Archive pour le 3 novembre, 2015
PAGE SPIRITUELLE – LA MISSION CHEZ SAINT PAUL – INTRODUCTION
3 novembre, 2015http://daleb-mpassi.over-blog.com/article-31172308.html
PAGE SPIRITUELLE LA MISSION CHEZ SAINT PAUL INTRODUCTION
L’éminente personnalité qui se propose à nous pour réflexion, et ce, sous l’angle de la mission, est sans aucun doute, l’une des plus célèbre figure que l’histoire du christianisme ait connu. En effet, il suffit d’évoquer le nom de saint Paul et tout de suite, vous aurez droit à une litanie extraordinaire d’adjectifs et de substantifs y affairant au portrait saisissant de l’apôtre. Pour ce fait, nous voulons aller à la découverte de la mission de ce personnage biblique ayant fortement marqué la vie de l’Eglise. Dans notre premier numéro nous avons déjà abordé la vie de Saint Paul et son œuvre. Cette fois-ci, nous vous proposons de voir ce qu’a été sa mission. Persécuteur farouche des chrétiens, mêlé au meurtre d’Etienne, le Seigneur lui donna rendez-vous sur la route de Damas. C’est précisément là qu’a lieu la rencontre véritable de Paul et du Christ. Pourquoi le Seigneur se saisi de Paul ? Il va sans dire, que c’est dans l’unique but de faire de lui un instrument de sa mission d’amour. Non seulement Paul découvre la vérité de la foi chrétienne, mais aussi, c’est à cet instant que sa mission spéciale d’apôtre des païens, lui sera signifiée. Et à partir de ce moment, toute la vie de Paul se transforme en un service pour la mission du Christ.
1. PAUL RECOIS LE BAPTÊME C’est dans le Livre des Actes des Apôtres que Luc nous rapporte ceci : « Il reçut alors le baptême et, quand il se fut alimenté, il reprit des forces » (Ac 9, 18). Cela fut l’œuvre d’Ananias qui d’ailleurs dira à Paul ces mots importants : « le Dieu de nos pères t’a destiné à connaître sa volonté, à voir le Juste et à entendre sa propre voix. Tu dois en effet être témoin pour lui devant tous les hommes de ce que tu as vu et entendu. » Sans doute à partir de cet instant Paul se pose de multiples questions. Car un fils d’Israël qui abandonne la religion des ancêtres est plus qu’un déserteur, c’est un traître, un renégat : pire, il devient un mechoumad, mot terrible qui signifie un homme détruit, un être dévasté. Ce point de doctrine concerne Saul personnellement, en même temps qu’il concerne son peuple tout entier, dans sa croyance la plus profonde, la plus intime, la plus sacrée. On va désormais retrouver ce souci, exprimé ou inexprimé, à tous les tournants de l’extraordinaire mission qui ne fait que commencer ici à Damas. Pour les juifs il se trouve quelque chose de complètement absurde : comment un supplicié peut-il être libérateur d’Israël au point que l’on veuille le suivre ? Paul a donc perdu la tête. La croix, instrument de torture et non de salut ; un bois d’ignominie et non un titre de gloire ; un poteau de mort et non un arbre de vie. Et pourtant Paul est convaincu que désormais, c’est cela qui sera l’objet de sa passion, sa raison de vivre. Cela, il le signifie clairement lorsqu’il affirme avec force et vigueur « nous proclamons un Christ crucifié, scandale pour les juifs, folie pour les païens » 1Co1, 23. A toutes ces considérations s’ajoute, au fond de la conscience de Saul une douloureuse hésitation : comment a-t-il pu être choisi par le Seigneur, lui, l’odieux tyranneau qui a du sang sur les mains ? « C’est là l’œuvre de Dieu, la merveille sous nos yeux ! » Ps 118, 23. L’ancien homme s’en est allé et a fait place à un homme nouveau. Ce baptême de l’eau que Paul reçoit est un symbole. Comme était un symbole la durée même de la cécité : trois jours, comme pour le Christ qui est demeuré au tombeau pendant trois jours avant de retrouver la lumière. Toutefois, si l’on peut dire que c’est l’eau baptismale qui rend la vue à Saul, elle ne lui rend pas la vie : elle lui donne une vie nouvelle. C’est pourquoi désormais il ne s’appellera plus Saul mais Paul. C’est le déclic de sa nouvelle mission. Il y a donc quelque chose de plus important que le symbole : c’est la réalité de l’adhésion, définitive et indéfectible, de ce nouveau baptisé à Celui qui va être désormais le seul guide et le seul maître de son existence. C’est le début d’une autre vie au service de la Bonne Nouvelle du Christ Ressuscité.
2. SAINT PAUL AU SERVICE DE L’EVANGILE Il y a une grande cohérence entre l’enseignement et l’attitude de Jésus et l’ « Evangile » de Paul. Le cœur de l’ « Evangile » de Paul impliquait le message même du Christ. L’annonce de la miséricorde gratuite de Dieu à tous les pécheurs, l’accès du « Royaume » à qui veut l’accueillir sans considération de justice ou de pureté légale préalables, la loi subordonnée à la vie de l’homme et culminant dans le commandement de l’amour du prochain, c’est poser un type de rapport religieux si ouvert que l’on ne peut dire sérieusement que Paul ait inventé le christianisme. Saint Paul pourrait on dire, est un fougueux missionnaire. C’est une âme de feu qui se donne sans réserve pour la cause de l’Evangile « annoncer l’Evangile en effet n’est pas pour moi un titre de gloire ; c’est une nécessité qui m’incombe. Oui malheur à moi si je n’annonçait pas l’Evangile » (1Co 9, 16) Ce but poursuivit par Paul est dorénavant essentiellement religieux. Pour lui il n’est plus question d’autres choses encore. Dieu est le tout de sa vie, et il le servira jusqu’au don de sa vie. Toute la vie de l’apôtre Paul consistera à prêcher. Une prédication essentiellement axée non sur de vaines connaissances mais sur une Personne vivante, le Christ Jésus. Dans son entreprise rien ne l’arrête. La fougue paulinienne surmontera les labeurs, les fatigues, les tribulations, les périls. De sorte que « rien de tout cela ne saurait le séparer de l’amour de Dieu et du Christ » Rm 8 35-39. Saint Paul est prêt à souffrir la passion. Il est désormais conscient que le Christ a vraiment besoin de lui pour sa mission. C’est pourquoi rien ne peut l’arrêter dans cette mission. D’où ses immenses ambitions. A écouter saint Paul et à le voir à l’œuvre, l’on serait tenter de le taxer d’orgueilleux. Mais en fait il n’en est rien de tout cela. C’est plutôt une fierté légitime d’appartenance au Christ qui déborde en lui au point de contaminer ceux et celles qui l’écoutent et qui le côtoient. Rien de contradictoire en cela. C’est la vie humble et sainte d’un homme heureux de vivre pour le Christ à tel point qu’il dira « ce n’est plus moi qui vit mais le Christ qui vit en moi » (Gal 2, 20). Paul est donc un homme perdu en Dieu. C’est cela le secret de l’excellence de la prédication de l’apôtre des païens. Paul ne ménagera aucun effort en ce qui concerne la proclamation du Christ crucifié et ressuscité : c’est le « kryggme » apostolique. A son esprit perspicace, viennent s’unir un cœur aimant et une intelligence lucide. Paul soucieux d’exposer la foi, ne veut devoir sa force de persuasion qu’à la puissance de Dieu. Ainsi d’éminentes pensées théologiques se sont conjuguées à une passion vive de transmettre la Parole de Dieu, comment ne pas admettre que le langage ne soit balbutiant quant il est question d’exprimer la densité d’un tel message. C’est un cœur qui brûle au contact d’une intelligence tranchante.
3. PAUL, APÔTRE PAR CHARISME L’apostolat de Paul est une grâce que Dieu lui a accordée. C’est un don par grâce, une charge qui lui a été imposée (1 Co 9, 16) comme tel il se range parmi les actions efficaces de l’Esprit de Dieu (1 Co 12, 8-11). Paul écrira aux Galates : « l’Evangile que je vous ai annoncé n’est pas d’inspiration humaine ». Et d’ailleurs, « ce n’est pas par un homme qu’il m’a été transmis, ni enseigné, mais par une révélation de Jésus-Christ…celui qui m’a mis à part dès le sein de ma mère et m’a appelé par sa grâce, a jugé bon de révéler son Fils en moi pour que je l’annonce aux païens. . . » (Gal 1, 11. 12. 15). Du reste l’on peut affirmer sans ambages que l’apostolat paulinien résulte directement du Christ, comme un « charisme ». De fait, Paul apparaît comme un « charismatique ». Il a des révélations et des visions (2 Co 12, 1 ; Ac 16, 9 ; 22, 18 ; 23, 11). Paul, pourrait on dire, est un appelé de la dernière heure, tel un enfant dont la mère, morte en le mettant au monde, reste inconnue de lui : c’est le sens du mot traduit par « avorton » en 1Co 15, 7. Empoigné par le Ressuscité alors qu’il était persécuteur de l’Eglise, Paul a dû faire un long cheminement spirituel. Ce cheminement allait de tout ce qui se situe après Pâques, après la résurrection de Jésus-Christ, a tout ce qui se situe avant Pâques, au crucifié, à son ministère, à son enseignement, à sa vie. Annonciateur du Christ, les communautés constituent son champ d’action. Paul est un homme sincère, droit, désintéressé, doux, maternel, paternel, aimant, courageux, travailleur, bref il se conduit toujours « de manière sainte, juste et irréprochable. . . »
CONCLUSION Force est de constater qu’en définitive, il est impossible de parler de la mission de saint Paul et faire abstraction de la puissance de sa prédication. Non point simple discours, mais dynamisme vainqueur par l’action de l’Esprit, annonce pleine d’assurance, parole d’homme où l’on reconnaît la Parole de Dieu parce que celle-ci s’atteste à l’auditeur lui-même. En témoigne sa personnalité et le contenu de toutes ses épîtres. Frère Ibrahim Gérard (religieux rédemptoriste)
L’ÉDUCATION DE LA FEMME SELON EDITH STEIN
3 novembre, 2015http://www.eleves.ens.fr/aumonerie/en_ligne/ete98/isa.html
L’ÉDUCATION DE LA FEMME SELON EDITH STEIN
Isabelle Raviolo
« Je me souviens de ma première rencontre avec Edith Stein(…), ses exposés profonds sur la femme, sa mission selon la nature et selon la grâce, et sur la femme dans l’activité professionnelle. » Maria Wilkens, dans W. Herbstrith, Le vrai visage d’Edith Stein Le choix que j’ai fait de parler de l’éducation de la femme ne s’inscrit pas dans un sectarisme féministe ou dans une volonté de mettre l’homme à la seconde place. Je vais m’efforcer de poser les fondations d’une relation harmonieuse et juste entre l’homme et la femme, relation qui signifie un face à face sans fusion ni déséquilibre. Et celle-ci ne peut s’envisager que dans le cadre d’une éducation proprement féminine qui ouvre son esprit, lui permet de s’épanouir et donne ainsi à son être tout entier de trouver sa vocation propre, de recouvrer son sens ontologique premier. »Aucune femme n’est que femme. Chacune a sa particularité et sa disposition au même titre que chaque homme et, dans cette disposition, le talent pour telle ou telle activité artistique, scientifique ou technique. En principe, la disposition individuelle peut se manifester dans n’importe quel domaine, même dans ceux qui n’ont rien à voir avec la spécificité féminine« (E. Stein, La femme.Son devoir selon la nature et la grâce, p. 7). Il semble en effet nécessaire de sortir des schémas qui depuis des siècles ont enfermé la femme dans une fonction, une image niant toute affirmation personnelle qui sortirait de « la norme ». Toutes ces idées reçues asservissaient la femme à l’homme pour qui elle ne semblait alors qu’un moyen en vue d’arriver à ses fins. « Parce que l’on était d’avis il y a quelques décennies encore que la femme avait sa place à la maison et qu’elle n’était bonne à rien d’autre, il a fallu de longs et difficiles combats pour parvenir à élargir un terrain d’action devenu par trop étroit » (E. Stein, ibidem, p. 102). La lecture des textes d’Edith Stein permet de découvrir le véritable sens d’une éducation de la femme et son intérêt capital pour que l’homme puisse rencontrer une compagne, une véritable »aide« . Je veux signifier par là que celle qui doit être sa compagne, semblable à lui par la place qu’elle occupe au-dessus des autres créatures, doit par une libre décision personnelle venir en »aide« à l’homme. Or l’homme ne peut trouver d’aide qu’en relation avec une personne libre et debout avec laquelle il puisse dialoguer, et trouver ainsi »l’os de ses os et la chair de sa chair« (Genèse II, 23). Car en effet, avant d’être un appui pour les autres, il faut que la femme soit d’abord elle-même fermement ancrée dans ses profondeurs. Le témoignage chrétien d’Edith Stein passe par sa tâche de professeur de philosophie : la formation et l’instruction des jeunes filles doit contribuer selon elle à marquer et à affirmer la nature particulière de la femme, et sa mission aux côtés de l’homme – et non à la place de celui-ci. »Grâce à ses expériences pratiques et en vertu de sa finesse psychologique, Edith Stein fut vraiment la première à apporter une réponse essentielle, indépendante des circonstances, à la question de la définition et de la vocation de la femme. (…) Elle parvenait aussi à transmettre pour la première fois une image vraie de la femme au clergé présent« (Père Erich Przywara, dans W. Herbstrith, op. cit., p. 64). « Homme et femme Il les créa. » Genèse I, 27 La création s’enracine dans une différence à partir de laquelle se noue la relation humaine. L’homme et la femme se reçoivent l’un de l’autre et ne peuvent donc s’accomplir dans la solitude. Car, s’il est dit que la femme a été créée pour l’homme, cela signifie également que celui-ci a besoin d’elle pour remplir le sens de son être : »Aussi l’homme laisse-t-il son père et sa mère pour s’attacher à sa femme, et ils deviennent une seule chair« (Genèse II, 24). Ainsi, à l’image du ciel et de la terre, l’homme et la femme ne semblent trouver de sens que dans leur embrassement. Toutefois, on ne remarque que trop le fossé creusé entre l’homme et la femme : la communication est parfois difficile, voire nulle, et induit souvent un repli sur soi douloureux et destructeur. Comment sortir de cette impasse qui aliène l’humain à des schémas ontologiques du masculin et du féminin ? Comment sortir de la fermeture normative qui classe et réduit l’être à une fonction en déformant le plus souvent le sens des Ecritures ? L’évangile apocryphe de Marie rapporte »la désolation de Marie-Madeleine de ce que l’apôtre ait cru impossible que le Sauveur se soit entretenu en secret avec elle, une femme. Alors, se levant, Lévi prit la parole et dit : »Pierre, tu as toujours eu un tempérament bouillant, je te vois maintenant argumenter contre la femme comme un adversaire. Pourtant si le Sauveur l’a rendue digne, qui es-tu toi pour la rejeter ? (…) Ayons plutôt honte, et revêtons-nous de l’Homme parfait, engendrons-le en nous comme Il nous l’a ordonné et proclamons l’Evangile en n’imposant d’autres règles ni d’autres lois que celle qu’a prescrites le Sauveur (…)« (Evangile selon Marie, Bibliothèque copte de Nag Hammadi, publié par les presses de l’université Laval-Québec, 1983). L’éducation à la féminité est un moyen privilégié pour tenter de redonner vie et fécondité à la relation entre l’homme et la femme. »Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance.« Genèse I, 26 Comment envisager la fonction d’image de l’être féminin ? Doit-on penser qu’elle ne trouve sa réalisation que dans le mariage et la maternité, ou bien est-elle réalisable d’une autre façon ? Ces questions soulignent l’importance de la vocation propre de la femme, de sa détermination ontologique dans le projet de Dieu sur l’homme. On se souvient de la sentence divine prononcée par Dieu après le péché : »Il dit à la femme : »Je ferai qu’enceinte, tu sois dans de grandes souffrances ; c’est péniblement que tu enfanteras des fils. Ton désir te poussera vers ton homme, et lui te dominera.« 1 Il dit à l’homme : »Parce que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais formellement prescrit de ne pas manger, le sol sera maudit à cause de toi. C’est dans la peine que tu t’en nourriras tous les jours de ta vie, il fera germer pour toi l’épine et le chardon et tu mangeras l’herbe des champs« (Genèse III, 16-18). Le péché vient marquer la rupture de l’harmonie entre Adam et Eve. Or notons que la femme est condamnée aux douleurs de l’enfantement, tandis que la peine de l’homme ne dépend pas des liens qui l’attachent à sa progéniture. Mais Eve, »Mère des vivants« exprime sa joie quand Dieu lui donne un fils : »Il installe au foyer la femme stérile en joyeuse mère de famille« (Psaume XII, 9). Dans la tradition de l’Ancien Testament la femme était honorée et louée lorsqu’elle devait être mère. Elle avait pour rôle d’élever des enfants et de ne pas veiller seulement à leur bien-être physique, mais aussi de les éduquer dans la crainte du Seigneur. Cette haute considération accordée aux fonctions de la mère est née de la consolante promesse qui a été faite à la femme lorsqu’elle fut chassée du paradis : »Le Seigneur Dieu dit au serpent : (…) Je mettrai l’hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance. Celle-ci te meurtrira à la tête et toi, tu la meurtriras au talon« (Psaume III, 15). Il est réservé à la femme et à sa descendance de poser le pied sur la tête du serpent. Conduire la lutte contre le mal, éduquer sa descendance, telle apparaît sa mission depuis Eve jusqu’à Marie, mère de Dieu. Il est intéressant de s’arrêter sur cette dernière figure qui ouvre le Nouveau Testament. La place de Marie dans l’éducation de la femme. Marie, jeune fille de la maison d’Israël, est choisie par Dieu pour enfanter le Verbe. Mais Il ne naîtra pas de sa rencontre avec Joseph. Marie restera vierge et sera fécondée par l’Esprit Saint. Ce mystère qui ouvre la nouvelle alliance apparaît complètement délirant à beaucoup de personnes qui refusent alors d’aller plus loin et de le méditer. Pourtant la bonne nouvelle commence sur cette conception virginale. Or que vient-elle nous apprendre sur la vocation de la femme ? En quel sens la Vierge apparaît-elle au centre de toute éducation, et plus particulièrement de celle de la femme ? Pour s’incarner, Dieu choisit de naître du sein d’une mère humaine, qu’il nous présente comme l’image accomplie de la mère. Dès le moment où elle sait qu’elle doit enfanter un fils, elle le reçoit de Dieu, et pour Dieu elle veillera sur lui. Edith Stein voit en la nouvelle Eve une sortie de l’ordre naturel : »Elle participe à l’oeuvre du Sauveur et prend place à ses côtés. Tous deux sont issus de la race humaine, mais l’un et l’autre sont ‘libres’ de ce lien qui ne permet pas à l’homme de voir l’accomplissement de la vie ailleurs que dans l’union charnelle avec un être et par celle-ci« (E. Stein, La femme. Son devoir selon la nature et la grâce). Marie et Joseph ne font qu’une seule chair sans avoir connu l’union charnelle, car la reproduction n’est pas le sens de ce mariage. Par l’institution de l’idéal de virginité, la règle de l’Ancien Testament selon laquelle la femme ne pouvait accéder au salut qu’en assurant une descendance à son mari est interrompue. Marie choisit librement la chasteté et en cela apparaît comme un modèle d’éducation pour l’homme et la femme, et plus particulièrement pour cette dernière puisqu’elle représente l’image originelle de l’être féminin (dans sa virginité elle est la pure et primitive image de la femme). Sa maternité spirituelle, qui dépasse l’ordre charnel, est une voie précieuse pour les femmes puisqu’elle les conduit à une image du Christ qui est propre à leur féminité. Un autre point reste à souligner à propos de Marie et de son enseignement pour le chrétien. Celui-ci s’exprime clairement par ces paroles où tout l’être de la Vierge est contenu : »Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l’as dit!« (Evangile selon Saint Luc I, 38) Par sa réponse elle dit sa ‘disponibilité’ sans partage au service du Seigneur. En cela tout son être dit une féminité transfigurée qui n’est qu’amour, c’est-à-dire donation pure de soi pour les autres. C’est pourquoi nous la voyons toujours aux côtés du Seigneur : »Le service qu’elle lui rend est immédiat, et c’est immédiatement qu’elle intervient pour les hommes« (E. Stein, La femme. Son devoir selon la nature et la grâce). Parler de Marie m’a paru essentiel pour ce thème de l’éducation de la femme, et je n’ai fait en cela que suivre l’intuition d’Edith Stein elle-même qui affirme dans La femme et sa destinée : »Si Marie est l’image originelle de la pure féminité, l’imitation de Marie devra être le but de l’instruction des jeunes filles(…).« Et d’ajouter : »L’imitation de Marie n’est pas différente de l’imitation du Christ: pour la simple raison que Marie fut la première à imiter le Christ, qu’elle fut le premier et le plus parfait portrait du Christ. C’est pour cette raison que l’imitation de Marie n’est pas seulement affaire de femmes, mais le devoir de tous les chrétiens.` Cela ne nie pas la disposition individuelle de chacune : on se gardera de plaquer sur la femme une image mariale mal comprise. Car la femme ne peut comprendre et vivre cette imitation que si elle a trouvé son chemin propre, son individualité qui ne se laisse ni comparer ni réduire à des schémas. L’individualité. Toute créature a sa signification propre que l’on trouve dans sa manière particulière d’être une image de la réalité divine. Et par conséquent l’être féminin doit avoir lui aussi une part propre à cette fonction d’image. Cependant toute ââme humaine, femme ou homme, créée par Dieu, reçoit encore de lui une empreinte personnelle qui la distingue de toutes les autres : c’est précisément cette individualité ainsi marquée qui, avec ses qualités, est développée par la valeur de la formation qu’elle reçoit. Edith Stein montre la nécessité de »reconnaître que cette humanité et cette féminité ne suffisent pas à déterminer notre but, et ne pourront se développer ailleurs que dans l’unité concrète d’une personnalité individuelle.« La vocation de la femme s’enracine dans sa particularité personnelle, dont l’épanouissement doit être considéré comme l’un des buts essentiels de son éducation. »Afin de réaliser une humanité et une féminité authentiques au sein d’un individu, il est indispensable d’utiliser une variété de moyens et de méthodes d’instruction souples et divers. Mais, bien plus, il faut la foi en la personne et le courage nécessaire en son accomplissement, la foi en une vocation individuelle, pour une mission personnelle déterminée, une oreille attentive à cette vocation et une disponibilité à la suivre« (E. Stein, La femme et sa destinée, traduit de l’allemand par Marie-Laure Rouveyre, éd. Amiot-Dumot, Bibliothèque catholique). L’éducation a donc pour tâche d’élever la personne, de la conduire àà un véritable épanouissement de son individualité, de lui permettre de faire fructifier ses talents. »L’éducation individuelle est la formation d’un être qui vive selon sa personnalité, qui suive son chemin et accomplisse son oeuvre. Son chemin n’est pas celui qu’il choisirait arbitrairement, mais le chemin où Dieu le conduit« (E. Stein, La femme et sa destinée). Ainsi la valeur de l’éducation tiendra en cette mission d’ouvrir l’individu à la confiance en Dieu, en son dessein d’amour sur chacun de nous. Or cette ouverture à la foi est inséparable d’une éducation au discernement qui permet de prêter attention aux signes par lesquels la volonté de Dieu se manifeste, afin de pouvoir lui obéir. Cette obéissance scelle l’intimité d’une relation d’amour entre l’âme et le Christ : »Le Christ a de tout temps appelé des femmes à s’unir àà lui le plus intimement possible, comme messagères de son amour, comme annonciatrices de sa volonté pour s’adresser aux rois et aux papes, pour préparer la voie de sa domination dans les coeurs des hommes : il ne peut y avoir de profession plus élevée que celle de sponsa Christi et celle qui voit ce chemin s’ouvrir devant elle n’en cherchera pas d’autre« (E. Stein, La femme et sa destinée).
I.R.