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JUDAÏSME ET CHRISTIANISME / RÉFLEXIONS DU PHILOSOPHE FRANZ ROSENZWEIG EN RECHERCHE DE SENS /
11 juin, 2015JUDAÏSME ET CHRISTIANISME / RÉFLEXIONS DU PHILOSOPHE FRANZ ROSENZWEIG EN RECHERCHE DE SENS /
ETUDE FAITE PAR MARCEL COMBY SAMEDI 16 MARS 2013
On dit que le christianisme prend ses racines dans le judaïsme. Etant donné la complexité du sujet, je me propose de décrire la pensée intime du philosophe juif allemand : Franz Rosenzweig (1886 – 1929). Ses réflexions sont extraites de son livre : « L’étoile de la rédemption ». Il s’agit de l’œuvre d’un homme ayant longuement hésité entre les deux religions. Rosenzweig n’aime guère le mot « religion » qui évoque une entreprise humaine alors que, pour lui, le mot doit être pris dans un sens « ontologique » ; la religion définit la façon même dont l’être est ; elle se définit donc comme la « trame de l’être », la pulsation même de la vie où Dieu entre en rapport avec l’homme et l’homme avec le monde et avec son créateur. La religion devient ce qui relie en profondeur, dans l’être même, l’homme, le monde et Dieu. Examinons maintenant les divers aspects de la théologie de Rosenzweig.
1- La Création
Elle est le fondement durable dont la Révélation a besoin ; commencement du monde, elle est aussi commencement et accomplissement de Dieu. Dieu naît à lui-même en sortant de soi et en accédant à l’extériorité. C’est le « premier miracle » ; là se brise l’enveloppe du mystère d’une divinité enfermée dans son Soi éternel. En la création Dieu se dit ; celle-ci est déjà annonce et promesse de Révélation et de la Rédemption.
2- La Rédemption
La Rédemption implique et englobe à la fois Création et Révélation. En effet, dans la Rédemption, celle du monde par l’homme et celle de l’homme par le monde, Dieu se donne sa propre Rédemption ; l’homme et le monde s’effacent dans la Rédemption ; Dieu, lui, s’accomplit ; c’est seulement dans la Rédemption que Dieu devient l’Un et le Tout. En elle se réalisent l’unification et l’achèvement d’un système universel.
3- La Révélation
Elle possède aussi un rôle dominant dans la pensée de Rosenzweig. En elle, Dieu se manifeste comme Dieu d’amour et son auto négation toujours actuelle. La Création était déjà révélation de Dieu mais non une révélation définitive, perdue dans le passé des origines. Il fallait une seconde révélation qui témoigne de toute chose, non seulement ayant été créée, mais comme créée en cet instant-ci et en tout instant, et donc comme don actuel et perpétuel de l’amour de Dieu. Pour Rosenzweig, l’amour n’est pas un attribut de l’essence divine car Dieu n’aime pas par nécessité de nature mais il aime par un acte toujours nouveau. Dieu n’aime pas par besoin ; l’amour divin est toujours totalement dans l’instant. Quant à l’homme, la Révélation le révèle à lui-même comme aimé de Dieu. Ce qui est merveilleux résulte dans le fait qu’entre l’Infini et la créature, il y a échange d’amour et même échange d’être. Dans le oui de l’âme aimée, Dieu trouve ce qu’il ne pourrait trouver en soi-même : affirmation et durée. Dans le témoignage de l’âme croyante, Dieu acquiert lui-aussi de l’être : « quand vous me confessez alors je suis ». L’être de Dieu se rétracte pour faire place à celui de l’univers. Les expressions un peu outrancières et mystiques de Rosenzweig ne font que dire l’indicible de Dieu. Le philosophe n’ignore pas la dimension historique de la Révélation ; mais il en retient surtout l’aspect existentiel et intime, l’âme s’éveille en l’homme au contact de la parole de Dieu. Du rocher du « soi » jaillit alors une source nouvelle : l’âme. Il n’y a de pensée que dans la Révélation ! L’éthique de la loi s’efface devant celle de l’amour. La Révélation de l’amour divin est le cœur du Tout : affirmation plus chrétienne que juive ! Si le christianisme est une mystique plus qu’une éthique, le judaïsme est davantage une éthique qu’une mystique. Cependant Rosenzweig récuse le terme de mystique qui possède une connotation négative : le repliement sur soi et les ravissements de l’intellect. Notons cependant une tendance mystique du philosophe qui écrit : « L’âme prend figue, en passant de la Révélation à la Rédemption ; elle entre dans le sur-monde de la Rédemption, et c’est ainsi que se réalise le Royaume ».
On pressent chez Rosenzweig un accord indéniable entre judaïsme et christianisme.
4- Le temps et l’éternité
Le monde est dans le temps et, comme le temps, il n’est pas achevé ; il est créé avec « la détermination de devoir l’être » Or ce monde en travail d’éternisation et d’accomplissement, c’est le Royaume, déjà accompli et pourtant encore à achever, marqué d’éternité et pourtant livré à la temporalité. L’éternité n’est pas un temps très long, mais un demain qui pourrait aussi bien être aujourd’hui, non pas un temps qui passe mais un temps qui dure, un instant immobile, un maintenant arrêté. L’éternité désigne une qualité du temps liée à une expérience limite, celle d’une certaine immobilisation. « Le Royaume est au milieu de vous » C’est précisément au cœur de leur rapport commun à l’éternité que Rosenzweig voit comment le christianisme et le judaïsme se démarquent l’un de l’autre. Pour lui, le juif est déjà dans la « vie éternelle », le chrétien, lui, dans la « voie éternelle » Ce dernier vit l’éternité comme une marche à travers le temps. Il travaille le temps de l’intérieur pour le transformer et, par son activité missionnaire, s’efforce de transformer le monde. On est donc en présence de deux attitudes convergentes quant à leur terme, mais opposées dans la pratique. Le peuple juif, peuple éternel, « achète son éternité au prix de la vie dans le temps ; pour lui, le temps n’est pas sien » Les événements dont il fait mémoire : le Sinaï, l’Exode, sont comme figés à jamais dans un temps immobile ; il vit donc hors de l’histoire des nations ; il vit déjà sa propre Rédemption ; il a anticipé pour soi l’éternité ; sa temporalité n’est jamais qu’une attente, une errance plus qu’une croissance. Le peuple juif tient donc l’éternité de sa nature même ; sa « communauté de sang » fait son unité et sa pérennité ; « seul le sang donne à l’espérance en l’avenir une garantie dans le présent » Ainsi l’orientation vers la venue future du Royaume est déposé dans notre sang dès la naissance. Lorsqu’il nait, un chrétien est encore païen alors qu’un juif est déjà juif !
5- L’élection
Pour le juif, le miracle de la renaissance se trouve avant la vie individuelle ; sa seconde naissance, sa vraie naissance à la judéité, est métahistorique. Elle précède la première ; elle est accomplie dès l’instant éternel où se noue l’Alliance de Dieu et du peuple élu. Le Ici actuel, dans les contingences de la vie terrestre, entre dans le grand Maintenant de l’expérience vécue mémorisée. La Rédemption va directement au peuple, alors que, pour le chrétien, elle concerne d’abord l’âme individuelle. La notion d’élection est difficile à penser compte tenu de l’universalité de la bonté divine qui ne saurait concerner qu’un groupe d’hommes. D’autre part, on sait que Dieu appelle chaque homme par son nom propre, apporte ses dons à toute âme individuelle en état d’éveil. Lors du Yom Kippour, rappelle Rosenzweig, chacun en particulier se soumet humblement au jugement de Dieu. Ce n’est pas le peuple qui est jugé, pas plus que le monde ou l’histoire, mais la personne en soi « dans sa singularité nue » qui confesse son péché. Selon le philosophe allemand, il y aurait ainsi, dans l’économie du salut, deux pôles symbolisés par deux religions : d’un côté, le peuple issu du sang et uni par la liturgie, le repas et l’écoute de la parole ; de l’autre, l’Eglise, une assemblée d’individus, où chacun garde sa liberté et accueille les autres comme « frères dans le Seigneur » C’est dans ces deux manières d’éterniser le temps que Rosenzweig hésita sans cesse. Est-il possible pour un peuple d’être hors du temps et de l’histoire ? Est-il possible, d’autre part, d’être frère d’un Dieu dans l’Alliance ? De multiples questions… ! L’histoire d’un peuple élu n’est-elle pas celle, plus universelle, du peuple de Dieu tel que le conçoivent les chrétiens ?
6- Vie éternelle – Voie éternelle
Rosenzweig suggère une belle métaphore : « A la vie dans le temps, Dieu arracha le juif en jetant jusqu’au ciel le pont de sa Loi, par-dessus le fleuve du temps ». Le juif est donc sur le pont qui surplombe le fleuve qui s’écoule. Le chrétien, quant à lui, se trouve dans le fleuve. Le philosophe entame une autre comparaison : la vie éternelle et la voie éternelle diffèrent « autant que l’infinité diffère d’un point et d’une ligne ». L’infinité d’un point, représente « l’éternelle autoconservation du sang qui ne cesse pas d’engendrer ; celle de la ligne, c’est la possibilité de prolongation illimitée ». Le judaïsme dit maintenance et pureté alors que le christianisme dit expansion missionnaire sans limites. D’une part l’étoile, de l’autre la croix. L’étoile de David concentre tous ses rayons sur son foyer ardent, le feu qui brûle en son centre ; la croix du Christ, quant à elle, étend ses bras à l’infini sur le monde. L’éternité du peuple s’enracine « dans le Soi le plus profond » tandis que l’éternité de la voie s’étend « au dehors dans toutes les directions ». Rosenzweig ne voit cependant pas une grande différence entre la vie et la voie : pour le juif comme pour le chrétien, l’homme vit dans le temps ; créé à l’image de Dieu, il porte en lui la marque et l’appel de l’éternité à laquelle il participe ; cet appel est à la fois vie éternelle et voie éternelle ; le juif attend le Messie, le chrétien attend la Parousie du Seigneur, mais tous deux agissent dans le monde et donnent croissance au Royaume ; tous deux vivent dans la prière et l’être-ensemble liturgique, l’éternité au cœur du temps. La distinction essentielle est à chercher ailleurs
7- Face à la personne du Christ
Ce qui définit le juif, c’est sa foi au Dieu unique qui se traduit par l’adhésion de tout son être à la Torah. Ce qui définit le chrétien, c’est, en lien avec sa foi au Dieu unique, la foi au Christ Verbe de Dieu fait homme et la volonté de marcher à sa suite. Dans les rapports entre les deux religions, il s’agit du « signe de contradiction » face auquel il faut prendre position. En fait Rosenzweig parle peu de la christologie qui ne fait que d’entrer dans le cadre du dogme chrétien et de la déclaration de st Paul : « lorsque tout lui sera soumis, le Fils remettra sa royauté au Père et alors Dieu sera tout en tout ». Ce qui concerne le Christ n’est qu’idée portant sur la fin des temps ; en attendant, la royauté appartient au Fils et Dieu n’est pas tout en tout ; aucun pont n’est jeté entre les deux rives du temps et de l’éternité ; le Fils de l’homme est « déifié dans le temps et l’Envoyé devient Seigneur. Sans l’Ancien Testament, poursuit le philosophe, et sans le peuple juif qui l’atteste, sans le Jésus historique sur les routes de la vie, le Christ qui ne serait que Christ se prêterait « à toutes les tentatives de déification et d’idolâtrie ». Ainsi, conclut-il, sommes- nous pour le chrétien ce dont il ne peut douter : « notre existence garantit leur vérité »
8- Face au mystère
La transcendance absolue de Dieu semble avoir été pour Rosenzweig, au plan intellectuel, la raison dernière de sa décision de ne pas se convertir au christianisme. A ses yeux, la croyance en l’Homme-Dieu constitue un reste de paganisme. Celle-ci renoue avec le besoin très vif dans l’Antiquité païenne, de recourir à un médiateur pour accéder à un dieu lointain et fermé sur soi. En fait, Rosenzweig se trouve confronté comme tout un chacun au mystère divin et d’autres que lui ont tranché différemment. Le mystère n’est tel que par ses profondeurs et les dogmes de l’Incarnation et de la Trinité ouvrent sur des perspectives infinies. La notion de « sortie de soi » de Dieu, de don de soi, de séparation d’avec soi de Dieu pour habiter avec son peuple, de « retrait » de Dieu pour que le monde et l’homme soient, constitue un axe majeur de sa pensée philosophique.
9- Face à l’histoire
Rosenzweig ne prend guère en compte la réalité de l’histoire et de son déroulement dans le temps qui montre tout le développement et l’évolution du monde : la temporalité au service de l’éternité donc l’histoire œuvrant pour le Royaume. Le peuple d’Israël est lui aussi dans le temps de l’histoire. Tout l’Ancien Testament est une histoire humano-divine. Là où le philosophe voit une rupture entre judaïsme et christianisme, d’autres voient au contraire une continuité et un accomplissement, celui de l’Alliance, les faits et gestes de Jésus réalisant la parole des prophètes. Henry Bergson écrivit dans son testament que le christianisme constituait l’achèvement complet du judaïsme. Ne pourrait-on pas voir dans la symbolique du ruban de Möbius une manifestation de la sagesse et de l’amour divin dans le fait d’avoir confié d’abord au seul peuple d’Israël le dépôt de la Promesse et la garantie de l’Alliance, pour ensuite par un retournement mystique, ouvrir à toutes les nations du monde les bienfaits de la Révélation et de la Rédemption ? Rosenzweig n’a finalement pas su dégager de l’histoire une vue globale compatible avec la théorie de l’évolution telle que Teilhard de Chardin l’a initiée en son temps.
10- Convergence entre judaïsme et christianisme
Rosenzweig dans son livre : « L’étoile de la rédemption », entame une profonde réflexion sur « la Vérité éternelle ». Ni le juif ni le chrétien n’ont la vérité totale. Le peuple juif est « l’unique noyau » et le cœur de l’étoile, centre incandescent qui alimente invisiblement les rayons qui deviennent visibles dans le christianisme et qui s’éparpillent à travers lui pour entrer dans la nuit du pré-monde du paganisme. Le judaïsme est ainsi la base solide du christianisme, la garantie de son devenir. A lui seul, tourné vers le dehors, vers l’expansion, le christianisme risquerait de se perdre dans l’exaltation du sentiment, l’idéalisation et la chimère ; le juif, peuple toujours bien vivant, le rappelle à plus de réalisme. Les deux religions sont donc complémentaires, car elles ont la vérité en partage. Les juifs contemplent dans leur cœur l’image fidèle de la vérité, et ainsi se détournent du temps ; les chrétiens ne voient pas la vérité, mais son guidés par ses rayons au cours du temps. Nous ne sommes que des créatures en condition d’existence temporelle. A ce titre nous avons seulement part à la vérité ; tel est notre partage ; ainsi même dans le sur-monde de la Rédemption, notre « vrai » est encore un « vrai » de l’homme ; Dieu seul est la Vérité, au-delà de toutes nos vérités. Le juif, par sa seule existence, contraint le chrétien à se dire que la Rédemption n’est pas encore achevée, et ainsi l’aide-t-il à se préserver de l’illusion. Quant au christianisme, il lui revient de répandre parmi les païens la connaissance du vrai Dieu. Le christianisme est le rameau greffé sur le tronc de l’olivier du judaïsme, chacun gardant son identité propre, tous deux nourris à la même racine.
Sur le plan philosophique, une telle vision théologique se fonde sur la distinction entre l’éternité de Dieu et notre éternité à nous. Ainsi dans l’éternel présent de Dieu, notre passé et notre avenir sont tout autant présents que notre présent. Dieu crée aujourd’hui, Dieu se dit et s’incarne aujourd’hui, Dieu sauve aujourd’hui. En ce sens, la Révélation est sous la Rédemption, comme un substrat et un socle porteur, tout comme la Création est sous la Révélation. Les événements de toute histoire sont tous intégrés dans le présent divin éternel. Notre éternité à nous n’est jamais qu’un instant tangentiel à l’éternité de Dieu dans la série des instants successifs. De même notre vérité n’est jamais purement et simplement vraie, totale, absolue et immuable ; elle est avec nous dans l’histoire. La vérité qui se dit dans le Nouveau Testament est plus pleinement manifestée que celle que confère le Premier Testament, car Dieu, dans sa sagesse, se révèle dans un processus temporel d’évolution dans la fidélité aux origines. Rosenzweig n’a pu toutefois franchir le pas, mais il a le mérite de nous inviter à sortir des lieux communs.
L’AMITIÉ DANS LA BIBLE
11 juin, 2015http://www.mabible.net/reflexions-sur-la-foi/amitie-dans-la-bible
L’AMITIÉ DANS LA BIBLE
De manière surprenante, la Bible parle relativement peu de l’amitié, telle que nous la comprenons généralement aujourd’hui, c’est-à-dire comme d’un rapport privilégié entre deux êtres. Néanmoins, même si cette notion est peu développée, elle n’en est pourtant pas absente.
Celle-ci y est développée en étant abordée sous deux angles différents: En premier lieu, elle parle de l’amitié de Dieu avec l’homme et de l’homme avec Dieu, et en second, bien évidemment du rapport particulier qu’une personne entretient avec un autre de ses congénères.
Alors voyons comment les Ecritures parlent et définissent l’amitié sur ces deux plans particuliers. Qu’est ce que l’amitié, comment se définit-elle et comment s’applique-t-elle dans la relation?
Abordons premièrement l’amitié de Dieu envers les hommes. La première question que nous pourrions nous poser est celle-ci? Est-il possible que Dieu puisse avoir des «chouchous»? Oui et non!
Romains 2.11 et Galates 2.6 nous disent que le Seigneur ne fait pas de favoritisme; devant lui, tous les hommes sont égaux et aimés de Lui de même façon et de la même intensité.
On voit également cela dans 1 Timothée 2.3-4 qui nous dit que «Dieu désire que tous les hommes soient sauvés».
Jean 3.16 nous affirme que « Dieu a tant aimé le monde (les hommes) qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle ». Dans ce «quiconque» que Dieu aime, est contenue l’humanité dans sa généralité, mais aussi de chacun en particulier, c’est-à-dire: toi, lui et moi.
Mais pourtant, outre le fait de l’amour de Dieu est égal pour chacun d’entre nous, la Parole relève tout de même que Dieu fut l’ami de certains hommes en particulier. Ce fut, entre autres exemples, le cas d’hommes comme Abraham, Moïse et David, sans oublier Jean, le disciple que Jésus aimait! N’oublions les femmes, comme Marthe et Marie…
Si la Parole nous affirme d’un côté que Dieu aime indistinctement tous les êtres humains, mais qu’en même temps, il y a en a tout de même certains qui sont l’objet de son attention particulière, nous pouvons alors naturellement en déduire que la différenciation se trouve du côté de l’homme. En clair, que c’est la réponse du cœur de l’homme à l’amour de Dieu qui scelle un lien d’amitié particulier entre lui et Dieu.
Pourquoi Abraham fut-il appelé l’ami de Dieu selon ce qu’il nous est dit en Jacques 2.23? Tout simplement parce qu’il crut en Dieu! Mais dans cette optique, croire en Dieu ne consiste pas simplement à dire: «Je crois que Dieu existe!» Non! (même si c’est déjà bien) Croire, en prenant l’exemple d’Abraham, c’est mettre sa confiance en Dieu de manière absolue, dans ce qu’il nous dit et dans ce qu’il nous demande. C’est accepter de croire que Dieu sait mieux que nous-mêmes ce qui est bon pour nous et au travers de nous. «Abraham crut» et cela a suffit pour engendrer la naissance d’un peuple (Israël) de qui est sorti Jésus-Christ, le sauveur de l’humanité. La foi n’est pas une attitude béate et statique, la foi se met en mouvement et produit quelque chose. Et chose très importante à comprendre, la foi est liée à l’obéissance.
Pour Moïse, ce sont les mêmes dispositions de son cœur qui lui ont permis à entrer dans une relation intime avec le Seigneur: «L’Éternel parlait avec Moïse face à face, comme un homme parle à son ami.». Moïse était, comme Abraham, un homme qui a accepté de se défaire de la gloire humaine et d’obéir à la voix de Dieu. A cause de cela, il fut défini comme étant la personne la plus humble que la terre est jamais portée (Nombres 12.3). Cette amitié liée à la foi, à l’humilité qui la aussi se traduit par l’obéissance à la Parole de Dieu. Le fruit de cette attitude intérieure a permis à un homme cœur de vivre une dimension de cœur à cœur avec le Dieu Tout-Puissant.
David nous est dépeint comme un homme selon le cœur de Dieu! Cela veut-il dire que David était parfait, qu’il ne commettait jamais d’erreurs? Non, David a commis beaucoup d’erreurs durant sa vie. La grande différence fut qu’il aimait Dieu et qu’il le connaissait comme un Dieu bon, miséricordieux et Saint. Il savait quel en était la grandeur, mais connaissait également sa propre misère. C’est pour cela qu’il pouvait se présenter devant lui pour lui demander grâce, droit et justice; ce que le Seigneur lui accorda sans cesse, sans pour autant passer sous silence ces péchés.
Malgré ces travers, David était un homme qui aimait le droit, l’équité, il était un homme respectueux et tentait constamment de marcher dans l’intégrité demandée par Dieu.
Pourquoi le Nouveau Testament présente-t-il à son tour l’apôtre Jean comme étant l’objet d’une apparente attention amicale de la part de Jésus? En effet, par quatre fois, l’Evangile de jean nous rapporte qu’il était «le disciple que Jésus aimait». Encore un fois, on ne peut pas avancer que Jésus en tant que Dieu avait plus d’amour pour lui que pour les autres.
La solution est encore ici du côté de l’homme. En effet, un simple regard sur le 4ème Evangile et sur les trois épîtres de Jean pour nous faire comprendre que l’appellation d’ «apôtre de l’amour». Si Jésus semble apporter une préférence à Jean, ce n’est certainement pas par préférence personnelle. Non c’est simplement parce que le cœur de Jean répond plus particulièrement au cœur même de Dieu; c’est-à-dire l’amour.
Comme le résume le Seigneur Jésus, toute la Loi et les Prophètes se trouvent résumés dans ces deux commandements: «Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée; et ton prochain comme toi-même.»
La parole de 1 Jean 5.3: «En effet, l’amour envers Dieu consiste à respecter ses commandements» donne écho à celle du Seigneur: «Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande.» Jean 15.14
En résumé, l’amitié de Dieu se donne se manière particulière aux personnes de foi sachant demeurer dans l’obéissance et l’humilité dans une relation d’amour. Proverbes 3.32 «Car l’Eternel a horreur de l’homme perverti, mais il est un ami pour les hommes droits.»
L’amitié entre les hommes se base dans une forme de relations. En tant qu’individus ayant été créés avec des sentiments et une sensibilité propres à chacun. Dans ces conditions, bien que le chrétien soit appelé à aimer son prochain comme lui-même, il est naturel pour lui de fonctionner par affinités caractérielles et de sentir plus en phase avec une personne plutôt qu’avec une autre.
La langue grecque, langue originale dans laquelle fut écrit le Nouveau Testament, emploie quatre termes nuancés pour définir l’amour.
L’amour agape : Cet amour est l’amour dont Dieu nous aime. Un amour absolu et inconditionnel.
L’amour storge : Cet amour est celui dont on aime sa propre famille.
L’amour eros : Concerne l’amour spécifiquement sexuel.
Et l’amour phileo : Relatif à l’amour qu’on peut avoir pour un ami.
Si l’Ecriture établit ces nuances linguistiques, c’est donc qu’elle reconnait ces réalités et les reconnait donc comme saines.
La Bible nous donne dans ce domaine de précieux renseignements qui nous aideront à définir sur quels critères nous devons nous baser pour entretenir une relation amicale saine.
Le Psaume 35.14 nous dit: «Comme pour un ami, pour un frère, je marchais lentement, comme pour le deuil d’une mère, j’étais accablé de tristesse.»
Dans ce texte, nous voyons que la vraie amitié est compatissante. La compassion n’est pas de la pitié, la compassion «souffre avec». L’ami vit les douleurs de l’autre comme lui, il pleure avec celui qui pleure, souffre avec celui qui souffre, mais également se réjouit à cause du bonheur de l’autre.
Psaume 119.63 «Je suis l’ami de tous ceux qui te craignent et qui se conforment à tes décrets.»
David, de son côté, sélectionne son amitié selon des critères d’obéissance au Seigneur. Et comme cette amitié est tributaire de la crainte de Dieu, le véritable ami ne se contente pas de choisir ses amis de cette manière mais il s’implique également dans un rôle de directeur de conscience. Comme le souligne le Proverbes 12.26: «Le juste apprend de son prochain, mais la voie qu’empruntent les méchants les égare.»
La véritable amitié se confirme dans toutes les situations, bonnes ou mauvaises. L’amitié n’est pas tributaire des circonstances, pour être vraie, elle doit être désintéressée. Proverbes 17.17 «L’ami aime en toute circonstance, et dans le malheur il se montre un frère.»
Mais la véritable amitié ne se borne pas dans une attitude silencieuse quand l’ami court un danger ou semble agir de mauvaise façon même si parfois, afin de dire la vérité implique de faire du mal à celui qu’on aime . Proverbes 27.6 «Les blessures d’un ami prouvent sa fidélité.»
Mais l’ami doit être perçu comme quelqu’un qui cherche à être de bon conseil Proverbes 27.9: «La douceur d’un ami vaut mieux que nos propres conseils.»