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16 JUILLET – NOTRE DAME DU MONT CARMEL

16 juillet, 2015

http://missel.free.fr/Sanctoral/07/16.php

16 JUILLET – ND DU MONT CARMEL

HISTORIQUE 

AVE MARIS STELLA

Les religieux du Carmel, appelés à leur origine les Ermites de Sainte Marie du Mont-Carmel[1] (premier ordre à porter officiellement dans les bulles pontificales le nom de Marie) ne séparaient pas le service du Seigneur de celui de la Vierge Marie sa Mère. En Marie, les Carmes voyaient leur Sœur, à cause de sa virginité, et leur Mère qui avait donné vie à leur Ordre ; ainsi professaient-ils le culte de Marie, l’imitation de Marie et la consécration totale à Marie.
Le chapitre général que les Carmes tinrent à Messine, en 1259, promulgua des constitutions pour « l’ampliation de l’office divin » à partir de quoi Sibert de Beka (provincial d’Allemagne) composa un nouvel ordinal qui fut approuvé par le chapitre général de Londres, en 1312. Les Carmes célébraient déjà solennellement, comme toute l’Eglise latine, les quatre principales fêtes de la Vierge (Nativité, Purification, Annonciation, Assomption) mais, outre qu’ils accordaient plus de solennité que d’autres à l’Annonciation, ils célébraient solennellement la messe en commémoration de la Vierge Marie chaque samedi libre (usage que l’Eglise romaine connaît dès le X siècle) ou, à défaut, un autre jour libre de la semaine ; aussi, de même que les Cisterciens, ils célébraient chaque jour une messe en l’honneur de Notre-Dame. Les Carmes qui prétendront, au XIV° siècle, avoir été fondés par le prophète Elie, n’imaginaient pas avoir une autre fête patronale qu’une fête de la Vierge et, comme le Mont-Carmel est assez proche de Nazareth, ils semblent avoir d’abord choisi l’Annonciation à quoi d’ailleurs sont consacrés la plupart des couvents qu’ils fondèrent en Europe ; ils firent aussi, plus tard, le choix de l’Immaculée Conception (1340) ou de l’Assomption (1367).
A la fin du XIV° siècle, les Carmes firent une fête olennelle (16 juillet) pour commémorer les faveurs qu’ils avaient reçues par l’intercession de Notre-Dame[2], dont les premières traces se rencontrent en Angleterre[3]. En 1585, Sixte Quint accorde un office entièrement propre dont l’hymne est l’Ave Maris Stella. La messe actuelle du missel romain, dite « Gaudeamus », est celle du missel imprimé à Rome en 1587 ; en 1726, Benoît XIII étend la fête de Notre-Dame du Mont-Carmel à l’Eglise universelle.

[1] En 1247, ils reçoivent officiellement le nom de Frères de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel.
[2] Le Bienheureux Simon, cassé de vieillesse, affaibli par l’austérité de sa vie pénitente, passait très-souvent les nuits en prières, gémissant dans son cœur des maux dont ses frères étaient affligés. Il arriva qu’un jour étant en prières, il fut comblé d’une consolation céleste, dont il nous fit part, en communauté, comme il suit : « Mes très-chers frères, béni soit Dieu, qui n’a pas abandonné ceux qui mettent en lui leur confiance et qui n’a pas méprisé les prières de ses serviteurs. Bénie soit la très-sainte Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui, se ressouvenant des anciens jours et des tribulations dont le poids a paru trop lourd et trop accablant à quelques-uns d’entre vous (ne faisant pas assez d’attention que ceux qui veulent vivre avec piété en Jésus-Christ, doivent s’attendre à souffrir la persécution), vous adresse aujourd’hui, par mon ministère, des paroles de consolation, que vous devez recevoir dans la joie du Saint-Esprit. Je prie cet Esprit de vérité qu’il dirige ma langue, afin que je parle convenablement, et que je manifeste avec la plus exacte fidélité l’œuvre de Dieu, et la faveur que nous avons reçue du Ciel. Lorsque j’épanchais mon âme en la présence du Seigneur, moi qui ne suis que cendre et poussière, et que je priais avec toute confiance la Vierge sainte, ma Souveraine, que puisqu’elle avait daigné nous honorer du titre spécial de Frères de la bienlieureuse Vierge Marie elle voulut aussi se montrer notre mère, notre protectrice, en nous délivrant de nos calamités, et en nous procurant de la considération et de l’estime, par quelque marque sensible de sa bienveillance, auprès de ceux qui nous persécutaient, lorsque je lui disais avec de tendres soupirs : ‘ FIeur du Carmel, Vigne fleurie, splendeur du Ciel, ô Mère-Vierge incomparable ! ô Mère aimable et toujours Vierge, donnez aux Carmes des privilèges de protection, Astre des mers ! ’ la bienheureuse Vierge m’apparut en grand cortège, et tenant en main l’habit de l’Ordre, elle me dit : ‘ Reçois, mon cher fils, ce scapulaire de ton Ordre, comme le signe distinctif et la marque du privilège que j’ai obtenu pour toi et les enfants du Carmel ; c’est un signe de salut, une sauvegarde dans les périls et le gage d’une paix et d’une protection spéciale jusqu’à la fin des siècles. Ecce signum salutis, salum in periculis. Celui qui mourra revêtu de cet habit sera préservé des feux éternels.’ Et comme la glorieuse présence de la Vierge sainte me réjouissait au-delà de tout ce qu’on peut se figurer, et que je ne pouvais, misérable que je suis, soutenir la vue de sa majesté, elle me dit, en disparaissant, que je n’avais qu’à envoyer une députation au pape Innocent, le vicaire de son Fils, et qu’il ne manquerait pas d’apporter des remèdes à nos maux » (16 juillet 1251 : témoignage du R.P. Pierre Swayngton, compagnon, secrétaire et confesseur de saint Simon Stock, troisième prieur général latin de l’Ordre des Carmes).
[3] « Calendrier Astronomique » de Nicolas de Lynn, en 1386 ; « Bréviaire » de Zimmerman, en 1399 ; « Missel » des Carmes de Londres, en 1393 ; « Missel » de Kilcornic, en 1458.

Ave Maris Stella
Par Honorat de Bueil, marquis de Racan (1589-1670)
O la plus claire des étoiles,
Qui parut au travers des voiles
Dont la nuit du péché nous offusquait les yeux,
Reçois nos vœux et nos suffrages
Et nous sauve de ces orages
Au port que tes bontés nous préparent aux cieux.
Si la créance trop légère
Qu’eut Eve à la voix mensongère
Nous avait tous rendus esclaves des enfers,
Ta foi, par un contraire échange, Croyant aux paroles de l’ange, Brisa de nos aïeux les prisons et les fers.
O bel astre, fais que ta flamme
Puisse encore éclairer mon âme
Dans l’asile où Jésus nous conduit au trépas ;
Chasse l’ennemi qui nous menace
Et fais que le fruit de sa grâce
Nous donne au ciel la gloire et la paix ici-bas.
Si jadis tes chastes entrailles
Contenaient ce Dieu des batailles
Dont le pouvoir s’étend du nord jusques au sud,
Usant de ton pouvoir de mère,
Apaise la juste colère
Du fils que dans tes flancs ta seule foi conçut.
Vierge chaste, Vierge féconde,
Fais que nous puissions en ce monde
Conserver la blancheur de notre pureté,
Et qu’en suivant ta sainte vie,
Notre âme, dans le ciel ravie,
Te puisse encore suivre en l’immortalité.
Gloire au Père dont la puissance
Est le support de l’innocence !
Gloire au Fils dont le sang fut répandu pour nous !
Gloire à l’Esprit qui nous inspire
L’amour dont notre âme soupire
Jusqu’à ce qu’elle soit unie à son époux.

AVE MARIS STELLA (LATINO)
Ave maris stella,
Dei Mater alma
Atque semper virgo
Felix caeli porta

Sumens illud ave
Gabrielis ore
Funda nos in pace
Mutans Evae nomen

Solve vincla reis
Profer lumen caecis
Mala nostra pelle
Bona cuncta posce

Monstra te esse matrem
Sumat per te preces
Qui pro nobis natus
Tulit esse tuus

Virgo singularis
Inter omnes mitis
Nos culpis solutos
Mites fac et castos

Vitam praesta puram
Iter para tutum
Ut videntes Jesum
Semper collaetemur

Sit laus Deo Patri
Summo Christo decus
Spiritui sancto
Tribus honor unus

Amen.
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EROS, PHILIA ET AGAPÈ

16 juillet, 2015

http://www.totus-tuus.fr/article-1834956.html

EROS, PHILIA ET AGAPÈ

[Nous poursuivons notre commentaire de l'Encyclique du Pape Benoît XVI]

«Eros» et «agapè» – différence et unité.

3. À l’amour entre homme et femme, qui ne naît pas de la pensée ou de la volonté mais qui, pour ainsi dire, s’impose à l’être humain, la Grèce antique avait donné le nom d’eros.
Disons déjà par avance que l’Ancien Testament grec utilise deux fois seulement le mot eros, tandis que le Nouveau Testament ne l’utilise jamais : des trois mots grecs relatifs à l’amour – eros, philia (amour d’amitié) et agapè – les écrits néotestamentaires privilégient le dernier, qui dans la langue grecque était plutôt marginal.
[Commentaire de Bernard Guy, pasteur protestant : Éros est certainement le plus populaire des quatre termes [désignant l’amour]. Éros était le nom du dieu grec de l’amour correspondant au dieu romain Cupidon. Ce terme signifie essentiellement : amour passionné. Il nous parle d’un vif et brûlant désir. Dans la littérature grecque, éros désigne parfois l’amour du patriote, c’est-à-dire les sentiments passionnés de celui qui cherche à défendre sa patrie (…). On retrouve aussi ce terme utilisé pour décrire la passion d’un homme épris de l’argent. Il y a des gens qui ont un désir démesuré pour l’argent, qui ne pensent qu’à cela. Ignace d’Antioche, un père de l’Église qui a vécu entre la fin du 1er siècle et le début du 2ème, écrit dans une lettre qu’il adresse aux Romains : « Mon éros a été crucifié et je n’ai plus de passion pour les choses matérielles. Mais il y a maintenant en moi une source vive qui me dit à l’intérieur: Viens au Père ». La passion matérielle d’Ignace avait été crucifiée avec Christ.
[Bien que nous retrouvions éros, utilisé dans la littérature grecque pour décrire différents types de passion, c’est pour désigner la passion sexuelle qu’il était le plus souvent utilisé. Au départ, il était utilisé pour désigner une passion sexuelle dans l’amour, une passion légitime. Mais l’homme étant ce qu’il est, le terme en est venu très vite à désigner une passion sexuelle dégradée, hors mariage. C’est peut-être pour cela d’ailleurs que nous ne le retrouvons pas dans le Nouveau Testament. Il semble que le Saint-Esprit et les auteurs du Nouveau Testament n’aient pas jugé bon de l’utiliser pour décrire une chose aussi belle que l’amour sexuel dans la vie d’un couple. Matthieu utilisera plutôt les termes « connaître » et « s’attacher » pour décrire un tel amour (Matt 1.25; 19.5).

[Éros est une énergie qui vient de Dieu et n’est pas nécessairement à rejeter. Il y a plusieurs passions que la Bible nous encourage à vivre:

1. La passion pour Dieu (Luc 10.27)
2. La passion pour sa Parole (Jér 15.16)
3. La passion pour les personnes perdues (1 Cor 9.19-22)
4. La passion pour notre épouse (Prov 5.18-20)

Mais plusieurs formes de passion sont à fuir : passion pour l’argent, pour la femme d’un autre, passions de la jalousie, de la vengeance, etc. Quand il s’agit de passion, la Bible ne dit pas de résister, mais de fuir car les passions sont des désirs brûlants auxquels il est très difficile de résister. Souvenons-nous de l’expérience de Joseph avec la femme de Potiphar (Gen 39:7-20) et ne jouons pas les braves!]
En ce qui concerne l’amour d’amitié (philia), il est repris et approfondi dans l’Évangile de Jean pour exprimer le rapport entre Jésus et ses disciples.
[Commentaire de Bernard Guy, pasteur protestant : Philia figure sous formes d’adjectifs, de noms et de verbes une cinquantaine de fois dans le Nouveau Testament et agapé, plus de trois cents fois. Ceci nous indique au départ qu’agapé est le terme consacré par le Saint-Esprit et les auteurs du Nouveau Testament pour décrire l’amour de Dieu (…).

Philia: un attachement émotif – Je vais vers telle personne parce que mon coeur m’y entraîne. J’éprouve des sentiments favorables pour quelqu’un et cela m’amène à rechercher sa compagnie. L’amour philia est un amour qui provient essentiellement du coeur. C’est l’amour typique des fréquentations. Lorsque deux jeunes gens se fréquentent, ils sont comme magnétisés l’un par l’autre. Ils sont constamment ramenés l’un vers l’autre par le coeur. Même à distance, les amoureux vibrent l’un pour l’autre. Et quand ils s’entrevoient, leur coeur se met à battre et leurs yeux scintillent. Le philia est un amour fait de sentiments et d’émotions.
[Philia: un amour spontané – L’amour philia n’est pas un amour que l’on peut commander ou forcer. À cause de son caractère émotif, il est plutôt imprévisible. Il vient ou ne vient pas : c’est un amour spontané.
[Philia: un amour fluctuant – L’amour philia est un amour qui vient et qui va. Il est très instable. Il nous envahit soudainement et nous quitte sans avertir. C’est souvent le seul amour qui existe dans les couples à part l’éros. Telle personne éprouve une attirance pour telle autre personne ; les deux tombent amoureux et conviennent de cheminer ensemble. C’est pour un temps l’amour à son meilleur. Puis, peu à peu, la lune de miel fait place au train-train quotidien, la griserie du début, à l’ennui et voilà nos deux tourtereaux désemparés. Que se passe-t-il donc? Nous nous aimions tant?… On conclut rapidement qu’il n’y a rien à faire, on passe l’éponge et on repart en quête d’une nouvelle aventure. Mais tant que l’on mise tout sur le philia, l’amour sentimental, toutes nos aventures se soldent par un échec. L’amour philia est un amour fluctuant.
[Philia: un amour égocentrique – L’amour philia est une relation de plaisir et de satisfaction personnelle. Je me tiens avec telle personne parce que j’ai du plaisir en sa compagnie. Nous ne faisons pas d’efforts pour nous entendre; notre relation est harmonieuse et agréable. Cette personne a les mêmes goûts que moi, les mêmes idées, les mêmes façons de voir ou d’agir : c’est moi en peinture. En réalité, c’est moi que j’aime. J’aime l’autre dans la mesure où il me ressemble. Il est dit dans Jean 15:19 que le monde aime ce qui est à lui : ce qui lui ressemble.
[Philia: un amour sélectif – Nous n’éprouvons d’amour philia que pour quelques-uns et cela est tout à fait normal. Avant même de vraiment connaître les gens, nous sommes attirés par certains plutôt que par d’autres. Jésus avait ses préférés. Il éprouvait un amour particulier pour Marthe, Lazare et Marie. Nous savons qu’il allait souvent chez eux pour se reposer. Il vivait une relation facile et agréable avec eux. Lorsque Lazare meurt, nous voyons Jésus attristé qui pleure et les juifs qui disent: « Voyez comme il l’aimait » (Jean 11.35-36). De plus, il y avait parmi les douze un disciple, l’apôtre Jean, pour lequel Jésus éprouvait plus d’amour et de tendresse que pour les autres (Jean 13.23; 20.2; 21.7; 21.20). Nous ne pouvons pas éprouver d’amour philia pour tous: il s’agit d’un amour sélectif, fondé sur les affinités.
[Philia : un amour humain – L’amour philia est une forme d’amour grandement désirable et nécessaire à la vie. Toutefois, cet amour n’est pas suffisant. Il ne constitue pas une base solide sur laquelle nous puissions bâtir des relations profondes et durables avec les autres. Il s’agit d’un amour humain que croyants ou non-croyants expérimentent également.
La mise de côté du mot eros, ainsi que la nouvelle vision de l’amour qui s’exprime à travers le mot agapè, dénotent sans aucun doute quelque chose d’essentiel dans la nouveauté du christianisme concernant précisément la compréhension de l’amour.
Dans la critique du christianisme, qui s’est développée avec une radicalité grandissante à partir de la philosophie des Lumières, cette nouveauté a été considérée d’une manière absolument négative.
Selon Friedrich Nietzsche, le christianisme aurait donné du venin à boire à l’eros qui, si en vérité il n’en est pas mort, en serait venu à dégénérer en vice. Le philosophe allemand exprimait de la sorte une perception très répandue : l’Église, avec ses commandements et ses interdits, ne nous rend-elle pas amère la plus belle chose de la vie ? N’élève-t-elle pas des panneaux d’interdiction justement là où la joie prévue pour nous par le Créateur nous offre un bonheur qui nous fait goûter par avance quelque chose du Divin ?

Texte intégral de l’Encyclique
http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/encyclicals/documents/hf_ben-xvi_enc_20051225_deus-caritas-est.html

Rubens, San Bonaventura

15 juillet, 2015

Rubens, San Bonaventura dans images sacrée Lille_PdBA_rubens_st_bonaventure

http://www.scuolaecclesiamater.org/

BENOÎT XVI – SAINT BONAVENTURE 1

15 juillet, 2015

http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100303.html

BENOÎT XVI

AUDIENCE GÉNÉRALE

Mercredi 3 mars 2010

SAINT BONAVENTURE 1

Saint Bonaventure 2 et 3
http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100310.html
http://w2.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2010/documents/hf_ben-xvi_aud_20100317.html

Chers frères et sœurs,

Aujourd’hui, je voudrais parler de saint Bonaventure de Bagnoregio. Je vous avoue qu’en vous proposant ce thème, je ressens une certaine nostalgie, car je repense aux recherches que, jeune chercheur, j’ai conduites précisément sur cet auteur, qui m’est particulièrement cher. Sa connaissance a beaucoup influencé ma formation. C’est avec une grande joie que je me suis rendu en pèlerinage, il y a quelques mois, sur son lieu de naissance, Bagnoregio, petite ville italienne dans le Latium, qui conserve avec vénération sa mémoire.
Né probablement aux alentours de 1217 et mort en 1274, il vécut au XIIIe siècle, à une époque où la foi chrétienne, profondément imprégnée dans la culture et dans la société de l’Europe, inspira des œuvres durables dans le domaine de la littérature, des arts visuels, de la philosophie et de la théologie. Parmi les grandes figures chrétiennes qui contribuèrent à la composition de cette harmonie entre foi et culture se distingue précisément Bonaventure, homme d’action et de contemplation, de profonde piété et de prudence dans le gouvernement.
Il s’appelait Jean de Fidanza. Comme il le raconte lui-même, un épisode qui eut lieu alors qu’il était encore jeune garçon, marqua profondément sa vie. Il avait été frappé d’une grave maladie, et pas même son père, qui était médecin, espérait désormais pouvoir le sauver de la mort. Alors, sa mère eut recours à l’intercession de saint François d’Assise, canonisé depuis peu. Et Jean guérit.
La figure du Poverello d’Assise lui devint encore plus familière quelques années plus tard, alors qu’il se trouvait à Paris, où il s’était rendu pour ses études. Il avait obtenu le diplôme de Maître d’art, que nous pourrions comparer à celui d’un prestigieux lycée de notre époque. A ce moment, comme tant de jeunes du passé et également d’aujourd’hui, Jean se posa une question cruciale: « Que dois-je faire de ma vie? ». Fasciné par le témoignage de ferveur et de radicalité évangélique des frères mineurs, qui étaient arrivés à Paris en 1219, Jean frappa aux portes du couvent franciscain de la ville et demanda à être accueilli dans la grande famille des disciples de saint François. De nombreuses années plus tard, il expliqua les raisons de son choix: chez saint François et dans le mouvement auquel il avait donné naissance, il reconnaissait l’action du Christ. Il écrivait ceci dans une lettre adressée à un autre frère: « Je confesse devant Dieu que la raison qui m’a fait aimer le plus la vie du bienheureux François est qu’elle ressemble aux débuts et à la croissance de l’Eglise. L’Eglise commença avec de simples pêcheurs, et s’enrichit par la suite de docteurs très illustres et sages; la religion du bienheureux François n’a pas été établie par la prudence des hommes mais par le Christ » (Epistula de tribus quaestionibus ad magistrum innominatum, in Œuvres de saint Bonaventure. Introduction générale, Rome 1990, p. 29).
C’est pourquoi, autour de l’an 1243, Jean revêtit l’habit franciscain et prit le nom de Bonaventure. Il fut immédiatement dirigé vers les études, et fréquenta la Faculté de théologie de l’université de Paris, suivant un ensemble de cours de très haut niveau. Il obtint les divers titres requis pour la carrière académique, ceux de « bachelier biblique » et de « bachelier sentencier ». Ainsi, Bonaventure étudia-t-il en profondeur l’Ecriture Sainte, les Sentences de Pierre Lombard, le manuel de théologie de l’époque, ainsi que les plus importants auteurs de théologie, et, au contact des maîtres et des étudiants qui affluaient à Paris de toute l’Europe, il mûrit sa propre réflexion personnelle et une sensibilité spirituelle de grande valeur qu’au cours des années suivantes, il sut transcrire dans ses œuvres et dans ses sermons, devenant ainsi l’un des théologiens les plus importants de l’histoire de l’Eglise. Il est significatif de rappeler le titre de la thèse qu’il défendit pour être habilité à l’enseignement de la théologie, la licentia ubique docendi, comme l’on disait alors. Sa dissertation avait pour titre Questions sur la connaissance du Christ. Cet argument montre le rôle central que le Christ joua toujours dans la vie et dans l’enseignement de Bonaventure. Nous pouvons dire sans aucun doute que toute sa pensée fut profondément christocentrique.
Dans ces années-là, à Paris, la ville d’adoption de Bonaventure, se répandait une violente polémique contre les frères mineurs de saint François d’Assise et les frères prédicateurs de saint Dominique de Guzman. On leur contestait le droit d’enseigner à l’Université, et l’on allait jusqu’à mettre en doute l’authenticité de leur vie consacrée. Assurément, les changements introduits par les ordres mendiants dans la manière d’envisager la vie religieuse, dont j’ai parlé dans les catéchèses précédentes, étaient tellement innovateurs que tous ne parvenaient pas à les comprendre. S’ajoutaient ensuite, comme cela arrive parfois même entre des personnes sincèrement religieuses, des motifs de faiblesse humaine, comme l’envie et la jalousie. Bonaventure, même s’il était encerclé par l’opposition des autres maîtres universitaires, avait déjà commencé à enseigner à la chaire de théologie des franciscains et, pour répondre à qui contestait les ordres mendiants, il composa un écrit intitulé La perfection évangélique. Dans cet écrit, il démontre comment les ordres mendiants, spécialement les frères mineurs, en pratiquant les vœux de chasteté et d’obéissance, suivaient les conseils de l’Evangile lui-même. Au-delà de ces circonstances historiques, l’enseignement fourni par Bonaventure dans son œuvre et dans sa vie demeure toujours actuel: l’Eglise est rendue plus lumineuse et belle par la fidélité à la vocation de ses fils et de ses filles qui non seulement mettent en pratique les préceptes évangéliques mais, par la grâce de Dieu, sont appelés à en observer les conseils et témoignent ainsi, à travers leur style de vie pauvre, chaste et obéissant, que l’Evangile est une source de joie et de perfection.
Le conflit retomba, au moins un certain temps, et, grâce à l’intervention personnelle du Pape Alexandre IV, en 1257, Bonaventure fut reconnu officiellement comme docteur et maître de l’université parisienne. Il dut toutefois renoncer à cette charge prestigieuse, parce que la même année, le Chapitre général de l’ordre l’élut ministre général.
Il exerça cette fonction pendant dix-sept ans avec sagesse et dévouement, visitant les provinces, écrivant aux frères, intervenant parfois avec une certaine sévérité pour éliminer les abus. Quand Bonaventure commença ce service, l’Ordre des frères mineurs s’était développé de manière prodigieuse: il y avait plus de 30.000 frères dispersés dans tout l’Occident avec des présences missionnaires en Afrique du Nord, au Moyen-Orient, et également à Pékin. Il fallait consolider cette expansion et surtout lui conférer, en pleine fidélité au charisme de François, une unité d’action et d’esprit. En effet, parmi les disciples du saint d’Assise, on enregistrait différentes façons d’interpréter le message et il existait réellement le risque d’une fracture interne. Pour éviter ce danger, le chapitre général de l’Ordre, qui eut lieu à Narbonne en 1260, accepta et ratifia un texte proposé par Bonaventure, dans lequel on recueillait et on unifiait les normes qui réglementaient la vie quotidienne des frères mineurs. Bonaventure avait toutefois l’intuition que les dispositions législatives, bien qu’elles fussent inspirées par la sagesse et la modération, n’étaient pas suffisantes à assurer la communion de l’esprit et des cœurs. Il fallait partager les mêmes idéaux et les mêmes motivations. C’est pour cette raison que Bonaventure voulut présenter le charisme authentique de François, sa vie et son enseignement. Il rassembla donc avec un grand zèle des documents concernant le Poverello et il écouta avec attention les souvenirs de ceux qui avaient directement connu François. Il en naquit une biographie, historiquement bien fondée, du saint d’Assise, intitulée Legenda Maior, rédigée également sous forme plus brève, et donc appelée Legenda Minor. Le mot latin, à la différence du mot italien, n’indique pas un fruit de l’imagination, mais, au contraire, « Legenda » signifie un texte faisant autorité, « à lire » de manière officielle. En effet, le chapitre des frères mineurs de 1263, qui s’était réuni à Pise, reconnut dans la biographie de saint Bonaventure le portrait le plus fidèle du fondateur et celle-ci devint, ainsi, la biographie officielle du saint.
Quelle est l’image de François qui ressort du cœur et de la plume de son pieux fils et successeur, saint Bonaventure? Le point essentiel: François est un alter Christus, un homme qui a cherché passionnément le Christ. Dans l’amour qui pousse à l’imitation, il s’est conformé entièrement à Lui. Bonaventure indiquait cet idéal vivant à tous les disciples de François. Cet idéal, valable pour chaque chrétien, hier, aujourd’hui et à jamais, a été indiqué comme programme également pour l’Eglise du Troisième millénaire par mon prédécesseur, le vénérable Jean-Paul II. Ce programme, écrivait-il dans la Lettre Novo millennio ineunte, est centré « sur le Christ lui-même, qu’il faut connaître, aimer, imiter, pour vivre en lui la vie trinitaire et pour transformer avec lui l’histoire jusqu’à son achèvement dans la Jérusalem céleste » (n. 29).
En 1273, la vie de saint Bonaventure connut un autre changement. Le Pape Grégoire X voulut le consacrer évêque et le nommer cardinal. Il lui demanda également de préparer un événement ecclésial très important: le IIe concile œcuménique de Lyon, qui avait pour but le rétablissement de la communion entre l’Eglise latine et l’Eglise grecque. Il se consacra à cette tâche avec diligence, mais il ne réussit pas à voir la conclusion de cette assise œcuménique, car il mourut pendant son déroulement. Un notaire pontifical anonyme composa un éloge de Bonaventure, qui nous offre un portrait conclusif de ce grand saint et excellent théologien: « Un homme bon, affable, pieux et miséricordieux, plein de vertus, aimé de Dieu et des hommes… En effet, Dieu lui avait donné une telle grâce, que tous ceux qui le voyaient étaient envahis par un amour que le cœur ne pouvait pas cacher » (cf. J.G. Bougerol, Bonaventura, in. A. Vauchez (sous la direction de), Storia dei santi e della santità cristiana. Vol. VI L’epoca del rinnovamento evangelico, Milan 1991, p. 91).
Recueillons l’héritage de ce grand Docteur de l’Eglise, qui nous rappelle le sens de notre vie avec les paroles suivantes: « Sur la terre… nous pouvons contempler l’immensité divine à travers le raisonnement et l’admiration; dans la patrie céleste, en revanche, à travers la vision, lorsque nous serons faits semblables à Dieu, et à travers l’extase… nous entrerons dans la joie de Dieu » (La conoscenza di Cristo, q. 6, conclusione, in Opere di San Bonaventura. Opuscoli Teologici/1, Roma 1993, p. 187).

LA PRIERE JUIVE

15 juillet, 2015

http://el-bethel.fr/etudes/la-priere-juive-1/

LA PRIERE JUIVE

Notre désir est que cet article aide les croyants à mieux connaître les Juifs et le mouvement messianique lié au peuple d’Israël. Mieux connaître c’est aussi mieux comprendre les pratiques et les coutumes du peuple d’Israël. Très tôt dans l’histoire de l’Eglise s’est développée une attitude anti-juive qui, de nos jours encore, influence la position du christianisme face au judaïsme. Une image faussée et déformée de la synagogue prévaut la plupart du temps.
LA SYNAGOGUE
Habituellement, elle désigne un bâtiment, mais son sens originel est « assemblée »; une assemblée de dix hommes, au minimum, que le judaïsme appelle le « minyane ». Ces hommes se regroupent dans le but de prier car pour les Juifs la prière collective est essentielle. Un minyane est donc composé d’au moins dix hommes et peut se réunir partout pour prier. Ce nombre de dix se réfère, entre autres, au récit de Genèse 18 : 32, lorsqu’Abraham implorait l’Eternel au sujet de Sodome et Gomorhe. Abraham a osé diminuer, chaque fois, le nombre de justes requis pour que D.ieu épargne la ville. D.ieu aurait épargné la ville s’il s’y était trouvé seulement dix justes. Cette approche est la base de la prière d’intercession pour la ville ou le pays. Elle nous plonge dans le mystère de la prière. Certains théologiens chrétiens ont vu une contradiction entre cette tradition du minyane et la déclaration de Yeshoua en Matthieu 18 : 20 : « Car là ou deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieux d’eux. » Le rabbin Elie Soloveitchik dans son commentaire de l’Evangile de Matthieu « Kol Koré » relève la déclaration suivante du Talmud « En quelque lieu où des hommes se réunissent pour adorer, où des justes siègent au tribunal et où un homme, même seul, s’adonne à l’étude de la Torah, la Chéhinah (la gloire de D.ieu) est présente. » (Abin Ben-Adda, Talmud : Berakot 6a).
Ce nombre obligatoire pour la prière en publique peut aussi être considéré comme une mesure de sécurité et de sagesse. On évite ainsi des erreurs suite à une décision prise par un trop petit nombre de personnes. Proverbes 14 : 28 : « Quand le peuple est nombreux, c’est l’ornement d’un roi ; quand la population diminue, c’est la ruine du prince. » Les Evangiles nous montrent Yéshoua (Jésus) menant la vie d’un Juif fidèle en ce qui concerne l’observation de la loi de Moïse. En Luc 4 : 19, il est dit que c’était son habitude d’aller à la synagogue le jour du shabbath. Dans les Evangiles la synagogue est mentionnée plus de 40 fois. La prière joue un rôle essentiel dans le judaïsme qui considère que D.ieu l’a prévue pour remplacer les sacrifices sanglant d’animaux devenus impossibles après la destruction du temple. Nous lisons à ce sujet dans Osée 6 : 6 « Car je veux, la loyauté et non les sacrifices, et la connaissance de D.ieu plus que les holocaustes. » Osée 14 : 3 dit également « Prenez avec vous des paroles de repentance et revenez à l’Eternel. Dites-lui : pardonne toute faute et reçois-nous favorablement ! Nous t’offrirons, au lieu de taureaux l’hommage de nos lèvres. »

LA PRIERE ET SES TROIS FORMES DANS LE JUDAISME
Les prières sont avant tout des bénédictions (Béni soit D.ieu…), des louanges et des actions de grâce ; les Juifs expriment également des requêtes personnelles. Ils rendent grâce à D.ieu pour la Création, pour le don de la Torah, pour la Chéhinah et pour la rédemption. C’est depuis l’époque d’Esdras que les synagogues se sont développées et devinrent des lieux de prière, d’étude de la Torah et de rassemblement. La prière est une affaire personnelle, mais le concept de la prière en commun existe aussi dans la Bible. La prière personnelle est une force ; ajoutée à celles des autres, elle devient encore plus puissante. Il en va de la prière comme d’une corde, plus ses brins sont nombreux, plus solide elle devient.
Les Juifs pieux prient trois fois par jour. Ces trois moments de prières se nomment : Cha’harite – prière du matin ; Min’ha – prière de l’après-midi ; Arvite – prière du soir. Les trois temps quotidiens de prière qui nous ont été transmis par Esdras, le scribe versé dans les Ecritures, correspondent aux moments des sacrifices ; les prières du matin et de l’après-midi aux sacrifices eux-mêmes, celles du soir, au sacrifice par le feu des entrailles des victimes du jour. La tradition enseigne que ce furent les patriarches, Abraham, Isaac et Jacob qui instituèrent la prière offerte trois fois par jour.
Selon la pensée hébraïque, David transcrivit toutes ses expériences dans les Psaumes. Tout ce qu’un homme peut vivre au cours de son existence s’y trouve écrit. C’est pourquoi, les Juifs les utilisent pour exprimer tous leurs besoins. Quand ils se trouvent au Mur Occidental, en dehors des services réguliers, ils récitent des Psaumes. Ils répandent ainsi leur cœur devant D.ieu. Il va de soi que les Juifs parlent également à D.ieu d’une manière spontanée.
« PESSOUKE DEZIMRA »
Les Juifs se préparent à la prière selon un rite qui sert à la purification du cœur et des pensées afin que celui qui prie ose se présenter devant D.ieu et son trône. Dans le temple le prêtre devait se laver les mains dans la cuve d’airain avant de vaquer à la prière et aux sacrifices. C’est par la lecture répétée chaque jour de certains Psaumes, de cantiques et de louange, que la communauté se prépare à se tenir devant D.ieu. « Pessouké Dezimra » signifie « texte de louange » et prépare l’assemblée à la prière du « Chema Israël » et de « Chemoné Esréh » l’un à la suite de l’autre. Les textes constituant Pessouké Dezimra sont les suivants 1 Chroniques 16 : 8-36, Psaumes 100 et 145 : 1 et pour terminer Exode 14 : 30, 15 : 19. La lecture de ces passages de la Bible est introduite par une bénédiction et se termine de même. La bénédiction qui introduit Pessouké Dezimra, nommé «Barouh Chéamar» est particulièrement significative. Selon la tradition, cette prière a été transcrite par les hommes de Grande Assemblée il y a environ 2400 ans. La prière « Barouh Cheamar » consiste en quatre vingt sept mots hébreux, ce qui représente la valeur numérique du terme « Paz » signifiant « or fin » Psaume 19 : 11. Le thème de cette prière est le nom de D.ieu avec ses multiples significations. Connaître ce nom, c’est connaître ses divers attributs, mentionnés brièvement dans cette prière.
Loué soit l’Eternel qui a créé l’univers par sa parole.
Loué soit celui dont l’action est conforme à la parole.
Loué soit celui qui ordonne et maintient.
Loué soit celui qui a tiré le monde du néant.
Loué soit celui qui étend sa miséricorde sur la terre.
Loué soit celui qui récompense ses fidèles.
Loué soit celui qui dissipe les ténèbres et fait naître la lumière.
Loué soit le Tout-Puissant qui est et qui existe éternellement.
Loué soit celui qui n’admet ni iniquité, ni oubli, ni partialité, ni don corrupteur dans le jugement ; il est juste dans toutes ses voies, bienfaisant dans toutes ses actions.
Loué soit le libérateur et Sauveur.
Loué soit celui qui a ordonné le repos à son peuple Israël le saint jour du Shabbath.
Loué soit-il, loué soit son Nom, et béni soit son souvenir d’éternité en éternité.
Sois loué, Eternel notre D.ieu, Roi de l’Univers, Roi tout-puissant et saint, principe de toute miséricorde, glorifié par la bouche de ton peuple, célébré et exalté par les louanges de tes pieux et fidèles serviteurs. Et par les cantiques de ton serviteur David nous te louons, ô Eternel notre D.ieu ! Nous te glorifions, nous publions ta puissance et ta majesté. Nous te proclamons notre Roi, nous te sanctifions et nous t’exaltons, ô toi notre Roi, notre Dieu unique et Eternel ! Sois loué Eternel, notre Roi, célébré par des actions de grâces.
Ce concept fondamental de la louange et des actions de grâces, lié à une profonde connaissance du Nom de D.ieu et au besoin de l’honorer, ressort d’une manière évidente des écrits de shaliah Paul. Il commence la plupart de ses lettres par la louange, en offrant des actions de grâce à D.ieu pour tout ce qu’Il fait à l’égard de son peuple. En Philippiens 4 : 6 Paul résume en un seul verset : « Ne vous inquiétez de rien ; mais en toutes choses, par la prière et la supplication, avec des actions de grâce, faites connaître à D.ieu tout vos besoins ou demandes. »
Pessouké Dezimra se terminent par une prière nomée « Yichtaba’h » ce qui signifie « sois loué ». A nouveau le nom de D.ieu se trouve au cœur de cette prière. Les sages attirent l’attention sur la prédominance du nombre quinze dans cette prière. En hébreux, ce nombre est écrit au moyen des lettres yod et hé, deux des lettres du tétragramme sacré (yod, hé, vav, hé), jamais prononcé, qui est le nom même de D.ieu.
LE YICHTABA’H
« Loué soit ton Nom pour l’éternité, notre Roi, notre D.ieu, Roi puissant et saint dans le ciel et sur la terre. Car à toi appartiennent, Eternel notre D.ieu et D.ieu de nos pères, les hymnes et la louange, l’honneur et les cantiques, la sainteté et la domination, la victoire, la grandeur et la puissance, la gloire et la splendeur, la sainteté et la royauté, la bénédictions et les actions de grâce dés maintenant et pour l’éternité. Loué sois-tu, Eternel D.ieu Roi, grand par la renommée, seul digne de nos actions de grâce, auteur de toute merveille, toi qui daignes accepter nos hymnes de louange, Roi puissant et éternel, toi qui donne la vie au monde. »
Les quinze expressions de louange de cette prière sont : hymnes, louanges, honneur, cantiques, sainteté, domination, victoire, grandeur, puissance, gloire, splendeur, sainteté, royauté, bénédiction, action de grâce. On fait également la relation entre Yichtaba’h et les quinze cantiques des montées des Psaumes de 120 à 134 de David, ainsi nommés, car celui qui prie s’approche toujours plus de la présence de D.ieu.
Que le Dieu d’Israël vous bénisse au travers de cet article et qu’Il vous remplisse de sa bonté et de sa miséricorde.
Emmanuel Rodriguez
Fin de la première partie. La suite de cet article paraîtra au prochain numéro de TMPI.

Jour 2, Les eaux sont divisées

14 juillet, 2015

Jour 2, Les eaux sont divisées  dans images sacrée 14%20MICHIEL%20DIVISION%20OF%20THE%20WATERS

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L’EAU CHEZ SAINT JEAN – FRÉDÉRIC MANNS

14 juillet, 2015

http://www.interbible.org/interBible/ecritures/symboles/2010/sym_100528.html

L’EAU CHEZ SAINT JEAN – FRÉDÉRIC MANNS

PREMIÈRE PARTIE : LE SYMBOLE BIBLIQUE DE L’EAU

Le quatrième évangile [2] ne pouvait pas ignorer ce symbole fondamental associé d’une part au Jourdain et à la mer de Galilée, d’autre part aux piscines de Béthesda et de Siloé. En effet il apparaît dans huit chapitres du livre des signes, et une fois dans le livre de l’heure. L’ajout du chapitre 21 le mentionne une fois. Une progression caractérise ce symbole : dans les chapitres 1 et 5 l’eau signifie ce qui est préparation; dans les chapitres 4-12 l’eau est élevée au rang de symbole christologique; dans les chapitres 9-19 elle signifie le salut eschatologique apporté par Jésus.
Au chapitre 1 Jésus est baptisé dans les eaux du Jourdain. L’eau du baptême de Jean est opposée au baptême de Jésus dans l’Esprit. Je suis venu baptiser dans l’eau, affirme Jean et plus loin : Celui sur qui tu verras l’Esprit descendre et demeurer, c’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint. Et moi j’ai vu et je témoigne que celui-ci est l’Élu de Dieu (1,33-34). La scène se passe à Béthanie, de l’autre côté du Jourdain! Le baptême dans l’eau évoque sans doute la purification précédant la nouvelle alliance annoncée par les prophètes Jérémie et Ézéchiel. C’est le Baptiste et ses disciples qui introduisent le symbole de l’eau dans le quatrième évangile.
Au chapitre 2, dans la scène des noces de Cana en Galilée, l’eau des jarres de purification [3] est opposée au vin. Le maître du repas ne sait pas d’où vient l’eau changée en vin. La scène est localisée en Galilée. L’eau devient un symbole qui annonce une réalité sacramentelle [4]. Le vin, œuvre du travail de l’homme, est symbole de justice et de joie eschatologique, tandis que l’eau, don gratuit de Dieu, exprime la piété divine. L’eau a une double fonction : elle permet la manifestation de la gloire de Jésus et transforme les disciples qui voyant ce signe croient en Jésus.
Au chapitre 3, dans le dialogue avec Nicodème, un maître en Israël, il est question à nouveau de la naissance de l’eau et de l’Esprit. À moins de renaître d’eau et d’Esprit nul ne peut entrer dans le Royaume de Dieu (3,3). Le chapitre se termine par une mention du baptême de Jésus. L’entretien de Jésus avec Nicodème se situe à Jérusalem. Ici encore l’eau, associée à l’Esprit, est un symbole sacramentel [5].
Au chapitre 4, le dialogue avec la Samaritaine oppose l’eau du puits de Jacob à l’eau vive que donne Jésus. Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, c’est toi qui l’aurais prié et il t’aurait donné de l’eau vive (4,10). C’est à Sycar en Samarie que la scène se situe. Après l’entretien de Nicodème avec Jésus la nuit, Jésus rencontre la Samaritaine en plein jour. Généralement les femmes venaient puiser l’eau le matin et le soir. Ici c’est en plein jour que la femme vient étancher sa soif. C’est auprès des puits que de nombreuses alliances furent scellées dans le premier Testament. Jésus fatigué révèle sa propre faiblesse. L’évangéliste comme d’habitude joue sur le double sens des expressions qui atteste le vocabulaire distinct de la communauté. Le dialogue débouche sur le problème du culte authentique qui doit être un culte en Esprit et en Vérité. Le salut qui vient des Juifs passe par la loi et les prophètes, mais également par la soif de connaître la révélation.
Au chapitre 5, lors de la guérison du paralytique à la piscine de Béthesda, il est question de l’eau agitée qui guérit. Le premier à entrer dans l’eau après qu’elle avait été agitée se trouvait guéri, quel que fût son mal (5,4). C’est à Jérusalem que la scène a lieu. L’eau a une vertu thérapeutique.
Au chapitre 6, après le signe de la multiplication des pains, Jésus marche sur les eaux du lac de Galilée. La scène évoque le passage de la mer Rouge qui dans la tradition juive symbolisait le baptême des Pères (1 Co 10,2).
Au chapitre 7, dans le contexte de la fête des Tentes, il est question de l’eau qui étanche la soif et de l’eau vive qui sortira du sein du Christ ou du croyant. Si quelqu’un a soif qu’il vienne et qu’il boive celui qui croit en moi. Selon le mot de l’Écriture : de son sein couleront des fleuves d’eau vive. Il parlait de l’Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui (7,37-38). C’est au temple, dans le contexte de la fête des Tentes, après la procession qui remontait de la piscine de Siloé où l’eau avait été puisée, que Jésus fait cette déclaration. Plusieurs textes de l’Écriture trouvent ici leur accomplissement [6]. La Tosephta Succot admettait que l’eau de Siloé qui était versée en libation sur l’autel résumait toutes les eaux du monde, depuis les eaux de la création jusqu’aux eaux qui devaient jaillir de sous le Temple selon la prophétie de Zacharie. À l’eau de Siloé était associé l’Esprit du sanctuaire.
Au chapitre 9, dans la scène de la guérison de l’aveugle-né à Jérusalem, il est question de l’eau de Siloé. Or ce dernier terme devient un titre christologique. Les deux piscines de Jérusalem sont situées par rapport au Temple de Jérusalem [7].
Dans le livre de l’heure, l’eau associée au sang jaillit du côté du Christ en croix. Certains exégètes y ont vu la réalisation de la prophétie d’Éz 47, d’autres de la scène de Moïse qui frappe le rocher. Dans les deux hypothèses il s’agit d’eau vive que donne le Christ.
Au total des références sont faites à l’eau dans dix chapitres de l’Évangile de Jean. Les chiffres dix et un sont symboliquement identiques. Dans la dizaine le multiple revient à l’unité. Il est plus parfait que tous les nombres parfaits. La création avait été faite avec dix paroles. Noé apparaît à la dixième génération et était parfait parmi ceux de sa génération (Gn 6,9). Les dix plaies d’Égypte attestent la puissance de Dieu. Moïse avait reçu les dix paroles de Dieu au Sinaï.
Jésus fut baptisé par Jean, il fut immergé dans le Jourdain. On peut en déduire que l’humanité n’était pas encore totalement immergée et renouvelée ni en Noé, ni en Moïse et son peuple. Jésus, par contre, l’homme nouveau, (Jr 31,31-32) est capable de réaliser les prophéties de Jérémie et d’Ézéchiel, en créant une humanité régénérée par le bain du baptême, renouvelée avec un cœur et un esprit nouveau (Ez 36,26). Jésus est totalement purifié par l’eau vive. Son œuvre est de faire une nouvelle création.
En marchant sur les eaux Jésus manifeste sa puissance par rapport au cycle des eaux qui reconduisent sans cesse au préforme et au déluge. Il maitrise aussi les forces hostiles qui habitent la mer (Ap 13,1). Il est aussi capable d’apaiser la tempête (Lc 8,22-25) et les forces du mal qui habitent la mer. Avec le Christ on passe par la mort : c’est le sens du baptême (Rm 6,4-6). On se dépouille du vieil homme définitivement et on revêt l’humanité nouvelle du Christ ressuscité. La mort physique est la réalisation plénière et concrète du rite de l’immersion baptismale. D’où l’importance du rite d’immersion totale au baptême car lui seul symbolise vraiment la plénitude du symbole de renaissance par la mort. On ne peut pas rester immergé sous l’eau sans mourir. Le Christ fera disparaître les forces hostiles, la mer (Ap 21,1), mais, par contre, il donne de devenir en lui source jaillissante de vie éternelle (Jn 4,14).
Origène aborde dans ses Homélies sur la Genèse le thème privilégié du puits où les bergers des Patriarches abreuvaient leurs troupeaux. Il souhaite que l’eau du puits se transforme en source d’intelligence spirituelle pour tout homme, le juif et le chrétien :
L’outre est la lettre de la loi dont boit le peuple charnel pour en tirer quelque intelligence; cette lettre lui fait souvent défaut et ne peut avoir d’explication car en bien des points l’interprétation historique n’en peut. L’Église, elle, boit aux sources évangéliques et apostoliques qui ne tarissent jamais et qui se répandent sur les places publiques car elles sont abondantes et coulent toujours dans la largeur de l’interprétation spirituelle… Nous sommes souvent à côté du puits d’eaux vives, c’est-à-dire des divines Écritures, nous trompant sur elles. Nous possédons les livres et nous les lisons, mais nous n’allons pas jusqu’au sens spirituel. C’est pourquoi il faut des larmes et des prières incessantes pour que le Seigneur nous ouvre les yeux.

[2] Jones, L.P., The symbol of water in the Gospel of John. Sheffield 1977.
[3] Sur l’aspect historique de ces jarres de purification, voir Y. Magen-O. Rimon, Purity’ Broke Out in Israel. Stone Ves­sels in the Late Second Temple Period, University of Haifa : Haifa, 1994.
[4] O. Cullmann, Les sacrements dans l’Évangile johannique : la vie de Jésus et le culte de l’Église primitive (Études d’histoire et de philosophie religieuses 42), Presses universitaires de France : Paris 1951.
[5] O. Cullmann, Les sacrements dans l’Évangile johannique : la vie de Jésus et le culte de l’Église primitive (Études d’histoire et de philosophie religieuses 42), Presses universitaires de France : Paris, 1951.
[6] G. Bienaimé, « L’annonce des fleuves d’eau vive en Jean 7,37-39 », Revue théologique de Louvain 21 (1990) 281-310; 417-454.
[7] L. Devillers, « Une piscine peut en cacher une autre : à propos de Jean 5,1­9a. », Revue biblique 106 (1999) 175-205.

Source : La Terre Sainte 603 (septembre-octobre 2009).

LE SYMBOLE BIBLIQUE DE L’EAU, FRÉDÉRIC MANNS

14 juillet, 2015

http://www.interbible.org/interBible/ecritures/symboles/2010/sym_100423.html

LE SYMBOLE BIBLIQUE DE L’EAU, FRÉDÉRIC MANNS

L’eau est, dans la Bible comme dans la vie, un trésor dont on néglige peut-être l’importance. Le père Manns nous rappelle les cinq axes principaux sur lesquels s’articulent le thème de l’eau nous incitant à ne pas perdre une goutte de notre lecture des textes.

Le symbole biblique de l’eau associé à l’Esprit est l’objet d’une grande inclusion dans l’histoire biblique : il revient en Genèse 1,2 et en Apocalypse 22,17. L’eau est source de vie et fait revivre l’esprit.
Les valences de l’eau sont diversifiées dans la Bible : l’eau purifie et féconde, elle étanche la soif et elle guérit. Zacharie 13 avait annoncé qu’une source devait jaillir de Jérusalem pour la purification des habitants. Dans le premier Testament l’eau symbolisait soit la Loi soit l’Esprit [1].

Cinq symbolismes majeurs
Cinq directions essentielles du symbolisme de l’eau sont connues : celle de l’eau germinale et fécondante, celle de l’eau médicinale, source miraculeuse ou boisson d’éternité, celle de l’eau lustrale, celle enfin de l’eau diluviale permettant la purification et la régénération du genre humain.
L’eau germinale et fécondante s’explique par le fait qu’une des premières expériences de l’humanité est d’établir le lien entre la pluie et la croissance de la végétation. L’eau tombe du ciel, féconde la terre après l’avoir purifiée. Il en est de même de la Parole de Dieu qui vient du ciel, purifie et féconde, affirme le midrash Cantiques Rabbah. Ce commentaire juif rappelle que l’eau est conservée dans des jarres de terre et non pas dans des vases en or ou en argent, ce qui signifie que la Parole de Dieu demeure chez celui qui est humble, qui sait qu’il est fait de terre et qu’il retournera à la terre.
L’eau est médicinale puisqu’elle est l’inductrice de toute fécondité. Elle peut également redonner, prolonger et sauver la vie puisqu’elle en est la donatrice première.
L’eau est purifiante comme le prouve l’expérience courante de l’eau utilisée pour laver et pour faire disparaître les impuretés. Par l’immersion du bain rituel ou du baptême le symbolisme de l’eau fécondante, régénératrice, médicinale et purificatrice se concentrent dans un même rite.
L’eau est diluviale comme les mythes diluviaux universels l’attestent. Le déluge rejoint le mythe de l’éternel retour aux origines. La notion cyclique du temps exprime cette réalité. Il s’agit de rejoindre l’idéal de l’origine car celui-ci n’a pas été encore corrompu par l’histoire. Le déluge est l’événement purificateur qui permet la fin d’une humanité et le début d’une humanité nouvelle.
Moïse exprime la même réalité que Noé. Il est « tiré et sauvé des eaux » pour donner naissance à un peuple libre. En passant la mer Rouge, le peuple est libéré, il est immergé dans l’eau, il renaît, tout en étant préservé du passage par la mort, contrairement aux Égyptiens et à tous ceux qui ont été engloutis par le déluge mais sont finalement sauvés comme Noé. Noé et Moïse enfant flottent sur les eaux du déluge, alors que le peuple passe à pied sec dans les eaux de la mer (Ex 14,21).
Le salut que Dieu apporte à son peuple est symbolisé par l’eau : le Seigneur fait couler de l’eau, ou jaillir des sources dans le désert. Le Seigneur va désaltérer les assoiffés : la soif représente l’exil, l’oppression, et l’eau la libération, le bonheur. En Isaïe 44,3-5, le salut va plus loin que la simple libération, l’eau devient symbole de l’Esprit qui inspire à Israël une nouvelle fidélité au Seigneur. De la même façon, Dieu change les steppes arides en pays verdoyants, symbole de renouveau et de vivification (Isaïe 41,19; 45,18) où le salut et la justice ruissellent comme la rosée et germent comme les plantes (ls 49,9; 55,13). Inversement, Dieu peut assécher les rivières, dévaster la nature, en signe de sa puissance que rien n’arrête, de sa victoire sur ses ennemis, ou de la manifestation de sa colère contre l’impiété.
La fête des Tentes avait mis au centre de la liturgie la procession à la piscine de Siloé en passant par la porte des eaux. C’est de là que devait jaillir la source annoncée par le prophète Ézéchiel, source qui allait se jeter dans la mer Morte.
Au chapitre 21 de l’Évangile selon saint Jean la pêche miraculeuse au bord du lac de Galilée exploite le symbolisme des 153 gros poissons qui peut renvoyer à la gematrie (valeur numérique des lettres) de Eglaim de Ézéchiel 47,10, endroit où les pêcheurs jetteront leurs filets.
La prophétie d’Ézéchiel 47 est fondamentale dans la tradition juive. Dans la version de la Tosephta Succot 3,3 et du Midrash Pirqe de Rabbi Eliézer 51 l’eau qui sort du Temple se divise en trois, une partie va vers la grande mer, une partie vers la mer Morte et une partie vers la mer de Tibériade. D’après la version du Targum Ez 47,8 les eaux de la mer Morte sont purifiées au contact avec l’eau qui sort du Temple.
L’eau, capable de jouer le rôle d’un miroir, a comme caractéristique d’échapper. Elle échappe parce qu’elle n’a pas de forme tout en étant capable d’épouser toutes les formes possibles et imaginables. Elle va épouser la forme d’un vase et dès qu’elle est versée dans un verre, elle en épouse la forme. Elle échappe parce qu’elle a une très grande capacité de division. Elle s’évapore et, si on l’enferme, elle profite de la moindre faille. La maîtrise de l’eau a mis beaucoup de temps dans l’histoire.
Les eaux symbolisent la totalité des virtualités, la matrice de toutes les possibilités d’existence. Elles précèdent toute forme et l’immersion en elles, symbolise la régression dans le préformel, la régénération totale, une nouvelle naissance, car elles contiennent les germes de vie nouvelle, elles guérissent et, dans les rites funéraires, elles symbolisent la vie éternelle. Elles sont ainsi élevées au rang de symbole de vie. C’est pourquoi l’eau deviendra symbole de la Parole de Dieu et de l’Esprit de Dieu.

[1] F. Manns, Le symbole eau-esprit dans le judaïsme ancien, Jérusalem, Franciscan Printing Press, 1983.

Source : La Terre Sainte 603 (septembre-octobre 2009).

Christ blessing the children

13 juillet, 2015

Christ blessing the children dans images sacrée ChristBlessingChildren

http://orthodoxsanantonio.org/parishministries.html

QUE SIGNIFIE « ACCUEILLIR LE RÈGNE DE DIEU COMME UN ENFANT » ?

13 juillet, 2015

http://www.taize.fr/fr_article3261.html

QUE SIGNIFIE « ACCUEILLIR LE RÈGNE DE DIEU COMME UN ENFANT » ?

Lettre de Taizé : 2006/2

Un jour, des gens amènent à Jésus des enfants pour qu’il les bénisse. Les disciples s’y opposent. Jésus se fâche et leur enjoint de laisser les enfants venir à lui. Puis il leur dit : « Quiconque n’accueille pas le règne de Dieu comme un petit enfant, n’y entrera certainement pas » (Marc 10,13-16).
Il est utile de se rappeler que, plus tôt, c’est à ces mêmes disciples que Jésus avait dit : « Le mystère du règne de Dieu vous a été donné » (Marc 4,11). À cause du règne de Dieu, ils ont tout quitté pour suivre Jésus. Ils cherchent la présence de Dieu, ils veulent faire partie de son règne. Mais voilà que Jésus les avertit qu’en repoussant les enfants, ils sont justement en train de se fermer la seule porte d’entrée dans ce royaume de Dieu tant désiré !
Mais que signifie « accueillir le règne de Dieu comme un enfant » ? On comprend en général : « accueillir le règne de Dieu comme un enfant l’accueille ». Cela correspond à une parole de Jésus en Matthieu : « Si vous ne retournez pas et ne devenez pas comme les enfants, vous n’entrerez pas dans le règne des cieux » (Matthieu 18,3). Un enfant fait confiance sans réfléchir. Il ne peut pas vivre sans faire confiance à ceux qui l’entourent. Sa confiance n’a rien d’une vertu, elle est une réalité vitale. Pour rencontrer Dieu, le meilleur dont nous disposons, c’est notre cœur d’enfant qui est spontanément ouvert, ose demander simplement, veut être aimé.
Mais on peut aussi bien comprendre : « accueillir le règne de Dieu comme on accueille un enfant ». Car le verbe « accueillir » a en général le sens concret d’« accueillir quelqu’un », comme on peut le constater quelques versets plus tôt où Jésus parle d’« accueillir un enfant » (Marc 9,37). Dans ce cas, c’est à l’accueil d’un enfant que Jésus compare l’accueil de la présence de Dieu. Il y a une connivence secrète entre le règne de Dieu et un enfant.
Accueillir un enfant, c’est accueillir une promesse. Un enfant croît et se développe. C’est ainsi que le règne de Dieu n’est jamais sur terre une réalité achevée, mais une promesse, une dynamique et une croissance inachevée. Et les enfants sont imprévisibles. Dans le récit d’Evangile, ils arrivent quand ils arrivent, et de toute évidence ce n’est pas au bon moment selon les disciples. Mais Jésus insiste qu’il faut les accueillir puisqu’ils sont là. C’est ainsi qu’il nous faut accueillir la présence de Dieu quand elle se présente, que ce soit au bon ou au mauvais moment. Il faut jouer le jeu. Accueillir le règne de Dieu comme on accueille un enfant, c’est veiller et prier pour l’accueillir quand il vient, toujours à l’improviste, à temps ou à contretemps.

Pourquoi Jésus a-t-il montré une attention si particulière aux enfants ?
Un jour, les douze apôtres discutent pour savoir qui est le plus grand (Marc 9,33-37). Jésus, qui a deviné leurs réflexions, leur dit une parole déroutante qui bouleverse et ébranle leurs catégories : « Si quelqu’un veut être le premier, il sera le dernier de tous et le serviteur de tous ».
À sa parole, il joint le geste. Il va chercher un enfant. Est-ce un enfant qu’il trouve abandonné au coin d’une rue de Capharnaüm ? Il l’amène, le « place au milieu » de cette réunion de futurs responsables de l’Eglise et leur dit : « Quiconque accueille un enfant comme celui-ci en mon nom, c’est moi qu’il accueille ». Jésus s’identifie à l’enfant qu’il vient de prendre dans ses bras. Il affirme que c’est « un enfant comme celui-ci » qui le représente le mieux, à tel point qu’accueillir un tel enfant revient à l’accueillir lui-même, lui, le Christ.
Peu avant, Jésus avait dit cette parole énigmatique : « Le fils de l’homme est livré aux mains des hommes » (Marc 9,31). « Le fils de l’homme », c’est lui-même, et ce sont en même temps tous les fils d’homme, c’est-à-dire tous les humains. Le mot de Jésus peut se comprendre : « les humains sont livrés au pouvoir de leurs semblables ». C’est en particulier lors de l’arrestation et des mauvais traitements infligés à Jésus que se vérifiera une fois de plus que les hommes font n’importe quoi avec leurs semblables qui sont sans défense. Que Jésus se reconnaisse dans l’enfant qu’il est allé chercher, n’est alors pas étonnant, car, si souvent, les enfants aussi sont livrés sans défense à ceux qui ont pouvoir sur eux.
Jésus a montré une attention si particulière aux enfants car il veut, parmi les siens, une attention prioritaire pour les démunis. Jusqu’à la fin des temps, ils seront ses représentants sur la terre. Ce qu’on leur fera, c’est à lui, le Christ, qu’on le fera (Matthieu 25,40). Les « plus petits de ses frères », ceux qui comptent peu et que l’on traite comme on veut car ils n’ont ni pouvoir ni prestige, sont le chemin, le passage obligé, pour vivre en communion avec lui.
Si Jésus a placé un enfant au milieu de ses disciples réunis, c’est aussi afin qu’eux-mêmes acceptent d’être des petits. Il le leur explique, dans l’enseignement qui suit : « Quiconque vous donne à boire un verre d’eau au nom de ce que vous êtes de Christ, amen, je vous le dis qu’il ne perd pas sa récompense » (Marc 9,41). Allant sur les chemins pour annoncer le règne de Dieu, les apôtres seront aussi « livrés aux mains des hommes ». Ils ne sauront jamais à l’avance comment ils seront accueillis. Mais même pour ceux qui les accueilleront avec un simple verre d’eau fraîche, sans même les prendre très au sérieux, ils auront été porteurs d’une présence de Dieu.

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