Archive pour décembre, 2015

Bonne année à tous!

31 décembre, 2015

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MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LA CÉLÉBRATION DE LA XLIXe JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX – 2016

31 décembre, 2015

http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/messages/peace/documents/papa-francesco_20151208_messaggio-xlix-giornata-mondiale-pace-2016.html

MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LA CÉLÉBRATION DE LA XLIXe JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX

1er JANVIER 2016

Gagne sur l’indifférence et remporte la paix !
1. Dieu n’est pas indifférent ! Dieu accorde de l’importance à l’humanité, Dieu ne l’abandonne pas ! Au début de l’année nouvelle, je voudrais accompagner de cette profonde conviction les vœux d’abondantes bénédictions et de paix, sous le signe de l’espérance, pour l’avenir de tout homme et de toute femme, de toute famille, peuple et nation du monde, ainsi que des Chefs d’État et de Gouvernement et des Responsables des religions. En effet, ne perdons pas l’espérance de voir en 2016 chacun, engagé fermement et avec confiance, à différents niveaux, à réaliser la justice et à œuvrer pour la paix. Oui, celle-ci est don de Dieu et œuvre des hommes. La paix est don de Dieu, mais don confié à tous les hommes et à toutes les femmes qui sont appelés à le réaliser.

Préserver les raisons de l’espérance
2. Les guerres et les actions terroristes, avec leurs tragiques conséquences, les séquestrations de personnes, les persécutions pour des motifs ethniques ou religieux, les prévarications, ont marqué l’année passée du début à la fin, se multipliant douloureusement en de nombreuses régions du monde, au point de prendre les traits de ce qu’on pourrait appeler une « troisième guerre mondiale par morceaux ». Mais certains événements des années passées et de l’année qui vient de s’achever m’invitent, dans la perspective de l’année nouvelle, à renouveler l’exhortation à ne pas perdre l’espérance dans la capacité de l’homme, avec la grâce de Dieu, à vaincre le mal et à ne pas s’abandonner à la résignation et à l’indifférence. Les événements auxquels je me réfère représentent la capacité de l’humanité à œuvrer dans la solidarité au-delà des intérêts individuels, de l’apathie et de l’indifférence vis-à-vis des situations critiques.
Parmi ceux-ci je voudrais rappeler l’effort fait pour favoriser la rencontre des leaders mondiaux, dans le cadre de la COP 21, afin de chercher de nouvelles voies pour affronter les changements climatiques et sauvegarder le bien être de la Terre, notre maison commune. Et cela renvoie à deux événements précédents au niveau global : le Sommet d’Addis Abeba pour réunir des fonds pour le développement durable du monde ; et l’adoption par les Nations Unies de l’Agenda 2030 pour le Développement Durable, visant à assurer, avant cette date, une existence plus digne à tous, surtout aux populations pauvres de la planète.
2015 a été aussi une année spéciale pour l’Église, parce qu’elle a été marquée par le 50ème anniversaire de la publication de deux documents du Concile Vatican II qui expriment de manière très éloquente le sens de la solidarité de l’Église avec le monde. Le Pape Jean XXIII, au début du Concile, a voulu ouvrir tout grand les fenêtres de l’Église pour que la communication entre elle et le monde soit plus ouverte. Les deux documents, Nostra aetate et Gaudium et spes, sont des expressions emblématiques de la nouvelle relation de dialogue, de solidarité et d’accompagnement que l’Église veut introduire à l’intérieur de l’humanité. Dans la Déclaration Nostra aetate l’Église a été appelée à s’ouvrir au dialogue avec les expressions religieuses non chrétiennes. Dans la Constitution pastorale Gaudium et spes, puisque « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ » [1], l’Église désire instaurer un dialogue avec la famille humaine sur les problèmes du monde, en signe de solidarité et de respectueuse affection. [2]
Dans cette même perspective, avec le Jubilé de la Miséricorde, je veux inviter l’Église à prier et à travailler pour que tout chrétien puisse mûrir un cœur humble et compatissant, capable d’annoncer et de témoigner la miséricorde, de « pardonner et de donner », de s’ouvrir « à ceux qui vivent dans les périphéries existentielles les plus différentes, que le monde moderne a souvent créées de façon dramatique » sans tomber « dans l’indifférence qui humilie, dans l’habitude qui anesthésie l’âme et empêche de découvrir la nouveauté dans le cynisme destructeur» [3].
Il y a de multiples raisons pour croire en la capacité de l’humanité à agir ensemble, en solidarité, dans la reconnaissance de sa propre interconnexion et interdépendance, ayant à cœur les membres les plus fragiles et la sauvegarde du bien commun. Cette attitude de coresponsabilité solidaire est à la racine de la vocation fondamentale à la fraternité et à la vie commune. La dignité et les relations interpersonnelles nous constituent comme êtres humains, voulus par Dieu à son image et ressemblance. En tant que créatures dotées d’une inaliénable dignité, nous existons en relation avec nos frères et sœurs, envers lesquels nous avons une responsabilité, et avec lesquels nous agissons en solidarité. En dehors de cette relation, nous serions des êtres moins humains. C’est justement ainsi que l’indifférence constitue une menace pour la famille humaine. Alors que nous nous mettons en marche vers une année nouvelle, je voudrais inviter chacun à reconnaître ce fait, pour vaincre l’indifférence et conquérir la paix.

Certaines formes d’indifférence
3. Il est certain que l’attitude de l’indifférent, de celui qui ferme le cœur pour ne pas prendre en considération les autres, de celui qui ferme les yeux pour ne pas voir ce qui l’entoure ou qui s’esquive pour ne pas être touché par les problèmes des autres, caractérise une typologie humaine assez répandue et présente à chaque époque de l’histoire. Cependant, de nos jours, cela a dépassé nettement le domaine individuel pour prendre une dimension globale et produire ce phénomène de la « globalisation de l’indifférence ».
La première forme d’indifférence dans la société humaine est l’indifférence envers Dieu, dont procède l’indifférence envers le prochain et envers la création. Et ceci est l’un des graves effets d’un faux humanisme et d’un matérialisme pratique, combinés à une pensée relativiste et nihiliste. L’homme pense être l’auteur de lui-même, de sa propre vie et de la société ; il se sent autosuffisant, et il cherche non seulement à se substituer à Dieu, mais à le faire disparaître complètement ; par conséquent, il pense ne rien devoir à personne, excepté à lui-même, et il prétend avoir seulement des droits [4]. Contre cette auto-compréhension erronée de la personne, Benoît XVI rappelait que ni l’homme ni son développement sont capables de se donner à soi-même leur propre signification ultime [5]. Et avant lui, Paul VI avait affirmé qu’« il n’est d’humanisme vrai qu’ouvert à l’Absolu, dans la reconnaissance d’une vocation, qui donne l’idée vraie de la vie humaine» [6].
L’indifférence envers le prochain prend différents visages. Il y a celui qui est bien informé, écoute la radio, lit les journaux ou assiste aux programmes télévisés, mais il le fait de manière tiède, presque dans une condition d’accoutumance : ces personnes connaissent vaguement les drames qui affligent l’humanité mais elles ne se sentent pas impliquées, elles ne vivent pas la compassion. Cela, c’est l’attitude de celui qui sait mais, qui garde son regard, sa pensée et son action tournés vers lui-même. Malheureusement, nous devons constater que l’augmentation des informations, propre à notre époque, ne signifie pas, en soi, une augmentation d’attention aux problèmes, si elle n’est pas accompagnée d’une ouverture des consciences dans un sens solidaire [7]. Bien plus, elle peut entraîner une certaine saturation qui anesthésie et, dans une certaine mesure, relativise la gravité des problèmes. « Certains se satisfont simplement en accusant les pauvres et les pays pauvres de leurs maux, avec des généralisations indues, et prétendent trouver la solution dans une “éducation” qui les rassure et les transforme en êtres apprivoisés et inoffensifs. Cela devient encore plus irritant si ceux qui sont exclus voient croître ce cancer social qui est la corruption profondément enracinée dans de nombreux pays – dans les gouvernements, dans l’entreprise et dans les institutions – quelle que soit l’idéologie politique des gouvernants» [8].
Dans d’autres cas, l’indifférence se manifeste comme un manque d’attention vis-à-vis de la réalité environnante, surtout la plus lointaine. Certaines personnes préfèrent ne pas chercher, ne pas s’informer, et vivent leur bien-être et leur confort, sourdes au cri de douleur de l’humanité souffrante. Presque sans nous en apercevoir, nous sommes devenus incapables d’éprouver de la compassion pour les autres, pour leurs drames ; prendre soin d’eux ne nous intéresse pas, comme si ce qui leur arrive était d’une responsabilité extérieure à nous, qui ne nous revient pas [9]. « Quand nous allons bien et nous prenons nos aises, nous oublions sûrement de penser aux autres (ce que Dieu le Père ne fait jamais), nous ne nous intéressons plus à leurs problèmes, à leurs souffrances et aux injustices qu’ils subissent… Alors notre cœur tombe dans l’indifférence : alors que je vais relativement bien et que tout me réussit, j’oublie ceux qui ne vont pas bien » [10].
En vivant dans une maison commune, nous ne pouvons pas ne pas nous interroger sur son état de santé, comme j’ai cherché à le faire dans Laudato si’. La pollution des eaux et de l’air, l’exploitation sans discernement des forêts, la destruction de l’environnement, sont souvent le fruit de l’indifférence de l’homme envers les autres, parce que tout est lié. Comme, aussi, le comportement de l’homme avec les animaux a une influence sur ses relations avec les autres [11] , pour ne pas parler de celui qui se permet de faire ailleurs ce qu’il n’ose pas faire chez lui [12].
Dans ces cas, et dans d’autres, l’indifférence provoque surtout une fermeture et un désengagement, et finit ainsi par contribuer à l’absence de paix avec Dieu, avec le prochain et avec la création.

La paix menacée par l’indifférence globalisée
4. L’indifférence envers Dieu dépasse la sphère intime et spirituelle de la personne individuelle, et elle investit la sphère publique et sociale. Comme l’affirmait Benoît XVI, « il existe un lien intime entre la glorification de Dieu et la paix des hommes sur la terre» [13]. En effet, « sans une ouverture transcendante, l’homme devient facilement la proie du relativisme et, ensuite, il réussit difficilement à agir selon la justice et à s’engager pour la paix» [14]. L’oubli et la négation de Dieu qui conduisent l’homme à ne plus reconnaître aucune norme au-dessus de lui et à se prendre lui-même comme seule norme, ont produit des cruautés et des violences sans mesure [15].
Au niveau individuel et communautaire l’indifférence envers le prochain, fille de l’indifférence envers Dieu, prend l’aspect de l’inertie et du désengagement qui alimentent la prolongation de situations d’injustice et de grave déséquilibre social. Ces situations, à leur tour, peuvent conduire à des conflits, ou en tout cas, générer un climat d’insatisfaction qui risque de déboucher tôt ou tard sur des violences et de l’insécurité.
En ce sens, l’indifférence et le désengagement qui en est la conséquence constituent un manque grave au devoir que toute personne a de contribuer, dans la mesure de ses capacités et de son rôle dans la société, au bien commun, en particulier à la paix, qui est l’un des biens les plus précieux de l’humanité [16].
Quand, ensuite, l’indifférence envers l’autre, envers sa dignité, ses droits fondamentaux et sa liberté, investit le niveau institutionnel, dans une culture imprégnée de profit et d’hédonisme, elle favorise et parfois justifie des actions et des politiques qui finissent par constituer des menaces à la paix. Un tel comportement d’indifférence peut aussi en arriver à justifier certaines politiques économiques déplorables, annonciatrices d’injustices, de divisions et de violences, en vue de l’obtention de son propre bien être ou de celui de la nation. Souvent, en effet, les projets économiques et politiques des hommes ont pour fin la conquête ou le maintien du pouvoir et des richesses, même au prix de piétiner les droits et les exigences fondamentales des autres. Quand les populations voient leurs propres droits élémentaires niés, comme la nourriture, l’eau, l’assistance sanitaire ou le travail, elles sont tentées de se les procurer par la force [17].
De plus, l’indifférence vis-à-vis de l’environnement naturel, qui favorise la déforestation, la pollution et les catastrophes naturelles qui déracinent des communautés entières de leur milieu de vie en les contraignant à la précarité et à l’insécurité, crée de nouvelles pauvretés, de nouvelles situations d’injustice aux conséquences souvent néfastes en termes de sécurité et de paix sociale. Combien de guerres ont été conduites et combien seront encore faites à cause du manque de ressources ou pour répondre à l’insatiable recherche de ressources naturelles [18] ?

De l’indifférence à la miséricorde : la conversion du cœur
5. Quand, il y a un an, dans le Message pour la Journée Mondiale de la Paix, “Non plus esclaves mais frères”, j’évoquais la première icône biblique de la fraternité humaine, celle de Caïn et Abel (cf. Gn 4, 1-16), c’était pour attirer l’attention sur la manière dont cette première fraternité a été trahie. Caïn et Abel sont frères. Ils proviennent tous deux du même sein, ils sont égaux en dignité et créés à l’image et ressemblance de Dieu ; mais leur fraternité de créature est rompue. « Non seulement Caïn ne supporte pas son frère Abel, mais il le tue par envie » [19]. Le fratricide devient alors la forme de trahison, et le refus par Caïn de la fraternité d’Abel est la première rupture dans les relations familiales de fraternité, de solidarité et de respect réciproque.
Dieu intervient alors, pour appeler l’homme à la responsabilité à l’égard de son semblable, comme il a fait lorsqu’Adam et Ève, les premiers parents, ont rompu la communion avec le Créateur. « Le Seigneur dit à Caïn : “Où est ton frère Abel ?”. Il répondit : “Je ne sais pas. Suis-je le gardien de mon frère ? ”. Le Seigneur reprit : “Qu’as-tu fait ! Écoute le sang de ton frère crier vers moi du sol ! ” (Gn 4, 9-10).
Caïn dit ne pas savoir ce qui est arrivé à son frère, il dit ne pas être son gardien. Il ne se sent pas responsable de sa vie, de son sort. Il ne se sent pas impliqué. Il est indifférent envers son frère, bien qu’ils soient liés par l’origine commune. Quelle tristesse ! Quel drame fraternel, familial, humain ! C’est la première manifestation de l’indifférence entre frères. Dieu, au contraire, n’est pas indifférent : le sang d’Abel a grande valeur à ses yeux et il demande à Caïn d’en rendre compte. Donc Dieu se révèle depuis les débuts de l’humanité comme Celui qui s’intéresse au sort de l’homme. Quand plus tard, les fils d’Israël se trouvent en esclavage en Égypte, Dieu intervient à nouveau. Il dit à Moïse : « J’ai vu, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte. J’ai entendu son cri devant ses oppresseurs ; oui, je connais ses angoisses. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de cette terre vers une terre plantureuse et vaste, vers une terre qui ruisselle de lait et de miel » (Ex 3, 7-8). Il est important de noter les verbes qui décrivent l’intervention de Dieu : il observe, il entend, il connaît, il descend, il libère. Dieu n’est pas indifférent. Il est attentif et il agit.
De la même façon, en son Fils Jésus, Dieu est descendu parmi les hommes, il s’est incarné et il s’est montré solidaire de l’humanité, en toute chose, excepté le péché. Jésus s’identifie avec l’humanité : « l’aîné d’une multitude de frères » (Rm 8, 29). Il ne se contente pas d’enseigner aux foules, mais il se préoccupe d’elles, spécialement quand il les voyait affamées (cf. Mc 6, 34-44) ou sans travail (cf. Mt 20, 3). Son regard n’était pas tourné seulement vers les hommes, mais aussi vers les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les plantes et les arbres, petits et grands ; il embrassait le créé tout entier. Il voit, certainement, mais il ne se limite pas à cela, parce qu’il touche les personnes, il parle avec elles, agit en leur faveur et fait du bien à celui qui est dans le besoin. Non seulement, mais il se laisse émouvoir et il pleure (cf. Jn 11, 33-44). Et il agit pour mettre fin à la souffrance, à la tristesse, à la misère et à la mort.
Jésus nous enseigne à être miséricordieux comme le Père (cf. Lc 6, 36). Dans la parabole du bon samaritain (cf. Lc 10, 29-37), il dénonce l’omission d’aide devant l’urgente nécessité de ses semblables : « Il le vit et passa outre » (cf. Lc 10, 31.32). En même temps, à l’aide de cet exemple, il invite ses auditeurs, et en particulier ses disciples, à apprendre à s’arrêter devant les souffrances de ce monde pour les soulager, devant les blessures des autres pour les soigner, avec les moyens dont on dispose, à commencer par son temps, malgré les nombreuses occupations. L’indifférence, en effet, cherche souvent des prétextes : dans l’observance des préceptes rituels, dans la quantité de choses qu’il faut faire, dans les antagonismes qui nous tienne éloignés les uns des autres, dans les préjudices de tout genre qui nous empêchent de nous faire proche.
La miséricorde est le cœur de Dieu. Elle doit donc être aussi le cœur de tous ceux qui se reconnaissent membres de l’unique grande famille de ses enfants ; un cœur qui bat fort partout où la dignité humaine – reflet du visage de Dieu dans ses créatures – est en jeu. Jésus nous avertit : l’amour pour les autres – les étrangers, les malades, les prisonniers, les sans-domicile-fixe, même les ennemis – est l’unité de mesure de Dieu pour juger nos actions. De cela dépend notre destin éternel. Il n’y a pas à s’étonner que l’apôtre Paul invite les chrétiens de Rome à se réjouir avec ceux qui se réjouissent et à pleurer avec ceux qui pleurent (cf. Rm 12, 15), ou qu’il recommande à ceux de Corinthe d’organiser des collectes en signe de solidarité avec les membres souffrants de l’Église (cf. 1 Co 16, 2-3). Et saint Jean écrit : « Si quelqu’un, jouissant des biens de ce monde, voit son frère dans la nécessité et lui ferme ses entrailles, comment l’amour de Dieu demeurait-il en lui ? » (1 Jn 3, 17 ; cf. Jc 2, 15-16).
Voilà pourquoi « il est déterminant pour l’Eglise et pour la crédibilité de son annonce de vivre et de témoigner elle-même de la miséricorde. Son langage et ses gestes doivent transmettre la miséricorde pour pénétrer le cœur des personnes et les inciter à retrouver le chemin du retour au Père. La vérité première de l’Eglise est l’amour du Christ. De cet amour, qui va jusqu’au pardon et au don de soi, l’Eglise se fait servante et médiatrice auprès des hommes. En conséquence, là où l’Eglise est présente, la miséricorde du Père doit être manifeste. Dans nos paroisses, les communautés, les associations et les mouvements, en bref, là où il y a des chrétiens, quiconque doit pouvoir trouver une “oasis de miséricorde”» [20].
Ainsi, nous aussi, nous sommes appelés à faire de l’amour, de la compassion, de la miséricorde et de la solidarité un vrai programme de vie, un style de comportement dans nos relations les uns avec les autres [21]. Cela demande la conversion du cœur : c’est à dire que la grâce de Dieu transforme notre cœur de pierre en un cœur de chair (cf. Ex 36, 26), capables de s’ouvrir aux autres avec une solidarité authentique. Cela en effet, est beaucoup plus qu’un « sentiment de compassion vague ou d’attendrissement superficiel pour les maux subis par tant de personnes, proches ou lointaines » [22]. La solidarité « est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le bien commun, c’est-à-dire pour le bien de tous et de chacun parce que tous nous sommes vraiment responsables de tous » [23], parce que la compassion jaillit de la fraternité.
Ainsi comprise, la solidarité constitue l’attitude morale et sociale qui répond le mieux à la prise de conscience des plaies de notre temps et de l’incontestable interdépendance qui existe toujours plus, spécialement dans un monde globalisé, entre la vie de l’individu et de sa communauté dans un lieu déterminé et celle des autres hommes et femmes dans le reste du monde [24].
Promouvoir une culture de solidarité et de miséricorde pour vaincre l’indifférence
6. La solidarité comme vertu morale et attitude sociale, fruit de la conversion personnelle, exige un engagement d’une multiplicité de sujets, qui ont une responsabilité de caractère éducatif et formateur.
Ma première pensée va aux familles, appelées à une mission éducative première et incontournable. Elles constituent le premier lieu où se vivent et se transmettent les valeurs de l’amour et de la fraternité, de la convivialité et du partage, de l’attention et du soin de l’autre. Elles sont aussi le milieu privilégié pour la transmission de la foi, en commençant par ces simples gestes de dévotion que les mères enseignent à leurs enfants [25].
Pour ce qui concerne les éducateurs et les formateurs qui, à l’école ou dans les différents centres de socialisation infantile et juvénile, ont la tâche exigeante d’éduquer des enfants et des jeunes, ils sont appelés à être conscients que leur responsabilité regarde les dimensions morales, spirituelles et sociales de la personne. Les valeurs de la liberté, du respect réciproque et de la solidarité peuvent être transmises dès le plus jeune âge. S’adressant aux responsables des institutions qui ont des tâches éducatives, Benoît XVI a affirmé : « Que chaque structure éducative puisse être un lieu d’ouverture au transcendant et aux autres ; un lieu de dialogue, de cohésion et d’écoute, où le jeune se sente valorisé dans ses propres potentialités et ses richesses intérieures, et apprenne à estimer vraiment ses frères. Que ce lieu puisse enseigner aussi à goûter la joie qui jaillit du fait de vivre, jour après jour, dans la charité et dans la compassion envers le prochain, et dans la participation active à la construction d’une société plus humaine et fraternelle » [26].
Les agents culturels et des moyens de communication sociale ont aussi une responsabilité dans le domaine de l’éducation et de la formation, spécialement dans la société contemporaine, où l’accès aux instruments d’information et de communication est toujours plus répandu. C’est leur tâche de se mettre par-dessus tout au service de la vérité et non d’intérêts particuliers. Les moyens de communication en effet, « non seulement informent, mais ils façonnent aussi l’esprit de leurs destinataires et ils peuvent donc contribuer de façon notable à l’éducation des jeunes. Il est important de retenir que le lien entre éducation et communication est très étroit : l’éducation advient en effet par les moyens de communication, qui influent sur la formation de la personne d’une manière positive ou négative »[27]. Les agents culturels et des media devraient être aussi vigilants afin que la manière dont ils obtiennent et diffusent les informations soit toujours juridiquement et moralement licite.

La paix : fruit d’une culture de solidarité, de miséricorde et de compassion
7. Conscients de la menace d’une globalisation de l’indifférence, nous ne pouvons pas ne pas reconnaître que, dans le scenario décrit ci-dessus, s’insèrent aussi de nombreuses intiatives et actions positives qui témoignent la compassion, la miséricorde et la solidarité dont l’homme est capable.
Je voudrais rappeler quelques exemples d’engagement louable, qui montrent comment chacun peut vaincre l’indifférence lorsqu’il choisit de ne pas détourner le regard de son prochain, et qui constituent de bonnes pratiques sur le chemin vers une société plus humaine.
Il y a beaucoup d’organisations non grouvernementales et de groupes caritatifs, à l’intérieur de l’Église et en dehors d’elle, dont les membres, à l’occasion d’épidémies, de calamités ou de conflits armés, affrontent difficultés et dangers pour soigner les blessés et les malades et pour enterrer les défunts. À côté d’elles, je voudrais mentionner les personnes et les associations qui portent secours aux migrants qui traversent des déserts et sillonnent des mers à la recherche de meilleures conditions de vie. Ces actions sont des oeuvres de miséricorde corporelle et spirituelle, sur lesquelles nous serons jugés à la fin de notre vie.
Ma pensée va aux journalistes et aux photographes qui informent l’opinion publique sur les situations difficiles qui interpellent les consciences, et à ceux qui s’engagent pour la défense des droits humains, en particulier ceux des minorités ethniques et religieuses, des peuples indigènes, des femmes et des enfants, et de tous ceux qui vivent dans des conditions de plus grande vulnérabilité. Parmi eux, il y a aussi beaucoup de prêtres et de missionnaires qui, comme des bons pasteurs, restent à côté de leurs fidèles et les soutiennent malgré les dangers et les difficultés, en particulier durant les conflits armés.
Combien de familles, ensuite, au milieu de nombreuses difficultés sociales et de travail, s’engagent concrètement pour éduquer leurs enfants “à contre-courant”, au prix de beaucoup de sacrifices, aux valeurs de la solidarité, de la compassion et de la fraternité ! Combien de familles ouvrent leurs cœurs et leurs maisons à celui qui est dans le besoin, comme aux réfugiés et aux migrants ! Je veux remercier de façon particulière toutes les personnes, les familles, les paroisses, les communautés religieuses, les monastères et les sanctuaires, qui ont répondu rapidement à mon appel à accueillir une famille de réfugiés [28].
Enfin, je voudrais mentionner les jeunes qui s’unissent pour réaliser des projets de solidarité et tous ceux qui ouvrent leurs mains pour aider le prochain dans le besoin dans leurs villes, dans leurs pays ou dans d’autres régions du monde. Je veux remercier et encourager tous ceux qui s’engagent dans des actions de ce genre, même si elles ne font pas l’objet de publicité : leur faim et soif de justice sera rassasiée, leur miséricorde leur fera trouver miséricorde et, en tant qu’artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu (cf. Mt 5, 6-9).

La paix dans le signe du Jubilé de la Miséricorde
8. Dans l’esprit du Jubilé de la Miséricorde, chacun est appeler à reconnaître comment l’indifférence se manifeste dans sa propre vie, et à adopter un engagement concret pour contribuer à améliorer la réalité dans laquelle il vit, à partir de sa propre famille, de son voisinage ou de son milieu de travail.
Les États sont aussi appelés à des gestes concrets, à des actes de courage à l’égard des personnes les plus fragiles de leurs sociétés, comme les prisonniers, les migrants, les chômeurs et les malades.
Pour ce qui concerne les détenus, dans beaucoup de cas, il semble urgent d’adopter des mesres concrètes pour améliorer leurs conditions de vie dans les prisons, accordant une attention spéciale à ceux qui sont privés de liberté en attente de jugement [29], ayant à l’esprit la finalité de rééducation de la sanction pénale et évaluant la possibilité d’insérer dans les législations nationales des peines alternatives à la détention carcérale. Dans ce contexte, je désire renouveler l’appel aux autorités étatiques pour l’abolition de la peine de mort, là où elle est encore en vigueur, et à considérer la possibilité d’une amnistie.
En ce qui concerne les migrants, je voudrais inviter à repenser les législations sur les migrations, afin qu’elles soient animées par la volonté de l’accueil, dans le respect des devoirs et des responsabilités réciproques, et puissent faciliter l’intégration des migrants. Dans cette perspective, une attention spéciale devrait être portée aux conditions de séjour des migrants, se rappelant que la clandestinité risque de les entraîner vers la criminalité.
Je désire, en outre, en cette Année jubilaire, formuler un appel pressant aux responsables des États à accomplir des gestes concrets en faveur de nos frères et sœurs qui souffrent à cause du manque de travail, de terre et de toit. Je pense à la création de postes de travail décent, pour lutter contre la plaie sociale du chômage, qui écrase un grand nombre de familles et de jeunes et a des conséquences très importantes sur le maintien de la société tout entière. Le manque de travail entame lourdement le sens de la dignité et de l’espérance, et peut être compensé seulement partiellement par des subsides, également nécessaires, destinés aux chômeurs et à leurs familles. Une attention spéciale devrait être donnée aux femmes – malheureusement encore discriminées dans le domaine du travail – et à certaines catégories de travailleurs, dont les conditions sont précaires ou dangereuses et dont les rétributions ne sont pas proportionnées à l’importance de leur mission sociale.
Enfin, je voudrais inviter à accomplir des actions efficaces pour améliorer les conditions de vie des malades, garantissant à tous l’accès à des soins médicaux et aux médicaments indispensables à la vie, y compris la possibilité de soins à domicile.
Tournant leur regard au-delà de leurs propres frontières, les responsables des États sont aussi appelés à renouveler leurs relations avec les autres peuples, permettant à tous une participation effective et une inclusion à la vie de la communauté internationale, afin que la fraternité se réalise également à l’intérieur de la famille des nations.
Dans cette perspective, je désire adresser un triple appel à s’abstenir d’entraîner les autres peuples dans des conflits ou des guerres qui en détruisent non seulement les richesses matérielles, culturelles et sociales, mais aussi – et pour longtemps – l’intégrité morale et spirituelle ; à l’effacement ou à la gestion soutenable de la dette internationale des pays les plus pauvres ; à l’adoption de politiques de coopération qui, au lieu de se plier à la dictature de certaines idéologies, soient respectueuses des valeurs des populations locales et qui, dans chaque cas, ne portent pas atteinte au droit fondamental et inaliénable des enfants à naître à la vie.
Je confie ces réflexions, ainsi que mes meilleurs vœux pour la nouvelle année, à l’intercession de Marie, la Très Sainte, Mère attentive aux besoins de l’humanité, afin qu’elle obtienne de son Fils Jésus, Prince de la Paix, d’exaucer nos supplications et de bénir notre engagement quotidien pour un monde fraternel et solidaire.

Du Vatican, le 8 décembre 2015
Solennité de l’Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie
Ouverture du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde

FRANCISCUS

CÉLÉBRATION DES VÊPRES ET DU TE DEUM D’ACTION DE GRÂCE POUR LA FIN DE L’ANNÉE 2011 – HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT VI

30 décembre, 2015

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/homilies/2011/documents/hf_ben-xvi_hom_20111231_te-deum.html

CÉLÉBRATION DES VÊPRES ET DU TE DEUM D’ACTION DE GRÂCE POUR LA FIN DE L’ANNÉE 2011 –
HOMÉLIE DU PAPE BENOÎT XVI

Basilique Saint-Pierre

Samedi 31 décembre 2011

Messieurs les Cardinaux,
Chers frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Autorités,
Chers frères et sœurs,

Nous sommes réunis dans la Basilique Vaticane pour célébrer les Premières Vêpres de la solennité de Sainte Marie Mère de Dieu et pour rendre grâce au Seigneur au terme de l’année, en chantant ensemble le Te Deum. Je vous remercie vous tous qui avez voulu vous unir à moi en cette circonstance toujours dense en sentiments et en signification. Je salue tout d’abord Messieurs les Cardinaux, les vénérés Frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce, les religieux et les religieuses, les personnes consacrées et les fidèles laïcs qui représentent la communauté ecclésiale de Rome tout entière. Je salue de façon spéciale les Autorités présentes, à commencer par le Maire de Rome, le remerciant pour le don du calice qui, selon une belle tradition, se renouvelle chaque année. Je souhaite de tout cœur que l’engagement de tous ne manque pas afin que le visage de notre ville soit toujours plus conforme aux valeurs de foi, de culture et de civilisation qui appartiennent à sa vocation et à son histoire millénaire.
Une autre année s’achève alors que nous en attendons une nouvelle : avec l’anxiété, les désirs et les attentes de toujours. Si on pense à l’expérience de la vie, on demeure étonnés de ce qu’au fond elle soit brève et fugace. C’est pour cela, qu’il n’est pas rare que nous nous interrogions : quel sens pouvons-nous donner à nos jours ? Quel sens, en particulier, pouvons-nous donner aux jours de difficulté et de souffrance ? C’est une question qui traverse l’histoire, qui traverse même le cœur de toute génération et de tout être humain. Mais à cette question il y a une réponse : elle est écrite sur le visage d’un Enfant qui, il y a deux mille ans, est né à Bethléem et qui aujourd’hui est le Vivant, ressuscité de la mort pour toujours. Dans le tissu de l’humanité déchiré par tant d’injustices, de méchancetés et de violences, fait irruption de manière surprenante la nouveauté joyeuse et libératrice du Christ Sauveur qui, dans le mystère de son Incarnation et de sa naissance, nous fait contempler la bonté et la tendresse de Dieu. Dieu éternel est entré dans notre histoire et demeure présent de façon unique dans la personne de Jésus, son Fils fait homme, notre Sauveur, venu sur la terre pour renouveler radicalement l’humanité et la libérer du péché et de la mort, pour élever l’homme à la dignité de fils de Dieu. Noël ne rappelle pas seulement la réalisation historique de cette vérité qui nous concerne directement, mais, de façon mystérieuse et réelle, nous la donne de nouveau.
Comme il est suggestif, en ce crépuscule d’une année, d’écouter à nouveau l’annonce joyeuse que l’Apôtre Paul adressait aux Chrétiens de Galatie : « Lorsque les temps furent accomplis, Dieu a envoyé son Fils ; il est né d’une femme, il a été sous la domination de la loi de Moïse pour racheter ceux qui étaient sous la domination de la Loi et pour faire de nous des fils » (Ga 4, 4-5). Ces paroles rejoignent le cœur de l’histoire de tous et l’illuminent, ou mieux la sauvent, car depuis le jour de la nativité du Seigneur la plénitude des temps est venue à nous. Donc il n’y a plus de place pour l’angoisse face au temps qui s’écoule et ne revient pas ; il y a maintenant la place pour une confiance illimitée en Dieu, dont nous savons être aimés, pour qui nous vivons et vers qui notre vie est orientée dans l’attente de son retour définitif. Depuis que le Sauveur est descendu du ciel, l’homme n’est plus esclave d’un temps qui passe sans un pourquoi, ou qui est marqué par la difficulté, la tristesse, la souffrance. L’homme est fils d’un Dieu qui est entré dans le temps pour racheter le temps du non-sens ou de la négativité et qui a racheté l’humanité tout entière, lui donnant comme nouvelle perspective de vie l’amour qui est éternel.
L’Église vit et professe cette vérité et entend la proclamer aujourd’hui encore avec une vigueur spirituelle renouvelée. Dans cette célébration nous avons des raisons spéciales de louer Dieu pour son mystère de salut, œuvrant dans le monde par le ministère ecclésial. Nous avons de nombreux motifs de remerciement au Seigneur pour ce que notre communauté ecclésiale, au cœur de l’Église universelle, accomplit au service de l’Évangile dans cette ville. À ce propos, avec le Cardinal Vicaire, Agostino Vallini, les Évêques auxiliaires, les curés et le presbyterium diocésain tout entier, je désire remercier le Seigneur, en particulier, pour le cheminement communautaire prometteur visant à adapter la pastorale ordinaire aux exigences de notre temps, par le projet « Appartenance ecclésiale et coresponsabilité pastorale ». Il a pour objectif de mettre l’évangélisation à la première place, afin de rendre plus responsable et fructueuse la participation des fidèles aux sacrements, de sorte que chacun puisse parler de Dieu à l’homme d’aujourd’hui et annoncer l’Évangile de façon incisive à tous ceux qui ne l’ont jamais connu ou qui l’ont oublié.
La quaestio fidei est également le défi pastoral prioritaire pour le diocèse de Rome. Les disciples du Christ sont appelés à faire renaître en eux et dans les autres la nostalgie de Dieu et la joie d’en vivre et d’en témoigner, à partir de la question toujours très personnelle : pourquoi est-ce que je crois ? Il faut accorder la primauté à la vérité, accréditer l’alliance entre foi et raison comme deux ailes grâce auxquelles l’esprit humain s’élève vers la contemplation de la Vérité (cf. Jean-Paul II, Enc. Fides et ratio, Prologue) ; rendre fécond le dialogue du christianisme avec la culture moderne ; faire redécouvrir la beauté et l’actualité de la foi non comme un acte en soi, isolé, qui concerne un moment quelconque de la vie, mais comme une orientation constante, même des choix les plus simples, qui conduit à l’unité profonde de la personne la rendant juste, laborieuse, bienfaisante, bonne. Il s’agit de raviver une foi qui fonde un nouvel humanisme capable de faire naître culture et engagement social.
Dans ce cadre de référence, durant le Congrès diocésain de juin dernier, le diocèse de Rome a entrepris un parcours d’approfondissement sur l’initiation chrétienne et sur la joie de faire naître de nouveaux chrétiens à la foi. Annoncer la foi dans le Verbe fait chair est, en effet, le cœur de la mission de l’Église et la communauté ecclésiale tout entière doit redécouvrir avec une ardeur missionnaire renouvelée cette tâche incontournable. Surtout les jeunes générations, qui ressentent le plus le désarroi qu’accentue aussi la crise actuelle, non seulement économique mais aussi des valeurs, ont besoin de reconnaître en Jésus Christ « la clé, le centre et la fin de toute l’histoire humaine » (Conc. Vat. II, Const. Gaudium et spes, 10)
Les parents sont les premiers éducateurs à la foi de leurs enfants, dès leur plus jeune âge. C’est pourquoi il est nécessaire de soutenir les familles dans leur mission éducative à travers des initiatives opportunes. En même temps, il est à souhaiter que le chemin baptismal, première étape de l’itinéraire formateur de l’initiation chrétienne, outre à favoriser la préparation consciente et digne à la célébration du Sacrement, porte aussi une attention adéquate aux années suivant immédiatement le baptême, à travers des itinéraires appropriés tenant compte des conditions de vie que les familles doivent affronter. J’encourage donc les communautés paroissiales et les autres réalités ecclésiales à poursuivre avec application leur réflexion pour promouvoir une meilleure compréhension et réception des sacrements par lesquels l’homme est rendu participant de la vie même de Dieu. Que ne manquent pas à l’Église de Rome des fidèles laïcs prêts à offrir leur propre contribution pour édifier des communautés vivantes, qui permettent à la Parole de Dieu de faire irruption dans le cœur de ceux qui n’ont pas encore connu le Seigneur ou qui se sont éloignés de lui ! En même temps, il est opportun de créer des occasions de rencontre avec la ville, qui permettent un dialogue fructueux avec ceux qui sont à la recherche de la Vérité.
Chers amis, puisque Dieu a envoyé son Fils unique, pour que nous puissions obtenir la filiation adoptive (cf. Ga 4,5), il ne peut exister pour nous de devoir plus grand que celui d’être totalement au service du projet divin. À ce propos, je désire encourager et remercier tous les fidèles du Diocèse de Rome, qui sentent la responsabilité de redonner une âme à notre société. Merci à vous, familles romaines, premières et fondamentales cellules de la société ! Merci aux membres des nombreuses communautés, associations et mouvements qui s’emploient à animer la vie chrétienne dans notre ville !
« Te Deum laudamus ! ». Nous te louons, Dieu ! L’Église nous suggère de ne pas finir l’année sans adresser au Seigneur notre remerciement pour tous ses bienfaits. C’est en Dieu que doit prendre fin notre dernière heure, la dernière heure du temps et de l’histoire. Oublier cette fin de notre vie signifierait tomber dans le vide, vivre sans aucun sens. C’est pourquoi l’Église met sur nos lèvres l’hymne antique du Te Deum. C’est un hymne plein de la sagesse de nombreuses générations chrétiennes qui sentent le besoin d’orienter leur cœur vers le haut, conscientes que nous sommes tous entre les mains pleines de miséricorde du Seigneur.
« Te Deum laudamus ! ». C’est aussi ce que chante l’Église qui est à Rome, pour les merveilles que Dieu a opérées et opère en elle. Le cœur rempli de gratitude, nous nous disposons à franchir le seuil de l’an 2012, nous rappelant que le Seigneur veille sur nous et nous protège. C’est à lui que nous voulons confier, ce soir, le monde entier. Remettons entre ses mains les drames de notre monde et offrons-lui aussi nos espérances pour un avenir meilleur. Déposons ces vœux dans les mains de Marie, Mère de Dieu, Salus Populi Romani. Amen.

Te Deum -Angels

30 décembre, 2015

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http://te-deum.blogspot.it/2013/10/a-collection-of-audiences-of-pope-john.html

TEXTE FRANÇAIS ET LATIN DU TE DEUM

30 décembre, 2015

TEXTE FRANÇAIS ET LATIN DU TE DEUM

Texte français du Te Deum
À toi Dieu, notre louange ! Nous t’acclamons, tu es Seigneur ! À toi Père éternel, L’hymne de l’univers.
Devant toi se prosternent les archanges, les anges et les esprits des cieux ; ils te rendent grâce ; ils adorent et ils chantent :
Saint, Saint, Saint, le Seigneur, Dieu de l’univers ; le ciel et la terre sont remplis de ta gloire.
C’est toi que les Apôtres glorifient, toi que proclament les prophètes, toi dont témoignent les martyrs ; c’est toi que par le monde entier l’Église annonce et reconnaît.
Dieu, nous t’adorons : Père infiniment saint, Fils éternel et bien-aimé, Esprit de puissance et de paix.
Christ, le Fils du Dieu vivant, le Seigneur de la gloire, tu n’as pas craint de prendre chair dans le corps d’une vierge pour libérer l’humanité captive.
Par ta victoire sur la mort, tu as ouvert à tout croyant les portes du Royaume ; tu règnes à la droite du Père ; tu viendras pour le jugement.
Montre-toi le défenseur et l’ami des hommes sauvés par ton sang : prends-les avec tous les saints dans ta joie et dans ta lumière. © A.E.L.F.

Texte latin du Te deum
Te Deum laudamus : te Dominum confitemur. Te aeternum patrem, omnis terra veneratur.
Tibi omnes angeli, tibi caeli et universae potestates : tibi cherubim et seraphim, incessabili voce proclamant : « Sanctus, Sanctus, Sanctus Dominus Deus Sabaoth. Pleni sunt caeli et terra maiestatis gloriae tuae. »
Te gloriosus Apostolorum chorus, te prophetarum laudabilis numerus, te martyrum candidatus laudat exercitus.
Te per orbem terrarum sancta confitetur Ecclesia, Patrem immensae maiestatis ; venerandum tuum verum et unicum Filium ; Sanctum quoque Paraclitum Spiritum.
Tu rex gloriae, Christe. Tu Patris sempiternus es Filius. Tu, ad liberandum suscepturus hominem, non horruisti Virginis uterum.
Tu, devicto mortis aculeo, aperuisti credentibus regna caelorum. Tu ad dexteram Dei sedes, in gloria Patris.
Iudex crederis esse venturus.
Te ergo quaesumus, tuis famulis subveni, quos pretioso sanguine redemisti. Aeterna fac cum sanctis tuis in gloria numerari.
Salvum fac populum tuum, Domine, et benedic hereditati tuae. Et rege eos, et extolle illos usque in aeternum.
Per singulos dies benedicimus te ; et laudamus nomen tuum in saeculum, et in saeculum saeculi.
Dignare, Domine, die isto sine peccato nos custodire. Miserere nostri, Domine, miserere nostri.
Fiat misericordia tua, Domine, super nos, quemadmodum speravimus in te. In te, Domine, speravi : non confundar in aeternum.

Mount Athos Chapel

29 décembre, 2015

Mount Athos Chapel dans images sacrée

http://holymountain-agionoros.blogspot.it/2010_11_01_archive.html

LITURGIE DES HEURES – 29 DÉCEMBRE 2015 – SERMON DE SAINT BERNARD POUR L’ÉPIPHANIE

29 décembre, 2015

http://aelf.org/office-lectures

LITURGIE DES HEURES – OFFICE DES LECTURES

29 décembre 2015 – 5ème jour dans l’octave de Noël

SERMON DE SAINT BERNARD POUR L’ÉPIPHANIE

À la plénitude des temps est venue aussi la plénitude de la divinité

Voici manifestées la bonté et l’humanité de Dieu notre Sauveur. Rendons grâce à Dieu qui fait ainsi abonder notre consolation dans cet état de pèlerins qui est le nôtre, dans cet exil, dans cette misère d’ici-bas. ~ Avant que n’apparaisse son humanité, sa bonté aussi demeurait cachée. Certes, elle existait auparavant, car la miséricorde du Seigneur est de toujours. Mais comment aurait-on pu savoir qu’elle était si grande ? Elle faisait l’objet d’une promesse, non d’une expérience. Aussi beaucoup d’hommes n’y croyaient pas. Sans doute, à bien des reprises et de bien des manières, le Seigneur parlait par les prophètes. Moi, disait-il, je forme des pensées de paix, et non de malheur. Mais que pouvait bien répondre l’homme quand il éprouvait le malheur et ne connaissait pas la paix ? Jusqu’à quand allez-vous dire : Paix ! la paix ! alors qu’il n’y a pas de paix ? C’est pourquoi les messagers de la paix pleuraient amèrement, disant : Seigneur, qui aurait cru ce que nous avons entendu ? Mais maintenant, que les hommes croient à ce qu’ils voient, car les affirmations du Seigneur sont vraiment infaillibles. En effet, pour que même l’œil troublé ne demeure pas incapable de le voir, c’est dans le soleil qu’il a placé sa tente. Voici que la paix n’est plus promise mais envoyée, non plus remise à plus tard mais donnée, non plus prophétisée mais proposée. C’est comme un couffin plein de sa miséricorde que Dieu le Père a envoyé sur la terre ; oui, dis-je, un couffin que la Passion devra déchirer pour laisser se répandre ce qu’il contient : notre paix ; un couffin, peut-être petit, mais rempli. Un petit enfant nous a été donné, mais en lui habite toute la plénitude de la divinité. Lorsqu’est venue la plénitude des temps est venue aussi la plénitude de la divinité. Elle est venue dans la chair, afin de se faire voir même de ceux qui sont charnels, et que son humanité ainsi manifestée permette de reconnaître sa bonté. En effet, dès que l’humanité de Dieu se fait connaître, sa bonté ne peut plus rester cachée. Et comment aurait-il pu davantage mettre en relief sa bonté qu’en revêtant ma chair ? — Ma chair, dis-je, non celle d’Adam, non celle qui était la sienne avant la chute. Pourquoi déclare-t-il avec tant de soin sa miséricorde, au point de faire sienne notre misère elle-même ? Pourquoi est-il rempli d’une bonté telle que la parole de Dieu, pour nous, s’est faite herbe fanée ? Seigneur, qu’est-ce que l’homme, pour que tu penses à lui ? Qu’est- il pour que ton cœur en fasse tant de cas ? Voici où l’homme doit porter son attention pour découvrir quel souci Dieu prend de lui ; voici où l’homme doit apprendre quelle pensée et quel sentiment Dieu nourrit à son égard. N’interroge pas ce que tu souffres, toi, mais ce qu’il a souffert, lui. À ce qu’il est devenu pour toi, reconnais ta valeur à ses yeux, afin que sa bonté t’apparaisse à partir de son humanité. En effet, l’abaissement qu’il accomplit dans son humanité a été la grandeur même de sa bonté, et plus il s’est rendu méprisable en ma faveur, plus il me devient cher. Voici manifestées la bonté et l’humanité de Dieu notre Sauveur, dit l’Apôtre. Oui, qu’elles sont grandes et évidentes, la bonté de Dieu et son humanité ! Quelle grande preuve de sa bonté il nous a donnée, en prenant tant de soin pour ajouter à l’humanité le nom de Dieu.

MONT ATHOS: L’HUMILITÉ DANS LA PRIÈRE

29 décembre, 2015

http://orthodoxologie.blogspot.it/2010/09/mont-athos-lhumilite-dans-la-priere.html

MONT ATHOS: L’HUMILITÉ DANS LA PRIÈRE

Nous avons lu dans les paroles des Pères du désert l’anecdote concernant deux frères qui décidèrent de devenir moines et quittèrent le monde. L’un devint  disciple d’un monastère cénobitique, l’autre devint ermite. Après deux ou trois ans, l’ermite dit:  » Je vais aller voir mon frère qui est dans le monastère, vivant au milieu des soucis et des tracas. Qui sait comment le pauvre vit au milieu de tant d’agitation. » Il était convaincu que, par son ascèse, il avait atteint un niveau spirituel élevé. Il se rendit au monastère, et sous le prétexte qu’il avait besoin de son frère, il dit à l’higoumène, « Je voudrais un peu voir mon frère. » Son frère vint, et l’higoumène, qui était un saint homme, leur donna la bénédiction de sortir et de parler. Quand ils furent arrivés à quelque distance du monastère, ils virent sur le chemin un homme mort qui était presque nu. L’ermite dit: « N’avons-nous pas des vêtements pour en couvrir l’homme? » Le moine du monastère, dans sa simplicité dit: « Ne serait-il pas mieux de prier pour lui pour qu’il ressuscite? » « Prions », dit l’ermite. Ils prièrent tous deux, et le mort ressuscita. Le moine du monastère n’attacha pas beaucoup d’importance à ce miracle, il estima qu’il était arrivé grâce aux prières de son staretz. L’ermite, cependant, se dit en lui-même que le miracle s’était produit en raison de ses propres vertus, en raison de son ascèse et du jeûne, de ses vigiles nocturnes et des difficultés qu’il avait endurées, du fait qu’il  dormait sur le sol et de tous ses autres exploits. Quand ils revinrent, avant qu’ils n’aient une chance de prendre la parole, l’higoumène dit à l’ermite, « Mon frère, ne crois pas que c’était à cause de tes prières que Dieu a ressuscité l’homme mort, non! Dieu l’a fait à cause de l’obéissance de ton frère! » Quand l’ermite vit que le staretz avait immédiatement lu dans ses pensées, qu’il avait un don de clairvoyance et qu’il était un saint homme, il estima qu’en réalité, il était dans l’erreur, et que son frère, qui lui semblait inquiet et préoccupé par beaucoup de choses dans le monastère, était en fait au-dessus de lui.

Version française Claude Lopez-Ginisty

Guido Reni, Santi martiri, innocenti

28 décembre, 2015

Guido Reni, Santi martiri, innocenti dans Approfondissement
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LA SAINTETÉ DES ENFANTS – FÉVRIER 1931

28 décembre, 2015

http://www.salve-regina.com/salve/La_saintet%C3%A9_des_enfants

LA SAINTETÉ DES ENFANTS –  FÉVRIER 1931

Vie spirituelle Auteur : P. Garrigou-Lagrange, O.P. Source : In La Vie Spirituelle n° 137 Date de publication originale : Février 1931 1 La prédilection de Notre-Seigneur pour les enfants 2 Les lois de la vie de la grâce en ces vies d’enfants 3 Notes et références

On rapporte que S. S. Pie X, en appelant les enfants à faire la première communion dès l’âge de raison, a dit : « Il y aura des saints parmi les enfants. » Ces paroles semblent de plus en plus se vérifier, et l’on aime à citer les noms de saints enfants dont la vie a été écrite ces dernières années : la petite Nellie, morte en odeur de sainteté, le 2 février 1908, en Irlande, à l’âge de quatre ans et demi, après avoir fait sa première communion qu’elle avait ardemment désirée, et après avoir pratiqué à un degré extraordinaire les plus aimables vertus, surtout la patience à supporter les douleurs de la carie des os[1] ; – le petit Gustavo Maria Brani, appelé « il piccolo serafino di Gesù sacramentato », né à Turin en 1903 et mort en odeur de sainteté à huit ans, content de souffrir par amour de Notre-Seigneur[2] ; – Galileo Nicolini, qui partit pour le ciel, au cours de son noviciat chez les Passionistes ; – Emma Mariani de Lucca, morte à quatre ans et demi, après avoir de très bonne heure manifesté le vif désir de faire sa première communion, qu’elle fit à trois ans, et avoir montré surtout dans sa dernière maladie une grande dévotion à la Passion du Sauveur[3] ; – la petite Anne de Guigné, dont la gracieuse vie, a été racontée dans La Vie Spirituelle, et s’est fort répandue depuis[4] ; – Guy de Fontgalland, à qui la sainte Vierge annonça à Lourdes qu’il mourrait jeune et qu’il ferait ensuite beaucoup de bien du haut du ciel, ce qui se vérifie par les grâces nombreuses obtenues par son intercession[5] ; – Hélène-Anne Dabrowska, née de père polonais et de mère française en 1912, morte le 5 février 1925 à l’âge de douze ans, après avoir su vaincre son caractère indépendant, entêté, fermé, porté à la contradiction, et devenu un modèle d’obéissance, de souplesse et d’oubli de soi[6] ; – Marie-Gabrielle T., dont la vie écrite, par Myriam de G. va paraître chez P. Lethielleux sous le titre Petite prédestinée, dans la collection Parvuli, – ainsi que celles de Guglielmina, d’Hélène, née en Savoie[7]. Toutes ces vies rappellent celle de la Bienheureuse Imelda, morte d’amour pendant l’action de grâces de sa première communion, qui lui fut miraculeusement donnée avec une hostie descendue du ciel. Pourquoi ne pas citer aussi la vie du jeune Pier Giorgio Frassati, de Turin, qui vient d’être traduite en français[8], modèle parfait d’énergie, de pureté, de vraie piété et de dévouement pour les pauvres ? En parcourant la vie de ces enfants, prédestinés à atteindre si vite le ciel, on est frappé de deux choses : de la prédilection de Notre-Seigneur pour les parvuli, et de la façon très belle dont se vérifie dans la vie de ces petits les grandes lois qui président à la vie de tout prédestiné. La prédilection de Notre-Seigneur pour les enfants Cette prédilection est souvent exprimée dans l’Évan­gile. « Quand les disciples demandèrent au Maître, rapporte saint Matthieu, XVIII, 1 : « Qui donc est le plus grand dans le royaume des cieux ? », Jésus, faisant venir un petit enfant, le plaça au milieu d’eux et leur dit : « Je vous le dit, en vérité, si vous ne vous convertissez et devenez comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux. Celui donc qui se fera humble comme ce petit enfant est le plus grand dans le royaume des cieux. Et celui qui reçoit en mon nom un petit enfant comme celui-ci, c’est moi qu’il reçoit. Mais celui qui scandalisera un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu’on lui atta­chât au cou la meule qu’un âne tourne, et qu’on le précipitât au fond de la mer. » Notre-Seigneur veut nous dire que, à l’égard de Dieu, qui que nous soyons, quelle que soit notre science, notre autorité, nous devons toujours être comme de petits enfants, par la conscience de notre faiblesse, de notre fragilité, de notre dépendance, par notre humilité et notre simplicité. Tandis que l’homme devient de plus en plus indépendant de son père et de sa mère en avançant en âge, le chrétien, pour arriver à l’union divine, prélude de la vie éternelle, doit prendre de plus en plus con­science de sa dépendance à l’égard de son Père du ciel ; il devient de plus en plus enfant de Dieu, de plus en plus humble, simple, filial et abandonné ; il en arrive à ne penser, vouloir, agir que par son Père, et pour Lui. C’est ce qui se voit dans la vie des saints, que la fidélité au Saint-Esprit fait entrer dans les voies dites passives, où ils sont de plus en plus à l’égard de Dieu comme des enfants ; ils s’en remettent à Lui avec une absolue confiance et n’usent de leur activité propre que pour parvenir à être plus dépendants de Lui, comprenant bien que notre salut, est plus assuré entre ses mains qu’entre les nôtres. Les saints trouvent aussi le moyen de réaliser les deux parties de cette parole de saint Paul (I Cor., XIV, 20) : « Ne soyez pas des enfants sous le rapport du jugement, mais faites-vous enfants sous le rapport de la malice. » C’est ainsi que le confesseur de Saint Thomas d’Aquin dit que la confession que ce grand théologien avait faite avant de mourir lui montrait son âme innocente comme celle d’un enfant de cinq ans. L’oraison de Saint Thomas devait être aussi des plus simples, des plus filiales et des plus humbles. Les plus grands saints aiment à se rappeler que Jésus disait (Marc, X, 14) : « Laissez les petits enfants venir à moi et ne les empêchez pas ; car le royaume des cieux est à ceux qui leur ressemblent. Je vous le dit en vérité, quiconque ne recevra pas comme un petit enfant le royaume de Dieu, n’y entrera point. » « Puis il les embrassa et les bénit en leur imposant les mains. » (Matth., XIX, 13). Enfin pensant à tous ceux qui ressemblent aux petits par la manière humble et simple de recevoir la parole divine, Jésus disait (Matth., XI, 25) : « Je vous bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux prudents, et les avez révélées aux petits. Oui, père, je vous bénis de ce qu’il vous a plu ainsi. » C’est le même enseignement qui nous est donné, aujourd’hui par le travail de la grâce dans les âmes d’en­fants dont nous venons de parler ; c’est avec joie qu’on suit en eux le développement de ce germe de la vie éter­nelle que le baptême leur a donné, et qui arrive parfois si vite à sa dernière éclosion. Les lois de la vie de la grâce en ces vies d’enfants Ce qui frappe en ces biographies, c’est la façon dont se vérifient en ces enfants les grandes lois qui président à la vie de tout prédestiné. La première de ces lois est, celle inscrite dans l’essence même de la grâce sanctifiante, germe de la gloire, semen gloriae. Cette vie, qui nous a été donnée au baptême, est la même en son fond que celle du ciel, comme celle du germe contenue dans un gland est la même que celle qui apparaîtra dans le chêne complètement développé. C’est une participation de la vie intime de Dieu, participation qui s’épanouira lorsque nous verrons Dieu sans voiles, immédiatement, comme il se voit, et lorsque nous l’ai­merons comme il s’aime, sans danger de le perdre par le péché. Cette vie de la grâce, qui se développe ici-bas dans l’obscurité de la foi par le progrès de la charité, doit donc de soi durer toujours, et, lorsque la foi et l’espérance auront disparu pour faire place à la vision et à la possession de Dieu, la grâce sanctifiante et la charité qui sont en nous dureront éternellement, et nous donnent dès ici-bas d’être le temple de la sainte Trinité. Mais bien que cette vie de la grâce doive de soi durer toujours sans jamais se perdre par le péché mortel, qui est le désordre même, elle est reçue dans un vase fragile, qui peut se briser, et en beaucoup de baptisés elle disparaît, elle est détruite par le péché, puis elle est rendue par l’absolution et la contrition ; souvent elle est détruite encore bien des fois, et c’est une grande miséricorde si elle est rendue avant la mort. Ainsi cette grande loi de la grâce sanctifiante, faite de soi pour durer toujours, est masquée en bien vies chrétiennes par des inter­ruptions qui sont des temps de mort. Dans les enfants dons nous parlons, au contraire, cette loi se réalise merveilleusement, l’innocence baptismale demeure, le vase ne se brise pas, et l’eau très pure qu’il contient jaillit vraiment, comme le disait Jésus à la Samaritaine, jusqu’à la vie éternelle, ainsi que le montrent les derniers instants de ces petits. « Vita gratiæ est quædam inchoatio vitæ æternæ », aimait dire saint Thomas[9]. Une deuxième loi de la vie de la grâce est ainsi formulée par le même saint docteur : Comme la pierre tombe d’autant plus vite qu’elle se rapproche de la terre, l’âme qui est en état de grâce doit se porter d’autant plus vite vers Dieu qu’elle se rapproche de Lui et qu’elle est plus attirée par Lui[10]. En d’autres termes, l’âme en état de grâce doit normalement par l’élan de sa charité ou de son amour tendre toujours plus fortement vers Dieu, jusqu’à l’heure où elle arrive à la vision de l’essence di­vine. C’est ainsi qu’en principe chacune de nos commu­nions devrait être substantiellement plus fervente que la précédente, puisque chacune doit augmenter en nous la grâce et la charité et nous disposer ainsi à mieux recevoir Notre-Seigneur le lendemain[11]. Mais le péché véniel, surtout s’il est délibéré, vient souvent retarder cet élan, et voiler cette seconde loi, comme le péché mortel en détruisant la vie de la grâce empêche la réalisation effective de la première. Dans les petits prédestinés dont nous parlons, ce retard dans l’élan de l’amour de Dieu, qui provient surtout du péché véniel délibéré, est à peine visible ; on sent que ces âmes innocentes, comme celle de la petite Nellie, se portent d’un élan toujours plus fort vers « le Dieu saint », comme elle disait, vers Notre-Seigneur présent dans l’Eucharistie, jusqu’à ce qu’Il leur donne de participer à sa vie glorieuse dans le ciel. On comprend de mieux en mieux avec quelle joie Jésus devait dire : « Laissez venir à moi les petits enfants. » Enfin une troisième loi de la grâce, qui complète les précédentes, est celle qui est ainsi formulée par saint Paul (Rom., VIII, 28) : « Toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son éternel dessein. » Dans la vie des élus tout concourt au salut et au degré de gloire auquel ils ont été prédestinés : toutes les grâces depuis celle du baptême, tous les dons naturels, les circonstances favorables de l’existence et aussi les épreuves, les maladies, l’heure de la mort choisie par Dieu de toute éternité, sans même excepter, dit saint Augustin, leurs fautes, car elles ont été permises par le Seigneur pour les faire arriver à une humilité plus vraie, à une parfaite défiance d’eux-mêmes et à une confiance en Dieu d’autant plus ferme : « Cum enim infirmor, tunc potens sum. » Mais, encore une fois, cette grande loi, comme les deux précédentes, est masqué par la vie de bien des élus par le nombre et la gravité de fautes insuffisamment expiées, et pour lesquelles beaucoup doivent faire un long et dur purgatoire, qui entre ainsi dans le nombre des choses qui concourt pour eux à les conduire au terme de leur destinée. Or, dans la vie des petits prédestinés dont nous parlons, on ne remarque pour ainsi dire rien de pareil. Sous le souffle de la grâce, ces âmes volent presque sans arrêt jusqu’à la sainteté, celle que le Seigneur demande aux petits, celle qui leur vaut d’atteindre si vite le degré de gloire auquel ils ont été prédestinés. Vraiment dans leur courte vie, jusqu’au choix divin de l’heure de leur mort, tout a concouru au bien ; et dans ce tout, le purgatoire semble n’avoir aucune place. L’Esprit-Saint, fait entendre à ces petits ce qu’il attend d’eux pour qu’ils répondent à la grâce de leur sanctification selon le plan divin. Ces petites biographies nous aident à comprendre un peu ce qu’est, dans la pensée de Dieu, la sainteté d’un enfant et ce qu’elle requiert pour Lui rendre la gloire qu’Il en attend. Vraiment ces âmes encore couvertes de la rosée céleste du baptême, ces âmes qui n’ont pas été éclaboussées par les fanges de la terre, n’ont guère à passer par le purga­toire. Or celui qui est prêt, à l’instant de sa mort, à entrer immédiatement au ciel est un saint ; en sa vie tout a concouru à le conduire à ce degré de pureté et d’amour de Dieu et des âmes qui lui obtient aussitôt l’éternelle béatitude. Tout en faisant leurs petits sacrifices – grands pour le Seigneur et pour eux – , ces petits semblent aller de clarté en clarté, jusqu’à recevoir et goûter Dieu dès ici-bas. « Je le savoure », disait Guy. On lit dans la déposition inédite d’une religieuse auxiliatrice de Cannes qui enseigna pendant cinq ans le catéchisme à la petite Anne de Guigné : « Par ses dons elle aurait pu exciter la jalousie ; sans sa vertu, elle aurait éclaboussé les autres, mais elle restait si bien à sa place, par sa discrétion elle évitait d’écraser ses compagnes avec un soin si parfait, elle savait si bien ne se mettre en avant que pour rendre service, que tous subissaient le charme de sa vertu sans jalouser son excellence. Elle est toujours restée dans son coin, à sa petite place, et d’une manière qui dépasse une vertu déjà grande… « J’ai souvent remarqué chez elle des touches de recueillement intérieur : c’est à ces moments que le petit Jésus lui parlait, avouait-elle. Je suis intimement persuadé qu’elle a demandé à aller au paradis : cela se sentait, tout trahissait cette impatience du ciel. Le bon Dieu l’appelait, elle en avait le sentiment ; elle répondait à cet appel avec joie. Elle n’en parlait pas à sa mère pour ne point l’attrister, pour lui éviter cet immense chagrin, mais elle avait une certitude intime qu’elle mourrait bientôt. C’était frappant à la fin. Rien plus ne la retenait sur la terre, je sentais que la mort ne lui coûterait qu’un sacrifice, celui de sa mère. » C’est la même remarque que l’on fait en lisant toutes les biographies de ces petits serviteurs de Dieu. – « Quand sera-ce ? Quand viendra-t-il ? » disait Marie-Gabrielle T., qui mourut en exprimant son très vif désir du ciel. Une petite Gugliemina Tacchi-Marconi (1898-1909), dont la biographie paraît aussi dans la collection Parvuli, manifeste à huit ans un amour extraordinaire des pauvres, auxquels elle donne, « pour l’amour de Jésus », son argent, son manteau. Une parole qui offense Dieu la fait pâlir ; elle, devient grave et recueillie dès qu’on parle de l’Eucharistie. Souffrant, beaucoup pendant sept mois d’une endocardite, qui l’emporta, elle se montre douce, résignée, sans caprices ni impatiences malgré l’insomnie ; après l’extrême-onction, elle demande instamment la communion : « Je veux de nouveau Jésus-Hostie, et puis je m’endors. Hâtez-vous ! » ; et son souhait exaucé, elle meurt, pendant son action de grâces. D’après la même collection, une petite savoisienne, Hélène[12] (1894-1905), qui semble pratiquer sans effort la vertu, l’obéissance, la mortification, et se montre studieuse, appliquée, réfléchie, veut demander à Jésus la grâce de mourir le jour de sa première communion ; sa mère lui répond : « Laisse-Le faire comme Il voudra. » Puis, quelques mois après cette première communion radieuse, elle invite ses parents et ses sœurs à entendre une dernière fois tout ce qu’elle sait jouer au piano, et elle dit : « Est-ce que je vais mourir ? Il me semble que oui, c’est pourquoi je vous ai joué tout ce que je sais… pour la dernière fois. » Peu après, elle est atteinte d’une méningite. Dans l’excès du mal, elle reste toujours recueillie, gardant les mains jointes, sans impatience. Elle recouvre toute sa lucidité, lorsque son confesseur lui demande si elle veut Jésus. Elle le reçoit en disant du plus profond de son cœur : « Mon Dieu, je vous aime ! » et après l’extrême-onction, elle meurt, comme elle en avait eu le pressentiment. On est surpris parfois de rencontrer ces petites âmes toutes perdues dans la lumière, et on a l’impression que ces enfants ont donné à Dieu tout ce qu’Il voulait d’eux : la fidélité aux devoirs quotidiens de leur âge, fidélité ins­pirée par une foi, une confiance filiale et une charité toujours plus vives, On trouve même chez eux un sens pro­fond du mystère de la Croix. Le petit Guy de Fontgalland, âgé de onze ans, pendant les tortures qui précèdent sa mort, dit : « Oh ! comme je souffre ! Cher petit Jésus, je vous offre de souffrir encore aussi longtemps que vous le voudrez… ; je vous aime bien, allez ! » Et se tournant vers sa mère, avant son dernier soupir, il lui dit pour la consoler en lui rappelant le prix de la Croix du Sauveur : « Maman, ma petite maman, quand je serai là-haut près du petit Jésus, je t’enverrai des croix… Il faudra bien les accepter. » Quelle grande leçon de force le Seigneur nous donne par ce petit ! La perfection de la vie chrétienne consiste spécialement dans la charité, dans l’amour de Dieu et des âmes en Dieu. Si donc nous voyons la vie d’un enfant toute animée par l’amour de Dieu, par la confiance en Notre­-Seigneur et en Marie, si nous trouvons en lui, avec l’es­prit de mortification et de sacrifice, une intimité de pres­que tous les instants et toujours grandissante avec Celui qui a dit : « Laissez venir à moi les petits enfants », alors nous pouvons dire que ce petit, malgré son jeune âge, a atteint la perfection de la vie chrétienne, et cela à un degré peut-être très supérieur à celui auquel parviennent nombre de bons chrétiens arrivés pourtant à un âge très avancé. Nous nous rappelons alors la parole de Pie X lorsqu’il appelait les tout petits à la première commu­nion : « Il y aura des saints parmi les enfants. » Et la prière de ces petits est parfois singulièrement puissante ; si les grands de la terre sont souvent très touchés de la prière que leur adressent de petits enfants, combien plus le Seigneur lui-même aime-t-il à la recevoir, Lui qui la fait jaillir de leur cœur ! Demandons-leur de nous obtenir des vocations sacerdotales, des prêtres saints, et, pour écarter les dangers d’une nouvelle guerre, de faire surgir, dans les pays susceptibles d’entrer en conflit demain, de véritables amis de Jésus, des sources de charité et de paix. Rome, Angelico.

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