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COMMENTAIRES DE MARIE-NOËLLE THABUT, 21 JUIN 2015 – LIVRE DE JOB 38, 1. 8 – 11
19 juin, 2015COMMENTAIRES DE MARIE-NOËLLE THABUT, 21 JUIN 2015
PREMIERE LECTURE – LIVRE DE JOB 38, 1. 8 – 11
1 Le SEIGNEUR s’adressa à Job du milieu de la tempête et dit :
8 « Qui donc a retenu la mer avec des portes,
quand elle jaillit du sein primordial ;
9 quand je lui mis pour vêtement la nuée,
en guise de langes le nuage sombre ;
10 quand je lui imposai ma limite,
et que je disposai verrous et portes ?
11 Et je dis : Tu viendras jusqu’ici !
Tu n’iras pas plus loin,
ici s’arrêtera l’orgueil de tes flots ! »
LA CREATION TOUT ENTIERE EST DANS LA MAIN DE DIEU
Voilà un texte qui nous dit comment nos ancêtres imaginaient Dieu en train de créer le monde ! Il se trouve face à des masses d’eau mugissantes : d’un geste de la main, il les arrête « Tu viendras jusqu’ici ! Tu n’iras pas plus loin, ici s’arrêtera l’orgueil de tes flots ! » Et, pour les contenir, il installe des portes avec des verrous ; enfin, il saisit une écharpe de nuages qui traînait dans le ciel et il en fait un lange pour la mer enfin calmée, devenue un nourrisson tout faible entre ses mains.
Dans une civilisation qui a gardé la mémoire d’un déluge meurtrier, mais qui connaît aussi la sécheresse et la soif, la maîtrise de Dieu sur les eaux est la meilleure manière de dire sa Toute-Puissance. Et si le livre de Job dit que Dieu parle « du milieu de la tempête », c’est également une manière de dire qu’il est bien le seul être au monde à maîtriser la tempête au point de s’en servir comme d’un porte-voix !
A elle toute seule, cette mise en scène est déjà une réponse aux problèmes de Job ; car, on le sait bien, il y a dans nos vies des tempêtes de toute sorte, et celles qui se déroulent dans notre tête sont autrement plus graves que celles des océans. Or Job est en pleine tempête intérieure, justement.
Vous savez bien que le livre de Job ne prétend pas raconter une histoire vraie, il est classé parmi les livres de Sagesse : c’est donc une réflexion qui nous est proposée sur les grands problèmes de l’humanité. Le problème dont il s’agit ici, c’est celui qui nous secoue tous, un jour ou l’autre, le plus terrible de nos vies : ce qu’on appelle couramment le problème du mal : affrontés à la maladie, la souffrance, la mort, l’échec de nos rêves et de nos projets, spontanément, nous demandons des comptes à Dieu, parce que, d’une manière ou d’une autre, nous pensons qu’il est le grand responsable de nos malheurs.
C’est toute l’histoire du livre de Job. Il ressemble à un conte : il pourrait commencer par « il était une fois » : il était une fois un homme qui s’appelait Job ; il avait commencé sa vie dans le bonheur, la richesse, la réussite ; mais soudain, tous les malheurs s’abattent sur lui : la mort tragique de tous ses enfants, la misère la plus noire, la maladie, la déchéance physique…
Pourtant, jusque-là, il était un homme juste, fidèle au Seigneur, et donc, comme il se doit, tout allait bien pour lui. Mais alors, que s’est-il passé ? Désormais, se pose la question : pourquoi cette souffrance ? Pourquoi le sort s’acharne-t-il sur moi, qui suis un innocent ? Si j’avais des choses à me reprocher, je m’estimerais puni et ce serait justice, mais j’ai beau chercher, je n’ai rien à me reprocher… Ces questions, Job les pose directement à Dieu, il les pose et repose sans cesse.
Et le passage que nous venons d’entendre est le début de la réponse de Dieu ; ce n’est pas une explication de tout ce qui vient d’arriver à Job, ce n’est pas non plus un reproche pour avoir osé poser des questions à Dieu, non, c’est une réponse, mais inattendue, c’est le moins qu’on puisse dire.
Cette réponse se présente sous la forme d’un long discours de Dieu :
la première phrase dit « Qui est celui qui dénigre la providence par des discours insensés ? » (littéralement : « Qui obscurcit le plan de Dieu par des propos dénués de sagesse ? »).
La suite est une véritable hymne à la Création.
Il faudrait la relire en entier, je vous lis seulement l’introduction (c’est Dieu qui parle) : « Où est-ce que tu étais quand je fondai la terre ? Dis-le-moi puisque tu es si savant. Qui en fixa les mesures, le saurais-tu ? Ou qui tendit sur elle le cordeau ? En quoi s’immergent ses piliers, et qui donc posa sa pierre d’angle, tandis que les étoiles du matin chantaient en choeur et tous les Fils de Dieu crièrent hourra ? »
Et Dieu, doucement, tranquillement, mais fermement, remet, comme on dit, Job à sa place sur le thème : tu n’as pas créé le monde, tu n’as pas maîtrisé la mer (c’est notre texte d’aujourd’hui), tu ne maîtrises pas davantage la lumière, ni la neige, ni la grêle, ni aucun des phénomènes naturels, ni la marche des étoiles ; tu n’es pas non plus le maître des animaux, que sais-tu de leur nourriture, et de leur reproduction ?
NOTRE VIE EGALEMENT EST DANS LA MAIN DE DIEU
Devant cette avalanche d’évocations de tout ce qui nous échappe, Job ne trouve plus rien à dire : « Je ne fais pas le poids… Je mets la main sur ma bouche. » (Jb 40, 4).
Il reprend même la phrase du début, (cette fois, c’est Job qui parle) :
« Qui est celui qui dénigre la providence sans y rien connaître ? Eh oui ! J’ai abordé, sans le savoir, des mystères qui me confondent. » (Jb 42, 3). Ce qui prouve qu’il a bien entendu la leçon.
Cette prise de conscience de Job ne résout pas son problème, me direz-vous ; il est tout aussi malade, ses enfants sont bel et bien morts, il est le pestiféré sur son tas de fumier… et on peut se demander si il est d’humeur à s’émerveiller devant les beautés du monde ? Quand on a les yeux pleins de larmes, on ne voit plus rien…
Alors que signifie cette hymne à la grandeur de Dieu ? On croirait presque que Dieu se vante… C’est le moment de nous rappeler ce que dit Saint Paul : « Tout ce qui a été écrit jadis (sous-entendu dans la Bible) l’a été pour notre instruction, afin que, par la persévérance apportée par les Ecritures, nous possédions l’espérance. » (Rm 15, 4) ; Dieu ne se vante pas de son pouvoir, Dieu n’a pas besoin de notre admiration ; quand nous nous émerveillons devant sa Création, c’est à nous que cela fait du bien !
Si Dieu rappelle à Job son pouvoir, c’est pour le rassurer… Bien plus que d’exalter la grandeur du Tout-Puissant, il s’agit d’inciter la créature impuissante à la confiance. Puisque Dieu maîtrise la mer et les flots, puisqu’il leur impose sa loi, c’est qu’il en est le maître. Ce que l’auteur du livre de Job veut nous faire entendre ici, c’est : Confiance, vous êtes impuissants, peut-être, mais vous êtes dans la main de Dieu ; quelles que soient les tempêtes de votre existence, il ne les laissera pas vous submerger.
HOMÉLIE DU 12ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
19 juin, 2015http://preparonsdimanche.puiseralasource.org/
HOMÉLIE DU 12ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
21/06/2015
L’AUTRE RIVE
Pour comprendre ces textes d’aujourd’hui, il faut savoir que dans le monde de la Bible, la mer c’est le repère des forces du mal. Dans la première lecture, nous voyons Job qui est très douloureusement éprouvé par ce mal. Dieu lui répond en affirmant sa puissance sur la mer, et, à travers elle, sur tout ce qui détruit l’homme. Si nous lisons la suite de ce récit, nous découvrons que Job va retrouver une situation encore plus belle que celle qu’il avait au début. Comme Job, les hommes peuvent crier leur souffrance vers Dieu. La bonne nouvelle c’est qu’il ne nous laisse pas désespérés. Il vient vers nous.
Dans la seconde lecture, saint Paul nous invite à faire un pas de plus. En venant dans le monde, le Christ a pris sur lui toutes nos souffrances et nos péchés. Toute la vie de Paul a été transformée par la découverte de ce Jésus qui est mort pour tous les hommes en portant sur lui le poids du mal. Notre situation s’en trouve totalement modifiée. Si Jésus est mort pour nous, nous n’avons pas le droit de vivre enfermés dans note égoïsme. Nous devons accueillir la vie nouvelle qu’il nous a obtenue par sa Passion et sa mort. C’est une vie essentiellement caractérisée par un immense amour.
Dans l’Évangile, nous voyons Jésus qui invite ses disciples à passer vers « l’autre rive ». Nous devons comprendre ici que cette « autre rive » ce n’est pas seulement l’autre côté de la mer. C’est d’abord celle du monde païen. Jésus veut le rejoindre là où il en est pour le libérer des puissances du mal et lui annoncer la bonne nouvelle de l’Evangile. C’est une manière de dire qu’il n’est pas venu pour le seul peuple d’Israël mais aussi pour tous les hommes du monde entier. Il veut que tous aient la vie en abondance.
En lisant cet Évangile, nous pensons aux nombreux prêtres, religieux, religieuses et laïcs qui ont répondu à cet appel du Christ. Ils ont quitté leur famille, leurs amis, leur pays pour aller vers l’inconnu. Ils ont traversé les océans pour annoncer Jésus à des peuples qui ne le connaissaient pas. Et actuellement, nous voyons des prêtres Africains, Indiens ou autres qui ont également quitté leur pays pour venir nous évangéliser. La bonne nouvelle doit être annoncée à tous. Elle est en priorité pour les pauvres, les exclus, les malades, les prisonniers. Dieu les aime tous tels qu’ils sont, et il veut leur salut.
Quitter son pays pour rejoindre « l’autre rive » cela suppose une grande confiance. L’Évangile nous parle de la tempête et de la peur panique des disciples. En calmant cette tempête, le Christ affirme sa victoire sur les forces du mal. Il faut savoir que saint Marc écrit son Évangile bien après la résurrection du Christ (vers les années 60 – 70). Il s’adresse à des chrétiens persécutés et désemparés par cette tempête qui les accable. L’Église est un peu comme la barque de Pierre qui est en train de sombrer. Alors, ils appellent au secours : « Sauve-nous ! Nous périssons. » C’est aussi la prière de nombreux chrétiens d’aujourd’hui qui subissent la violence et la persécution. Mais Jésus est là et avec lui, les puissances du mal n’ont pas le dernier mot.
Si nous voulons rester fidèles à l’Évangile, nous serons exposés aux difficultés de notre temps : nous aurons à lutter contre le racisme, à prendre la défense des opprimés, à faire preuve de solidarité avec les plus pauvres. En affrontant le mal, les chrétiens peuvent se mettre en danger ou être tournés en dérision. Mais ils se rappellent qu’avec Jésus, il n’y a rien à craindre car il a vaincu toutes les formes de tempêtes. Avec lui, nous pouvons affronter les mêmes combats contre le mal et maîtriser toutes les tempêtes, celles de l’égoïsme, de la haine, de l’injustice et de la violence. Avec lui, nous avons la ferme assurance que c’est l’amour qui triomphera.
En ce jour, nous pouvons faire nôtre cette prière du chanteur Raymond Fau :
Tu es là au cœur de nos vies
Et c’est toi qui nous fais vivre
Tu es là au cœur de nos vies
Bien vivant, ô Jésus-Christ.
Sources : Revues Signes et Feu Nouveau, Guide Emmaüs des dimanches et fêtes (JP Bagot), Ta Parole est ma joie (J. Proux), Lectures bibliques des dimanches (A. Vanhoye, site des ADAP, Sous le figuier avec Nathanaël
Jean Compazieu, prêtre de l’Aveyron ( 21/06/2015)