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LE SAINT ESPRIT – LES PLUS BELLES PAGES – ECRITS DU XVII° SIÈCLE – Fénelon
11 mai, 2016http://www.spiritualite-chretienne.com/stesprit/esprit-7.html
LE SAINT ESPRIT – LES PLUS BELLES PAGES – ECRITS DU XVII° SIÈCLE
François de Salignac de Lamothe-Fénelon (1651-1715)
Il est certain par l’Ecriture (Rom., 8, et Jean, 14) que l’Esprit de Dieu habite au-dedans de nous, qu’Il y agit, qu’il y prie sans cesse, qu’Il y gémit, qu’Il y désire, qu’Il y demande ce que nous ne savons pas nous-mêmes demander ; qu’Il nous pousse, nous anime, nous parle dans le silence, nous suggère toute vérité, et nous unit tellement à Lui que nous ne sommes plus qu’un même esprit avec Dieu (1 Cor., 6, 17). Voilà ce que la foi nous apprend ; voilà ce que les docteurs les plus éloignés de la vie intérieure ne peuvent s’empêcher de reconnaître. Cependant, malgré ces principes, ils tendent toujours à supposer dans la pratique que la loi extérieure, ou tout au plus une certaine lumière de doctrine et de raisonnement, nous éclaire au-dedans de nous-mêmes, et qu’ensuite c’est notre raison qui agit par elle-même sur cette instruction. On ne compte point assez sur le docteur intérieur qui est le Saint-Esprit, et qui fait tout en nous. Il est l’âme de notre âme : nous ne saurions former ni pensée ni désir que par Lui. Hélas ! quel est donc notre aveuglement ! Nous comptons comme si nous étions seuls dans ce sanctuaire intérieur ; et tout au contraire Dieu y est plus intimement que nous n’y sommes nous-mêmes. Vous me direz peut-être : Est-ce que nous sommes inspirés ? Oui, sans doute, mais non pas comme les prophètes et les apôtres. Sans l’inspiration actuelle de l’Esprit de grâce, nous ne pouvons ni faire, ni vouloir, ni croire aucun bien. Nous sommes donc toujours inspirés ; mais nous étouffons sans cesse cette inspiration. Dieu ne cesse point de parler ; mais le bruit des créatures au dehors et de nos passions au-dedans nous étourdit et nous empêche de l’entendre. Il faut faire taire toute créature, il faut se faire taire soi-même pour écouter dans ce profond silence de toute l’âme cette voix ineffable de l’époux. II faut prêter l’oreille ; car c’est une voix douce et délicate, qui n’est entendue que de ceux qui n’entendent plus tout le reste. O qu’il est rare que l’âme se taise assez pour laisser parler Dieu ! Le moindre murmure de nos vains désirs ou d’un amour-propre attentif à soi confond toutes les paroles de l’Esprit de Dieu. On entend bien qu’Il parle et qu’Il demande quelque chose ; mais on ne sait point ce qu’Il dit, et souvent on est bien aise de ne le deviner pas. La moindre réserve, le moindre retour sur soi, la moindre crainte d’entendre trop clairement que Dieu demande plus qu’on ne veut lui donner trouble cette parole intérieure. Faut-il donc s’étonner si tant de gens, même pieux, mais encore pleins d’amusements, de vains désirs, de fausse sagesse, de confiance en leurs vertus, ne peuvent l’entendre et regardent cette parole intérieure comme une chimère de fanatiques ? Hélas ! que veulent-ils donc dire avec leurs raisonnements dédaigneux ? A quoi servirait la parole extérieure des pasteurs et même de l’Ecriture s’il n’y avait une parole intérieure du Saint-Esprit même, qui donne à l’autre toute son efficace ? La parole même de l’Evangile, sans cette parole vivante et féconde de l’intérieur, ne serait qu’un vain son. C’est la lettre qui seule tue, et l’esprit seul peut nous vivifier (II Cor., 3, 6). O Verbe, ô parole éternelle et toute-puissante du Père, c’est Vous qui parlez au fond des âmes ! Cette parole, sortie de la bouche du Sauveur, pendant sa vie mortelle, n’a eu tant de vertu et n’a produit tant de fruits sur la terre qu’à cause qu’elle était animée par cette parole de vie qui est le Verbe même. De là vient que saint Pierre dit : » A qui irions-nous ? Vous avez les paroles de la Vie éternelle » (Jean, 6, 68). Ces principes posés, il faut reconnaître que Dieu parle sans cesse en nous (Imitation de Jésus-Christ, L. III, ch. III, v. 3). Mais souvent ces personnes, pleines d’elles-mêmes et de leurs lumières, s’écoutent trop pour écouter Dieu. O mon Dieu ! je Vous rends grâces avec Jésus-Christ (Matth., 11, 25) de ce que Vous cachez vos secrets ineffables à ces grands, à ces sages tandis que Vous prenez plaisir à les révéler aux âmes faibles et petites ! Il n’y a que les enfants avec qui Vous Vous familiarisez sans réserve. Dieu, qui ne cherche qu’à se communiquer, ne sait, pour ainsi dire, où poser le pied, dans ces âmes pleines d’elles-mêmes et trop nourries de leur sagesse et de leurs vertus. Mais son entretien familier, comme dit l’Ecriture, est avec les simples (Prov., III, 32). Où sont-ils ces simples ? Je n’en vois guère. Dieu les voit ; c’est en eux qu’Il se plait à habiter : Mon Père et Moi, dit Jésus-Christ, Nous y viendrons, et Nous y ferons notre demeure (Jean, 14, 23). » Faites-moi connaître votre voix ; qu’elle sonne à mes oreilles » (Cant., II, 14). O quelle est donc cette voix ? elle fait tressaillir mes entrailles. Parlez, ô mon Epoux, et que nul autre que Vous n’ose parler ! Taisez-vous, mon âme : parlez, ô mon amour. Je dis qu’alors on sait tout sans rien savoir. Ce n’est pas qu’on ait la présomption de croire qu’on possède en soi toute vérité. Non, non : tout au contraire, on sent qu’on ne voit rien, qu’on ne peut rien et qu’on n’est rien. On le sent et on en est ravi. En cet état, l’Esprit enseigne toute vérité ; car toute vérité est éminemment dans ce sacrifice d’amour où l’âme s’ôte tout pour donner tout à Dieu. [...] Votre esprit est un esprit d’amour et de liberté et non un esprit de crainte et de servitude. Je renoncerai donc à tout ce qui n’est point de votre ordre pour mon état. Je porterai paisiblement toutes ces privations ; et voici ce que j’ajouterai : c’est que dans les conversations innocentes et nécessaires, je retrancherai ce que Vous me ferez sentir intérieurement n’être qu’une recherche de moi-même. Quand je me sentirai porté à faire là-dessus quelque sacrifice, je le ferai gaiement. Je me réjouirai devant le Seigneur ; je tâcherai de réjouir les autres ; j’épancherai mon cœur sans crainte dans l’Assemblée des enfants de Dieu. Je ne veux que candeur, innocence, joie du Saint-Esprit. [...] Vous avez commencé, Seigneur, par ôter à vos apôtres ce qui paraissait le plus propre à les soutenir, je veux dire la présence sensible de Jésus votre Fils : mais Vous avez tout détruit pour tout établir : Vous avez ôté tout pour rendre tout avec usure. Telle est votre méthode. Vous Vous plaisez à renverser l’ordre du sens humain. Après avoir ôté cette possession sensible de Jésus-Christ, Vous avez donné votre Saint-Esprit. O privation, que vous êtes précieuse et pleine de vertu, puisque vous opérez plus que la possession du Fils de Dieu même ! O âmes lâches ! pourquoi vous croyez-vous si pauvres dans la privation, puisqu’elle enrichit plus que la possession du plus grand trésor ? Bienheureux ceux qui manquent de tout et qui manquent de Dieu même, c’est-à-dire de Dieu goûté et aperçu ! Heureux ceux pour qui Jésus se cache et se retire ! L’Esprit consolateur viendra sur eux ; Il apaisera leur douleur et aura soin d’essuyer leurs larmes. Malheur à ceux qui ont leur consolation sur la terre, qui mettent hors de Dieu le repos, l’appui et l’attachement de leur volonté ! Ce bon Esprit promis à tous ceux qui le demandent n’est point envoyé sur eux. Le Consolateur envoyé du Ciel n’est que pour les âmes qui ne tiennent ni au monde ni à elles-mêmes. Hélas ! Seigneur, où est-il donc cet Esprit qui doit être ma vie ? Il sera l’âme de mon âme. Mais où est-Il ? Je ne le sens, je ne le trouve point. Je n’éprouve dans mes sens que fragilité, dans mon esprit que dissipation et mensonge, dans ma volonté qu’inconstance et que partage entre votre amour et mille vains amusements. Où est-il donc votre Esprit ? que ne vient-Il créer en moi un cœur nouveau selon le vôtre ? O mon Dieu, je comprends que c’est dans cette âme appauvrie que votre Esprit daignera habiter, pourvu qu’elle s’ouvre à Lui sans mesure. C’est cette absence sensible du Sauveur et de tous ses dons, qui attire l’Esprit-Saint. Venez donc, ô Esprit, Vous ne pouvez rien trouver de plus pauvre, de plus dépouillé, de plus nu, de plus abandonné, de plus faible, que mon cœur. Venez, apportez-y la paix ; non cette paix d’abondance qui coule comme un fleuve mais cette paix sèche, cette paix de patience et de sacrifice, cette paix amère, mais paix véritable pourtant, et d’autant plus pure, plus intime, plus profonde, plus intarissable, qu’elle n’est fondée que sur le renoncement sans réserve. O Esprit, O Amour ! O Vérité de mon Dieu ! O Amour lumière ! O Amour qui enseignez l’âme sans parler, qui faites tout entendre sans rien dire, qui ne demandez rien à l’âme et qui l’entraînez par le silence à tout sacrifice ! O Amour qui dégoûtez de tout autre amour, qui faites qu’on se hait, qu’on s’oublie, qu’on s’abandonne ! O Amour qui coulez au travers du cœur, comme la fontaine de vie, qui pourra Vous connaître sinon celui en qui Vous serez ? Taisez-vous, hommes aveugles ; l’amour n’est point en vous. Vous ne savez ce que vous dites : vous ne voyez rien, vous n’entendez rien. Le vrai Docteur ne vous a jamais enseignés. C’est Lui qui rassasie l’âme de Vérité sans aucune science distincte. C’est Lui qui fait naître au fond de l’âme les vérités que la parole sensible de Jésus-Christ n’avait exposées qu’aux yeux de l’esprit. On goûte, on se nourrit, on se fait une même chose avec la Vérité. Ce n’est plus elle qu’on voit comme un objet hors de soi ; c’est elle qui devient nous-mêmes et que nous sentons intimement comme l’âme se sent elle-même. O quelle puissante consolation sans chercher à se consoler ! On a Tout sans rien avoir. Là on trouve en unité le Père, le Fils et le Saint-Esprit : le Père Créateur, qui crée en nous tout ce qu’Il veut y faire pour nous rendre des enfants semblables à Lui ; le Fils, Verbe de Dieu, qui devient le Verbe et la parole intime de l’âme, qui se tait à tout pour ne plus laisser parler que Dieu ; enfin l’Esprit, qui souffle où Il veut, qui aime le Père et le Fils en nous. O mon Amour, qui êtes mon Dieu, aimez-Vous, glorifiez-Vous vous-même en moi ! Ma paix, ma joie, ma vie sont en Vous, qui êtes mon Tout, et je ne suis plus rien.
Extrait de Divers sentiments et avis chrétiens, in Œuvres, Paris, Didot, 1892
PAPE FRANÇOIS – 17. LA BREBIS PERDUE (CF. LC 15,1 À 7)
11 mai, 2016PAPE FRANÇOIS – 17. LA BREBIS PERDUE (CF. LC 15,1 À 7)
AUDIENCE GÉNÉRALE
Mercredi 4 mai 2016
Chers frères et sœurs, bonjour !
Nous connaissons tous l’image du Bon Pasteur qui prend sur ses épaules la brebis égarée. Depuis toujours, cette icône représente la sollicitude de Jésus envers les pécheurs et la miséricorde de Dieu qui ne se résigne pas à perdre quelqu’un. La parabole est racontée par Jésus pour faire comprendre que sa proximité à l’égard des pécheurs ne doit pas scandaliser, mais au contraire provoquer en chacun une réflexion sérieuse sur la manière dont nous vivons notre foi. Le récit voit, d’une part, les pécheurs qui s’approchent de Jésus pour l’écouter et, d’autre part, les docteurs de la loi, les scribes soupçonneux qui s’éloignent de lui en raison de ses comportements. Ils s’éloignent parce que Jésus s’approche des pécheurs. Ces derniers étaient orgueilleux, ils étaient vaniteux, ils se croyaient justes. Notre parabole se déroule autour de trois personnages : le pasteur, la brebis égarée et le reste du troupeau. Mais le seul qui agit est le pasteur, pas les brebis. Le pasteur est donc l’unique véritable protagoniste et tout dépend de lui. Une question introduit la parabole : « Lequel d’entre vous, s’il a cent brebis et vient à en perdre une, n’abandonne les quatre-vingt-dix-neuf autres dans le désert pour s’en aller après celle qui est perdue, jusqu’à ce qu’il l’ait retrouvée ? » (v. 4). Il s’agit d’un paradoxe qui pousse à douter de l’action du pasteur: est-il sage d’abandonner les quatre-vingt-dix-neuf brebis contre une seule ? Et qui, de plus, ne sont pas en sécurité dans une bergerie mais dans le désert ? Selon la tradition biblique, le désert est un lieu de mort où il est difficile de trouver de la nourriture et de l’eau, un lieu sans abri et en proie aux fauves et aux voleurs. Que peuvent faire quatre-vingt-dix-neuf brebis sans défense ? Le paradoxe se poursuit cependant, car il est dit que le pasteur, une fois la brebis retrouvée, « la met, tout joyeux, sur ses épaules et, de retour chez lui, il rassemble amis et voisins et leur dit : Réjouissez-vous avec moi » (v. 6). Il semble donc que le pasteur ne revienne pas dans le désert pour récupérer tout le troupeau ! Tendu vers cette unique brebis, il semble oublier les quatre-vingt-dix-neuf autres. Mais en réalité, il n’en est pas ainsi. L’enseignement que Jésus veut nous donner est plutôt qu’aucune brebis ne doit se perdre. Le Seigneur ne peut se résoudre au fait que ne serait-ce qu’une seule personne puisse se perdre. L’action de Dieu est celle de celui qui va à la recherche des enfants perdus pour ensuite faire la fête et se réjouir avec tous de leur retrouvailles. Il s’agit d’un désir irréfrénable : pas même quatre-vingt-dix-neuf brebis ne peuvent arrêter le pasteur et le garder enfermé dans la bergerie. Il pourrait raisonner ainsi : « Je fais le bilan : j’en ai quatre-vingt-dix-neuf, j’en ai perdu une, mais ce n’est pas une grande perte ». Lui, en revanche, va à la recherche de celle-ci, car chacune est très importante pour lui et celle-ci a davantage besoin, elle est la plus abandonnée, la plus délaissée ; et il va la chercher. Nous sommes tous avertis : la miséricorde envers les pécheurs est le style selon lequel Dieu agit et Il est absolument fidèle à cette miséricorde : rien ni personne ne pourra le détourner de sa volonté de salut. Dieu ne connaît pas notre culture actuelle du rebut, Dieu n’a rien avoir avec cela. Dieu ne met personne au rebut; Dieu aime tout le monde, il cherche tou