Archive pour mars, 2016

LES TROIS HYMNES DE LUC : BENEDICTUS, MAGNIFICAT, NUNC DIMITTIS

14 mars, 2016

http://www.bible-service.net/extranet/current/pages/200011.html

LES TROIS HYMNES DE LUC : BENEDICTUS, MAGNIFICAT, NUNC DIMITTIS  

Commencer Trois prières de Luc 1-2 sont passées dans la prière de l’Église…  

Trois prières de Luc 1-2 sont passées dans la prière de l’Église : le Benedictus ou bénédiction avec Zacharie , le Magnificat ou action de grâce avec Marie et le Nunc dimittis ou prière confiante avec Syméon.

L’histoire du peuple de Dieu est accomplie Ces trois prières débordent largement le cadre des récits de Luc 1-2. Zacharie, Marie et Syméon sont témoins de l’action de Dieu dans l’histoire, à travers les naissances des deux enfants : Jean et Jésus (1,47.69; 2,30). Luc signale que chacun de ces témoins parle sous l’action de l’Esprit Saint (1,35.67; 2,27). Ils sont les chantres du salut de Dieu promis et espéré par tout un peuple : Israël est mentionné dans chaque hymne, en 1,54.68; 2,32. Ce salut qui « visite » Israël est une marque de la fidélité de Dieu à son peuple dont il « se souvient » (1,54.72). En un mot, l’alliance (1,72) conclue entre Dieu et Abraham, confirmée dans la personne du roi David, image du messie à venir, chantée enfin par les prophètes espérant la consolation, la libération d’Israël (1,68; 2,25), cette alliance est pleinement manifestée avec la naissance d’un « astre » nouveau (1,78), le messie. Et pourtant, tout commence… Comme Anne, la stérile qui avait donné naissance à Samuel (1 S 2,1-lo), Marie célèbre la grandeur du Seigneur qui comble ceux qui le servent (Lc 1,48.54). Elle est pour le nouveau peuple de Dieu, ce qu’était Anne pour Israël : une image et un modèle de confiance et de service de Dieu. Marie annonce les Béatitudes. Zacharie emprunte aux Psaumes les images du salut d’Israël, pour célébrer l’astre qu’est le Christ (1,78). Les v.76-77 semblent un ajout orientant le regard, non plus sur le messie, mais sur son précurseur, Jean-Baptiste. Il prépare le peuple de Dieu à accueillir « la connaissance du salut par le pardon des péchés » (v. 77). Au terme de la chaîne des prophètes d’Israël, il sera le premier témoin du messie. Syméon, enfin, ouvre l’évangile de Luc à sa dimension universelle : « Car mes yeux ont vu ton salut que tu as préparé face à tous les peuples » (2,31). Bien qu’il attende la consolation d’Israël et salue le Messie comme « gloire d’Israël », il le déclare aussi « lumière pour éclairer les païens ». Par lui, Luc annonce déjà les missions de Paul, dans les Actes des Apôtres. Ces trois hymnes, peut-être déjà chantées par l’Eglise primitive, annoncent chaque jour le grand commencement inauguré en Marie, un commencement toujours nouveau.

SBEV. Stéphane Aulard

-Joh-08,01 Femme Adultere

11 mars, 2016

-Joh-08,01 Femme Adultere dans images sacrée 19%20COLRD%20B%20THE%20WIDOWS%20TALEN

http://www.artbible.net/3JC/-Joh-08,01_Woman_Adultery_Femme_Adultere/slides/19%20COLRD%20B%20THE%20WIDOWS%20TALEN.html

MARIE-NOËLLE THABUT, DIMANCHE 13 MARS 2016 – LIVRE D’ISAÏE 43, 16-21

11 mars, 2016

http://www.eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/le-dimanche-jour-du-seigneur/commentaires-de-marie-noelle-thabut/

COMMENTAIRES DE MARIE-NOËLLE THABUT, DIMANCHE 13 MARS 2016

CINQUIÈME DIMANCHE DE CARÊME

PREMIERE LECTURE – LIVRE D’ISAÏE 43, 16-21

16 Ainsi parle le SEIGNEUR, lui qui fit un chemin dans la mer, un sentier dans les eaux puissantes, 17 lui qui mit en campagne des chars et des chevaux, des troupes et de puissants guerriers ; les voilà tous couchés pour ne plus se relever, ils se sont éteints, consumés comme une mèche. Le Seigneur dit : 18 « Ne faites plus mémoire des événements passés, ne songez plus aux choses d’autrefois. 19 Voici que je fais une chose nouvelle : elle germe déjà, ne la voyez-vous pas ? Oui, je vais faire passer un chemin dans le désert, des fleuves dans les lieux arides. 20 Les bêtes sauvages me rendront gloire, – les chacals et les autruches – parce que j’aurai fait couler de l’eau dans le désert, des fleuves dans les lieux arides, pour désaltérer mon peuple, celui que j’ai choisi. 21 Ce peuple que je me suis façonné redira ma louange. »

Ce texte est surprenant ! A première vue, il comporte deux parties absolument contradictoires : la première partie est un rappel de la sortie d’Egypte, donc du passé ; la seconde, au contraire, recommande de faire table rase du passé… Mais peut-être pas de n’importe quel passé ? Tout est là. Je reprends ces deux parties l’une après l’autre. Tout commence par la formule « Ainsi parle le SEIGNEUR », qui annonce toujours des paroles très importantes. Puis vient l’évocation de ce fameux « chemin dans la mer » : « Ainsi parle le SEIGNEUR, lui qui fit un chemin dans la mer, un sentier dans les eaux puissantes ». C’est le miracle mémorable de la Mer des Joncs, lorsque les Hébreux s’enfuyaient d’Egypte. Dans tous les livres de la Bible, une évocation de cet ordre est un rappel de cette fameuse nuit de la libération d’Egypte (rapportée par le livre de l’Exode, au chapitre 14). Isaïe précise encore « (le SEIGNEUR), lui qui mit en campagne des chars et des chevaux, des troupes et de puissants guerriers ; les voilà tous couchés pour ne plus se relever, ils se sont éteints, ils se sont consumés comme une mèche. » Ce sont les Egyptiens, bien sûr, lancés à la poursuite des fuyards. Et Dieu a fait échapper son peuple. Ce n’est pas un hasard, d’ailleurs, si Isaïe a employé le Nom « SEIGNEUR », puisque c’est ce nom-là, précisément, qui qualifie le Dieu du Sinaï, notre libérateur. Voilà donc l’œuvre de Dieu dans le passé. C’est le meilleur soutien de l’espérance d’Israël pour l’avenir. Et c’est de cela qu’Isaïe va parler maintenant : « Voici que je fais une chose nouvelle ». De quoi s’agit-il ici ? A qui Isaïe promet-il un monde nouveau ? Ici, nous avons besoin de nous remettre dans le contexte historique de cette prédication. Le deuxième Isaïe, celui que nous lisons aujourd’hui, vit au sixième siècle pendant l’Exil à Babylone (qui a duré de 587 à 538 av. J.C.). Nous avons souvent eu l’occasion de parler de cette période qui fut une terrible épreuve. Et, franchement, on ne voyait pas bien pourquoi l’horizon s’éclaircirait ! S’ils sont déportés à Babylone, c’est parce que Nabuchodonosor, roi de Babylone, a vaincu le tout petit royaume juif dont Jérusalem est la capitale. Et pour l’instant les affaires de Nabuchodonosor marchent encore très bien ! Et puis, à supposer que l’on arrive à s’enfuir un jour… de la Babylonie à Jérusalem, il faudrait traverser le désert de Syrie qui couvre des centaines de kilomètres, et en fuyards, c’est-à-dire dans les pires conditions qui soient. Le prophète a donc fort à faire pour redonner le moral à ses contemporains : mais il le fait si bien qu’on appelle son livre « le livre de la Consolation d’Israël » parce que le chapitre 40 commence par cette phrase superbe : « Consolez, consolez mon peuple, dit votre Dieu » ; et le seul fait de dire « votre Dieu » est un rappel de l’Alliance, une manière de dire « l’Alliance de Dieu n’est pas rompue, Dieu ne vous a pas abandonnés ». Car l’une des formulations de l’Alliance entre Dieu et son peuple était « Vous serez mon peuple et je serai votre Dieu » ; et chaque fois que l’on entend cette expression « mon Dieu » ou « votre Dieu », ce possessif est un rappel de l’Alliance en même temps qu’une profession de foi. Isaïe va donc, de toutes ses forces, raviver l’espoir chez les exilés : Dieu ne les a pas abandonnés, au contraire, il prépare déjà leur retour au pays. On ne le voit pas encore, mais c’est sûr ! Pourquoi est-ce sûr ? Parce que Dieu est fidèle à son Alliance, parce que, depuis qu’il a choisi ce peuple, il n’a cessé de le libérer, de le maintenir en vie à travers toutes les vicissitudes de son histoire. Ce sont ces arguments-là qu’Isaïe développe ici : Nabuchodonosor vous fait peur ? Mais Dieu a déjà fait mieux : il vous a délivrés de Pharaon ! Le désert vous fait peur ? Mais le désert du Sinaï, c’était bien pire et Dieu a protégé son peuple tout du long ! Or, vous êtes toujours le peuple de Dieu, son élu. Sous-entendu « ce que Dieu a fait pour vous une fois, il le refera ». Comme il a fait passer son peuple à travers la Mer à pied sec au moment de la sortie d’Egypte, le SEIGNEUR saura faire passer son peuple « à pied sec » à travers toutes les eaux troubles de son histoire. L’espérance d’Israël s’appuie toujours sur son passé : c’est le sens du mot « Mémorial » ; on fait mémoire de l’oeuvre de Dieu depuis toujours, pour découvrir que cette oeuvre de Dieu se poursuit pour nous aujourd’hui, et pour y puiser la certitude qu’elle se poursuivra demain. Passé, Présent, Avenir : Dieu est à jamais présent aux côtés de son peuple. C’est l’un des sens du Nom de Dieu « Je suis » (sous-entendu, « Je suis avec vous en toutes circonstances). Je reviens à notre texte : c’est précisément au cours de cette période difficile de l’Exil, au moment où on risquait de s’installer dans la désespérance, que les prophètes ont développé une nouvelle métaphore, celle du germe : « Voici que je fais une chose nouvelle : elle germe déjà, ne la voyez-vous pas ? » dit Isaïe ici. Dans la Bible, ce n’est pas seulement un terme de botanique : à partir de l’expérience éminemment positive d’une minuscule graine capable de devenir un grand arbre, on voit bien comment le mot « germe » a pu devenir en Israël un symbole d’espérance. Le même prophète avait déjà dit équivalemment la même chose au chapitre précédent (preuve qu’il n’était pas inutile de le répéter) : « Je vous annonce de nouveaux événements, avant qu’ils germent, je vous les laisse entendre. » (Is 42, 2). Il nous reste à apprendre aujourd’hui à déceler les germes du monde nouveau, du Royaume que Dieu est en train de construire.

HOMÉLIE DU 5E DIMANCHE DE CARÊME C

11 mars, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 5E DIMANCHE DE CARÊME C

Is 43, 16-21 ; Phil 3, 8-14 ; Jn 8, 1-11

Rappelez-vous l’évangile de dimanche dernier. Il nous offrait la parabole de la miséricorde et du pardon. Elle se prolonge aujourd’hui, se précise et s’amplifie à trois voix : celles d’Isaïe, de Paul et de Jean. Ne songez plus au passé, dit le prophète. Je fais un monde nouveau. D’ailleurs, regardez, il germe déjà. Parole du Seigneur. Et Paul enchaîne : Le passé, c’est le passé, « J’oublie ce qui est en arrière et je cours vers l’avant ». Avec l’Evangile de Jean, nous sommes confrontés à un fait divers très médiatique, comme s’il était filmé en pleine rue, et comme on peut encore le voir à travers des faits divers contemporains : Des femmes tondues de force pour s’être converties à une autre religion, d’autres exécutées d’une balle dans la tête pour avoir eu un enfant hors mariage, ou même d’autres encore, pour un motif similaire, enterrées jusqu’au cou et lapidées. L’Evangile, lui, nous montre, d’un côté, des hommes, fanatisés par des principes, qui en appellent aux méthodes radicales pour faire régner ce qu’ils estiment être « l’ordre », « la justice » et « la pureté des mœurs ». En face, un jeune prophète, qui prendra le contre-pied de la rigueur agressive et aveugle de ceux qui se croient des « justes ». Entre les deux, une présumée coupable, ou une victime, dont le complice ou le responsable a réussi à prendre la fuite pour échapper à la lapidation. Les accusateurs s’appuient sur des lois, coutumes et traditions très anciennes, archaïques, qui ont été sacralisées et divinisées jusque dans les moindres détails. D’où, cette morale d’interdits rigides et sans nuances. Jésus ne vient pas pour autant contredire la grande Loi originelle de Moïse, et encore moins l’abolir. Au contraire. Il vient en fait l’accomplir à la perfection, mais en montrant comment il faut la comprendre et l’accomplir, car elle est fondamentalement une loi d’Alliance et une loi d’Amour. En précisant que la loi est faite pour l’homme et non l’homme pour la loi. Comme Paul l’écrira plus tard : « Nous servons sous le signe nouveau de l’Esprit et non plus sous le régime périmé de la lettre » (Rm 7, 6). Jésus dénonce ainsi l’intransigeance de ceux qui se prétendent être des « justes ». Des modèles !, parfaitement soumis et obéissants à la loi. Or, précisément, il ne suffit pas d’obéir. Pour Jésus, ce n’est pas l’amour de la loi qui sauve, mais bien la loi de l’Amour. Et si la faute mérite jugement, il ne peut être décrété par un cœur dur. Ni uniquement et scrupuleusement en fonction de coutumes et traditions, dont certaines sont vraiment barbares, et donc périmées. Comme il le dira un jour : « Je ne suis pas venu pour condamner, mais pour sauver. Vous, au contraire, qui prétendez être des justes, vous jugez de façon purement humaine » (Jn 8, 15). Cet épisode illustre bien deux types de « justice » qui s’opposent : celui de la lettre et celui de l’esprit. D’un côté, la Loi bétonnée et pétrifiée, aveugle et impitoyable. Un jugement sans appel. De l’autre, la loi de la Bonne Nouvelle du pardon et celle des Béatitudes. Un jugement, oui, mais un jugement de la miséricorde. Dans le cas présent, il y a, certes, faute et flagrant délit. Mais les accusateurs, qui ne sont pas sans péché, sont pris eux aussi en flagrant délit d’hypocrisie et de mauvaise foi. Non seulement, ils humilient publiquement une femme sans la moindre pitié, mais ils le font moins par « respect de la Loi » que pour tendre un piège à ce jeune prophète, contestataire et novateur, qui les dérange. Ce qu’ils veulent, c’est l’éliminer. De plus, ils sont eux-mêmes des adultères. Si pas selon la chair, certainement selon l’esprit. Puisqu’en refusant la miséricorde, ils trompent le Dieu de miséricorde. Evidemment, le danger existe toujours de prêcher une foi et une morale de facilité. Cependant, le danger est plus grand encore de faire de la religion un christianisme sans évangile. Autrement dit : d’être plus préoccupé d’exiger que d’écouter, de juger que d’accueillir, de dénoncer, plutôt que d’annoncer LA Bonne Nouvelle. Remarquez que le Maître ne condamne pas. Il garde sa confiance envers l’accusée. Il lui laisse toutes ses chances de conversion. Il ne dit pas pour autant : Va et vis ta vie comme tu l’entends. Mais bien : « Va et ne pèche plus ». Jésus est un guérisseur d’âme et un avocat spirituel. Maintenant , c’est à elle de prendre l’affaire en main, d’assumer ses responsabilités et de bâtir son avenir. Elle peut à nouveau regarder en avant, sans ressasser ni ruminer ses erreurs et fautes passées. Sans broyer du noir. Ainsi, ce matin, Jésus nous invite tous à prendre le chemin de la conversion et de l’espérance. Que nous soyons ici physiquement ou, plus largement encore, en esprit, à la maison, à l’hôpital ou en voiture, nous sommes là avec nos faiblesses et nos fautes. Et, peut-être même avec nos violences intérieures et nos pierres de lapidation. Mais le Christ nous invite à déposer tous nos cailloux. Nous avons pris place à la table de la Parole qui sauve, une Parole de miséricorde. Et nous allons rompre le Pain, Corps du Christ, qui nous invite au partage, pour changer nos cœurs de pierre en cœurs de chair, non pas au nom d’une loi qui tue, mais d’une loi qui sauve.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T) 1925 – 2008

Saint Paul

10 mars, 2016

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POUR UNE TRANSFORMATION D’AMOUR – LA PRIÈRE CONTACT AVEC DIEU

10 mars, 2016

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POUR UNE TRANSFORMATION D’AMOUR – LA PRIÈRE CONTACT AVEC DIEU

II y a longtemps déjà, saint Augustin s’écriait :  » Tu nous as faits pour toi, ô Seigneur, et notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en toi « 1. Nous venons de Dieu, en effet, et nous retournons vers Dieu. La nature humaine porte en elle-même une tendance, qui lui vient de son origine et de son Créateur, pour revenir vers son maître et sa fin qui est Dieu. II semble que bien des hommes ne prennent pas une nette conscience de cette tendance, de cette orientation de l’homme vers Dieu. Cette aspiration de la nature humaine est cependant réelle. Et il est des périodes de crise, comme la nôtre, où le monde semble envahi par le matérialisme, en proie à certains troubles profonds et à des craintes pour l’avenir. En ces périodes de crise, cette aspiration, sans devenir plus consciente chez bien des hommes qui ne vont que rarement ou jamais dans les profondeurs de leur âme, se manifeste d’une façon réelle et devient plus ardente. Nous constatons de nos jours que cette aspiration est ardente en effet : un des signes en est l’intérêt que l’on porte aux problèmes spirituels. Nous sommes orientés vers Dieu, nous retournons vers Dieu. Comment ici-bas, pouvons-nous, spécialement nous chrétiens, entrer en contact avec Dieu ? Dans ce contact avec Dieu, quelle est la part de l’homme ? C’est ce problème que je voudrais étudier avec vous, en m’appuyant sur la vérité révélée, qui nous est donnée et explicitée par l’Église ; en m’appuyant aussi sur des vérités psychologiques et sur la doctrine spirituelle des maîtres du Carmel qui sont, pour ainsi dire, des spécialistes, des professionnels de cette recherche de Dieu.

Qu’est-ce que la prière ? Demandons-nous d’abord ce que nous pensons de la prière, ce qu’évoque ce mot. Pour la plupart des hommes, le mot  » prière  » évoque un acte religieux, une récitation de prières vocales. Pour des artistes et des poètes, il évoque une certaine émotion religieuse, une sensation que l’on éprouve dans la partie la plus profonde et la meilleure de soi, émotion dans laquelle on croit trouver un certain contact avec Dieu. Pour le philosophe, du moins pour certains d’entre eux, la prière est un dépassement des choses extérieures, du monde sensible et même d’une certaine région du domaine intellectuel, dépassement qui conduit plus loin dans les profondeurs de l’esprit. Nous savons que certains philosophes modernes mettent précisément dans cette découverte, dans cette réalisation du plus profond d’eux-mêmes et de l’esprit en eux, une découverte de Dieu. Pour le mystique, la prière est aussi un dépassement, une recherche de Dieu qui s’affirme par des impressions profondes, par une expérience mystique, religieuse, dans laquelle l’activité de l’homme a une part, mais dont la part principale revient à l’activité de Dieu. Il y a dans toutes ces définitions quelque chose de vrai ; mais elles méritent d’être complétées. Et il nous paraît que, pour cela, nous n’avons qu’à reprendre notre définition du catéchisme2 et à la méditer. Qu’est-ce que la prière ? La prière est  » une élévation de notre âme vers Dieu « . Supprimons, si vous voulez, le mot  » élévation  » : la prière est une démarche de tout nous-même, de notre personne, vers Dieu. La prière est une prise de contact avec Dieu, pour un échange avec lui ; elle est un entretien, sainte Thérèse dira  » un commerce affectueux « 3. C’est l’amour évidemment qui est à la base de l’union, de l’échange, au principe du mouvement, et qui en est aussi le but, car qui aime veut aimer davantage ; et l’amour est en même temps le lien qui unit.

I. — LA DÉMARCHE VERS DIEU Dans cette prière qui est un échange, une démarche vers Dieu, que se passe-t-il ? Présence du Dieu infini Demandons-nous d’abord où est ce Dieu que nous cherchons : nous allons vers Dieu, encore faut-il savoir où il est. Nous savons que Dieu est partout, parce qu’il est infini. Il est dans tout le monde créé parce qu’il en est non seulement le créateur mais le conservateur : toutes choses ne peuvent subsister que par une action de Dieu, et donc par une présence de Dieu. Dieu est l’être simple, il agit partout et partout où il agit, il se trouve présent. Donc, aller vers Dieu, c’est chercher en soi-même, ou dans la nature, dans la création, ou au-delà du monde créé dans le monde des possibles, dans le fini de la création et dans l’infini au-delà, chercher donc cet être vivant qu’est Dieu. Car Dieu n’est pas une chose, Dieu est un être vivant. Le catéchisme nous apprend que Dieu est infini, et qu’en cet être infini, il y a trois personnes : le Père qui engendre son Fils, le Père et le Fils qui, se connaissant et se trouvant parfaits, s’aiment et par une spiration commune produisent l’Esprit Saint, spiration commune du Père et du Fils, spiration d’Amour personnifiée. Pour nous donc, Dieu est un être vivant. Permettez-moi d’insister sur cette vérité, car nous la méconnaissons bien souvent ; et les erreurs modernes sur la prière, sur la recherche de Dieu, ont le tort de la méconnaître. Dieu est un être vivant, un être infini et distinct de nous. Dieu est un être infini, nous sommes finis : entre nous, créatures, entre notre personne et Dieu, il y a l’infini, il y a un espace infini, une distance, non un fossé mais une distance. Que nous cherchions cet infini en nous ou dans la création ou bien au-delà, Dieu, être vivant qui nous pénètre et qui pénètre la création, est cependant pour ainsi dire séparé de nous par cet infini. Le problème de la prière, c’est de se porter vers Dieu, c’est de franchir cette distance infinie entre Dieu et nous. Pouvons-nous le faire ? Si vous le voulez bien, essayons de faire cette démarche, de nous porter vers Dieu, de nous mettre en quelque sorte en prière, en analysant brièvement les activités qui se déploient en nous. Vous me pardonnerez ces explications philosophiques et psychologiques : il est bon, de temps en temps, au moins une fois, de découvrir ce que nous faisons nous-mêmes chaque fois que nous nous mettons en prière. Et cela, non pas seulement pour une connaissance purement spéculative, mais pour perfectionner notre prière en perfectionnant précisément tous les mouvements, toutes les activités que nous déployons pour trouver Dieu.

L’attitude extérieure de prière Quand je me mets en prière, je fais une démarche. Même si je ne vais pas à l’église, si je ne fais pas le déplacement physique pour aller trouver Dieu dans le tabernacle, dans la maison de la prière, même si je prie chez moi, je déploie cependant une certaine activité physique extérieure. Je me mets à genoux, j’arrête du moins mon activité habituelle, parce que je conçois très bien que pour prier, du moins d’une façon parfaite, je dois orienter mes sens extérieurs vers la prière. Il y a d’ailleurs, nous le savons, des attitudes de prière : à genoux, debout les bras étendus ou levés… Quand nous considérons l’art dans les divers pays, surtout l’art primitif, comme dans les catacombes, nous découvrons presque toujours des orants. Cette attitude varie suivant les peuples et la conception qu’ils peuvent avoir de Dieu, ais il y a partout une attitude extérieure de prière. Actuellement, pour communier d’une façon plus étroite au sacrifice de la Messe, on insiste à juste raison, sur les diverses attitudes à prendre pendant la célébration parce que, dans notre civilisation, dans nos façons de faire, nous avons des attitudes expressives de tel ou tel sentiment. Nous nous tenons debout pendant le Credo, parce que c’est une attitude de confession, d’affirmation ; nous nous agenouillons pendant la consécration, parce que s’agenouiller c’est adorer, et nous adorons le mystère de la transsubstantiation et la présence du Christ à l’autel. Donc nous prions avec notre attitude extérieure, nous prions avec notre corps. Dans la démarche vers Dieu qu’est la prière, dans cette prise de contact, il y a tout d’abord une attitude extérieure qui contribue à cette prise de contact.

L’activité des facultés intérieures Mais la prière n’est pas toute là : il ne suffit pas de s’agenouiller pour se mettre en prière. Il y a un travail qui doit être fait par nos facultés intérieures, un travail de l’imagination et de la mémoire. Par exemple, je suis à l’église, ou chez moi pour prier, et je cherche Dieu ; je me place devant son image, devant le Crucifix, ma mémoire me rappelle le sacrifice du Calvaire. Je suis dans l’église, je me mets devant le tabernacle et, là aussi, ma mémoire me rappelle la vérité énoncée par le catéchisme : Jésus est présent avec son corps, son âme, sa divinité, dans le tabernacle. Peut-être vais-je essayer de construire cette présence à l’aide de mon imagination ; je sais fort bien qu’elle ne va pas reproduire la réalité, elle ne va faire que son travail, à savoir créer des images, se représenter la vérité par un symbole, reconstruire à sa façon la réalité. Je fais ce travail, afin de fixer mes sens sur cette vérité ; j’ai en moi des facultés qui ne peuvent être retenues et fixées que par une image. Et cela est nécessaire, me semble-t-il, à ma prière, car si je ne fais pas ce travail de la mémoire et de l’imagination, mes facultés vont s’envoler, partir s’occuper d’autre chose et je ne pourrai pas rester en prière. Mais il s’agit, maintenant, de prendre le contact avec Dieu. L’imagination et la mémoire ne me donnent pas ce contact, elle ne peuvent créer que des images. Lorsque je veux me rappeler un être cher qui est à distance et que je prends sa photographie ou que j’essaie de me rappeler ses traits, je n’arrive à créer qu’un symbole, mais je n’ai pas de contact vivant avec l’être aimé. Pour le contact vivant il faudrait sa présence, il faudrait que je puisse lui parler, l’étreindre, il faudrait que mon affection puisse pénétrer en lui véritablement pour que s’établisse cet échange vivant. Comment vais-je faire pour atteindre Dieu ainsi, pour réaliser ce contact vivant ? J’ai mon intelligence : Dieu est esprit, et moi-même, je suis esprit, j’ai mon âme qui est cet esprit. Vais-je pouvoir établir ce contact, ainsi, de mon esprit avec l’esprit qu’est Dieu ? Saint Jean de la Croix, le spécialiste de la prière, nous répondra : non, ce n’est pas possible4. Je puis prendre ce contact avec un homme, j’essaie de le faire actuellement avec vous : j’ai dans mon esprit une pensée que je traduis par une parole et, grâce à cette parole que je prononce, la pensée qui est dans mon esprit pénètre dans le vôtre. Il y a véritablement entre nous, actuellement, une communication d’esprit et de pensée. Est-ce que je puis le faire avec Dieu directement ? Non, parce qu’il n’y a pas de commune mesure. Cette communication que nous pouvons établir entre nous est rendue possible par le fait que notre intelligence à tous est finie, c’est-à-dire que le mot que j’emploie et qui traduit la pensée actuellement dans mon esprit, peut entrer dans le vôtre parce que nos esprits, pour ainsi dire, sont de même qualité. Mais avec Dieu, nous nous trouvons devant l’infini ; nous sommes des êtres finis, nous n’avons qu’une capacité limitée et notre intelligence, parce qu’elle est finie, si vaste soit-elle, ne peut pas étreindre cet infini qu’est Dieu. Nous sommes arrêtés par la distance, par le manque de proportion.

Le langage de l’analogie Je sais bien que Dieu a voulu établir cette communication entre lui et nous. Il nous a envoyé le Verbe incarné, qui nous a dit ce qui se passait au sein de Dieu. Notre Seigneur le dit nettement à Nicodème :  » Personne ne peut parler de Dieu, de la vie de Dieu, que celui qui en est venu ; lui sait ce qui s’y passe « 5, et il apporte la vérité. Mais le langage qu’a dû employer le Verbe incarné, Jésus, ainsi que l’Église à qui il a donné mission de nous enseigner, n’est qu’un langage  » analogique « . Dieu ne peut pas s’exprimer dans une parole humaine parce que la parole humaine est finie et que Dieu est infini. De même que l’océan ne peut pas être contenu dans un vase, de même et surtout, l’infini ne peut pas être exprimé, contenu, dans un mot humain, dans le langage humain, qui est fait uniquement pour la pensée humaine. Pour arriver à nous dire quelque chose de ce qui se passe en Dieu, en cet Être mystérieux et infini, Jésus a employé un langage analogique. Il a traduit en langage humain ce qui est infini et que le langage humain ne pourrait pas exprimer. De même — ceci est encore une comparaison —, quelqu’un qui vient d’un pays étranger où il a vu des choses extraordinaires, et qui veut les expliquer à un auditoire, est obligé de prendre des comparaisons ; il décrit tel animal en disant que sa tête ressemble à ceci, son corps à cela, il fait des comparaisons, pour essayer de traduire quelque chose de ce qu’il a vu : c’est un langage symbolique, un langage analogique. Pour l’infini, Notre Seigneur a agi ainsi ; il a pris, dans ce que nous savons et qui est du domaine de notre pensée, des réalités que nous connaissons, et il a traduit la vérité infinie dans ce langage que nous connaissons et comprenons, qui est dans notre expérience, dans la capacité de notre intelligence. Il nous a donné ainsi les vérités du dogme, notre catéchisme ; les vérités qui y sont exprimées sont donc de ces vérités analogiques. Oh, l’expression est la plus parfaite qui soit et on ne peut rien y changer. Mais cependant, en soi, cette expression n’est pas parfaite. Alors puisque l’expression n’est pas parfaite, nous ne pouvons pas au moyen de cette expression établir complètement pour ainsi dire, une union avec Dieu, il nous faut un autre moyen.

Le contact par la foi Allons-nous donc pouvoir franchir la distance, établir la communication, le contact, l’échange avec Dieu ? Oui, nous le pouvons, Dieu nous en a donné les moyens. Non seulement il nous a donné cette vérité mais il nous a donné, par-dessus tout, la grâce, la vie divine. Nous sommes Dieu par participation, nous sommes les enfants de Dieu. Le chrétien a reçu au baptême un moyen, un instrument, une puissance : la vertu surnaturelle de foi qui va lui permettre d’établir véritablement ce contact, cette union avec Dieu, de franchir la distance entre Dieu infini et nous. Que nous cherchions ce Dieu présent en nous ou dans le tabernacle, nous avons la vertu de foi, qui est une richesse incomparable car elle nous permet d’atteindre Dieu. Au baptême, nous recevons la vie surnaturelle et, comme toute vie, elle a des moyens pour se mouvoir et se développer. Nous avons une vie physique et un corps, des membres, des organes qui lui permettent de se développer, de se mouvoir, de poser ses actes. Nous avons la vie de l’âme et, en cette vie, des facultés, intelligence et volonté, qui lui permettent de s’épanouir et de se développer. De même, cette vie surnaturelle qui nous est donnée au baptême peut agir, se développer, s’épanouir. Elle a pour cela des moyens d’action, elle a, pour ainsi dire, des membres, des facultés, des puissances qui lui permettent d’agir, de poser ses actes propres de vie surnaturelle et de se développer. La première faculté qu’elle possède, la première puissance, c’est précisément cette vertu de foi qui lui permet de pénétrer en Dieu, d’entrer en Dieu. Comment vais-je faire cet acte de foi que nous assimilons à la prière ? Je vais prendre une vérité qui m’est donnée, par exemple  » un seul Dieu en trois Personnes « . Voilà l’expression humaine, analogique, de la vérité qui est en Dieu. Je la recueille avec mes sens, je l’ai lue, je l’ai entendue et je la présente à mon intelligence ; mon intelligence l’examine, la discute et voit qu’il n’y a rien de contradictoire :  » trois Personnes, une seule nature en Dieu « . Mon intelligence, cependant, ne l’admet pas. Pourquoi ? Parce que mon intelligence ne peut être forcée à l’adhésion d’une vérité que lorsqu’elle lui paraît évidente : deux et deux font quatre et mon intelligence adhère. Mais  » trois Personnes en un seul Dieu « , il n’y a pas de contradiction, mais il n’y a pas cependant une lumière telle, une évidence qui m’oblige à adhérer, à dire que c’est vrai. Devant une vérité qui n’est pas évidente, je cherche naturellement quelle est l’autorité qui me la présente, car je sais bien que je ne puis pas me rendre compte moi-même de tout par une évidence extérieure ou intérieure. J’adhère, je crois à bien des choses uniquement parce qu’elles m’ont été affirmées par quelqu’un, et que le témoignage qui m’en est donné me paraît valable. Je n’ai jamais vu l’Amérique, mais on me dit qu’elle existe, et j’ai des témoignages tels que je crois à l’existence de l’Amérique aussi fortement, aussi fermement que si je l’avais vue : voilà le témoignage. Cette vérité :  » un seul Dieu en trois Personnes « , qui n’est pas évidente pour moi, m’est affirmée par l’Église : j’examine si l’Église a autorité pour cela, si cette affirmation se trouve dans le dépôt de vérités qui lui a été légué par le Christ. Je découvre en effet que l’Eglise a autorité pour parler au nom de Dieu, que cette vérité particulière lui a été révélée par Dieu, et me voici devant un témoignage. J’ai fait mon travail intellectuel, j’ai fait une enquête, et je me dis :  » Puisque cela est affirmé par Dieu, je dois le croire « . Que se passe-t-il maintenant que j’ai reconnu que je dois croire ? Mon intelligence, à ce moment-là, abdique pour ainsi dire ; elle reconnaît qu’elle ne peut pas aller plus loin mais qu’elle est obligée d’adhérer bien qu’elle ne comprenne pas. La foi n’est donc pas dans une évidence que je perçois ; elle est, pour l’instant, dans la force, dans la vérité du témoignage. Lorsque j’en suis à ce point, à ce moment-là, je fais l’acte de foi ; je dis :  » Mon Dieu, je crois que vous êtes, je crois que vous existez, et qu’en vous il y a trois Personnes « . Voilà l’acte de foi. Que s’est-il passé ? Grâce à la soumission de l’intelligence qui a reconnu qu’elle ne peut pas aller plus loin et que, cependant, elle doit adhérer ; grâce à cette soumission raisonnable, obsequium rationabile, comme dit l’apôtre saint Paul6, mon intelligence a fait tout ce qu’elle a pu et elle reconnaît maintenant qu’elle ne peut pas aller plus loin, qu’elle ne peut raisonnablement faire qu’une chose, à savoir adhérer à la vérité qui lui est proposée. Est-ce un acte de foi ? Non pas encore. Comme un greffon … L’acte de foi est dans une démarche positive, dans un acte de la vertu de foi qui m’est donnée au baptême. Cette vertu de foi est greffée sur mon intelligence comme le greffon sur le cep de vigne. Nous savons ce que fait le vigneron quand il greffe la vigne : il taille le cep, fait une entaille et y met le greffon dont il désire avoir le fruit. Le greffon est fixé et dans quelques semaines ou quelques mois, il aura fait corps avec le cep de vigne. Nous aurons désormais les racines de la vigne primitive, le cep primitif et, sur ce cep, un greffon de la qualité dont nous désirons avoir les fruits. Dans notre âme, nous avons aussi les sens qui apportent l’aliment à notre intelligence ; cette intelligence est le cep primitif de la vigne ; sur ce cep primitif de la vigne, à savoir l’intelligence, nous avons le greffon de la foi. Le surnaturel, en nous, n’existe pas, pourrions-nous dire, à l’état pur ; il est greffé sur notre nature humaine, sur nos facultés humaines. L’intelligence reçoit la foi : la foi ne pourra pas agir sans l’intelligence. Elle agit en même temps avec la lumière qui lui arrive par l’intelligence et par les sens, de même que le greffon de la vigne reçoit la sève par le cep primitif et par les racines enfoncées dans la terre. Mais ce greffon de la vigne va donner son fruit propre, qui est le sien et non celui du cep primitif. De même, dans l’âme, la foi va produire son acte propre qui n’est pas un acte de l’intelligence, mais un acte de la vertu de foi, un acte surnaturel. Tout à l’heure, nous avons dit que l’intelligence, par ses propres forces, ne peut pas pénétrer en Dieu, parce qu’elle est finie et que Dieu est infini. Mais cette vertu de foi qui m’a été donnée au baptême, en tant qu’organe surnaturel, organe divin, peut pénétrer jusqu’en Dieu. Elle pénètre dans l’essence divine, elle y entre réellement, c’est sa fonction, c’est l’avantage de notre organisme surnaturel : elle pénètre réellement en Dieu, elle fait un acte de connaissance, une pénétration en Dieu.

L’acte essentiel de la prière Nous voici à l’acte essentiel de la prière, qu’il importe de mettre en relief. Quand je prie et que je fais un acte de foi en m’appuyant sur l’énoncé d’une vérité qui m’est donnée dans le catéchisme, en utilisant la formule habituelle de la prière, celle de la messe ou toute autre, j’entre en Dieu, j’établis un contact direct, un contact profond, un contact vivant avec Dieu. Tout à l’heure, nous nous demandions comment arriver à saisir l’infini : l’infini, je le saisis par la foi. Je voudrais bien que nous comprenions tous la valeur incomparable de notre foi. La foi n’a pas seulement comme résultat et bénéfice pour notre âme, de nous éclairer sur ce qu’est Dieu, sur des vérités que nous n’aurions jamais pu saisir uniquement par notre intelligence. Elle a l’avantage incomparable et suprême, d’établir un contact avec Dieu. c’est cela, la prière : ce contact avec Dieu. Dans l’Évangile, presque à tout instant, dans les relations de Jésus avec les foules ou avec les personnes qui viennent lui demander une grâce, nous voyons l’effet de la foi. Lorsqu’on vient demander un miracle à Notre Seigneur, la plupart du temps, il demande :  » Avez-vous la foi ? « 7 c’est-à-dire, êtes-vous véritablement en relation avec moi, avez-vous pris contact avec moi, avec la divinité qui est en moi, avec la puissance de ma divinité ? Et quand le contact est établi, le miracle est réalisé. Il arrivera même, parfois, qu’il n’y ait pas de dialogue entre Notre Seigneur et la personne qui vient lui demander une grâce, comme l’hémorroïsse de Capharnaüm qui s’approche de lui et se dit  » Oh ! si je réussis seulement à toucher la frange de son vêtement, je serai guérie « 8. En effet, elle touche la frange du vêtement de Notre Seigneur avec foi, et immédiatement elle se sent guérie. Et Notre Seigneur se retourne :  » Qui m’a touché ?  » Les apôtres lui disent :  » Mais tout le monde te presse et tu demandes qui t’a touché !  » Oui, mais quelqu’un l’a touché, c’est la foi qui l’a touché, qui l’a pénétré comme un glaive pour ainsi dire et lui a arraché une vertu.

De même que la Cananéenne9 qui le prie avec foi, de même que le centurion10 qui le prie avec foi, provoquent en Notre Seigneur un tressaillement, l’hémoroïsse a produit un tressaillement dans le Christ. Le centurion provoquera l’enthousiasme :  » Je n’ai jamais rencontré une telle foi en Israël… « 11 Cet enthousiasme, ce tressaillement que nous sentons dans le Christ, nous le produisons en Dieu lui-même chaque fois que nous le touchons avec foi, avec une foi ardente. Le voilà, le contact de la prière, la voilà, la valeur de la prière, nous dirions l’essence, la partie essentielle de la prière. La prière, certes, est une attitude extérieure, elle est un recueillement, elle est une pensée ; elle est surtout un contact avec Dieu, c’est en cela qu’elle consiste. Ce contact est pénétrant et quand nous pénétrons en Dieu, que ce contact est établi, il y a un échange véritable : Dieu est un océan, Dieu est un feu, Dieu est une fontaine vive. Chaque fois que nous prenons contact avec Dieu, nous touchons l’océan qu’il est, nous touchons à la flamme, à l’incendie qu’il est, et par conséquent, nous puisons en lui la substance divine, nous pouvons recevoir une augmentation de la participation de la vie divine qu’est la grâce en nous. Il est possible que nous n’obtenions pas la grâce spéciale, temporelle, que nous avons demandée, mais nous recevons bien mieux puisque nous nous divinisons à son contact. Voilà ce qu’est la prière : c’est essentiellement ce contact avec un Dieu vivant, avec un Dieu qui réagit, non pas comme un simple être inanimé, mais comme une personne vivante, par un tressaillement, par un don de lui-même.

II. — L’ACTE HUMAIN PAR EXCELLENCE Cette prière, cette prise de contact avec Dieu, prendra des formes bien différentes. La prière, qui est l’exercice de la vertu de foi, pourra s’exercer dans toute âme qui a la foi. Elle prendra évidemment des formes différentes au point de vue extérieur. Essentiellement, elle sera la même pour tous : ce sera toujours cette prise de contact entre l’être vivant qu’est Dieu et notre âme, par l’intermédiaire de la foi. Mais dans ses formes extérieures en nous, elle prendra des formes bien différentes.

Une foi en éveil Est-ce que l’enfant peut prier ? Mais oui, il le peut. Comment exprimera-t-il sa prière ? Comme un enfant, par un baiser au tabernacle, par un sourire peut-être, par une parole dont nous comprendrons à peine le sens, mais qu’importe ? Il exprime sa prière comme il peut ; mais puisqu’il a la foi, et qu’on lui a dit que Jésus est dans le tabernacle ou en lui, il va pouvoir exercer cette foi, d’une façon non pas explicitée à la manière d’un adulte, mais cependant réelle. Le contact est établi avec Dieu et, par conséquent, l’enrichissement de ce contact sera réalisé en lui. Un peu plus tard, il le prendra avec des images, puis avec une pensée ; mais ce contact, quelle que soit sa forme extérieure, y sera à la mesure de sa foi. Et nous, dans notre prière, nous veillerons bien à prendre contact ainsi, à mettre notre foi en éveil. Notre exercice de prière sera une prière vocale peut-être, mais à la condition qu’elle soit animée intérieurement par la foi, par cet acte de la foi qui est en nous. Elle sera animée peut-être par une méditation ou par le silence. Trop souvent on croit que, pour que la prière soit fervente, efficace, pénétrante, il faut qu’elle soit chargée d’une activité extérieure ou intellectuelle très grande : il n’en est rien. Même dans l’état de fatigue où je n’ai plus la disposition de mes facultés, où je ne puis plus penser, état qui me laissera moi-même insensible, pourvu que cette vertu de foi qui est en moi cherche Dieu, dise sa foi et son amour à Dieu, ma prière sera efficace. La prière est toujours possible, justement parce que l’âme peut toujours faire cet acte intérieur de foi.

Nous sommes faits pour Dieu Nous savons que notre prière, étant toujours possible, pourra devenir continuelle lorsque nous en avons l’habitude ; notre prière doit rester, du moins en tendance et en désir, aussi continuelle que possible. Qu’est-ce que le chrétien ? Certes le chrétien est quelqu’un qui doit affirmer sa foi, son christianisme, par sa charité, son attitude extérieure, l’accomplissement de ses devoirs ; mais, essentiellement, le chrétien est celui qui tend vers sa fin, vers Dieu. Le chrétien, c’est celui qui croit qu’il vient de Dieu, qu’il retourne à Dieu et qu’il est appelé à participer à la vie divine, à se perdre dans la Trinité sainte. Le chrétien croit à cela, il croit que sa véritable vie n’est pas ici-bas, mais dans la Trinité sainte. Car nous sommes faits pour Dieu, nous sommes faits pour le Ciel ; et le Ciel ne consiste pas uniquement à retrouver ceux que nous aimons : le Ciel consiste essentiellement à trouver Dieu, à entrer dans le mouvement de la Trinité sainte. La grâce nous fait enfants de Dieu et, au sein de la Trinité sainte, il y a le Père, le Fils et l’Esprit Saint ; notre grâce nous appelle précisément à nous identifier au Verbe de Dieu, au Fils de Dieu. Le Fils de Dieu s’est incarné, c’est en lui que nous trouvons notre fin, c’est à nous perdre en lui que nous devons travailler. Et c’est en lui que nous trouverons notre bonheur : ce sera de lui être identifié, d’entrer avec lui dans la Trinité sainte, de partager ses opérations, et par là son bonheur. Voilà notre fin, voilà le Ciel : non pas seulement être spectateur de Dieu, mais agir avec Dieu en agissant avec le Verbe, avec le Fils de Dieu. Voilà notre fin, c’est là la vie qui n’aura pas de terme, la vie du Ciel. La prière, le contact avec Dieu, c’est déjà l’exercice de la vie éternelle ; c’est l’exercice du Ciel, c’est la réalisation des opérations que nous ferons dans le Ciel. Notre vie ici-bas ne nous a été donnée que pour préparer cela, pour nous exercer, pour réaliser déjà ce que nous ferons dans le Ciel. Nous le réalisons dans la foi, c’est-à-dire sans la jouissance ; dans le Ciel, nous le réaliserons dans la vision et dans le bonheur parfait. La prière n’est donc pas un incident dans notre vie ; la prière, c’est l’acte chrétien par excellence, c’est la préparation de notre éternité, c’est la réalisation par avance des opérations que nous ferons dans l’éternité.

Puissance de la prière Quand nous regardons la prière de cette façon, cette prise de contact avec Dieu comme l’acte essentiel de l’homme, l’acte humain par excellence — acte humain par excellence car il est déjà un acte divin —, nous voyons l’importance qu’il doit avoir dans notre vie. Je ne parle pas ici de la puissance de la prière au point de vue de la grâce que nous pouvons recevoir, mais de sa puissance en tant qu’elle nous associe à la vie et par conséquent à la puissance de Dieu. C’est Dieu qui mène le monde, et nous avons un moyen pour participer à cette puissance de Dieu et donc à la direction du monde avec lui. C’est par la prière, par le contact avec lui, en nous mêlant à lui, en nous unissant à lui, que nous dirigeons pour ainsi dire, à notre tour et avec lui, le monde. Et sainte Thérèse nous dit que l’âme qui prie, commande tour à tour avec Dieu dans son union12 ; Dieu lui laisse gouverner le monde, à ses moments et à ses heures. Ou plutôt, elle est toute soumise à Dieu mais Dieu qui ne se laisse pas vaincre en délicatesse lui laisse à son tour le gouvernement du monde. Quand nous serons dans le Ciel et que nous verrons les choses dans la vérité, nous serons frappés de voir comment Dieu lui-même a été délicat avec les hommes et les âmes qui lui étaient unies, en leur laissant la direction du monde, en cédant même à leurs désirs dans la direction des événements. Voici la prière, ainsi que dira sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus13, comme une reine, comme une puissance entrant dans le sein de Dieu et dans le gouvernement du monde. On a osé dire parfois que l’âme de prière était une égoïste, qui recherchait des impressions dans la prière et qui délaissait le monde. Oh ! les malheureux qui disent cela et qui n’ont pas compris, bien que chrétiens, ce qu’est la prière, son essence. Non, le moyen de s’intéresser au monde et de pratiquer la charité avec le monde — oh, il en est d’autres, je ne dis pas que ce soit le seul — mais enfin le plus efficace, c’est d’entrer dans ce mouvement de Dieu par la prière. Si vous le voulez bien, retenons justement cela : la prière nous introduit en Dieu, elle nous fait entrer en contact avec lui et, si elle est parfaite, elle nous fait partager en même temps ses opérations. Retenons aussi que ce moyen est à notre disposition : de jour et de nuit, par un acte de foi, nous pouvons entrer en lui, rester en lui. Retenons que Dieu a toujours la porte ouverte pour nous laisser entrer en lui par la prière. Dieu est un feu consumant, une fontaine toujours jaillissante, le bien diffusif de lui-même et, à tout instant par conséquent, il ne dépend que de nous, par un acte de foi, par un acte d’amour, de prendre contact avec lui, de nous vivifier nous-mêmes, de nous enrichir surnaturellement. Il dépend de nous de faire cet acte divin qu’est la prière, d’entrer en Dieu et, quand nous sommes en lui, d’agir sur cette Cause première par le contact que nous avons réalisé et par l’amour que nous lui portons et qu’il nous porte ; d’agir en lui et par lui, pour le bien de notre âme et du monde. Restons simplement sur ces pensées, spécialement celle du contact avec Dieu, et profitons de cette vérité que je voudrais voir entrer profondément dans vos âmes pour qu’elle y devienne désormais une idée-force, une pensée qui vous plonge dans la véritable vie, qui vous plonge en Dieu. Que, plongés ainsi en Dieu, au moins de temps en temps, vous ayez de plus en plus le désir de revenir en lui, de vivre avec lui, et dans ce contact avec lui, de vous diviniser, de devenir une puissance pour ceux qui vous entourent et pour le monde.

NOTES SUR LE SITE (DOCUMENTS)

JÉRUSALEM, MÈRE DE DIEU – Frédéric Manns

10 mars, 2016

http://www.christusrex.org/www1/ofm/sbf/dialogue/mere_de_dieu.html

JÉRUSALEM, MÈRE DE DIEU

Frédéric Manns

Dans le dialogue inter religieux Marie tient peu de place, il faut l’avouer. Si les musulmans respectent la mère d’Issa, il n’en est pas toujours ainsi de la part des Juifs. Curieusement, la communauté judéo-chrétienne de Jérusalem, par souci de respect des frères aînés, répète qu’il est impossible de traduire en hébreu l’expression Marie, mère de Dieu, sans provoquer leur indignation. Pour ne choquer personne elle propose de traduire ’em immanouel ou ’em Yeshouah Eloheynou. Le concile d’Ephèse, qui a donné à Marie le titre de Theotokos, a connu les mêmes difficultés et les mêmes réticences. Les objections ne manquaient pas de la part de Nestorius. Malgré tout, l’Eglise a affirmé que Marie est la Theotokos ou la Dei Genitrix. C’est un fait que l’inculturation du message chrétien s’est faite dans le monde hellénistique. Mais, puisqu’il est impossible de réécrire l’histoire à rebours, une réflexion préliminaire doit rappeler la signification de l’expression : Marie, mère de Dieu. Le catéchisme de l’Eglise universelle au paragraphe 466 s’exprime ainsi : « Le Verbe en s’unissant dans sa personne une chair animée par une âme rationnelle est devenu homme. L’humanité de Jésus n’a d’autre sujet que la personne divine du Fils de Dieu qui l’a assumée et faite sienne dès sa conception. Pour cela le concile d’Ephèse a proclamé en 431 que Marie est devenue en toute vérité Mère de Dieu par la conception humaine du Fils de Dieu dans son sein : Mère de Dieu non pas parce que le Verbe de Dieu a tiré d’elle sa nature divine, mais parce que c’est d’elle qu’il tient le corps sacré doté d’une âme rationnelle uni auquel en sa personne le Verbe est dit naître selon la chair ». Plus loin, au paragraphe 495, le catéchisme continue: « Marie appelée dans les Evangiles mère de Jésus est appelée aussi sous l’inspiration de l’Esprit la Mère de mon Seigneur (Lc1,43). De fait, celui que Marie a conçu comme homme par l’action de l’Esprit et qui est devenu son Fils selon la chair est le Fils éternel du Père, la seconde personne de la Trinité. L’Eglise confesse que Marie est la Theotokos ». La traduction hébraïque de Lc 1,43 : ’em ’adony pourrait servir de modèle à une version moderne de l’expression Marie, mère de Dieu. La version syriaque de l’Evangile de Luc avait traduit : ’emeh de mary, Mar étant le titre réservé à Dieu. L’expression Marie “mère de Dieu” ne devrait pas choquer les frères aînés, parce que ce titre est attribué à Jérusalem. Du fait que la ville contient la présence symbolique de Dieu, elle est appelée Mère de Dieu. C’est ce qui ressort du targum du cantique des cantiques III,11 “Sortez, filles de Sion, voyez le roi Salomon avec le diadème dont sa mère l’a couronné, le jour de ses noces, le jour de la joie de son coeur”. “Quand le roi Salomon vint pour célébrer la dédicace du sanctuaire, un héraut cria à haute voix et dit ainsi : Sortez, habitants des districts de la terre d’Israël et peuple de Sion. Et regardez le roi Salomon avec le diadème et la couronne dont le peuple de la maison d’Israël le couronna au jour de la dédicace du Temple . Et réjouissez-vous pour la fête des Tentes pendant quatorze jours .”. Dans ce commentare les filles de Sion sont les habitants de la terre d’Israël et le peuple de Jérusalem. Le Roi Salomon est Dieu. Le nom Salomon indique directement Dieu dans tout le targum. La mère du Roi est le peuple de la maison d’Israël. La couronne que le peuple a posée sur Dieu est le Temple. Israël est mère de Dieu en tant qu’elle contient la présence de Dieu au temple. Le midrash Sifra Lev 9,221 applique la même interprétation à la tente du témoignage du désert après la théophanie du Sinaï. La présence de Dieu au milieu de son peuple fait de ce dernier la mère de Dieu. L’expression « Marie mère de Dieu » en fait ne choque pas plus les frères aînés juifs que l’affirmation de l’Incarnation de Dieu. Ce mystère est refusé également au nom de la transcendance de Dieu. Est-ce à dire que les chrétiens ont renoncé au monothéisme strict pour retourner à la mythologie grecque ? L’accusation est fréquente même dans les milieux ouverts au dialogue inter religieux. La foi au Christ dans la théologie chrétienne se remplit en Marie, mère de Dieu selon l’humanité, d’une lumière nouvelle : paradoxalement Marie ne cesse de dévoiler le visage humain de Dieu. Serge Boulgakov affirme que le secret que Marie dévoile est celui de la maternité de Dieu. L’amour de Dieu a un visage féminin, de nombreux théologiens l’ont rappelé récemment. Marie révèle encore un autre secret : celui de l’Eglise : « Il n’y a qu’une seule Vierge Mère et il me plaît de l’appeler l’Eglise », écrivait Clément d’Alexandrie. « La Mère de Dieu c’est l’Eglise qui prie », affirme de son côté Serge Boulgakov. Il existe donc un lien étroit et profond entre la présence de Marie et l’action de l’Eglise, entre la purification de l’âme en Marie et celle en Eglise. L’auteur de cette purification est l’Esprit de Dieu. Marie et l’Eglise sont les deux manifestations visibles de Celui qui reste invisible. L’Esprit est la Vierge et la Vierge est l’Eglise, selon l’affirmation de Saint Ambroise. Les icônes de Marie aux titres si variés ne font rien d’autre que de souligner les aspects différents de l’Eglise, vierge et mère. Marie est également à l’origine de la mémoire de l’Eglise. Elle méditait tous les souvenirs de l’Eglise des origines dans son cœur. Elle est l’archétype et la personnification de l’Eglise, corps du Christ et Temple de l’Esprit. Enfin, Marie, accueillant Dieu en elle lors de l’annonciation, montre que la nature humaine peut être complètement transfigurée par Dieu. Elle est l’image de l’âme fécondée par l’Esprit qui engendre le Seigneur. La Pentecôte, où Marie est présente comme mère de l’Eglise, n’est autre que la mission de l’Eglise visant à humaniser l’humanité tentée par l’animalité. Curieusement Marie de Nazareth, chantée par le monde entier et peinte par d’innombrables artistes, n’a pas de place dans l’encyclopédie Judaica. Une omission curieuse pour le moins pour la femme juive la plus célèbre dans le monde entier. « Les grands mystiques et les grands athées se rencontrent », disait Dostoïevski. C’est qu’il nous parlent d’un Dieu plus grand que notre cœur, que nos représentations mentales et que nos recherches spirituelles. Ce Dieu se révèle Autre et, pour qu’il vive, nos représentations confortables de Dieu et de Marie, doivent disparaître.

Raffaello Sanzio, Study for God the Father

9 mars, 2016

Raffaello Sanzio, Study for God the Father dans images sacrée 98025f21ffc1153b317862086899e207

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PAPE FRANÇOIS – 9. LA MISÉRICORDE ET LA CORRECTION

9 mars, 2016

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PAPE FRANÇOIS – 9. LA MISÉRICORDE ET LA CORRECTION

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 2 mars 2016

Chers frères et sœurs, bonjour,

En parlant de la miséricorde divine, nous avons évoqué à plusieurs reprises la figure du père de famille, qui aime ses enfants, en prend soin, les pardonne. Et en tant que père, il les éduque et les corrige lorsqu’ils se trompent, favorisant leur croissance dans le bien. C’est ainsi qu’est présenté Dieu dans le premier chapitre du prophète Isaïe, dans lequel le Seigneur, en tant que père affectueux mais également attentif et sévère, s’adresse à Israël, l’accusant d’infidélité et de corruption, pour la reporter sur la voie de la justice. Notre texte commence ainsi : « Cieux écoutez, terre prête l’oreille, / car Yahvé parle. / J’ai élevé des enfants, je les ai fait grandir, / mais ils se sont révoltés contre moi. / Le bœuf connaît son possesseur, / et l’âne la crèche de son maître, / Israël ne connaît pas, / mon peuple ne comprend pas » (1, 2-3). Dieu, à travers le prophète, parle au peuple avec l’amertume d’un père déçu : il a fait grandir ses enfants, et à présent, ils se sont rebellés contre lui. Même les animaux sont fidèles à leur maître et reconnaissent la main qui les nourrit ; le peuple, en revanche, ne reconnaît plus Dieu, se refuse de comprendre. Même blessé, Dieu laisse parler l’amour, et fait appel à la conscience des enfants dégénérés afin qu’ils reconnaissent leurs torts et qu’ils se laissent à nouveau aimer. Voilà ce que fait Dieu ! Il vient à notre rencontre afin de nous laisser aimer par Lui par notre Dieu. La relation père-fils, à laquelle les prophètes font souvent référence pour parler du rapport d’alliance entre Dieu et son peuple, s’est dénaturée. La mission éducative des parents vise à les faire grandir dans la liberté, à les rendre responsables, capables d’accomplir des œuvres de bien pour eux-mêmes et pour les autres. En revanche, à cause du péché, la liberté devient prétention d’autonomie, prétention d’orgueil, et l’orgueil conduit au conflit et à l’illusion de se suffire à soi-même. Voilà alors que Dieu rappelle son peuple : « Vous vous êtes trompés de chemin ». Affectueusement et amèrement, il dit « mon » peuple. Dieu ne nous renie jamais ; nous sommes son peuple, le plus méchant des hommes, la plus méchante des femmes, les plus méchants des peuples sont ses fils. Et Dieu est comme cela: il ne nous renie jamais, jamais ! Il dit toujours : « Mon Fils, viens ». Et cela est l’amour de notre Père ; cela est la miséricorde de Dieu. Avoir un tel père nous donne espérance, nous donne confiance. Cette appartenance devrait être vécue dans la confiance et dans l’obéissance, dans la conscience que tout est un don qui vient de l’amour du Père. Et en revanche, apparaissent la vanité, la folie et l’idolâtrie.

C’est pourquoi le prophète s’adresse à présent directement à ce peuple à travers des paroles sévères pour l’aider à comprendre la gravité de sa faute : « Malheur ! nation pécheresse ! [...] fils pervertis ! / Ils ont abandonné Yahvé, / ils ont méprisé le Saint d’Israël, / ils se sont détournés de lui » (v. 4). La conséquence du péché est un état de souffrance, dont le pays subit également les conséquences, étant dévasté et transformé en désert, au point que Sion — c’est-à-dire Jérusalem — devient inhabitable. Là où se trouve le refus de Dieu, de sa paternité, il n’y a plus de vie possible, l’existence perd ses racines, tout apparaît perverti et anéanti. Toutefois, également dans ce moment douloureux le salut est en vue. L’épreuve est envoyée pour que le peuple puisse faire l’expérience de l’amertume de celui qui abandonne Dieu, et donc se confronter avec le vide désolant d’un choix de mort. La souffrance, conséquence inévitable d’une décision autodestructrice, doit faire réfléchir le pécheur pour l’ouvrir à la conversion et au pardon. Tel est le chemin de la miséricorde divine : Dieu ne nous traite pas selon nos fautes (cf. Ps 103, 10). La punition devient l’instrument pour inciter à réfléchir. On comprend ainsi que Dieu pardonne son peuple, fait grâce et ne détruit pas tout, mais laisse toujours ouverte la porte à l’espérance. Le salut implique la décision d’écouter et de se laisser convertir, mais il reste toujours un don gratuit. Dans sa miséricorde, le Seigneur indique donc une route qui n’est pas celle des sacrifices rituels, mais plutôt de la justice. Le culte est critiqué non parce qu’il est inutile en lui-même, mais parce qu’au lieu d’exprimer la conversion, il prétend la remplacer ; et il devient ainsi la recherche d’une propre justice, en créant la conviction trompeuse que ce sont les sacrifices qui sauvent et non la miséricorde divine qui pardonne le péché. Pour bien comprendre: quand quelqu’un est malade, il va chez le médecin; quand quelqu’un se sent pécheur, il va auprès du Seigneur. Mais si au lieu d’aller chez le médecin, il va chez le sorcier, il ne guérit pas. Très souvent, nous n’allons pas auprès du Seigneur, mais nous préférons emprunter de fausses routes, en cherchant en dehors de Lui une justification, une justice, une paix. Dieu, dit le prophète Isaïe, n’aime pas le sang des taureaux et des agneaux (v. 11), en particulier si l’offrande est faite avec des mains sales du sang de nos frères (v. 15). Je pense que si certains bienfaiteurs de l’Église venaient avec une offrande — « Prenez cette offrande pour l’Église » — qui est le fruit du sang de beaucoup de gens exploités, maltraités, esclavagisés par un travail mal payé, je dirai à ces gens : « S’il te plaît, reprends ton chèque, brûle-le ». Le peuple de Dieu, c’est-à-dire l’Église, n’a pas besoin d’argent sale, il a besoin de cœurs ouverts à la miséricorde de Dieu. Il est nécessaire de s’approcher de Dieu avec les mains purifiées, en évitant le mal et en pratiquant le bien et la justice. Comme la façon dont termine le prophète est belle : « Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien ! / Recherchez le droit, redressez le violent ! / Faites droit à l’orphelin, plaidez pour la veuve » (vv. 16-17). Pensez aux nombreux réfugiés qui débarquent en Europe et ne savent pas où aller. Alors, dit le Seigneur, les péchés, même s’ils étaient écarlates, deviendraient blancs comme la neige, et candides comme la laine, et le peuple pourra se nourrir des biens de la terre et vivre en paix (v. 19). C’est le miracle du pardon que Dieu, le pardon que Dieu, en tant que Père, veut donner à son peuple. La miséricorde de Dieu est offerte à tous, et ces paroles du prophète valent également aujourd’hui pour nous tous, appelés à vivre comme des enfants de Dieu. Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier les groupes des diocèses de Saint-Denis, de Grenoble et de Mamfé, avec leurs évêques, ainsi que les séminaristes de Toulouse. La miséricorde de Dieu est offerte à tous. Mettons à profit ce temps du carême qui nous est donné pour regretter nos péchés, et nous engager courageusement dans une vie nouvelle.

Je vous souhaite un bon chemin vers Pâques, et que Dieu vous bénisse.

BENOÎT XVI – « (EN COMMUNION AVEC LE CHRIST NOUS POUVONS CONNAÎTRE DIEU COMME PÈRE VÉRITABLE (CF. MT 11, 27) »

9 mars, 2016

https://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2012/documents/hf_ben-xvi_aud_20121003.html

BENOÎT XVI – « (EN COMMUNION AVEC LE CHRIST NOUS POUVONS CONNAÎTRE DIEU COMME PÈRE VÉRITABLE (CF. MT 11, 27) »

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre

Mercredi 3 octobre 2012

Chers frères et sœurs,

Dans la dernière catéchèse j’ai commencé à parler de l’une des sources privilégiées de la prière chrétienne : la sainte liturgie, qui — comme l’affirme le Catéchisme de l’Église catholique — est « participation à la prière du Christ, adressée au Père dans l’Esprit Saint. En elle toute prière chrétienne trouve sa source et son terme » (n. 1073). Je voudrais aujourd’hui que nous nous demandions : dans ma vie, est-ce que je réserve une place suffisante à la prière et, surtout, quelle place a dans ma relation avec Dieu la prière liturgique, en particulier la Messe, comme participation à la prière commune du Corps du Christ qui est l’Église ? En répondant à cette question, nous devons nous rappeler tout d’abord que la prière est la relation vivante des fils de Dieu avec leur Père infiniment bon, avec son Fils Jésus Christ et avec l’Esprit Saint (cf. ibid., n. 2565). La vie de prière consiste donc à être de manière habituelle en présence de Dieu et à en avoir conscience, à vivre en relation avec Dieu comme nous vivons les relations habituelles de notre vie, celles avec les membres les plus chers de notre famille, avec nos vrais amis ; c’est même cette relation avec le Seigneur qui donne la lumière à toutes nos autres relations. Cette communion de vie avec Dieu, Un et Trine, est possible car à travers le baptême nous avons tous été insérés dans le Christ, nous avons commencé à être un avec Lui (cf. Rm 6, 5). En effet, ce n’est qu’en Christ que nous pouvons dialoguer avec Dieu le Père comme des fils, autrement cela n’est pas possible, mais en communion avec le Fils nous pouvons nous aussi dire, comme Il l’a dit : « Abbà ». En communion avec le Christ nous pouvons connaître Dieu comme Père véritable (cf. Mt 11, 27). C’est pourquoi la prière chrétienne consiste à nous tourner constamment et de manière toujours nouvelle vers le Christ, à parler avec Lui, à demeurer en silence avec Lui, à l’écouter, à agir et à souffrir avec Lui. Le chrétien redécouvre sa véritable identité en Christ, « premier-né de toute créature », dans lequel toute chose subsiste (cf. Col 1, 15sq). En m’identifiant à Lui, en étant un avec Lui, je redécouvre mon identité personnelle, celle de véritable fils qui regarde Dieu comme un Père plein d’amour. Mais n’oublions pas : nous découvrons le Christ, nous le connaissons comme Personne vivante, dans l’Église. Celle-ci est « son Corps ». Cette corporéité peut être comprise à partir des paroles bibliques sur l’homme et sur la femme : les deux seront une seule chair (cf. Gn 2, 24 ; Ep 5, 30sq ; 1 Co 6, 16s). Le lien indissoluble entre le Christ et l’Église, à travers la force unifiante de l’amour, n’annule pas le « toi » et le « moi », mais les élève au contraire à leur unité la plus profonde. Trouver sa propre identité en Christ signifie parvenir à une communion avec Lui, qui ne m’annule pas, mais qui m’élève à la plus haute dignité, celle de fils de Dieu dans le Christ : « L’histoire d’amour entre Dieu et l’homme consiste justement dans le fait que cette communion de volonté grandit dans la communion de pensée et de sentiment, et ainsi notre vouloir et la volonté de Dieu coïncident toujours plus » (Enc. Deus caritas est, n. 17). Prier signifie s’élever à la hauteur de Dieu, à travers une transformation progressive nécessaire de notre être. Ainsi, en participant à la liturgie, nous faisons nôtre la langue de la mère Église, nous apprenons à parler en elle et pour elle. Naturellement, comme je l’ai déjà dit, cela a lieu de manière progressive, peu à peu. Je dois me plonger progressivement dans les paroles de l’Église, avec ma prière, avec ma vie, avec ma souffrance, avec ma joie, avec ma pensée. C’est un chemin qui nous transforme. Je pense alors que ces réflexions nous permettent de répondre à la question que nous nous sommes posée au début : comment puis-je apprendre à prier, comment puis-je grandir dans ma prière ? En regardant le modèle que nous a enseigné Jésus, le Notre Père, nous voyons que le premier mot est « notre » et le deuxième est « Père ». La réponse est donc claire : en apprenant à prier je nourris ma prière, en m’adressant à Dieu comme Père et en priant-avec-les-autres, en priant avec l’Église, en acceptant le don de ses mots, qui deviennent peu à peu familiers et riches de sens. Le dialogue que Dieu établit avec chacun de nous, et nous avec Lui, dans la prière inclut toujours un « avec » : on ne peut pas prier Dieu de manière individualiste. Dans la prière liturgique, surtout l’Eucharistie, et — formés par la liturgie — dans toute prière, nous ne parlons pas uniquement en tant qu’individus, mais nous entrons dans le « nous » de l’Église qui prie. Et nous devons transformer notre « moi » en entrant dans ce « nous ». Je voudrais rappeler un autre aspect important. Dans le Catéchisme de l’Église catholique nous lisons : « Dans la liturgie de la Nouvelle Alliance, toute action liturgique, spécialement la célébration de l’Eucharistie et des sacrements, est une rencontre entre le Christ et l’Église » (n. 1097) ; donc c’est le « Christ total », toute la Communauté, le Corps du Christ uni à son Chef qui célèbre. La liturgie n’est alors pas une sorte d’« auto-manifestation » d’une communauté, mais c’est en revanche une manière de sortir du simple « être-soi-même », être enfermés en soi-même, et d’accéder au grand banquet, d’entrer dans la grande communauté vivante, dans laquelle Dieu lui-même nous nourrit. La liturgie implique universalité et ce caractère universel doit entrer toujours à nouveau dans la conscience de tous. La liturgie chrétienne est le culte du temple universel qu’est le Christ ressuscité, dont les bras sont ouverts sur la croix pour attirer tous les hommes dans l’accolade d’amour éternel de Dieu. C’est le culte du ciel ouvert. Ce n’est jamais seulement l’événement d’une communauté singulière, ayant une place particulière dans le temps et dans l’espace. Il est important que tout chrétien se sente et soit réellement inséré dans ce « nous » universel, qui fournit le fondement et le refuge au « moi », dans le Corps du Christ qu’est l’Église. En cela, nous devons avoir à l’esprit et accepter la logique de l’incarnation de Dieu : il s’est fait proche, présent, en entrant dans l’histoire et dans la nature humaine, en se faisant l’un de nous. Et cette présence se poursuit dans l’Église, son Corps. La liturgie n’est alors pas le souvenir d’événements passés, mais la présence vivante dans le Mystère pascal du Christ qui transcende et unit les temps et les espaces. Si dans la célébration n’émerge pas la place centrale du Christ, nous n’aurons pas une liturgie chrétienne, totalement dépendante du Seigneur et soutenue par sa présence créatrice. Dieu agit par l’intermédiaire du Christ et nous ne pouvons agir que par son intermédiaire et en Lui. Chaque jour doit croître en nous la conviction que la liturgie n’est pas notre « action », mon « action » mais l’action de Dieu en nous et avec nous. Par conséquent, ce n’est pas l’individu — prêtre ou fidèle — ou le groupe qui célèbre la liturgie, mais elle est avant tout action de Dieu à travers l’Église, qui a son histoire, sa riche tradition et sa créativité. Cette universalité et ouverture fondamentale, qui est propre à toute la liturgie, est l’une des raisons pour laquelle elle ne peut pas être conçue ou modifiée par une communauté singulière ou par des experts, mais elle doit être fidèle aux formes de l’Église universelle. L’Église tout entière est toujours présente même dans la liturgie de la communauté la plus petite. C’est pourquoi il n’y a pas d’« étrangers » dans la communauté liturgique. L’Église tout entière, le ciel et la terre, Dieu et les hommes participent ensemble à chaque célébration liturgique. La liturgie chrétienne, même si elle est célébrée dans un lieu et un espace concret, et exprime le « oui » d’une communauté déterminée, est par sa nature catholique, provient du tout et conduit au tout, en unité avec le Pape, avec les évêques, avec les croyants de toutes les époques et de tous les lieux. Plus une célébration est animée par cette conscience, plus se réalise en elle de façon fructueuse le sens authentique de la liturgie. Chers amis, l’Église est visible de nombreuses façons : dans l’action caritative, dans les projets de mission, dans l’apostolat personnel que chaque chrétien doit réaliser dans son milieu. Mais le lieu où l’on en fait pleinement l’expérience en tant qu’Eglise est dans la liturgie: elle est l’acte par lequel nous croyons que Dieu entre dans notre réalité et nous pouvons le rencontrer, nous pouvons le toucher. C’est l’acte par lequel nous entrons en contact avec Dieu: Il vient à nous, et nous sommes illuminés par Lui. C’est pourquoi, lorsque dans les réflexions sur la liturgie, nous concentrons notre attention uniquement sur la façon de la rendre attrayante, intéressante et belle, nous risquons d’oublier l’essentiel: la liturgie se célèbre pour Dieu et non pour nous-mêmes; c’est son œuvre; c’est Lui le sujet; et nous devons nous ouvrir à Lui et nous laisser guider par Lui et par son Corps qui est l’Eglise. Demandons au Seigneur de nous enseigner chaque jour à vivre la sainte liturgie, en particulier la Célébration eucharistique, en priant dans le «nous» de l’Eglise, qui porte son regard non pas sur elle-même, mais sur Dieu et en sentant que nous sommes une partie de l’Eglise vivante de tous les lieux et de tous les temps. Merci.

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