ne cessent d’être offertes à tous les accablés, les écrasés, les angoissés, les éprouvés. La mort n’est pas le dernier mot de la vie, mais un passage obligé pour un surcroît de vie et même la vie en plénitude. C’est la tête haute et l’espérance au cœur qu’il nous faut comprendre et accepter le détachement purificateur des morts quotidiennes, ces passages qui préparent au grand passage. Merveilleux don que l’existence terrestre, souffle immortel de Dieu dans une enveloppe périssable. Existence éternelle greffée dans le tissu du temps. Aucune vie n’a de valeur marchande, car toute vie vaut toujours la peine d’être vécue. Elle ne relève pas de l’avoir ou de la jouissance mais de la qualité d’être. La mort dès lors s’accueille comme la vie. Des créations nouvelles. Dans la marche vers la vie, l’horizon n’est pas bouché par un cercueil ouvrant sur le vide, mais bien ouvert sur un tombeau vide, signe de la résurrection du Christ. C’est elle qui peut nous donner « une spiritualité de transcendance à notre vie quotidienne »… « Seigneur, tu m’a fait remonter de l’abîme et revivre quand je descendais à la fosse » (Ps 29).
P. Fabien Deleclos, franciscain (T) 1925 – 2008
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