Archive pour le 4 mars, 2016

James Tissot – The Return of the Prodigal Son (Le retour de l’enfant prodigue) – Brooklyn Museum

4 mars, 2016

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https://en.wikipedia.org/wiki/Parable_of_the_Prodigal_Son

SAINT PAUL AUX CORINTHIENS 5, 17-21 – COMMENTAIRES DE MARIE-NOËLLE THABUT

4 mars, 2016

http://www.eglise.catholique.fr/approfondir-sa-foi/la-celebration-de-la-foi/le-dimanche-jour-du-seigneur/commentaires-de-marie-noelle-thabut/

COMMENTAIRES DE MARIE-NOËLLE THABUT, DIMANCHE 6 MARS 2016

DEUXIEME LECTURE – DEUXIÈME LETTRE DE SAINT PAUL AUX CORINTHIENS  5, 17-21

Frères, 17 si quelqu’un est en Jésus-Christ, il est une créature nouvelle. Le monde ancien s’en est allé, un monde nouveau est déjà né. 18 Tout cela vient de Dieu : il nous a réconciliés avec lui par le Christ, et il nous a donné le ministère de la réconciliation. 19 Car c’est bien Dieu qui, dans le Christ, réconciliait le monde avec lui ; il n’a pas tenu compte des fautes, et il a déposé en nous la parole de la réconciliation. 20 Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c’est Dieu lui-même qui lance un appel. nous le demandons au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. 21 Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin qu’en lui, nous devenions justes de la justice même de Dieu.

La difficulté de ce texte, c’est qu’on peut le comprendre de deux manières. Tout se joue peut-être sur la phrase qui est au centre : Dieu « effaçait pour tous les hommes le compte de leurs péchés ». Cela peut vouloir dire deux choses : soit, première hypothèse, depuis le début du monde, Dieu fait le compte des péchés des hommes. Mais, dans sa grande miséricorde, il a quand même accepté d’effacer ce compte à cause du sacrifice de Jésus-Christ. C’est ce qu’on appelle « la substitution ». Jésus aurait porté à notre place le poids de ce compte trop lourd. Soit, deuxième hypothèse, Dieu n’a jamais fait le moindre compte des péchés des hommes et le Christ est venu dans le monde pour nous le prouver. Pour nous montrer que Dieu est depuis toujours Amour et Pardon. Comme disait déjà le psaume 102/103 bien avant la venue du Christ, « Dieu met loin de nous nos péchés ». Or tout le travail de la révélation biblique consiste justement à nous faire passer de la première hypothèse à la deuxième. Nous allons donc nous poser trois questions : premièrement Dieu tient-il des comptes avec nous ? Deuxièmement, peut-on parler de « substitution » pour la mort du Christ ? Troisièmement, si Dieu ne fait pas de comptes avec nous, si on ne peut pas parler de « substitution » à propos de la mort du Christ, alors comment comprendre ce texte de Paul ? Tout d’abord, Dieu fait-il des comptes avec nous ? Un Dieu comptable, c’est une idée qui nous vient assez spontanément à l’esprit : probablement parce que nous sommes un peu comptables nous-mêmes à l’égard des autres ? Cette idée était incontestablement celle du peuple élu au début de l’histoire de l’Alliance ; rien d’étonnant : pour que l’homme découvre Dieu tel qu’il est vraiment, il faut que Dieu se révèle à lui. Et nous voyons, dimanche après dimanche, le travail de la Révélation biblique. Commençons par Abraham : Dieu n’a jamais parlé de péché avec lui ; il lui a parlé d’Alliance, de Promesse, de bénédiction, de descendance : on ne trouve le mot « mérite » nulle part. La Bible note « Abraham eut foi dans le SEIGNEUR et cela lui fut compté comme justice » (Gn 15, 6). La foi, la confiance, c’est la seule chose qui compte. Nos comportements suivront. Dieu n’en fait pas des comptes : ce qui ne veut pas dire que nous pouvons désormais faire n’importe quoi ; nous gardons notre entière responsabilité dans la construction du royaume. Ou encore, rappelons-nous les révélations successives de Dieu à Moïse, en particulier, le « SEIGNEUR miséricordieux et bienveillant, lent à la colère et plein d’amour » ; et puis David qui a découvert (à l’occasion de son péché justement) que le pardon de Dieu précède même nos repentirs. Ou encore cette magnifique phrase où Isaïe nous dit que Dieu nous surprendra toujours parce que ses pensées ne sont pas nos pensées, précisément parce qu’il n’est que pardon pour les pécheurs. (Is 55, 6-8) Impossible de tout citer, mais l’Ancien Testament, déjà, avait compris que Dieu est tendresse et pardon et n’oublions pas que le peuple d’Israël a appelé Dieu « Père » bien avant nous. La fable de Jonas par exemple a été écrite justement pour qu’on n’oublie pas que Dieu s’intéresse au sort de ces païens de Ninivites, les ennemis héréditaires de son peuple. Deuxième question, peut-on parler de « substitution » pour la mort du Christ ? Evidemment, si Dieu ne tient pas des comptes, si donc nous n’avons pas de dette à payer, nous n’avons pas besoin que Jésus se substitue à nous ; d’autre part, quand les textes du Nouveau Testament parlent de Jésus, ils parlent de solidarité, mais pas de substitution ; et d’ailleurs, si quelqu’un pouvait agir à notre place, où serait notre liberté ? Jésus n’agit pas à notre place ; il ne se substitue pas à nous ; il n’est pas non plus notre représentant ; Jésus est notre frère aîné, le « premier-né » comme dit Paul, notre pionnier, il ouvre la voie, il marche à notre tête ; il se mêle aux pécheurs en demandant le Baptême de Jean ; sur la Croix il acceptera de mourir du fait de la haine des hommes : il se rapproche ainsi de nous pour que nous puissions nous rapprocher de lui. Troisième question : mais alors, comment comprendre notre texte de Paul d’aujourd’hui ? Première conviction, Dieu n’a jamais fait le moindre compte des péchés des hommes ; deuxième conviction, le Christ est venu dans le monde pour nous le prouver. Comme il l’a dit à Pilate « Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité ». C’est-à-dire pour nous montrer que Dieu est depuis toujours Amour et Pardon. Quand Paul dit « il effaçait pour tous les hommes le compte de leurs péchés », c’est dans nos têtes qu’il efface nos fausses idées sur un Dieu comptable. La question rebondit : pourquoi Jésus est-il mort ? Le Christ est venu pour témoigner de ce Dieu d’amour auprès de ses contemporains ; il a essuyé le refus de cette révélation ; et il a accepté de mourir d’avoir eu trop d’audace, d’avoir été trop gênant pour les autorités en place qui savaient mieux que lui qui était Dieu. Il est mort de cet orgueil des hommes qui s’est mué en haine sans merci. Au sein même de ce déchaînement d’orgueil, il a subi l’humiliation ; au sein de la haine, il n’a eu que des paroles de pardon. Voilà le vrai visage de Dieu enfin exposé au regard des hommes. « Qui m’a vu a vu le Père » (dit-il à Philippe, Jn 14, 9). On comprend mieux alors la phrase : « Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché des hommes, afin que, grâce à lui, nous soyons identifiés à la justice de Dieu. » Sur le visage du Christ en croix, nous contemplons jusqu’où va l’horreur du péché des hommes ; mais aussi jusqu’où vont la douceur et le pardon de Dieu. Et de cette contemplation peut jaillir notre conversion. « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé » disait déjà Zacharie (Za 12,10), repris par Saint Jean (Jn 19, 37). Alors nos cœurs de pierre pourront enfin devenir des cœurs de chair, comme disait Ezéchiel, c’est-à-dire, pleins de douceur et de pardon comme lui. A nous maintenant de devenir à notre tour les ambassadeurs de son message.

 

HOMÉLIE DU 4E DIMANCHE DE CARÊME, C

4 mars, 2016

http://parolesdudimanche.blogs.lalibre.be/

HOMÉLIE DU 4E DIMANCHE DE CARÊME, C

Jos 5, 10-12 ; 2 Co 5, 17-21 ; Lc 15, 1-3, 11-32

Charles Péguy, qui était revenu à la foi catholique à 35 ans, écrivait à propos de l’enfant prodigue : « Toutes les paraboles sont belles, mais, sur celle-ci, des centaines et des milliers d’hommes ont pleuré : un homme avait deux fils. » C’est en effet la parabole la plus émouvante. La plus vivante. Une grande histoire d’amour. Et sans doute la plus belle image de Dieu. Un Père prodigue, lui aussi, mais de générosité, de miséricorde. Un géniteur de réconciliation. Car la parabole est un drame en deux actes. Histoire d’un conflit entre un père et ses deux enfants, qu’il aime intensément et autant l’un que l’autre. Une histoire qui peut se revivre dans bien des familles. On pourrait la titrer « la parabole des deux enfants perdus » ou bien celle « des deux enfants retrouvés » ou encore « la parabole inachevée » puisqu’il n’est rien dit de la suite. En fait, on peut constater que, dans les commentaires, la prédication, les examens de conscience et les représentations artistiques, on met presque toujours l’accent sur l’enfant prodigue. Et particulièrement sur sa vie dissipée et son travail de gardien de pourceaux. Ce qui est un peu court, mais certainement plus facile. Par contre, Rembrandt a consacré sept dessins, une gravure et une peinture au thème du retour de l’enfant prodigue. Le tableau est des plus célèbres. Un commentateur de cet admirable tableau attire l’attention sur un symbole génial des deux mains du père accueillant l’enfant perdu, l’une serait une main d’homme, la seconde une main de femme. La première saisit, assure, l’autre caresse et adoucit. Un Dieu Père et Mère. Une évocation très biblique. Heureux les enfants d’une telle Mère qui est Père. Mais comment se comportent les deux fils ? Très mal. Chacun à leur manière. Car il ne faut surtout pas se fier aux apparences. Sachez d’abord qu’au départ la parabole s’adressait au peuple d’Israël, le fils chéri de Dieu. Et même son fils unique, enseignait-on dans les synagogues. Quant aux païens, ils n’étaient que des créatures enfoncées dans le péché. Des mangeurs de porcs. Et certainement pas des fils. Un problème qui divisait aussi les premières communautés chrétiennes. Mais Jésus, puis ses apôtres, les avaient élevés au rang de dernier-né, de benjamin, égaré sans doute, éloigné, mais pas nécessairement plus pécheur que le fils aîné. D’où l’attitude choquée et la grogne des fidèles et pieux pharisiens. En fait, les deux fils sont tous deux des pécheurs. Le péché fondamental du cadet est manifeste : son égoïsme. Un égoïsme qui se traduit en termes de propriété et donc d’exigence envers son père. Impatient et gourmand, il ne veut pas attendre que son père soit mort. Il réclame son dû. Il a droit à un tiers de la fortune paternelle. Et bien, qu’il le prenne, dit le père, l’amour ne se négocie pas. Ou, comme dit le Cantique des cantiques: « celui qui offrirait tous ses biens pour obtenir l’amour ne récolterait que mépris » (8, 7). Le cœur du Père et Mère n’en est pas moins déchiré. L’aîné, tout au contraire, c’est une perle, un fidèle, un parfait, un obéissant. L’exemple même des croyants qui honorent le Père, le célèbrent dans le culte, observent sa loi. Un portrait dans lequel nous sommes toujours prêts à nous reconnaître. Mais, comme les auditeurs de Jésus, scribes et pharisiens, ce bon fils pratique, a lui aussi un égoïsme de propriétaire. Comme eux, il est convaincu que la fidélité crée des obligations à Dieu. Je suis fidèle, Dieu me doit le salut. C’est pourquoi, enfermé dans sa suffisance et drapé de vertu, l’aîné déroule la liste de ses mérites. Je suis laborieux, régulier, efficace, respectueux et fidèle. Je n’ai rien à me reprocher. Il sait obéir, en effet, mais il ne sait pas aimer. En définitive, il est tout aussi égoïste que son frère cadet. Comme lui, il pense en termes de propriété et de droit. Il y ajoute même les privilèges. De même, le peuple fidèle, et les plus fidèles d’entre eux, les pharisiens, croyaient au privilège de la venue d’un Messie pour eux seuls. Pas question de le partager avec les païens qui n’observaient pas la loi. Et donc tout juste bons à être condamnés. C’est ainsi qu’une fidélité peut devenir source d’orgueil spirituel, jusqu’au refus du dialogue interreligieux et même du dialogue œcuménique, dirions-nous aujourd’hui. L’invitation au festin des retrouvailles et de la réconciliation sera la goutte qui va faire déborder la coupe. Et le fils fidèle va se révéler tel qu’il est : colérique, jaloux et agressif. Il accuse même son père de favoritisme et lui reproche de vouloir festoyer avec un coupable. Mais la pratique de Dieu ne relève pas d’exigences dues au devoir, mais bien des exigences d’un amour sans frontière. Il peut même réunir ses enfants par des chemins différents, aussi bien par celui de la révolte que par celui de l’obéissance. La parabole reste ouverte. C’est à chacun de nous d’en écrire la suite. Que fera l’aîné ? Manger avec son frère « impur » ou rester muré dans sa colère ? Et la parabole ne dit pas qu’une réponse positive est facile et va de soi. Voilà pour la parabole de l’évangile. Mais l’actualité, elle aussi, nous livre parfois, sur le même thème, d’authentiques paraboles. Des paraboles incarnées dans le quotidien d’aujourd’hui. Ainsi ce père palestinien, qui décide de donner les organes de son fils à une banque d’organes, sachant que de jeunes israëliens pourraient en bénéficier. En effet, grâce à ce geste fou et quasiment incroyable, trois enfants israëliens ont été sauvés. Il ne s’agit pas d’une légende, ni d’un conte de fée. C’est un fait réel. Une parabole vivante. La plus belle image de Dieu.

P. Fabien Deleclos, franciscain (T)

1925 – 2008