Archive pour février, 2016

HOMÉLIE 2E DIMANCHE DE CARÊME

19 février, 2016

http://www.homelies.fr/homelie,,4485.html

HOMÉLIE 2E DIMANCHE DE CARÊME

dimanche 21 février 2016

Famille de Saint Joseph

« Regarde le Ciel » demande le Seigneur à Abraham. L’invitation à la conversion pour notre deuxième semaine de carême concerne notre regard. Jésus transfiguré s’offre aux regards tournés vers le Ciel et ouvre à une autre conversion : celle de nos oreilles. « Écoutez-le », clame la voix dans la nuée. Jésus va sur la montagne pour prier. C’est son but. Il ne va pas comme on prépare une surprise spectaculaire. Il rejoint le Père. Jésus emmène avec lui trois de ses disciples. Ceux qui sont de toutes les théophanies. Il les « prend » avec lui ; Jésus prend les disciples dans sa prière, il les introduit au cœur de son dialogue avec le Père. En montant sur le Thabor, nous entreprenons un voyage au cœur de la Trinité. Nous le savons, quand il prie, Jésus dit « Abba, Père ». L’évangile nous fait entendre que le Père en retour l’appelle « mon Fils, celui que j’ai choisi ». Il existe une intimité entre les deux que personne d’autre ne partage. Intimité ici ne veut pas dire proximité exclusive des autres. Elle veut dire connaissance dans l’amour. Car « personne ne connaît le Fils, sinon le Père, et personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler » (Mt 11,27). L’évangile nous fait donc entrer dans l’intimité de la prière de Jésus non pas comme des spectateurs (ou des voyeurs !) mais comme des amis à qui le Fils veut révéler le Père. C’est pour cette raison qu’il nous prend avec lui. Jésus nous révèle le Père en nous introduisant au cœur dans sa relation filiale. C’est-à-dire qu’on ne vit pleinement la paternité de Dieu que dans le Fils. Sans doute trouvons-nous là une raison pour laquelle Jésus ne s’est jamais présenté comme le Fils de Dieu. Certes, la première raison est à trouver dans la culture de l’époque – « fils de Dieu » désignait autant les rois que les prophètes ou toute personnalité marquante –, mais, par-dessus tout, parce qu’on ne peut connaître le Fils que dans sa relation au Père. Ainsi, s’il nous permet de connaitre le Père, Jésus nous permet aussi de le connaître lui-même, dans le Père. Le Père est heureux de ce don. Il est profondément heureux que son Fils lui ramène ses enfants dispersés. Il s’ouvre à eux et les fait entrer dans le dialogue intime qu’il entretient éternellement avec le Fils : « Celui-ci est mon Fils ». Le Père nous désigne le Fils et nous interpelle ; dès lors, il nous introduit lui aussi dans le colloque qu’il entretient avec le Verbe éternel. Le « tu es mon fils, aujourd’hui je t’ai engendré » du psaume s’ouvre dans l’évangile à un autre interlocuteur dans le « voici mon fils bien-aimé ». Dieu le Père nous prend avec lui dans la prière de son Fils. Parce qu’elle nous introduit au cœur du mystère de la vie, la transfiguration est une annonce de la mort et de la résurrection. Les deux. Car l’union du Fils au Père, la vie filiale à laquelle Jésus nous introduit par sa prière, se découvre aussi sur la Croix, offrande du Fils de l’Homme. Le Thabor comme la Croix est l’autel où le Grand-Prêtre élève son offrande au Père. Le Thabor comme la Croix est le lieu d’où Jésus attire tous à lui, dans le sein du Père. « On ne vit plus que Jésus seul » : Ecce Homo. L’Homme, dans toute sa gloire, l’Homme dans la lumière de la résurrection. Gravir avec Jésus le Thabor est donc un chemin purement spirituel et totalement incarné. Inutile, comme saint Pierre, de se rêver s’installant dans un monde qui ne serait que spirituel. Ce ne serait pas l’éternité, ce n’est qu’une ultime tentation pour les disciples. On ne monte pas sa tente sur la montagne sainte. Il faut redescendre de la montagne et vivre la grâce reçue, jusque dans sa chair. Saint Paul disait dans la deuxième lecture : « le Seigneur Jésus Christ (…) transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux ». La grâce du Thabor nous concerne tout entiers, corps, âme et esprit. Dans un monde où « beaucoup de gens vivent en ennemis de la croix du Christ », dans une culture qui méprise le corps, faisant de lui à la fois une idole et un objet, il est important de rappeler la noblesse et la vraie grandeur du corps. Elles sont celles de la personne humaine. Cette « transformation de nos corps » se vit également au pluriel, communautairement. En nous transfigurant tous « à l’image de son corps glorieux », tous ensemble, le Christ transfigure aussi nos différences qui sont un reflet de sa propre richesse. Ces différences fondamentales qui caractérise chacun des enfants de Dieu nous pèsent souvent et nous divisent parfois. Sur le Thabor, elles révèlent leur sens et elles trouvent leur unité dans le Christ. De même en chaque individu. La contemplation de la transfiguration agit en prisme pour nos dispersions et pour nos dissipassions intérieures. Contempler la lumière du Christ nous unifie intérieurement et nous unit à lui en nous révélant notre sens et notre unité. Le Christ est le sens de notre vie. En contemplant le transfiguré, nous contemplons notre avenir. Quand la voix se tait dans la nuée, il ne reste que le silence qui ouvre les yeux : « on ne vit plus que Jésus seul ». Seigneur Jésus, donne-nous d’accueillir ta Parole comme le Père le demande pour que te connaissions dans l’amour. Ainsi nous te reconnaîtrons en chacun de nos frères et en nous-mêmes ; ainsi nous marcherons joyeux et confiants à ta suite, vers la Jérusalem Céleste où nous trouverons enfin la demeure où nous installer dans ton amour.

Frère Dominique

Holy Cross

18 février, 2016

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BENOÎT XVI – LA LITURGIE , ÉCOLE DE PRIÈRE : SEIGNEUR LUI-MÊME NOUS ENSEIGNE À PRIER

18 février, 2016

https://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2012/documents/hf_ben-xvi_aud_20120926.html

BENOÎT XVI – LA LITURGIE , ÉCOLE DE PRIÈRE : SEIGNEUR LUI-MÊME NOUS ENSEIGNE À PRIER

AUDIENCE GÉNÉRALE

Place Saint-Pierre

Mercredi 26 septembre 2012

Chers frères et sœurs,

Ces derniers mois, nous avons parcouru un chemin à la lumière de la Parole de Dieu, pour apprendre à prier de façon toujours plus authentique en examinant plusieurs grandes figures de l’Ancien Testament, les Psaumes, les Lettres de saint Paul et l’Apocalypse, mais surtout en examinant l’expérience unique et fondamentale de Jésus, dans sa relation avec le Père céleste. En réalité, ce n’est que dans le Christ que l’homme devient capable de s’unir à Dieu avec la profondeur et l’intimité d’un fils à l’égard d’un Père qui l’aime, ce n’est qu’en Lui que nous pouvons nous adresser en toute vérité à Dieu en l’appelant avec affection : « Abba, Père ! ». Comme les apôtres, nous aussi avons répété ces dernières semaines et répétons à Jésus aujourd’hui : « Seigneur, apprends-nous à prier » (Lc 11, 1). En outre, pour apprendre à vivre encore plus intensément la relation personnelle avec Dieu, nous avons appris à invoquer l’Esprit Saint, premier don du Ressuscité aux croyants, car c’est Lui qui « vient au secours de notre faiblesse ; car nous ne savons que demander pour prier comme il faut » (Rm 8, 26) dit saint Paul, et nous savons qu’il a raison. À présent, après une longue série de catéchèses sur la prière dans l’Écriture, nous pouvons nous demander : comment puis-je me laisser former par l’Esprit Saint et devenir ainsi capable d’entrer dans l’atmosphère de Dieu, de prier avec Dieu ? Quelle est cette école à travers laquelle Il m’enseigne à prier, Il m’aide dans mes difficultés à m’adresser de façon correcte à Dieu ? La première école de la prière — nous l’avons vu au cours de ces semaines — est la Parole de Dieu, l’Écriture Sainte. L’Écriture Sainte est un dialogue permanent entre Dieu et l’homme, un dialogue progressif dans lequel Dieu se révèle toujours plus proche, dans lequel nous pouvons connaître toujours mieux son visage, sa voix, son être ; et l’homme apprend à accepter de connaître Dieu, à parler avec Dieu. Donc, au cours de ces semaines, en lisant l’Écriture Sainte, nous avons tenté, à partir de l’Écriture, de ce dialogue permanent, d’apprendre comment nous pouvons entrer en contact avec Dieu. Il y a encore un autre « espace » précieux, une autre « source » précieuse pour grandir dans la prière, une source d’eau vive très étroitement liée à la précédente. Je veux parler de la liturgie, qui est un domaine privilégié dans lequel Dieu parle à chacun de nous, ici et maintenant, et attend notre réponse. Qu’est-ce que la liturgie ? Si nous ouvrons le Catéchisme de l’Église catholique — aide toujours précieuse, dirais-je et indispensable — nous pouvons lire qu’à l’origine, le terme « liturgie » signifie « service de la part de/et en faveur du peuple » (n. 1069). Si la théologie chrétienne a emprunté ce mot du monde grec, elle l’a évidemment fait en pensant au nouveau Peuple de Dieu né du Christ, qui a ouvert ses bras sur la Croix pour unir les hommes dans la paix de l’unique Dieu. « Service en faveur du peuple », un peuple qui n’existe pas en soi, mais qui s’est formé grâce au Mystère pascal de Jésus Christ. En effet, le Peuple de Dieu n’existe pas en vertu de liens de sang, de territoire, de nation, mais il naît toujours de l’œuvre du Fils de Dieu et de la communion avec le Père qu’il nous obtient. Le Catéchisme indique en outre que « dans la tradition chrétienne (le mot “liturgie”) veut signifier que le Peuple de Dieu prend part à l’œuvre de Dieu » (n. 1069), car le Peuple de Dieu en tant que tel n’existe que par l’œuvre de Dieu. C’est ce que nous a rappelé le développement même du Concile Vatican II, qui débuta ses travaux, il y a cinquante ans, avec la discussion du schéma sur la sainte liturgie, approuvé ensuite solennellement le 4 décembre 1963, le premier texte approuvé par le Concile. Que le document sur la liturgie fût le premier résultat de l’assemblée conciliaire, fut peut-être attribué par certains au hasard. Parmi les nombreux projets, le texte sur la sainte liturgie sembla être le moins controversé et, précisément pour cette raison, en mesure de constituer comme une sorte d’exercice pour apprendre la méthodologie du travail conciliaire. Mais sans aucun doute, ce qui à première vue peut sembler un hasard, s’est démontré être le choix le plus juste, même à partir de la hiérarchie des thèmes et des tâches les plus importantes de l’Église. En effet, en commençant par le thème de la « liturgie » le Concile mit en lumière de façon très claire le primat de Dieu, sa priorité absolue. Dieu avant toute chose : c’est précisément ce que nous dit le choix conciliaire de partir de la liturgie. Là où le regard de Dieu n’est pas déterminant, toute autre chose perd son orientation. Le critère fondamental pour la liturgie est son orientation à Dieu, pour pouvoir ainsi participer à son œuvre même. Mais nous pouvons nous demander : quelle est cette œuvre de Dieu à laquelle nous sommes appelés à participer ? La réponse que nous offre la Constitution conciliaire sur la sainte liturgie est apparemment double. Au numéro 5 elle nous indique, en effet, que l’œuvre de Dieu, ce sont ses actions historiques qui nous apportent le salut, qui ont culminé dans la Mort et la Résurrection de Jésus Christ ; mais au numéro 7 la même Constitution définit précisément la célébration de la liturgie comme « œuvre du Christ ». En réalité, ces deux significations sont indissociablement liées. Si nous nous demandons qui sauve le monde et l’homme, la seule réponse est : Jésus de Nazareth, Seigneur et Christ, crucifié et ressuscité. Et où devient actuel pour nous, pour moi aujourd’hui le Mystère de la Mort et de la Résurrection du Christ qui nous apporte le salut ? La réponse est : dans l’action du Christ à travers l’Église, dans la liturgie, en particulier dans le sacrement de l’Eucharistie, qui rend présente l’offre sacrificielle du Fils de Dieu, qui nous a rachetés ; dans le sacrement de la réconciliation, où l’on passe de la mort du péché à la vie nouvelle ; et dans les autres actes sacramentaux qui nous sanctifient (cf. Presbyterorum ordinis, n. 5). Ainsi le mystère pascal de la Mort et de la Résurrection du Christ est le centre de la théologie liturgique du Concile. Allons encore un peu plus loin et demandons-nous: de quelle manière est rendue possible cette actualisation du mystère pascal du Christ ? Le bienheureux Pape Jean-Paul II, 25 ans après la constitution Sacrosanctum Concilium, écrivit : « Pour actualiser son mystère pascal, le Christ est toujours là, présent dans son Église, surtout dans les actions liturgiques. La liturgie est, en effet, le lieu privilégié de rencontre des chrétiens avec Dieu et celui qu’il a envoyé, Jésus Christ (cf. Jn 17, 3) » (Vicesimus quintus annus, n. 7). Dans la même perspective, nous lisons dans le Catéchisme de l’Église catholique : « Une célébration sacramentelle est une rencontre des enfants de Dieu avec leur Père, dans le Christ et l’Esprit Saint, et cette rencontre s’exprime comme un dialogue, à travers des actions et des paroles » (n. 1153). Par conséquent, la première exigence pour une bonne célébration liturgique est qu’elle soit prière, entretien avec Dieu, écoute tout d’abord puis réponse. Saint Benoît, dans sa « Règle », en parlant de la prière des Psaumes, indique aux moines : mens concordet voci, « que l’esprit concorde avec la voix ». Le saint enseigne que dans la prière des Psaumes, les paroles doivent précéder notre esprit. Habituellement, cela ne se passe pas ainsi, nous devons d’abord penser puis ce que nous avons pensé est converti en parole. Ici en revanche, dans la liturgie, c’est l’inverse, la parole précède. Dieu nous a donné la parole et la sainte liturgie nous offre les paroles ; nous devons entrer à l’intérieur des paroles, dans leur signification, les accueillir en nous, nous mettre en harmonie avec ces paroles ; ainsi devenons-nous fils de Dieu, semblables à Dieu. Comme le rappelle Sacrosanctum Concilium, pour assurer la pleine efficacité de la célébration « il est nécessaire que les fidèles accèdent à la liturgie avec les dispositions d’une âme droite, qu’ils harmonisent leur âme avec leur voix, et qu’ils coopèrent à la grâce d’en haut pour ne pas recevoir celle-ci en vain » (n. 11). Un élément fondamental, primaire, du dialogue avec Dieu dans la liturgie, est la concordance entre ce que nous disons avec les lèvres et ce que nous portons dans le cœur. En entrant dans les paroles de la grande histoire de la prière, nous sommes nous-mêmes conformés à l’esprit de ces paroles et nous devenons capables de parler avec Dieu. Dans cette optique, je voudrais seulement mentionner l’un des moments qui, au cours de la liturgie elle-même, nous appelle et nous aide à trouver cette concordance, cette conformation à ce que nous écoutons, nous disons et nous faisons pendant la célébration de la liturgie. Je fais référence à l’invitation que le célébrant formule avant la prière eucharistique : « Sursum corda », élevons nos cœurs au-dessus de l’enchevêtrement de nos préoccupations, de nos désirs, de nos angoisses, de notre distraction. Notre cœur, au plus profond de nous-mêmes, doit s’ouvrir docilement à la Parole de Dieu et se recueillir dans la prière de l’Église, pour recevoir son orientation vers Dieu des paroles mêmes qu’il écoute et prononce. Le regard du cœur doit se diriger vers le Seigneur, qui se trouve parmi nous : il s’agit d’une disposition fondamentale. Quand nous vivons la liturgie avec cette attitude de fond, notre cœur est comme libéré de la force de gravité, qui l’attire vers le bas, et il s’élève intérieurement vers le haut, vers la vérité, vers l’amour, vers Dieu. Comme le rappelle le Catéchisme de l’Église catholique : « La mission du Christ et de l’Esprit Saint qui, dans la liturgie sacramentelle de l’Église, annonce, actualise et communique le Mystère du salut, se poursuit dans le cœur qui prie. Les Pères spirituels comparent parfois le cœur à un autel » (n. 2655) : altare Dei est cor nostrum. Chers amis, nous ne célébrons et vivons bien la liturgie que si nous restons dans une attitude de prière, et pas si nous voulons « faire quelque chose », nous faire voir ou agir, mais si nous orientons notre cœur vers Dieu et si nous nous plaçons dans une attitude de prière en nous unissant au Mystère du Christ et à son dialogue de Fils avec le Père. Dieu lui-même nous enseigne à prier, comme l’affirme saint Paul (cf. Rm 8, 26). Il nous a lui-même donné les paroles adaptées pour nous adresser à Lui, des paroles que nous rencontrons dans le Psautier, dans les grandes oraisons de la sainte liturgie et dans la célébration eucharistique elle-même. Prions le Seigneur d’être chaque jour plus conscients du fait que la liturgie est action de Dieu et de l’homme ; une prière qui jaillit de l’Esprit Saint et de nous, entièrement adressée au Père, en union avec le Fils de Dieu fait homme (cf. Catéchisme de l’Église catholique, n. 2564). Merci.

DEUX MONTAGNES DANS LA BIBLE: MORIJA, SION

18 février, 2016

http://www.bible-notes.org/article-45-deux-montagnes-dans-la-bible.html

DEUX MONTAGNES DANS LA BIBLE

1- LA MONTAGNE DE MORIJA :
1.1- Lire Genèse 22.
1.2- Lire 2 Chroniques 3

2- LA MONTAGNE DE SION :

1- LA MONTAGNE DE MORIJA :
1.1- Lire Genèse 22
Lorsque Dieu voulut éprouver Abraham, Il lui dit : « Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac, et va-t’en va au pays de Morija, et là offre-le en holocauste, sur une des montagnes que je te dirai ». Nous pensons que le pays de Morija était ainsi appelé à cause du nom de la montagne : c’est probablement sur cette colline que le père des croyants leva le couteau sur son fils et donna ainsi un admirable témoignage de sa foi en Dieu qui ressuscite les morts.
Arrivés au pied du mont Morija, Abraham prit le bois de l’holocauste, et le mit sur Isaac, son fils… « Et ils allaient les deux ensemble. » (Gen. 22 : 6, 8). Quelle pénible ascension, surtout pour le coeur du père ! Isaac ne savait pas encore que le bois dont il était chargé devait servir à l’autel sur lequel il devait être égorgé. Dix-neuf siècles plus tard, le Saint et le Juste, après avoir été jugé et condamné par un tribunal de méchants, ayant subi les moqueries, les injures, les coups, les crachats, gravissait aussi péniblement une colline voisine de Morija, chargé du bois sur lequel Il devait mourir. « Jésus sortit, portant sa croix, et s’en alla au lieu appelé lieu du crâne, qui est appelé en hébreu Golgotha, où ils le crucifièrent » (Jean 19 : 17-18). Il y a pourtant une différence importante entre les deux cas : Jésus, qui portait nos péchés en son corps sur le bois, mourut réellement pour les expier, tandis qu’Isaac, au dernier moment, fut épargné. En gravissant les pentes de la montagne, Isaac avait adressé à son père cette question bien naturelle : « Mon père !…. Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ? ». A quoi le patriarche avait répondu : « Mon fils, Dieu se pourvoira de l’agneau pour l’holocauste ». Cette parole, inspirée par l’Esprit de Dieu, s’accomplit littéralement. Abraham lève le couteau pour égorger son fils : le sacrifice est consenti dans son coeur, l’obéissance a été parfaite. Alors l’Eternel l’arrête. Isaac est épargné. « Et Abraham leva ses yeux, et vit, et voici, il y avait derrière lui un bélier retenu à un buisson par les cornes ; et Abraham alla et prit le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils. Et Abraham appela le nom de ce lieu-là : Jéhovah-Jiré ».
Après ces paroles du patriarche, l’écrivain sacré ajoute : « comme on dit aujourd’hui : En la montagne de l’Eternel il y sera pourvu ». Ici, dans le sens le plus littéral, c’est à Morija qu’il faut appliquer cette expression. Le proverbe avait encore cours en Israël, alors que, quatre siècles après le sacrifice d’Abraham, Moïse écrivait le livre de la Genèse. Comment donc et à quoi a-t-il été pourvu en cette montagne de l’Eternel ? Nous allons voir que la réponse à cette question se trouve dans le second passage où se rencontre le nom de Morija ?

1.2- Lire 2 Chroniques 3
« Et Salomon commença de bâtir la maison de l’Eternel à Jérusalem, sur la montagne de Morija, où l’Eternel était apparu à David, son père, sur l’emplacement que David avait préparé dans l’aire d’Ornan, le Jébusien » (2 Chr. 3 : 1).
Morija, c’était donc précisément le lieu choisi par David pour en faire le site du temple. Ce roi d’Israël, vainqueur de tous ses ennemis, ayant du repos tout à l’entour, jouissant d’un règne prospère, s’éleva, hélas, par orgueil. Satan en profita pour l’inciter à faire le dénombrement du peuple d’Israël (voir 1 Chr. 21 et 2 Sam. 24). Et cela déplut à l’Eternel ; c’est pourquoi il frappa Israël. Alors David dit à Dieu : « J’ai grandement péché en ce que j’ai fait cette chose ; et maintenant fait passer l’iniquité de ton serviteur, car j’ai agi très-follement » (2 Chr. 21 : 8). Dieu est toujours disposé à pardonner à son enfant qui confesse ses fautes ; cependant il faut que le mal soit jugé et puni. David devra choisir entre les trois propositions faites par Dieu : la famine durant trois ans, ou bien une guerre désastreuse pour lui durant trois mois, ou enfin l’épée de l’Eternel, c’est-à-dire la mort sur le pays durant trois jours (2 Chr. 21 : 10-12). David répond à Gad, le messager du Seigneur : « Que je tombe, je te prie, dans les mains de l’Eternel, car ses compassions sont très-grandes ; et que je ne tombe point dans la main des hommes » (1 Chr. 21 : 13). L’Eternel envoya donc la peste sur Israël ; et il tomba 70 000 hommes d’Israël. C’était un ange de l’Eternel qui exerçait ainsi le jugement, et Dieu l’envoya aussi à Jérusalem. Comme il exécutait ce châtiment, l’Eternel regarda et se repentit de cette plaie dont il frappait son peuple. Il dit à l’ange : « Assez ! Retire maintenant ta main ». Or l’ange de l’Eternel se tenait près de l’aire d’Ornan, le Jébusien, placée sur la montagne de Morija. Et David, élevant ses yeux, vit l’ange de l’Eternel qui était entre la terre et le ciel, ayant dans sa main son épée nue, tournée contre Jérusalem.
« Et David dit à Dieu : N’est-ce pas moi qui ai commandé de dénombrer le peuple ? C’est moi qui ai péché et qui ai mal agi ; mais ces brebis, qu’ont-elles fait ? Eternel, mon Dieu, je te prie, que ta main soit sur moi et sur la maison de mon père, mais qu’elle ne soit pas sur ton peuple, pour le frapper » (1 Chr. 21 : 17).
Alors David reçut de l’ange l’ordre de monter sur le mont Morija, pour ériger un autel à l’Eternel dans l’aire d’Ornan, le Jébusien. Ornan, appelé aussi Arauna, occupé à battre du blé, s’était caché avec ses quatre fils, parce qu’il avait vu l’ange. Le roi d’Israël lui acheta son aire, ses boeufs… Puis David bâtit un autel à l’Eternel, et il offrit des holocaustes et des sacrifices de prospérité, et il invoqua l’Eternel qui lui montra qu’Il l’exauçait en envoyant des cieux le feu qui alluma le bois sur l’autel pour consumer l’holocauste ! Alors, au commandement de l’Eternel, l’ange remit son épée dans son fourreau. La plaie fut arrêtée : ainsi la miséricorde se glorifia vis-à-vis du jugement (Jac. 2 : 13). « Et David dit : c’est ici la maison de l’Eternel Dieu, et c’est ici l’autel pour l’holocauste d’Israël » (1 Chr. 22 : 1). Dès ce moment, il fit préparer les matériaux pour la construction du temple, réservée à Salomon, son fils. Ce temple était réellement la maison de Dieu. Durant le voyage des Israélites à travers le désert, Dieu voulait habiter au milieu de son peuple, dans le tabernacle, qui n’était qu’une tente portative. Maintenant que le peuple était bien établi dans les villes et les villages de Canaan, l’Eternel voulait aussi avoir, au milieu d’eux, sa maison de pierre et de bois, afin d’y fixer sa demeure, d’une manière spéciale et bénie, entre les chérubins qui étaient sur l’arche.
C’est dans ce temple qu’il était pourvu, selon la loi, à tous les besoins spirituels et moraux des enfants d’Israël ; c’est là, et là seulement, qu’ils pouvaient rendre leur culte à Jéhovah, par l’intermédiaire des sacrificateurs ; c’est là que les sacrifices étaient offerts et que les fêtes solennelles se célébraient. Là, les fils d’Aaron, au nom du peuple, s’approchaient de l’Eternel.
Ainsi s’est accompli le proverbe que nous avons rappelé : « En la montagne de l’Eternel il y sera pourvu ».
Rappelons encore que c’est sur une colline voisine, au lieu appelé Crâne (Luc 23 : 33), qu’il a été pourvu pleinement, parfaitement, par le seul sacrifice du Fils de Dieu, à tous les besoins de pardon, de paix, de bonheur et de vie, de pauvres pécheurs. Par la foi au Sauveur, ils sont mis en possession de tous ces privilèges, ils participent dès à présent à la grâce et auront bientôt part à la gloire de Dieu, avec Jésus !

2- LA MONTAGNE DE SION :
Dans l’Ecriture, le nom de Sion est mentionné pour la première fois dans le deuxième livre de Samuel: « David prit la forteresse de Sion : c’est la ville de David » (5 : 7). C’est dans ce chapitre que nous voyons toutes les tribus d’Israël se soumettre à David et le reconnaître roi, choisi et donné par l’Eternel. David était alors fixé à Hébron ; il alla avec ses gens faire le siège de Jérusalem, qui est Jébus où se trouvaient encore les Jébusiens, une peuplade cananéenne que les Israélites auraient dû détruire en prenant possession du pays de promesse. Et David prit la forteresse de Sion, et il y habita ; c’est pourquoi on l’appela la cité de David (1 Chr. 11 : 4-7). Jérusalem, située au Nord-Est et au-dessous de cette colline, est souvent appelée « la fille de Sion ». Ce nom, dans le langage des prophètes, désigne fréquemment la ville sainte tout entière. L’Ecriture dit aussi : « la montagne de Sion » (2 Rois 19 : 31 ; Ps. 133 : 3 ; Es. 10 : 12, 32 ; Abdias 17, 21). Dieu l’appelle « la montagne de ma sainteté » (Ps. 2 : 6). Le Dieu d’Israël y habite, elle est sa demeure (Ps. 9 : 11 ; 74 : 2 ; 76 : 2 ; Es. 8 : 18).
Le nom du mont Morija, sur lequel le temple était construit, disparaît ainsi devant le nom plus solennel de la Sion sainte. C’est là, dans la cité de David, qui est Sion, que l’arche de l’alliance de l’Eternel avait été provisoirement déposée dans un tabernacle, une tente que David avait tendue pour elle (2 Sam. 6 : 17) ; c’est là que, sur l’ordre de Salomon, les sacrificateurs la prirent pour la transporter « en son lieu » dans l’oracle de la maison, dans le lieu très saint, sous les ailes des chérubins. Aux yeux de Dieu, la montagne de Sion s’élève avec beauté, « elle est la joie du toute la terre, aux côtés du nord, la ville du grand Roi » (Ps. 48 : 2). « De Sion, perfection de la beauté, Dieu a fait luire sa splendeur » (Ps. 50 : 2). « L’Eternel aime les portes de Sion plus que toutes les demeures de Jacob » (Ps. 87 : 2). « L’Eternel a choisi Sion ; il l’a désirée pour être son habitation ; c’est ici mon repos à perpétuité ; ici j’habiterai, car je l’ai désirée » (Ps. 132 : 13-14 ; 78 : 68).
Aussi, les « fils de Sion » (Lam. 4 : 2) ont leurs coeurs attachés à cette sainte montagne. Ecoutons-les : « Auprès des fleuves de Babylone, là nous nous sommes assis, et nous avons pleuré quand nous nous sommes souvenus de Sion. Aux saules qui étaient au milieu d’elle nous avons suspendu nos harpes. Car là, ceux qui nous avaient emmenés captifs nous demandaient des cantiques, et ceux qui nous faisaient gémir, de la joie : Chantez-nous un des cantiques de Sion. Comment chanterions-nous un cantique de l’Eternel sur un sol étranger ? Si je t’oublie, ô Jérusalem, que ma droite s’oublie ! Que ma langue s’attache à mon palais si je ne me souviens de toi, si je n’élève Jérusalem au-dessus de la première de mes joies ! » (Ps. 137 : 1-6).
Voici, depuis de longs siècles, la condition présente des fils de la sainte Sion. Plus que jadis, « les chemins de Sion mènent deuil de ce qu’il n’y a personne qui vienne aux fêtes (Lam. 1 : 4). «Et toute la magnificence de la fille de Sion s’est retirée d’elle… Sion étend ses mains, il n’y a personne qui console… Comment, dans sa colère, le Seigneur a-t-il couvert d’un nuage la fille de Sion !… Il a tué tout ce qui était agréable à l’oeil dans la tente de la fille de Sion ; il a versé, comme un feu, sa fureur… L’Eternel a fait oublier dans Sion jour solennel et sabbat ; et, dans l’indignation de sa colère, il a méprisé roi et sacrificateur… Il s’est proposé de détruire la muraille de la fille de Sion ; et il n’a pas retiré sa main pour cesser de détruire ; et il a fait mener deuil au rempart et à la muraille… Les anciens de la fille de Sion sont assis par terre, ils gardent le silence ; ils ont mis de la poussière sur leurs têtes, ils se sont ceints de sacs…Quel témoignage t’apporterai-je ?… Qui est-ce que j’égalerai à toi, afin que je te console, vierge, fille de Sion ? Car ta ruine est grande comme la mer : qui te guérira ?… Muraille de la fille de Sion, laisse couler des larmes jour et nuit, comme un torrent… L’Eternel a accompli sa fureur, il a versé l’ardeur de sa colère et a allumé dans Sion un feu qui en a dévoré les fondements. Notre coeur est abattu… nos yeux sont obscurcis, à cause de la montagne de Sion qui est désolée (Lam. 1 : 6, 17 ; 2 : 1, 4, 6, 8, 10, 13, 18 ; 4 : 11 ; 5 : 17, 18).
Oui, hélas, comme les prophètes l’avaient annoncé, « Sion est un désert, Jérusalem, une désolation ». Les enfants d’Israël ont dit en gémissant : « Notre maison sainte et magnifique, où nos pères te louaient, est brûlée par le feu » (Es. 64 : 10,11). Le Seigneur Jésus leur déclare plus tard les mêmes calamités (voir Luc 13 : 34-35). Michée 3 : 12 avait prédit, comme le rappelle Jérémie 26 : 18, que Sion serait « labourée comme un champ », et Jérusalem réduite en « monceaux de pierres » : c’est ce qui est arrivé. Aussi maintenant la louange est-elle « dans le silence en Sion » (Ps. 65 : 1). Depuis longtemps, Sion répète, en se trompant toutefois : « l’Eternel m’a abandonnée, et le Seigneur m’a oubliée » (Es. 49 : 14). « Une voix de lamentation se fait entendre de Sion : … nous sommes détruits et devenus fort honteux ! Aurais-tu entièrement rejeté Juda ? Ton âme serait-elle dégoûtée de Sion ? » (Jér. 9 : 19 ; 14 : 19). Depuis longtemps, ses ennemis disent : « c’est Sion, que personne ne recherche !» (Jér. 30 : 17). Et d’où viennent ces terribles jugements sur la montagne de l’Eternel, que la colère de l’Eternel a livrée entre les mains des nations ? Du péché de ses habitants, de leurs constantes rébellions contre leur Dieu. « Les filles de Sion sont hautaines » (Es. 3 : 16).
Le malheureux peuple juif en était venu à ce point de perversité, que Dieu envoyait dire aux princes de la maison d’Israël par un prophète : « Vous…. qui abhorrez le jugement et pervertissez toute droiture, bâtissant Sion avec du sang, et Jérusalem avec l’iniquité » (Mich. 3 : 9). Enfin, après avoir épuisé tous les autres moyens de ramener son peuple, Dieu dit : « J’enverrai mon fils le bien-aimé ; peut-être que, quand ils verront celui-ci, ils le respecteront ». Il leur envoya en effet son saint Fils Jésus, leur Messie, leur Rédempteur, leur Roi. Mais, au lieu de l’accueillir avec reconnaissance, ils raisonnèrent entre eux, en disant : « Celui-ci est l’héritier, tuons-le, afin que l’héritage soit à nous » (Luc 20 : 13-14). Et c’est ce qu’ils firent. Cependant, peu auparavant, une foule de Juifs était allée au-devant du Seigneur Jésus, entrant à Jérusalem monté sur un âne, en criant : « Hosanna ! Béni soit le Roi d’Israël, qui vient au nom du Seigneur ». Ceux qui faisaient entendre ces acclamations accomplissaient ainsi, sans s’en douter, une remarquable prophétie de Zacharie 9 : 9 : « Réjouis-toi avec transports, fille de Sion ; pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici, ton Roi vient à toi… humble et monté sur un âne… » (voir Matt. 21 : 5 ; Jean 12 : 12-16). Dans cette foule, il y avait plusieurs enfants, (voir Matt. 21 : 15) : sans doute, ceux-ci étaient-ils sincères. Mais, quant aux multitudes, peu de jours après, autour de Pilate qui leur demandait : « Que ferai-je donc de Jésus qui est appelé le Christ », elles criaient plus fort encore : « Qu’il soit crucifié … Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! » (Matt. 27 : 22-23, 25). Ainsi, les malheureux Juifs mirent le comble à leurs péchés ; de là vient qu’ils sont maintenant rejetés de Dieu ; de là vient que Sion est désolée et Jérusalem foulée aux pieds par les nations.
Mais ce rejet n’est que temporaire, ces désolations prendront fin : il y a encore des trésors de grâce et de miséricorde dans le coeur du Seigneur pour son peuple et pour la montagne de sa sainteté. Il y a une quantité de promesses de délivrance et de bénédiction qui doivent s’accomplir en faveur de Sion. « Tu te lèveras, tu auras compassion de Sion ; car c’est le temps d’user de grâce envers elle, car le temps assigné est venu. Car tes serviteurs prennent plaisir à ses pierres… Quand l’Eternel bâtira Sion, il paraîtra dans sa gloire,… afin qu’on annonce dans Sion le nom de l’Eternel, et sa louange dans Jérusalem, quand les peuples seront rassemblés, et les royaumes, pour servir l’Eternel » (Ps. 102 : 13-14, 16, 21, 22). Alors « tous ceux qui haïssent Sion » seront « couverts de honte et se retireront en arrière » ; mais « la montagne de Sion se réjouira », parce que « l’Eternel ramènera les captifs de Sion » ; « car Dieu délivrera Sion, et bâtira les villes de Juda ; on y habitera, et on la possédera » (Ps. 129 : 5 ; 48 : 11 ; 126 : 1; 69 : 35).
Oui, bientôt peut-être, « l’Eternel consolera encore Sion, et choisira encore Jérusalem » (Zach. 1 : 17) ; « l’Eternel consolera Sion, il consolera tous ses lieux arides, et fera de son désert un Eden, et de son lieu stérile, comme le jardin de l’Eternel. L’allégresse et la joie y seront trouvées, des actions de grâce et une voix de cantiques» (Es. 51 : 3). « L’Eternel des armées descendra pour combattre sur la montagne de Sion et sur sa colline » (Es. 31 : 4). « Il y a un jour auquel les gardes crieront sur la montagne d’Ephraïm : Levez-vous, et nous monterons à Sion, vers l’Eternel, notre Dieu » (Jér. 31 : 6). Et Dieu dira : « Réveille-toi, réveille-toi, revêts-toi de ta force, Sion ! Revêts-toi de tes vêtements de parure, Jérusalem, ville sainte…Secoue de toi la poussière… ; délivre-toi des chaînes de ton cou, captive, fille de Sion» (Es. 52 : 1,2). « Ceux que l’Eternel a délivrés retourneront et viendront à Sion avec des chants de triomphe ; et une joie éternelle sera sur leur tête » (Es. 35 : 10). Alors, il sera dit à Sion : « Ton Dieu règne ! La voix de tes sentinelles ! – elles élèvent la voix, elles exultent ensemble avec chant de triomphe ; car elles verront face à face, quand l’Eternel restaurera Sion » (Es. 52 : 8). «Le Rédempteur viendra à Sion et vers ceux qui, en Jacob, reviennent de leur rébellion, dit l’Eternel » (Es. 59 : 20 ; Rom. 11 : 26). « Voici, l’Eternel a fait entendre jusqu’au bout de la terre : Dites à la fille de Sion : Voici, ton salut vient ; voici, son salaire est avec lui, et sa récompense devant lui » (Es. 62 : 11).
Nous voyons que de grandes choses sont dites de Sion dans les Ecritures et ces grandes choses, c’est le millénium qui en verra l’accomplissement. Lisons, par exemple, le Psaume 87 : « La fondation qu’il a posée est dans les montagnes de sainteté. L’Eternel aime les portes de Sion plus que toutes les demeures de Jacob. Des choses glorieuses sont dites de toi, cité de Dieu…. Et de Sion il sera dit : Celui-ci et celui-là sont nés en elle ; et le Très-Haut, lui, l’établira. Quand l’Eternel enregistrera les peuples, il comptera : Celui-ci est né là ». Sion est représentée comme fondée par Dieu lui-même, comme une cité qui a des fondements inébranlables. Les hommes possèdent des villes dont ils sont fiers, mais Dieu a une cité qu’Il a fondée sur les saintes montagnes. Ici, il ne s’agit que des beautés et des richesses de la nature : le plus beau lieu de toute la terre, aux yeux du Seigneur, c’est Sion. La richesse de Sion, c’est Dieu ; son site, les saintes montagnes, c’est ce qui est consacré à Dieu lui-même. Les fidèles n’ont pas à rougir de Sion, en présence de tous les lieux vantés de la terre : ce qui se dit d’elle, ce sont des choses glorieuses… On tient Sion pour le lieu de naissance de l’homme de Dieu, le lieu de naissance des bien-aimés de Jéhovah. Le Souverain avait établi ce lieu et c’est Lui qui l’affermira. Lorsqu’Il enregistrera les peuples soumis à sa domination, sous le sceptre de son règne de justice et de grâce, Il distinguera glorieusement les enfants de Sion, en disant de chacun d’eux : « Celui-ci est né là ! ».
Le temps vient où l’Eternel dira, en jugeant les princes et les rois de la terre soulevés contre Lui et contre son Christ : « Et moi, j’ai oint mon Roi sur Sion, la montagne de ma sainteté » (Ps. 2 : 6). C’est là, en effet, que le Seigneur Jésus règnera sur la maison de Jacob éternellement, car le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père (Luc 1 : 32-33). C’est de là qu’il donnera la délivrance à Israël (Ps. 14 : 7 ; 53 : 6) ; c’est de là qu’il soutiendra les fidèles (22 : 2) ; c’est de là qu’il fera luire sa splendeur (Ps. 50 : 2), lorsqu’il aura exaucé cette prière de ses bien-aimés : « Fais du bien, dans ta faveur, à Sion » (Ps. 51 : 18). « Dieu sauvera Sion, et bâtira les villes de Juda ; et on y habitera, et on la possédera ; (Ps. 69 : 35). Alors il sera dit : « l’Eternel est grand en Sion, et il est haut élevé par-dessus tous les peuples » (99 : 2). C’est de là qu’il bénira son peuple ; c’est de là que son peuple bénira Jéhovah, son Dieu, qui habitera dans Jérusalem (Ps. 128 : 5 ; 134 : 3 ; 135 : 21). Alors ces exhortations et ces promesses auront un accomplissement réel : « Jérusalem, célèbre l’Eternel ! Sion, loue ton Dieu…. Qu’Israël se réjouisse en celui qui l’a fait ; que les fils de Sion s’égayent en leur Roi ! » (147 : 12 ; 149 : 2). « Ils marchent de force en force, ils paraissent devant Dieu en Sion » (Ps. 84 : 7). « Ceux qui se confient en l’Eternel sont comme la montagne de Sion, qui ne chancelle pas, qui demeure à toujours » (Ps.125 : 1). L’Eternel a dit au Seigneur et au Fils de David, à notre Seigneur et Sauveur : « Assieds-toi à ma droite » ; c’est là que, par la foi, nous voyons Jésus couronné de gloire et d’honneur, lequel, après avoir fait par lui-même la purification de nos péchés, s’est assis à la droite de la Majesté dans les lieux très hauts (Héb. 1 : 3 ; 2 : 9). Mais le jour viendra, où le Seigneur se lèvera, où l’Eternel transmettra de Sion le sceptre de sa force, en disant : « Domine au milieu de tes ennemis » (Ps. 110 : 1-2). Alors, « quand le Seigneur aura nettoyé la saleté des filles de Sion…. l’Eternel créera sur chaque demeure de la montagne de Sion, et sur ses assemblées, une nuée et une fumée de jour, et la splendeur d’une flamme de feu, la nuit ; car sur toute la gloire il y aura une couverture » (Es. 4 : 4-5). Alors tout sera beau, glorieux et digne de Dieu, car « l’Eternel des armées règnera en la montagne de Sion et à Jérusalem, et devant ses anciens en gloire » (Es. 24 : 23). « Il a rempli Sion de droiture et de justice » (Es. 33 : 5)… Comme il sera beau pour Israël de pouvoir dire alors : « Regarde Sion, la cité de nos assemblées solennelles ! Tes yeux verront Jérusalem, une demeure tranquille, une tente qui ne sera pas transportée… Mais là l’Eternel est pour nous magnifique… car l’Eternel est notre Juge, l’Eternel est notre Législateur, l’Eternel est notre Roi ; lui nous sauvera » (Es. 33 : 20-22).
Ces réjouissants accents ne sortiront pas seulement des lèvres d’Israël. « Et les fils de tes oppresseurs viendront se courber devant toi, et tous ceux qui t’ont méprisée se prosterneront à la plante de tes pieds et t’appelleront la ville de l’Eternel, la Sion du Saint d’Israël » (Es. 60 : 14). Quels beaux jours pour le peuple terrestre de Dieu, quand ces paroles deviendront une réalité : « Voici, l’Eternel a fait entendre jusqu’au bout de la terre : Dites à la fille de Sion : Voici ton Salut vient ; voici, ton salaire est avec lui, et sa récompense devant lui. Et on les appellera le peuple saint, les rachetés de l’Eternel ; et toi, tu seras appelée la recherchée, la ville non abandonnée » (Es. 62 : 11-12). « Et vous, fils de Sion, égayez-vous, et réjouissez-vous en l’Eternel, votre Dieu… Et il arrivera que, quiconque invoquera le nom de l’Eternel sera sauvé. Car sur la montagne de Sion il y aura délivrance, et à Jérusalem, comme l’Eternel l’a dit, et pour les réchappés que l’Eternel appellera » (Joël 2 : 23, 32).
Voici, d’après les Saintes Ecritures, l’histoire passée, présente et future de la montagne de Sion. Quant au Nouveau Testament, le nom de Sion ne s’y trouve que dans sept passages, dont cinq sont des citations de certains de ceux que nous venons de rappeler. Dans Apocalypse 14 : 1, l’apôtre Jean voit l’Agneau qui se tient sur la montagne de Sion, et avec lui cent quarante- quatre milliers avec son nom et le nom de son Père écrits sur leurs fronts. Enfin, dans Hébreux 12 : 22, s’adressant à des Juifs devenus chrétiens, l’auteur de l’épître leur rappelle que ce n’est plus à la montagne de la loi, à Sinaï où tout était terrible, qu’ils sont venus et qu’ils ont affaire maintenant. Il leur dit : « Vous êtes venus à la montagne de Sion ; et à la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste ». Comme la Jérusalem céleste est ici mise en contraste avec la Jérusalem de la terre, de même Sion ou la montagne de la grâce royale, est en contraste avec Sinaï, la redoutable et effrayante montagne de la loi.
Nous qui croyons de coeur au Seigneur Jésus, nous sommes venus à cette montagne de Sion, étant devenus les objets de la grâce de Dieu. Il n’y a plus de condamnation pour ceux qui sont en Jésus Christ ! Veuille le Seigneur faire connaître de cette manière à tous nos lecteurs la céleste Sion. Que chacun puisse dire avec l’apôtre : « la Jérusalem d’en haut est la femme libre qui est notre mère» (Gal. 4 : 26).

D’après plusieurs articles parus dans la « Bonne Nouvelle » (1862 et 1872).

SAN FRANCISCO DE ASÍS

17 février, 2016

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“LETTRE AUX FIDÈLES” DE SAINT FRANÇOIS D’ASSISE

17 février, 2016

http://www.vatican.va/spirit/documents/spirit_20020120_lettera-francesco_fr.html

“LETTRE AUX FIDÈLES” DE SAINT FRANÇOIS D’ASSISE

Préparé par la Pontificale Faculté de Théologie « Saint Bonaventure » (Seraphicum).

« Au nom du Seigneur, Père et Fils , et Saint-Esprit. Amen. A tous les chrétiens religieux, clercs et laïcs, hommes ct femmes, tous ceux quï habitent dans le monde etitïer, frère François, leur serviteur et leur sujet, hommage avec révécrence, vraie païx du ciel et charité sincère dans le Seigneur. Puisque je suis le serviteur de tous, je suis tenu de vous servir tous et de vous administrer à tous les paroles odorantes de mon Seigneur. Aussi; considérant en esprit que je ne puis vous visiter chacun personnellement à cause de la maladie et de la faiblesse de mon corps, je me suis proposé de vous rapporter, par les présentes lettres et par ce message, les paroles de notre Seigneur Jésus-Christ, qui est la Parole du Père, et les paroles de l’Esprit-Saint, qui sont esprit et vie. Cette Parole du Père, si digne, si sainte et si glorieuse, le Père très haut l’envoya du ciel par saint Gabriel, son ange, dans le ventre de la sainte et glorieuse Vierge Marie ; c’est de son ventre que la Parole reçut la vraie chair de notre humanité et de notre fragilité. Lui qui fut riche par-dessus tout, il voulut lui-même dans le monde, avec la très bienheureuse Vierge, sa mère, choisir la pauvreté. Et près de la passion, il célébra la pâque avec ses disciples et, prenant le pain, il rendit grâces et le bénit et le rompit en disant : Prenez et mangez, ceci est mon corps. Et prenant le calice il dit Ceci est mon sang, celui de la nouvelle alliance, qui pour vous et pour beaucoup sera répandu en rémission des péchés. Ensuite il pria le Père, disant : Père, s’il est possible, que ce calice passe loin de moi. Et sa sueur devint comme des gouttes de sang coulant jusqu’à terre. Il mit cependant sa volonté dans la volonté du d’ère, disant : Père, que ta volonté ta volonté soit faite, non comme je veux, mais comme tu veux. Et telle fut la volonté du Père: que son Fils béni et glorieux, qu’il nous donna et qui est né pour nous, s’offrît lui-même par son propre sang en sacrifice et en victime sur l’autel de la croix ; non pour lui par quï tout a été fait, mais pour nos péchés, nous laissant un exemple pour que nous suivions ses traces. Et il veut que tous nous soyons sauvés par lui et que nous le recevions avec notre coeur pur et notre corps chaste. Mais il en est peu qui veulent le recevoir et être sauvés par lui, bien que son joug soit suave et son fardeau léger. » De la “lettre aux fidèles” de Saint François d’Assise 

Priére : Dieu souverain et glorieux, illumine les ténèbres de mon coeur et donne-moi la foi droite, l’espérance certaine et la charité parfaite, le sens et la connaissance, Seigneur, pour que j’accomplisse ton commandement saint et véridique. Amen

« CHERCHER DIEU ET SE LAISSER TROUVER PAR LUI » – PAR BENOÎT XVI

17 février, 2016

http://chiesa.espresso.repubblica.it/articolo/1337092?fr=y

« CHERCHER DIEU ET SE LAISSER TROUVER PAR LUI »

Deux ans exactement après Ratisbonne, le pape Joseph Ratzinger adresse un autre grand discours au monde de la culture. A Paris, au Collège des Bernardins, le 12 septembre 2008. En voici le texte intégral

PAR BENOÎT XVI

Monsieur le Cardinal, Madame le Ministre de la Culture, Monsieur le Maire, Monsieur le Chancelier de l’Institut de France, chers amis! Merci, monsieur le Cardinal, pour vos aimables paroles. Nous nous trouvons dans un lieu historique, lieu édifié par les fils de saint Bernard de Clairvaux et que votre prédécesseur, le regretté Cardinal Jean-Marie Lustiger, a voulu comme un centre de dialogue de la Sagesse chrétienne avec les courants culturels intellectuels et artistiques de votre société. Je salue particulièrement Madame le Ministre de la Culture qui représente le gouvernement, ainsi que Messieurs Giscard d’Estaing et Chirac. J’adresse également mes salutations aux ministres présents, aux représentants de l’Unesco, à Monsieur le Maire de Paris et à toutes les autorités. Je ne veux pas oublier mes collègues de l’Institut de France qui savent ma considération et je désire remercier le Prince de Broglie de ses paroles cordiales. Nous nous reverrons demain matin. Je remercie les délégués de la communauté musulmane française d’avoir accepté de participer à cette rencontre; je leur adresse mes vœux les meilleurs en ce temps du ramadan. Mes salutations chaleureuses vont maintenant tout naturellement vers l’ensemble du monde multiforme de la culture que vous représentez si dignement, chers invités. J’aimerais vous parler ce soir des origines de la théologie occidentale et des racines de la culture européenne. J’ai mentionné en ouverture que le lieu où nous nous trouvons était emblématique. Il est lié à la culture monastique. De jeunes moines ont ici vécu pour s’initier profondément à leur vocation et pour bien vivre leur mission. Ce lieu évoque-t-il pour nous encore quelque chose ou n’y rencontrons-nous qu’un monde désormais révolu? Pour pouvoir répondre, nous devons réfléchir un instant sur la nature même du monachisme occidental. De quoi s’agissait-il alors? En considérant les fruits historiques du monachisme, nous pouvons dire qu’au cours de la grande fracture culturelle, provoquée par la migration des peuples et par la formation des nouveaux ordres étatiques, les monastères furent des espaces où survécurent les trésors de l’antique culture et où, en puisant à ces derniers, se forma petit à petit une culture nouvelle. Comment cela s’est-il passé? Quelle était la motivation des personnes qui se réunissaient en ces lieux? Quelles étaient leurs désirs? Comment ont-elles vécu? Avant toute chose, il faut reconnaître avec beaucoup de réalisme que leur volonté n’était pas de créer une culture nouvelle ni de conserver une culture du passé. Leur motivation était beaucoup plus simple. Leur objectif était de chercher Dieu, « quaerere Deum ». Au milieu de la confusion de ces temps où rien ne semblait résister, les moines désiraient la chose la plus importante: s’appliquer à trouver ce qui a de la valeur et demeure toujours, trouver la Vie elle-même. Ils étaient à la recherche de Dieu. Des choses secondaires, ils voulaient passer aux réalités essentielles, à ce qui, seul, est vraiment important et sûr. On dit que leur être était tendu vers l’«eschatologie». Mais cela ne doit pas être compris au sens chronologique du terme – comme s’ils vivaient les yeux tournés vers la fin du monde ou vers leur propre mort – mais au sens existentiel: derrière le provisoire, ils cherchaient le définitif. « Quaerere Deum »: comme ils étaient chrétiens, il ne s’agissait pas d’une aventure dans un désert sans chemin, d’une recherche dans l’obscurité absolue. Dieu lui-même a placé des bornes milliaires, mieux, il a aplani la voie, et leur tâche consistait à la trouver et à la suivre. Cette voie était sa Parole qui, dans les livres des Saintes Écritures, était offerte aux hommes. La recherche de Dieu requiert donc, intrinsèquement, une culture de la parole, ou, comme le disait Dom Jean Leclercq (1): eschatologie et grammaire sont dans le monachisme occidental indissociables l’une de l’autre (cf. « L’Amour des lettres et le désir de Dieu », p.14). Le désir de Dieu comprend l’amour des lettres, l’amour de la parole, son exploration dans toutes ses dimensions. Puisque dans la parole biblique Dieu est en chemin vers nous et nous vers Lui, ils devaient apprendre à pénétrer le secret de la langue, à la comprendre dans sa structure et dans ses usages. Ainsi, en raison même de la recherche de Dieu, les sciences profanes, qui nous indiquent les chemins vers la langue, devenaient importantes. La bibliothèque faisait, à ce titre, partie intégrante du monastère tout comme l’école. Ces deux lieux ouvraient concrètement un chemin vers la parole. Saint Benoît appelle le monastère une « dominici servitii schola », une école du service du Seigneur. L’école et la bibliothèque assuraient la formation de la raison et la « eruditio », sur la base de laquelle l’homme apprend à percevoir, au milieu des paroles, la Parole. Pour avoir une vision d’ensemble de cette culture de la parole liée à la recherche de Dieu, nous devons faire un pas supplémentaire. La Parole qui ouvre le chemin de la recherche de Dieu et qui est elle-même ce chemin est une Parole qui donne naissance à une communauté. Elle remue certes jusqu’au fond d’elle-même chaque personne en particulier (cf. Ac 2, 37). Grégoire le Grand décrit cela comme une douleur forte et inattendue qui secoue notre âme somnolente et nous réveille pour nous rendre attentifs à Dieu (cf. Leclercq, ibid., p. 35). Mais elle nous rend aussi attentifs les uns aux autres. La Parole ne conduit pas uniquement sur la voie d’une mystique individuelle, mais elle nous introduit dans la communauté de tous ceux qui cheminent dans la foi. C’est pourquoi il faut non seulement réfléchir sur la Parole, mais également la lire de façon juste. Tout comme à l’école rabbinique, chez les moines, la lecture accomplie par l’un d’eux est également un acte corporel. «Le plus souvent, quand « legere » et « lectio » sont employés sans spécification, ils désignent une activité qui, comme le chant et l’écriture, occupe tout le corps et tout l’esprit», dit à ce propos Dom Leclercq (ibid., p. 21). Il y a encore un autre pas à faire. La Parole de Dieu elle-même nous introduit dans un dialogue avec Lui. Le Dieu qui parle dans la Bible nous enseigne comment nous pouvons Lui parler. En particulier, dans le Livre des Psaumes, il nous donne les mots avec lesquels nous pouvons nous adresser à Lui. Dans ce dialogue, nous Lui présentons notre vie, avec ses hauts et ses bas, et nous la transformons en un mouvement vers Lui. Les Psaumes contiennent en plusieurs endroits des instructions sur la façon dont ils doivent être chantés et accompagnés par des instruments musicaux. Pour prier sur la base de la Parole de Dieu, la seule labialisation ne suffit pas, la musique est nécessaire. Deux chants de la liturgie chrétienne dérivent de textes bibliques qui les placent sur les lèvres des Anges: le « Gloria » qui est chanté une première fois par les Anges à la naissance de Jésus, et le « Sanctus » qui, selon Isaïe 6, est l’acclamation des Séraphins qui se tiennent dans la proximité immédiate de Dieu. Sous ce jour, la Liturgie chrétienne est une invitation à chanter avec les anges et à donner à la parole sa plus haute fonction. À ce sujet, écoutons encore une fois Jean Leclercq: «Les moines devaient trouver des accents qui traduisent le consentement de l’homme racheté aux mystères qu’il célèbre: les quelques chapiteaux de Cluny qui nous aient été conservés montrent les symboles christologiques des divers tons du chant» (cf. ibid., p. 229). Pour saint Benoît, la règle déterminante de la prière et du chant des moines est la parole du Psaume: « Coram angelis psallam Tibi, Domine » – en présence des anges, je veux te chanter, Seigneur (cf. 138, 1). Se trouve ici exprimée la conscience de chanter, dans la prière communautaire, en présence de toute la cour céleste, et donc d’être soumis à la mesure suprême: prier et chanter pour s’unir à la musique des esprits sublimes qui étaient considérés comme les auteurs de l’harmonie du cosmos, de la musique des sphères. À partir de là, on peut comprendre la sévérité d’une méditation de saint Bernard de Clairvaux qui utilise une expression de la tradition platonicienne, transmise par saint Augustin, pour juger le mauvais chant des moines qui, à ses yeux, n’était en rien un incident secondaire. Il qualifie la cacophonie d’un chant mal exécuté comme une chute dans la « regio dissimilitudinis », dans la « région de la dissimilitude ». Saint Augustin avait tiré cette expression de la philosophie platonicienne pour caractériser l’état de son âme avant sa conversion (cf. « Confessions », VII, 10.16): l’homme qui est créé à l’image de Dieu tombe, en conséquence de son abandon de Dieu, dans la « région de la dissimilitude », dans un éloignement de Dieu où il ne Le reflète plus et où il devient ainsi non seulement dissemblable à Dieu, mais aussi à sa véritable nature d’homme. Saint Bernard se montre ici évidemment sévère en recourant à cette expression, qui indique la chute de l’homme loin de lui-même, pour qualifier les chants mal exécutés par les moines, mais il montre à quel point il prend la chose au sérieux. Il indique ici que la culture du chant est une culture de l’être et que les moines, par leurs prières et leurs chants, doivent correspondre à la grandeur de la Parole qui leur est confiée, à son impératif de réelle beauté. De cette exigence capitale de parler avec Dieu et de Le chanter avec les mots qu’Il a Lui-même donnés est née la grande musique occidentale. Ce n’était pas là l’œuvre d’une «créativité» personnelle où l’individu, prenant comme critère essentiel la représentation de son propre moi, s’érige un monument à lui-même. Il s’agissait plutôt de reconnaître attentivement avec les «oreilles du cœur» les lois constitutives de l’harmonie musicale de la création, les formes essentielles de la musique émise par le Créateur dans le monde et en l’homme, et d’inventer une musique digne de Dieu qui soit, en même temps, authentiquement digne de l’homme et qui proclame hautement cette dignité. Enfin, pour s’efforcer de saisir cette culture monastique occidentale de la parole, qui s’est développée à partir de la quête intérieure de Dieu, il faut au moins faire une brève allusion à la particularité du Livre ou des Livres par lesquels cette Parole est parvenue jusqu’aux moines. Vue sous un aspect purement historique ou littéraire, la Bible n’est pas un simple livre, mais un recueil de textes littéraires dont la rédaction s’étend sur plus d’un millénaire et dont les différents livres ne sont pas facilement repérables comme constituant un corpus unifié. Au contraire, des tensions visibles existent entre eux. C’est déjà le cas dans la Bible d’Israël, que nous, chrétiens, appelons l’Ancien Testament. Ça l’est plus encore quand nous, chrétiens, lions le Nouveau Testament et ses écrits à la Bible d’Israël en l’interprétant comme chemin vers le Christ. Avec raison, dans le Nouveau Testament, la Bible n’est pas de façon habituelle appelée «l’Écriture» mais «les Écritures» qui, cependant, seront ensuite considérées dans leur ensemble comme l’unique Parole de Dieu qui nous est adressée. Ce pluriel souligne déjà clairement que la Parole de Dieu nous parvient seulement à travers la parole humaine, à travers des paroles humaines, c’est-à-dire que Dieu nous parle seulement dans l’humanité des hommes, et à travers leurs paroles et leur histoire. Cela signifie, ensuite, que l’aspect divin de la Parole et des paroles n’est pas immédiatement perceptible. Pour le dire de façon moderne: l’unité des livres bibliques et le caractère divin de leurs paroles ne sont pas saisissables d’un point de vue purement historique. L’élément historique se présente dans le multiple et l’humain. Ce qui explique la formulation d’un distique médiéval qui, à première vue, apparaît déconcertant: « Littera gesta docet – quid credas allegoria… » (cf. Augustin de Dacie, « Rotulus pugillaris », I). La lettre enseigne les faits; l’allégorie ce qu’il faut croire, c’est-à-dire l’interprétation christologique et pneumatique. Nous pouvons exprimer tout cela d’une manière plus simple: l’Écriture a besoin de l’interprétation, et elle a besoin de la communauté où elle s’est formée et où elle est vécue. En elle seulement, elle a son unité et, en elle, se révèle le sens qui unifie le tout. Dit sous une autre forme: il existe des dimensions du sens de la Parole et des paroles qui se découvrent uniquement dans la communion vécue de cette Parole qui crée l’histoire. À travers la perception croissante de la pluralité de ses sens, la Parole n’est pas dévalorisée, mais elle apparaît, au contraire, dans toute sa grandeur et sa dignité. C’est pourquoi le Catéchisme de l’Église catholique peut affirmer avec raison que le christianisme n’est pas au sens classique seulement une religion du livre (cf. n. 108). Le christianisme perçoit dans les paroles la Parole, le Logos lui-même, qui déploie son mystère à travers cette multiplicité. Cette structure particulière de la Bible est un défi toujours nouveau posé à chaque génération. Selon sa nature, elle exclut tout ce qu’on appelle aujourd’hui «fondamentalisme». La Parole de Dieu, en effet, n’est jamais simplement présente dans la seule littéralité du texte. Pour l’atteindre, il faut un dépassement et un processus de compréhension qui se laisse guider par le mouvement intérieur de l’ensemble des textes et, à partir de là, doit devenir également un processus vital. Ce n’est que dans l’unité dynamique de leur ensemble que les nombreux livres ne forment qu’un Livre. La Parole de Dieu et Son action dans le monde se révèlent dans la parole et dans l’histoire humaines. Le caractère crucial de ce thème est éclairé par les écrits de saint Paul. Il a exprimé de manière radicale ce que signifient le dépassement de la lettre et sa compréhension holistique, dans la phrase: «La lettre tue, mais l’Esprit donne la vie» (2 Co 3, 6). Et encore: «Là où est l’Esprit…, là est la liberté» (2 Co 3, 17). Toutefois, la grandeur et l’ampleur de cette perception de la Parole biblique ne peut se comprendre que si l’on écoute saint Paul jusqu’au bout, en apprenant que cet Esprit libérateur a un nom et que, de ce fait, la liberté a une mesure intérieure: «Le Seigneur, c’est l’Esprit, et là où l’Esprit du Seigneur est présent, là est la liberté» (2 Co 3, 17). L’Esprit qui rend libre ne se laisse pas réduire à l’idée ou à la vision personnelle de celui qui interprète. L’Esprit est Christ, et le Christ est le Seigneur qui nous montre le chemin. Avec cette parole sur l’Esprit et sur la liberté, un vaste horizon s’ouvre, mais en même temps, une limite claire est mise à l’arbitraire et à la subjectivité, limite qui oblige fortement l’individu tout comme la communauté et noue un lien supérieur à celui de la lettre du texte: le lien de l’intelligence et de l’amour. Cette tension entre le lien et la liberté, qui va bien au-delà du problème littéraire de l’interprétation de l’Écriture, a déterminé aussi la pensée et l’œuvre du monachisme et a profondément modelé la culture occidentale. Cette tension se présente à nouveau à notre génération comme un défi face aux deux pôles que sont, d’un côté, l’arbitraire subjectif, de l’autre, le fanatisme fondamentaliste. Si la culture européenne d’aujourd’hui comprenait désormais la liberté comme l’absence totale de liens, cela serait fatal et favoriserait inévitablement le fanatisme et l’arbitraire. L’absence de liens et l’arbitraire ne sont pas la liberté, mais sa destruction. En considérant «l’école du service du Seigneur» – comme Benoît appelait le monachisme –, nous avons jusque-là porté notre attention prioritairement sur son orientation vers la parole, vers l’«ora». Et, de fait, c’est à partir de là que se détermine l’ensemble de la vie monastique. Mais notre réflexion resterait incomplète si nous ne fixions pas aussi notre regard, au moins brièvement, sur la deuxième composante du monachisme, désignée par le terme «labora». Dans le monde grec, le travail physique était considéré comme l’œuvre des esclaves. Le sage, l’homme vraiment libre, se consacrait uniquement aux choses de l’esprit; il abandonnait le travail physique, considéré comme une réalité inférieure, à ces hommes qui n’étaient pas supposés atteindre cette existence supérieure, celle de l’esprit. La tradition juive était très différente: tous les grands rabbins exerçaient parallèlement un métier artisanal. Paul, comme rabbi puis comme héraut de l’Évangile aux Gentils, était un fabricant de tentes et il gagnait sa vie par le travail de ses mains. Il n’était pas une exception, mais il se situait dans la tradition commune du rabbinisme. Le monachisme chrétien a accueilli cette tradition: le travail manuel en est un élément constitutif. Dans sa « Regula », Benoît ne parle pas au sens strict de l’école, même si l’enseignement et l’apprentissage – comme nous l’avons vu – étaient acquis dans les faits; en revanche, il parle explicitement du travail (cf. chap. 48). Augustin avait fait de même en consacrant au travail des moines un livre particulier. Les chrétiens, s’inscrivant dans la tradition pratiquée depuis longtemps par le judaïsme, devaient, en outre, se sentir interpellés par la parole de Jésus dans l’Évangile de Jean, où il défendait son action le jour du shabbat: «Mon Père (…) est toujours à l’œuvre, et moi aussi je suis à l’œuvre» (5, 17). Le monde gréco-romain ne connaissait aucun Dieu Créateur. La divinité suprême selon leur vision ne pouvait pas, pour ainsi dire, se salir les mains par la création de la matière. L’«ordonnancement» du monde était le fait du démiurge, une divinité subordonnée. Le Dieu de la Bible est bien différent: Lui, l’Un, le Dieu vivant et vrai, est également le Créateur. Dieu travaille, Il continue d’œuvrer dans et sur l’histoire des hommes. Et dans le Christ, Il entre comme Personne dans l’enfantement laborieux de l’histoire. «Mon Père est toujours à l’œuvre et moi aussi je suis à l’œuvre.» Dieu Lui-même est le Créateur du monde, et la création n’est pas encore achevée. Dieu travaille! C’est ainsi que le travail des hommes devait apparaître comme une expression particulière de leur ressemblance avec Dieu qui rend l’homme participant à l’œuvre créatrice de Dieu dans le monde. Sans cette culture du travail qui, avec la culture de la parole, constitue le monachisme, le développement de l’Europe, son ethos et sa conception du monde sont impensables. L’originalité de cet ethos devrait cependant faire comprendre que le travail et la détermination de l’histoire par l’homme sont une collaboration avec le Créateur, qui ont en Lui leur mesure. Là où cette mesure vient à manquer et là où l’homme s’élève lui-même au rang de créateur déiforme, la transformation du monde peut facilement aboutir à sa destruction. Nous sommes partis de l’observation que, dans l’effondrement de l’ordre ancien et des antiques certitudes, l’attitude de fond des moines était le « quaerere Deum » – se mettre à la recherche de Dieu. C’est là, pourrions-nous dire, l’attitude vraiment philosophique: regarder au-delà des réalités pénultièmes et se mettre à la recherche des réalités ultimes qui sont vraies. Celui qui devenait moine s’engageait sur un chemin élevé et long, il était néanmoins déjà en possession de la direction: la Parole de la Bible dans laquelle il écoutait Dieu parler. Dès lors, il devait s’efforcer de Le comprendre pour pouvoir aller à Lui. Ainsi, le cheminement des moines, tout en restant impossible à évaluer dans sa progression, s’effectuait au cœur de la Parole reçue. La quête des moines comprend déjà en soi, dans une certaine mesure, sa résolution. Pour que cette recherche soit possible, il est nécessaire qu’il existe dans un premier temps un mouvement intérieur qui suscite non seulement la volonté de chercher, mais qui rende aussi crédible le fait que dans cette Parole se trouve un chemin de vie, un chemin de vie sur lequel Dieu va à la rencontre de l’homme pour lui permettre de venir à Sa rencontre. En d’autres termes, l’annonce de la Parole est nécessaire. Elle s’adresse à l’homme et forge en lui une conviction qui peut devenir vie. Afin que s’ouvre un chemin au cœur de la parole biblique en tant que Parole de Dieu, cette même Parole doit d’abord être annoncée ouvertement. L’expression classique de la nécessité pour la foi chrétienne de se rendre communicable aux autres se résume dans une phrase de la Première Lettre de Pierre, que la théologie médiévale regardait comme le fondement biblique du travail des théologiens: «Vous devez toujours être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte (logos) de l’espérance qui est en vous» (3, 15). (Logos doit devenir apo-logie, la Parole doit devenir réponse). De fait, les chrétiens de l’Église naissante ne considéraient pas leur annonce missionnaire comme une propagande qui devait servir à augmenter l’importance de leur groupe, mais comme une nécessité intrinsèque qui dérivait de la nature de leur foi. Le Dieu en qui ils croyaient était le Dieu de tous, le Dieu Un et Vrai qui s’était fait connaître au cours de l’histoire d’Israël et, finalement, à travers son Fils, apportant ainsi la réponse qui concernait tous les hommes et que, au plus profond d’eux-mêmes, tous attendent. L’universalité de Dieu et l’universalité de la raison ouverte à Lui constituaient pour eux la motivation et, à la fois, le devoir de l’annonce. Pour eux, la foi ne dépendait pas des habitudes culturelles, qui sont diverses selon les peuples, mais relevait du domaine de la vérité qui concerne, de manière égale, tous les hommes. Le schéma fondamental de l’annonce chrétienne « ad extra » – aux hommes qui, par leurs questionnements, sont en recherche – se dessine dans le discours de saint Paul à l’Aréopage. N’oublions pas qu’à cette époque, l’Aréopage n’était pas une sorte d’académie où les esprits les plus savants se rencontraient pour discuter sur les sujets les plus élevés, mais un tribunal qui était compétent en matière de religion et qui devait s’opposer à l’intrusion de religions étrangères. C’est précisément ce dont on accuse Paul: «On dirait un prêcheur de divinités étrangères» (Ac 17, 18). Ce à quoi Paul réplique: «J’ai trouvé chez vous un autel portant cette inscription: “Au dieu inconnu”. Or, ce que vous vénérez sans le connaître, je viens vous l’annoncer» (cf. 17, 23). Paul n’annonce pas des dieux inconnus. Il annonce Celui que les hommes ignorent et pourtant connaissent: l’Inconnu-Connu. C’est Celui qu’ils cherchent, et dont, au fond, ils ont connaissance et qui est cependant l’Inconnu et l’Inconnaissable. Au plus profond, la pensée et le sentiment humains savent de quelque manière que Dieu doit exister et qu’à l’origine de toutes choses, il doit y avoir non pas l’irrationalité, mais la Raison créatrice, non pas le hasard aveugle, mais la liberté. Toutefois, bien que tous les hommes le sachent d’une certaine façon – comme Paul le souligne dans la Lettre aux Romains (1, 21) – cette connaissance demeure ambiguë: un Dieu seulement pensé et élaboré par l’esprit humain n’est pas le vrai Dieu. Si Lui ne se montre pas, quoi que nous fassions, nous ne parvenons pas pleinement jusqu’à Lui. La nouveauté de l’annonce chrétienne c’est la possibilité de dire maintenant à tous les peuples: Il s’est montré, Lui personnellement. Et à présent, le chemin qui mène à Lui est ouvert. La nouveauté de l’annonce chrétienne réside en un fait: Dieu s’est révélé. Ce n’est pas un fait nu mais un fait qui, lui-même, est Logos – présence de la Raison éternelle dans notre chair. « Verbum caro factum est » (Jn 1, 14): il en est vraiment ainsi en réalité, à présent, le Logos est là, le Logos est présent au milieu de nous. C’est un fait rationnel. Cependant, l’humilité de la raison sera toujours nécessaire pour pouvoir l’accueillir. Il faut l’humilité de l’homme pour répondre à l’humilité de Dieu. Sous de nombreux aspects, la situation actuelle est différente de celle que Paul a rencontrée à Athènes, mais, tout en étant différente, elle est aussi, en de nombreux points, très analogue. Nos villes ne sont plus remplies d’autels et d’images représentant de multiples divinités. Pour beaucoup, Dieu est vraiment devenu le grand Inconnu. Malgré tout, comme jadis où derrière les nombreuses représentations des dieux était cachée et présente la question du Dieu inconnu, de même, aujourd’hui, l’actuelle absence de Dieu est aussi tacitement hantée par la question qui Le concerne. « Quaerere Deum » – chercher Dieu et se laisser trouver par Lui: cela n’est pas moins nécessaire aujourd’hui que par le passé. Une culture purement positiviste, qui renverrait dans le domaine subjectif, comme non scientifique, la question concernant Dieu, serait la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un échec de l’humanisme, dont les conséquences ne pourraient être que graves. Ce qui a fondé la culture de l’Europe, la recherche de Dieu et la disponibilité à L’écouter, demeure aujourd’hui encore le fondement de toute culture véritable.

 

 

Lutte de Jacob avec l’ange

16 février, 2016

Lutte de Jacob avec l'ange dans images sacrée Jacob_Wrestling_with_Angel_

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COMMENT FAIRE NAÎTRE L’ESPRIT DE PRIÈRE ? PAR LE SAINT ÉVÊQUE THÉOPHANE LE RECLUS

16 février, 2016

http://www.pagesorthodoxes.net/priere/priere-theophane.htm

COMMENT FAIRE NAÎTRE L’ESPRIT DE PRIÈRE ? PAR LE SAINT ÉVÊQUE THÉOPHANE LE RECLUS

Dans la vie chrétienne, la prière tient la première place. La prière, c’est le souffle de l’esprit. Là où est la prière, l’esprit vit ; s’il n’y a pas de prière, l’esprit est sans vie. Se tenir devant une icône et se prosterner, n’est pas la prière, ce n’en est qu’un attribut. Dire des prières, de mémoire, ou les lisant, ou les écoutant – n’est pas encore prier, c’est seulement un moyen de découverte et d’éveil. La prière elle-même consiste en l’apparition dans notre cœur d’une succession de sentiments pieux, dirigés l’un après l’autre vers Dieu : sentiments de notre propre indignité, de dévotion, de reconnaissance, de glorification, de supplique, de contrition, de prosternation ardente, et autres. Tout notre souci doit être là : emplir notre âme de tous ces sentiments et de ceux qui leur sont identiques, afin que le cœur ne reste pas vide. Lorsque tous ces sentiments ou l’un d’entre eux s’y trouvent, et s’élancent vers Dieu, notre oraison est alors prière, sinon elle ne l’est pas encore. La prière, ou élan du cœur vers Dieu, doit être stimulée et affermie ou, ce qui revient au même, il faut éduquer en nous-mêmes l’esprit de prière. Le premier procédé pour cela est la lecture ou l’écoute de nos prières. Lis, ou écoute avec attention, et en toute certitude, tu éveilleras et conforteras la montée de la prière de ton cœur vers Dieu, c’est-à-dire que tu en pénétreras l’esprit. Dans les prières des Pères saints, une force puissante est en mouvement, et celui qui s’y introduira en déployant toute son attention et sa persévérance la goûtera sans doute aucun, par la loi de l’interaction, dans la mesure où il aura approché du contenu de cette prière son propre état d’esprit. Pour que nos prières soient un réel moyen d’éduquer cette disposition, il est indispensable de les accomplir de telle sorte que la pensée et le cœur en accueillent le contenu. Voici, dans ce but, trois procédés des plus simples : ne commence pas tes prières sans t’y être d’abord préparé comme il se doit ; ne prie pas n’importe comment, mais avec attention et sentiment ; et à la fin, ne reprends pas immédiatement tes occupations.

Préparation à la prière Lorsque tu te disposes à prier, quel que soit le moment choisi, reste d’abord un peu tranquille, assieds-toi ou fais quelques pas et efforce-toi alors de libérer ta pensée de toute préoccupation ou objet d’ici-bas. Puis, réfléchis : Quel est celui à qui tu vas t’adresser dans ta prière, et qui tu es, toi qui dois maintenant la lui adresser ; et éveille en ton âme le sentiment approprié, celui d’abnégation et de crainte pieuse en la présence de Dieu au dedans du cœur. Voilà en quoi consiste cette préparation minime, mais d’importante signification : se maintenir avec piété devant Dieu dans le cœur. C’est là le début de la prière, et un bon début, c’est déjà la moitié de l’entreprise accomplie. Observance de la prière – Les prières lues T’étant ainsi préparé intérieurement, place-toi devant l’icône, signe-toi, fais une prosternation, et commence tes prières habituelles. Lis sans hâte, pénètre chaque mot, amène jusqu’au cœur le sens de chaque parole, et accompagne tout cela de prosternations, en te signant. Cette lecture fructueuse de la prière est agréable à Dieu. Approfondis chaque parole et introduis sa pensée jusqu’au cœur, autrement dit : comprends ce que tu lis, et ressens-le. Tu lis : « Purifie-moi de toute souillure » (Ps 50), ressens le mal qui est en toi, désire la pureté, et dans une totale espérance, demande-la au Seigneur. Tu lis : « Que ta volonté soit faite », et dans ton cœur remets complètement ton destin au Seigneur, étant totalement prêt à accueillir de bon gré tout ce qu’il t’enverra. Tu lis : « Remets-nous nos dettes, comme nous les remettons à nos débiteurs », et en ton âme, pardonne tout à tous, et demande alors son pardon au Seigneur pour toi. Si tu agis ainsi pour chaque verset de ta prière, tu auras trouvé l’oraison appropriée. Et pour l’accomplir au mieux précisément de cette façon, voici ce qu’il faut faire :

1) Aie une certaine règle de prières, pas trop longue, afin de pouvoir l’accomplir sans hâte, malgré tes occupations habituelles. 2) Dans tes temps libres, lis attentivement les prières de ta règle, pour en comprendre chaque mot et le ressentir, afin de connaître d’avance ce que tu dois produire en ton âme et en ton cœur à telle ou telle parole, afin que cela te soit facile de le réaliser et de l’éprouver au moment de l’oraison. 3) Si, au moment de la prière, ta pensée s’envole vers d’autres objets, efforce-toi de rester attentif, et ramène-la sur l’objectif de la prière ; elle s’enfuit à nouveau, ramène-la à nouveau : répète la lecture, tant que tu n’en auras pas compris et ressenti chaque mot. C’est ainsi que tu déshabitueras ta pensée de la dispersion lorsque tu pries. 4) Si une parole de la prière exerce un effet puissant sur ton âme : arrête-toi dessus et ne lis pas plus loin ; reste sur ce passage, dans l’attention et le sentiment, nourris-en ton âme, ou les pensées qu’elle produira, et ne détruis pas cet état, tant qu’il ne disparaîtra pas de lui-même : c’est le signe que l’esprit de prière commence à faire son nid en toi, et cet état est le moyen le plus sûr d’éduquer et d’affermir cet esprit.

Après la prière Lorsque tu auras terminé ton oraison, ne passe pas aussitôt à quelque autre occupation, mais à nouveau, reste tranquille un moment et réfléchis à ce que tu viens d’accomplir et à ce à quoi cela t’engage, sauvegardant tout particulièrement, après la prière, ce qui a eu sur toi un effet marquant. La nature même de la prière est telle que si tu as bien prié, comme il se doit, tu n’auras pas rapidement envie de te soucier des affaires : celui qui aura goûté au miel ne voudra pas du fiel ; goûter à cette douceur de la prière est le but même de l’oraison et, en goûtant à cette douceur dans l’oraison, l’esprit de prière s’éduque. Si tu te tiens à ces quelques principes, tu verras rapidement le fruit de tes efforts. Toute oraison laisse dans l’âme une trace de la prière ; sa poursuite fidèle avec la même méthode l’enracinera, et la persévérance dans l’effort y greffera alors l’esprit de prière. Voilà le début, le premier moyen d’éduquer en nous cet esprit de prière ! Il est conforme à sa destination, l’accomplissement de nos prières. Mais ce n’est pas encore tout, ceci n’est que le début de la science de la prière. Il faut aller plus loin.

Aller plus loin : La prière personnelle Nous étant habitués par l’esprit et le cœur à nous adresser à Dieu avec une aide extérieure, les livres de prières, il est ensuite indispensable de s’essayer à sa propre montée vers Dieu, d’arriver à ce que l’âme elle-même, par un discours pour ainsi dire personnel, entre dans un entretien de prières avec Dieu, se transporte elle-même vers lui, s’ouvre à lui, lui confesse son état, et ce qu’elle désire. Et il faut le lui apprendre. Comment réussir dans cette science ? Certes l’habitude de prier, avec piété, attention et sensibilité, à l’aide du livre de prières, y amène, car la prière personnelle, emplie de sentiments saints par le livre de prières, commencera à s’arracher d’elle-même du cœur, pour aller vers Dieu. Cependant, il existe aussi pour cela des méthodes particulières qui amènent à la réussite nécessaire de la prière. Première méthode : l’enseignement qui conduit l’âme à s’adresser fréquemment à Dieu est la « pensée en Dieu », ou réflexion pieuse sur les propriétés et actions divines – bienveillance, justice, sagesse, omnipotence, omniprésence, omniscience – sur la création et la providence, le salut en Jésus Christ, sur la grâce et la parole de Dieu, les saints mystères, le royaume céleste. Quel que soit celui de ces sujets sur lequel tu commenceras à méditer, il emplira sans faute l’âme d’un sentiment de piété envers Dieu : il propulse tout droit vers Dieu l’être entier, c’est pourquoi c’est le moyen le plus direct pour habituer l’âme à s’élancer vers Dieu. Lorsque tu auras terminé tes prières, surtout le matin, assieds-toi, et commence la méditation : aujourd’hui sur l’une, demain sur l’autre des propriétés et actions de Dieu, et amène ton âme à la prédisposition correspondante. Dis, avec saint Dimitri de Rostov : « Viens, sainte pensée en Dieu, et plongeons-nous dans la méditation sur les grandes œuvres de Dieu ». Permets ainsi à ton cœur de s’émouvoir et tu commenceras à épancher ton âme dans la prière. Ce n’est pas un gros effort, mais il donne beaucoup de fruits. Il y faut seulement le désir et le zèle. Commence, par exemple, à réfléchir sur la bienveillance divine et tu te verras entouré des effets corporels et spirituels de la miséricorde divine, et, plein de reconnaissance, tu te prosterneras devant Dieu ; médite sur son omniprésence et tu découvriras que tu es partout devant lui et qu’il est devant toi, et il te sera impossible de ne pas ressentir une crainte pieuse ; médite sur la vérité de Dieu, tu seras alors convaincu qu’aucune mauvaise action ne restera impunie, et tu te disposeras, à coup sûr, à te purifier de tes péchés devant Dieu d’un cœur contrit, dans le repentir ; réfléchis à l’omniscience divine : tu reconnaîtras que rien de ce qui est en toi n’échappe à l’œil de Dieu, et tu décideras sûrement d’être sévère envers toi-même et attentif en tout, afin de ne pas irriter Dieu, qui voit tout. La deuxième méthode pour éduquer l’âme à fréquemment invoquer Dieu est de dédier toute entreprise, grande ou petite, à sa gloire ; car si nous prenons pour règle, selon l’Apôtre (1 Co 10, 31), de tout faire, même manger et boire, à la gloire de Dieu, alors il est certain que chaque fois, non seulement nous nous souviendrons de Dieu, mais nous ferons attention, en toute circonstance, de ne pas agir mal et de ne pas irriter Dieu par quelque action. Cela nous obligera à nous adresser à lui avec crainte et à Le prier de nous aider et de nous éclairer. Et comme nous sommes presque sans arrêt en activité, nous adresserons presque sans arrêt des prières à Dieu, et nous nous exercerons donc presque sans arrêt à l’élévation priante de notre âme vers Dieu. Ainsi nous apprendrons à notre âme à s’adresser le plus souvent possible à lui au cours d’une journée. La troisième méthode d’éducation de notre âme est de l’habituer à faire appel à Dieu à partir du cœur, par des paroles courtes, selon les besoins de l’âme et les occupations. Tu commences quelque chose, dis : « Bénis, Seigneur ! » Tu as terminé, dis, non seulement par la langue, mais avec le cœur : « Gloire à toi, Seigneur ! » Une mauvaise passion apparaît, dis : « Sauve-moi, Seigneur, je péris ! » Une foule de pensées mauvaises t’envahit, appelle : « Tire mon âme de sa prison ! » Un mensonge apparaît dans une affaire et le péché t’y attire, prie : « Guide-moi, Seigneur, sur la route » ; ou : « Ne laisse pas mon pied chanceler ». Les péchés te pèsent et t’amènent au désespoir, appelle par la voix du publicain : « Seigneur, aie pitié de moi ! » Et ainsi en toute circonstance. Ou bien, dis plus souvent : « Seigneur, aie pitié ! Mère de Dieu Souveraine, sauve-moi ! Ange, mon saint gardien, défends-moi ! » ; ou appelle par quelque autre parole. Seulement, autant que possible, appelle plus souvent, t’efforçant surtout à ce que ces appels viennent du cœur, comme s’ils jaillissaient hors de lui. Faisant ainsi, nous aurons de fréquentes élévations spirituelles du cœur vers Dieu, des appels fréquents à lui, et une prière fréquente, et cette fréquence nous inculquera l’habitude de l’entretien spirituel avec Dieu. Ainsi donc, outre la règle de prières, l’apprentissage de l’élévation de l’âme vers Dieu par la prière comporte aussi les trois pratiques nous amenant à l’esprit de prière : laisser du temps le matin à la méditation de Dieu ; œuvrer en tout pour la Gloire de Dieu ; et s’adresser à Dieu souvent, par des appels courts. Lorsque la méditation de Dieu matinale aura été bonne, elle préservera une disposition profonde de l’esprit à penser à Dieu. Cette pensée en Dieu obligera l’âme à accomplir tout acte, intérieur ou extérieur, avec prudence et pour la gloire de Dieu. Et l’une et l’autre la mettront dans une situation qui lui fera faire souvent de courts appels à Dieu. Ces trois choses – méditation de Dieu, toute œuvre pour la gloire de Dieu et invocations fréquentes – sont les armes les plus efficaces pour la prière spirituelle du cœur. Chacune d’elles élève l’âme vers Dieu. S’étant arrachée de la terre, celle-ci entrera dans son domaine et vivra avec délice dans les hauteurs ; ici, par le cœur et la pensée ; et, là-haut, elle se sera essentiellement rendue digne de se tenir devant la Face de Dieu.

Théophane le Reclus, Lettre 227. Traduit du russe par N.M. Tikhomirova.

RENCONTRE DU SAINT-PÈRE AVEC S.S. CYRILLE, PATRIARCHE DE MOSCOU ET DE TOUTE LA RUSSIE

16 février, 2016

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2016/february/documents/papa-francesco_20160212_dichiarazione-comune-kirill.html

VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE FRANÇOIS AU MEXIQUE (12-18 FÉVRIER 2016)

RENCONTRE DU SAINT-PÈRE AVEC S.S. CYRILLE, PATRIARCHE DE MOSCOU ET DE TOUTE LA RUSSIE

SIGNATURE DE LA DÉCLARATION CONJOINTE

Aéroport international « José Martí » – La Havane, Cuba Vendredi 12 février 2016

Déclaration conjointe Discours du Pape François Déclaration commune du Pape François et du Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie

« La grâce de Notre Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu le Père et la communion du Saint-Esprit soit avec vous tous » (2 Co 13, 13). 1. Par la volonté de Dieu le Père de qui vient tout don, au nom de Notre Seigneur Jésus Christ et avec le secours de l’Esprit Saint Consolateur, nous, Pape François et Kirill, Patriarche de Moscou et de toute la Russie, nous sommes rencontrés aujourd’hui à La Havane. Nous rendons grâce à Dieu, glorifié en la Trinité, pour cette rencontre, la première dans l’histoire. Avec joie, nous nous sommes retrouvés comme des frères dans la foi chrétienne qui se rencontrent pour se « parler de vive voix » (2 Jn 12), de cœur à cœur, et discuter des relations mutuelles entre les Eglises, des problèmes essentiels de nos fidèles et des perspectives de développement de la civilisation humaine. 2. Notre rencontre fraternelle a eu lieu à Cuba, à la croisée des chemins entre le Nord et le Sud, entre l’Est et l’Ouest. De cette île, symbole des espoirs du « Nouveau Monde » et des événements dramatiques de l’histoire du XXe siècle, nous adressons notre parole à tous les peuples d’Amérique latine et des autres continents. Nous nous réjouissons de ce que la foi chrétienne se développe ici de façon dynamique. Le puissant potentiel religieux de l’Amérique latine, sa tradition chrétienne séculaire, réalisée dans l’expérience personnelle de millions de personnes, sont le gage d’un grand avenir pour cette région. 3. Nous étant rencontrés loin des vieilles querelles de l’« Ancien Monde », nous sentons avec une force particulière la nécessité d’un labeur commun des catholiques et des orthodoxes, appelés, avec douceur et respect, à rendre compte au monde de l’espérance qui est en nous (cf. 1 P 3, 15). 4. Nous rendons grâce à Dieu pour les dons que nous avons reçus par la venue au monde de son Fils unique. Nous partageons la commune Tradition spirituelle du premier millénaire du christianisme. Les témoins de cette Tradition sont la Très Sainte Mère de Dieu, la Vierge Marie, et les saints que nous vénérons. Parmi eux se trouvent d’innombrables martyrs qui ont manifesté leur fidélité au Christ et sont devenus « semence de chrétiens ». 5. Malgré cette Tradition commune des dix premiers siècles, catholiques et orthodoxes, depuis presque mille ans, sont privés de communion dans l’Eucharistie. Nous sommes divisés par des blessures causées par des conflits d’un passé lointain ou récent, par des divergences, héritées de nos ancêtres, dans la compréhension et l’explicitation de notre foi en Dieu, un en Trois Personnes – Père, Fils et Saint Esprit. Nous déplorons la perte de l’unité, conséquence de la faiblesse humaine et du péché, qui s’est produite malgré la Prière sacerdotale du Christ Sauveur : « Que tous soient un. Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu’eux aussi soient un en nous » (Jn 17, 21). 6. Conscients que de nombreux obstacles restent à surmonter, nous espérons que notre rencontre contribue au rétablissement de cette unité voulue par Dieu, pour laquelle le Christ a prié. Puisse notre rencontre inspirer les chrétiens du monde entier à prier le Seigneur avec une ferveur renouvelée pour la pleine unité de tous ses disciples ! Puisse-t-elle, dans un monde qui attend de nous non pas seulement des paroles mais des actes, être un signe d’espérance pour tous les hommes de bonne volonté ! 7. Déterminés à entreprendre tout ce qui nécessaire pour surmonter les divergences historiques dont nous avons hérité, nous voulons unir nos efforts pour témoigner de l’Evangile du Christ et du patrimoine commun de l’Eglise du premier millénaire, répondant ensemble aux défis du monde contemporain. Orthodoxes et catholiques doivent apprendre à porter un témoignage unanime à la vérité dans les domaines où cela est possible et nécessaire. La civilisation humaine est entrée dans un moment de changement d’époque. Notre conscience chrétienne et notre responsabilité pastorale ne nous permettent pas de rester inactifs face aux défis exigeant une réponse commune. 8. Notre regard se porte avant tout vers les régions du monde où les chrétiens subissent la persécution. En de nombreux pays du Proche Orient et d’Afrique du Nord, nos frères et sœurs en Christ sont exterminés par familles, villes et villages entiers. Leurs églises sont détruites et pillées de façon barbare, leurs objets sacrés sont profanés, leurs monuments, détruits. En Syrie, en Irak et en d’autres pays du Proche Orient, nous observons avec douleur l’exode massif des chrétiens de la terre d’où commença à se répandre notre foi et où ils vécurent depuis les temps apostoliques ensemble avec d’autres communautés religieuses. 9. Nous appelons la communauté internationale à des actions urgentes pour empêcher que se poursuive l’éviction des chrétiens du Proche Orient. Elevant notre voix pour défendre les chrétiens persécutés, nous compatissons aussi aux souffrances des fidèles d’autres traditions religieuses devenus victimes de la guerre civile, du chaos et de la violence terroriste. 10. En Syrie et en Irak, la violence a déjà emporté des milliers de vies, laissant des millions de gens sans abri ni ressources. Nous appelons la communauté internationale à mettre fin à la violence et au terrorisme et, simultanément, à contribuer par le dialogue à un prompt rétablissement de la paix civile. Une aide humanitaire à grande échelle est indispensable aux populations souffrantes et aux nombreux réfugiés dans les pays voisins. Nous demandons à tous ceux qui pourraient influer sur le destin de ceux qui ont été enlevés, en particulier des Métropolites d’Alep Paul et Jean Ibrahim, séquestrés en avril 2013, de faire tout ce qui est nécessaire pour leur libération rapide. 11. Nous élevons nos prières vers le Christ, le Sauveur du monde, pour le rétablissement sur la terre du Proche Orient de la paix qui est « le fruit de la justice » (Is 32, 17), pour que se renforce la coexistence fraternelle entre les diverses populations, Eglises et religions qui s’y trouvent, pour le retour des réfugiés dans leurs foyers, la guérison des blessés et le repos de l’âme des innocents tués. Nous adressons un fervent appel à toutes les parties qui peuvent être impliquées dans les conflits pour qu’elles fassent preuve de bonne volonté et s’asseyent à la table des négociations. Dans le même temps, il est nécessaire que la communauté internationale fasse tous les efforts possibles pour mettre fin au terrorisme à l’aide d’actions communes, conjointes et coordonnées. Nous faisons appel à tous les pays impliqués dans la lutte contre le terrorisme pour qu’ils agissent de façon responsable et prudente. Nous exhortons tous les chrétiens et tous les croyants en Dieu à prier avec ferveur le Dieu Créateur du monde et Provident, qu’il protège sa création de la destruction et ne permette pas une nouvelle guerre mondiale. Pour que la paix soit solide et durable, des efforts spécifiques sont nécessaires afin de redécouvrir les valeurs communes qui nous unissent, fondées sur l’Evangile de Notre Seigneur Jésus Christ. 12. Nous nous inclinons devant le martyre de ceux qui, au prix de leur propre vie, témoignent de la vérité de l’Evangile, préférant la mort à l’apostasie du Christ. Nous croyons que ces martyrs de notre temps, issus de diverses Eglises, mais unis par une commune souffrance, sont un gage de l’unité des chrétiens. A vous qui souffrez pour le Christ s’adresse la parole de l’apôtre : « Très chers !… dans la mesure où vous participez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous, afin que, lors de la révélation de Sa gloire, vous soyez aussi dans la joie et l’allégresse » (1 P 4, 12-13). 13. En cette époque préoccupante est indispensable le dialogue interreligieux. Les différences dans la compréhension des vérités religieuses ne doivent pas empêcher les gens de fois diverses de vivre dans la paix et la concorde. Dans les circonstances actuelles, les leaders religieux ont une responsabilité particulière pour éduquer leurs fidèles dans un esprit de respect pour les convictions de ceux qui appartiennent à d’autres traditions religieuses. Les tentatives de justifications d’actions criminelles par des slogans religieux sont absolument inacceptables. Aucun crime ne peut être commis au nom de Dieu, « car Dieu n’est pas un Dieu de désordre, mais de paix » (1 Co 14, 33). 14. Attestant de la haute valeur de la liberté religieuse, nous rendons grâce à Dieu pour le renouveau sans précédent de la foi chrétienne qui se produit actuellement en Russie et en de nombreux pays d’Europe de l’Est, où des régimes athées dominèrent pendant des décennies. Aujourd’hui les fers de l’athéisme militant sont brisés et en de nombreux endroits les chrétiens peuvent confesser librement leur foi. En un quart de siècle ont été érigés là des dizaines de milliers de nouvelles églises, ouverts des centaines de monastères et d’établissements d’enseignement théologique. Les communautés chrétiennes mènent une large activité caritative et sociale, apportant une aide diversifiée aux nécessiteux. Orthodoxes et catholiques œuvrent souvent côte à côte. Ils attestent des fondements spirituels communs de la convivance humaine, en témoignant des valeurs évangéliques. 15. Dans le même temps, nous sommes préoccupés par la situation de tant de pays où les chrétiens se heurtent de plus en plus souvent à une restriction de la liberté religieuse, du droit de témoigner de leurs convictions et de vivre conformément à elles. En particulier, nous voyons que la transformation de certains pays en sociétés sécularisées, étrangère à toute référence à Dieu et à sa vérité, constitue un sérieux danger pour la liberté religieuse. Nous sommes préoccupés par la limitation actuelle des droits des chrétiens, voire de leur discrimination, lorsque certaines forces politiques, guidées par l’idéologie d’un sécularisme si souvent agressif, s’efforcent de les pousser aux marges de la vie publique. 16. Le processus d’intégration européenne, initié après des siècles de conflits sanglants, a été accueilli par beaucoup avec espérance, comme un gage de paix et de sécurité. Cependant, nous mettons en garde contre une intégration qui ne serait pas respectueuse des identités religieuses. Tout en demeurant ouverts à la contribution des autres religions à notre civilisation, nous sommes convaincus que l’Europe doit rester fidèle à ses racines chrétiennes. Nous appelons les chrétiens européens d’Orient et d’Occident à s’unir pour témoigner ensemble du Christ et de l’Evangile, pour que l’Europe conserve son âme formée par deux mille ans de tradition chrétienne. 17. Notre regard se porte sur les personnes se trouvant dans des situations de détresse, vivant dans des conditions d’extrême besoin et de pauvreté, alors même que croissent les richesses matérielles de l’humanité. Nous ne pouvons rester indifférents au sort de millions de migrants et de réfugiés qui frappent à la porte des pays riches. La consommation sans limite, que l’on constate dans certains pays plus développés, épuise progressivement les ressources de notre planète. L’inégalité croissante dans la répartition des biens terrestres fait croître le sentiment d’injustice à l’égard du système des relations internationales qui s’est institué. 18. Les Eglises chrétiennes sont appelées à défendre les exigences de la justice, le respect des traditions des peuples et la solidarité effective avec tous ceux qui souffrent. Nous, chrétiens, ne devons pas oublier que « ce qu’il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi, pour couvrir de confusion ce qui est fort ; ce qui est d’origine modeste, méprisé dans le monde, ce qui n’est pas, voilà ce que Dieu a choisi, pour réduire à rien ce qui est ; ainsi aucun être de chair ne pourra s’enorgueillir devant Dieu » (1 Co 1, 27-29). 19. La famille est le centre naturel de la vie humaine et de la société. Nous sommes inquiets de la crise de la famille dans de nombreux pays. Orthodoxes et catholiques, partageant la même conception de la famille, sont appelés à témoigner que celle-ci est un chemin de sainteté, manifestant la fidélité des époux dans leurs relations mutuelles, leur ouverture à la procréation et à l’éducation des enfants, la solidarité entre les générations et le respect pour les plus faibles. 20. La famille est fondée sur le mariage, acte d’amour libre et fidèle d’un homme et d’une femme. L’amour scelle leur union, leur apprend à se recevoir l’un l’autre comme don. Le mariage est une école d’amour et de fidélité. Nous regrettons que d’autres formes de cohabitation soient désormais mises sur le même plan que cette union, tandis que la conception de la paternité et de la maternité comme vocation particulière de l’homme et de la femme dans le mariage, sanctifiée par la tradition biblique, est chassée de la conscience publique. 21. Nous appelons chacun au respect du droit inaliénable à la vie. Des millions d’enfants sont privés de la possibilité même de paraître au monde. La voix du sang des enfants non nés crie vers Dieu (cf. Gn 4, 10). Le développement de la prétendue euthanasie conduit à ce que les personnes âgées et les infirmes commencent à se sentir être une charge excessive pour leur famille et la société en général. Nous sommes aussi préoccupés par le développement des technologies de reproduction biomédicale, car la manipulation de la vie humaine est une atteinte aux fondements de l’existence de l’homme, créé à l’image de Dieu. Nous estimons notre devoir de rappeler l’immuabilité des principes moraux chrétiens, fondés sur le respect de la dignité de l’homme appelé à la vie, conformément au dessein de son Créateur. 22. Nous voulons adresser aujourd’hui une parole particulière à la jeunesse chrétienne. A vous, les jeunes, appartient de ne pas enfouir le talent dans la terre (cf. Mt 25, 25), mais d’utiliser toutes les capacités que Dieu vous a données pour confirmer dans le monde les vérités du Christ, pour incarner dans votre vie les commandements évangéliques de l’amour de Dieu et du prochain. Ne craignez pas d’aller à contre-courant, défendant la vérité divine à laquelle les normes séculières contemporaines sont loin de toujours correspondre. 23. Dieu vous aime et attend de chacun de vous que vous soyez ses disciples et apôtres. Soyez la lumière du monde, afin que ceux qui vous entourent, voyant vos bonnes actions, rendent gloire à votre Père céleste (cf. Mt 5, 14, 16). Eduquez vos enfants dans la foi chrétienne, transmettez-leur la perle précieuse de la foi (cf. Mt 13, 46) que vous avez reçue de vos parents et aïeux. N’oubliez pas que vous « avez été rachetés à un cher prix » (1 Co 6, 20), au prix de la mort sur la croix de l’Homme-Dieu Jésus Christ. 24. Orthodoxes et catholiques sont unis non seulement par la commune Tradition de l’Eglise du premier millénaire, mais aussi par la mission de prêcher l’Evangile du Christ dans le monde contemporain. Cette mission implique le respect mutuel des membres des communautés chrétiennes, exclut toute forme de prosélytisme. Nous ne sommes pas concurrents, mais frères : de cette conception doivent procéder toutes nos actions les uns envers les autres et envers le monde extérieur. Nous exhortons les catholiques et les orthodoxes, dans tous les pays, à apprendre à vivre ensemble dans la paix, l’amour et à avoir « les uns pour les autres la même aspiration » (Rm 15, 5). Il ne peut donc être question d’utiliser des moyens indus pour pousser des croyants à passer d’une Eglise à une autre, niant leur liberté religieuse ou leurs traditions propres. Nous sommes appelés à mettre en pratique le précepte de l’apôtre Paul : « Je me suis fait un honneur d’annoncer l’Évangile là où Christ n’avait point été nommé, afin de ne pas bâtir sur le fondement d’autrui » (Rm 15, 20). 25. Nous espérons que notre rencontre contribuera aussi à la réconciliation là où des tensions existent entre gréco-catholiques et orthodoxes. Il est clair aujourd’hui que la méthode de l’« uniatisme » du passé, comprise comme la réunion d’une communauté à une autre, en la détachant de son Eglise, n’est pas un moyen pour recouvrir l’unité. Cependant, les communautés ecclésiales qui sont apparues en ces circonstances historiques ont le droit d’exister et d’entreprendre tout ce qui est nécessaire pour répondre aux besoins spirituels de leurs fidèles, recherchant la paix avec leurs voisins. Orthodoxes et gréco-catholiques ont besoin de se réconcilier et de trouver des formes de coexistence mutuellement acceptables. 26. Nous déplorons la confrontation en Ukraine qui a déjà emporté de nombreuses vies, provoqué d’innombrables blessures à de paisibles habitants et placé la société dans une grave crise économique et humanitaire. Nous exhortons toutes les parties du conflit à la prudence, à la solidarité sociale, et à agir pour la paix. Nous appelons nos Eglises en Ukraine à travailler pour atteindre la concorde sociale, à s’abstenir de participer à la confrontation et à ne pas soutenir un développement ultérieur du conflit. 27. Nous exprimons l’espoir que le schisme au sein des fidèles orthodoxes d’Ukraine sera surmonté sur le fondement des normes canoniques existantes, que tous les chrétiens orthodoxes d’Ukraine vivront dans la paix et la concorde et que les communautés catholiques du pays y contribueront, de sorte que soit toujours plus visible notre fraternité chrétienne. 28. Dans le monde contemporain, multiforme et en même temps uni par un même destin, catholiques et orthodoxes sont appelés à collaborer fraternellement en vue d’annoncer la Bonne Nouvelle du salut, à témoigner ensemble de la dignité morale et de la liberté authentique de la personne, « pour que le monde croie » (Jn 17, 21).Ce monde, dans lequel disparaissent progressivement les piliers spirituels de l’existence humaine, attend de nous un fort témoignage chrétien dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale. De notre capacité à porter ensemble témoignage de l’Esprit de vérité en ces temps difficiles dépend en grande partie l’avenir de l’humanité. 29. Que dans le témoignage hardi de la vérité de Dieu et de la Bonne Nouvelle salutaire nous vienne en aide l’Homme-Dieu Jésus Christ, notre Seigneur et Sauveur, qui nous fortifie spirituellement par sa promesse infaillible : « Sois sans crainte, petit troupeau : votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume » (Lc 12, 32) ! Le Christ est la source de la joie et de l’espérance. La foi en Lui transfigure la vie de l’homme, la remplit de sens. De cela ont pu se convaincre par leur propre expérience tous ceux à qui peuvent s’appliquer les paroles de l’apôtre Pierre : « Vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, qui n’obteniez pas miséricorde et qui maintenant avez obtenu miséricorde » (1 P 2, 10). 30. Remplis de gratitude pour le don de la compréhension mutuelle manifesté lors de notre rencontre, nous nous tournons avec espérance vers la Très Sainte Mère de Dieu, en l’invoquant par les paroles de l’antique prière : « Sous l’abri de ta miséricorde, nous nous réfugions, Sainte Mère de Dieu ». Puisse la Bienheureuse Vierge Marie, par son intercession, conforter la fraternité de ceux qui la vénèrent, afin qu’ils soient au temps fixé par Dieu rassemblés dans la paix et la concorde en un seul Peuple de Dieu, à la gloire de la Très Sainte et indivisible Trinité !

François Évêque de Rome Pape de l’Eglise catholique  Kirill Patriarche de Moscou et de toutes la Russie le 12 février 2016, La Havane (Cuba) Adresse du Saint-Père après la signature de la Déclaration commune avec le Patriarche Kirill Sainteté, Eminences, Révérendes autorités religieuses, Nous nous sommes parlé comme des frères, nous avons le même Baptême, nous sommes évêques. Nous avons parlé de nos Eglises, et nous sommes tombés d’accord sur le fait que l’unité se fait en marchant. Nous avons parlé clairement, sans détours, et moi, je vous avoue que j’ai senti la consolation de l’Esprit dans ce dialogue. Je remercie Votre Sainteté pour l’humilité, pour la fraternelle humilité et le fort désir de l’unité. Nous nous quittons avec une série d’initiatives dont je crois qu’elles sont viables et pourront être réalisées. C’est pourquoi je voudrais remercier, une fois encore, Votre Sainteté pour l’accueil chaleureux, ainsi que les collaborateurs – et j’en nomme deux – : Son Eminence le Métropolite Hilarión et Son Eminence le Cardinal Koch – qui y ont contribué avec toutes leurs équipes. Je ne saurais m’en aller sans exprimer une sincère gratitude à Cuba, au grand peuple cubain et à son Président ici présent. Je vous remercie de votre efficace disponibilité. Si vous continuez ainsi, Cuba sera la capitale de l’unité. Et que tout cela soit pour la gloire de Dieu, le Père, le Fils et le Saint Esprit, ainsi que pour le bien du saint peuple de Dieu, sous le manteau de la Sainte Mère de Dieu.     

 

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